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FAISABILITÉ D’UNE MONNAIE UNIQUE ET INTÉGRATION PAR LE MARCHÉ DANS LA CEEAC 1 : une application de l’estimateur Poisson du Pseudo- Maximum de Vraisemblance au modèle de gravité en données de panel Introduction Créer une monnaie unique est avantageux au moins pour deux avantages directs : la réduction du risque de change et des coûts de couverture contre ce risque. D’autres effets moins directs sont relevés par la littérature, entre autres l’atténuation des chocs asymétriques (Bayoumi et Eichengrenn, 1993), la synchronisation des cycles réels (Frankel et Rose, 1998), l’augmentation du commerce bilatéral (Rose, 2000) et la création d’un cadre propice à la croissance (Vickers, 2000). Ainsi donc, la monnaie unique stabilise l’environnement macroéconomique, subventionne les échanges bilatéraux, diminue les coûts de transaction, favorise la transparence des prix, accroît la crédibilité des pays membres et génère des bénéfices externes. Dans cette optique, étudier la faisabilité d’une monnaie unique en tant que catalyseur de l’intégration par le marché en Afrique centrale se présente comme une préoccupation intéressante. Sur le plan factuel, cet intérêt se justifie par deux arguments : les travaux sur la rationalisation des sous- régions en Afrique, et le projet de création d’une monnaie 1 Le Traité instituant la CEEAC (Communauté Économique des États de l’Afrique Centrale) signé en octobre 1983 à Libreville, est entré en vigueur en décembre 1984. La CEEAC comprend dix États : l’Angola, le Burundi, le Cameroun, la Centrafrique, le Congo, la RD Congo, le Gabon, la Guinée Équatoriale, Sao Tome & Principe et le Tchad. Son objectif est la promotion et le renforcement d’une coopération harmonieuse et un développement dynamique, équilibré et autoentretenu dans tous les domaines de l’activité économique et sociale. 1

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FAISABILITÉ D’UNE MONNAIE UNIQUE ET INTÉGRATION PAR LE MARCHÉ DANS LA CEEAC1 : une application de l’estimateur Poisson du Pseudo-Maximum de

Vraisemblance au modèle de gravité en données de panel

Introduction

Créer une monnaie unique est avantageux au moins pour deux avantages directs : la réduction

du risque de change et des coûts de couverture contre ce risque. D’autres effets moins directs

sont relevés par la littérature, entre autres l’atténuation des chocs asymétriques (Bayoumi et

Eichengrenn, 1993), la synchronisation des cycles réels (Frankel et Rose, 1998),

l’augmentation du commerce bilatéral (Rose, 2000) et la création d’un cadre propice à la

croissance (Vickers, 2000). Ainsi donc, la monnaie unique stabilise l’environnement

macroéconomique, subventionne les échanges bilatéraux, diminue les coûts de transaction,

favorise la transparence des prix, accroît la crédibilité des pays membres et génère des

bénéfices externes. Dans cette optique, étudier la faisabilité d’une monnaie unique en tant que

catalyseur de l’intégration par le marché en Afrique centrale se présente comme une

préoccupation intéressante. Sur le plan factuel, cet intérêt se justifie par deux arguments : les

travaux sur la rationalisation des sous-régions en Afrique, et le projet de création d’une

monnaie africaine en 2028, la CEEAC ayant été choisie comme un pôle d’intégration par

l’Union Africaine (UA).

La question de la monnaie unique est d’autant plus intéressante que la CEEAC est une sous-

région hétérogène de par la culture historique et socioculturelle de ses États membres. À cet

effet, chaque pays aurait tendance à annexer sa politique monétaire à celle de sa métropole.

Mais il est prévu dans le cadre des accords signés avec l’UA qu’ils puissent former une seule

union monétaire selon la future architecture monétaire africaine. En effet, depuis sa relance en

1999 sous l’initiative de l’UA, l’activité de la CEEAC peut être mesurée par le nombre de

traités et protocoles signés dans plusieurs domaines. Toutefois, ceux-ci ne concernent que le

secteur réel, les aspects monétaires ayant été plus ou moins effleurés. Dans ses statuts,

l’objectif objectif ultime de la CEEAC est la création d’un marché commun en Afrique

centrale autour de quatre priorités : (i) la paix, la sécurité et la stabilité ; (ii) le développement

1 Le Traité instituant la CEEAC (Communauté Économique des États de l’Afrique Centrale) signé en octobre 1983 à Libreville, est entré en vigueur en décembre 1984. La CEEAC comprend dix États : l’Angola, le Burundi, le Cameroun, la Centrafrique, le Congo, la RD Congo, le Gabon, la Guinée Équatoriale, Sao Tome & Principe et le Tchad. Son objectif est la promotion et le renforcement d’une coopération harmonieuse et un développement dynamique, équilibré et autoentretenu dans tous les domaines de l’activité économique et sociale.

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de l’intégration physique, économique et monétaire ; (iii) le développement de la culture et de

l’intégration humaine ; (iv) l’établissement d’un mécanisme de financement autonome.

Pourtant, l’intégration en Afrique en général et en Afrique centrale en particulier doit être

totale, c'est-à-dire qu’elle devrait intégrer la dimension monétaire. C’est donc l’occasion

d’imaginer un spectre long et large de l’intégration et épouser une logique au-delà de la

sphère réelle. Bien plus, il faut inscrire les priorités selon les visées de l’UA, structurée autour

de cinq Communautés Économiques Régionales (CER) circonscrites dans le Traité d’Abuja.

Étant donné que la monnaie unique n’a pas encore été expérimentée dans la CEEAC, il

convient d’adopter une approche prospective par simulation en y étudiant la faisabilité d’une

monnaie unique et son impact sur l’intégration commerciale.

Sur le plan empirique, Masson et Patillo (2004) distingue cinq catégories  d’unions

monétaires : (i) l’union monétaire à taux de change informels, dans laquelle les pays gardent

leurs monnaies selon une parité fixe, mais seulement à l’intérieur des marges ; (ii) l’union

monétaire à taux de change formels, dans laquelle les pays gardent leurs monnaies, les marges

de fluctuation étant très petites ou nulles ; (iii) l’union monétaire totale, dans laquelle les pays

membres adoptent une monnaie unique et une Banque Centrale commune ; (iv) la

dollarisation, qui consiste pour un pays d’adopter la monnaie d’un autre pays ; (v) la caisse

d’émission, système monétaire dans lequel les monnaies des pays sont rattachées à celle d’un

pays-ancre suivant un taux de change fixe.

Au-delà de l’intégration monétaire, la littérature distingue plusieurs autres formes

d’intégration qu’on a tendance à hiérarchiser (De Grauwe, 2007). Il s’agit de : (i) l’intégration

commerciale, qui se distingue à travers l’existence d’une zone de libre échange ou d’une

union douanière ; (ii) l’intégration économique, qui se matérialise par la formation d’un

marché commun ; (iii) l’intégration financière, qui consiste en une unification des marchés

financiers. Dans le cadre de ce travail, c’est l’intégration commerciale qui est mise en relation

avec la faisabilité d’une monnaie unique dans la CEEAC. Elle se définit comme l’abolition

des barrières nationales dans les transactions économiques entre les États membres, afin que

les facteurs de production puissent y circuler librement.

Sur le plan empirique, le lien entre monnaie unique et intégration par le marché a opposé deux

thèses : la thèse du « cercle vertueux » et la thèse du « cercle vicieux ». La première thèse

indique que l’entrée d’un pays à une union monétaire augmente ses échanges bilatéraux d’au

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moins 3 fois que s’il avait gardé sa monnaie nationale. Cette thèse est notamment soutenue

par Rose (2000). Cette intensification commerciale induirait par la suite une forte corrélation

des cycles à cause des chocs symétriques inhérents (Frankel et Rose, 1998). Par contre, La

thèse du « cercle vicieux » soutient que le choix d’une monnaie unique encourage la

spécialisation des pays en fonction de leurs avantages comparatifs, ceci grâce au jeu des

forces centrifuges et centripètes. Cet argument puisé dans la nouvelle théorie de l’économie

géographique est l’œuvre de Krugman (1993). La spécialisation ainsi causée par la monnaie

unique induit des cycles asynchrones et une réaction asymétrique aux chocs.

À la lumière de ce clivage, l’objectif de cet article est de tester la validité empirique du débat

suscité par le choix d’une monnaie unique et son impact sur l’intensification commerciale

dans l’espace CEEAC.

Après cette introduction, la suite de l’article se s’articule en quatre points : (i) une synthèse de

l’existant théorique, (ii) la présentation du modèle empirique, (iii) le choix de la technique

d’estimation, (iv) le protocole d’estimation et l’interprétation des résultats.

1. La théorie des zones monétaires optimales : essai de synthèse

Le cadre théorique qui sous-tend le débat suscité dans cet article est la théorie des zones

monétaires optimales (ZMO). En effet, l’intérêt porté aux unions monétaires s'est ravivé ces

dernières années grâce à deux événements majeurs. Il s’agit d'un côté de la concrétisation de

l'intégration monétaire en Europe qui a montré que la constitution d'une union monétaire était

possible alors que la théorie traditionnelle des ZMO était assez pessimiste. D’un autre côté,

les crises financières qui se sont multipliées dans les années 1990 et tout récemment ont

conduit de nombreux économistes à défendre les régimes de change tels que les caisses

d'émission ou l'union monétaire, considérés comme étant les seuls régimes viables avec le

régime de changes flexibles (Lochard, 2005).

La littérature théorique des ZMO est fondée sur deux paradigmes : le paradigme exogène ou

statique qui analyse les critères définissant une ZMO et le paradigme endogène ou dynamique

qui s’intéresse à l’impact macroéconomique ou au rôle de la monnaie unique sur l’économie.

1.1. Le paradigme exogène de la théorie des ZMO

Les premiers travaux sur les unions monétaires remontent aux années 50 sur les arrangements

monétaires en Europe (Scitovsky, 1958) et la politique de change au Canada (Meade, 1955).

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Mais c’est à Mundell (1961) que revient la paternité de la théorie des ZMO, à la suite de

l’introduction du débat sur les critères d’optimalité monétaire. Pour Mundell, une zone

monétaire est optimale si en son sein, les facteurs de production sont mobiles, les prix et les

salaires flexibles et surtout si les pays adoptent un taux de change fixe. Les conclusions de

Mundell ont inspiré ses contemporains, qui à leur tour sont restés dans la logique d’arbitrage

des régimes de changes tout en proposant d’autres critères.

Ainsi, pour McKinnon (1963), l’optimalité monétaire doit être fondée sur le degré d’ouverture

intra-zone des économies. Puisqu’une économie ouverte qui utilise sa propre monnaie est

fortement exposée au degré d’élasticité de la demande étrangère, il propose la formation

d’une zone monétaire. Mais l’une des hypothèses implicites du modèle de Mundell est que

chaque région est mono-productrice, ce qui induit des chocs importants de demande. Pour

cela, Kenen (1969) pense qu’une région produisant une grande variété de produits doit avoir

des exportations diversifiées. Dans ces conditions, les ajustements se font uniquement par les

quantités et non par la monnaie, d’où la nécessité de former une ZMO. Pour Johnson (1970)

et Ingram (1973), les critères avancés sont l’intégration fiscale et l’intégration financière. Le

modèle de Johnson montre que seules des politiques de transferts financiers permettent

d’éviter de grandes variations des taux de change, ce qui faciliterait la formation d’une ZMO.

Pour Ingram, Il faut tenir compte de la mobilité du travail et du capital.

Se déconnectant des conditions microéconomiques, un autre paradigme s’est développé

autour des critères qualifiés de modernes à travers l’harmonisation des conditions macro-

économiques, notamment le parallélisme de l’inflation, de la productivité et des salaires réels.

Ce paradigme est basé sur l’hypothèse des préférences identiques des pays (Harberler, 1970 ;

Fleming, 1971 ; Magnifico, 1974).

Au total, il ressort du modèle exogène une indétermination et l’inconsistance de la définition

des ZMO, car les développements manquent d’un cadre unifiant dans la mesure où selon les

approches, les critères changent radicalement. C’est à la lumière de ces insuffisances que

s’est forgé le paradigme endogène des ZMO.

1.2. Le paradigme endogène de la théorie des ZMO

Selon ce paradigme, la monnaie unique devient une variable causale. Il implique que

l’optimalité monétaire peut être assurée ex post, même si ex ante, elle ne l’est pas. Pour cela,

deux conditions sont nécessaires, à savoir l’augmentation du commerce bilatéral (Rose, 2000)

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et la synchronisation des cycles (Frankel et Rose, 1998). L’intérêt de cet article est de simuler

la première condition.

On se pose la question de savoir si le partage d’une monnaie unique est une subvention aux

échanges sous-régionaux. En réponse à cette question, Rose (2000) montre que les pays qui

adoptent une monnaie unique voient leurs échanges bilatéraux tripler en moyenne. En plus, il

montre que réduire la volatilité du taux de change à zéro n'implique pas les mêmes effets sur

le commerce qu’adopter une monnaie unique. Ce dernier résultat est important puisqu'il

signifie que l'on ne devrait plus confondre les unions monétaires aux régimes de change fixes.

Ces résultats fondateurs ont ouvert un nouveau champ de recherche très fécond, malgré des

spécificités spatio-temporelles.

D’autres études plus étendues intègrent d’autres variables que la monnaie unique, notamment

la frontière et la distance. Les tests empiriques concluent qu’il existe une grande réduction des

flux commerciaux due aux frontières internationales (McCallum, 1995 ; Head et Mayer,

2001 ; Helliwell et Schembri, 2005 ; Daumal et Zignago, 2010). Ce résultat qui cadre avec les

pays ne faisant pas partie de la même zone d’intégration a connu une variante avec Lochard

(2005). Pour lui, les États qui partagent la même frontière commerceraient davantage par

rapport aux autres, car le facteur « proximité » entre en jeu, combiné à la disparition de

certaines barrières nocives au commerce. Ceci peut être la résultante de nombreux accords

régionaux passés entre ces pays. Ce travail fait suite à ceux d’Anderson et van Wincoop

(2003) et Combes et al. (2005). La distance quant à elle est une approximation des coûts de

transaction, car en toute logique, ceux-ci sont fortement liés à l’éloignement entre deux pays.

Presque toutes les études empiriques rencontrées aboutissent au même résultat en ce qui

concerne l’impact déprimant et toujours significatif de cette variable sur le commerce. Ainsi

dans les modèles de gravité, la distance reflète l’une des frictions les plus importantes du

commerce bilatéral, même en contexte africain (Carrere, 2002 ; Avom, 2005 ; Gbetnkom et

Avom, 2005 ; Gbetnkom, 2006 ; Agbodji Akoété, 2007 ; Avom et Mignamissi, 2013).

De manière générale, le modèle de Rose souffre de deux principales insuffisances. Sur le plan

théorique, la thèse de l’endogénéité se retrouve radicalement contrastée par la thèse de la

spécialisation développée par Krugman (1993). Sur le plan empirique, le modèle de Rose

présente plusieurs biais qui ont inspiré les travaux récents. Pour Krugman, la parité

irrévocable des taux de change pousserait à la spécialisation des pays et donc favoriserait

l’apparition de chocs asymétriques. Il s’appuie sur les enseignements des théories du

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commerce international selon lesquelles l’intégration a pour corolaire une intensification des

avantages comparatifs, conduisant à une plus grande spécialisation productive. Celle-ci réduit

les corrélations des cycles et rend les pays membres de l’union plus vulnérables aux chocs

asymétriques. Krugman a même montré que la mise en place d'une union douanière allait

accroître la polarisation des activités et donc l'hétérogénéité de l'espace économique européen.

À la suite de la critique théorique de Krugman, Lochard (2005) axe ses critiques sur les biais

empiriques qui ressortent du modèle de Rose. Il recense à cet effet trois principaux biais, à

savoir : (i) un biais d’agrégation, car Rose agrège et compile en une seule variable les unions

monétaires multilatérales, unilatérales et dollarisées ; (ii) un biais d’auto-sélection, qui

s’explique par le fait que les pays membres d’une union monétaires sont généralement

pauvres, petits et proches géographiquement. Dans ce contexte, les pays membres peuvent

être conditionnés dans leur commerce par d’autres caractéristiques que le partage d’une

monnaie commune ; (iii) un biais d’endogénéité qui s’explique par le fait que des variables

endogènes se retrouvent dans la matrice des variables explicatives.

Ainsi, les causes de la faible intégration par le marché dans la CEEAC sont multiples

(concentration des échanges, hyperspécialisation des pays, commerce informel, etc.). Une des

principales seraient le risque de change et les coûts de couverture contre ce risque.

L’application du modèle de gravité nous informe comment l’annulation de ce risque, à travers

l’adoption d’une monnaie unique impacterait sur l’augmentation du potentiel commercial de

la sous-région.

2. Le modèle de gravité : justification et spécification empirique

De manière générale, l’équation de gravité s’applique dans un contexte monopolistique qui

suppose des rendements d’échelle croissants et la différentiation des produits. Le cadre

d’analyse est sous-tendu par trois hypothèses fondamentales : (i) la maximisation des profits

par les firmes en concurrence monopolistique, (ii) la maximisation sous contrainte de l’utilité

par les consommateurs, (iii) la spécialisation de l’offre de biens entre pays (Bergstrand, 1989 ;

Anderson, 1979 ; Anderson et van Wincoop, 2003 ; Helliwell et Schembri, 2005). Mais ce

cadre d'analyse est inapproprié avec la réalité du commerce bilatéral de la CEEAC, en raison

notamment de l’inexistence de grands groupes monopolistiques appartenant à ces pays. Pour

cette raison, d’autres fondements sont mobilisés dans cet article. Ainsi, pour Oguledo et

MacPhee (1994), le modèle de gravité trouve ses fondements dans l'analyse microéconomique

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à l’aide d’un système linéaire de dépenses. Deardorff (1998) démontre pour sa part que le

modèle de gravité peut dériver d’un contexte général indépendant de tout modèle de

commerce international. Quant à Evernett et Keller (2002), c’est la théorie de la spécialisation

de Heckscher-Ohlin dans un contexte de rendements d’échelle croissants qui justifie

l’équation de gravité. Harrigan (2003) justifie les fondements de l’équation de gravité par le

volume de commerce entre les pays concernés, pendant que Helpman et al. (2008) s’inspirent

d’un contexte d’hétérogénéité des firmes.

À la suite de cette diversité de fondements, il ressort que l’application du modèle de gravité

dans la CEEAC serait plus liée à un contexte général indépendant de tout modèle de

commerce international (Deardorff, 1998), ou au niveau du (faible) volume de commerce

bilatéral entre les pays concernés (Harrigan, 2003).

Empiriquement, l’équation de gravité est dérivée de la physique newtonienne de gravitation

qui énonce que « deux corps s’attirent en raison proportionnelle de leurs masses et en raison

inverse du carré de la distance qui les sépare »2. La première application en économie a été

l'œuvre de Tinbergen (1961). Dans ce travail, nous utilisons un modèle de gravité selon la

spécification théorique proposée par Anderson et van Wincoop (2003). Pour ces auteurs, les

consommateurs ont des préférences de type CES avec une élasticité de substitution commune

à tous les biens et supérieure à l’unité (σ>1). Dans cette perspective, l’équation de gravité

peut prendre la forme suivante :

X ij=Y i Y j

Y w [ t ij

∏i

P j ]1−σ

(1)

Y i et Y j sont les PIB des pays partenaires au commerce etY w le PIB mondial.t ij représente les

coûts du commerce du pays i vers le pays j. Si l’hypothèse de la symétrie des coûts est

vérifiée, c'est-à-dire si t ij=t ji, impliquant que ∏i

¿P i, l’équation de gravité peut se réécrire

comme suit :

X ij=Y i Y j

Y w [ t ij

Pi P j ]1−σ

(2)

2 Cette équation se note comme suit : F ij=gM i M j

Dij2 . F est la est la force d’attraction, M i( j ) la masse du corps

i( j), g la constante de gravitation et Dij la distance qui sépare les deux corps.

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Pi et P j, les indices de prix des pays i et j, sont des indicateurs de résistance multilatérale,

c'est-à-dire les coûts moyens liés au commerce entre un pays et tous ses partenaires.

Intuitivement, le modèle de gravité explique l’intensité des flux commerciaux bilatéraux des

pays par leurs masses respectives (les PIB) et par la distance qui les sépare. Ainsi, la

transposition économétrique originelle simplifiée du modèle de gravité inspirée de Tinbergen

(1962) prend la forme suivante :

Comij=β0Y i

β1 Y jβ 2

Dijβ3

exp (ε ij)(3)

Comij représente le commerce total bilatéral entre les pays iet j, Y i et Y j les PIB respectifs des

pays, et Dij la distance qui les sépare. Les β i sont des paramètres à estimer et ε ij est un facteur

de nuisance.

La forme précédente du modèle de gravité n'a jamais été appliquée en l'état. Selon les auteurs

et en fonction des objectifs poursuivis et des sensibilités théoriques, certaines variables

quantitatives et/ou qualitatives sont généralement ajoutées. Ainsi, en suivant Rose (2000), la

spécification de la forme log-linéaire augmentée adoptée dans le cadre de cet article est la

suivante :

log ( X ijt )=β0+ β1 ln Y ¿+β2 ln Y jt+β3 ln Pop¿+β4 ln Pop jt+β5 ln Dij+β6 P¿+β7 P jt+β8 MU ij+β9 Ouvij+β10 LCij+β11 UE j+β12BRICS j+β13CEDEAO j+εijt (4 )

avec X ijt la valeur des exportations bilatérales du paysivers le pays j à la période t , Y i ( j)t les

PIB réels desdits pays, Popi ( j) t les populations respectives, Pi ( j)t les indices de prix à la

consommation etDij la distance qui sépare les deux pays. MU ij est une variable indicatrice

simulée qui prend la valeur 1 si les pays i et j appartiennent à la CEEAC. Ouvij est une

variable qui prend en compte l’ouverture simultanée des pays à la mer. LCij est une variable

muette qui vaut 1 si les pays i et j partagent une langue commune. UE j, BRICS j, et CEDEAO j

sont des variables d’intégration qui captent la création ou le détournement de commerce. Ces

variables prennent la valeur 1 si le pays j, c'est-à-dire le pays de destination appartient à l’une

ou l’autre des communautés indiquées par la variable hyponyme. ε ijtest une perturbation.

3. Les techniques d’estimation du modèle de gravité

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3.1. Les méthodes jusqu’alors utilisées

Les modèles de gravité sont des modèles complexes à estimer à cause de leur spécification

tridimensionnelle (transversale, longitudinale et bilatérale). La première approche

d’estimation consiste à appliquer les MCO sur les données empilées. Mais l’application de

cette technique pose d’énormes problèmes, les plus importants étant la non-prise en compte

de l’hétérogénéité du panel, car elle stipule que les pays de l’échantillon possèdent des effets

communs et donc sont parfaitement homogènes. Pour tenir compte de ce dernier biais, les

auteurs ont fait recours à la modélisation en panel tout en spécifiant la nature des effets. Cette

approche a posé la difficulté de discrimination entre effet individuels et effets bilatéraux

(Feenstra, 2004). Toutefois, si on suppose que les perturbations aléatoires croisées satisfont

aux hypothèses des MCO (centrées, homoscédastiques, indépendantes et normales), les

estimations sont optimales. Malgré cela, les données de panels ont également montré leurs

limites, notamment lorsque la variable dépendante contient une grande proportion de zéros et

lorsque le vecteur des explicatives contient des variables invariantes dans le temps.

Bien plus, étant donné que la variable dépendante du modèle de gravité est par définition

toujours positive ou nulle (car il n’existe pas de commerce négatif), il s’est posé un nouveau

problème de définition de domaine de variation de cette dernière. Sous l’hypothèse d’une

censure à zéro, on a pensé à une technique d’estimation qui tient compte de cet aspect, à

savoir le TOBIT. Cette dernière trouve rapidement des limites lorsque les variables sont

transformées en logarithme, certaines observations devenant ainsi indéterminées. Ainsi,

l’interprétation des zéros dans la variable dépendante pose un problème important dans la

modélisation économétrique, aussi longtemps qu’on n’est pas fixé sur leur nature. S’agit-il

d’une erreur d’enregistrement ou d’une véritable absence de commerce ? Le TOBIT essaie de

répondre à cette préoccupation lorsque l’on contraint certaines observations négatives à être

nulles. Or en censurant la variable dépendante à ne prendre que des valeurs positives, on crée

un biais additionnel, qui pourrait rendre les estimateurs moins robustes. Le TOBIT pose deux

autres problèmes soulignés dans la littérature, à savoir le choix du Pseudo-R carré3, le choix

de la variante du TOBIT (Amemiya (1985) identifie 5 variantes) avec la définition des seuils

de censure et de troncature (qui ne repose sur aucune logique théorique).

Une autre spécificité des équations de gravité c’est qu’ils sont caractérisés par la présence de

variables invariantes dans le temps, à cause de multiples dummies qu’elle modélise. À cet

3 Il existe au moins une dizaine de pseudo-R2, celui de McFadden étant le plus usité.

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effet, l’application des techniques jusqu’ici exposées donnent des estimateurs biaisés à cause

de cette invariance et de l’endogénéité de certaines variables explicatives. Une méthode qui

tient compte de ces aspects a été proposé par Hausman et Taylor (1981). Toutefois, si cette

méthode corrige avec efficacité le biais lié à l’invariance des variables, elle a du mal à

distinguer entre les différents biais d’endogénéité (le biais de variables omises, le biais

d’erreurs de mesure et le biais de simultanéité). Bien plus, cette méthode qui est une extension

des variables instrumentales pose le problème de choix et de validité des instruments utilisés,

qui tantôt sont des variables retardées, tantôt des variables en différences, l’ordre du retard et

de la différence choisi manquant généralement de fondement théorique.

Enfin, Arellano et Bond (1991), Arellano et Bover (1995) puis Blundell et Bond (1998) ont

développé l’estimateur des moments généralisés en panels dynamiques. Il a la particularité de

tenir compte du biais d’endogénéité et peut être spécifié en différences ou en système sous les

hypothèses de quasi-stationnarité des variables et d’absence d’autocorrélation des résidus. Si

cet estimateur résout avec une efficacité reconnue le biais d’endogénéité, il n’en demeure pas

moins que le problème posé par les zéros de la variable dépendante et celui de

l’hétéroscédasticité des erreurs demeurent.

Toutefois, Santos Silva et Tenreyro (2006) démontrent que le problème de l’estimation du

commerce dans le modèle de gravité n’est pas l’endogénéité des variables, mais la robustesse

des estimateurs avec des bonnes propriétés, notamment celle écart-types minimum. Ils

recommandent à cet effet d’utiliser l’estimateur Poisson du Pseudo-Maximum de

Vraisemblance (PPMV) pour contrôler davantage l’hétéroscédasticité et la question des zéros

dans la variable dépendante.

3.2. L’estimateur Poisson du Pseudo-Maximum de Vraisemblance

L’estimateur PPMV a été introduit et dérivée des lois de Poisson par Gourieroux et al. (1984).

À la suite de ce travail pionnier, l’estimateur Poisson, qui suppose que la variance

conditionnelle de la variable dépendante soit proportionnelle à son espérance, a été développé.

Toutefois, c’est Santos Silva et Tenreyro (2006, 2010 et 2011) qui justifient la pertinence d’un

tel estimateur pour le modèle de gravité. Ils montrent que la spécification sous forme log-

linéaire du modèle de gravité donne des estimateurs baisés en accord avec l’inégalité de

Jensen4, à cause de l’hétéroscédasticité des niveaux de commerce. Ils parviennent à montrer

4 Dû au fait que E ( logComij ) ≠ log ( E (Comij )), la valeur ajustée du logarithme des flux commerciaux dépend généralement des moments d’ordre supérieur, y compris la variance. Étant donné que la variance du terme

10

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en plus que l’estimateur du PPMV est plus efficient que l’estimateur des moindres carrés non

linéaires (MCNL) lorsque le commerce est spécifié en niveau. Ils rappellent aussi que pour

s’assurer de la consistance de l’estimateur PPMV, les données ne doivent pas suivre une

distribution de Poisson. C’est ce qui justifie le préfixe « pseudo ». Cet estimateur corrige trois

principaux : (i) un biais induit par la transformation logarithmique, (ii) l’échec de l’hypothèse

d’homoscédasticité et (iii) la façon dont les zéros de la variable dépendante sont traités.

En appliquant la fonction de densité de la loi de Poisson au modèle de gravité (Wooldridge,

2002), on obtient :

Prob (Com ij=C / x ij)=e−μ ( x ij β ) μ ( x ij β )Comij

(Comij ) !(5)

Comij est le commerce bilatéral, μ ( x ij β ) la moyenne de la loi de Poisson et (Comij)! le

factoriel du commerce bilatéral. Il faut rappeler que Comij=0,1 ,2 ,…

Le modèle de poisson stipule théoriquement une dispersion égalitaire, c'est-à-dire que et la

variance conditionnelle de Comij est égale à la moyenne μ ( x ij β ) :

Var (Comij∨x ij)=E (Comij∨x ij )=μ ( x ij β ) (6)

Si cette hypothèse fondamentale n’est pas vérifiée, il faut ré-spécifier le modèle ou l’estimer

par d’autres techniques qui relâchent cette hypothèse, notamment la loi binomiale négative

(voir la sous-section sur le test de robustesse).

La fonction de log-vraisemblance de l’équation (6) se note donc comme suit :

log L ( β )=∑i=1

N

∑j=1

N

[−e( x ij β )+Comij ( x ij β )−log (Comij ) !](7)

La condition de premier ordre de maximisation de log L ( β ) en fonction de β donne5 :

∂ log L ( β )∂ β

=0→∑i=1

N

∑j=1

N

[Comij−e ( x ij β) ] x ij=¿∑i=1

N

∑j=1

N

( εij x ij)=0(8)¿

La condition de second ordre pour un maximum est donnée ci-dessous :

d’erreur dépend des variables explicatives, l’estimation issue de la log-linéarisation est baisée.5 Dans cette relation, ε ij=Comij−e ( xij β ).

11

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∂2 LogL ( β )∂ β2 =−∑

i=1

N

∑j=1

N

[e ( x ijβ ) ] x ij

2<0 (9)

Étant donné que l’espérance conditionnelle du terme d’erreur est nulle, c'est-à-dire

E (ε ij∨xij )=0, l’expression ∑i=1

N

∑j=1

N

(εij x ij )=0 peut s’interpréter comme l’ensemble des

conditions de moment ou d’orthogonalité. Dans ce cas, l’estimateur qui maximise le log-

vraisemblance est en général consistant. Puisque la seule propriété essentielle à la suite de ces

dérivations est celle de la consistance des estimateurs et rassurée par le fait que

E (Comij∨xij )=e( x ij β ), les données ne doivent pas forcément suivre un processus de Poisson et

la variable dépendante peut observer des zéros. L’estimateur Poisson s’obtient

numériquement comme une solution de la maximisation de la log-vraisemblance log L ( β ):

β̂Poisson=ArgMax {∑i=1

N

∑j=1

N

[−e ( x ij β )+Com ij ( x ij β )− log (Com ij) ! ]}(10)

Ainsi, même en présence d’hétéroscédasticité, l’estimateur Poisson est consistant et plus

efficient que les estimateurs jusque-là développés.

4. Protocole d’estimation, interprétation et robustesse des résultats

4.1. Estimation et interprétation des résultats

L’échantillon considéré dans cette étude couvre tous les pays de la CEEAC, les pays de la

CEDEAO, les BRICS, les pays de l’UE et certains pays africains (voir le liste en annexe). Cet

échantillon fait un total de 54 pays sur la période 1995-2010, c'est-à-dire 10*16*54 = 8 640

observation. Le choix de cet échantillon assez large s’explique par deux principaux

arguments: contrôler le « piège à variable muette » et assurer la consistance de l’estimateur.

Toutefois, seuls les pays de la CEEAC sont les pays reporters, c'est-à-dire que la variable

dépendante est constituée uniquement des flux bilatéraux des pays de la CEEAC vers tous les

autres pays de l’échantillon. Les données utilisées sont issues de trois bases principales, à

savoir la base de la CNUCED, la base de la Banque Mondiale et la base du CEPII. Les

résultats obtenus par application de la méthode du PPMV sont consignés dans le tableau 1.

Tableau 1. Résultats du modèle de gravité estimé par le PPMV.Variable dépenda

Modèle sans monnaie unique Modèle avec monnaie unique simulée

Modèle Modèle Modèle Modèle

12

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nte :standard augmenté standard augmenté

Coef z-Stat Coef z-Stat Coef z-Stat Coef z-StatConstante -1,44 (-0,72) -5,20 (-

2,82)*-1,52 (-0,76) -4,77 (-

1,75)***

LogPIBi 0,19 (3,33)* 0,16 (3,36)*

0,19 (3,35)* 0,17 (2,66)*

LogPIBj 0,56 (46,76)*

0,47 (22,86)*

0,56 (46,74)*

0,48 (22,96)*

LogPopi -0,63 (-1,77)**

*

-0,19 (-0,60)

-0,64 (-1,81)**

*

-0,34 (-0,72)

LogPopj 0,05 (3,65)* 0,21 (8,50)*

0,05 (3,70)* 0,20 (8,29)*

LogDistij -0,56 (-22,30)

*

-0,46 (-16,12)

*

-0,52 (-16,76)

*

-0,38 (-10,75)

*LogPi -0,03 (-

2,13)**

-0,03 (-1,81)**

*LogPj 0,12 (4,40)

*0,13 (4,69)*

MU 0,07 (2,06)**

0,18 (4,03)*

OUVij 0,31 (8,59)*

0,33 (9,04)*

LCij 0,41 (20,71)*

0,40 (20,37)*

UEj 0,17 (6,62)*

0,20 (7,48)*

BRICSj -0,12 (-3,73)*

-0,10 (-3,09)*

CEDEAOj -0,02 (-0,99)

0,07 (1,82)***

Observations

8 262 8 059 8 262 8 059

Wald Chi 2

5 178,9

5

5 403,8

6

5 184,2

4

5 444,9

5Prob > Chi 2

0,0000

0,0000

0,0000

0,0000

Note : *, ** et *** significatif à 1%, 5% et 10%.

13

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Source : Construit par l’auteur, à partir de l’estimation.

Les estimations révèlent que les coefficients associés aux PIB ont des signes attendus. En

effet, le PIB du pays i est positivement corrélé au commerce bilatéral de ce pays avec ses

partenaires j, ce qui traduit le fait que plus un pays produit, plus il dégage une forte

propension à exporter, et plus il est intégré dans le commerce international. En termes de

demande, ce signe stipule qu’un pays commerce avec ses partenaires proportionnellement à

son pouvoir d’achat. À cet effet, l’estimation prouve qu’une augmentation de 1% du PIB du

pays i entraine une augmentation de l’ordre de 0,16 à 0,19 de ses exportations bilatérales vers

ses partenaires j. Le signe du PIB du pays j s’inscrit dans la même logique, avec un effet et

une significativité plus forts que celui du PIB du pays i. En effet, le revenu du pays partenaire

lui donne un pouvoir d’achat en termes de produits du pays i. Ainsi, une augmentation d’un

point du PIB du pays j induit une augmentation de l’ordre de 0,47 à 0,56 des exportations

bilatérales du pays i vers ce pays.

Les coefficients associés aux populations affichent un signe négatif pour le pays i et positif

pour le pays j. En effet, pour le pays i, sa population est un déterminant de l’absorption

nationale, c'est-à-dire qu’elle exprime une forte demande de la production locale et limite les

exportations vers les partenaires. Toutefois, le coefficient est non significatif lorsque l’on

augmente le modèle. Le signe affecté à la population du pays j est positif, traduisant le fait

que l’augmentation de la population du pays partenaire augmente les exportations bilatérales

du pays i. Cette situation stipule que parmi les moteurs externes de la demande nationale, la

population des pays partenaires joue un rôle positif. L’effet est significatif à 1% quelle que

soit la spécification de l’estimation.

La distance donne le signe attendu. Ainsi, une distance croissante entre deux pays déprime

leur commerce bilatéral. L’effet de cette dépression, significative à 1%, varie de -0,38 à -0,56

selon les spécifications retenues, pour une augmentation d’une unité de la distance. Ces

résultats rentrent globalement en cohérence avec ceux établis par Avom (2005), Gbetnkom et

Avom (2005), Gbetnkom (2006), Avom et Mignamissi (2013).

La résistance multilatérale est captée dans la modélisation gravitaire par les prix. Ainsi, le

niveau des prix dans le pays i déprime son commerce bilatéral. En effet, l’augmentation du

prix d’une unité dans le pays i diminue significativement ses exportations bilatérales de 0,03.

Un prix domestique qui augmente diminue les exportations, cette augmentation s’apparentant

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à une appréciation de la monnaie. À cet effet, qu’importe la qualité, les partenaires substituent

les produits du pays i par ceux des autres pays, l’objectif étant d’éviter d’importer l’inflation.

Par contre, un niveau de prix élevé dans le pays j encourage le pays i à exporter vers ce pays.

L’estimation révèle que les exportations sont susceptibles d’augmenter de l’ordre de 0,12 à

0,13 suite à une augmentation du prix d’une unité dans le pays j. Cette dernière relation

implique que les exportateurs du pays i ont tendance à capter la rente ou la marge induite par

l’augmentation des prix chez leurs partenaires.

Pour tester la thèse endogène des unions monétaires dans la CEEAC, nous avons voulu savoir

quel serait par simulation l’effet du partage d’une monnaie unique dans cette Communauté. À

cet effet, deux modèles ont été estimés, à savoir un modèle sans monnaie unique et un modèle

avec monnaie unique. L’estimation dévoile que le passage à la monnaie unique dans la

CEEAC booste le commerce bilatéral des pays membres. Toute chose étant égale par ailleurs,

l’option d’une monnaie unique dans la CEEAC augmente le commerce bilatéral des pays

membres de 0,07 à 0,18 selon les spécifications retenues. Ce résultat confirme entre autres

ceux de Rose (2000), Avom (2005), Avom et Mignamissi (2013).

L’estimation dévoile également que l’ouverture simultanée des pays de la CEEAC avec leurs

partenaires explique positivement leur commerce bilatéral total. Cette variable montre que

moins les pays sont enclavés, plus ils sont enclins à augmenter leur commerce bilatéral, à

cause du fait que les coûts de transaction diminuent considérablement. L’effet sur les

exportations bilatérales est de l’ordre de 0,31 à 0,33 et significatif à 1%. Bien plus, partager

une langue commune pousse deux pays à échanger davantage. L’estimation montre que

comparativement aux pays qui utilisent des langues différentes, le partage d’une langue

commune augmente les exportations bilatérales de l’ordre de 0,40 à 0,41 selon qu’on utilise

une même monnaie ou non.

Trois zones d’intégration ont été privilégiées dans cette étude, à savoir l’UE, les BRICS et

l’UEMOA. Toute chose égale par ailleurs, si le pays partenaire à la CEEAC est de l’UE, les

exportations bilatérales augmentent de 0,17 à 0,20. De ce résultat, il ressort que garder en

l’état les relations commerciales avec les pays de l’UE crée des courants d’échanges pour les

pays de la CEEAC, spécifiquement les courants d’importations, la CEEAC étant un

importateur net vis-à-vis de l’Europe. Ce signe significatif à 1% implique une sortie de

ressources pour la CEEAC. L’effet est contrasté lorsqu’il s’agit des BRICS ou de la

CEDEAO. En effet, l’estimation montre que, le commerce bilatéral de la CEEAC diminue

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significativement à 1% pour les BRICS dans toutes les hypothèses et à 10% pour la CEDEAO

en présence d’une monnaie unique. Ce signe pourrait s’expliquer par le fait que les pays de la

CEDEAO sont reconnus pour leur extraversion commerciale. En effet, ces pays seraient

moins intégrés sur le plan commercial avec ceux de la CEEAC en raison du fait qu’ils

possèdent des dotations assez similaires. Le seul paradoxe est celui qu’affiche le groupe

BRICS. Toutefois, ce paradoxe pourrait être levé à cause de la période considérée dans cette

étude (1995-2010). En effet, les relations commerciales des pays de la CEEAC avec ce

groupe ne sont accélérées que ces dernières années. L’utilisation de données récentes

produirait sans doute un signe positif.

Sans se limiter aux effets partiels, il importe de tester si le passage à une monnaie unique

augmente véritablement le potentiel commercial des pays membres. À cet effet, nous

calculons les potentiels des exportations sans monnaie unique et avec monnaie unique. Nous

comparons par la suite pour chaque pays ces deux indicateurs en rapportant le second sur le

premier, un ratio supérieur à 1 impliquant le gain commercial apporté par l’introduction de la

monnaie unique (voir graphique 1).

Graphique 1 : Ratio moyen du potentiel des exportations avec monnaie unique au potentiel des exportations sans monnaie unique vers la CEEAC.

COG ZAR CMR AGO TCD BDI CAF GAB GNQ STP0.000

0.500

1.000

1.500

2.000

2.500

3.000

3.500

0.000

0.337

1.021 1.037 1.091 1.152 1.202

1.806

2.638

3.044

Source : Calculs et construction de l’auteur, à partir de l’estimation.

Il ressort de ce graphique qu’en termes de gains, STP serait le premier pays à bénéficier de

l’union monétaire, car son potentiel commercial est trois fois plus que s’il garde sa monnaie.

Le second pays bénéficiaire est la Guinée Équatoriale, avec un ratio de 2,638, c'est-à-dire un

potentiel commercial équivalent au plus du double s’il garde l’utilisation du CFA. Les pays

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tels que le Gabon, la Centrafrique, le Burundi, le Tchad, l’Angola et le Cameroun seraient

également des gagnants si la monnaie unique est instituée dans la CEEAC, avec toutefois un

effet moindre. Seuls les deux Congo (la République du Congo et la République Démocratique

du Congo) affichent un ratio inférieur à 1, impliquant un potentiel commercial insuffisant

suite à l’introduction de la monnaie unique. Toutefois en cohérence avec Rose (2000), la thèse

de l’endogénéité des unions monétaires stipule que des mécanismes endogènes génèrent à

terme des potentiels commerciaux même pour les perdants. En effet, l’utilisation d’une

monnaie unique crée un cercle vertueux, la monnaie unique pouvant jouer le rôle de

subvention aux échanges à travers les bénéfices et les externalités positives qu’elle génère.

4.2. Test de robustesse 

Le test de robustesse mené dans le cadre de cette étude consiste à faire recours à une autre

technique d’estimation. Nous choisissions à cet effet d’estimer l’équation (4) par la loi

Binomiale Négative (NEGBIN). La loi NEGBIN se présente comme une technique

d’estimation concurrente à la spécification en Poisson. L’estimateur Poisson n’est consistant

que si l’égalité moyenne-variance est respectée6. Dans le cas où la variance est supérieure à la

moyenne, les données sont dispersées et c’est l’estimateur NEGBIN qui est indiqué7. Les

résultats du modèle spécifié en effets fixes et aléatoires sont reportés dans le tableau 2.

Tableau 2. Estimation du modèle de gravité avec la loi Binomiale Négative.Variable dépenda

nte :Xij

NEGBIN-Effets fixes

NEGBIN-Effets aléatoires

Coef t-Stat Coef z-Stat

Constante 7,17 (3,29)*

-0,07 (-0,01)

LogPIBi 0,32 (5,79)*

0,16 (2,49)**

LogPIBj 0,50 (23,45 0,48 (22,90)*

6 La moyenne de la variable dépendante est de 1,83 et la variance de 3,36.7 La log-vraisemblance d’une NEGBIN est donnée par :

l ( β , η )=∑i=1

N

y i log (η2 μ ( x i β ))−( y i+1η2 ) log (1+η2 μ ( x i β ))+ log Γ ( yi+

1η2 )−log ( y i !)−log Γ ( 1

η2 ).

η2 est un paramètre de variance à estimer conjointement avec la moyenne conditionnelle de β . y i est la variable dépendante, x i le vecteur des explicatives, μ la moyenne et Γ le symbole de la loi Gamma. La loi NB stipule qu’il y a une grande dispersion des données (v ( x i , β )>μ ( x i , β )). Les moments d’ordre 1 et 2 sont donnés par

les expressions suivantes : E ( y i∨x i , β )=μ ( xi , β ) et var ( y i∨xi , β )=μ ( xi β ) (1+η2 μ ( x i , β )). En général, la NEGBIN converge vers la Poisson (Hilbe, 2007).

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)*LogPopi -1,63 (-

4,55)*-0,28 (-0,57)

LogPopj 0,20 (7,97)*

0,20 (8,26)*

LogDistij -0,39 (-10,90)

*

-0,38 (-10,72)*

LogPi -0,005 (-0,36) -0,03 (-1,86)***

LogPj 0,15 (5,56)*

0,13 (4,62)*

MU 0,20 (4,25)*

0,18 (3,94)*

OUVij 0,34 (8,91)*

0,33 (9,01)*

LCij 0,40 (20,17)*

0,40 (20,12)*

UEj 0,19 (7,27) 0,20 (7,46)*BRICSj -0,09 (-

2,91)*-0,10 (-3,09)*

CEDEAOj 0,08 (2,23)**

0,06 (1,80)***

Observations

8 059 8 059

Wald Chi 2

5 075,49

4 959,83

Prob > Chi 2

0,0000

0,0000

Note : *, ** et *** significatif à 1%, 5% et 10%.

Source : Construit par l’auteur, à partir de l’estimation.

Les résultats affichent une stabilité de signe et de significativité quant à la variable d’intérêt (à

savoir MU). Toutefois, il apparait une modification de signe pour la variable « CEDEAO ».

La NEGBIN avec effets aléatoires confirme l’effet simulé de la monnaie unique sur le

commerce bilatéral des pays de la CEEAC par l’estimateur Poisson (à savoir 0,18), la seule

différence résidant au niveau de la significativité du coefficient. Par contre, la NEGBIN avec

effets fixes a tendance à le sur-estimer l’effet simulé de la monnaie unique, avec une semi-

élasticité significative à 1% de 0,20.

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Conclusion

Cet article simule l’effet du passage à une monnaie unique sur l’intensification du commerce

bilatéral dans la CEEAC. Cette simulation s’insère dans le clivage théorique et empirique

soulevé par les deux principales conclusions de la théorie des ZMO, à savoir que l’adoption

d’une monnaie unique peut créer soit un cercle vicieux (Krugman, 1993), soit un cercle

vertueux (Rose, 2000). Le cadre méthodologique pour tester la validité de ce clivage a

consisté, après avoir rappelé le débat théorique, à procéder à une estimation économétrique. À

cet effet, le modèle de prédilection est le modèle de gravité, la principale innovation étant

l’application d’une technique d’estimation nouvelle, l’estimateur Poisson du Pseudo-

Maximum de Vraisemblance (PPMV). Pour un souci de robustesse des résultats établis, cet

estimateur est comparé à l’estimateur de la loi Binomiale Négative. À la suite de cette

démarche, nous aboutissons aux principaux résultats suivants :

l’estimation du modèle de gravité dans sa version augmentée laisse entrevoir que les

variables traditionnelles et les variables muettes de contrôle observent globalement les

signes attendus ;

si les pays de la CEEAC avaient adopté une monnaie unique depuis 1995, leur

potentiel commercial se serait considérablement accru, comparativement à la situation

actuelle où les pays commercent avec leurs monnaies nationales ;

le test de robustesse adressé à l’aide de l’estimateur NEGBIN spécifiée en effets

aléatoires confirme le signe et la significativité du paramètre d’intérêt. Cette

confirmation traduit la validité de la simulation menée dans le cadre de cette étude.

Ces résultats appellent les autorités de la sous-région, en cohérence avec les objectifs de

création d’une monnaie unique africaine indexée sur les monnaies sous-régionales à l’horizon

2028, à accélérer le processus de rationalisation des entités de la CEEAC à de mettre sur pied

un projet d’union monétaire. Enfin, le potentiel commercial que provoquerait le choix d’une

monnaie unique ferait que l’Afrique centrale ne soit plus considérée comme le maillon faible

de l’intégration africaine.

Annexe

Liste des pays de l’échantillon

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CEEAC CEDEAO UE BRICSAutres pays

africainsAngola,

Cameroun, Burundi, Congo,

République Démocratique du

Congo, Gabon, Tchad, République

Centrafricaine, São-Tomé et

Principe, Guinée Équatoriale

Benin, Burkina Faso, Cap Vert, Côte-d’Ivoire,

Gambie, Ghana, Guinée, Guinée Bissau, Libéria,

Mali, Mauritanie,

Niger, Nigéria, Sénégal, Sierra

Léone, Togo

Allemagne, Autriche, Belgique, Espagne,

Finlande, France, Irlande, Italie, Luxembourg,

Pays-Bas, Portugal, Grèce, Slovénie, Chypre, Malte, Slovaquie,

Estonie

Brésil, Inde

Russie, Chine, Afrique du Sud

Algérie, Égypte, Maroc, Kenya, Tunisie

Source : Construit par l’auteur.

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