le journal de notre amérique n°9

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Décembre 2015, Bruxelles.

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Page 1: Le Journal de Notre Amérique n°9
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SOMMAIRE :L'Édito du JNA

Par Tarik Bouafia & Michel Collon

En Argentine, le retour des bourreauxpar Pablo Gandolfo

En Amérique Latine, les «murs de la honte» par Tarik Bouafia

Dossier Venezuela

Une défaite mais la résistance continuepar Michel Collon

L'opposition reste le seul espoir pour le peuplepar Romain Migus

Recension rouges: «les collines de Caracas» de Maxime Vivaspar Emmanuel Wathelet

La candidate Hillary Clinton a fait un rêve,la démocratie au Venezuela

par Alex Anfruns

Les Brèves du mois de Décembre

Au Chili, l'urgence de l'unité par Marcel Claude

Un nouveau «Plan Condor» frappe l'Amérique Latinepar Ilka Oliva Corado

Porto Rico doit sortir du piège de la dettepar Pierre Gottiniaux

A La Havane, une rencontre inattendue et historiquepar Hernando Calvo Ospina

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L’ Edito

Que se passe-t-il en Amérique Latine? Après le printemps progressiste, assistons-nous au retour de l'hiver réactionnaire et néolibéral? C'est à craindre après les défaites des gauches argentines et vénézuéliennes aux récentes élections.

De nombreux facteurs expliquent ces douloureuses défaites, inquiétantes pour l'avenir de l'intégration latino-américaine: récession économique, persistance de la corruption, insécurité, bureaucratisation, guerre médiatique et économique...

Cela dit, ces revers s'inscrivent dans une dynamique plus large des droites sud-américaines bien décidées à reprendre le pouvoir et à appliquer leurs recettes ultra-libérales qui ont pourtant fait tellement de ravages dans les années 1990.Frustrées d'avoir perdu le pouvoir politique et une partie du pouvoir économique, démoralisées par les incessantes défaites électorales, dépitées par les échecs des tentatives des coup de force, les conservateurs du sous-continent tentent de se renouveler et de donner une image plus saine, plus présentable.

En Argentine, Macri a mené toute sa campagne sans exposer son vrai projet : une politique économique néolibérale et autoritaire. Au contraire, il a privilégié l'image, la communication et les discours sans idées. «Révolution du bonheur» a-t-il clamé à de nombreuses reprises en appelant à l'unité des Argentins. Pourtant, à peine élu, il a donné le ton: nommant deux juges à la cour suprême sans passer par le Parlement, abrogeant la loi sur les médias de Cristina Kirchner, persécutant des partisans de l'ex-présidente, annonçant une hausse des tarifs de l'eau, du gaz, de l’électricité...

Au Venezuela, une série d'erreurs et de manquements ainsi que la terrible guerre économique menée par la bourgeoisie du pays expliquent en partie la défaite électorale du chavisme. Cet échec dans les urnes ne doit pas rester sans réaction. Face à l'urgence de la situation, il est urgent d'agir pour que s'améliorent les conditions d'existence des Vénézuéliens.

Face à cette contre-attaque de la droite, largement soutenue par les USA, le vice-président bolivien a averti : «Ou nous impulsons les transformations et nous radicalisons les processus ou il y aura un retour en arrière, la droite, le conservatisme, la régression».

C'est vrai, l'Amérique Latine est à la croisée des chemins. Deux voies s'offrent maintenant clairement à elle: la poursuite de l'intégration régionale, la radicalisation de la révolution, la poursuite des conquêtes sociales, la consolidation de l'indépendance et de la souveraineté ou le retour au néolibéralisme, aux régimes réactionnaires et autoritaires, à la dictature du capital, au pillage des ressources naturelles, à l'individualisme, à la dépolitisation...Si rien de concret et de fort n'est fait notamment au Venezuela, le futur de la révolution sera grandement compromis.

L'heure est grave!

Notre Journal Notre Amérique, numéro 9, vous apporte de premiers éléments de réflexion sur les défis qui attendent les gouvernements de gauche.

Par Tarik Bouafia & Michel Collon

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Le triomphe de Mauricio Macri, un entrepreneur d'extrême droite néolibéral, un brin fasciste, marque la fin d'une étape de la politique argentine et sud-américaine.

par Pablo Gandolfo*

Nous pouvons anticiper sans peur de nous tromper, que le nouveau gouvernement de M.Macri, si il ne rencontre pas d'opposition au sein de la société, sera le pire en 200 ans d'histoire argentine. Pourquoi? Car il n'y a pas de droite formée, une bourgeoisie vigoureuse, un parti politique enraciné ni un dirigent “illuminé”

Il s'agit en terme politique d'une droite ignorante; en terme de classe d'une lumpen bourgeoisie qui a accumulé sa fortune en pillant l'Etat et qui n'a d'autre projet que de continuer à le piller. Ceci est vrai pour la totalité de la grande bourgeoisie locale. Au sein de cette dernière, le nouveau président élu appartient à une fraction de classe dont l'unique idée est de livrer la pays de manière illimité aux multinationales (ce qui peut provoquer une réaction de la part d'autres fractions de la bourgeoisie plus nationalistes)

Il n'y a pas de parti politique derrière le nouveau gouvernement, seulement une scénographie appelé PRO (Propuesta Republicana, le parti de M.Macri), régi par les diktats de la publicité; sa tête principal n'est en rien un dirigeant. A peine est-il un produit marketing, avec des difficultés sérieuses pour interpréter les plumes qui écrivent ses discours et qui menace de déraper ausitôt ses plumes disparus.

Comme la signalé le reconnu journaliste Horacio Vertbisky, le gouvernement de Macri marque une nouveauté dans l'histoire de l'Argentine car c'est “la première fois que depuis l'instauration du vote universel et secret, un parti de la droite patronal remporte des élections légalement sans renverser et attaquer les institutions et les droits des citoyens”

Depuis 1916 jusqu'à aujourd'hui, le patronat a du p o u r g o u v e r n e r, s e c a m o u f l e r d a n s d e s gouvernements qui ne lui appartenait pas, introduire des lobbyistes qui le représente, provoquer des coups d'Etat, réaliser des élections frauduleuses et, lors des

trente dernières années transformé les partis réformistes de base populaire (UCR et PJ) en de propres instruments du patronat à force de corruption et aux prix de destructions;

Le nouveau gouvernement marque une rupture: l'Argentine sera administré par ses propres propriétaires. Dans le nouveau cabinet ministériel, on compte la présence de représentants d'entreprises multinationales (JP Morgan, Deutsch Bank, General Motors, Telecom, IBM et la liste est encore longue) dans des postes clés (Ministère de l'économie, Energie, Affaires étrangères, Finances). En continuant vers le bas dans l'organigramme de l'Etat, le chiffre se multiplie. Ce qui surprend, c'est la rareté des cadres politiques bien formés qui sont remplacés par des chefs d'entreprise sans expérience politique.

A part grâce a l'appui des Etats-Unis et du grand capital qui apportera les dollars nécessaire pour recréer un cycle économique qui en dernière instance n'aura aucun réel support, le gouvernement de Macri est extrêmement faible.

UN PAYS EN DECOMPOSITION

Le kirchnérisme, nom donné au gouvernement sortant, a conduit le pays durant les douze dernières années. Quelques jours après avoir perdu le contrôle de l'Etat, le niveau de désintégration est déjà grand. En peu de temps, il n'y aura rien d'envergure qui se dénomera “kirchnérisme”.

Ce fait illustre une réalité plus profonde encore. Si il y a bien quelque chose de sur dans la politique argentine c'est qu'il n' existe rien de solide. Ni partis, ni politique formés, ni alignements permanents, ni institutions transparentes.

Cette absence est le fait central, autant pour ne pas se tromper dans l'action politique que pour interpréter et anticiper ce qui adviendra. Si on ne prend pas en compte ce fait, il sera impossible de mettre en place une politique destinée à renverser la situation.

Les classes dominantes en Argentine pâtissent d'un affaiblissement structurel qui se confirme dans l'affaiblissement des instruments avec

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2015 lesquelles ils exercent le pouvoir politique. Dans le

même temps, l'initiative politique est entièrement aux mains de la bourgeoisie et ses représentants occupent la totalité de la scène. Pourquoi ? A cause de l'absence totale de structures qui représentent les intérêts de la majorité.

La réalité déstructurée donne lieu a un ample éventail de possibilités. Parmi elles, celle de construire rapidement en Argentine une force politique que exprime les intérêts des classes populaires et qui arbore un programme anti-impérialiste. Si cela a lieu, le pays changerait radicalement. Le programme qu'applique le nouveau gouvernement, oeuvre comme une force centripète, qui tend a unir ceux qui doivent mener ce combat.

LES PREMIERS DEFIS

Pour pouvoir s'affirmer, le nouveau gouvernement devra résoudre quelques dilemmes difficiles. Le nouveau président affronte une situation économique caractérisée par une monnaie surévaluée, un déficit fiscal croissant et une économie qui stagne. Il devra réaliser un délicat équilibre entre les mesures qu'exige l'assainissement d'une économie capitaliste et le coût social que cela provoquera. Il aura comme obstacle une société qui ne lui fait pas un chèque en blanc.

DEVALUATION, INFLATION ET SALAIRES A LA BAISSE

Entre les mesures qu'il devra prendre se trouve une dévaluation qui fera gagner de la compétitivité pour les exportations, en même temps il baissera le cout des salaires en dollars. L'inflation qui avoisine les 30% s' accélèrera dans un temps, réduisant ainsi le pouvoir d'achat. Pour fermer ce cycle de la manière avec laquelle le pouvoir économique le demande, la clé sera le moi de mars, lorsque commencent à se développer les paritarias (négociations entre patronat et syndicat) pour évoquer l'augmentation des salaires. Le patronat réclame une augmentation de salaire qui soit en dessous du taux d'inflation. Les directions syndicales de leur côté enclins à accepter cette situation. La clé sera la réaction sociale des travailleurs face à cette offensive. Si cette dernière a lieu, les dirigeants syndicaux durciront leurs positions. Dans le cas inverse, le patronat aura atteint ses objectifs et Macri payera un faible coût politique.

Subventions aux services publics

Le deuxième front est celui des subventions aux tarifs des services publics, principalement l'énergie et le transport. Pour réduire le déficit fiscal, il est nécessaire de baisser les subventions. Mais les réduire aura un impact significatif dans les poches des citoyens. Le Ministre de l'économie Alfonse Prat Gray, a annoncé que les aides seront maintenues pour les bas salaires et seront supprimées pour le reste de la population. Avec cette division, il souhaite éviter que commence une crise sociale notamment dans les quartiers du Grand Buenos Aires, qui sont en même temps des zones ou le PRO manque de structure et où le gouvernement sortant l'a largement emporté. Le contre-coup de tout cela, c'est que le nouveau gouvernement commencera à s'attaquer à la classe moyenne et aisé à qui il supprimera les subsides alors que ces derniers constituent sa base social.

Financement des Etats provinciaux

Un troisième dilemme est celui du financement par l'Etat National aux provinces. Pour le capital financier et le Département d'Etat, c'est une épine dans le pied et un point en suspens depuis les recettes appliqués dans les années 90. En 2001, le gouvernement de Fernando de la Rua et de son ministre de l'économie Domingo Cavallo au service du FMI ont prétendu démanteler les appareils clientélistes soutenues par les Etats provinciaux. Ce fut un des facteurs qui a mené à la chute du gouvernement. Quatorze ans plus tard, le thème revient sur le devant de la scène politique. Couper dans les dépenses aide certes à diminuer le déficit fiscal mais le faire implique de s'affronter avec les gouverneurs, majoritairement dans le camp de l'opposition.

Un gouvernement faible, sans structure, et avec des cadres qui ne sont pas impliqués en politique peut-il résoudre ces dilemmes, avec une économie stagnante et au milieu d'une crise structurelle du capitalisme à l'échelle mondiale? Le spectacle ne fait que commencer.

*Pablo Gandolfo, journaliste, Buenos Aires

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Malgré un important recul de la pauvreté lors de la dernière décennie, l'Amérique Latine reste la région la plus inégalitaire au monde, juste après l'Afrique subsaharienne. Soucieux de se protéger et de se démarquer, les riches n'hésitent pas à mettre la main à la poche pour bâtir des forteresses, comme au Pérou et au Brésil.

par Tarik Bouafia

Plus d'un quart de siècle après la chute du mur de Berlin et alors que les chantres du néolibéralisme se gargarisent sur les soi-disant bienfaits de la mondialisation, le monde lui, n'a jamais connu autant de murs (1).De plus en plus présents en Europe, construits pour se protéger des migrants et des réfugiés qui fuient la guerre et la misère, ils sont devenus de nouveaux marqueurs géographiques censés repousser les indésirables.Ce que l'on sait moins et que l'on voit moins, c'est que ces immenses forteresses servent également à séparer les riches des pauvres, créant ainsi de terribles ségrégations sociales, territoriales mais aussi raciales.En Amérique Latine, où le phénomène des inégalités a toujours été particulièrement criant, la construction de murs s'est accélérée ces dernières années, agrandissant un peu plus le fossé qui sépare ceux qui ont tout de ceux qui n'ont rien.

« Construits pour que ceux d’en-haut ne se mélangent pas avec ceux d’en-bas »

Depuis maintenant quatre ans, les habitants du bidonville Vista Hermosa, situés sur les hauteurs de Lima, se trouvent privés de leur vue sur la capitale.

La cause? Un mur de plus de dix kilomètres de long et de trois mètres de haut qui les sépare d'un des quartiers les plus huppés de la capitale péruvienne, Las Casuarinas.

«La vue d'ici était belle, on pouvait voir toute la ville jusqu'à ce que ceux de Casuarinas ont su que nous arrivions et ils ont construits le mur; ils nous enlevé la vue pour qu'on ne regarde pas de leur côté, pour nous éloigner d'eux car nous n’avions par leur niveau» raconte Amadeo Alarcon, un habitant de Vista Hermosa.

D'un côté donc des maisons faites avec les moyens du bord. Il n'y a ni gaz, ni électricité, ni eau courante. De ce côté du mur, une maison coûte moins de trois-cents dollars.

De l'autre côté en revanche, c'est un autre monde. Les maisons peuvent coûter jusqu'à cinq millions de dollars. Ici vit une partie de la grande bourgeoisie du pays.Pendant que les premiers payent leur eau une fortune pour subvenir à leurs besoins élémentaires, les seconds profitent d'une eau bon marché et abondante pour remplir leurs immenses piscines.

La construction de ce «mur de la honte» comme l'appellent les habitants du bidonville a commencé en 1980 «à l'époque du terrorisme et de l'avancée des invasions au Pérou» explique Elke McDonald, qui réside à Las Casuarinas.

Les années 1980 furent marquées par la terrible guerre civile qui a opposé les partisans de la guérilla marxiste du Sentier Lumineux et l’État péruvien. Contraints de fuir les combats, de nombreux paysans émigrent vers la capitale où ils trouvent refuge sur ces collines escarpées où les conditions de vie se révèlent très difficiles.Plus de vingt ans après la fin du conflit qui fit plus de soixante-dix mille morts, de nombreux paysans continuent d'affluer vers la capitale en quête d'un avenir meilleur pour leur famille.Mais pourquoi partent-ils? La réponse est à trouver dans les politiques économiques mises en place depuis des décennies au Pérou et dont les peuples indigènes sont les premières victimes.

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2015 Très dépendante des exportations, l'économie

péruvienne est presque exclusivement basée sur l'extraction des minerais (or, cuivre, zinc...). Pour ce faire, les gouvernements qui se succèdent ne lésinent pas sur les moyens pour attirer les investisseurs étrangers, lesquels répondent très largement à l'appel. Le pays est un paradis pour les multinationales qui engrangent des profits mirobolants.Dans la région de Cajamarca par exemple, les activités criminelles de la puissante multinationale états-unienne Newmont provoquent l'exode de milliers de paysans pauvres, chassés de leur terre par les autorités pour laisser place au pillage des ressources minières.Victimes très souvent de la répression policière, emprisonnés lorsqu'ils ne sont pas purement et simplement assassinés, les communautés indigènes trouvent refuge dans les grandes villes du pays et notamment dans la capitale, où ils viennent grossir les rangs des indigents et des exclus de la société.

C'est pour se protéger de ces naufragés du système considérés par la haute société péruvienne comme des individus dangereux, les qualifiant volontiers de délinquants, que les nantis qui vivent à las Casuarinas ont, avec l'appui des autorités, bâti ce mur.

Pour ces derniers, il s'agit simplement d'une mesure de sécurité: «tout le monde a le droit de clôturer sa propriété privée pour se protéger» se défend M. Mc Donald avant d'ajouter «C'est le meilleur lieu du Pérou car on peut se promener et dormir tranquillement. Nous payons tous une cotisation mensuelle pour la sécurité de 100 dollars».

Pour Alicia Yupanqui en revanche, qui réside dans le bidonville, ce mur est une manière de les «discriminer».

«Je crois que le mur a été construit pour pas que se mélangent ceux d'en haut avec ceux d'en bas» poursuit Sara Torres, une autre habitante du quartier.

Une autre ville du continent connaît un phénomène similaire, Sao Paulo. Mégapole de plus de onze millions d'habitants, c'est le poumon économique du Brésil.Là aussi, les inégalités et les discriminations sont grandes. Elles sont symbolisées par ce long bloc de béton qui sépare la favela de Paraisopolis où vivent

soixante-dix mille habitants du quartier aisé de Morumbi.D'un côté, quatorze mille maisons en bois et en plastique, de l'autre, des appartements pouvant atteindre les 700 000 euros.Pendant que les uns manquent cruellement de services publics, les autres vont se faire soigner dans l’hôpital Albert Einstein, l'un des plus célèbres et des plus onéreux du pays.Les habitants des deux quartiers ne se parlent pas, ne se côtoient pas, ne se connaissent pas.«Nous ne nous mélangeons pas. Eux restent là-bas, nous ici» commente un habitant de la favela.

La ville, et plus globalement l'Etat de Sao Paulo, attire chaque année des milliers de personnes venant principalement des régions pauvres du Nord à la recherche d'un emploi et de meilleurs conditions de vie.

Une violence symbolique

Dans son chef d’œuvre, Les Veines ouvertes de l'Amérique Latine, publié en 1971, l'écrivain Eduardo Galeano tirait déjà la sonnette d'alarme sur le spectacle choquant de la misère et des inégalités qui frappaient son continent. Plus de quarante ans plus tard, et bien que de nombreuses avancées ont été enregistrées en terme de baisse de la pauvreté, d'éradication de l'analphabétisme et de lutte contre la faim, l’Amérique Latine peine encore à penser toutes ses plaies.Après avoir été un laboratoire des politiques néolibérales, politiques qui ont fait passé le nombre de pauvres de 136 millions en 1980 à 225 millions au début des années 2000, le sous-continent américain a connu lors de la dernière décennie des réussites sociales sans précédent. De nouveaux pays, la Bolivie et le Venezuela ont été déclarés par l'UNESCO «territoire libre d'analphabétisme».

Ces politiques sociales ont pu être mises en place grâce notamment au boom des prix des matières premières, dont sont largement dépendantes les économies latino-américaines.

Mais la crise économique et financière de 2008, couplée à la baisse des prix des matières premières ces dernières années, frappe durement les nations sud-américaines.

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Au Brésil, où la politique économique de la présidente Dilma Rousseff se droitise de jour en jour, abandonnant ainsi les mouvements sociaux, les inégalités sont particulièrement choquantes.

Le Brésil est après le Honduras le pays le plus inégalitaire du continent américain.

Au Pérou, même si la pauvreté a été réduite de moitié ces dernières années grâce notamment à une croissance avoisinant les 6,5%, les disparités restent très marquées. Sociales, ces dernières peuvent également être de nature territoriale voire raciale. En effet, en 2004, la probabilité pour un habitant de la campagne de sombrer dans la pauvreté était deux fois supérieure à un citadin. En 2014, cette probabilité est trois fois plus grande.Les Péruviens qui possèdent une langue maternelle indigène (aymara, quechua) ont quant à eux deux fois plus de risque de sombrer dans la pauvreté que ceux ayant l'espagnol comme langue maternelle.

Les murs construits à Lima et à Sao Paulo sont le symbole de cette terre de contraste qu'est l'Amérique Latine. Un continent et des peuples en lutte depuis cinq-cents ans pour leur libération et leur indépendance définitive.Ces immenses forteresses mettent également en lumière le caractère méprisant et raciste des élites latino-américaines qui éprouvent souvent un véritable dégoût pour les pauvres et les indigènes.Ces «murs de la honte» s'apparentent clairement à une violence symbolique. Une violence qui ne frappe pas les corps mais les esprits. Une violence absolument subtile, qui ne tue pas mais qui crée des frustrations et participe au désespoir de ceux qui n'ont pas la chance d'être du bon côté du mur.

L'affaiblissement des gouvernements de gauche et l'offensive néoconservatrice de la droite latino-américaine risquent bien de mettre à mal les nombreuses conquêtes sociales obtenues lors des quinze dernières années comme en Argentine par exemple.Fer de lance de la contestation contre les politiques néolibérales, les mouvements sociaux pourraient bien revenir sur le devant de la scène pour notamment abattre ces murs indignes et en finir une bonne fois pour toute avec ces sociétés profondément inégalitaires.

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Michel Collon* analyse les résultats des dernières élections au Venezuela et l'avenir de ce pays révolutionnaireLa gauche radicale française a-t-elle soutenu comme il faut la révolution chaviste au Venezuela? Malheureusement, non, à quelques exceptions près : Maurice Lemoine, Jean Ortiz, Romain Migus, Rémy Herrera, Ignacio Ramonet et quelques autres. Mais globalement, il y a eu peu d’intérêt, peu de compréhension de ce qui se jouait là. Et guère de solidarité concrète alors que ce peuple en avait grand besoin, soumis aux attaques incessantes de l’Empire US.

C’est donc aussi l’heure des bilans et examens de conscience : laisserons-nous cet Empire US (et notre Europe complice) saboter et détruire un par un tous les pays qui résistent ? A qui le tour ? Bolivie, Equateur et Nicaragua recevront-ils davantage de soutien ?

La première solidarité sera d’essayer de comprendre cette révolution, ses formidables espoirs et ses points faibles. Sans jouer les prétentieux : le véritable bilan ne peut être établi que par les militants vénézuéliens. Et pour avoir beaucoup visité ce pays, je peux attester que le débat politique y est très vivant.

D’un côté, la révolution a apporté des résultats spectaculaires : éliminant l’analphabétisme, apportant des soins de santé et une éducation à chaque Vénézuélien, qu’il habite dans les quartiers pauvres de Caracas, au fin fond de l’Amazonie ou tout en haut de la Cordillère des Andes. Des progrès impressionnants pour l’alimentation des enfants, l’espérance de vie, la distribution d’eau potable, la connexion à l’égout, la réduction du chômage (hommes et femmes). Quiconque a visité le pays a pu

le constater. L’Etat avait récupéré le contrôle du pétrole et ces revenus servaient non plus à enrichir les riches mais à réduire l’extrême pauvreté : de plus de moitié en dix ans. N’oublions jamais que l’élite qui aujourd’hui jubile à Caracas, c’est elle qui avait maintenu cette extrême pauvreté pendant que le pétrole alimentait ses comptes en banque.

De l’autre côté, la récente victoire électorale de l’opposition montre des points faibles tout aussi importants qui ont bloqué la révolution et provoqué le découragement d’une partie du peuple. Dans mon livre Les 7 Péchés d’Hugo Chavez, j’avais pointé trois faiblesses : 1. Le poids économique toujours décisif de la grande bourgeoisie liée aux USA. 2. Le poids médiatique toujours décisif de cette même grande bourgeoisie. 3. Une nouvelle corruption au sein de la révolution. Une étude toute récente d’André Crespin, Où en est le Venezuela après dix-sept ans de « socialisme du 21e siècle ? » actualise l’analyse de façon remarquable (Etudes marxistes, Bruxelles, décembre 2015, p. 77).

1. L’économie. En 2009, nous écrivions : « Le grand défi du Venezuela était de passer d’une économie pétrolière avec redistribution sociale à une économie productive s’appuyant sur plusieurs secteurs. Mais ce ne sera pas facile. Comment créer une mentalité productive qui intègre aussi les valeurs de coopération et de solidarité ? Pas simple après cinq siècles de dépendance coloniale et un siècle d’abondance pétrolière » (Michel Collon, Les 7 péchés d’Hugo Chávez, Investig’action, 2009, p. 278).

Cinq ans plus tard, on est au même point. 43% des calories sont importées, la révolution n’a pas vraiment réussi à relancer une agriculture locale. Le pays ne produit pas, il importe. Et ces importations

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Deux défaites, mais la résistance continue. Venezuela, un premier bilan

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2015 sont contrôlées par la grande bourgeoisie liée aux

USA. Elle en a profité pour spéculer, revendre dans la Colombie voisine et semer la panique aux pénuries.

2. Les médias. Le chapitre 19 de notre livre posait la question « Est-il possible de réaliser une révolution sociale sans et contre les médias ? ». Constatant que les médias privés aux mains des milliardaires dominaient encore largement l’audimat, malgré les efforts pour développer la télé publique, des télés et radios régionales participatives, on avait ce paradoxe : le peuple chaviste (entre 50 et 65% selon les résultats des votes) regardait toujours la télé de ses adversaires et se faisait manipuler par cette télé dont on n’imagine pas ici le degré de manipulation et de violence.

Forcément, ça laisse des traces. En tout cas sur des personnes moins politisées. Ce problème ne pose pas qu’au Venezuela : la télé des riches, qu’elle soit locale ou internationale, diffuse une vision de l’actualité, de l’économie, des relations sociales et des relations humaines en général qui reflète la vision de l’élite et ses intérêts. En période de guerre économique, de pénuries et de paniques organisées, cela démoralise très fort.

3. La corruption au sein même de la révolution. Crespin souligne l’impact négatif de « la boli-bourgeoisie, cette nouvelle classe née de la révolution bolivarienne, installée confortablement dans l’administration du PSUV et qui profite de sa position favorable pour pratiquer corruption et népotisme, joue un rôle actif au sein du parti dont elle veut justement freiner le processus révolutionnaire et transformateur ; elle tire en effet profit de cette situation stagnante » (Etudes marxistes, Bruxelles, décembre 2015, p. 86).

Là aussi, on se trouve face à un problème qui se pose à toute révolution, et encore plus quand il y a du pétrole, donc beaucoup d’argent en circulation. Les mandataires se proclamant « chavistes » mais pensant davantage à leur portefeuille qu’à celui des citoyens ont causé un tort considérable ! Bloquant des projets importants, n’écoutant pas les doléances populaires et donnant un exemple démoralisant. Ce sera aux Vénézuéliens d’établir le bilan de la lutte contre la corruption. Mais vu que le problème se pose partout, il faut réfléchir à l’intérêt d’un contrôle populaire

permanent sur les revenus de tous les mandataires et de toutes les administrations et entreprises. L’informatique le permet.

Faut-il sombrer dans le découragement ? Non. D’abord, l’opposition va devoir gouverner, elle mangera ses promesses, attaquera les acquis sociaux et révélera son véritable visage. Ensuite, Chavez a beaucoup mobilisé et organisé, souligne Crespin : « Chávez comprend bien le défi de taille qu’il doit relever en priorité : l’organisation des masses depuis la base. Quand on a l’ambition de convertir « un État contre-révolutionnaire en un État révolutionnaire, l’implication des masses dans ce processus est indispensable » (Hugo Chávez, discours lors de la prestation de serment du nouveau gouvernement, 8 janvier 2007).

Comités urbains regroupant de 100 à 200 familles, conseils communaux impliqués dans les décisions importantes qui concernent leur quartier, et surtout les missions installées dans les quartiers pour garantir au peuple santé, alphabétisation, produits subventionnés… » Effectivement Chávez a réussi à impulser une vie démocratique participative au sein de laquelle les bases participent réellement au processus, exercent un véritable contrôle sur les élus et débattent elles-mêmes du problème et des solutions.

C’est cela qui maintient l’espoir. Si l’unité peut être maintenue (Washington essaiera évidemment de soudoyer certains cadres chavistes), si le débat se développe à propos de ces faiblesses, si les militants restent aux côtés de la population quand le nouveau pouvoir se démasquera, alors un retour est possible. Comme au Nicaragua: après une campagne de terrorisme et de panique entretenue, le néo-libéralisme a gagné une élection en 1990, mais les révolutionnaires sandinistes ont réussi à revenir.

Bien sûr l’Empire ne laissera pas faire. Et se reposera la question : que pouvons-nous faire ici pour une solidarité efficace?

*Michel Collon, journaliste et écrivain belge, fondateur du site Investig'Action et auteur du livre Les 7 Pechés d'Hugo Chavez

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Les élections législatives du 6 décembre dernier ont adjugé une victoire indiscutable aux adversaires du processus politique initié par le commandant Hugo Chávez et par le peuple du Venezuela il y a dix-sept ans. La conquête de l'Assemblée Nationale par une partie de la droite néolibérale n'est pas peu de chose. Même si le Venezuela, comme d'autres démocraties dans le monde, se targue d'avoir un régime présidentiel dans un État fédéral mais centralisé, le pouvoir législatif est énorme. C´est de là que l´on a adopté pendant seize ans les lois qui ont permis l'immense majorité des changements révolutionnaires, dont les décrets-lois qui ont pu voir le jour grâce à la Loi Habilitante votée à l'Assemblée. Bien que ce pouvoir ait été symbolisé par la figure du commandant Chávez, les succès de la Révolution Bolivarienne ont été rendus possibles grâce au travail conjoint du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif afin de changer la vie des citoyens de la République.

par Romain Migus*

Les porte-paroles politiques du Capital se sont distingués tout au long de l’histoire politique récente de l’hémicycle en s’opposant à tout ce que proposait le chavisme. Pas par caprice, mais parce que les représentants du peuple bolivarien s’évertuaient à construire un échafaudage légal afin de renforcer le bien-être commun, et ceci menaçait les intérêts capitalistes de ceux dont les politiques de droite se veulent les représentants. Alors que la Révolution s’attachait à construire la base légale au bénéfice de l’intérêt général, la droite plaidait pour la primauté des intérêts particuliers d’une minorité.

Après dimanche dernier, le jeu politique législatif s’est renversé. Dorénavant la stratégie qui cimentait les politiques de la droite néolibérale, à savoir s’opposer à tout, s’effondre. Ils sont obligés de révéler au pays quelles sont ses véritables options politiques et en fonction de quels intérêts ils vont légiférer à partir de maintenant. Et avec un glissement sémantique comme conséquence : l’opposition au nouveau projet du pays, aujourd’hui hégémonique à l’Assemblée nationale, c’est nous, les révolutionnaires !

La seule chose sur laquelle nous rejoignons la proposition de la contre révolution est qu’il va y avoir un changement. Pour savoir réellement en quoi il consiste, il suffit de vérifier le programme de gouvernement que tous les partis qui composent l’auto-proclamée Table de l’unité démocratique (Mesa de la Unidad Democrática, MUD) ont scellé d’un commun accord le 23 janvier 2012. Dans ce programme composé de 1237 articles on retrouve une grande partie des actions futures de la MUD à l’Assemblée, puisque de nombreux députés de la nouvelle majorité parlementaire ont participé à la rédaction de ce programme néolibéral. Par conséquent, on en déduit qu’ils appliqueront en conscience les esquisses qu’ils ont élaborées. Voyons quelles sont les propositions qu’ils vont maintenant essayer d’implémenter depuis l’hémicycle législatif.Bien qu’ils n’aient pas informé le peuple de ses véritables intentions lors de la campagne électorale, la MUD met l’accent dans son programme sur la nécessité de reprendre “toute la multitude des lois afin de les ajuster à une vision intégrale d’un nouveau cadre juridique qui reflète la nature démocratique de la République” (art. 162 du programme de la MUD)[1]. C’est-à-dire démolir tout l’appareil légal qui a permis l’élaboration de politiques en faveur du peuple.

Au niveau économique, les députés de la MUD ont promis à leurs électeurs d’en finir avec la crise. Comme nous savons que la MUD ne pourra pas faire monter les prix du pétrole au niveau international, il faut se demander qui paiera les conséquences de l’écroulement du prix du brut : le peuple ou les classes privilégiées ?

Une fois encore, le programme de la droite vénézuélienne nous fournit une ébauche de réponse : en finir avec le contrôle des prix des produits du

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2015 Venezuela : l’opposition reste le seul espoir

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panier moyen pour “stimuler l’activité privée” (art. 420), réformer la Loi de Terres et de Pêche ; la Loi de Souveraineté Alimentaire, afin de “garantir les libertés économiques” (art. 547) ; la Loi d’Économie Populaire (art.125), et la Loi pour la Défense des Personnes à l’Accès aux Bien et aux Services (art. 147).

En d’autres termes, ils prétendent retoucher toutes les lois qui protègent le peuple de la dictature du marché. De même, éliminer le contrôle des changes, comme ils le proposent dans l’article 406 provoquerait une forte dévaluation qui achèverait de détruire de manière drastique le pouvoir d’achat des classes populaires ainsi que celle des classes moyennes de la société.

Comme l’a indiqué José Guerra, un des rédacteurs du programme économique de la MUD élu récemment député de Caracas, la nouvelle Assemblée réformera la Loi de la Banque Centrale du Vénézuela (BCV). Une mesure très abstraite pour les électeurs qui l’ont porté au pouvoir mais dont les conséquences pourraient se faire sentir à moyen terme. Tout au long de ces seize années, la droite a toujours pleurniché devant le fait que les politiques monétaires soient soumises aux décisions du gouvernement élu et servent le développement de la Nation de manière coordonnée. Les canons libéraux des politiques financières vont pouvoir s’imposer à travers la réforme de cette loi. Pour ce faire, la MUD préconise d’accroître l’autonomie de la BCV et d’interdire à cette entité de “financer les dépenses publiques et de valider des politiques déficitaires” (art.408). Cela pourrait peut-être avoir un impact sur l’inflation mais quel en serait le coût social ? D’où serait pris l’argent pour renforcer les systèmes d’éducation, de santé, sans parler des programmes sociaux que le Gouvernement Bolivarien a maintenus malgré la crise ?

Ces intentions des nouveaux députés de la droite vénézuélienne n’ont pas fait l’objet de débats dans la campagne électorale. Quand les politiques de la MUD parlaient de liberté d’expression à leurs électeurs, ils ont omis de préciser qu’ils veulent modifier la Loi Resorte [NdT : Loi de Responsabilité Sociale à la Radio et à la Télévision] (art.124) ainsi que la Loi de Télécommunications (art. 1147) pour éradiquer les voix de la critique, criminaliser les médias communautaires et ré-offrir le spectre radioélectrique aux entreprises de communication privées. Quand ils criaient furieusement pour la pleine démocratie, ils n’ont pas mentionné leur

volonté de réformer à l’Assemblée Nationale la Loi du Conseil Fédéral du Gouvernement (art. 276), la Loi des Conseils Communaux (art. 289), la Loi des Communes ainsi que la Loi Organique du Pouvoir Populaire (art. 125).

Ils ont promis monts et merveilles à une population épuisée par une terrible guerre économique, mais ils ont passé sous silence leur désir d’abattre la législation qui a permis à l’industrie pétrolière d’être le moteur économique du processus de changement révolutionnaire (art. 512 et 275). Ils se sont agités pendant des années appelant en vain les forces armées à la rébellion, sans mentionner qu’ils vont retoucher la Loi Organique de la Force Armée Nationale Bolivarienne ainsi que la Loi Organique de Sécurité de la Nation (art. 100), avec comme objectif de “réorganiser et reformuler l’institution militaire” (art. 99) ; éliminer la Milice Bolivarienne (art. 101) et, d’une manière générale, détacher le soldat et la collectivité militaire de l’avenir de la Nation. En somme, revenir à une armée de façade dont l’unique rôle serait de défiler le 5 juillet et de réprimer en cas de rébellion populaire.

L’offensive législative contre la Révolution Bolivarienne qui est en train d’être menée depuis la nouvelle Assemblée Nationale cherchera soumettre à nouveau l’intérêt général et le bien-être de la majorité aux intérêts particuliers des élites. Dans la bataille politique et communicationnelle à venir, le chavisme doit assumer le rôle qui est désormais le sien dans l’hémicycle : informer sur la stratégie de la majorité parlementaire et s’opposer à la destruction de l’appareil législatif bâti au cours de seize années de Révolution. En d’autres termes, une opposition politique pour le bien du peuple !

[1] Voir ce programme sur le site internet officiel de la MUD : “Pistes pour le programme de gouvernement d’unité nationale” disponible ici (en espagnol) : (dernière consultation le 10/12/2015).

Voir aussi Romain Migus, le programme de la MUD, Caracas : ed. Barrio Alerta, 2012. Disponibleici (en espagnol)Traduit de l’espagnol par Rémi Gromelle pour Investig’ActionSource: TeleSur

* Romain Migus, sociologue et écrivain.

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« Après ce résultat historique aux élections, un vent d’espoir souffle de nouveau chez nos voisins...du Venezuela. » C’est par ces mots enthousiastes que l’écrivain belge Hugo Poliart rend compte le 7 décembre passé de la victoire de l’opposition aux élections vénézuéliennes. Un a priori plutôt conforme à la couverture médiatique du pays latino dans les médias occidentaux mais qui ne rend ni compte de la complexité de la situation économique et politique du pays, ni surtout du processus bolivarien engagé par le Président Chavez. Rien de tel qu’un livre de fiction pour répondre à un écrivain de fiction : voici « Rouges, les collines de Caracas », un roman de Maxime Vivas paru récemment aux éditions Arcane 17.

par Emmanuel Wathelet

L’histoire est celle de Gaya, une journaliste française appelée à assister à une conférence sur les médias à Caracas. Elle ignore qu’elle a été « choisie » par les services secrets pour être témoin d’une tentative d’attentat fomentée par l’opposition. Lorsqu’elle arrive à Caracas, la connaissance qu’a l’héroïne du Venezuela est limitée à ce que ses collègues ont toujours raconté, dans la veine des articles du journal Le Monde ou des reportages de la BBC. La réalité de terrain qu’elle découvre ensuite l’emmène dans un triple voyage : c’est d’abord un thriller prenant où Gaya se trouve aux prises d’un sicaire bien décidé à lui faire la peau, où elle est aimée autant qu’instrumentalisée par un séduisant agent secret cubain puis courtisée par un poète plagiaire. Le second voyage est plus politique : Gaya découvre les « missions », c’est-à-dire les

politiques sociales mises en place par Chavez et qui l’ont rendu si populaire parmi les plus pauvres. Le dernier voyage la voit se remettre en question, laisser de côté ce qu’elle croyait savoir pour construire une opinion sur des faits, rien que des faits.

Le lecteur peu au courant de ce qui s’est passé au Venezuela sous le gouvernement d’Hugo Chavez découvrira alors que le Président était régulièrement caricaturé en singe dans un pays où la couleur de la peau donne bien souvent une idée du niveau socio-économique, les plus blancs étant les plus riches. Il comprendra beaucoup mieux combien opposition et médias sont intriqués faisant des chaînes privées comme Globovision ou RCTV des médias qui seraient interdits par le CSA en France parce que les règles minimales de déontologie sont bafouées. Il apprendra que sous la « dictature » de Chavez, pas un journaliste n’était en prison – un aspect sur lequel pourrait prendre exemple le Président turc Erdogan, pourtant si bon ami des chancelleries occidentales.

Plus encore, le lecteur de « Rouges, les collines de Caracas » pourra resituer le coup d’État manqué préparé par les USA contre Chavez en 2002 dans un contexte historique où l’immense majorité des États latinos – pour ne citer qu’eux - qui se sont démarqués de la politique étasunienne ont été renversés : Arbenz en 1954, Pern en 1955, Boch en 1963, Goulart en 1964, Estenssoro et Torres en 1964 et 1971, Allende en 1973, en Uruguay en 1973, en Argentine en 1976, Torrijos et Roldos en 1981 (tous deux étrangement morts dans des accidents d’avion), etc. Et c’est sans compter les multiples attentats auxquels a réchappé Fidel Castro...

Pour autant, Maxime Vivas n’élude pas les problèmes toujours d’actualité de la société vénézuélienne et qui ont certainement contribué aux résultats des élections du week-end passé. La criminalité à Caracas reste importante, ainsi que la corruption, des fonctionnaires hérités des anciens gouvernements qui agissent comme un contre-pouvoir, etc. À ces problèmes s’ajoutent entre autres la spéculation sur les denrées alimentaires et la chute du prix du baril de pétrole qui ont fait plonger une économie encore beaucoup trop dépendante de cette unique matière première. Bien entendu, la réalité est toujours plus complexe et c’est à cette complexité que nous convie Maxime Vivas dans un livre qui détend, informe et questionne.

Source : « Rouges, les collines de Caracas », Maxime Vivas, Les éditions Arcane 17, 22€

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2015 Recension Rouges, les collines de Caracas

de Maxime Vivas

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Hillary Clinton ne pouvait pas perdre cette occasion. Après les résultats des élections à l'Assemblée Nationale du Venezuela le 6 décembre dernier, la candidate aux prochaines élections à la présidence de la Maison Blanche vient de rappeler à ceux et celles qui ne l'avaient pas encore compris combien le soutien des Etats-Unis à l'opposition vénézuélienne est une question cruciale et stratégique.

par Alex Anfruns*

Après avoir dépassé en estimations l’Arabie Saoudite, le Venezuela est désormais la première réserve mondiale en ressources pétrolières. Autant imaginer à quel point les Etats-Unis aspirent à renverser un gouvernement trop indépendant qui a nationalisé la principale entreprise d’extraction du pays, PDVSA, pour destiner une partie de ses ressources aux programmes sociaux en matière d’éducation, de santé et de logement. Seulement dans ce dernier domaine, le gouvernement de Nicolas Maduro vient d’inaugurer, début décembre, le logement social numéro 900.000 de la "Mision Vivienda".

Sous la direction de Hugo Chavez, le Venezuela a en effet repris sa souveraineté nationale et son impact a été notable sur les événements régionaux pendant plus d’une décennie. Le message était clair : l’Amérique Latine et les Caraïbes ne sont plus la "cour arrière" des Etats-Unis. Mais la manne de l’or noir vénézuélien, dont l’accès par la mer permettrait de disposer d’un avantage essentiel à l’économie du voisin du Nord en réduisant le temps de l’acheminement de cette ressource stratégique depuis le Moyen Orient , es t t rop tentante pour l’impérialisme. C’est ainsi que peuvent s’expliquer les récentes déclarations de Mme Clinton :

"le peuple du Venezuela a besoin de tout notre soutien dans l’hémisphère, en particulier de celui de nos amis d’Amérique Latine. Il est nécessaire qu’ils se prononcent en faveur de la démocratie, qu’ils défendent les droits de l’homme dans ce pays. C’est tragique de voir à quel point ce pays, le plus riche de l’Amérique Latine, l’un des plus riches du monde en matière de ressources, est mal géré et à quel point les gens ont été opprimés et malmenés au cours des 15 dernières années...Donc, il faut soutenir le peuple du Venezuela. Et certainement je vous soutiendrai, et nous formons des vœux pour que ces élections soient le début d’un processus de récupération de la démocratie et pour que des opportunités pour le peuple du Venezuela puissent être créées (...)".(1)

Des déclarations qui ont le mérite de la clarté et qui ne doivent r ien au hasard, puisque cette préoccupation pour le pétr... oups ! c’est à dire, pour les droits de l’homme, a été partagée par le général John Kelly qui s’est dit, lui aussi, inquiet pour la situation économique au Venezuela, préoccupé par la situation à tel point qu’il dit "passer 40 secondes par jour à penser au Venezuela", "déplorer l’inflation de son économie" et "prier pour son peuple, parce qu’il souffre terriblement". Le général Kerry semble donc souhaiter, en bon samaritain, le bien-être des Vénézuéliens et est même "prêt à intervenir si on le lui demande". (2)

Les récentes déclarations d’Hillary Clinton font écho à celles du Secrétaire d’Etat John Kerry du 8 décembre, où il "exhorte le Consejo Nacional Electoral (CNE) de publier les résultats électoraux". Le président Maduro répond ironiquement "il doit se réveiller le matin et penser qu’il gouverne le Venezuela. Un gouverneur spécial pour le Venezuela (...). Mais vous vous croyez qui, monsieur ? Le CNE est le Pouvoir électoral de la République bolivarienne du Venezuela, et il est autonome. Que Dieu nous protège de ne plus jamais devenir la colonie d’autrui. Et encore moins, d’être la colonie de cette élite qui gouverne Washington." (3)

Si la candidate à l’élection présidentielle de 2016, Mme Clinton, l’actuel Secrétaire d’Etat John Forbes Kerry et le général de l’armée John Kelly peuvent encore se permettre de donner des leçons des droits

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2015 La candidate Hillary Clinton a fait un rêve :

la "démocratie" au Venezuela

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2015 humains au Venezuela sans craindre la moindre

réaction du "monde civilisé", c’est sans doute parce que tout ce beau monde n’a pas tiré le bilan de l’ingérence des USA et de ses crimes dans le monde, part icul ièrement en menant l ’ invasion de l’Afghanistan et de l’Irak et en soutenant financièrement des groupes de mercenaires en Irak, en Libye et en Syrie.

Des documents (4) attestent également que ce ne fut personne d’autre que Mme Clinton qui donna, en 2009, l’ordre de renverser le Président du Honduras Manuel Zelaya par un coup d’état, comme "vengeance" pour avoir osé rejoindre l’Alba créée par Hugo Chavez. Mais aussi parce que deux semaines auparavant, à San Pedro Zulia, eut lieu la réunion de l’Organisation des Etats Américains (OEA), où les sanctions à l’égard de Cuba en vigueur depuis les années 60 furent levées sous l’initiative du Président Mel Zelaya. Hillary Clinton explique que ce fut à la sortie de cette session qu’elle eut l’idée d’ordonner le renversement du président du Honduras.

Comme le démontre brillamment Diana Johnstone dans son livre récent "Hillary Clinton, la Reine du Chaos" (5), la candidate à la Maison Blanche sait pertinemment que, pour avoir ce poste, il faut prouver qu’une femme peut elle aussi devenir une cheffe de guerre. Et c’est cela qui explique son parcours dans les années 90 en tant que "Première dame" et épouse de William Clinton, dans la promotion du féminisme et des droits de l’homme dans les pays du Sud. Une caution nécessaire pour s’adapter à la nouvelle ère caractérisée par la toute-puissance de l’empire états-unien. En effet, depuis la guerre de Yougoslavie, un changement profond fut opéré par les élites USA à travers l’actualisation des objectifs de l’OTAN, ce qui permit de "reformuler" le droit international et de pervertir les notions les plus élémentaires d’aide humanitaire, en les mettant au service de la puissante industrie d’armement. Une fois l’URSS disparue, les Etats-Unis et l’Europe seraient convaincus de leur supériorité morale et de leur modèle économique, bref, ce qui fut résumé comme la "fin de l’histoire". Rien ne les empêcherait désormais de défendre leurs intérêts en s’appuyant sur le principe du "Right to Protect". C’est à dire le droit de décider de quel gouvernement il convient de renverser, de continuer à perfectionner leur technologie de guerre (comme les drones) et

d’intervenir dans les pays du Sud trop indépendants, mais de façon respectable aux yeux de l’opinion publique.

Finalement, le "Décret Obama" du 9 mars 2015, déclarant le Venezuela comme étant une "menace inhabituelle et extraordinaire pour la sécurité des Etats-Unis", prend toute sa signification en écoutant les responsables militaires et politiques du pays qui a le plus utilisé les armes chimiques au monde et n’a pas hésité à tester deux bombes nucléaires sur la population civile des villes japonaises d’Hiroshima et Nagasaki. Sans doute faut-il se rappeler aussi son rôle dans les années 60 et 70 dans l’arrivée au pouvoir des dictatures militaires en Amérique Latine à travers la politique de l’ancien Secrétaire d’Etat Henry Kissinger.

Les escadrons de la mort formés par la CIA au Salvador, le bombardement de la population civile dans les quartiers d’un petit pays comme Grenade sont autant de démonstrations de la légitimité avec laquelle Hillary Clinton ose aborder le sujet des droits de l’homme. Sans parler du fait qu’elle a avoué elle-même que son pays a été à l’origine de la création du réseau terroriste Al Qaeda lorsque Brezinski a mis au point la stratégie consistant à entraîner et financer les moujahidins qui partiraient faire une "guerre sainte" contre un gouvernement hostile puisque du côté de l’URSS à l’époque de la guerre froide. Enfin, on a retrouvé la même stratégie dans le soutien aux rebelles libyens et syriens, dépeints par la propagande "occidentale" comme étant les nouveaux "freedom fighters" (6) des "héros" capables de réaliser le rêve du "chaos constructeur" de l’ancienne Secrétaire d’Etat de l’administration Bush, Condolezza Rice. (7)

Qu’a-t-on appris des mensonges des Bush et cie., et de ses conséquences en Irak et en Syrie, avec les retombées prévisibles qui ont eu lieu d’abord dans ces mêmes pays, puis à Madrid, à Londres, et ensuite en Egypte, en Tunisie, au Liban, au Nigéria, enfin à Paris ou à Bamako ? Eh bien que, de façon invariable, ce sont toujours les peuples qui paient le prix de chaque guerre, sans distinction de religion, pour les intérêts de quelques-uns.

Écoutons maintenant Hugo Chavez, le promoteur de la paix et du monde multipolaire, répondre avec sa

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2015 clairvoyance et sa sincérité habituelles aux

successives coalitions des va-t-en-guerre d’hier et d’aujourd’hui comme François Hollande, Manuel Valls, Laurent Fabius, David Cameron, Barack Obama ou Hillary Clinton, qui n’ont cessé de soutenir financièrement et militairement ceux qu’ils affirment aujourd’hui vouloir combattre par les bombes :

"Combien de problèmes doit affronter la France en ce moment ? Qu’en est-il du chômage en France... ? Le chômage, les entreprises en faillite, les banques qui pillent leurs peuples ...Bien sûr, la France n’est pas le pire des cas ... il y a l’Espagne, le Portugal, qui sont les pires cas, la partie la plus pauvre de cette Europe-là.(...) En un demi-siècle la prétendue UE n’a pas réussi à avoir une stratégie qui élimine ou réduise les grandes asymétries entre une Europe riche et une Europe pauvre, souffrant de la crise. Le gouvernement français devrait être davantage préoccupé des problèmes de la France comme le changement climatique, la pauvreté, la faim, etc. Pourquoi poursuit-elle alors cette politique étrangère impériale qui consiste à renverser les gouvernements parce qu’ils ne plaisent pas à quelqu’un ? C’est ce qui s’est passé avec la Libye. Nous reconnaissons le gouvernement syrien et, qui voulez-vous qu’on reconnaisse sinon ? les terroristes, ceux qui lancent des bombes ? C’est triste de constater que des gouvernements européens reconnaissent les terroristes, se réunissent avec des terroristes et leur envoient de l’argent et des armes. Espérons que les peuples d’Europe puissent se réveiller ! S’il y a des problèmes en Syrie, c’est aux Syriens de les résoudre, et pas aux groupes terroristes infiltrés." (8)

Les faits ont, encore une fois, donné la raison à Chavez. Les plans de l’impérialisme états-unien et leur stratégie consistant à piller les ressources des pays du Sud ne peuvent pas fonctionner toujours à la perfection. Même si les techniques derrière les révolutions de couleurs et la promotion d’une société civile prête à promouvoir la conception de la démocratie et les droits de l’homme à l’"american way of life" se sont beaucoup perfectionnés ces dernières années en particulier à travers le rôle essentiel de la propagande des médias, la machine de guerre tombe souvent en panne face à la résistance des peuples. Et au Venezuela, même si la stratégie de

déstabilisation économique semble avoir remporté une bataille importante après les résultats des élections du 6 décembre dernier, elle ne pourra pas détruire si facilement les acquis de la révolution bolivarienne.

Notes :1) U.S. : Hillary Clinton Weighs in for Venezuelan Opposition, TeleSur English, 7 décembre 2015.2) CNN, Entrevista de John Kelly, Atlanta, Estados Unidos, 22 de octubre, 2015.3) En contacto con Maduro, 9 décembre 2015, Cuartel de la Montana, Caracas.4) "We strategized on a plan to restore order in Honduras and ensure that free and fair elections could be held quickly and legitimately, which would render the question of Zelaya moot.", Hillary Clinton, Hard Choices. Simon & Schuster, 2014. Lire aussi l’article de Mark Weisbrot : Hard choices : Hillary Clinton admits role in Honduran coup aftermath5) Diana Johnstone, Hillary Clinton. La Reine du Chaos. Editions Delga, Paris 2015.6) "(...) To watch the courageous Afghan freedom fighters battle modern arsenals with simple hand-held weapons is an inspiration to those who love freedom. Their courage teaches us a great lesson—that there are things in this world worth defending."Ronald Reagan, Message on the Observance of Afghanistan Day, White House, March 21, 1983.7) "(...) Condoleezza Rice appelle de ses voeux le « chaos constructif » pour implanter la démocratie dans les Etats arabes de la région, en proie au totalitarisme. L’expression est ténébreuse... L’administration américaine privilégie-t-elle la poursuite des massacres pour mieux détourner les richesses naturelles du pays, et en premier lieu le pétrole, sans éveiller les soupçons ? " ;Gamal Ghitany, Le « chaos constructif », un leurre. Libération, 22 mars, 2007.8) Hugo Chavez, Rueda de prensa presidencial, Aeropuer to de Maiquet ia , Vargas , h t tp : / /elnuevodiario.com.do/mobile/...

Source : Investig’Action

*Alex Anfruns, rédacteur en chef du Journal Notre Amérique, Bruxelles

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Les Brèves du mois de Décembre

La Bolivie se lance dans le nucléaire

La Bolivie construira son premier complexe nucléaire en 2016 afin d'augmenter ses capacités de production. Ce dernier sera construit grâce à la technologie russe et à l'aide de l'Argentine.

Réaction d'Evo Morales suite aux élections au Venezuela

Suite à la défaite du chavisme aux élections législatives au Venezuela, le président bolivien a appelé à une «profonde réflexion» face à la situation actuelle. «Les résultats doivent nous amener à une profonde réflexion, une réflexion pour voir comment défendre nos révolutions démocratiques» a t'-il affirmé avant de pointer du doigt l'ingérence des États-Unis: «Nous libérer politiquement, économiquement et socialement est si important pour résoudre nos problèmes de pauvreté et de sous-développement en Bolivie, mais l'empire ne dort pas».

L'éducation bientôt publique au Chili ?

La présidente du Chili, Michelle Bachelet vient d'envoyer au parlement un projet de loi pour rendre l'éducation publique. Cette décision arrive après des années de manifestations monstres des étudiants qui réclamaient le droit à étudier dans des universités publiques et gratuites. En effet, depuis 1973 et l'arrivée au pouvoir d'Augusto Pinochet, l'éducation n'a cessé d'être privatisé par les gouvernements néolibéraux successifs.

Paraguay: mort d'Osmar Martinez

Osmar Martinez, combattant reconnu pour les droits des paysans est décédé en prison le 7 décembre dernier. Au Paraguay, les paysans sont régulièrement la cible d'expulsions, de répressions voire d'assassinats de la part des forces de l'ordre. Pendant ce temps, de nombreuses multinationales telles Monsanto ou Cargill exploitent le soja, grande ressource du pays.

Le Maroc s'en prend au Venezuela à l'ONU

Le représentant permanent adjoint pour le Maroc à l'ONU,Abderrazak Laassel s'est dit «surpris» qu'un pays (le Venezuela) «qui représente une menace pour ses voisins puisse parler de paix et de sécurité».Cette offensive de la monarchie chérifienne intervient après que le Venezuela ait une nouvelle fois appelé à l’autodétermination du peuple sahraoui, victime depuis quarante ans de la colonisation marocaine.

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Après le Siècle des Lumières, le “20ème siècle cambalache” de José Santos Disceopolo, et l’arrivée au 21ème siècle de la post-modernité, la condition de Notre Amérique qu’Eduardo Galeano décrivait dans “Les Veines ouvertes de l’Amérique latine” n’a pas beaucoup changé: “L’Amérique latine s’est habituée à perdre depuis des temps reculés, lorsque les Européens de la Renaissance sont arrivés par la mer et ont enfoncé leurs dents dans sa gorge… Mais la région continue aujourd’hui encore à travailler comme servante et n’a cessé d’être au service des exigences étrangères.

par Marcel Claude*

D’après le « centre d’études de la répartition du travail et du social » (CEDLAS), l’Amérique Latine occupe la seconde position sur l’échelle mondiale en termes d’inégalité et le CEPAL nous informe que la pauvreté est le lot de 30% de la population. Selon Ofxam, plus de 27 millions de personnes du monde entier travaillent dans ces 200 zones économiques spéciales, connues en Amérique Latine et aux Caraïbes comme “maquilas”, qui ne sont rien d’autres que des ghettos de misère : journées de travail du matin au soir, travail dans des conditions insalubres et salaires misérables. Les femmes y constituent plus de la moitié des travailleurs et représentent jusqu’à 90% de la main d’oeuvre de ces énormes usines où sont fabriqués les vêtements e t autres produi ts text i les des multinationales. Celles-ci se sont installées dans de nombreux pays latino-américains qui attirent les investissements étrangers en offrant une main d’oeuvre bon marché et non syndiquée, ce qui est un grand avantage compétitif. Dans les “maquilas” du Salvador, 9 travailleurs sur 10 sont des femmes et les salaires perçus par les employées des pays tels que le Nicaragua, le Honduras et le Guatemala ne suffisent pas à couvrir le minimum vital, mais seulement 50 à 84% des besoins, selon Oxfam. Le prix de vente final de quelques-uns des produits qu’elles confectionnent peut atteindre jusqu’à 300 fois leur salaire.

Notre Amérique, avec sa forêt d’Amazonie et ses sommets andains, contient la biodiversité la plus riche de la planète; cependant, la déforestation menée au moyen de coupes à blanc et du brûlage des bois, dans

l’objectif de créer des zones réservées à l’agriculture et à l’élevage de bétail, avance dangereusement et suit l’expansion capitaliste, offrant l’espace nécessaire aux cultures transgéniques et le commerce de la viande, perpétuant par la même occasion la souffrance animale.

Malgré la légitimité universelle de la Déclaration de l’ONU sur les Droits des Peuples indigènes, beaucoup d’Etats ne reconnaissent pas leur existence et leurs droits humains sont loin d’être respectés : ils sont toujours les plus pauvres et les plus marginalisés du monde, tandis que les investissements de l’industrie extractive et l’agriculture à grande échelle sont les causes principales de l’appauvrissement et de la violation des droits systématiques. Durant la période de 2000 à 2011, les terres livrées aux multinationales se sont étendues sur plus de 200 millions d’hectares dans le monde, et la majorité concerne les terres des peuples indigènes des pays pauvres de l’Amérique Latine, cédées sans le consentement des communautés locales, sans compensation et sans aucun respect pour l’environnement. Il s’agit ni plus ni moins d’un dépouillement territorial soutenu par l’armée, la police et les groupes paramilitaires.

Tout ceci se répète avec une rigueur particulière au Chili. Selon la fondation Sol: 54% des travailleurs chiliens gagnent moins de 300.000 pesos (390 euros) par mois. Seuls 16% gagnent plus de 650.000 pesos (843 euros); le salaire minimum, voire inférieur, est perçu par plus d'un million de Chiliens. Selon l'OCDE, le Chili est le pays le plus inégalitaire en termes de revenus des 18 Etats membres. Ainsi, les revenus des 10% les plus riches dans le pays sont 26 fois plus élevés que les 10% des plus pauvres. Cependant, au Chili, il n'existe pas 10% de riches ou super riches. Selon l'Université du Chili, les super riches accaparent une part gigantesque du revenu national: plus de 30% pour le 1% représentant les plus riches, 17% pour les 0,1% les plus aisés et plus de 10% pour les 0,01% les plus nantis. Ceci est une moyenne qui couvre la période 2004-2010. Personne n'est surpris donc quand le journaliste et historien britannique Robert Hunziker affirme que la force de travail au Chili se développe dans des conditions d'esclavage et qu'il existe un marché d'esclaves plus grand que celui des Etats-Unis en 1850.

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2015 L’ urgence de l’ unité

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2015 La reconnaissance constitutionnelle consentie aux

communautés indigènes dans le cadre d'un processus participatif comme l'établissent les organismes internationaux est encore une décision politique systématiquement remise à plus tard, ce qui aggrave l'absence de protection des territoires menacés par les projets miniers et hydroélectriques entre autres. Tout cela profite aux multinationales et entreprises nationales, comme l'application en vigueur de la loi antiterroriste dirigée contre les membres des communautés indigènes, et ce bien que le comité des Droits de l'Homme de l'ONU en mars 2007 ait réitéré les recommandations faites en 2003 sur le devoir de l'Etat de modifier ladite loi.

Et que dire de la situation critique des pensions au Chili? L'unique description possible est de reconnaître que ce n'est rien d’autre qu'une catastrophe sociale, puisque neuf pensions sur dix seraient de 150.000 pesos (195 euros), soit inférieures au salaire minimum. La santé, de son côté, est un autre facteur social critique dont on parle peu.Le droit à la santé n'est pas garanti dans la Constitution, sinon seul le droit de choisir entre FONASA ou ISAPRE (mutuelles), c'est à dire d’être recueilli ou abandonné à son propre sort, étant donné que le système public ne satisfait pas aux standards définis par l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS). Le budget public dédié à la santé est un peu plus élevé que la moyenne à laquelle il devrait se situer. Seule 20% de la population possède ISAPRE et cette dernière perçoit 60% des cotisations pour s'occuper des plus riches et de ceux qui ne sont pas malades, ce qui fait exploser ses profits.

Nous avons autant de médecins par habitant que les pays développés mais 2/3 travaillent dans le secteur privé pour le secteur le plus riche et 1/3 pour les plus pauvres alors que ces derniers représentent 80% de la population. L'Etat paye aux hôpitaux à peine 40% de leurs coûts réels alors qu'aux cliniques et aux créanciers privés, il transfère plus d'un million de dollars par an, couvrant non seulement les coûts mais aussi les utilités. Une fois de plus: 40% des coûts de santé pour les 80% les plus pauvres et 100% des utilités pour les 20% les plus riches.

Nous avons une Constitution d'origine illégitime, réalisée par sept juristes d'extrême droite, approuvée lors d’un plébiscite totalement frauduleux et légitimé par la Concertation dans un processus aberrant de trahison et de mensonges. Arrivé au pouvoir, un

personnage tel que Edgardo Boeninger déclarait dans ses écrits (1997) que le leadership de la Concertation aurait expérimenté à la fin des années 1980 une “convergence” avec la pensée économique de la droite, situation que “politiquement, il n'était pas en condition de reconnaître”.

Convergence? Plutôt une articulation de trahison, de soumission et de corruption. Cette articulation explique et donne de la cohérence au projet de loi de Lagos, une sorte de Christ Rédempteur du capitalisme et du fascisme, projet approuvé en 48 heures en 2004, qui a laissé impunis les tortionnaires et les violeurs des droits de l'homme, établissant un secret de 50 ans pour toutes les dénonciations effectuées face à la Commission Valech et interdisant au pouvoir judiciaire d'accéder à ces informations.Le point culminal de tout ce processus arrive en 2005: Ricardo Lagos et la Concertation donnent une “légitimité démocratique” à la Constitution de 1980, par leur signature et celle de tous les ministres, substituant à Pinochet, en échange de l'élimination de l'immobilité des Commandants en chef des Forces Armées, des Carabiniers et du Conseil de Sécurité Nationale, mais la loi organique Constitutionnel des Forces Armées reste intacte.

Tout au long des 200 ans de notre indépendance, nous n'avons pas été capables de sortir de notre condition soumise, subjugués d'être les serviteurs, comme le dit Galeano, des pays du Nord hyper-développés. C'est ce qu’affirme également José Abelardo Ramos dans son “Histoire de la Nation Latino-américaine” lorsqu'il écrit que l'Amérique Latine a perdu la possibilité de se réunir en une Nation et d'avancer vers le progrès social comme le faisaient les Etats récemment unis sur le nord du continent américain.

Les oligarchies agro-commerciales des ports se sont imposées en Amérique Latine sur les aspirations unificatrices de Bolívar, San Martín, Artigas, Alamán, y Morazán. Pendant des décennies sont parus des livres sur “l'argentineité”, la “péruanité”, la “bolivianité” ou la “mexicanité” dans la recherche d’une identité nationale ou culturelle propre mais peu se sont consacrés à redécouvrir l'identité latino-américaine qui était la seule pouvant rendre l'Amérique Latine capable de se constituer en un pouvoir autonome face au progrès du capitalisme.Quand l'Europe prit possession de l'Amérique Latine, après la ruine de l'Empire espagnol, raconte Aberlardo Ramos, elle contrôla les chemins de fer, les bananes, le

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2015 café, le cacao, le pétrole ou les viandes et quelque

chose qui s’avéra bien plus dangereux: elle coopta une grande partie de l' intelligentsia latino-américaine, créant une admiration acritique envers ses modèles externes et la rendant aveugle à la tragique réalité de ses propres pays.

Abelardo Ramos expliquait en 1991 que les Latino-américains avaient déjà payé leur tribut d'innocence et ne devaient pas changer une seconde fois son or pour des perles de verre. Ainsi était venue l'heure qu’ils soient eux-mêmes et personne d'autre, qu’ils soient ceux qui se posent les questions et qui se donnent leurs propres réponses. Il se demandait si la nation moderne française serait née sans sa grande révolution ?

Dans “Nuestra América”, José Marti soutient le fait que le problème latino-américain ne se trouve pas dans l'incapacité raciale, culturelle ou historique à dépasser le colonialisme mais dans l'erreur d'assumer sans critiques les formes d'organisation politique et sociale provenant de l'Europe occidentale et des Etats-Unis. Marti soutient une thèse contraire à celle de Sarmiento (ancien Président argentin entre 1868 et 1874) qui, dans “Facundo Civilización o Barbarie”, identifie la civilisation avec l'Europe et la Barbarie avec le Noir, le gaucho et le métis américain. Pour Marti, la véritable cause se trouve dans l'imposition aux Latino-américains de modèles non créés par eux-mêmes.

C'est à dire qu'il n'y a pas d’opposition entre la civilisation et la barbarie ou entre la fausse érudition et la nature de Notre Amérique. Et il affirme: “L'Université européenne a cédé la place à l'université américaine”. En même temps, il nous appelle à dépasser la “mentalité villageoise”, à dépasser le chauvinisme et demande que “Les peuples qui ne se connaissent pas soient pressés de se connaître”

En d'autres mots, son oeuvre est un urgent appel à l'unité continentale et à l'action unitaire de notre Amérique face aux dangers ainsi pointés du doigt et dont nous avons souffert au cours de l'histoire.Le défi des peuples de Notre Amérique est donc l'unité, tant continental que local. Nous savons déjà, à travers la tragédie de l'histoire du continent, que jamais

nous ne dépasserons la domination coloniale ni impériale si nous ne nous mettons pas debout à l'unisson, conscients et déterminés à prendre l'histoire en main, la tâche n'étant pas seulement continentale mais aussi locale. Aujourd'hui au Chili, après le spectacle imprésentable de la classe politique chilienne au service du capital national et multinational, il ne nous reste pas d'autre chemin que celui de l'unité.

Le Chili a besoin de construire un projet politique sous un nouveau référent, comme l'a été le Front Populaire qui en 1938 a porté le candidat Pedro Aguirre Cerda à la présidence de la République. Lors de cette grande et victorieuse coalition se trouvaient le Parti Communiste, le Parti Socialiste mais également les syndicats ouvriers regroupés dans la Centrale des Travailleurs du Chili (CTCH), la Fédération des Etudiants de l'Université du Chile (FECH) et le mouvement mapuche organisé dans le Front Unique Araucano. Cette union politique réussie est parvenue à battre le duo de cette époque, à savoir les libéraux et les conservateurs, et a ouvert une époque de progrès pour le Chili avec la création de la CORFO et le renforcement de l'Education publique dont le cri de campagne était “Gouverner c'est éduquer”. Un exemple historique que nous devons reprendre aujourd'hui.

Le Chili a besoin d'une révolution, d’un changement de paradigme, d’un tournant historique, d’une refondation de la République, mais cela n'aura jamais lieu sans l'unité du peuple, l'unité de cette réserve morale qui veut réaliser ces changements avec l'appui des peuples frères de l'Amérique. Nous sommes une même Nation et nous atteindrons la splendeur civilisationnelle quand nous serons conscients que nous “naissons de la même branche d'arbre que celui de nos rêves” (Zitarossa)

Comme Marti l’appelait de ses vœux : les arbres se sont mis les uns derrière les autres pour que le géant des sept lieues ne passe pas !

*Marcel Claude, économiste, Santiago du Chili

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Il y a quelques mois, lors de la dernière réunion du Mercosur, Cristina Fernandez a rappelé que cela faisait maintenant 40 ans que le « plan condor » existe et a fait remarquer que «ce plan avait été mis sur pieds afin de renverser les gouvernements démocratiques. Il se peut actuellement qu’un autre plan soit en phase d’élaboration, cette fois-ci plus utile et plus sophistiqué. Dans certains cas, il peut s’agir de vautours et non de condors, mais ce sont toujours quoiqu’il arrive des rapaces. Nous devons renforcer plus que jamais nos démocraties ».

par Ilka Oliva Corado*

L’aigle impérial survole le continent latino-américain, accompagné de vautours et de condors ; ils se lancent des regards et ne savent pas quand ils vont le dévorer. Il faut se réveiller si nous ne voulons pas nous faire dévorer comme il y a 40 ans. Les États-Unis veulent tout dévaster, avec la puissance d’un ouragan ou d’une vague en pleine tempête.

Il y a quelques semaines, le gouvernement américain a lancé une attaque médiatique contre le Venezuela: la DEA aurait intercepté une cargaison de drogues à Haïti qui se dirigeait vers les États-Unis, un trafic supposément mené par le cousin et filleul de Nicolas Maduro. En l’espace de quelques secondes, les médias, sous le joug de l’impérialisme, ont propagé l’info à travers le monde, et, le jour suivant, elle faisait la une de tous les journaux principaux dans le monde. Bien entendu, ce n’est qu’une stratégie pour accuser Maduro d’être un allié des narcotrafiquants. Le gouvernement vénézuélien a prouvé que cette accusation était fausse mais aucun des médias qui avaient publié l’information n’a pris la peine de s’excuser pour une telle diffamation, et encore moins le gouvernement américain et la DEA.

Pourquoi avoir provoqué un buzz médiatique d’une telle envergure et pourquoi à ce moment précis? Et bien tout simplement en raison des élections parlementaires qui allaient avoir lieu au Venezuela ce 6 décembre. L’assassinat de Luis Manuel Diaz, secrétaire du parti « Action démocratique », faisait également partie de ce plan ; M. Diaz avait ordonné à Lilian Tintori d’accuser le gouvernement de Nicolas

Maduro de vouloir mettre fin à ses jours et de soutenir le « terrorisme d’État ». Rappelons que M. Diaz était aux côtés de Mauricio Macri dans son bunker lorsque celui-ci est sorti vainqueur des élections présidentielles en Argentine. Petite précision : M.Macri a gagné avec seulement 679 000 voix, c’est-à-dire que ceux qui ont voté pour lui étaient des politiciens fanatiques qui ne savent même pas compter jusque 10. Quelques heures après son élection, le président-crapule s’en est immédiatement pris au Venezuela pour tenter de l’éjecter du Mercosur.

Ainsi, on peut affirmer avec certitude que le président fera tout ce qui est en son pouvoir, avec l’argent du peuple argentin, pour renverser les gouvernements de Maduro et de Dilma. On peut également supposer qu’il fait partie de la coalition qui avait tenté une invasion dans le Cône sud et qu’il tentera d’instituer une directive similaire à celle d’Hitler (« Nuit et Brouillard ») : on serait de nouveau au temps des escadrons de la mort. Macri a le soutien de l’oligarchie latino-américaine, du secteur des entreprises et des anciens et actuels présidents droitistes. Réveillons-nous si on ne veut pas se faire dévorer.

L’aigle impérial, les vautours et les condors avancent côte à côte avec les larbins afin de vendre le pays. Ils profitent du Mexique, de l’Amérique centrale et des Caraïbes (toutes des colonies américaines), du Pérou, du Paraguay et de la Colombie, en y implantant leurs bases militaires afin d’être le plus proche possible des gouvernements progressistes et assurer la réussite d’une éventuelle invasion militaire. Pour preuve : ils se sont emparés de l’Argentine récemment et ils trament un coup d’État contre Dilma. Ils s’attaquent maintenant au Brésil et veulent l’exclure du BRICS. Pour quelle raison ? C’est très simple : ce groupe est formé par le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud, des pays unis qui constituent une menace pour le capitalisme.

Les gouvernements dirigés par Lula et Dilma sont les seuls qui ont lutté pour éradiquer la misère sociale. Les États-Unis convoitent le pétrole du Brésil, du Venezuela, de la Syrie, et c’est cette soif de pétrole qui explique les bombardements et les

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invasions militaires dans ce pays. Comme ils ont réussi à s’accaparer le pétrole irakien (le pétrole du Mexique leur a été remis par Enrique Peña Nieto, qui a cédé au chantage comme un lâche), ils supposent qu’ils pourront également s’emparer du pétrole qui se trouve en Amérique du Sud. Réveillons-nous!

Le président du Congrès national du Brésil a autorisé la poursuite contre Dilma. Qui est donc cette crapule ? Il figure parmi les hommes politiques de droite les plus puissants du Brésil. Il a fait l’objet d’une enquête pénale pour avoir accepté un pot-de-vin de cinq millions de dollars et est accusé de faire partie d’un système de corruption qui vise à faire tomber Petrobras. La présidente Dilma s’est opposée à ces vautours qui voulaient dévorer l’entreprise étatique et, en réponse, ce freluquet tente de l’amener en justice en l’accusant d’être corrompue. Son objectif est en fait de fomenter un coup d’État contre l’actuel gouvernement progressiste et ainsi mettre un terme au progrès de la région. Réveillons-nous ou on se fera dévorer.

Ce détracteur, à l’instar de Lilian Tintori, Leopoldo Lopez et Henrique Capriles au Venezuela, est responsable d’un grand nombre de marches pour la destitution du gouvernement de Dilma. La situation est semblable à celle de l’Argentine, où les journaux « Clarin » et « la Nacion » ont attaqué le gouvernement de Cristina Kirchner et ont organisé des marches qui ont causé la mort du procureur Nisman.

Face à une telle puissance capitaliste et oligarchique, plusieurs questions me viennent à l’esprit : quand allons-nous enfin être unis ? Quand va-t-on accepter que l’Amérique latine est notre patrie unique et unie, indépendamment de notre pays de naissance, et que nous devons défendre la liberté et la plus-value de nos peuples ? Quand allons-nous nous unir pour ne former qu’un et ainsi mettre un terme à cette fissure qui ne cesse de croître ? Que faut-il de plus que tous les problèmes qui nous accablent pour réagir ?

Faut-il qu’ils nous abattent avec un autre plan condor ? Ou qu’une invasion militaire nous ramène à l’époque des dictatures ? Comment allons-nous nous réveiller ? Comment peut-on justifier que nous laissions ces puissances impérialistes nous dominer ? Où est passée la dignité, l’identité et l’héritage historique de l’Amérique latine ? Nous devons empêcher l’élaboration d’un autre plan condor qui pourrait être un frein au progrès de nos nations. Disons stop au sang versé, stop aux disparitions forcées, stop aux tortures, stop aux génocides, stop aux dictatures. L’Amérique latine a besoin de nous, mais quand allons-nous nous relever et défendre notre patrie ? Que les traîtres soient jugés et punis !

*Ilka Oliva Corado, poétesse et activiste des droits humains, Etats-Unis

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Depuis la fin du XIXesiècle, Porto Rico est une sorte de colonie des États-Unis qui ne dit pas son nom. Officiellement, les quelques îles qui la constituent sont un «territoire non incorporé» ayant un statut de Commonwealth, c’est-à-dire un statut d’État souverain mais au rayon d’action limité. Le système législatif portoricain est ainsi largement influencé par les États-Unis, qui l’ont remodelé à leur sauce. Et ce sont les tribunaux américains qui ont abrogé la loi sur la faillite de l’État, dont disposent pourtant toutes les économies dites développées, y compris les États-Unis. Pourtant, cette loi serait bien utile au gouverneur de ce territoire, qui déclare lui-même que « la dette de Porto Rico est impayable ».D’où vient cette dette ?

par Pierre Gottiniaux*

Le statut ô combien privilégié de Porto Rico lui permet de bénéficier d’une série de mesures extrêmement intéressantes pour sa population, dont des mesures d’exonérations fiscales pour les investisseurs états-uniens ainsi que l’exonération fiscale des intérêts payés sur les titres de la dette portoricaine. Ce qui fait de Puerto Rico une sorte de paradis fiscal , et qui ne voudrait pas vivre au paradis ? Je vous le demande !Par contre, comme Puerto Rico, ce n’est pas non plus tout à fait les États-Unis, les investissements dans des titres de la dette n’y sont pas aussi sûrs. Ils nécessitent donc des taux d’intérêt bien plus élevés, oscillant entre 8 et 10 %. Pour les investisseurs, c’est carrément Byzance ! Imaginez : ils ramassent du 8 % (minimum), net d’impôt et, cerise sur le gâteau, les lois de Puerto Rico stipulent que le paiement des intérêts est prioritaire sur tout autre poste de dépense de l’État ! Les détenteurs de capitaux ne se sont donc pas fait prier pour venir proposer aux gouvernements successifs des milliards de dollars de prêts, les dirigeants trouveront bien quelque chose à en faire... Et ces derniers se sont évidemment empressés d’accepter. Mettez une carotte devant le nez d’un âne, il y a peu de chances pour qu’il vous demande ce que vous voulez en échange...

Dépendance accrue aux marchés

Lorsque la « crise » de 2007 a éclaté, l’État a vu ses recettes fondre, ce qui a provoqué une forte contraction de l’économie et donc une augmentation du déficit.

Puerto Rico a alors dû accroître son niveau de financement sur les marchés, augmentant ainsi sa dépendance à l’endettement.

En 2013, la faillite de la ville de Detroit eut un effet « collatéral » insoupçonné sur Puerto Rico. D’un seul coup, les investisseurs friands de titres de la dette des collectivités publiques états-uniennes ont commencé à s’en détourner, se disant certainement que si l’État commence à s’inquiéter de ses villes surendettées, ce n’est pas bon signe pour les affaires. Puerto Rico a donc commencé à avoir du mal à trouver des acheteurs pour ses titres, et a dû emprunter directement aux banques, à des taux encore plus élevés.

Las, le gouvernement s’est dit : « il y a quelque chose qui cloche dans notre façon de faire, c’est sûr ». Et ça aurait pu être le début d’une réflexion intéressante, mais ils ont finalement voulu jouer l’originalité. Ils en sont venus à se dire que ce niveau insoutenable d’endettement était forcément dû aux dépenses excessives de l’État, comme en Grèce et dans la plupart des pays du monde. Et donc, comme en Grèce et dans la plupart des pays du monde, ils ont mis en place des mesures d’austérité ! Le résultat est foudroyant : environ 60 % des adultes qui sont sans emplois ou n’en cherchent même plus, 45 % de la population qui vit sous le seuil de pauvreté (56 % des enfants sont touchés !), plus de 150 écoles publiques fermées, des inégalités de revenus supérieures à tout autre état américain et une émigration massive passée d’une dizaine de milliers de personnes par an avant 2010 à une moyenne de 48 000 par an entre 2010 et 2014. Et une dette qui continue d’augmenter, comme en Grèce et dans la plupart des pays du monde (surprise !).Maintenant, Puerto Rico se retrouve sous une forte pression de la part de ses créanciers, car les liquidités manquent pour faire face aux prochaines échéances (comme en Gr... Bon, ça va, j’arrête, vous avez compris). La dette portoricaine s’élève désormais à quelques 73 milliards de dollars, dont 18 milliards qui seront à rembourser d’ici 2020 |1 |. Le pays a déjà fait défaut une première fois cet été |2 |, au mois d’août, sur une échéance de 58 millions $. Le 1er décembre, une échéance de 355 millions $ se profile, suivie de près par une autre échéance de 330 millions $ le 1er janvier, et l’agence de notation Moody’s voit déjà un nouveau défaut se profiler |3 |. L’ambiance risque de ne pas être à la fête pour le gouvernement.

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2015 Économie : Porto Rico doit sortir

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2015 Défaut, banqueroute, austérité... Que choisir ?

Le gouverneur, Alejandro Garcia Padilla, demande aux créanciers de restructurer la dette de Puerto Rico, affirmant que, s’il y est obligé, il préférera faire défaut plutôt que de suspendre les services sociaux de base à ses 3,5 millions d’habitants (je sais, ça sonne un peu comme une blague, mais c’est lui qui le dit). Seulement, le petit Puerto Rico, face à ses créanciers, aura intérêt à la jouer bien fine. Attention aux risques de procès de la part de créanciers malintentionnés, notamment les fonds vautours qui sont déjà à la manœuvre |4 | pour racheter des titres portoricains, dans l’anticipation d’une restructuration de laquelle ils tenteront de tirer profit.De son côté, l’administration Obama, dans sa « grande mansuétude », propose que Puerto Rico ait accès au fameux Chapitre 9, qui prévoit la mise en faillite ordonnée d’une collectivité publique états-unienne, la protégeant ainsi de ses créanciers, au même titre que Detroit. En échange, une commission de supervision sera mise en place, pour mettre en œuvre les réformes fiscales dont Puerto Rico « a besoin » pour se sortir de son endettement massif : de nouvelles fermetures d’écoles publiques, des réductions supplémentaires des dépenses de santé, de nouvelles coupes dans les subventions et les salaires publics...

Et s’il y avait une autre voie ?

Le plan d’Obama ne permettra pas le redressement économique de l’île, qui sera étouffée par des mesures d’austérité mortifères, dont l’efficacité n’a jamais été prouvée, bien au contraire. De même, une restructuration qui verrait les officiels de Puerto Rico s’asseoir avec leurs créanciers autour d’une table de négociation n’aurait que fort peu de chance d’aboutir à une issue favorable pour les habitants de l’île. Le seul moyen efficace connu à ce jour, mais (bizarrement ?) fort peu présenté par les médias, est de renverser le rapport de force entre l’île et ses créanciers, en suspendant le paiement de la dette et en lançant un audit intégral de la dette extérieure publique de Puerto Rico, afin de déterminer quelle part de cette dette doit être remboursée, et quelle part peut être déclarée illégitime, illégale, odieuse ou insoutenable et doit être purement et simplement annulée – les taux d’intérêt indécents ou le statut de colonie américaine de l’île sont déjà de sérieuses pistes pour aller dans ce sens.

C’est en partie ce que propose Bernie Sanders, le candidat à l’investiture démocrate qui bouscule quelques peu le jeu politique américain |5 |. Dans une lettre (voir en bas de l’article) écrite au secrétaire du trésor américain, Jacob Lew, Bernie Sanders presse l’administration d’organiser une rencontre entre le gouvernement de Puerto Rico, les principaux créanciers

de l’île, les représentants des fonds de pension qui ont investi dans la dette portoricaine et les syndicats, afin de mettre sur pied un plan de remboursement réaliste et juste. Il s’oppose clairement à plus d’austérité, précisant qu’il est impossible d’extraire du sang de la pierre (it’s impossible to get blood out of a stone). Encore mieux, le candidat démocrate plaide pour un audit de la dette de Puerto Rico préalablement à toute restructuration, précisant simplement que tout prêt conclu en désaccord avec la constitution devrait être mis de côté... Ce qui nous semble évidemment un peu léger, mais de la part d’un élu américain, c’est déjà énorme. Bernie Sanders réclame enfin que Puerto Rico puisse avoir recours à la loi sur la faillite des collectivités publiques, dite Chapitre 9, et que la couverture sociale soit étendue aux habitants de l’île, qui paient les mêmes cotisations que les citoyens américains vivant dans les 50 états fédéraux, mais ne reçoivent en moyenne que la moitié du taux de remboursement, ce que le candidat considère comme une discrimination à l’égard de citoyens américains. Sur ce dernier point, il serait difficile de lui donner tort, mais pour ce qui est du Chapitre 9, on a vu dans le cas de Detroit que celui-ci n’a pas empêché les créanciers d’obtenir de terribles mesures d’austérité. Ce n’est donc pas la bonne solution. La réalisation d’un audit intégral de la dette avec suspension de paiement devrait aboutir à soulager durablement l’économie portoricaine. Si en plus celui-ci s’accompagnait de mesures sociales visant à recréer de l’emploi, améliorer les systèmes de santé et d’éducation, lutter contre la pauvreté et donc contre l’émigration, Puerto Rico aurait vite fait de se défaire du joug de la dette...Les grands médias états-uniens, en bons chiens de garde du capitalisme veillant sur leur sphère d’influence comme sur un troupeau, font planer toutes sortes de menaces des plus effrayantes sur le sort de Puerto Rico. Le New York Times écrit ainsi qu’un défaut de paiement entraînerait probablement l’île, ses créanciers et ses résidents « dans des limbes financiers dont ils pourraient prendre des années à sortir ». De là à dire que Puerto Rico pourrait s’enfoncer dans les océans après avoir subi une tornade abominable, un tsunami d’une ampleur jamais connue de mémoire de pêcheur et une attaque de goélands zombies dévoreurs d’homme, se serait risquer de me faire insulter par le tout Hollywood pour avoir révélé la fin du film avant sa sortie en salle... Malheureusement, croire que le gouvernement empruntera une autre voie que la désormais sacro-sainte austérité, relève tout autant de la pure science-fiction. L’histoire récente l’a montré, sans mobilisation populaire massive, comme en Équateur ou en Islande, pas d’échappatoire aux logiques tordues des créanciers et des gouvernements complices.

*Pierre Gottiniaux, économiste, membre du Comité pour l'annulation de la dette du tiers-monde, France

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A La Havane, une rencontreinattendue et historique

Par Hernando Calvo Ospina*

Le samedi 28 novembre, j’ai interviewé une nouvelle fois Rodrigo Granda, l’un des commandants de l’Etat-Major des FARC qui mène des dialogues de paix avec le gouvernement de Colombie à La Havane. Cette fois, c’était pour parler du rôle de Cuba et du Venezuela dans ce processus. Il a aussi été question de la Norvège et de la France.

A la fin du court entretien, nous l’accompagnons jusqu’à la porte de l’hôtel Palco pour prendre congé. La voiture qui doit l’emmener au Laguito, un quartier proche où toute l’équipe de cette organisation de guérilla est logée, tarde un peu à arriver.

Alors que nous sommes là à attendre, un autre véhicule s’arrête et un homme grand en descend, accompagné de sa femme. Nous l’attendions, mais ni Granda ni le couple n’avaient imaginé se croiser à cet instant. Mais le hasard a voulu que…

Je fais les présentations et Ramón Labañino, l’un des « 5 » héros antiterroristes de Cuba, libéré des geôles étasuniennes le 17 décembre dernier, s’élance vers le guérillero colombien dans une étreinte fraternelle.

« Les Cinq et Cuba, nous sommes avec les dialogues et pour la paix en Colombie », déclare-t-il spontanément à Granda.

L’échange ne dure même pas cinq minutes. C’est la première fois que l’un des Cinq rencontre l’un des six commandants de l’Etat-Major des FARC.

* Journaliste et écrivain colombien résidant en France. Collaborateur du Monde Diplomatique.

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photo : Albino Moldes

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L’équipe de Latin America Solidarity Trade, LAST, et son projet Cerveza Bolivariana vous sont reconnaissants pour votre appui à la concrétisation de ce projet fondé sur la solidarité avec les organisations paysannes d’Amérique latine et des Caraïbes. Sachez que vous êtes aussi les artisans et les gestionnaires de cette initiative devenue réalité; sans vous, nous aurions eu des difficultés à atteindre nos objectifs.

Nous vous sommes infiniment reconnaissants de votre confiance et de votre soutien pour continuer à avancer. Aujourd’hui, 17 décembre, anniversaire de la mort de Simón Bolívar, LAST fête le premier anniversaire de sa fondation et Cerveza Bolivariana sa première année d’existence comme produit solidaire en Europe. Ces 12 mois d’existence nous ont appris à cheminer et à réaffirmer notre conception qui veut que l’on avance lorsqu’on est accompagné, lorsqu'il y a de la confiance, confiance que nous avons perçue dans chaque bière que vous avez achetée.

Nous souhaitons continuer à aller de l’avant, vous êtes importants pour notre organisation, pour les paysans de notre Amérique et leurs luttes pour la défense d’une vie digne sur la planète, pour la souveraineté alimentaire, les sources d’eau, les bois et les forêts, qui sont aussi la lutte pour la défense de l’humanité tout entière.

Nous vous adressons nos meilleurs vœux, nous espérons que l’année que nous laissons peu à peu derrière nous vous aura offert une récolte fructueuse et que celle qui vient vous ouvrira un horizon vaste et généreux où chacun d’entre vous pourra trouver la joie de voir un monde plus juste, où des milliers de mains s’uniront pour vaincre l’indifférence et la peur.

Mille mercis pour votre solidarité !

Joyeuses fêtes et une nouvelle année pleine de beaux projets.

http://www.cervezabolivariana.com/

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Le Journal de Notre AmériqueN°9 - Décembre 2015

Directeur de publication : Michel Collon

Rédacteur en chef : Alex Anfruns

Rédacteur en chef adjoint : Tarik Bouafia

Rédaction: Alex Anfruns, Tarik Bouafia, Pablo Gandolfo

Traductions: Muhammet Asa, Sarah Brasseur, Manuel Colinas

Corrections: Sarah Vergote, Elisabeth Beague

Photomontage, mise en page : Baf.f. !, Michèle Janss

----Diffusion gratuite----

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