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a L’hiver des sans-abri Les structures d’accueil actuelles et la multiplication des SAMU sociaux en province permettent de prendre en charge correctement les exclus durant l’hiver. p. 8 a Les évêques et l’immigration Après une semaine de débats, l’assem- blée plénière de Lourdes souhaite un changement d’orientation fort de la politique d’immigration et lance un ap- pel à « vivre ensemble ». p. 9 a Le congrès de Brest La Gauche socialiste, qui présente une motion au congrès du PS, devrait faire un score autour de 10 %. p. 6 a Un entretien avec Adam Michnik Le directeur du principal quotidien polonais, Gazeta, ancien dirigeant du mouvement syndical Solidarnosc, prône la réconciliation entre la droite et les post-communistes pour solidifier la démocratie en Pologne. p. 11 a La finance belge en ébullition Le groupe financier néerlandais ING s’apprêterait à prendre le contrôle de la Banque Bruxelles Lambert. 20 a Mouvement préfectoral Le conseil des ministres a procédé à plusieurs nominations, dont celle de Jean Dussourd comme directeur de la sécurité civile et de la défense, ces deux directions du ministère de l’inté- rieur devant fusionner. p. 7 a Cinéma, l’enjeu chinois Pékin a décidé de sanctionner les stu- dios (Sony, Disney, MGM) produisant des films pro-tibétains, alors que Hollywood s’apprête à conquérir l’im- mense marché cinématographique chinois. p. 27 a L’habitat « bio » Le 23 e Salon Marjolaine, au Parc floral de Paris, met l’accent sur une vision « naturelle » de la maison. p. 23 a Vin en stock Comment conserver ses bonnes bou- teilles lorsque l’on ne possède pas une vraie cave. p. 26 CINQUANTE-TROISIÈME ANNÉE – N o 16419 – 7,50 F FONDATEUR : HUBERT BEUVE-MÉRY – DIRECTEUR : JEAN-MARIE COLOMBANI MARDI 11 NOVEMBRE 1997 Allemagne, 3 DM ; Antilles-Guyane, 9 F ; Autriche, 25 ATS ; Belgique, 45 FB ; Canada, 2,25 $ CAN ; Côte-d’Ivoire, 850 F CFA ; Danemark, 15 KRD ; Espagne, 225 PTA ; Grande-Bretagne, 1 £ ; Grèce, 450 DR ; Irlande, 1,40 £ ; Italie, 2900 L ; Luxembourg, 46 FL ; Maroc, 10 DH ; Norvège, 14 KRN ; Pays-Bas, 3 FL ; Portugal CON., 250 PTE ; Réunion, 9 F ; Sénégal, 850 F CFA ; Suède, 16 KRS ; Suisse, 2,10 FS; Tunisie, 1,2 Din ; USA (NY), 2 $ ; USA (others), 2,50 $. Un problème européen ? INVESTISSEMENT TOTAL 79 1982 1985 1988 1991 1994 1997 JAPON ÉTATS- UNIS EUROPE LE MONDE ÉCONOMIE a Les mystères de l’investissement (pages 15 à 19) International ............. 2 France .......................... 6 Société ......................... 8 Horizons ...................... 10 Entreprises ................. 20 Annonces classées.... 21 Communication ........ 21 Carnet .......................... 22 Aujourd’hui ................ 23 Jeux ............................... 26 Météorologie............. 26 Culture......................... 27 Guide ............................ 29 Abonnements ............ 30 Kiosque........................ 30 Radio-Télévision ....... 31 Generali contre AGF, l’OPA qui oblige à réfléchir FAUT-IL tresser des lauriers à François Pinault ou le maudire ? En lançant, le 19 septembre, une offre publique d’achat sur Worms et Cie, l’industriel français a enclenché un mécanisme qui risque fort d’abou- tir au transfert du contrôle de l’un des plus importants investisseurs institutionnels français, les AGF, à un groupe étranger. Les plus conservateurs voueront peut-être l’ami de Jacques Chirac aux gémo- nies. Ils auront tort. Le geste initial de M. Pinault qui, de contre-OPA en surenchère, a provoqué le raid de l’assureur Generali sur les AGF a projeté toute la communauté fi- nancière et politique devant de brutales mais salutaires réalités. Et entraîné une nécessaire réflexion. La mondialisation, la globalisation, jusqu’à présent c’était pour les marchés, les flux de capitaux qui traversent la planète à la vitesse de la lumière pour aller se porter là où ils seront le mieux rémunérés. Et si les non-résidents détiennent quel- que 40 % du capital des entreprises françaises, il s’agit de participa- tions émiettées, qui n’atteignent jamais, individuellement, la mino- rité de blocage et ne modifient pas les centres de décision. Elles poussent au contraire, sous l’in- fluence des fonds anglo-saxons, à la mise en place du gouvernement d’entreprise et à l’abandon de pra- tiques monarchiques. L’opération-éclair lancée par Generali brise un tabou. Personne n’avait jusqu’à présent osé lancer une opération, étrangère, hostile, sur la totalité du capital d’un groupe financier. La manière peut choquer. Elle n’est pas surpre- nante. Antoine Bernheim, patron de Generali, est français et associé- gérant de la banque d’affaires La- zard. Nul mieux que lui ne connaît les faiblesses du capitalisme fran- çais, au lendemain de l’éclatement des participations croisées et des noyaux durs qui protégeaient les entreprises de toute attaque. Plus cocasse : il a concocté son affaire avec son principal actionnaire, la banque d’affaires italienne Medio- banca, dont le fondateur, Enrico Cuccia, a passé sa vie à défendre l’idée de groupes nationaux forts mais n’a visiblement pas la même philosophie lorsqu’il s’agit des pays voisins. Babette Stern Lire la suite page 14 Le Festival des Inrock IL NE FAUT PAS se laisser abu- ser par la silhouette fragile de Lau- ren Hoffman. Cette chanteuse et guitariste américaine a le don des contrastes, alternant murmures sensuels et blues rageur. Elle a été l’une des révélations du dixième Festival des Inrockuptibles qui a confirmé la fraîcheur du rock scandinave et apporté son lot de découvertes, comme celle de Mogwai, quatre Ecossais élec- triques. Lire page 29 LAUREN HOFFMAN La grande forme du rugby français a À L’AUNE européenne, les rugbymen français sont en pleine forme : trois clubs, Brive, Toulouse et Pau, se sont qualifiés, samedi 8 et dimanche 9 novembre, pour les demi-finales de la Coupe d’Europe, en éliminant respective- ment les Wasps, les Harlequins et Leicester. Le dernier club anglais en lice, Bath, aura donc du mal à em- pêcher le trophée de rester en France, pour la troisième année consécutive. Les perspectives sont plus rudes pour la sélection natio- nale de Jean-Claude Skrela, qui va disputer deux test-matchs contre les Springboks sud-africains, à Lyon puis à Paris, les 15 et 22 novembre. Lire page 24 Mobilisation en France pour le peuple algérien Interrogations sur l’origine des attentats de Paris Les anciens nouveaux riches de Bangkok bradent leurs limousines BANGKOK de notre correspondant L’adresse est précieuse : Sukhumvit Soi 55, à Bangkok. Derrière la façade d’un ancien centre d’exposition d’un concessionnaire de la marque Mercedes-Benz se tient désormais le « marché pour les anciens riches ». C’est l’en- droit où, à cours d’argent liquide, des riches bradent, le week-end, une partie de leurs col- lections de limousines, de vins rares, de montres, de bijoux ou de pierres précieuses. On y a même exposé un petit avion monomo- teur de cinq places, qui, après une centaine d’heures de vol seulement, a été revendu à moitié prix. La fête est terminée pour certains nouveaux riches thaïlandais avec l’effondrement du baht, la monnaie nationale, qui a perdu 40 % de sa valeur par rapport au dollar, et la menace d’une récession. En dépit de la rentrée des classes, cauchemar annuel des automobilistes, on circule mieux à Bangkok. En dehors de la capitale, les autoroutes fraîchement construites ne connaissent plus leurs embou- teillages traditionnels de poids lourds. En quelques mois, la crise a réglé des problèmes de circulation que l’on croyait insolubles. Les anciens nouveaux riches, comme on les appelle aujourd’hui, ne sont pas les plus à plaindre. Certains ne font qu’entamer leurs bas de laine. Les grues à l’arrêt signalent des chantiers suspendus un peu partout, et le pré- sident de la Confédération nationale des em- ployeurs du commerce et de l’industrie estime à trois cent mille, d’ici à la fin de l’année, le nombre des employés supplémentaires qui se- ront mis au chômage. Trois constructeurs au- tomobiles, Nissan, Isuzu et Toyota, ont ainsi provisoirement arrêté leur production, ce qui affecte également des dizaines de milliers de personnes salariées par des sous-traitants. Les ventes de voitures ont chuté de 38 % dès le mois d’août. Alors que les anciens riches lorgnent sur des limousines d’occasion qu’ils n’auraient jamais pu s’offrir neuves, des parents sacrifient tout pour continuer à payer les études de leurs en- fants à l’étranger. Mais plus de sept cents éco- liers thaïlandais en Grande-Bretagne ont dé- posé leurs candidatures auprès d’écoles internationales installées en Thaïlande, ce qui est nettement moins onéreux. Des chasseurs internationaux de bonnes af- faires commencent à prospecter les banques, hôtels, sociétés financières, télécommunica- tions. La Thaïlande, seul pays de la région qui n’a jamais été colonisé, s’y fait mal. Sans se ré- volter, les Thaïlandais veulent tenir le coup jusqu’à ce que leur économie se redresse. Il leur faudra, pensent-ils, deux ou trois ans. Leur traditionnel sourire cache mal un soup- çon d’angoisse. Au « marché des anciens riches », un homme d’affaires jeune déclare qu’il ne se séparera pas des trois symboles de son statut social : Mercedes, Rolex et télé- phone portable. Sa crédibilité, dit-il, est en jeu. Jean-Claude Pomonti Saddam Hussein prépare l’Irak à un affrontement avec l’ONU Les Américains ont repris leurs vols de surveillance L’IRAK n’ayant pas donné le moindre signe de fléchissement quant à son refus de coopérer avec les inspecteurs américains de la Commission chargée de son désar- mement (Unscom), la réaction du Conseil de sécurité de l’ONU devait être « ferme et sans ambiguïté », ainsi que l’a réclamé le président améri- cain, Bill Clinton. Le Conseil devait se réunir lundi 10 novembre. En at- tendant, le président irakien, Sad- dam Hussein, a préparé son pays au pire, affirmant que les promesses qui lui avaient été faites n’ont pas été te- nues. Dans un entretien au Monde, le chef de l’Unscom, Richard Butler, affirme que les experts ont fait des « progrès substantiels » et que c’est surtout dans le domaine des armes biologiques que l’Irak demeure sus- pect. Il indique aussi avoir obtenu la garantie que l’embargo imposé à Bagdad sera levé une fois que l’Irak aura été désarmé. A Paris, le vice-premier ministre irakien, Tarek Aziz, a été reçu, lundi, par Hubert Védrine qui lui a rappelé « le caractère inacceptable des me- sures prises par l’Irak ». Lire page 2 A L’APPEL de syndicats, d’asso- ciations et d’un groupe d’artistes, de nombreuses manifestations de solidarité avec la population algé- rienne devaient avoir lieu, lundi 10 novembre, dans plusieurs grandes villes de France. Les orga- nisateurs de ce mouvement – « Un jour pour l’Algérie » – assurent qu’il s’agira de la plus importante mobilisation en France depuis le début des affrontements en Algé- rie qui ont fait des dizaines de mil- liers de morts. « Depuis maintenant près de cinq années, l’Algérie vit une innom- mable tragédie » et « la commu- nauté internationale est restée inerte devant les massacres», écrivent les organisateurs. Ils in- diquent avoir le soutien de nom- breux artistes (Khaled, Isabelle Adjani, Gérard Depardieu, Charles Aznavour, Guy Bedos, MC Solaar, Miou Miou, Bertrand Tavernier) et d’intellectuels (Mohamed Dib, Benjamin Stora, Alain Touraine, Jacques Attali, Tahar Ben Jelloun). A Paris, une retraite aux flam- beaux devait partir de la gare de l’Est pour gagner La Villette. Là, Isabelle Adjani devait lire un texte dans lequel elle déclare notam- ment : « A l’heure où un peuple tout entier, le peuple algérien, ne sait plus à qui faire confiance, ne sait plus où trouver refuge, c’est à nous d’être là. La solidarité mondiale, c’est de regarder les Algériens et les Algériennes comme nos frères et sœurs. » Cette journée de manifestations a lieu alors que deux Algériens se présentant comme des officiers supérieurs des services de sécurité se sont confiés à la presse, l’un au Monde, l’autre à l’hebdomadaire britannique The Observer, pour im- pliquer Alger dans au moins deux des attentats perpétrés dans le métro parisien au cours de l’été 1995. Dans un communiqué, le mi- nistère français de l’intérieur dé- clare que les affirmations de The Observer «appellent les plus grandes réserves ». Le communi- qué rappelle que la plupart des au- teurs des attentats ont été arrêtés. Lire page 3 Retour sur un massacre page 10 Le point de vue d’Alain Joxe page 12 Notre éditorial page 14

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LeMonde Job: WMQ1111--0001-0 WAS LMQ1111-1 Op.: XX Rev.: 10-11-97 T.: 11:00 S.: 111,06-Cmp.:10,11, Base : LMQPAG 21Fap:99 No:0216 Lcp: 196 CMYK

CINQUANTE-TROISIÈME ANNÉE – No 16419 – 7,50 F FONDATEUR : HUBERT BEUVE-MÉRY – DIRECTEUR : JEAN-MARIE COLOMBANIMARDI 11 NOVEMBRE 1997

Espagne, 225 PTA ; Grande-Bretagne, 1 £ ; Grèce,450 DR ; Irlande, 1,40 £ ; Italie, 2900 L ; Luxembourg,46 FL ; Maroc, 10 DH ; Norvège, 14 KRN ; Pays-Bas,3 FL ; Portugal CON., 250 PTE ; Réunion, 9 F ;Sénégal, 850 F CFA ; Suède, 16 KRS ; Suisse, 2,10 FS ;Tunisie, 1,2 Din ; USA (NY), 2 $ ; USA (others), 2,50 $.

Un problème européen ?

INVESTISSEMENT TOTAL

7919

8219

8519

8819

9119

9419

97

JAPON

ÉTATS- UNIS

EUROPE

LE MONDE ÉCONOMIE

a Les mystèresde l’investissement(pages 15 à 19)

Mobilisation en Francepour le peuple algérien

Interrogations sur l’origine des attentats de Paris

ssein prépare l’Iraktement avec l’ONUt repris leurs vols de surveillance

A L’APPEL de syndicats, d’asso-ciations et d’un groupe d’artistes,

dans lequel elle déclare notam-ment : « A l’heure où un peuple tout

quant à son refus de coopérer avecles inspecteurs américains de laCommission chargée de son désar-mement (Unscom), la réaction duConseil de sécurité de l’ONU devaitêtre « ferme et sans ambiguïté », ainsique l’a réclamé le président améri-cain, Bill Clinton. Le Conseil devaitse réunir lundi 10 novembre. En at-tendant, le président irakien, Sad-dam Hussein, a préparé son pays aupire, affirmant que les promesses quilui avaient été faites n’ont pas été te-nues. Dans un entretien au Monde,le chef de l’Unscom, Richard Butler,affirme que les experts ont fait des« progrès substantiels » et que c’estsurtout dans le domaine des armesbiologiques que l’Irak demeure sus-pect. Il indique aussi avoir obtenu lagarantie que l’embargo imposé àBagdad sera levé une fois que l’Irakaura été désarmé.

A Paris, le vice-premier ministreirakien, Tarek Aziz, a été reçu, lundi,par Hubert Védrine qui lui a rappelé« le caractère inacceptable des me-sures prises par l’Irak ».

Lire page 2

re AGF, l’OPA qui oblige oupe étranger. Les plus

rvateurs voueront peut-êtrebrutales mais salutaires réalités. Etentraîné une nécessaire réflexion.

veaux riches de Bangkok bradent leursconstruites ne connaissent plus leurs embou-teillages traditionnels de poids lourds. En

pour continfants à l’étr

de nombreuses manifestations desolidarité avec la population algé-rienne devaient avoir lieu, lundi10 novembre, dans plusieursgrandes villes de France. Les orga-nisateurs de ce mouvement – « Unjour pour l’Algérie » – assurentqu’il s’agira de la plus importantemobilisation en France depuis ledébut des affrontements en Algé-rie qui ont fait des dizaines de mil-liers de morts.

« Depuis maintenant près de cinqannées, l’Algérie vit une innom-mable tragédie » et « la commu-nauté internationale est restéeinerte devant les massacres »,écrivent les organisateurs. Ils in-diquent avoir le soutien de nom-breux artistes (Khaled, IsabelleAdjani, Gérard Depardieu, CharlesAznavour, Guy Bedos, MC Solaar,Miou Miou, Bertrand Tavernier) etd’intellectuels (Mohamed Dib,Benjamin Stora, Alain Touraine,Jacques Attali, Tahar Ben Jelloun).

A Paris, une retraite aux flam-beaux devait partir de la gare del’Est pour gagner La Villette. Là,Isabelle Adjani devait lire un texte

à réfléchirque 40 % du capital des entreprisesfrançaises, il s’agit de participa-

limousinesuer à payer les études de leurs en-

anger. Mais plus de sept cents éco-

entier, le peuple algérien, ne saitplus à qui faire confiance, ne saitplus où trouver refuge, c’est à nousd’être là. La solidarité mondiale,c’est de regarder les Algériens et lesAlgériennes comme nos frères etsœurs. »

Cette journée de manifestationsa lieu alors que deux Algériens seprésentant comme des officierssupérieurs des services de sécuritése sont confiés à la presse, l’un auMonde, l’autre à l’hebdomadairebritannique The Observer, pour im-pliquer Alger dans au moins deuxdes attentats perpétrés dans lemétro parisien au cours de l’été1995. Dans un communiqué, le mi-nistère français de l’intérieur dé-clare que les affirmations de TheObserver « appellent les plusgrandes réserves ». Le communi-qué rappelle que la plupart des au-teurs des attentats ont été arrêtés.

Lire page 3Retour sur un massacre page 10

Le point de vued’Alain Joxe page 12

Notre éditorial page 14

La grande formedu rugby françaisa À L’AUNE européenne, les

rugbymen français sont en

L’adresse est précieuse : Sukhumvit Soi 55,à Bangkok. Derrière la façade d’un anciencentre d’exposition d’un concessionnaire de lamarque Mercedes-Benz se tient désormais le« marché pour les anciens riches ». C’est l’en-droit où, à cours d’argent liquide, des richesbradent, le week-end, une partie de leurs col-lections de limousines, de vins rares, demontres, de bijoux ou de pierres précieuses.On y a même exposé un petit avion monomo-teur de cinq places, qui, après une centained’heures de vol seulement, a été revendu àmoitié prix.

La fête est terminée pour certains nouveauxriches thaïlandais avec l’effondrement dubaht, la monnaie nationale, qui a perdu 40 %de sa valeur par rapport au dollar, et la menaced’une récession. En dépit de la rentrée desclasses, cauchemar annuel des automobilistes,on circule mieux à Bangkok. En dehors de lacapitale, les autoroutes fraîchement

quelques mois, la crise a réglé des problèmesde circulation que l’on croyait insolubles.

Les anciens nouveaux riches, comme on lesappelle aujourd’hui, ne sont pas les plus àplaindre. Certains ne font qu’entamer leursbas de laine. Les grues à l’arrêt signalent deschantiers suspendus un peu partout, et le pré-sident de la Confédération nationale des em-ployeurs du commerce et de l’industrie estimeà trois cent mille, d’ici à la fin de l’année, lenombre des employés supplémentaires qui se-ront mis au chômage. Trois constructeurs au-tomobiles, Nissan, Isuzu et Toyota, ont ainsiprovisoirement arrêté leur production, ce quiaffecte également des dizaines de milliers depersonnes salariées par des sous-traitants. Lesventes de voitures ont chuté de 38 % dès lemois d’août.

Alors que les anciens riches lorgnent sur deslimousines d’occasion qu’ils n’auraient jamaispu s’offrir neuves, des parents sacrifient tout

liers thaïlandais en Grande-Bretagne ont dé-posé leurs candidatures auprès d’écolesinternationales installées en Thaïlande, ce quiest nettement moins onéreux.

Des chasseurs internationaux de bonnes af-faires commencent à prospecter les banques,hôtels, sociétés financières, télécommunica-tions. La Thaïlande, seul pays de la région quin’a jamais été colonisé, s’y fait mal. Sans se ré-volter, les Thaïlandais veulent tenir le coupjusqu’à ce que leur économie se redresse. Illeur faudra, pensent-ils, deux ou trois ans.Leur traditionnel sourire cache mal un soup-çon d’angoisse. Au « marché des anciensriches », un homme d’affaires jeune déclarequ’il ne se séparera pas des trois symboles deson statut social : Mercedes, Rolex et télé-phone portable. Sa crédibilité, dit-il, esten jeu.

Jean-Claude Pomonti

pleine forme : trois clubs, Brive,Toulouse et Pau, se sont qualifiés,samedi 8 et dimanche 9 novembre,pour les demi-finales de la Couped’Europe, en éliminant respective-ment les Wasps, les Harlequins etLeicester. Le dernier club anglais enlice, Bath, aura donc du mal à em-pêcher le trophée de rester enFrance, pour la troisième annéeconsécutive. Les perspectives sontplus rudes pour la sélection natio-nale de Jean-Claude Skrela, qui vadisputer deux test-matchs contreles Springboks sud-africains, à Lyonpuis à Paris, les 15 et 22 novembre.

Lire page 24

Le Festivaldes Inrock

lançant, le 19 septembre, une offrepublique d’achat sur Worms et Cie,l’industriel français a enclenché unmécanisme qui risque fort d’abou-tir au transfert du contrôle de l’undes plus importants investisseursinstitutionnels français, les AGF, à

l’ami de Jacques Chirac aux gémo-nies. Ils auront tort. Le geste initialde M. Pinault qui, de contre-OPAen surenchère, a provoqué le raidde l’assureur Generali sur les AGF aprojeté toute la communauté fi-nancière et politique devant de

La mondialisation, la globalisation,jusqu’à présent c’était pour lesmarchés, les flux de capitaux quitraversent la planète à la vitesse dela lumière pour aller se porter là oùils seront le mieux rémunérés. Et siles non-résidents détiennent quel-

France .......................... 6Société ......................... 8Horizons ...................... 10Entreprises ................. 20Annonces classées.... 21Communication ........ 21Carnet .......................... 22

Jeux ............................... 26Météorologie............. 26Culture......................... 27Guide ............................ 29Abonnements ............ 30Kiosque........................ 30Radio-Télévision ....... 31

IL NE FAUT PAS se laisser abu-ser par la silhouette fragile de Lau-

LAUREN HOFFMAN

tions émiettées, qui n’atteignentjamais, individuellement, la mino-rité de blocage et ne modifient pasles centres de décision. Ellespoussent au contraire, sous l’in-fluence des fonds anglo-saxons, àla mise en place du gouvernementd’entreprise et à l’abandon de pra-tiques monarchiques.

L’opération-éclair lancée parGenerali brise un tabou. Personnen’avait jusqu’à présent osé lancerune opération, étrangère, hostile,sur la totalité du capital d’ungroupe financier. La manière peutchoquer. Elle n’est pas surpre-nante. Antoine Bernheim, patronde Generali, est français et associé-gérant de la banque d’affaires La-zard. Nul mieux que lui ne connaîtles faiblesses du capitalisme fran-çais, au lendemain de l’éclatementdes participations croisées et desnoyaux durs qui protégeaient lesentreprises de toute attaque. Pluscocasse : il a concocté son affaireavec son principal actionnaire, labanque d’affaires italienne Medio-banca, dont le fondateur, EnricoCuccia, a passé sa vie à défendrel’idée de groupes nationaux fortsmais n’a visiblement pas la mêmephilosophie lorsqu’il s’agit despays voisins.

Babette Stern

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International ............. 2 Aujourd’hui ................ 23

ren Hoffman. Cette chanteuse etguitariste américaine a le don descontrastes, alternant murmuressensuels et blues rageur. Elle a étél’une des révélations du dixièmeFestival des Inrockuptibles qui aconfirmé la fraîcheur du rockscandinave et apporté son lot dedécouvertes, comme celle deMogwai, quatre Ecossais élec-triques.

Lire page 29

a L’hiverdes sans-abriLes structures d’accueil actuelles et lamultiplication des SAMU sociaux enprovince permettent de prendre encharge correctement les exclus durantl’hiver. p. 8

a Les évêqueset l’immigrationAprès une semaine de débats, l’assem-blée plénière de Lourdes souhaite unchangement d’orientation fort de lapolitique d’immigration et lance un ap-pel à « vivre ensemble ». p. 9

a Le congrès de BrestLa Gauche socialiste, qui présente unemotion au congrès du PS, devrait faireun score autour de 10 %. p. 6

Saddam Huà un affron

Les Américains onL’IRAK n’ayant pas donné le

moindre signe de fléchissement

a Un entretienavec Adam Michnik

Le directeur du principal quotidienpolonais, Gazeta, ancien dirigeant dumouvement syndical Solidarnosc,prône la réconciliation entre la droiteet les post-communistes pour solidifierla démocratie en Pologne. p. 11

a La finance belgeen ébullitionLe groupe financier néerlandais INGs’apprêterait à prendre le contrôle dela Banque Bruxelles Lambert. 20

a Mouvement

Les anciens nouBANGKOK

de notre correspondant

préfectoralLe conseil des ministres a procédé àplusieurs nominations, dont celle deJean Dussourd comme directeur de lasécurité civile et de la défense, cesdeux directions du ministère de l’inté-rieur devant fusionner. p. 7

a Cinéma,l’enjeu chinoisPékin a décidé de sanctionner les stu-dios (Sony, Disney, MGM) produisantdes films pro-tibétains, alors queHollywood s’apprête à conquérir l’im-mense marché cinématographiquechinois. p. 27

a L’habitat « bio »Le 23e Salon Marjolaine, au Parc floralde Paris, met l’accent sur une vision« naturelle » de la maison. p. 23

a Vin en stockComment conserver ses bonnes bou-teilles lorsque l’on ne possède pas unevraie cave. p. 26

Allemagne, 3 DM ; Antilles-Guyane, 9 F ; Autriche,25 ATS ; Belgique, 45 FB ; Canada, 2,25 $ CAN ;Côte-d’Ivoire, 850 F CFA ; Danemark, 15 KRD ;

Generali contFAUT-IL tresser des lauriers à

François Pinault ou le maudire ? Enun grconse

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I N T E R N A T I O N A LLE MONDE / MARDI 11 NOVEMBRE 1997

Des inspecteurs « agressifs », selon BagdadS’il est vrai que les programmes d’armement et le savoir-faire de

l’Irak en la matière justifient une vigilance ininterrompue, ils nepeuvent expliquer la manière dont se comportent les inspecteurs dela Commission de l’ONU chargée du désarmement de l’Irak (Uns-com), a indiqué au Monde une source diplomatique à Bagdad. Cesinspections ont été décrites, par la même source, comme étant« parfois fortement intrusives » et le langage des inspecteurs, « trèsagressif » et « dédaigneux » vis-à-vis des Irakiens. On reproche demême source à Richard Butler, le chef de l’Unscom, de multiplier lesdéclarations intempestives – notamment à l’occasion de la criseactuelle entre l’Irak et l’ONU –, qui ne font qu’aggraver la tension.Son prédécesseur, Rolf Ekeus, selon la même source, a su davantagerésister aux pressions tant de Washington que de Bagdad.

Richard Butler, chef de l’Unscom, Commission de l’ONU chargée de désarmer l’Irak

« Les Américains m’ont assuré que le feu vert de la Commission de l’ONU suffirait à lever l’embargo »NEW YORK

(Nations unies)de notre correspondante

« Comment analysez-vouscette nouvelle crise avec l’Irak ?

– Il existe une contradiction fon-damentale dans la politique ira-kienne. L’objectif de Bagdad est lalevée des sanctions économiques,mais les responsables irakiensveulent, en même temps, garderleurs armes de destruction massive,et cela est impossible. Avec cettecrise, l’Irak entend changer le statuquo de ses relations avec l’ONU ouse débarrasser complètement desinspecteurs de l’Unscom [Commis-sion des Nations unies chargée dudésarmement de l’Irak]. Mais, àmon avis, nos inspecteurs étaientsur le point de trouver du matérielque les Irakiens veulent à tout prixcacher. Ils ont donc décidé de nousen empêcher.

– Quel type d’armementveulent-ils garder ?

– Leur premier choix est l’armebiologique. Il y a quelques années,leur but était de garder des pro-grammes nucléaires, mais ils ontété presque entièrement détruits.Cela dit, sans le système de surveil-lance à long terme de l’ONU,il est concevable que Bagdadpuisse poursuivre ses ambitionsnucléaires.

– En refusant de coopérer avecl’Unscom, l’Irak a déjà perdu plusde 100 milliards de dollars (prèsde 600 milliards de francs) derevenus pétroliers, n’aurait-il paspu reconstruire son arsenal aprèsla levée de l’embargo pétrolier ?

– C’est la question que tout lemonde se pose. Mais, comme vousle voyez, ils sont prêts à perdre cesmilliards de dollars pour gardercertaines armes. Il faut tout de

même noter que nous avons unsystème de contrôle à long termequi continuera, même après ledépart de l’Unscom, à veiller surl’industrie d’armement de l’Irak.

– Il sera donc impossible pourl’Irak de recréer des programmesd’armement ?

– Rien n’est absolu dans ledomaine du désarmement, mais il[leur] sera beaucoup plus difficilede relancer des programmesd’armement de destruction mas-sive sans être détectés.

– Selon votre prédécesseur,Rolf Ekeus, Badgad se considèrecomme « le gardien du Golfe per-sique » contre l’ennemi iranien,et c’est pour cela qu’il refused’être désarmé. Est-ce aussi votreanalyse ?

– Il est vrai que Bagdad est trèsconscient des menaces réelles ouimaginaires de la part de Téhéran,et c’est en effet en ces termes queses dirigeants justifient leurcomportement. Personne n’ajamais nié à l’Irak le droit de sedéfendre – ce droit lui est garantipar la charte de l’ONU –, mais pasavec des armes de destruction mas-sive. Ces armes font peur à justetitre aux pays de la région quiveulent, eux aussi, en avoir.

– En dépit de sept ans de désar-mement, l’Irak est donc toujourscapable de se défendre en casd’agression ?

– A mon avis, oui, mais si vousposez la même question aux Ira-kiens, ils vous diront le contraire.Pour eux, le fait de posséder oud’être perçus comme étant en pos-session d’armes biologiques ouchimiques est une garantie contretoute agression.

– Les responsables irakiens ontune série de griefs contre l’Uns-com, y a-t-il du vrai dans ce qu’ilsvous reprochent ?

– Ils disent que l’ONU est utiliséepar les Américains, que noussommes l’instrument de Washing-ton, cela est complètementinfondé. C’est faux. Il est toutefoisvrai que ce processus de désarme-

ment a duré beaucoup trop long-temps. Mais il n’y a qu’une seuleraison à cela : l’Irak a, depuis le pre-mier jour, refusé de dire la vérité àl’Unscom. En créant la commissionspéciale, en avril 1991, le Conseil desécurité a demandé à Bagdad dedire toute la vérité en quinze jours.Presque sept ans plus tard, lesexperts disent à l’unanimité que lesinformations fournies par Bagdad,surtout sur les armes biologiques,ne sont pas absolument crédibles.Que voulez-vous que l’on fasse,que l’on oublie qu’il existe toujoursen Irak des armes horribles,capables de tuer des millions depersonnes ?

– Ils sont aussi persuadés quela décision politique de ne jamaislever les sanctions aussi long-temps que Saddam Hussein seraau pouvoir a déjà été prise àWashington.

– Si c’était le cas, je n’auraisjamais accepté ce travail. Avantd’accepter ce poste, je suis allé àWashington, Paris, Moscou etLondres pour, justement, posercette question. Puisque vous meparlez de Washington, je vais vousdire que les Américains m’ontassuré que le feu vert de l’Unscomsur le désarmement de l’Irak suffi-rait pour que l’embargo soit levé. Jerépète que, sans cette garantie, jen’aurais jamais accepté ce poste.

– Où en est le désarmement del’Irak aujourd’hui ?

– Nous avons fait des progrèssubstantiels. Hormis le volet bio-logique, on peut presque se fier ausystème de surveillance à longterme.

– Paris et Moscou estiment queles dossiers de l’Unscomdevraient être conclus un par un.Pourriez-vous, par exemple, fer-mer le dossier sur les missilesbalistiques ?

– Oui : je le dis dans mon dernierrapport, ce qui reste à faire sur cedossier est négligeable. Je dis quece dossier est clos. Mais, évidem-ment, l’embargo ne peut pas êtrelevé avant que tous les dossierssoient fermés.

– Sans missiles, l’Irak peut-ilencore se servir de ses armes bio-logiques ?

– Bien sûr, ces armes n’ont pas

besoin de missiles sophistiqués. Ilsuffit que le vent souffle dans labonne direction pour que des mil-lions de gens soient affectés.

– On dit que vous êtes publi-quement trop agressif ?

– C’est l’Irak qui a violé les règlesen disant que les Américains nepeuvent plus participer à l’Unscom.Que suis-je censé dire ? (...) Je n’airien contre l’Irak, je veux finir montravail, voir la levée de l’embargo etpermettre à la population irakienne

de vivre normalement. J’ai apprisque dans la culture politique ira-kienne, il est normal de personnali-ser des arguments, ce n’est pasdans ma culture. (...) Il est quandmême extraordinaire que dansleurs lettres au Conseil de sécurité,les Irakiens nomment certains ins-pecteurs qui ne leur plaisent pas.

– On a dit, par exemple, quevous étiez la première personneà avoir employé l’expression« violation flagrante », qui signifiela nécessité de recourir à laforce ?

– Pour moi, cette phrase ne vou-lait pas nécessairement dire lerecours à la force.

– Pensez-vous qu’une actionmilitaire est désormais néces-saire pour obliger l’Irak à revenirsur sa décision ?

– Evidemment non, je ne veuxpas voir une action militaire.

– L’argument de Bagdadsemble être : puisque les sanc-tions ne seront de toute façonpas levées, autant se débarrasserdes inspections intrusives del’ONU. Craignez-vous que l’Irakdécide de rompre toute relationavec l’Unscom ?

– Je ne crois pas que cela puissearriver.

– Mais si la force est utiliséecontre l’Irak, la première choseque Bagdad ferait serait de vousjeter dehors.

– Je ne crois pas que la force serautilisée.

– Les Américains subissent uneénorme pression de leur opinionpublique pour régler le problèmepar la force.

– Peut-être, mais je constate quel’administration fait tout pourprendre une décision qui soit àl’abri de toute réaction émotive.

– Mais si vous êtes chassé dupays...

– C’est hautement hypothétique.La seule chose qui m’inquiète est laperte de temps. »

Propos recueillis parAfsané Bassir Pour

L’armée turque mène ses opérations dans le Kurdistan irakienTANDIS que l’attention est

entièrement focalisée sur la criseentre Bagdad et le Conseil desécurité de l’ONU, l’armée turquemène ses propres « opérations »dans le nord de l’Irak et sembleprendre une part active auxcombats qui opposent, depuis le13 octobre, dans cette région, lesdeux principales formations kurdesirakiennes, l’Union patriotique duKurdistan (UPK) de Jalal Talabaniet le Parti démocratique du Kurdis-tan (PDK) de Massoud Barzani.

Ankara a annoncé, samedi8 novembre, une « opération limi-tée » contre les positions du Partides travailleurs du Kurdistan (PKK,marxiste-léniniste) de Turquie,dans les zones de la ligne de cessez-le-feu entre les deux formationskurdes irakiennes rivales. Il aaccusé l’UPK de « collaborer avec lePKK », ce que le parti de M. Tala-bani a toujours démenti. Peu aupa-ravant, le PDK avait annoncé qu’il

lançait une offensive contre sesfrères ennemis de l’UPK. Si l’on encroit les communiqués publiés parl’une et l’autre formation, les vic-times se comptent désormais pardizaines – 67 combattants de l’UPKselon le PDK et 30 partisans deM. Barzani, selon la formationrivale, pour la seule journée dusamedi.

En réalité, affirment des respon-sables de l’UPK, les bombarde-ments des positions de cette for-mation par l’artillerie et l’aviationturques n’ont pas cessé depuis dessemaines. Fin octobre, l’UPK amême affirmé que des bombes aunapalm ont été utilisées, cequ’Ankara a démenti. Un respon-sable de l’ONU dans le nord del’Irak avait toutefois confirmé laparticipation de l’aviation turqueau conflit entre Kurdes irakiens.

Ce qui est sûr, c’est que lestroupes d’Ankara, qui ont lancé le23 septembre une nouvelle opéra-

tion contre le PKK, à la demande deM. Barzani, ne se sont toujours pasrepliées. Samedi, Ankara a justifiéson « opération limitée » dans leKurdistan irakien par le fait que lacollaboration entre l’UPK et le PKKa « permis au PKK de s’emparer deplusieurs zones sur la ligne de cessez-le-feu » avec le PDK.

TESTER LES RÉACTIONSParler d’une opération limitée est

« absolument faux », affirme uncommuniqué rendu public par lareprésentation de l’UPK à Paris.« C’est un prétexte visant à justifierune opération militaire massive etl’incursion la plus profonde del’armée turque dans le Kurdistan ira-kien », précise l’UPK. « C’est uneopération menée conjointementavec la milice de Barzani contrel’UPK et non pas contre le PKK,comme l’a affirmé un porte-paroleturc », ajoute-t-il.

D’après Ahmad Bamarni, ancien

« député » (UPK) du « Parlement »kurde irakien – élu en 1992 et qui avolé en éclats en 1994 après larésurgence du conflit armé entrel’UPK et le PDK –, la Turquie est entrain de tester les réactions arabeset occidentales à la présence de sestroupes dans le nord de l’Irak.

Son objectif est, estime-t-il, decréer dans cette région, une fois lesrigueurs de l’hiver passées, et avecla collaboration du PDK, une« zone de sécurité » semblable àcelle qu’Israël a délimitée au Libansud. Le quotidien turc Zamancroyait savoir, fin octobre, qu’unetrentaine de milliers d’hommespasseraient l’hiver dans une tellezone. Le vice-premier ministreturc, Bülent Ecevit, avait, dès ledébut du mois d’octobre, réclamél’« installation » de troupes turquesdans le Kurdistan irakien « jusqu’àce que l’Irak recouvre son intégrité ».

Mouna Naïm

LA CRISE entre l’Irak et l’ONUs’est exacerbée, lundi 10 no-vembre, à quelques heures d’uneréunion du Conseil de sécurité quidoit examiner la riposte à apporterau refus de Bagdad de coopéreravec les experts américains endésarmement de l’ONU. Un avionespion américain U 2 a survolé,lundi, aux premières heures de lajournée, le territoire irakien, « enprovenance du sud », c’est-à-direde l’Arabie saoudite selon Bagdad.

L’appareil était toutefois, selonla radio irakienne, hors de portéede la défense anti-aériennelaquelle « se tient prête à faire

face ». Les autorités irakiennes,pour qui l’U 2 fait de l’espionnagepour le compte des Etats-Unis etnon de la surveillance pour l’ONU,avaient menacé de l’abattre dès lareprise des vols, suspendus lasemaine dernière, lors de la visiteen Irak des émissaires du secré-taire général de l’ONU, KofiAnnan (Le Monde daté 9-10 no-vembre).

Dimanche, le président irakien,Saddam Hussein, avait estimé queson pays était dans une situationoù il doit choisir « entre le sacrificeet l’esclavage », entre « une viedigne et honorable et l’affronte-

ment ». M. Hussein, dont les pro-pos ont été rapportés par l’agenceirakienne INA, après une réuniondu Conseil de commandement dela révolution, a affirmé que la déci-sion de rompre avec les expertsaméricains était « défensive et nonune attaque contre l’Amérique ».

« SITUATION DÉSESPÉRÉE »« Nous avons fait des sacrifices

pour ensuite découvrir que les pro-messes qui nous ont été faites ontété emportées par le vent, alors quela situation désespérée des Irakiensdemeurait inchangée », a ajoutéM. Hussein, sans préciser à quelles

« promesses » il faisait allusion, nipar qui elles avaient été faites.

Les Etats-Unis sont demeurésfermes face à l’Irak. « J’attends desNations unies qu’elles décident uneaction ferme et sans ambiguité pourqu’il soit parfaitement clair qu’il [leprésident irakien] doit se confor-mer » aux résolutions du Conseilde sécurité sur le désarmement, adéclaré, dimanche, le président BillClinton. « Je ne veux rien retenir niexclure », a ajouté M. Clinton àpropos des options possibles faceà Bagdad. « A un moment commecelui-ci, il est très important que leprésident conserve toutes ses options

et n’en mentionne aucune », aajouté M. Clinton.Traitant le pré-sident irakien de « menteur congé-nital », le secrétaire d’Etat, Made-leine Albright, a affirmé de soncôté que l’Irak commettrait « unetrès grave erreur, qui aurait desconséquences », s’il essayaitd’abattre l’U 2. Selon elle, lesEtats-Unis n’écartent aucuneoption, pas même contre M. Hus-sein. « Aucun d’entre nous n’a ditque nous le voulions mort ou vif.Nous voulons qu’il respecte les réso-lutions du Conseil de sécurité », aajouté Mme Albright, qui a rejeté lademande irakienne de réduction

du nombre des experts américainsau sein de la Commission del’ONU chargée du désarmementde l’Irak (Unscom).

En route pour New York, où ilsouhaiterait prendre la paroledevant le Conseil de sécurité, levice-premier ministre irakien,Tarek Aziz, a fait une escale tech-nique à Paris, dans la nuit dedimanche à lundi. Il est notam-ment accompagné du principalinterlocuteur de l’Unscom à Bag-dad, le général Houssam Moha-mad Amine, et du ministre dupétrole, le général Amer Rachid.– (AFP, Reuter.)

PROCHE-ORIENT Le présidentirakien, Saddam Hussein, a laisséentendre, dimanche 9 novembre, quela crise entre l’Irak et l’ONU à proposdes experts américains de l’Unscom

(la Commission de l’ONU chargée dedésarmer l’Irak) pourrait tourner aupire, estimant que le peuple irakienavait désormais le choix entre« l’esclavage et le sacrifice ». b BILL

CLINTON, à quelques heures d’uneréunion du Conseil de sécurité sur lanouvelle crise avec Bagdad, a estiméque les Nations unies doivent adop-ter une « action très ferme et sans

ambiguïté » à l’égard de l’Irak.b RICHARD BUTLER, le chef de l’Uns-com, souligne la nécessité d’êtreintraitable sur cette question etaffirme avoir la garantie que lorsque

l’Irak aura été désarmé, les sanctionsde l’ONU seront levées. b LA TUR-QUIE met à profit la crise pour conti-nuer ses opérations militaires dans leKurdistan irakien.

Le Conseil de sécurité de l’ONU s’achemine vers une riposte très ferme à l’IrakTandis que le vice-président irakien, Tarek Aziz, était attendu lundi 10 novembre aux Nations unies, après une escale technique à Paris,

le président Saddam Hussein, qualifiant l’attitude de son pays de « défensive », prépare la population au pire

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I N T E R N A T I O N A L LE MONDE / MARDI 11 NOVEMBRE 1997 / 3

L’hommageà Itzhak Rabina rassembléla gaucheisraélienne

JÉRUSALEMde notre correspondant

L’impressionnant rassemble-ment populaire – entre 150 000 et200 000 personnes pour un paysde 5 millions d’habitants – qui aeu lieu, dans la soirée du samedi8 novembre, pour le deuxième an-niversaire de l’assassinat d’ItzhakRabin par un extrémiste juif reli-gieux, n’a pas précisément ébran-lé le gouvernement nationalistereligieux de Benjamin Nétanya-hou. Mais le premier ministre, misen cause par la gauche pour avoirassisté à des manifestations vio-lentes contre l’ancien premier mi-nistre, a tenté de répliquer, di-manche, dans un cadre plusofficiel et plus solennel. Acclamépar les deux mille sept cents délé-gués de son parti, le Likoud, réunipour sa convention annuelle detrois jours à Tel Aviv, le chef ducartel des droites au pouvoir a misun point d’honneur à réclamer –et obtenir – de ses fidèles une mi-nute de silence « à la mémoire dupremier ministre d’Israël assassiné,Itzhak Rabin ». « Bibi » Nétanya-hou a demandé en outre aupeuple d’Israël « d’oublier ses divi-sions et de refaire son unité ».

La veille, sur l’ancienne placedes Rois-d’Israël, rebaptisée placeRabin puisque c’est là, au sortird’un grand rassemblement pourla paix, que le vieux soldat avaitété assassiné, les pancartes bran-dies ne laissaient guère de placeau doute quant à l’humeur poli-tique de la foule. « Bibi n’a pasd’alibi ! Nous voulons la paix ! Sau-vons la paix ! Bibi go home ! » Pourun jour fédérés, les organisations,mouvements et associations di-verses en faveur de la paixs’étaient en principe donné le motpour conserver à la commémora-tion un caractère digne. Une di-zaine d’artistes parmi les plus po-pulaires ont fait assaut demessages en faveur de la paix.Mais, comme le soulignait di-manche Maariv, le journal de ladroite, « ce fut surtout un rassem-blement antigouvernemental, leplus vaste qui se soit vu en Israëlcontre un premier ministre au pou-voir depuis à peine deux ans ».

« SUIVRE LA VOIE TRACÉE »Un seul ministre en exercice,

l’ancien refuznik soviétique, Na-than Chtcharanski, qui détient leportefeuille du commerce et nemanque jamais une occasion dedévelopper l’idéologie du « GrandIsraël » et de justifier le refus gou-vernemental de restituer les terri-toires occupés aux Palestiniens, aeu le courage de monter sur lascène. Il s’est fait huer si fort qu’àla fin de sa brève intervention lechef des travaillistes, Ehoud Ba-rak, s’est cru obligé de le prendredans ses bras puis de rappeler à lafoule qu’il s’agissait là d’un« grand héros d’Israël ».

M. Barak, qui tente ces temps-cide nombreuses ouvertures versplusieurs petits partis de droite etvers les formations religieusestout en refusant de répondre clai-rement à la question de savoir s’ilest ou non pour l’émergence d’unEtat palestinien indépendant, afait le serment de « suivre la voietracée par Itzhak Rabin ». Plus di-rect et plus offensif, comme àl’accoutumée, le chef du parti sio-niste le plus à gauche del’échiquier politique, Yossi Sarid,président du Meretz (9 députéssur 120), a fait remarquer qu’iln’accusait pas de la mort de l’an-cien premier ministre « la moitiédu pays » mais « tous ceux qui l’onttraité de meurtrier, de traître, dePétain juif et tous ceux qui ont mar-ché derrière un certain cercueil ».

Cette dernière allusionconcerne directement M. Néta-nyahou, qui avait manifesté encompagnie de militants portantun cercueil censé représenter lamort du sionisme assassiné par lapolitique de M. Rabin. A l’applau-dimètre, ce sont tout de mêmeLéah Rabin, la veuve du vieux gé-néral, et Shimon Pérès, son suc-cesseur malheureux aux électionsde juin 1996, qui ont remporté leplus grand nombre de suffrages.

Patrice Claude

Sur l’esplanade du Trocadéro à Paris :« Le silence n’a que trop duré »

LES YEUX FERMÉS face à lapluie, au vent, à la nuit, à toutes lessouffrances, Abdelkrim, vingt et unans, chante a capella la douleur del’absence. Cet agent d’accueil à LaVillette a longtemps vécu en Algé-rie. Ses parents y sont encore. Il nepeut plus les voir. Son chant poi-gnant, mi-prière, mi-sanglot, ren-voyé par les murs, emporté par lesbourrasques, envahit lentementl’esplanade. A ses pieds des cen-taines de parapluies se serrent fri-leusement dans un silence d’église.Beaucoup d’Algériens, timides, unpeu étonnés de se retrouver là, semêlent aux intellectuels, aux mili-tants, aux artistes. Nul n’a le cœurà sourire. Le rassemblement orga-nisé, dimanche 9 novembre, surl’esplanade des Droits-de-l’Hommepour donner le coup d’envoi d’« unjour pour l’Algérie » est grave etsobre.

Un seul discours, dit par Chris-tian Gay-Bellile, coordonnateur dela manifestation, rappelle que l’Al-gérie, depuis cinq ans, « vit une in-nommable tragédie », dans l’indiffé-rence et l’inertie de la communautéinternationale : « Le silence n’a quetrop duré. Il est temps que les démo-crates en France se mobilisent. » Lajournée du 10 novembre sera, dit-il,un « témoignage du cœur », etcontribuera à ce que les institutionsinternationales « assurent leurs de-voirs ». M. Gay-Bellile lit en conclu-sion un message du chanteur Dje-mel Allam, qui, lundi soir, alorsqu’en France les sympathisants

marcheront dans la nuit une lampeà la main, chantera à Bougie, del’autre côté de la Méditerranée.

C’est déjà presque fini. La chan-teuse Battja Rahal module unedouce mélopée à la lueur indirectedes projecteurs. Une femme dansla foule lance un youyou. Puis He-lène Delavault enchaîne, toujours acapella, sur un extrait de La Passionselon saint Matthieu, de Jean-Sébas-tien Bach. Dans la foule, on dis-tingue quelques personalités : Ma-rie-Claire Mendès France, lecomédien Bernard Giraudeau ; unefemme assure avoir reconnuCharles Fiterman. Des militantsdistribuent des cartes demandant« la création d’une commission d’en-quête internationale, ayant libre ac-cès à l’information, pour que toute lalumière soit faite sur les atrocités etles atteintes aux droits de l’hommeen Algérie ».

Abdelkrim a repris le micro pourune dernière chanson. « Ce soir,c’est le lancement ; la vraie journée,c’est lundi, assure Fatima,confiante. Il faut que les Algériens icise bougent pour que l’ONU ou legouvernement français inter-viennent. Le gouvernement algérienseul ne fera rien. » A ses côtés, Bel-lel, nerveux, se cache en bougon-nant. Il n’aime pas les questions,encore moins les projecteurs. « Ilarrive de là-bas, explique Fatima. Ilest déçu. Il a vraiment souffert, il a lahaine. »

Véronique Maurus

Quelques invraisemblancesUNE SÉRIE d’invraisemblances émaille les témoi-

gnages apportés à The Observer et au Monde par lesdeux hommes qui se présentent comme des respon-sables en rupture de ban des services secrets algé-riens. Le premier, « Joseph », aurait fait défection enGrande-Bretagne il y a deux ans et demi afin de de-mander l’asile politique. Ces deux témoins anonymesn’ont pas été identifiés par les services spécialisés quicoopèrent de part et d’autre de la Manche. Contactéspar leurs homologues français, dimanche 9 no-vembre, les services britanniques ont ainsi indiqué nepas connaître la personne se dissimulant sous lepseudonyme de « Joseph ».

Accusant les services algériens d’avoir envoyé leursagents afin d’« organiser au moins deux des attentats àla bombe commis à Paris », « Joseph » fournit peud’éléments vérifiables. Il évoque toutefois l’un desterroristes interpellés, Karim Koussa, dont il écorchele nom : « Karim Moussa a été capturé et blessé. Il a de-puis disparu et les autorités françaises ont échoué à ex-pliquer ce qui était arrivé à ce suspect très recherché. »Or, Karim Koussa, le jeune de Vaulx-en-Velin inter-pellé le 27 septembre 1995 dans les monts du Lyon-nais où il s’était réfugié avec son complice KhaledKelkal, est toujours écroué en France : il témoigneraen décembre au procès du groupe islamiste deChasse-sur-Rhône.

Dans son témoignage à notre journal, « Hakim »indique que les attentats du RER Saint-Michel et dumétro Maison-Blanche auraient été commandités parAlger. A l’en croire, les explosifs auraient été « ré-cupérés dans les locaux de l’ambassade d’Algérie à Pa-ris » par Boualem Bensaïd, l’étudiant algérien présen-té par les enquêteurs français comme le représentantdu GIA envoyé dans l’Hexagone pour coordonner lacampagne terroriste. Cette version est démentie parles enquêtes judiciaires françaises. Il est ainsi établique les ingrédients des engins explosifs utilisés enFrance ont été achetés par Boualem Bensaïd et AliTouchent, toujours recherché par la justice.

Les empreintes digitales de Boualem Bensaïd,écroué depuis son arrestation, le 2 novembre 1995, àParis, ont été retrouvées sur les débris de la bombe deMaison-Blanche. Ordonnant un attentat contre unmarché de Lille, le même a transmis par téléphonedes instructions au groupe actif en région lilloise,dont l’artificier a été interpellé le 2 novembre à sondomicile, où une bouteille de gaz prête à l’emploi aété saisie. Boualem Bensaïd était, enfin, en relationsuivie avec l’un des responsables du GIA à Londres,Rachid Ramda, dont la justice française attend tou-jours l’extradition.

Erich Inciyan

Des « fuites » impliquent Alger dans les attentats de Paris Selon des récits d’Algériens se présentant comme responsables des services spéciaux, recueillis par « The Observer »

et par « Le Monde », l’objectif aurait été de monter l’opinion française contre les islamistes Les services secrets algériens sont-ils res-ponsables des attentats commis en Franceau cours de l’été 1995 ? Faut-il leur imputerles massacres de plusieurs centaines de civilsperpétrés aux portes d’Alger à la fin de

l’été ? L’hebdomadaire britannique The Ob-server l’affirme dans son édition du 9 no-vembre, en s’appuyant sur les confidencesd’un homme présenté comme un ancien res-ponsable de la sécurité militaire. Se faisant

appeler « Joseph », le responsable algériencité par l’Observer affirme que le meurtre deplusieurs Européens en Algérie, contraire-ment à la thèse officielle, est l’œuvre desservices secrets algériens et non d’isla-

mistes. Ces propos sont confirmés par lesdéclarations confiées au Monde par un res-ponsable présumé de la direction du rensei-gnement et de la sécurité algérienne. (Lireaussi notre éditorial page 14.)

LE MONDE a recueilli les révéla-tions d’un responsable présumé dela direction du renseignement etde la sécurité (DRS). Si cethomme, qui se présente commeun officier supérieur, a accepté,sous couvert d’anonymat, de par-ler plusieurs heures durant, cen’est pas, assure-t-il, pour obtenirun statut de réfugié politique. Il adécidé de rester dans son pays etde ne pas démissionner de sonposte. Ce qu’il veut, affirme-t-il,c’est faire évoluer le système del’intérieur. « Nous sommes ungroupe d’officiers à vouloir changerles choses. Puisqu’il est impossiblede faire un coup d’Etat et que lapresse algérienne est aux ordres,nous saisissons l’opinion publiqueoccidentale. Notre démarche obéit àune stratégie réfléchie. »

« En Algérie, poursuit-il en éle-vant la voix, tout le monde a lesmains tachées de sang. Nous avonshonte de voir des gens torturés. Noussommes devenus des assassins auprofit d’une caste d’affairistes quirongent l’institution militaire. Ilsveulent tout : le pétrole, le contrôledes importations, l’immobilier...Nous, les militaires, nous ne sommespas des barbares. Notre mission,telle qu’on nous l’a enseignée, c’estde défendre la patrie, la Répu-blique. Pas ceux qui se remplissentles poches », accuse-t-il.

L’homme – il se fera appeler« « Hakim » » – confirme les pro-pos de son collègue à The Observer.Sur un seul sujet, il refusera des’exprimer : la complicité supposéeentre l’Irak et l’Algérie, qui auraitcaché certains des éléments duprogramme nucléaire, chimique etbactériologique de Bagdad. « Je neveux pas faire le jeu des services se-crets occidentaux », se défend-il.

Parfois, « Hakim » complète defaçon précise les infomations don-nées par son collègue à The Obser-ver. Ainsi, sur les attentats perpé-trés en France durant l’été 1995 :« Je confirme que les attentats deSaint-Michel [8 morts et plus de130 blessés, le 25 juillet 1995] et ce-lui de Maison-Blanche [13 blessés,le 6 octobre 1995, jour des ob-sèques de Khaled Kelkal, principalsuspect dans l’attentat raté duTGV Paris-Lyon] ont été commis àl’instigation du sercice action de ladirection infiltration et manipula-tion (DIM) de la DRS, quecontrôlent Mohamed Médiène, plusconnu sous le nom de “Toufik”, et legénéral Smaïn Lamari. »

« A l’époque, ajoute « Hakim »,les service algériens redoutaient quedes liens se nouent en France entreune émigration connue pour sessympathies kabyles et des dirigeantsislamistes dont plusieurs étaient jus-tement d’origine kabyle. Il fallaitque les services français prennentdes mesures pour empêcher cerapprochement qui, s’il réussissait,risquait d’alimenter les caisses desislamistes et de faciliter l’approvi-sionnement des maquis en armes.On pouvait espérer aussi que lacommunauté émigrée, se sachantsurveillée par nos homologues fran-çais, saurait se tenir à l’écart desévénements algériens. »

Le ministre de l’intérieur del’époque, Charles Pasqua, étaitd’accord pour coopérer avec lesAlgériens, même si, depuis le vrai-faux enlèvement, le 24 octobre1993 à Alger, des époux Thévenotet d’Alain Freyssier, les trois agentsconsulaires français – « ils ont étéretenus dans une caserne d’Husseinday, dans la banlieue d’Alger, alorsqu’ils étaient censés être entre lesmains d’islamistes » –, il se méfiaitdes services algériens.

Il restait à gagner l’opinion pu-blique en discréditant les isla-mistes. De là les attentats à Parisdécidés, selon « Hakim », à Alger :« La tête pensante des deux atten-tats, explique-t-il, est Boualem Ben-saïd. » Incarcéré en France, cetétudiant islamiste d’une trentained’années « est un militaire algérienmembre du service “action”. C’estlui qui faisait le va-et-vient entre Al-ger et l’Europe pour entrer encontact avec le GIA. Et c’est lui quileur a passé commande des atten-tats ».

DJAMEL ZITOUNI SOUS CONTRÔLELe cas de Djamel Zitouni, le chef

du Groupe islamique armé (GIA),illustre la capacité de manipulationdes services, d’après « Hakim ».Présenté comme l’ennemi publicnuméro un, Djamel Zitouni seraitune créature de l’ancienne sécuritémilitaire. « Il a été recruté en 1991dans un camp de sûreté dans le Sudalgérien [des milliers d’islamistesavaient été emprisonnés dans leSud par l’armée]. Nous l’avons aidéà prendre la direction du GIA en1994. C’est Zitouni qui nous a fournil’information la plus importantedans notre guerre contre le GIA. Ilnous a dit où était Mourad Si Ah-med Mourad, l’homme le plus dan-gereux de la mouvance islamiste. »

Depuis, Djamel Zitouni est bel etbien mort, assure « Hakim » : « Il aété sous notre contrôle jusqu’à l’af-faire du monastère de Tibéhirine[mars-mai 1996]. Les moines de-vaient être trouvés − morts ou vi-vants, je l’ignore − dans le villagenatal d’un chef islamique à qui onvoulait faire porter la responsabilitéde l’affaire. Pour des raisons quej’ignore, Zitouni n’a pas respecté lecontrat. Il a donc été liquidé. »

Si quelques officiers ont choiside rompre le silence – dans TheObserver, Le Monde, demain peut-être dans d’autres journaux occi-dentaux −, c’est, dit-il, à la suitedes massacres de civils à la fin del’été. Et plus particulièrement celuide Beni Messous (plus de200 morts, en septembre) dont

« Hakim » est convaincu qu’il a étécommis par les services. « Il y a aumoins une demi-douzaine de ca-sernes à proximité. Il y avait un bar-rage. Il a été levé comme par ha-sard. Les militaires qui voulaientintervenir en ont été empêchés. Legroupe qui a commis le massacre aamené avec lui un islamiste, un pri-sonnier détenu depuis des annéespour qu’il soit reconnu par les habi-tants. »

« NOTRE TIMISOARA »Les massacres de Bentalha (lire

page 10) et de Raïs n’ont pas étéperpétrés par le pouvoir mais pardes « éléments perdus du GIA mani-pulés par les services », affirme« Hakim ». Il cite encore l’exemplede la reconquête par l’armée d’Ou-

led Alled, un petit village à deuxpas d’Alger vidé de ses habitantsen 1995 par le GIA, qui en auraitfait sa base arrière. « Ouled Alled,c’est notre Timisoara. Un mensongeénorme. explique-t-il. On a préten-du que le GIA avait résisté quinzejours. Comme si l’armée algériennefaisait dans la dentelle. Lesmembres du GIA qui tiraient,c’étaient des prisonniers islamistesqui n’avaient jamais voulu collabo-rer avec nous. On les amenés là, onleur a donné des armes et on leur adit : “Défendez-vous.“ L’armée al-gérienne avait été accusée de passi-vité pendant les massacres : il fallaitbien donner quelque chose en pâ-ture à la presse. »

Jean-Pierre Tuquoi

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4 / LE MONDE / MARDI 11 NOVEMBRE 1997 I N T E R N A T I O N A L

« Valeurs éthiques de la démocratie » au 7e sommet ibéro-américainSAINT-DOMINGUE

de notre correspondantLe 7e sommet ibéro-américain, consacré cette

année aux « valeurs éthiques de la démocra-tie », a réuni, dans l’île vénézuélienne de Mar-garita, les pays latino-américains, l’Espagne etle Portugal. Deux sujets, Cuba et la liberté de lapresse, ont dominé les débats, tandis que leprésident du gouvernement espagnol, José Ma-ria Aznar, poursuivait ses efforts pour renforcerles liens privilégiés entre l’Europe et l’Amériquelatine, qui est également engagée dans laconstitution d’une zone de libre-échange avecles Etats-Unis d’ici à 2005.

Le président cubain, Fidel Castro, qui a unenouvelle fois été la vedette du sommet, a re-mercié les autorités vénézuéliennes d’« avoirempêché des actions criminelles » contre lui.Quatre exilés cubains, arrêtés à Porto Rico le28 octobre en possession de « fusils capables detuer un éléphant », auraient avoué qu’ils proje-taient d’assassiner Fidel Castro sur l’île de Mar-garita. Cinq jours avant l’ouverture du sommet,plusieurs personnalités anticastristes, dontl’écrivain Carlos Alberto Montaner, ont été ex-

pulsées par la police vénézuélienne. A l’heuredes discours, Fidel Castro a été durement atta-qué par les présidents du Nicaragua et de l’Ar-gentine. Se prononçant pour l’élimination « desdictatures qui subsistent » dans la sphère ibéro-américaine, le nicaraguayen Arnoldo Aleman acritiqué « la tolérance face aux évidentes viola-tions des libertés élémentaires et des droits del’homme ».

« GLOBALISATION ÉCRASANTE ET BRUTALE »Le leader cubain a répliqué en affirmant qu’il

existe à Cuba « une démocratie véritable, ungouvernement du peuple, par le peuple et pour lepeuple, et non des riches, par les riches et pour lesriches ». Selon lui, ce n’est pas Cuba qui doitchanger, mais les autres pays, pour en finir avec« le néolibéralisme aveugle et incontrôlable et laglobalisation écrasante et brutale sous l’égide dela puissance la plus égoïste de l’histoire ».

Très dégradées ces derniers mois, les rela-tions entre Madrid et La Havane se sont déten-dues à l’occasion du sommet. Abel Matutes, leministre espagnol des affaires étrangères, a in-formé son homologue cubain, Roberto Robai-

na, que Madrid n’avait pas d’objection à ce quele 9e sommet ibéro-américain ait lieu à La Ha-vane en 1999, à condition qu’il se déroule dansles mêmes conditions de liberté que les som-mets précédents. La nouvelle dénonciation dela loi Helms-Burton, la législation nord-améri-caine renforçant l’embargo contre Cuba, aconstitué un autre motif de satisfaction pourFidel Castro.

Le chef de l’Etat cubain a par ailleurs été invi-té par le président colombien Ernesto Samper àse joindre au « groupe d’amis » (Costa Rica, Es-pagne, Mexique et Venezuela) qui tente de pro-mouvoir un accord de paix en Colombie. Ma-rotte de l’amphitryon du sommet, le présidentRafael Caldera, le « droit à l’information vraie »a été prudemment gommé dans la version fi-nale. Cette proposition vénézuélienne, qui dé-clarait que « les journalistes n’ont pas le droit dedéformer la réalité ni de manipuler l’opinion pu-blique », avait été vivement critiquée tant parles associations de journalistes que par les or-ganes de presse de la région.

Jean-Michel Caroit

La suspension du vote sur la procédurecommerciale constitue un échec pour M. Clinton

Le président des Etats-Unis a reculé en raison de la forte opposition des démocrates au CongrèsLe vote sur le fast-track – la procédure commer-ciale qui permet au président de conclure des ac-cords commerciaux – à la Chambre des représen-

tants a été suspendu pour la deuxième fois enquarante-huit heures, lundi 10 novembre. En de-mandant une nouvelle supension, Bill Clinton

évite une humiliante défaite au Congrès, maissubit un grave échec. Le projet de loi pourraitêtre à nouveau examiné dans la semaine.

WASHINGTONde notre correspondant

Le suspense a duré tout le week-end et s’est prolongé tard dans lanuit de dimanche à lundi 10 no-vembre : Bill Clinton aura-t-il lenombre de voix suffisant pourfaire adopter par la Chambre desreprésentants l’importante loi surle fast-track ? Cette procédure par-lementaire permet au chef de laMaison Blanche de demander auCongrès de se prononcer globale-ment sur des accords commer-ciaux, sans que celui-ci ait la possi-bilité d’amender le texte qui lui estsoumis. Parce qu’il a fait de la di-plomatie commerciale l’axe ma-jeur de la politique étrangère deson administration, Bill Clintonrisque gros dans une bataille poli-tique paradoxale mettant auxprises, d’un côté, le président etles républicains, et, de l’autre, lamajorité des élus démocrates, fa-rouchement opposée au projet.

C’est donc à un intense travailde lobbying auprès de ces derniersque se sont livrés le président, sesconseillers et plusieurs respon-sables de l’administration, tentantde gagner une à une les voix man-quantes, en alternant promesseset pressions politiques. Les répu-blicains ont profité de cette atmo-sphère de marchandage pourmonnayer leur soutien par desconcessions politiques sur des su-

jets fort éloignés des accordscommerciaux, tels le financementdu planning familial et l’avorte-ment, voire la procédure de recen-sement. Depuis 1974, tous les pré-sidents ont bénéficié de la facilitédu fast-track, laquelle inspireconfiance aux partenairescommerciaux des Etats-Unispuisque les compromis négociésavec la Maison Blanche peuvent,certes, être refusés par le Congrès,mais non mis en pièces sous lapression des nombreux groupesde pression. A l’inverse, si le pré-sident ne dispose pas du fast-track,certains pays seront réticents às’engager dans un partenariatcommercial avec les Etats-Unis.

DIVISIONS EXACERBÉESC’est donc toute la stratégie di-

plomatique et économique del’administration Clinton, fondéesur la multiplication des zones delibre-échange (notamment enAmérique latine et en Asie), quiest remise en cause. Pour les parle-mentaires, la principale référenceest l’Accord de libre-échangenord-américain (Alena), qui asso-cie les Etats-Unis au Canada et auMexique. La « bataille de l’Ale-na », en 1993, fut gagnée grâce aufast-track, mais au prix de divi-sions au sein du Parti démocrate.Celles-ci sont aujourd’hui d’autantplus exacerbées que le bilan de

l’Alena est controversé : cet accordtripartite a-t-il créé ou suppriméplusieurs centaines de milliersd’emplois, comme le prétendentrespectivement l’administration etles syndicats ?

Depuis plusieurs semaines, BillClinton n’a cessé de dramatiserl’enjeu. « Un vote négatif, a-t-il dé-claré, signifierait que nous ne vou-lons pas que notre pays puisse négo-cier un abaissement des barrièresdouanières, que nous faisons re-traite, que nous avons peur de lacompétition, et que nous souhaitonsabandonner notre leadership mon-dial. » M. Clinton n’a pas pris lerisque de faire la démonstration,avec un vote, qu’il ne dispose pasd’une majorité au sein de sonpropre parti ; il a opté pour une pi-teuse retraite en demandant àdeux reprises (vendredi et lundi) lasuspension du vote. En ne mettantpas chacun face à ses responsabili-tés à l’occasion d’un vote, il subitun échec, mais évite une défaitehumiliante qui n’aurait eu pour ef-fet que de souligner la fracturechez les démocrates. Car le votesur le fast-track est aussi une ba-taille pour le contrôle de la forma-tion présidentielle, aujourd’huiprofondément divisée entre« nouveaux démocrates » et « li-béraux » (progressistes).

Alors que M. Clinton incarne lespremiers, les seconds ont un

champion en la personne de Ri-chard « Dick » Gephardt, chef defile de la minorité démocrate à laChambre des représentants, quine cache pas son intention de dis-puter au vice-président Al Gorel’investiture du parti pour l’élec-tion présidentielle de 2000. Or,M. Gephardt a courtisé avec suc-cès la base syndicale du Parti dé-mocrate, dont le soutien est indis-pensable en période électorale.L’AFL-CIO a ainsi rappelé aux élusqu’ils prenaient un risque certain,dans la perspective des électionsparlementaires de 1998, en se ran-geant aux côtés de l’administra-tion.

Dans ses efforts pour regrouperses propres troupes, M. Clinton apromis de consacrer quelque4 milliards de dollars (24 milliardsde francs) au financement de la re-conversion des salariés qui aurontperdu leur emploi à la suite d’ac-cords commerciaux. Cette offre dedernière minute n’a fait que ren-forcer le caractère politicien del’épreuve de force engagée entrela Maison Blanche et le Congrès, àdéfaut de répondre à la véritablequestion que pose le fast-track :comment faire accepter aux Amé-ricains l’insécurité économiquequ’implique la globalisation deséchanges ?

Laurent Zecchini

L’Italie favorable à un Allemandà la tête de la future BCEROME. Le ministre italien du Trésor, Carlo Azeglio Ciampi, a esti-mé, samedi 8 novembre, qu’une éventuelle nomination du pré-sident de la Bundesbank, Hans Tietmeyer, à la tête de la banquecentrale européenne (BCE) serait un « choix excellent », tout en sa-chant fort bien que M. Tietmeyer n’est pas candidat. La veille, le mi-nistre italien des affaires étrangères, Lamberto Dini, avait déclaré,au sujet de la candidature de M. Tietmeyer, qu’« il fallait y pensersurtout à la veille de l’Union monétaire ». Le président du Conseil ita-lien, Romano Prodi, avait récemment lancé l’idée de la candidaturedu président de la Bundesbank à la tête de la BCE. − (AFP.)

La crise boursière asiatique n’affecteraitpas gravement la croissancePARIS. L’impact négatif de la crise en Asie du Sud-Est sur la crois-sance des vingt-neuf pays de l’Organisation de coopération et dedéveloppement économiques (OCDE) devrait être de 0,2 % cetteannée et en 1998. L’effet sur le Japon sera plus important – sansdoute le double – en raison de la part de ses exportations vers l’Asiedu Sud-Est. Ces chiffres ont été communiqués, vendredi 7 no-vembre, à Paris, par Ignazio Visco, chef des études économiques del’OCDE. L’Organisation va donc réviser en baisse « de facon subs-tantielle » son estimation sur la croissance au Japon. Dans ses prévi-sions semestrielles en juin, l’OCDE tablait sur une croissance de2,3 % au Japon en 1997 et de 2,9 % en 1998. Au sujet de l’Europe,M. Visco a ajouté que l’effet de la crise en Asie ne paraissait pas être« substantiel » et ne remettait pas en cause le respect des critères deMaastricht par les pays candidats à l’euro. – (AFP.)

Les étrangers détenus au Congo ont été libérésPOINTE-NOIRE. Les étrangers détenus au Congo-Brazzaville ontété libérés vendredi 7 et samedi 8 novembre. Sept Français, onzeRusses et deux Belges étaient retenus à Pointe-Noire depuis la vic-toire de Denis Sassou Nguesso. Le nouveau régime les accusaitd’avoir servi l’ex-président Pascal Lissouba en tant que mercenaires,ce que les prisonniers ont démenti. Ces libérations répondent « audésir du président Sassou Nguesso de tourner la page », a indiqué leministre de l’intérieur congolais.Les négociations pour la libération des Français ont été menées parl’ambassadeur au Gabon et un conseiller de Michel Rocard. Ce der-nier, Michel Dubois, a estimé que le nouveau président congolaisavait marqué « son amitié pour la France, le président Jacques Chiracet Michel Rocard ». Le gouvernement congolais a indiqué que, selonses chiffres, soixante-douze mercenaires, principalement ukrainienset serbes, avaient été engagés par M. Lissouba. – (AFP.)

DÉPÊCHESaALGÉRIE : au moins vingt-six personnes ont été égorgées dansla nuit de samedi à dimanche par un groupe armé à H’malit, sur lesmonts Chréa de Blida, au sud d’Alger, indique la presse lundi 10 no-vembre. L’attaque de ce hameau, à deux kilomètres de la ville degarnison de Blida, par un groupe de 30 à 50 islamistes armés, a eulieu vers minuit et a duré près de deux heures, précise Le Matin, quidonne un bilan de vingt-sept morts, dont une majorité de femmeset d’enfants, égorgés, mutilés, certains brûlés. Parmi les victimes fi-gurent onze enfants âgés de trois mois à douze ans, précise El Wa-tan. Le massacre de H’malit est le troisième en deux jours, après ledouble carnage de Tajmount, dans la nuit de vendredi à samedi,près de Tlemcen (ouest) où vingt-deux villageois ont été égorgés.– (AFP.)a NIGÉRIA : le rédacteur en chef de l’hebdomadaire indépendantThe News, Jenkins Alumona, a été arrêté samedi 8 novembre à La-gos par des agents du service de sécurité, selon le quotidien britan-nique The Guardian. L’hebdomadaire a récemment publié des ar-ticles critiquant le général Sani Abacha, chef de l’Etat. Le supérieurhiérarchique de M. Alumona au sein du groupe de presse ICN, BayoOnanuga, craignant d’être arrêté, est passé dans la clandestinité lasemaine dernière. – (AFP.)a ITALIE : l’ex-juge anti-corruption Antonio Di Pietro (47 ans) aété facilement élu sénateur lors d’une élection partielle dans la cir-concription de Mugello, au nord de Florence, selon les résultats pu-bliés dans la nuit de dimanche 9 à lundi 10 novembre. Antonio DiPietro, qui avait lancé l’opération « mains propres » en 1992, se pré-sentait sous les couleurs de l’Olivier, la coalition de centre-gaucheau pouvoir. – (AFP.)a BELGIQUE : un rassemblement de plusieurs centaines de per-sonnes , dimanche 9 novembre à Bruxelles, a dégénéré en échauffourées avec la police. Les manifestants protestaient contrela mort d’un présumé revendeur de drogue d’origine marocaine, tuédeux jours plus tôt par des gendarmes en civil à Anderlecht. Plus decent-vingt jeunes ont été interpellés. Ce rassemblement survenaitaprès deux nuits de violents affrontements dans la banlieue d’An-derlecht entre des centaines de jeunes et les forces de l’ordre.– (Reuter. )a KOWEÏT : le conseil suprême de défense du Koweït a décidé depasser commande à la Chine de soixante-quinze canons d’artilleriede 155 mm pour 600 millions de dollars (environ 3,4 milliards defrancs). Les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et l’Afrique du Sudavaient proposé leurs matériels face au canon de campagne PLZ-45chinois retenu. – (AFP.)a THAÏLANDE : le chef de l’opposition thaïlandaise, Chuan Leek-pai (59 ans), a été nommé comme prévu premier ministre dimanche9 novembre, en remplacement du général Chavalit Yongchaiyudh,victime de la tourmente financière (Le Monde du 8 novembre). Ou-vrant à la hausse, la Bourse de Bangkok a salué le retour au pouvoirdu favori des milieux d’affaires et des classes moyennes qui avaitdéjà été premier ministre de 1992 à 1995. – (AFP.)

La FAO met en garde contre une baissede l’aide au développementROME. Le directeur général de la FAO (Organisation des Nationsunies pour l’alimentation et l’agriculture) a mis en garde, samedi8 novembre à Rome, contre la diminution constante en termes réelsde l’aide au développement et contre une réduction du budget deson organisation qui aurait des répercussions sur ses programmesprioritaires. Jacques Diouf, qui s’adressait à la 29e session de laConférence de l’organisation, a souligné que l’aide au développe-ment « continue de s’amenuiser en termes réels » puisqu’elle est res-tée, au cours des dernières années, autour d’une valeur nominale de60 milliards de dollars (environ 342 milliards de francs).Le Sommet mondial de l’alimentation de 1996 s’était fixé pour ob-jectif de diminuer de moitié, en 2015, les 800 millions de personnesqui souffrent actuellement de mauvaise alimentation. – (AFP.)

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I N T E R N A T I O N A L LE MONDE / MARDI 11 NOVEMBRE 1997 / 5

Les démocrates-chrétiens européenspréparent le sommet sur l’emploi

TOULOUSEde notre envoyé spécial

Les démocrates-chrétiens euro-péens réunis en congrès à Tou-louse, dimanche 9 novembre, sesont mis d’accord sur la position àdéfendre au conseil européen surl’emploi, qui se tiendra dansmoins de deux semaines à Luxem-bourg. Le chancelier allemand,Helmut Kohl, a déclaré qu’il sou-tiendra avec force le projet mis aupoint par Jean-Claude Junker,premier ministre luxembourgeois,et président en exercice del’Union européenne, pendant laconférence au grand-duché. Lesdeux autres chefs de gouverne-ment présents dans la ville de Do-minique Baudis (UDF-FD), l’Ita-lien Romano Prodi et le BelgeJean-Luc Dehaene, ont fait demême, ainsi que Rodrigo Rato,vice-premier ministre espagnol,qui représentait José Maria Aznar.

MOYENNE DES PERFORMANCESLes idées dégagées par le Parti

populaire européen (PPE), quiréunit vingt et un partis démo-crates-chrétiens et apparentés,semblent sensiblement s’éloignerdu texte concocté par la Commis-sion de Bruxelles et soutenu par laFrance. Le document de M. Jun-ker, qui n’a pas été rendu public,porte essentiellement sur la défi-nition d’un « critère de référencepour la réalisation d’une politiquenationale efficace de l’emploi ». Al’image un peu de ce qui a été ar-rêté pour l’Union économique etmonétaire (les fameux critères deconvergence), i l est proposéd’établir une moyenne des perfor-

mances réalisées par les troisEtats membres qui œuvrent lemieux pour l’emploi. Les payspartenaires qui ne pourront pasprésenter « une tendance positivevers ce critère de référence » de-vront « subir des coupes finan-cières ». Il n’est pas dit sur quoices sommes pourraient être préle-vées, mais il semble logique queles mauvais élèves pourraient voirdiminuer les aides communau-taires dont ils bénéficient au titredu Fonds social, voire des fondsstructurels en général.

IDÉE IRRÉALISABLEAutrement dit, il appartient à

chaque gouvernement d’établirdes plans nationaux pourcombattre le chômage, l’Unionétant là pour apprécier les effortsde chacun des pays et, si l’oncomprend bien le texte de M. Jun-ker, de le sanctionner le caséchéant. Le premier ministreluxembourgeois a singulièrementinsisté sur la nécessité de « vérifieret de contrôler les plans d’actionnationaux ». François Bayrou, pré-sident de Force démocrate (FD), atenu des propos comparables ensoulignant, lui aussi, que les gou-vernements nationaux devaientêtre rendus responsables de leurschômeurs.

Avant la réunion des chefs defile de la démocratie chrétienneeuropéenne, M. Junker avait ex-pliqué que l’idée de fournir unemploi ou une formation à toutjeune chômeur avant qu’il ne dé-passe les six mois d’inactivité ou,pour lutter contre le chômage delongue durée, à tout salarié avantqu’il n’atteigne une pleine annéesans emploi, était irréalisable tantles différences étaient grandesentre les Quinze. Rejetant à la foisles idées socialistes et le néo-libé-ralisme, le président de l’Unionétait à la recherche d’une « for-mule souple mais pas creuse » afinque « le projet européen soitcomplet en intégrant le volet so-cial ». Il a apparemment réussi àconvaincre ses amis politiques de« préciser leurs désaccords et detrouver les moyens de les surmon-ter ».

Marcel Scotto

Difficile préparation de la Conférence

sur l’environnementTokyo, Washington et l’UE recherchent un compromis

TOKYOde notre correspondant

Réunion préparatoire à laConférence des Nations unies surl’environnement qui se tiendra àKyoto début décembre, la ren-contre samedi 8 et dimanche9 novembre à Tokyo des ministresde l’environnement de vingt payset de l’Union europénne n’a abou-ti à aucun compromis sur la ques-tion-clef : la réduction des émis-sions de gaz à effet de serre.Américains, Japonais et Euro-péens gardent des propositionsdivergentes sur ce sujet. L’Unioneuropéenne propose de réduireces émissions de 15 % d’ici à 2010.Les Etats-Unis veulent une stabili-sation entre 2008 et 2012 au ni-veau de 1990. Le Japon a un ob-jectif intermédiaire : uneréduction de 5 % d’ici à 2010.

Cependant, les participants à laréunion de dimanche ont soulignél’importance d’une rencontre quileur a permis de « clarifier les posi-tions » et d’« évaluer la flexibilitéde leur partenaire par une meil-leure compréhension des prioritéset des motivations respectives dechacun », selon Pierre Gramegna,ambassadeur du Luxembourg, quiassume actuellement la prési-dence de l’Union européenne(UE).

Le négociateur en chef de l’UE aestimé qu’« un pas en avant signi-ficatif » avait été accompli « en éli-minant un certain nombre de ques-tions techniques pour concentrernos efforts sur les problèmes defond. Chacun est resté sur ses posi-tions dans une atmosphère non plusde confrontation, mais de compré-hension mutuelle ». Masahiko Ko-

mura, secrétaire d’Etat japonaisaux affaires étrangères, a préciséque « la clarification des positionspermet désormais à chacun d’éva-luer les points spécifiques sur les-quels leurs partenaires peuvent oune peuvent pas faire de compro-mis ». Hôte de cette troisièmeConférence des Nations unies surl’environnement, le Japon a été lepremier à annoncer qu’il était prêtà faire preuve de flexibilité.L’Union européenne n’a pas excluun compromis. « Nous sommestous désormais engagés dans unprocessus de compromis », estimeM. Jorgen Henningsen.

OBJECTIF GLOBALAu cours de la rencontre à To-

kyo, la question épineuse des tauxde réduction a été mise de côté.Les ministres ont concentré leurattention sur les moyens néces-saires pour atteindre un objectifglobal. L’autre question délicateest l’inclusion des pays du Suddans le processus de réductiondes émissions de gaz. Dans unpremier temps, ces pays ont étéexclus afin que cette réduction nepèse pas sur leur développement.Mais le gouvernement américaintient à faire entrer les plus avan-cés d’entre eux (Brésil, Chine,Mexique) dans le protocole. LesEtats-Unis sont-ils décidés à fairede cette question un casus belli ?Les Japonais cherchent une voiemédiane pour inclure les pays duSud en leur offrant, en échange,de les aider à utiliser plus efficace-ment leur énergie par des aides etdes transferts de technologies.

Philippe Pons

Fermeture prématurée de la principale maternité de PraguePRAGUE

de notre correspondantLes mères de Prague sont en colère. Le minis-

tère tchèque de la santé a décidé de fermer laplus importante et prestigieuse maternité de lacapitale et du pays. Plus de deux mille mères etpères de famille, avec à leur tête plusieurs per-sonnalités de la culture et des arts, ont déjà si-gné une pétition réclamant l’abandon de ceprojet, qui a surpris et choqué l’opinion pu-blique, à commencer par les responsables decette institution. « Nous n’avons jamais étéconsultés sur une éventuelle fermeture qui noussemble aberrante », déclare Vladimir Wol-munth, directeur de l’Institut pour les soins dela mère et de l’enfant de Podoli.

Installée, depuis 1951, dans un imposant édi-fice art nouveau construit au début du sièclepar l’un des fondateurs de la médecine mo-derne, la maternité voit naître quelque deuxmille cinq cents enfants par an. Leur nombreaugmente régulièrement, alors que la natalitéconnaît depuis plusieurs années une très nettebaisse à Prague (– 30 %) et au plan national. Enthéorie réservée aux mères des deux arrondis-

sements les plus peuplés de Prague, la materni-té attire les femmes enceintes de tous les coinsde la ville et du pays qui veulent accoucherdans l’un des plus beaux espaces hospitaliersde la République tchèque.

Confronté à un déficit croissant des caissesd’assurance-maladie, le ministère de la santéenvisage de réduire, de manière drastique, lenombre de lits hospitaliers. Les maternités sontau premier rang des victimes. « J’espère quec’est vraiment la seule raison, commente ainsiM. Wolmunth, car j’imagine très bien à la placede la maternité un hôtel ou un casino », ajoute-t-il en écho à la rumeur populaire.

ÉCONOMIES BUDGÉTAIRES ET BÉNÉFICESEn effet, beaucoup de Pragois pensent que le

gouvernement veut vendre le bâtiment et legrand parc de verdure qui l’entoure – le toutévalué à 400 millions de couronnes (80 millionsde francs) – pour en faire un hôtel ou le sièged’une banque étrangère. La fermeture de Podo-li présenterait ainsi, aux yeux des fonction-naires du ministère, un double avantage : réali-ser des économies budgétaires et tirer des

bénéfices de la vente ou de la location du bâti-ment. Dans les autres hôpitaux de Prague, oùles cliniques de maternité sont intégrées auxautres services, l’opération immobilière seraitplus difficile à réaliser et les promesses de gainsne sont donc pas aussi importantes.

Le ministre de la santé, Jan Strasky, a tentéde couper court à ces spéculations, mais lapresse pragoise a pris fait et cause pour la ma-ternité, qui, sous le communisme, fut celle des« privilégiés du régime ». Aussi, alors que lesresponsables du ministère ont entamé, cettesemaine, une évaluation de tous les hôpitauxdu pays pour déterminer lesquels devront fer-mer définitivement leurs portes, M. Strasky aglissé, au cours d’un entretien à la télévision,que Podoli demeurerait un établissement médi-cal. « Un établissement de soins non convention-né par l’assurance-maladie », a-t-il précisé dansun jargon bureaucratique que ses concitoyensont interprété à leur manière : « une cliniquepour riches ». Une solution qui risque de dé-plaire autant que la fermeture pure et simple.

M. P.

Des dizaines de milliers de Tchèques manifestentcontre la politique d’austérité des libéraux

L’opposition a décidé de déposer une motion de censure au ParlementA l’appel du principal syndicat tchèque, des di-zaines de milliers de personnes ont manifesté,samedi 8 novembre à Prague, contre la politique

d’austérité du premier ministre libéral VaclavKlaus, au plus bas dans les sondages. Alors queles syndicats menacent de déclencher une grève

générale, l’opposition sociale-démocrate a déci-dé de déposer une motion de censure lors de laprochaine session parlementaire en février.

PRAGUEde notre correspondant

Des dizaines de milliers de sala-riés tchèques – 120 000 selon lesorganisateurs, moins de 70 000 se-lon la police – ont manifesté, sa-medi 8 novembre, au cœur dePrague, contre la politique du gou-vernement libéral de Vaclav Klaus.Organisée par la principale confé-dération syndicale du pays(CMKOS, 95 % des syndiqués),cette manifestation est la plus im-portante depuis celles de l’au-tomne 1989 qui avaient provoquéla chute du régime communiste.Huit ans presque jour pour jouraprès la « révolution de velours »,le président de la CMKOS, RichardFalbr, a été hué par une partie dela foule lorsqu’il a précisé que lamanifestation n’était pas « contrele régime ». M. Falbr, jugé tropconciliant envers le pouvoir, avaitimposé in extremis l’organisationd’un meeting de protestation etnon d’une grève générale, commele demandaient plusieurs fédéra-tions, dont celles des mineurs, descheminots et de métallurgistes.

Cette manifestation est néan-moins « un ultime avertissement »,a-t-il lancé à l’adresse du gouver-nement, au terme d’un sévère ré-quisitoire. Ce cabinet a « gaspilléles ressources financières du pays etla confiance des citoyens que lesautres gouvernements des ex-payscommunistes lui enviaient », a esti-mé le chef syndical. « Les salariésne doivent pas payer le prix deséchecs de la politique menée dansl’intérêt des partis gouvernementauxet des escrocs », a dit M. Falbr, enreprochant aux autorités leurlaxisme devant les nombreuses

faillites frauduleuses de banques,de fonds d’investissements etd’entreprises. « Nous n’accepteronspas, a-t-il averti, de nous serrer laceinture comme en 1991 », annéeoù le pouvoir d’achat a le plus re-culé.

Le gouvernement, qui a adoptéau printemps dernier une série demesures d’austérité en raisond’une détérioration brutale del’économie, prévoit, après quatreans de hausse du niveau de vie,une baisse des salaires réels l’anprochain. De plus, le Parlement arécemment approuvé la réductiondes indemnités de chômage « déjàmisérables », selon M. Falbr, aumoment où le taux de chômageest passé en un an de 3,2 % à 4,9 %

de la population active. A l’issuede la manifestation, les partici-pants ont adopté une déclarationdemandant aux partis de la coali-tion gouvernementale de « re-connaître leurs erreurs ».

Le premier ministre, comme àl’accoutumée, a fait peu de cas« des quelques manifestants » etlaissé clairement entendre qu’il nechangerait rien à son programmed’austérité. Moins péremptoire,plusieurs de ses ministres ont tou-tefois estimé qu’il serait nécessairede prendre en compte le mé-contentement grandissant dans lasociété. Ils ont d’ailleurs reçu unsoutien indirect du président, Va-clav Havel, qui a quitté pendantune heure son lit d’hôpital, où il

est soigné pour une pneumonie,afin de procéder à la nominationde trois nouveaux ministres.« Notre société a besoin d’un projetpour l’avenir, d’assurances élémen-taires et surtout besoin d’espoir », a-t-il déclaré lors de la cérémonie auchâteau de Prague, le siège de laprésidence. Il a souligné qu’un« simple remaniement ministérielne saurait satisfaire [la popula-tion] ». Les sondages montrent, eneffet, que les Tchèques n’ont plusle moral, perdent confiance dansles institutions démocratiques etsont de plus en plus nombreux àregretter « l’ancien régime ».

MOTION DE CENSUREDe son côté, l’opposition so-

ciale-démocrate a décidé, samedi,de déposer une motion de censurecontre le gouvernement lors de lasession parlementaire de février,après la réélection attendue deM. Havel pour un second mandatprésidentiel de cinq ans. Le partide Milos Zeman (CSSD) espèreconvaincre, au cours des trois pro-chains mois, un ou deux députésde la coalition gouvernementaledont les voix sont nécessaires pourla réussite de la manœuvre. LeCSSD a d’ores et déjà lancé uneoffensive de charme en directionde l’ex-ministre des affaires étran-gères, Jozef Zieleniec, qui, le23 octobre dernier, a claqué laporte du gouvernement aprèsavoir définitivement rompu avecle premier ministre dont il futproche. M. Zeman lui a proposé dediriger un cabinet intérimaire encas d’élections anticipées.

Martin Plichta

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F R A N C ELE MONDE / MARDI 11 NOVEMBRE 1997

Julien Dray : « devoir d’exigence » plutôt que « droit d’inventaire »

Pour obtenir plus de moyens, les contrôleurs des transports routiers font la grève du zèleAPRÈS LA GRÈVE des routiers,

voici la grève des contrôleurs desroutiers ! Les fonctionnaires encharge du « contrôle des transportsterrestres » réclament depuis long-temps plus de moyens pour contrô-ler les entreprises qui se livrent à dudumping social et qui faussent laconcurrence. Ils espéraient que lagrève des camionneurs, dont ilsétaient solidaires, inciterait le gou-vernement à prendre des mesuresénergiques en leur faveur.

Ils ne se satisfont pas du projetde budget du ministère de l’équipe-ment, qui prévoit la création devingt postes supplémentaires en1998 : « Nous serons quatre centdeux, au lieu de trois cent quatre-vingt-deux , alors qu’il faudrait êtrele double ! », proteste Joël Weitz,secrétaire général du syndicat descontrôleurs des transports ter-restres Force ouvrière. Secontentent-t-ils du projet de loi« tendant à améliorer les condi-tions d’exercice de la profession detransporteur routier » approuvé auconseil des ministres du lundi10 novembre (Le Monde daté 9-10 novembre) ? Ce texte les auto-rise, enfin, à contrôler les prix prati-qués. « Il satisfait une vieille revendi-

cation », constate M. Weitz.Les deux syndicats majoritaires

dans la profession (FO et Auto-nome) appellent donc les contrô-leurs à reprendre la grève du zèlequ’ils avaient entamée en octobre :les contrôleurs établissent un pro-cès-verbal à la moindre infractionconstatée, et immobilisent les véhi-cules dès qu’il manque une men-tion sur un document.

Ils font aussi la « grève des consi-gnations » : officiellement, ils neperçoivent plus d’avances sur lesamendes qui sont réclamées auxconducteurs étrangers : celles-cipeuvent s’élever à 10 000 francs,lorsqu’il y a fraude au chronotachy-graphe (outil qui mesure la vitessedu véhicule et le temps qu’y passele chauffeur). En fait, ils necontrôlent plus du tout les véhi-cules étrangers ; or, ceux-ci repré-sentent 22 % du trafic.

Ces contrôleurs sont chargés defaire respecter la réglementationsociale européenne, qui concerneles temps de conduite et les tempsde repos des chauffeurs, mais aussila réglementation des transports,condition d’une concurrenceéconomique loyale. Ils travaillentsur la route et dans les entreprises :

les contrôles aléatoires qu’ils effec-tuent leur permettent de repérer lesentreprises qui imposent des ca-dences illégales aux conducteurs. Ilsse placent près des zones de fret,des péages ou des nœuds routiers.

« On se dépêche d’arrêter les pre-miers camions qui passent, parce queles suivants sont avertis par “ CB ”qu’on est là et prennent un itinérairede délestage », raconte Jacques Do-tu, contrôleur et secrétaire général

adjoint du syndicat FO. « Au-jourd’hui, la fraude est sophistiquée,des interrupteurs étant montés sur leschronotachygraphes. Pour l’empê-cher, il faudrait équiper les camionsde chronotachygraphes électro-niques », déplore-t-il.

A l’aide de cartes et de « distan-ciers » indiquant les kilomètres quiséparent toutes les villes d’Europe,les contrôleurs tentent de vérifierque la distance parcourue est bien

celle qu’indique le disque. Concur-rence loyale oblige, ils examinent lepoids du camion. Lorsque le véhi-cule est trop chargé, ils l’immobi-lisent, jusqu’à ce que le chauffeurait fait le nécessaire pour se débar-rasser de son surplus de cargaison.

Pour cette mission, ils ont besoinde l’assistance de fonctionnaires enuniforme (douaniers, gendarmesou policiers), qui seuls, sont habili-tés à arrêter les véhicules. « Lesdouaniers viennent lorsqu’ils pensenttrouver de la drogue, des œuvresd’art ou de la fraude fiscale. Quantaux policiers et aux gendarmes moto-risés, ils manifestent beaucoup debonne volonté, mais ce travail ne faitpas partie des priorités imposées parleur hiérarchie », constate M. Weitz.

Pour assurer une meilleure coor-dination des services de l’Etat, AlainJuppé avait imposé, par circulaire,la constitution d’un pôle régionalde compétences. « Mais cela nemarche pas », observe le respon-sable syndical de FO. « Lorsque çase fait, la direction de l’équipement,qui doit en assurer le pilotage, neconsulte pas les contrôleurs destransports, alors qu’ils sont les princi-paux concernés », affirme-t-il.

Les contrôleurs se plaignent

d’être encadrés par des « des gensqui n’y connaissent rien » : « Ce sontdes ingénieurs des travaux publics del’Etat, qui ne s’intéressent qu’à laconstruction des routes et desponts », accuse Marie-MadeleineMilin, membre du Syndicat auto-nome. Les contrôleurs réclamentdonc la création d’un corps d’ins-pecteurs des transports, que le mi-nistère leur refuse.

Les contrôleurs se rendent aussidans les entreprises. Ils vérifientque les commissionnaires – inter-médiaires entre expéditeurs et-transporteurs, payés à la commis-sion –, font appel à des chauffeursinscrits au registre correspondant,et non à des travailleurs au noir. Ilsleur demandent de payer les chauf-feurs dans les délais légaux, ils exa-minent les contrats qu’ils passent :lorsqu’ils présument qu’ils im-posent un temps de conduite ex-cessif, ils vont chez les sous-trai-tants examiner les disques. Mais ilarrive que contrat et disques aient« disparu ». Dorénavant, lescontrôleurs pourront poursuivreleurs investigations, en examinantles factures.

Rafaële Rivais

M. Jospin : « Tous les acteursont su assumer leurs responsabilités »

« Le gouvernement – et, en particulier, le ministre des transports,Jean-Claude Gayssot, – a assumé sa propre responsabilité » dans leconflit des routiers, indique le premier ministre, dans un entretienque publie, lundi 10 novembre, La Dépêche du Midi. Lionel Jospinsouligne que « le gouvernement a d’abord tout fait pour prévenir ceconflit », puis, « une fois celui-ci déclenché, il a ramené ces mêmes par-tenaires sociaux à la négociation par des engagements forts et par lapratique constante de la consultation, tout en préservant la liberté deconsultation ».

M. Jospin relève « avec satisfaction que tous les acteurs de cette crise[patronat, syndicats et routiers] ont su assumer leurs responsa-bilités ». Il en tire une conclusion sur « ce que doit être un vrai dia-logue social : sincère du point de vue des partenaires sociaux et impli-quant l’Etat, qui doit en faciliter l’expression, mais aussi en garantir lesrésultats ».

LE SCORE de la Gauche socia-liste apparaît comme le principalenjeu de la préparation du congrèsdu Parti socialiste, du 21 au 23 no-vembre à Brest. Depuis le 4 no-vembre, et jusqu’au 14 novembre,les militants socialistes sont invitésà voter sur les trois motionsd’orientation qui leur sont sou-mises : la motion A, défendue parFrançois Hollande, premier secré-taire délégué, et la quasi-totalitédes courants du PS ; la motion B,émanant d’anciens poperénistes,Marie-Thérèse Mutin et Alain Vida-lies ; la motion C, présentée parJean-Luc Mélenchon, Julien Dray etMarie-Noëlle Lienemann, au nomde la Gauche socialiste.

Pour l’heure, à peine 20 % desvotes des sections socialistes sontparvenus à la direction du PS. Il enrésulte des indications fragmen-taires qui incitent à la prudencedans l’attente des grandes fédéra-tions. La participation serait entre65 % et 70 %, ce qui donnerait plusde 80 % pour la motion A, une mo-tion C plus proche de 10 % que de15 %, une motion B à la limite des5 %.

Sur les deux tiers des sections desAlpes-Maritimes, la participationserait de 65 %, avec 90 % pour la A,1 % pour la B et 8 % pour la C. Dansl’Indre-et-Loire, la motion C serait àmoins de 15 %. En Haute-Vienne,une faible participation, en-dessousde 50 %, ne jouerait pas en faveurde la Gauche socialiste.

Intervenant, dimanche 9 no-vembre, au « Grand-Jury RTL-LeMonde-LCI », M. Dray a choisi unregistre modéré, en adéquationavec le score modeste qui s’an-nonce pour son courant – « au-des-sus de la barre des 10 % », a-t-il indi-qué –, bien au-dessus des

pourcentages obtenus au congrèsde Rennes, en 1990, où les motionsde M. Mélenchon et de Mme Liene-mann avaient obtenu respective-ment 1,35 % et 0,6 %, mais sensible-ment en-dessous du score del’amendement de la Gauche socia-liste lors de la convention écono-mique de décembre 1996(8 873 voix et 16,19 %).

M. Dray a évoqué « l’été indien »du gouvernement, salué la bonnegestion « de gauche » du conflit desroutiers et revendiqué le « devoird’exigence », en indiquant avec iro-nie qu’il préfère exercer celui-ci au-jourd’hui plutôt que d’en être ré-duit, demain, au « droitd’inventaire » exercé par Lionel Jos-pin sur les septennats de FrançoisMitterrand.

« C’est un homme de caractère, aassuré M. Dray à propos de M. Jos-

pin. Nous aussi, nous avons notre ca-ractère et, des fois, cela fait des étin-celles. »

PAS DE SURENCHÈRESi M. Dray a rappelé avec force

ses différences sur l’Europe, enconfirmant son refus du traitéd’Amsterdam, il a en revanche refu-sé de faire de l’immigration « unélément de surenchère ». Le députéde l’Essonne s’est dit partisan d’un« droit du sol intégral, avec une céré-monie républicaine le 14 juillet »,mais il n’a pas réclamé une régula-risation générale de tous les « sans-papiers » : « Je suis pour une régula-risation, a-t-il indiqué en se voulant« généreux », qui prenne en considé-ration tous les éléments de situationdifficile concernant ces popula-tions. »

Pour autant, si M. Dray a exclu

que la Gauche socialiste, qui a ac-cumulé les désaccords avec le gou-vernement, quitte le PS – « Faireune petite boutique à côté des autrespetites boutiques ? Vous trouvez quec’est démonstratif, ce qu’a fait Jean-Pierre Chevènement ? » –, il a jugé« difficile » une synthèse entre lesmotions A et C au congrès.

Une synthèse d’autant plus diffi-cile que les candidats au poste depremier secrétaire devront présen-ter leurs candidatures avant la réu-nion de la commission des résolu-tions. Depuis l’été, il est prévu queM. Mélenchon défendra les cou-leurs de la Gauche socialiste face àM. Hollande, mais cette tactiquepourrait être remise en cause si lamotion C n’atteignait pas 10 %. « Sinotre score est dans les ordres degrandeur que nous prévoyons, s’estborné à indiquer M. Dray, il serait

normal que le courant que nous au-rions cristallisé pour ce congrès aitson propre candidat au poste de pre-mier secrétaire. »

A l’intérieur de la motion A, quisera en tout état de cause, très lar-gement majoritaire, des recomposi-tions pourraient intervenir au len-demain du congrès, au-delà de larépartition des postes au conseilnational au sein du bloc majoritairede 51 % – entre rocardiens, jospi-nistes, mauroyistes, amis de Mar-tine Aubry et petits courants – etentre les alliés fabiusiens, merma-ziens, poperenistes et emmanuel-listes qui compléteront la majorité.

Apparu discrètement au momentde l’élection présidentielle, structu-ré en juin 1996 lors de la conventionsur la démocratie, le groupe Nou-velle Gauche devrait mener son ac-tion au grand jour en regroupant

une partie des rocardiens et desjospinistes.

Se voulant à l’origine « une dé-marche générationnelle animée pardes militants entrés dans l’action po-litique, syndicale ou associative àpartir de la fin des années 80 »,Nouvelle Gauche « entend désor-mais s’ouvrir davantage ». Présidépar Benoît Hamon, ancien pré-sident du Mouvement des jeunessocialistes (MJS) et futur premiersecrétaire du Morbihan, et animépar Jean-Patrick Gilles, premier se-crétaire d’Indre-et-Loire, et RégisJuanico, président du MJS, ce cou-rant pourrait incarner, en soutien àM. Hollande, la relève de la « géné-ration Jospin » qui a déjà émergé ausein du groupe socialiste de l’As-semblée nationale.

Michel Noblecourt

La Gauche socialiste s’efforce de rassembler 10 % des militantsLa préparation du congrès socialiste qui se réunira à Brest le 21 novembre est dans la phase de vote des sections.

La principale motion « alternative » n’est pas assurée d’atteindre un score qui lui permette de s’opposer à la majorité pro-gouvernementale

INVITÉ, dimanche 9 novembre, du « GrandJury RTL-Le Monde-LCI », Julien Dray a décla-ré, à propos du conflit des routiers que « s’il ya eu un dénouement positif (...), c’est parce qu’ily avait un gouvernement de gauche qui a jouéson rôle, c’est-à-dire qui a été soucieux de l’in-térêt général mais qui, en même temps, a défen-du l’intérêt des salariés et qui s’est porté garantde l’accord ».

« Nous considérons qu’il ne faut pas ratifier letraité d’Amsterdam, a affirmé le député del’Essonne. Pour le ratifier, il faudrait remettreen cause le pacte de stabilité, remettre en causela logique de fonctionnement de la futurebanque centrale (...), instaurer une charte so-ciale et, enfin, procéder à des avancées signifi-catives sur le plan de la construction politiquede l’Europe. »

Pour M. Dray, il faudra pour la constructioneuropéenne en passer, « à un moment don-

né », par « une confrontation ». Evoquant lesommet sur l’emploi de Luxembourg, M. Draya estimé qu’« il faut être capable de défendreun modèle social européen, tout en rassurantnos partenaires sur notre volonté de construirel’Europe ». « Un sommet avec des objectifs maissans moyens, a-t-il ajouté, c’est un sommet quicourt à l’échec. »

« ÉTÉ INDIEN » POUR UN « COPAIN »Qualifiant Lionel Jospin de « copain »

– « c’est même un camarade » –, M. Dray a as-suré qu’au regard des sondages, le gouverne-ment connaît « une sorte d’été indien qui seprolonge ». « Tout cela permet au gouverne-ment de développer son action mais rien n’estjoué », a-t-il assuré.

Abordant la stratégie de la Gauche socia-liste, qui présente une motion au congrès duParti socialiste, du 21 au 23 novembre, à Brest,

M. Dray a affirmé : « Nous ne sommes pas là entrain d’essayer de grapiller deux points pour lecongrès du Parti socialiste. (...) Nous sommes làsimplement parce que nous défendons nosconvictions. Nous avons pris nos responsabilités,y compris en sacrifiant peut-être ce qui est notreambition naturelle, pour les uns et les autres(...). On est aussi en capacité d’exercer des res-ponsabilités dans ce pays. Et je pense qu’on leferait bien si on nous en offrait la possibilité. »

Indiquant que, selon les premières informa-tions, la Gauche socialiste va faire « un scoresubstantiel, au-dessus de la barre des 10 % »,M. Dray estime que « la synthèe sera difficileau regard de ce que nous avons exprimé et de cequ’exprime la majorité (...) même si celle-ci esttrès hétéroclite. (...) Nous, nous préférons exer-cer notre devoir de sincérité et d’exigence main-tenant, plutôt que de n’avoir après, comme seulrecours, que le droit d’inventaire. »

Tension entre le gouvernement et les députés socialistesà propos du projet de loi sur la nationalité

LA TENSION monte entre legouvernement et le principalgroupe de la majorité à propos duprojet de loi sur la nationalité, qua-rante-huit heures avant que les dé-putés socialistes se prononcent surles amendements issus de leursrangs. L’« équilibre » des textes surla nationalité et sur l’immigration,mis en avant par le premier mi-nistre, pourrait être remis en cause.

Apparu au grand jour lors de laréunion du groupe socialiste del’Assemblée nationale, le 5 no-vembre, le débat se focalise sur lesconditions d’acquisition de la natio-nalité pour les enfants nés en

France de deux parents étrangers.La loi Méhaignerie de 1993, quiexige de ces derniers une manifesta-tion de volonté entre 16 et 21 ans, asupprimé la possibilité pour les pa-rents étrangers d’obtenir la nationa-lité pour leurs enfants mineurs nésen France.

La décision du gouvernement dene pas rétablir cette possibilité a misle feu aux poudres. Derrière le rap-porteur de la commission des lois,Louis Mermaz, une partie des dépu-tés socialistes prône, sur ce point, leretour à la législation antérieure à1993, voyant dans cette mesure laréalisation de la promesse de LionelJospin de « revenir au droit du sol ».

SIGNATURES CONTESTÉESRefusant de céder à cette exi-

gence, le gouvernement, qui avaitinitialement prévu de maintenir lamanifestation de volonté entre 16 et18 ans, pourrait accepter d’étendrecette procédure aux enfants entre13 et 16 ans, avec l’accord des pa-rents. Cette position a été envisagéelors d’une réunion des directeurs decabinet concernés, le 7 novembre, àMatignon.

Signe de la tension qui règnedans les rangs socialistes, ce débatprincipal s’est doublé, en fin de se-maine, d’une controverse autour del’amendement présenté par Véro-nique Neiertz (Seine-Saint-Denis),qui prône le retour à un droit du sol« intégral » : rédigé le 5 novembre,ce texte prévoit l’acquisition auto-matique de la nationalité dès lanaissance sur le sol français, à la

seule condition que les parentssoient en situation régulière et ré-sident depuis au moins cinq ans enFrance.

Cette disposition maximaliste ainquiété le gouvernement, d’autantplus que la signature de certains« ténors » socialistes, commeLaurent Fabius et Henri Emmanuel-li, ainsi que celle de Julien Dray etde proches du premier ministre, fi-gurait au bas de l’amendement. Aupoint d’alimenter une rumeur sur lavolonté présumée de certains socia-listes de ressortir le « chiffonrouge » de l’immigration pour em-barrasser le gouvernement. Devantl’émotion manifestée notammentpar Daniel Vaillant, ministre des re-lations avec le Parlement, puis parles signataires eux-mêmes, qui ontaffirmé ne pas avoir donné leur ac-cord, leurs paraphes ont été rayés.

Lundi matin 10 novembre, cer-tains « signataires » indiquaient ne« toujours pas comprendre » com-ment leurs noms avaient pu êtreainsi utilisés. Mise en cause danscette affaire, Mme Neiertz assure queson amendement lui a « totalementéchappé ». Pour autant, elle persisteà affirmer que M. Fabius « avait l’aird’accord » avec sa proposition etque M. Emmanuelli était « enthou-siaste ». Dans l’entourage de M. Fa-bius, on souligne que l’attitudeconstante du président de l’Assem-blée est de ne pas signer de propo-sition de loi ni d’amendement.

Philippe Bernard etJean-Baptiste de Montvalon

PARTI SOCIALISTE La prépa-ration du congrès du Parti socialiste,qui se réunira à Brest du 21 au 23 no-vembre, se concentre, dans la phase

de vote des militants, sur le résultatqu’obtiendra la motion de la Gauchesocialiste, opposée à celle qui ras-semble les « grands courants » duparti autour du premier secrétaire

délégué, François Holland. b INVITÉdu « Grand Jury RTL-Le Monde-LCI »,dimanche 9 novembre, Julien Dray,député de l’Essonne et l’un des ani-mateurs de la Gauche socialiste, a

salué les réussites du gouverne-ment, mais déclaré normal que, sison courant dépasse 10 % des voix,il présente son propre candidatcontre M. Hollande pour le poste de

premier secrétaire. b LE PROJET DELOI sur la nationalité, qui doit êtreexaminé en séance publique par lesdéputés le 26 novembre, provoqueune tension avec le groupe PS.

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F R A N C E LE MONDE / MARDI 11 NOVEMBRE 1997 / 7

Mise en garde de Mme Aubrysur les dépenses de santéMINISTRE de l’emploi et de la solidarité, Martine Aubry a déclaré, di-manche 9 novembre, lors d’un colloque du syndicat de médecins gé-néralistes MG-France à Paris, que le respect des objectifs de dépensesde santé pour 1997 n’est en rien « joué ». Elle a appelé les généralistesà la « mobilisation ». Les dépenses d’assurance-maladie n’ont progres-sé que de 0,1 % en septembre, après deux hausses plus fortes en juilletet août, mais l’enveloppe allouée aux médecins pour 1997 a été dépen-sée aux trois quarts.Mme Aubry a prévenu qu’elle saura « mettre à mal ceux qui veulent faireéchouer notre système de santé ». « Vous n’êtes pas de ceux, et je m’en ré-jouis, qui pensent qu’il vaut mieux être salarié d’une compagnie d’assu-rance privée que conventionné à la Sécurité sociale », a-t-elle ajouté.

DÉPÊCHESa OPPOSITION : Lionel Jospin, dans un entretien publié lundi10 novembre, par La Dépêche du Midi, estime que l’opposition « désta-bilisée, divisée politiquement, déchirée par les luttes de personnes, tra-verse une crise ». « Si cette crise des partis de la droite républicaine seprolongeait, elle profiterait à l’extrême droite, selon le premier ministre.La porosité entre l’une et l’autre est déjà manifeste, qu’il s’agisse des idéesou des hommes. Je ne souhaite pas que cela aille plus loin. » M. Jospinannonce que le gouvernement lancera en 1998 « un débat concernantles prérogatives parlementaires de l’opposition, notamment le travail encommission et le droit d’amendement ».a SERVICES SECRETS : le général de division Philippe Rondot estmis à la disposition du ministre de la défense, Alain Richard. Ancienofficier à la DGSE (Direction générale de la sécurité extérieure) etgrand connaisseur des questions de renseignement, le général Ron-dot, soixante et un ans, était jusqu’à présent conseiller à la DST. Il est àl’origine de la libération des otages français de Beyrouth et de l’arres-tation, en août 1994, du terroriste Carlos. A la défense, il sera chargéde la coordination du renseignement entre la DGSE et la DST (Direc-tion de la surveillance du territoire).

Jean-Marie Le Pen relance à Bucarestson projet d’« internationale »

BUCARESTde notre correspondant

Le président du Front national arelancé, dimanche 9 novembre, àBucarest, son idée de créationd’une « internationale nationa-liste », qui regrouperait les partisnationalistes européens afin de les« aider à prendre le pouvoir dansleur pays ». Jean-Marie Le Pen s’ex-primait devant le congrès des ultra-nationalistes du Parti de la GrandeRoumanie (Romania Mare, PRM),une formation qui tient un discoursxénophobe, raciste, antijuif et hos-tile à la minorité magyare de Rou-manie. Longuement applaudi parles 1 000 délégués du PRM, M. LePen a précisé que la « constitutionde l’internationale nationaliste auralieu à la fin 1998 ou, au plus tard,début 1999 ».

Son initiative a trouvé une terrefertile chez les extrémistes rou-mains. Le président du PRM, Cor-neliu Vadim Tudor, a proposé à sontour une « organisation mondialedes partis nationalistes ». « Le Penl’appelle "Euronat" mais, moi, je luiai suggéré de l’appeler "Mondonat",car des partis d’Amérique latine,d’Afrique et d’Asie veulent aussi y

adhérer », a expliqué cet ancienpoète de cour du dictateur NicolaeCeausescu.

Pour M. Le Pen, l’« Euronat »doit construire « une Europe indé-pendante face aux Etats-Unis », oùles nationalistes auront la missiond’endiguer « la dérive dangereuse »dans laquelle est entraîné actuelle-ment, à ses yeux, le VieuxContinent. Dans la vision du chefdu Front national, les nationalistesveulent tout simplement « uneRoumanie roumaine, une Francefrançaise ou une Espagne espa-gnole ».

Les deux partis d’extrême droite,français et roumain, disent être« idéologiquement liés » dans leur« lutte contre le mondialisme dictépar les Etats-Unis » et contre une« Europe unie ».

« Jean-Marie est satanisé toutcomme je le suis, car nous luttonscontre les aventuriers et les maffio-si », a expliqué le président duPRM, dont la levée de l’immunitéparlementaire pour « calomnie » aété à plusieurs reprises débattuepar le Sénat roumain.

Andréi Neacsu

Un meeting catholique traditionalistedénonce les crimes du communisme

Un dirigeant du Front national exige « repentance »Un peu plus d’un millier de personnes ont participé, di-manche 9 novembre, à Paris, à un meeting et à unemanifestation contre les « crimes contre l’humanité

des régimes communistes » à l’appel de Chrétienté-So-lidarité, que préside Bernard Antony, député européenet membre du bureau politique du Front national.

UN ENFANT tenait haut la croix.Puis venaient plusieurs centainesd’hommes et de femmes, arborantdes cœurs vendéens et le fanion deChrétienté-Solidarité, l’organisa-tion présidée par Bernard Antony,catholique traditionaliste, membredu bureau politique du Front na-tional et dont la devise est « Patrie,Dieu, Famille ».

Tous hurlaient : « Communistes,assassins ! », « Boudarel, assas-sin ! » Ainsi s’est terminé, en défiléde la Mutualité à Notre-Dame,dans une atmosphère quelque peuhystérique, la journée de « procèsinternational des crimes contre l’hu-manité des régimes communistes »organisée, dimanche 9 novembre,par Chrétienté-Solidarité, à la sallede la Mutualité, à Paris.

« Il ne s’agit pas d’une procédurepénale, mais d’un procès moral »,avait pris la précaution de préciserM. Antony, qui n’ignore pas que leprincipal accusé de la journée, ce-lui dont le portrait figurait sur lesaffichettes annonçant le « procès »,le Français Georges Boudarel, bé-néficie d’un non-lieu pour ses acti-vités dans le camp viet-minh 113,où il était « commissaire poli-tique ». M. Boudarel n’était qu’unsymbole pour un procès politique

où il s’agissait de montrer, commel’ont affirmé tour à tour l’anciendéputé Pierre Clostermann, avia-teur de la France libre, le journa-liste d’extrême droite Jean-PierreCohen, ou l’ancien député AlainGriotteray, lui aussi ancien résis-tant, qui avait envoyé un messagede sympathie, qu’« Hitler était unbébé à côté de Staline », que « de-vant les responsables des crimescommunistes, Papon fait figure depetit garçon » et, enfin, que « lecommunisme et le nazisme sont lesmonstrueux rejetons du marxisme etdu socialisme ».

« VOLEURS D’ÂMES »D’anciens détenus au Vietnam,

en URSS, au Laos sont venus té-moigner, réclamant que les « vo-leurs d’âmes », les auteurs de « la-vages de cerveaux » des régimescommunistes soient jugés pourcrimes contre l’humanité. PourM. Antony, Karl Marx a « fait allé-geance à Satan, et le communisme aété marqué de cette allégeance ». Lenombre des victimes des Goulagss’élèverait à deux cents millions et« non à quatre-vingt-cinq millions,comme par je ne sais quel révision-nisme certains le prétendent », a-t-ilprécisé en rejetant ainsi l’évalua-

tion du Livre noir du communisme(Le Monde daté 9-10 novembre),dont les exemplaires mis en venteà la Mutualité sont partis néan-moins comme des petits pains.

Il en est allé de même, d’ailleurs,d’une brochure intitulée Les Ori-gines masquées du bolchévisme, ceque les communistes doivent auxjuifs, recensant les juifs ayant parti-cipé à la révolution russe ou « àl’administration des camps » stali-niens. « Pourquoi ce silence des rab-bins, ce silence sur les crimes et lesfautes de leurs prédécesseurs ? », ademandé M. Antony dans son dis-cours de clôture, face à Notre-Dame, avant d’exiger que « le PCFet ses compagnons de route », « lessorbonnards dégoulinant de bonneconscience », les « intellectuels au-toproclamés », « les journalistes »de L’Humanité, du Monde, deLa Croix, La Vie, Témoignage Chré-tien, Réforme, etc. « les évêques »,« les pasteurs », coupables de« complicité des crimes commu-nistes », fassent « acte de repen-tance ».

Christiane Chombeau

Un nouveau directeur pour la sécuritécivile est nommé en conseil des ministres

Le commissaire au Plan, Henri Guaino, sera probablement remplacé,le 19 novembre, par Jean-Michel Charpin, membre du conseil d’analyse

économique mis en place par le premier ministre, Lionel JospinLE CONSEIL des ministres du

lundi 10 novembre devait procéderà un mouvement préfectoral. Jean-François Denis, directeur de la sé-curité civile depuis mai 1996, de-vrait quitter ce poste pour devenirpréfet de Meurthe-et-Moselle ;Jean Dussourd, préfet des Hautes-Pyrénées, devrait être nommé di-recteur de la sécurité civile et de ladéfense, ces deux directions du mi-nistère de l’intérieur devant fu-sionner. Il devra calmer la grognedes pompiers liée à la mise enplace de la départementalisationdes services d’incendie et de se-cours (Le Monde du 29 octobre).

Gérard Bougrier, préfet de policede Corse, devrait être nommé pré-fet à Tarbes, en remplacement deM. Dussourd. Bernard Lemaire,sous-préfet de Bayonne, devraitremplacer M. Bougrier à Ajaccio.Rémi Thuau, secrétaire généralpour les affaires régionales duNord-Pas-de-Calais, devrait êtrenommé préfet de Saint-Pierre-et-Miquelon, en remplacement deJean-François Carenco, envoyédans le Tarn-et-Garonne, le 29 oc-tobre. Michel Pinauldt, préfet de

police de Lorraine, devrait être pla-cé hors cadre, en attendant d’êtrechargé de mission au SGCI (orga-nisme européen chargé notam-ment de la mise en œuvre des ac-cords de Schengen), enremplacement de Pierre-HenryMaccioni, muté en Dordogne le1e r octobre. Didier Pétetin, secré-taire général de la préfecture deSeine-et-Marne, devrait le rempla-cer à Metz. Hubert Perrot, préfetdélégué pour l’action extérieuredes collectivités locales, devraitêtre nommé inspecteur général del’administration en service extraor-dinaire (c’est-à-dire pour cinq ansseulement). Jacques Andrieu, pré-fet de Meurthe-et-Moselle, devraitremplacer M. Perrot sur la coopé-ration décentralisée, qui devraitêtre renforcée. Henri Hurand, chefdu service de coopération tech-nique internationale de la police,devrait se voir confier la prési-dence de la Société française d’ex-portation de matériels et systèmesrelevant du ministère de l’intérieur(SOFREMI).

Par ailleurs, le commissaire auPlan, Henri Guaino, proche de Phi-

lippe Séguin et de Charles Pasqua,sera remplacé, probablement lorsdu conseil des ministre du 19 no-vembre, par Jean-Michel Charpin,ancien directeur de études écono-miques de la BNP. M. Guaino, quiavait participé à l’élaboration dudiscours économique de JacquesChirac lors de la campagne prési-dentielle, a été nommé à ce postepar le précédent premier ministre,Alain Juppé, qui n’entretenait pasde bons rapports avec lui (LeMonde du 4 octobre). Lionel Jos-pin, qui souhaite redonner de la vi-gueur au commissariat général auPlan, n’a pas caché qu’il voulait ob-tenir, sans succès jusqu’ici, unchangement de titulaire du poste.On estime, dans son entourage,que M. Guaino n’est pas en me-sure d’exercer cette charge. Aucentre d’une rumeur de débarque-ment depuis plusieurs semaines,l’intéressé se refuse à tout com-mentaire, se contentant de signalerque « le Plan n’a jamais sorti autantde rapports qu’au cours des six der-niers mois ».

O. B. et R. Rs.

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S O C I É T ÉLE MONDE / MARDI 11 NOVEMBRE 1997

La « maison de Nanterre » est toujours en attente d’une rénovationIL EST régulièrement dénoncé pour la vétus-

té de ses locaux et la rudesse de son accueil. Ilfut épinglé en janvier 1996 par un rapport acca-blant de l’inspection générale des affaires so-ciales (IGAS) stigmatisant l’insécurité et lemanque d’hygiène. Pourtant le centre hospita-lier d’accueil des personnes sans abri (Chapsa)de Nanterre (Hauts-de-Seine) devra encore at-tendre jusqu’au printemps 1998 pour voir dé-marrer les premiers travaux de rénovation.

Depuis sa création, en 1877, le dépôt demendicité de Nanterre, devenu l’un des princi-paux lieux d’accueil des sans-abri de la régionparisienne, a mauvaise réputation. L’évocationde la « maison de Nanterre » renvoie à desimages de clochards ramassés à Paris par les« bleus », la brigade spéciale de la préfecturede Paris, et qui, après une douche forcée, unesoupe avalée en silence, s’entassent dans desdortoirs lugubres. Ils en repartent au petit ma-tin vêtus de propre pour retrouver la bouchede métro ou la gare abandonnée la veille avantde refaire le voyage vers Nanterre quelquesjours plus tard.

Au début des années 90, la population duChapsa a changé. Aux clochards parisiens sontvenus se mêler de nouveaux exclus, des jeunesâgés de dix-huit à vingt-cinq ans plus agressifs,

des toxicomanes, des étrangers pour la pluparten situation irrégulière. A la vétusté des lieuxs’est alors ajoutée une insécurité grandissante,aux querelles d’après boisson d’autrefois sesont greffés les trafics de drogue et de faux pa-piers, les viols et les vols. Ce climat est dénoncéde plus en plus vivement par le personnel del’établissement, surtout depuis qu’un pension-naire a tué un autre sans-abri, le 24 septembre,d’un coup de revolver dans un dortoir.

UN PROJET DE 37 MILLIONS DE FRANCSDeux ans après l’adoption d’un plan de ré-

novation des locaux, la situation au Chapsa n’aque peu évolué. Les premiers efforts se sontportés sur l’hygiène, avec le recrutement devingt-deux agents « d’hôtellerie » pour l’entre-tien des lieux. Jusque-là, d’anciens résidents enétaient chargés, contre un modeste pécule,avec parfois, selon l’IGAS, « d’inacceptablesdérives ».

Les travaux de restructuration du centre de-vraient finalement commencer en mars 1998.Malgré les protestations des populations deNanterre et de Colombes, qui n’ont jamais vud’un bon œil le maintien d’une telle structure àla lisière de leurs communes, le Chapsa garde-ra sa capacité actuelle de trois cents lits, dont

cinquante réservés pour les soins hospitaliers.Ce projet, d’un coût de 37 millions de francs,prévoit que les dortoirs, dont l’un peut actuel-lement accueillir jusqu’à cent dix-huit per-sonnes, laissent la place à des chambres dequatre à six lits. Cependant, si la réorganisa-tion du Chapsa, qui devrait durer trois ans, estde nature à humaniser l’accueil des sans-abri,elle ne règle pas, selon le personnel, les pro-blèmes d’insécurité. Les salariés se mobilisentpour l’augmentation des effectifs de nuit, lamise en place de détecteurs de métaux et pourque la fouille des pensionnaires soit autorisée.

Le directeur de l’établissement, Antoine deTovar, ne partage pas cette vision. Il souhaiteprivilégier le respect et la dignité des sans-abrirecueillis et aime à rappeler que le Chapsa estavant tout « un lieu de soins et non une prison ».Quant aux riverains proches de la maison deNanterre, comme le personnel, ils exigent queles bus ramènent vers Paris tous les sans-abriet pas seulement ceux qu’ils ont amenés,comme actuellement, ne voulant pas voir lessquares de leurs résidences se transformer enlieux d’accueil, jonchés d’ordures, de bouteillesvides et d’excréments.

Jean-Claude Pierrette

L’ALARMISME n’est plus de sai-son. L’approche de l’hiver n’a pasfait résonner de branle-bas decombat gouvernemental. Quelquesparagraphes à la fin d’une commu-nication consacrée à la lutte contrel’exclusion ont suffi à Martine Au-bry pour faire pénétrer, lundi 10 no-vembre, en conseil des ministres,un peu de la rigueur climatique desjours à venir. Signe des temps :pour la première fois depuis 1984, laministre de l’emploi et de la solida-rité n’a pas adressé de circulaire surce sujet aux préfets, mais une lettre,le 30 octobre. Aux circulaires surdes dispositifs d’exception en hiveront succédé les temps du « quanti-tativement suffisant ».

« Le dispositif d’accueil qui avaitété conçu à l’origine comme un dis-positif saisonnier est maintenant or-ganisé comme un dispositif per-manent, note la ministre dans salettre. Pour l’essentiel, les besoinsd’accueil d’urgence sont aujourd’huicouverts. » Ce constat ne s’expliquepas par une résorption miraculeusede la pauvreté. Les personnes engrande précarité n’ont jamais étéaussi nombreuses, mais les struc-tures censées répondre immédiate-ment aux situations de détressen’ont jamais disposé d’autant d’ou-tils.

A l’orée de l’hiver 1997-1998,Mme Aubry peut ainsi s’appuyer surl’amélioration du traitement del’urgence sociale depuis plus de dixans pour combattre la montée de la

misère. Certaines structures sym-bolisent sans doute mieux qued’autres les évolutions de la ré-ponse d’urgence à la grande exclu-sion. Ainsi les équipes mobiles, quise sont multipliées pour approcherau plus près des misères urbaines.Elles ont, sur deux points, profon-dément modifié le travail social cesdernière années : proximité avec lespersonnes à aider ; coordinationentre acteurs.

« J’ai toujours pensé qu’il était im-pératif d’aller au-devant de ceux quine demandent rien », triomphe au-jourd’hui Xavier Emmanuelli. Fon-dateur, en 1993, du premier et duplus connu des dispositifs mobiles,le SAMU social de Paris (SSP), l’an-cien secrétaire d’Etat à l’action hu-manitaire d’urgence du gouverne-ment d’Alain Juppé fait visiter leslocaux de sa « créature », sanscraindre d’en souligner le luxe.« Parfois, les gens qui viennent icipour la première fois pensent qu’ils sesont trompés. Ils n’imaginent pas quecela peut être destiné à despauvres. »

PRÊTES À PARTIRLe bel hospice Saint-Michel,

porte de Saint-Mandé, entièrementrestauré et mis à disposition par lesservices du patrimoine de la Villede Paris, concentre la quasi-totalitédes missions du SAMU social. Ac-cueil de jour, pour « apprivoiser »les plus éloignés de la société ; sallede régulation des demandes reçuessur le numéro vert – le numéro àhuit chiffres est devenu le 115, danschaque département, depuisfin septembre – ; trente lits infir-miers pour les personnes dont lesproblèmes de santé n’impliquentpas une hospitalisation ; fourgon-nettes garées dans la cour, prêtes àpartir en tournée... Tout, dans cet« anti-Nanterre », dit la puissanced’un mastodonte de l’action d’ur-gence. Structuré en groupementd’intérêt public (GIP) et fort d’unbudget de 40 millions de francs, leSSP aura prospéré en quatre ans,non sans traverser une grave crisede croissance.

« Nous avons failli crever de noustransformer en simple taxi social »,soupire M. Emmanuelli. Submergéd’appels de gens qui l’utilisaientcomme central de réservation etmoyen de transport vers un héber-gement nocturne, le SSP s’est peu àpeu trouvé détourné de sa missionpremière d’approche des plus mar-ginalisés. Des accords avec la RATP,qui convoie désormais ceux quipeuvent se déplacer jusqu’auxcentres d’hébergement, ont permisde renouer avec le souci de la « ma-raude ». L’extension des tournéesdurant la journée a permis de

mieux consacrer la nuit à cettequête des isolés.

A la tête de cette « émanation dela puissance publique », selon sonexpression, puis au gouvernement,Xavier Emmanuelli aura assisté àtoute une germination de disposi-tifs mobiles, aussi éloignés du sien,malgré leur appellation courante deSAMU social, que différents les unsdes autres. « Je ne souhaitais pas dé-poser une marque de fabrique, dit-il.La situation à Paris est trop parti-culière pour être transposable. Il ne

fallait pas non plus réglementer, aurisque de couper les ailes aux initia-tives. »

Une circulaire de Simone Veil,alors ministre des affaires socialesd’Edouard Balladur, appellera en1994 à la mise en place d’équipesmobiles dans les trente plusgrandes villes de France. Le rôle dé-cisif joué par les directions de l’ac-tion sociale, le financement engrande partie par l’Etat, restent despoints communs entre ces struc-tures, malgré leurs organisations

hétérogènes. Les SAMU sociaux deprovince ont eux aussi fait appa-raître de nouveaux publics, aux be-soins inédits, en bouleversant lesméthodes du travail social. « Au dé-but, dit Bernard Roux, responsabled’Entretemps, une des associationsqui se sont fédérées pour mettre enplace, dès 1993, la veille sociale deLyon, nous nous sommes fait un peupeur. Nous pensions aller au-devantde gens violents et déséquilibrés. Puisnous nous sommes rendu comptequ’il n’était pas si difficile de passerd’un logique de guichet à une lo-gique de contact. La maraude nous apermis de prendre conscience del’isolement. »

STRUCTURES ASSEMBLÉESLes SAMU sociaux ont aussi en

commun d’avoir contribué à resser-rer les liens entre associations.« Avant la création de la coordina-tion mobile d’accueil et d’orientation,explique Bernard Codert, le pré-sident de ce dispositif qui intervientsur la communauté urbaine de Lille,chacun travaillait dans son coin.Maintenant la centralisation des de-mandes permet de mieux connaîtrel’action des autres. »

Dans le schéma d’organisation leplus courant, une association gèrel’équipe mobile, une deuxième s’oc-cupe du numéro vert et de l’orienta-tion, d’autres fournissent lesmoyens d’hébergement. Les struc-tures ainsi assemblées n’en courentpas moins quelques risques. « Tout

dépend encore trop du dynamismed’un élu ou de la bonne volonté de laDAS, dit Bernard Catrix, respon-sable de l’UDOS, l’Union départe-mentale d’accueil et d’urgence so-ciale de la Somme, qui gère leSAMU social d’Amiens, créé à l’ini-tiative du maire de la ville, Gilles deRobien (UDF-DL). Le fait de ne re-poser sur aucune base réglementairefragilise l’ensemble, notamment pourasseoir une stabilité financière ».

Surtout, aucune de ces structuresne perd de vue l’absolue nécessitéde concevoir l’urgence comme unpremier pas vers une insertion plusdurable. « Il faut toujours qu’il existeune possibilité de recontrer quelqu’unpour un premier travail d’orientation,au lendemain d’un nuit passée en ac-cueil d’urgence », dit Aziz El Rabti,responsable de l’association Interlo-gement 93, qui intervient sur laSeine-Saint-Denis. L’urgence n’estqu’un soulagement transitoire sielle ne marque pas le début d’un re-tour vers la société. « On a beaufaire une très bonne régulation, unecoordination efficace, mais, si lesgens n’ont pas les moyens de sortirdes dispositifs par le haut... », ditAline Osman, de la Fédération na-tionale des associations d’accueil etde réadaptation sociale (FNARS).La banalisation de l’hiver n’auraitalors permis que de masquer, untemps, l’extension et la profondeurdes dégâts de l’exclusion.

Jérôme Fenoglio

L’urgence en Franceb Capacités. Le nombre de placesen hébergement d’urgence est deplus de 15 000, dont une partien’est disponible que l’hiver. S’yajoutent les 30 000 places environdes centres d’hébergement et deréadaptation sociale (CHRS)b Budget. Le crédit « intégrationet lutte contre l’exclusion »prévoit, au chapitre 47-21 de la loide finances, le budget de l’accueilet de l’hébergement d’urgence,ainsi que le fonds d’aide auxjeunes. En 1998, il doit s’élever à785 millions de francs, soit unrecul de 24 millions (3 %). Lebudget des CHRS est prévu à2,4 milliards de francs pour 1998,en progression de 2 %.b A Paris. Selon les services de laVille de Paris, la capitale disposerad’un total de 6 200 placespotentielles au 15 novembre,toutes structures, publiques ouassociatives, confondues. 3 000places sont disponibles toutel’année, 2 800 sont ouvertes pourl’hiver. Durant cette période, 400autres lits supplémentairespeuvent être ouverts en cas degrand froid. Il existe aussi 140 lits en centred’hébergement d’urgence poursoins infirmiers, pour lespersonnes ne nécessitant pas unehospitalisation.b SAMU Social. En 1996, leSAMU social de Paris a pris encharge, de jour, 84 561 personnes– une personne peut avoir faitappel plusieurs fois à ses servicesau cours de l’année. Ce total serépartit en 80 765 hommes, 1 702 femmes, 1 136 couples et 958familles. La nuit, 46 913 personnesont été prises en charge. AAmiens, du 1er janvier au30 septembre, le SAMU social aeffectué 1 670 interventions, soitune moyenne de 6 par nuit. ALyon, durant l’hiver 1996-1997,3 003 transports ont été effectués par la Veille socialemobile.b Décès. Quarante personnessont mortes des suites du froiddurant l’hiver 1995-1996. Ce bilan,dû à un hiver rigoureux, avait étéplus élevé que les annéesprécédentes qui avaient enregistréune quinzaine de décès. Environ150 personnes étaient mortes defroid en 1985 et près d’unecentaine en 1987, lors de deuxautres hivers particulièrementrudes.

Les irréductibles des cabanes de la porte de BercyLEUR existence s’est figée en

bord d’autouroute, là où les voi-tures accélèrent au sortir du péri-phérique parisien. Ils sont sept en-core à demeurer sur une étroite

bande d’herbes folles, coincéeentre le vacarme automobile, laSeine et l’échangeur de la porte deBercy. Le lieu avait connu sonquart d’heure de célébrité, en mai1995, lorsqu’une équipe de France2 était venue filmer ces gens qui vi-vaient sous des cabanes de bois etde carton, pour une chronique surle deuxième tour de l’élection pré-sidentielle (Le Monde du 16 mai1995).

La plupart des héros d’alors ontréussi à fuir ce bout de nulle part.Pierre et Marie-Jo, deux sexagé-naires, ont accepté cet été d’êtrerelogés dans un appartement parla mairie de Charenton-le-Pont,sur le territoire de laquelle est situé

ce terrain qui appartient au Portautonome de Paris. Leur baraque aété détruite par la police munici-pale, qui tolère les occupants dulieu mais n’accepte plus les nou-veaux arrivants. Jean-Claude a re-trouvé un travail de déménageur etsa compagne italienne serait en-ceinte, d’après l’un des irréduc-tibles de la porte de Bercy, qui l’acroisée récemment.

Le départ de Jean-François, il y aplus d’un an, s’est en revanche ef-fectué dans des conditions plustragiques : une évacuation sani-taire, pour cause de tuberculose.Ne restent aujourd’hui dans cescabanes que ceux qui n’ont aucunepossibilité ou aucune envie de par-tir. Sous le premier amas de bâcheset de carton demeurent trois Polo-nais. Lazek, premier arrivé, a étérejoint par Bogdan, puis cet été,par le plus jeune et le plus massifdes trois, Gregor. Ils survivent enmontant faire la manche, à tour derôle, sur le boulevard de ceinture.

Ce moyen de subsistance irriteau plus haut point Sebastian, leurvoisin, qui occupe la plus vaste etla mieux aménagée des cabanes. Iljure qu’il préférerait mourir plutôtde se laisser aller à la mendicité.

Dans un mélange d’anglais, denéerlandais et de français, cet Alle-mand âgé de quarante-huit ans,originaire de la région de Hanovre,assure même qu’il n’a pas voulutoucher le RMI, parce qu’il assimilel’allocation à une aumône.

Sebastian vit de son travail. Il ré-cupère du cuivre et du laiton, enaval, à la décharge de Bercy et lerevend en amont, à une entreprised’Ivry. Le produit de cette vente luiassure, selon les cours, environ400 francs par semaine, dont il fautdéduire 100 francs pour la nourri-ture du chien et du chat.

ABRIS SOLIDESLe froid ? Sebastian assure ne

pas le craindre. Son enfance de filsde fermier lui a appris à bricolerdes abris solides. Sa carrière de ca-mionneur indépendant l’a habituéaux courants d’air, lorsqu’il dor-mait sur la route glaciale entre Ber-lin et Moscou. Selon lui, le camiona été saisi à Paris, il y a trois ans, àcause des complications de son di-vorce. Il s’est retrouvé bloqué surplace et a décidé d’adosser saconstruction aux arbres du lopinde la porte de Bercy. Lorsqu’il a as-sez d’argent pour recharger sa bat-

terie, Sebastian regarde la télévi-sion, avec, à portée de la main, unebombe paralysante. C’est le moyenqu’il a trouvé pour tenir à distanceJosé et un autre Jean-Claude, quivivent dans une baraque tout aubout du terrain. Ceux-là l’insup-portent avec leur penchant obses-sionnel pour l’alcool. « Vous vousrendez compte, maugrée-t-il, ilstouchent tous les deux le RMI, et ilsarrivent à en boire la totalité enmême pas quinze jours. »

Un troisième Jean-Claude vitsous une cabane d’une seule pièceentièrement fabriquée avec despalettes de chantier et tapissée demoquette. « L’ambiance est lourdeici, raconte-t-il, ils passent leurtemps à boire et à s’insulter. Je pré-fère ne pas rester pour voir ça. Jepars dès que je me réveille et jerentre tard le soir. » Sobre etpropre, s’excusant de n’avoir eu letemps de se raser, Jean-Claude,quarante ans, affirme habiter làdavantage par choix que par dé-chéance. Sa rupture avec sa fa-mille, à Sarreguemines, en 1981, sesdémissions des différents emplois,notamment de manutentionnaire,il les explique par un caractère« très solitaire ».

Au cours de ses périodes sansemploi, Jean-Claude a fait la routesur la Côte d’Azur ou zoné à Châ-telet. Il est arrivé porte de Bercy àl’été 1995. Comme les autres, il ac-cepte depuis les cafés, la soupe etles vêtements de la Croix-Rougequi passe un soir par semaine pen-dant l’hiver. Mais, comme lesautres, il refuse de quitter la ca-bane qu’il chauffe avec un peud’alcool à brûler. Un passage àNanterre, la seule fois où il s’estfait attraper par les « bleus », l’adégoûté des foyers. « C’étaitl’épouvante », se souvient-il.

Les comptes sont vite faits. Unechambre d’hôtel dans le 12e arron-dissement ne lui laissait que1 300 francs pour vivre. La cabane,même glaciale l’hiver, lui laissel’intégralité de son RMI et de quoiacheter des livres d’aviation dont ilraffole. Il s’offre souvent l’aller-retour jusqu’à Orly, pour aller regarder les pavillons des nou-velles compagnies aériennes. Auretour, seul dans sa cabane, il sedit parfois que la solitude est « leprix à payer pour son indépen-dance ».

J. Fe.

REPORTAGELa police municipaletolère les occupantsdu lieu mais pasles nouveaux arrivants

PAUVRETÉ Lors d’une communi-cation consacrée à l’exclusion, lundi10 novembre, en conseil des mi-nistres, Martine Aubry, ministre del’emploi et de la solidarité, a évoqué

l’accueil des sans-abri cet hiver.« Pour l’essentiel, les besoins d’ac-cueil d’urgence sont aujourd’huicouverts », estime la ministre. b LAMISE en place de SAMU sociaux

dans les principales villes et l’amé-lioration des centres d’assistance etd’hébergement ont permis d’éviteraux pouvoirs publics le recours à unplan spécifique pour l’hiver. b LA

MAISON de Nanterre demeure unlieu d’asile vétuste, où l’insécurité sedéveloppe. Sa rénovation, attenduedepuis des années, pourrait démar-rer en mars 1998. b EN BORDURE

d’autoroute, porte de Bercy, plu-sieurs personnes vivent dans de mi-sérables cabanes, refusant touteprise en charge ou n’attendant plusrien des services sociaux.

Les SAMU sociaux ont permis d’améliorer l’assistance aux sans-abriPour la première fois depuis 1984, le gouvernement ne publiera pas de circulaire organisant un plan d’urgence spécifique à la période hivernale.

Les associations et les pouvoirs publics ont adapté les structures d’accueil, permettant un net progrès de la prise en charge des exclus

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S O C I É T É LE MONDE / MARDI 11 NOVEMBRE 1997 / 9

Le militant anti-avortementXavier Dor mis en examen et écrouéLE DOCTEUR XAVIER DOR, militant anti-avortement et fondateurde l’association SOS Tout-Petits, a été mis en examen pour « organi-sation de manifestation interdite en récidive légale » et écroué dans lanuit du samedi 8 au dimanche 9 novembre à la maison d’arrêt deBois-d’Arcy (Yvelines). M. Dor, soixante-huit ans, avait été interpellésamedi après-midi en face de l’hôpital André-Mignot du Chesnay,où il manifestait en compagnie d’une trentaine de personnes malgréune interdiction préfectorale.M. Dor a déjà fait l’objet de onze condamnations. La cour d’appel deVersailles l’avait condamné, le 8 mars 1996, à une peine de trois moisde prison ferme et cinq mois assortis d’un sursis, avec mise àl’épreuve de deux ans et obligation de s’abstenir de paraître danstout hôpital accueillant des femmes enceintes.

DÉPÊCHESa JUSTICE : un homme de quatre-vingt-un ans, condamné àmort par contumace en 1977, a été arrêté, vendredi 7 novembre, àMarseille. Francis Siciliano, accusé d’avoir tué, en 1975, l’un de sesrivaux dans une affaire de proxénétisme, vivait depuis vingt-deuxans sous une fausse identité. Il aurait pu bénéficier, dans quelquessemaines, de la prescription de vingt ans en matière criminelle. Il de-vrait être rejugé par une cour d’assises.a EXHUMATION : Mgr Jacques David, vice-président de la confé-rence des évêques de France, a déclaré, samedi 8 novembre, qu’ilressentait comme une « profanation » l’exhumation du corps d’YvesMontand, décidée le 6 novembre par la cour d’appel de Paris pourque soit pratiqué un test génétique de recherche en paternité (LeMonde du 8 novembre).a BANLIEUES : quatre policiers ont été blessés lors d’échauffou-rées avec un groupe d’une trentaine de jeunes, dans la nuit du sa-medi 8 au dimanche 9 novembre, à Sucy-en-Brie (Val-de-Marne).Sept personnes, dont quatre mineurs, ont été interpellées.a MEURTRES : deux hommes d’une trentaine d’années, les cou-sins Pascal et Emmanuel Damien, ont été tués, par des balles decalibre 22 long rifle, dans une rue de Marignane (Bouches-du-Rhône), samedi 8 novembre, par un homme seul qui a réussi àprendre la fuite.a ÉDUCATION : Olivia Jean, dix-sept ans, a été élue, samedi 8 no-vembre, présidente de la Fédération indépendante et démocratiquelycéenne (FIDL). Elève de terminale S au lycée Condorcet à Paris,elle remplace Léa Filoche, démissionnaire après son entrée à l’uni-versité.

Quatre marins périssentdans un naufrage

au large du FinistèreLa météo avait annoncé des vents de 140 km/hQUATRE MARINS-PÊCHEURS

ont péri lors du naufrage du Nar-vick, leur caseyeur, dimanche ma-tin 9 novembre, à un demi-mille aularge des côtes de l’Aber Wrac’h,situé sur la commune de Landéda,à 25 kilomètres au nord de Brest(Finistère). Un bulletin d’alerte mé-téo diffusé la veille avait annoncédes pointes de vent de 140 km/h.Dimanche matin à 7 h 47, la socié-té nationale de sauvetage en meravait reçu un appel de détresse desmarins. D’importants moyens desecours avaient alors été dépêchés,dont deux zodiacs des pompiers deLannilis et de Brest et un hélicop-tère de type Dragon 29. Un héli-coptère Super-Frelon de la marinenationale avait également été misen alerte compte tenu des mau-vaises conditions météorologiquessur la pointe Bretagne. Les pom-piers de Plouguerneau avaient enoutre envoyé une équipe terrestrepour effectuer les recherches sur lacôte.

Lors de leur arrivée en mer, lessauveteurs ont trouvé l’épaveéchouée sur la roche de la Ma-louine, ainsi qu’un canot de survie

à bord duquel l’un des marins avaitréussi à se réfugier. Les services desecours ont finalement repêché lescorps noyés de trois marins, tandisqu’un quatrième homme d’équi-page, qui avait été hélitreuillé ettransporté dans un état critique àl’hôpital de La Cavale-Blanche àBrest, est décédé peu après son ad-mission.

FORTES RAFALESPar ailleurs, plusieurs communes

de la Vienne ont été touchées di-manche après-midi par de fortesrafales de vent qui ont occasionnéd’importants dégâts matériels,sans faire de blessé. À l’ouest dePoitiers, douze maisons du lieu-ditla Chablatière ont eu leur toiturearrachée, des cheminées se sontécroulées et des animaux domes-tiques ont été tués. Au Grand-Breuil, vingt-cinq bâtiments sursoixante-quatre ont été endomma-gés tandis qu’à Journet, à Villemortet à Antigny (Vendée), trente-cinqhabitations au total ont été sinis-trées, des lignes électriques et télé-phoniques endommagées et desvéhicules renversés.

Il faut passer « à une politique positive de solidarité »VOICI les principaux extraits de la

présentation, faite à Lourdes di-manche 9 novembre, du document del’épiscopat Appelés à vivre en-semble :

« Toute per-sonne, quelsque soient sonorigine, saculture, sonstatut juri-dique, est revê-tue d’une di-gnité ayant un

caractère sacré. Nous réaffirmonsque la législation ne peut, sous au-cun prétexte, apporter de restrictionau droit de vivre en famille ou au

droit d’asile, ni prêter à discrimina-tion. Tout acte politique, toute me-sure qui aboutit à déshumaniser ungroupe humain est néfaste pour l’en-semble de la société.

» Nous appelons à changerl’orientation de la politique de l’im-migration. Exprimée en termes deprotection des flux migratoires, cettepolitique nous paraît sans avenir. [Ilfaut] passer d’une stratégie marquéepar le souci de nous protéger de lavenue des étrangers à une politiquepositive de solidarité et de dévelop-pement avec les pays d’origine. Enorganisant l’immigration de tellesorte qu’elle constitue un élémentdynamique de la solidarité interna-

tionale, une telle politique ouvriral’opinion à une vision plus positivede l’accueil de l’étranger.

» Dans certaines circonstancescritiques, le refuge dans le silencepeut devenir démission. Il est tra-gique, lorsque la sécurité, la santé etla dignité des personnes sont encause. Un débat clair permet decombattre les tentations de repli quifont obstacle à la mise en place d’unelégislation conforme aux droits del’homme et au bien commun. Ouvrirce débat, c’est favoriser la rencontredes partenaires concernés : respon-sables politiques, associations pré-sentes sur le terrain, Eglises et sur-tout les immigrés eux-mêmes. »

L’épiscopat souhaite un changement d’orientationde la politique d’immigration

L’assemblée plénière de Lourdes a adopté un appel à « vivre ensemble » L’assemblée des évêques s’est achevée, lundi10 novembre à Lourdes, au terme d’une semainede débats aux thèmes aussi divers que la « re-

pentance » de Drancy, les Journées mondialesde la jeunesse, la formation des prêtres, le dia-logue avec l’islam et la communication de

l’Eglise. Dimanche 9, elle a débattu d’un texte,Appelés à vivre ensemble, qui propose un chan-gement d’orientation de la politique d’immigra-

LOURDESde notre envoyé spécial

Les évêques se sont séparés, lun-di 10 novembre à Lourdes, aprèsavoir réexprimé leurs convictionssur au moins trois sujets – l’immi-gration, l’islam et le rapport avecle judaïsme – qui les mettent encontradiction avec une « base »qui traîne les pieds. L’appel à« vivre ensemble » avec les immi-grés est destiné à des communau-tés chrétiennes, dont les évêquessavent qu’elles sont guettées par le« repli ». De même, contre l’inté-grisme musulman, ont-ils réaffir-mé l’urgence d’un dialogue avecl’islam (Le Monde daté 9-10 no-vembre). Enfin, les réactions quiont suivi l’acte de « repentance »de Drancy montrent la résistancede milieux conservateurs à la per-ception du judaïsme développéepar le concile Vatican II (1962-1965), et à la dimension péniten-tielle du « Jubilé» de l’an 2000 sou-haitée par le pape.

De quels silences sommes-nouscoupables aujourd’hui qu’on seraen droit de nous reprocher dans

cinquante ans ? Cette questionqu’il avait posée après Drancy,Mgr Jean-Charles Thomas, évêquede Versailles et président du comi-té épiscopal des migrations, l’avaitprésente à l’esprit, en proposant,dimanche à Lourdes, un change-ment d’orientation de la politiqued’immigration. Le texte Appelés àvivre ensemble, qui sera publiédans son intégralité autour du20 novembre, vise le « longterme ». Il n’évoque pas les thèsesdu Front national, que l’épiscopata souvent condamnées de manièreplus explicite, ni la législation encours de discussion. Mais il déve-loppe les enjeux théologiques etpolitiques, rappelle les prescrip-tions de la Bible et propose des« repères » qui devraient guidertoute action sur l’immigration. Unaccrochage a eu lieu entre le prin-cipal rédacteur du texte et MgrLustiger, qui aurait voulu voir dé-veloppées les raisons structurellesde l’afflux des immigrés et préciséela notion d’« altérité » au cœur detout accueil de l’étranger.

Les autres débats de Lourdes,

sur des sujets plus internes, ontété davantage escamotés. Celui, enparticulier, qui portait sur les sémi-naires et les « circuits parallèles »de formation de prêtres. « On s’estcontenté de surfer sur le pro-blème », déplorait l’un des partici-pants.

« CRÉATIVITÉ À RETROUVER »Principalement visé, Mgr Ba-

gnard, supérieur du séminaire trèsconservateur d’Ars (Ain), est restésilencieux. S’il est un thème quimet les nerfs à l’épreuve d’un épis-copat divisé, c’est en effet celui dela formation sacerdotale et del’avenir des ministères ordonnés,dans un contexte de grande dé-pression. Président de la commis-sion compétente, Mgr GeorgesGilson est toutefois parvenu àfaire adopter « un code de bonneconduite » pour éviter touteconcurrence sauvage entre sémi-naires.

A propos de l’« après-JMJ »(Journées mondiales de la jeu-nesse), le débat attendu sur l’effi-cacité des structures de la Pasto-

rale des jeunes n’a pas eu lieu.« On aurait tort d’opposer les mou-vements de jeunes à la masse. Lesuns ont entraîné l’autre », s’estcontenté d’indiquer Mgr MichelColoni, évêque de Dijon. Ses col-lègues espèrent maintenir l’élanprovoqué par les rassemblementsde Longchamp et attirer les jeunespar des rassemblements excep-tionnels, des « marches », des cé-lébrations liturgiques ou desconfirmations de jeunes adultes.L’évêque est invité à s’engager da-vantage dans des « catéchèses » etdans l’accompagnement spirituelde jeunes. Il y a toute une « créati-vité à retrouver », convient MgrColoni.

Dernier « dossier » examiné àLourdes : la communication del’Eglise. L’« inventaire » des ques-tions soulevées – avant l’adoptiond’un « plan » dans un an – a per-mis d’actualiser des propositionsqui ont échoué dans le passé, fautede moyens financiers ou de volon-té. Il en va ainsi de la formationd’un personnel spécialisé dans lesrapports avec les médias. Le re-proche a été adressé aux journa-listes de ne pas comprendre « lesenjeux fondamentaux » de la vie del’Eglise. Mais comment le pour-raient-ils, soigneusement écartésqu’ils sont d’une assemblée, dontles participants eux-mêmes esti-ment le fonctionnement dépassé ?

Le rendez-vous annuel deLourdes ressemble de plus en plusà un exercice imposé, au cours du-quel un ordre du jour étroit n’au-torise guère la spontanéité de dé-bats que le huis-clos aurait dûfavoriser. « Je déplore qu’on restetoujours entre nous. J’étouffe »,confie l’un des participants. On nepouvait trouver meilleure conclu-sion à une assemblée de routine,sans texte incontesté et sanssouffle.

Henri Tincq

Mme Guigou prévoit un recrutement exceptionnel de magistrats DEUX JOURS après la grève des

avocats contre la grande misère del’institution judiciaire, Elisabeth Gui-gou a annoncé qu’elle allait prendredes « mesures d’urgence consé-quentes » afin d’endiguer l’asphyxiedes cours et tribunaux. Ce planqu’elle avait évoqué, jeudi 6 no-vembre, au cours d’une visite au tri-bunal de Bobigny, prévoiera un « re-crutement exceptionnel » demagistrats, de greffiers et de fonc-tionnaires. Il est actuellement àl’étude « au plan interministériel », aconclu la ministre.

Elisabeth Guigou s’exprimait, sa-medi 8 novembre, au cours ducongrès du Syndicat des avocats deFrance (SAF, gauche), qui avait lieucette année à Créteil. Soulignant le« ras-le-bol » des justiciables face àl’engorgement des tribunaux, le pré-sident du SAF, Philippe Vouland,

avait évoqué à la tribune le premiermouvement de grève national desavocats, jeudi 6 novembre.

TRAITEMENT DE FAVEUR Depuis une quinzaine d’années, la

justice a bénéficié d’un incontestabletraitement de faveur budgétaire – de1981 à 1997, sa part dans le budget del’Etat est passé de 1,05 à 1,56 %, soitune augmentation de près de 50 % –mais elle peine à suivre l’explosion ducontentieux. En vingt ans, de 1974 à1994, le nombre d’affaires civiles nou-velles est passé de 200 000 à 650 000dans les tribunaux et de 63 000 à215 000 dans les cours d’appel. Dansle même temps, le nombre de magis-trats a peu progressé, passant à 6 000.

L’enveloppe budgétaire de la placeVendôme bénéficie cette année de lacroissance la plus forte des minis-tères, à l’exception de l’outre-mer. La

justice verra ses crédits augmenterd’un peu plus de 4 %. En matière decréation d’emplois, la place Ven-dôme, avec 762 postes, se situe au se-cond rang derrière l’éducation natio-nale. Tous ces emplois n’irontcependant pas directement dans lesjuridictions : si l’on prend en compte,par exemple, les postes d’éducateursou de surveillants, on aboutit auchiffre de 70 magistrats et de 230fonctionnaires des greffes.

Pour les magistrats, le « recrute-ment exceptionnel » annoncé, quipourrait concerner une centaine depostes, impose l’adoption d’un textede loi organique. Les candidats nepasseront pas le traditionnelconcours de l’Ecole nationale de lamagistrature (ENM) de Bordeaux : letexte précisera l’âge minimum et lesexpériences professionnelles re-quises pour ces nouveaux postes. La

durée de leur formation sera pluscourte que pour les « auditeurs » del’ENM.

Confronté, lui aussi, à des vacancesde postes, Robert Badinter avait or-ganisé en 1983 un recrutement ex-ceptionnel de 70 magistrats. Huit ansplus tard, Henri Nallet avait fait demême. Les candidats devaient alorsêtre diplômés de l’enseignement su-périeur et avoir une expérience pro-fessionnelle de plus de dix, voire,pour certains postes, de quinze ans,dans les domaines économique, juri-dique, social ou administratif. « Il yaura un temps pendant lequel on neverra pas les effets, ni du plan d’ur-gence, ni du budget 1998, car nous de-vons gérer la pénurie des budgets1996 et 1997 » a prévenu ElisabethGuigou.

Anne Chemin

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10 / LE MONDE / MARDI 11 NOVEMBRE 1997

H O R I Z O N SENQUÊTE

Algérie, autopsied’un massacre

Dans la nuit du 22 au 23 septembre,plus de deux cents personnes étaientassassinées par un commandoà Bentalha, une petite villede la Mitidja qui avait massivementvoté pour le FIS en 1990 et 1991.Malgré le vacarme des explosions,des sirènes d’alarme et des cris,les militaires, basésà quelques centaines de mètres,ne sont pas intervenus

Un jeune hommejure que, lorsqu’ils’est présentépour donner l’alerte,les soldatsl’ont accueillien lui donnantun violent coupde crosse sur le nez et ont refuséde l’écouter

IL n’y aura pas decommission d’enquêteinternationale sur lesmassacres en Algérie.Dans un pays où le na-tionalisme est une valeurplus prisée que la vérité,il est exclu qu’une équipeétrangère soit autorisée

à venir sur place pour faire la lu-mière sur des tueries qui, à la finde l’été, ont causé la mort de prèsd’un millier de civils, égorgésdans leurs villages de la plaine quis’étend au sud d’Alger, la Mitidja.

Pourquoi s’être attaqué à cesbourgades – Sidi Moussa, Raïs,Bentalha – plutôt qu’à leurs voi-sines ? Et pourquoi à certainsquartiers de ces petites villes tropvite poussées à l’ombre de la ca-pitale ? Qui sont les responsablesde ces tueries ? Les islamistes ?Les forces de sécurité ? Commentles agresseurs ont-il pu repartirsans être véritablement inquié-tés ? Ces questions, beaucoupd’Algériens se les posent, toutcomme l’opinion publique inter-nationale. A défaut de pouvoir yrépondre avec certitude (les res-ponsables militaires interrogéspar la presse locale cultivent leflou), on peut, en recoupant lestémoignages des survivants d’unmassacre – celui de Bentalha(plus de deux cents morts dans lanuit du lundi 22 au mardi 23 sep-tembre) – cerner une part de lavérité.

Bentalha est une petite ville decette Mitidja mitée par un urba-nisme désordonné. Ce n’est déjàplus la campagne ; ce n’est pasencore la grande ville. Alger n’estpas loin. Malgré les embouteil-lages, il faut moins d’une demi-heure pour se rendre de Bentalhaau ministère algérien de la dé-fense, sur les hauteurs de la capi-tale.

Ville-dortoir sans âme d’envi-ron quatre mille habitants, pous-sée trop vite, avec ses maisonsfaussement bourgeoises jamaisfinies, ses chaussées sans as-phalte, Bentalha – privée de télé-phone depuis deux ans – vivote.Le travail est rare – parmi ungroupe de sept hommes ren-contrés par hasard, cinq étaientau chômage –, ce qui n’a pas em-pêché la ville de grossir sous l’af-flux de familles chassées descommunes voisines par la vio-lence. Etrange transhumance :certains nouveaux venus à Ben-talha se sont installés dans desmaisons désertées par des pro-priétaires partis se réfugier à Al-ger.

Bentalha est une terre qui a vo-té massivement en faveur du

Front islamique du salut (FIS) auxélections municipales de 1990 etlégislatives de 1991. Les forces desécurité ne l’ont d’ailleurs pas ou-blié. « Avant, ils ont soutenu lesterroristes », lâchera, sur un tonconfidentiel, un gendarme enparlant des habitants de Bental-ha. « On est pour l’Islam et ensuitepour l’Algérie », rétorquent cer-tains d’entre eux. Pour autant, ilsdisent avoir voté pour le Rassem-blement national démocrate(RND) et le Front de libérationnationale (FLN), deux partis de lacoalition gouvernementale, auxélections locales du 23 octobre.Donner sa voix au FIS s’il est ré-gularisé un jour ? L’idée fait sou-rire.

Le malheur de Bentalha, c’estd’être mal placée. Larbaa, SidiMoussa, Raïs, Beni Messous, tousces lieux de la Mitidja, marquéspar le fer et le feu, sont à deuxpas. Ouled Allel, une petite villevidée de ses habitants et transfor-mée jusqu’à ces dernières se-maines en base de repli duGroupe islamique armé (GIA)– sans que l’armée s’en émeuve –est à 4 ou 5 kilomètres. Le do-maine agricole de Gaïd Gacem– une ancienne ferme coloniale –que les survivants présententcomme un repère de « terro-ristes » est à portée de fusil.

Cette proximité à hauts risquesexplique la présence des forces desécurité à l’ombre de Bentalha.Le premier poste militaire – mo-deste – est situé à l’entrée de lapetite ville. Il est renforcé par unecaserne de gardes communaux(des hommes armés et en uni-forme). L’armée est égalementprésente quelques centaines demètres plus loin sur la route dé-partementale Baraki-Sidi Moussaoù une caserne abrite derrière dehauts murs plusieurs dizaines delogements et du matériel mili-taire. En fait, les barrages, lespostes de contrôle, les installa-tions militaires sont très nom-breux dans la région. Fin octobre,il était impossible de faire plus de1 kilomètre sans rencontrer deshommes en uniforme.

Ce n’est pas toute la ville deBentalha qui a été attaquée aucours de la nuit du 22 au 23 sep-tembre, mais deux quartiers ex-centrés et mitoyens, haï Boudou-mi et haï Djillali. Implantés à lapériphérie de l’agglomération, ony accède facilement depuis lecentre-ville par une mauvaiserue, ou à travers champs si l’onvient de l’extérieur. Le caserne-ment de l’armée est bien visibledepuis haï Boudoumi. Quant auposte militaire, il ne faut pas plusde trois minutes en voiture pours’y rendre en temps normal.

Pourquoi ces deux quartiers ?Ils sont à l’écart du centre et Pra-tiquement sans défense immé-diate. Les survivants de haï Djilla-li, en particulier, ont des motstrès durs pour les autorités qui,pendant des mois, auraient refu-sé des armes (kalachnikovs ousimples fusils de chasse) à laquinzaine de civils qui en avaientfait la demande pour parer à uneattaque. Dans les autres quar-tiers, les « patriotes », comme onles appelle, auraient été davan-tage écoutés. De leur côté, lesgendarmes font valoir que l’on neconfie pas des armes à une popu-lation soupçonnée de sympathiesislamistes sans une solide en-quête préalable. Parfois, seloneux, ces armes approvisionnentles maquis. Les groupes armésfréquentaient Bentalha. Outre

qu’une douzaine de jeunes du vil-lage avaient rejoint les maquisvoisins, « des "terros" venaient,certains soirs, à cinq ou six pournous effrayer. Ils ne portaient pasd’armes et ne restaient pas plusd’une dizaine de minutes. Avantque les patriotes les aient repérés,ils étaient repartis », raconte unvieillard.

L A volonté des habitants dehaï Djillali de s’armer expli-querait , selon certains

d’entre eux, l’attaque dont lequartier a fait l ’objet. Cir-constance aggravante, les « pa-triotes » de Bentalha avaient faitsauter, quelque temps aupara-vant, la maison d’une famille ré-putée proche d’un émir, et obligéses occupants à quitter le village.En revanche, parmi les personnesinterrogées à Bentalha, aucunene lie le massacre à un refus deshabitants d’acquitter l’« impôtrévolutionnaire » levé ailleurs parles groupes armés.

Que les assaillants – au mini-mum une centaine, selon les té-moignages – aient pu se regrou-per à proximité de Bentalha sanséveiller l’attention n’est pas sur-prenant. Ils connaissaient leslieux. L’attaque a eu lieu de nuit,aux alentours de 23 heures. Et lesplantations d’orangers, de né-

fliers, les champs en déshérenceenvahis par les hautes herbes,traversés de fossés, offrent desabris discrets.

Dès le début de l’attaque, leshabitants des quartiers mitoyensont su qu’un drame se déroulait àdeux pas de leurs propres mai-sons. Plaider l’ignorance est im-possible : le bruit des détonations(les assaillants ont fait sauter plu-sieurs portes d’entrée avec desengins explosifs de fabricationartisanale), le vacarme des si-rènes d’alarme, les cris... « On en-tendait la clameur jusqu’à El Har-rach [la proche banlieue de lacapitale] », affirme un Algérien.Et pourtant, personne n’est inter-venu. Ni les civils, terrés dansleurs maisons, ni les « patriotes »des autres quartiers. « Ils nous ontdit qu’ils étaient restés pour proté-ger les habitants vivant dans leurvoisinage. Depuis, on ne leuradresse plus la parole », raconteun rescapé.

Les assaillants étaient-ils desmilitaires déguisés en « terro-ristes » ? Quelques rares habi-tants de Bentalha mettent enavant le professionnalisme desassaillants. L’un d’eux raconte :« Ils se comportaient comme desninjas [les forces spéciales algé-riennes], agissaient très rapide-ment. J’en ai vu un tirer au fusil

d’une seule main. » Un hélicop-tère a, par ailleurs, survolé le siteavant et après le drame, mais« c’est tous les jours qu’i lspassent ». Au-delà de ces obser-vations, personne à Bentalhan’ose imaginer une seconde quel’armée algérienne soit directe-ment impliquée dans le massacrede Bentalha. Dans quel but au-rait-elle mené une telle opéra-tion ? « Pour faire échouer les né-gociations entre les islamistes etcertains clans du pouvoir »,avancent certains. L’explicationparaît un peu courte : l’appel à latrêve signé par Madani Mezrag,l’émir national de l’Armée isla-mique du salut (AIS), la branchemilitaire du FIS, date du 21 sep-tembre. Il est antérieur au mas-sacre de Bentalha.

Ce que certains habitants deBentalha (et les organisations dedéfense des droits de l’homme)reprochent aux forces de sécuri-té, c’est leur incroyable passivité.Elles ont laissé se commettre,pratiquement sous leurs yeux, unmassacre qui a duré entre quatreou cinq heures. « Si j’avais lecommandant [des militaires] enface de moi, je lui cracherais des-sus. Ils nous ont laissé crever », ac-cuse un Algérien à la retraite.« Tout le monde dans le villagepense comme moi », affirme-t-il.

« Est-ce que les Américains et lesFrançais ne peuvent pas venir nousdéfendre ? », demande un autrerescapé.

Le fait est que les forces de sé-curité ne se sont pas bousculéespour porter secours aux habi-tants de haï Boudoumi et, sur-tout, de haï Djillali. Les militairesstationnés dans leur caserne enbordure de la route départemen-tale n’ont pas bougé de la nuit.Pour intervenir, il leur suffisaitpourtant de s’avancer sur quel-ques centaines de mètres à tra-vers les champs. Ceux-ci avaientété minés par les « terroristes »,assurent des villageois. Quelquesjours avant l’attaque, précisent-ils, un engin de l’armée partici-pant à une opération de ratissageaurait sauté sur un engin. Quellequ’ait été la réalité du danger, unfait demeure : cette nuit-là, la ca-serne n’a pas réagi au drame quise déroulait à proximité, presquesous ses yeux.

Le comportement des oc-cupants du poste militaire situé àl’entrée de Bentalha est moinssujet à critique. Certes, un jeunehomme de haï Boudoumi jureque lorsqu’il s’est présenté pourdonner l’alerte, les soldats (laplupart sont des appelés) l’ontaccueil l i en lui donnant unviolent coup de crosse sur le nezet ont refusé de l’écouter. Il n’em-pêche : moins d’une heure aprèsle déclenchement de l’attaque, ungroupe d’hommes en uniformeétait présent à l’entrée du quar-tier de haï Boudoumi, 200 centsmètres environ de l’endroit où sedéroulait le massacre. Ils ont bientiré des coups de feu contre lesassaillants (les impacts sur les bâ-timents sont visibles), mais sanschercher à progresser. Ils sontrestés en retrait jusqu’au petitmatin. Le terrain était miné, mur-murent certains, pour justifier lapassivité de l’armée.

E N fait, une seule bombe,placée dans une fourgon-nette, explosera en tuant

un militaire. Les soldats neconnaissaient pas le terrain, ha-sardent quelques voix qui rap-pellent que les assaillants avaientpris soin, dès le début, de couperl’électricité dans le village. Lessoldats n’étaient pas équipéspour ce type d’intervention noc-turne et ils craignaient de tomberdans une embuscade, suggèrentd’autres Algériens. Autant d’ar-guments à moitié recevables,mais qui ne doivent pas faire ou-blier la réticence des militaires àrisquer leur vie pour défendre descivils sympathisants de l’ex-FIS.

Ce qui est incompréhensible etinexcusable, c’est que lecommandement militaire n’aitpas, au minimum, donné d’ordrepour intercepter les assaillantsalors qu’ils se repliaient au petitmatin. Les armes – quelquesballes de kalachnikovs, mais aussides cartouches de fusils dechasse, des couteaux... – récupé-rées à Bentalha sont là quiprouvent que les groupes armésétaient des cibles faciles à at-teindre. Faut-il incriminer la lour-deur de la chaîne hiérarchique ?L’incompétence d’une arméed’un pays du tiers-monde surtoutformée d’appelés dépourvus dezèle ? C’est oublier que les forcesalgériennes disposent de quel-ques unités d’élite – notammentde commandos de parachu-tistes –, équipées de matériel per-fectionné qui auraient pu être ra-pidement engagées à Bentalha.La rumeur veut que l’armée aitinterdiction de sortir de ses ca-sernes la nuit, sauf autorisationexpresse du chef d’état-major, legénéral Mohamed Lamari. L’hy-pothèse n’est pas à exclure : dutemps de Boumediene, parcrainte d’un coup d’Etat,confirme un ancien ministre, toutmouvement de troupe était su-bordonné à un ordre écrit du pré-sident de la République.

Un peu plus d’un mois après ledrame, la sécurité de Bentalhan’est pas beaucoup mieux assu-rée qu’avant. Quelques « pa-triotes » ont reçu des armes. Enbordure de haï Boudoumi, unepoignée de soldats en armescampent sur le toit d’une maisonen construction sur laquelle flottele drapeau algérien. Dans quelbut ? Il n’y a plus grand monde àdéfendre dans le quartier.

Jean-Pierre TuquoiDessin : Pierre Lohner

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H O R I Z O N S - E N T R E T I E N S LE MONDE / MARDI 11 NOVEMBRE 1997 / 11

Un incorrigible insoumis devenu patron de presseAUJOURD’HUI directeur du prin-

cipal quotidien polonais, Gazeta,Adam Michnik reste, à cinquante anspassés, l’adolescent brillant, chaleu-reux, rigolard et insouciant qu’il atoujours été. Tout comme il reste cethomme de profonde conviction quia, parmi d’autres mais au premierrang, largement payé de sa personnepour que son pays devienne ce qu’ilest aujourd’hui : une démocratie. Nédans une famille de juifs commu-nistes (pour son engagement, sonpère a passé de nombreuses annéesde prison avant guerre, avant defaire brièvement partie, dans les années 50, de l’élitedu nouveau régime), Adam Michnik a été arrêté pourla première fois à l’âge de dix-huit ans – premièred’une longue série d’arrestations : il passera au totalsix ans de sa vie en prison.

C’est en 1968 qu’il a, selon sa propre expression,« coupé le cordon ombilical » avec le communisme.Ses adversaires estiment qu’il ne l’a pas tout à fait

coupé, et y voient pour preuve l’in-dulgence remarquable qu’il manifesteà l’égard de ses anciens geôliers, le gé-néral Jaruzelski en tête. Courageuxquand il le fallait, traitant, depuis saprison, de « porc » le ministre de l’in-térieur, qui lui proposait l’exil enéchange de sa capitulation politique,il est aujourd’hui partisan de la ré-conciliation et a considéré ces der-nières années que le danger venaitplus désormais de la droite nationa-liste que de la gauche postcommu-niste.

« Spectateur engagé » et chef d’unepuissante et prospère entreprise – « du gros busi-ness », comme il dit –, il affiche clairement son sou-tien à l’Union de la liberté, où se retrouvent la plupartde ses amis intellectuels libéraux. Quitte à les sur-prendre et à les irriter, parfois, par des initiatives d’in-corrigible insoumis.

J. K.

ADAM MICHNIK

Raymond Soubie, PDG du groupe Altédia

« Les conflits sociaux ont désormais une dimension européenne »Analysant la grève des routiers, ce spécialiste des relations sociales pense que son issue est positive en France

« Quels enseignements peut-on tirer du conflit des routiers ?

– Il ressemble à bien des égards àceux qui se sont déjà produits dansce secteur : des barrages, qui sontparfois le fait des salariés et parfoiscelui des artisans, des négociationsà chaud et le recours à l’Etat.

» Au-delà, deux éléments intéres-sants et novateurs sont susceptiblesde se retrouver dans d’autres sec-teurs : l’intervention de l’Europe etle rôle de la CFDT. Pour la premièrefois, les gouvernements européenset la Commission de Bruxelles n’ontpas hésité à se livrer à des pressionssur le gouvernement français. Il vafalloir désormais en tenir comptedans le domaine social comme dansd’autres domaines. Quant à laCFDT, elle a réussi son opération.Elle a créé un rapport de forces avecles employeurs puis l’a transforméen paraphant un accord. Elle a éga-lement su convaincre les routiers du

bien-fondé de sa démarche. C’estune application réussie de la mé-thode Notat.

– Contrairement à de précé-dents conflits, il n’y a eu ni coor-dination ni phénomène « Tar-zan »...

– En effet. On a un syndicat qui asu négocier et convaincre sestroupes. C’est un bon point pour lanégociation collective et plus large-ment pour les relations socialesdans ce pays.

– Malgré le rôle de l’Etat ?– L’Etat a une vieille tradition

d’intervention. Surtout dans ce sec-teur. Dans le cas présent, son inter-vention ne me paraît pas excessive.La négociation se termine par unaccord entre un syndicat représen-tatif et des organisations patronalesqui le sont également.

– Quel rôle peut jouer labranche professionnelle dansles négociations sociales ?

– C’est une question très déli-cate. Théoriquement, dans l’avenir,la négociation d’entreprise devraitprogresser. C’est à ce niveau quel’on peut le mieux adapter les ac-cords à la situation réelle. Mais,souvent, les directions ne sont pastrès enclines à négocier ou n’ontpas d’interlocuteurs puisque lessyndicats ne sont présents quedans la moitié des entreprises demoins de 200 salariés. Donc, dansla pratique, et malgré la loi de 1996qui favorise le dialogue social dansles entreprises dépourvues de re-présentants syndicaux, il faudraencore de longues années et quel-ques réformes du code du travailpour que l’entreprise soit le lieu denégociation privilégié. En atten-dant, les branches qui disposentd’interlocuteurs patronaux et syn-dicaux souvent responsables ettoujours compétents resteront unlieu très important.

– Dans cette négociation, lepatronat était aussi divisé queles syndicats...

– Soyons franc, le syndicat réel-lement représentatif est l’Union fé-dérale des transports (UFT). Voir laCFDT signer avec la seule Unostraétait quelque peu irréel. La réinté-gration de l’UFT dans le jeucontractuel a permis de remettrece dossier dans une position cohé-rente.

– Que pensez-vous de l’atti-tude de Force ouvrière ?

– Elle a été très ambiguë. Parfois,M. Poletti donnait l’impression dejouer le rôle d’intermédiaire, maisil n’a pas eu d’action déterminantepour transformer le conflit en ac-cord. Il s’est privé d’un élément : laconclusion d’un accord comme ré-sultat du rapport de forces. Cela il-lustre la situation de Force ou-vrière, dont on ne sait plus tropbien si son tropisme naturel est de

chercher des solutions ou d’en ra-jouter sans faire avancer les dos-siers.

– Ce conflit aura-t-il des réper-cussions sur les élections pru-dhomales ?

– Ne confondons pas. Les sala-riés seront appelés à élire desjuges. Ils ne voteront pas forcé-ment comme s’il s’agissait de dé-signer des représentants syndi-caux. Mais il sera néanmoinsintéressant de voir comment lessalariés jugeront les évolutions res-pectives de Force ouvrière et de laCFDT. Je me garderai biend’émettre un pronostic.

– Comment expliquez-vousque l’opinion publique ait parusoutenir les grévistes ?

– Les médias ont donné une opi-nion favorable du mouvement. Onne connaît pas le sentiment de lapopulation. Mais il est vraisem-blable que, comme à chaque fois,

celle-ci condamne la prise d’otageset le blocus économique mais,comme au Guignol, elle est der-rière la victime qui, en l’oc-currence, paraît être le salarié.

– Pensez-vous qu’il y aurad’autres conflits dans le trans-port routier ou qu’une page estbel et bien tournée ?

– Bien sûr qu’il y aura d’autresconflits. L’ouverture européenneva créer des pressions sur les entre-prises et donc des tensions so-ciales. On sous-estime les consé-quences sociales de la constructioneuropéenne. Celle-ci aura un im-pact sur les relations du travail, surles conditions d’emploi et mêmesur la protection sociale. Dans lesecteur des transports, commedans d’autres, il y aura desconflits. »

Propos recueillis parFrédéric Lemaître

Adam Michnik, directeur du principal quotidien polonais

« Je suis vraiment heureux de vivre dans un pays devenu ennuyeux »L’ancien prisonnier politique estime que la démocratie polonaise est désormais solide

« La Pologne vient deconnaître des élections sans in-cidents. Un nouveau gouverne-ment, le huitième depuis lechangement de régime, a étéformé. Tout va pour le mieuxdans le meilleur des mondes ?

– Peut-être pas, mais le déroule-ment des élections, la formation dela majorité, l’esprit de compromisqui a prévalu montrent que la Po-logne est devenue un pays euro-péen normal, où la démocratie estune composante de la culture de lavie quotidienne.

– Depuis des années, ce quevous redoutiez plus que tout,c’était l’arrivée au pouvoir enPologne d’une droite radicale.En un sens, c’est fait, cettedroite est là, sinon au gouverne-ment, du moins au sein de lamajorité parlementaire. Et per-sonne n’en semble particulière-ment alarmé.

– C’est vrai. Mais cette droite ra-dicale s’est progressivement “civili-sée”. Aujourd’hui, elle est à saplace, ne domine pas la vie pu-blique, ni même la partie droite dupaysage politique. Elle a moinsd’importance aujourd’hui en Po-logne que n’a en France le Frontnational. Je pense que Jean-MarieLe Pen est plus dangereux pour ladémocratie française que les extré-mistes de droite en Pologne.

– Aujourd’hui, la figure cen-trale de la scène politique polo-naise, c’est Marian Krzaklewski,le président de l’AWS Solidarité,la coalition électorale qui a rem-porté les élections. Il y a quel-ques mois encore, il faisait fi-gure d’extrémiste clérical,profondément hostile aux libé-raux, très agressif à leur égard.Aujourd’hui, il “calme” sestroupes, fait preuve de mesure,de modération, d’esprit decompromis. Que s’est-il doncpassé ?

– De fait, on a pu entendre ré-cemment sur Radio Maryja (une ra-dio catholique intégriste) les an-ciens admirateurs de Krzaklewskil’accuser de “trahison”, d’avoirconclu un pacte avec le diable, avecBalcerowicz (l’initiateur de la ré-forme économique libérale d’après1989)... Il faut reconnaître que Krza-klewski s’est efforcé de résister àcette démagogie. Il voulaitconstruire le gouvernement, et il aréussi, en se comportant de ma-nière très rationnelle. Il a joué unrôle sans conteste positif.

– Pourrait-on dire que Krza-klewski, comme précédemmentWalesa et Alexandre Kwasniew-ski, ont fait preuve d’un certainsens de l’Etat, et mis l’intérêtnational au-dessus de leurspropres préférences politiques ?

– Ces trois hommes politiquesont des traits communs, notam-ment un discours d’oppositionsouvent démagogique et destructif.Telle a été l’attitude de Walesa pen-dant la campagne présidentielle de1990, de Kwasniewski avant les lé-gislatives en 1993 et cette année deKrzaklewski pendant la bataille au-tour de la nouvelle Constitution. Enmême temps, après la victoire, lalogique de l’action change. En ce

sens, on peut dire que, de la mêmemanière que Walesa a guéri sesconcitoyens de la foi dans le “mi-racle Walesa”, la distribution demillions à tout le monde, que de lamême manière que Kwasniewski aguéri ses concitoyens du regretnostalgique de la sécurité offertepar la Pologne populaire, de mêmeKrzaklewski guérira forcément lesPolonais de la foi en un Etat natio-nal-catholique régi par des épura-teurs et des “décommunisateurs”.

« Trente millionsde Polonais nepouvaient pas seretrouver au maquisou sur les barricades.Il fallait vivre. LesFrançais devraientbien le comprendre »

– Les centristes libéraux quireviennent au pouvoir avec Les-zek Balcerowicz n’avaient-ilspas commis, dans l’exercice dece pouvoir aussitôt après lechangement de régime, une er-reur−: celle de sacrifier lemonde du travail salarié, derompre l’alliance un peu mira-culeuse entre intellectuels etouvriers, qui avait permis la ré-volution pacifique polonaise ?Etait-ce inéluctable ?

– Je répondrai de deux manières.En un sens, c’était inéluctable. Soli-darité était un mouvement dontl’ethos était la lutte communecontre la dictature. L’ethos de lapériode qui a suivi le changementde régime, c’était la privatisation,l’enrichissement personnel, la créa-tivité, ce qui ne peut convenir à lamasse des travailleurs salariés. Maiscette rupture aurait pu revêtir unaspect moins hideux, moins déplai-sant. La faute, cependant, en re-

vient moins à Balcerowicz qu’à Wa-lesa qui, pour gagner l’électionprésidentielle, a déchaîné une dan-gereuse démagogie, fait défilerdans les rues des foules qui s’enprenaient à Balcerowicz, mais qui,quelques années plus tard, brû-laient l’effigie de Walesa lui-même,avec, pour résultat final, la victoiredes postcommunistes aux électionsde 1993.

– Est-ce qu’en fin de comptecette période où les ex-commu-nistes se sont retrouvés au pou-voir n’a pas été utile à la Po-logne, est-ce que cela n’a pasété un phénomène assez sainpour la vie publique ?

– Je n’ai pas voté pour lescommunistes et leur victoire m’ainquiété, et surpris, mais en fin decompte ces quatre années ont étébonnes pour la Pologne. Je ne veux

pas dire qu’il n’y a pas eu d’erreurs,de scandales, que le rythme des ré-formes n’a pas été ralenti. Mais ladirection fondamentale a étéconservée, la Pologne est restée unEtat démocratique, un Etat dedroit, orienté vers l’économie demarché et l’intégration à l’Europe.En tout état de cause, un ralentisse-ment était inéluctable pour per-mettre aux gens de reprendre leursouffle. Et les gens ont, de fait, re-pris leur souffle. L’indice d’opti-misme social est aujourd’hui plusélevé qu’alors, et le Parti social-dé-mocrate, qui a perdu les élections, atout de même récolté un million etdemi de voix de plus que quatre ansplus tôt.

– La question de l’épuration,de ce qu’on appelle ici la “lus-tration” ou la vérification desanciens cadres communistes,

continue à empoisonner la viepolitique polonaise. Ici, cette“épuration” n’a pas été faite,contrairement à ce qui s’est pas-sé en République tchèque ou enAllemagne de l’Est.

– C’est un mythe. L’épurationétait irréalisable et n’aurait rien ap-porté d’autre que le chaos. Si l’onveut comparer à l’Allemagne, onpourrait dire que, si la Pologneavait eu sa RFA, elle aurait pu fairel’épuration et mille autres choses.Elle aurait eu de l’argent, des cadresvenus de l’Ouest, etc. Et encore,que ceux qui vantent tellement lemodèle allemand aillent à Weimar,à Leipzig, à Dresde, qu’ils parlentavec les gens. J’ai été récemment àWeimar et on m’a raconté la petitedevinette qui circule là-bas : Quelleest la différence entre les Wessies(les gens de l’Ouest) et les Russes ?Eh bien, les Russes, eux, sont partis.Pour ce qui est des Tchèques, c’estune mystification complète. Klaus(le premier ministre) est un maîtredu marketing, mais maintenant onconstate que, malgré l’épuration, ladécommunisation, le génie du mar-keting et des relations publiques, laRépublique tchèque est tombéedans une profonde ornière, unecrise non seulement économique,mais aussi politique.

» Bien entendu, le problème dupassé historique se pose en Po-logne. De la même manière que laFrance se passionne pour le procèsPapon. Mais, puisqu’on parle de laFrance, c’est de Gaulle qui avait rai-son, et pas les communistes quivoulaient épurer. De Gaulle avaitcompris qu’il fallait réunir les Fran-çais de la Résistance et ceux de Vi-chy. Et en Pologne aussi on essaiede construire une communauté.Tout récemment, dans un scrutinsecret au Parlement, des représen-tants du SLD, désormais minori-taire, ont été élus à la vice-prési-

dence de la Diète et du Sénat. C’esttout à fait remarquable : l’AWS, leparti de Krzaklewski, a voté pourdes postcommunistes.

– C’est dans le même espritque vous êtes si indulgents àl’égard de Jaruzelski et de tousceux qui, jadis, vous ont empri-sonné ?

– Là, c’est un peu autre chose. Il ya le point de vue humain. Quandj’étais en prison, je m’étais promisque, lorsque tout cela serait fini,d’une part je ne m’inscrirais à au-cune association d’anciens combat-tants, d’autre part que jamais je nechercherais à me venger. Je me sensbeaucoup mieux dans le rôle del’avocat que dans celui du pro-cureur. Mais il y a un aspect beau-coup plus large. La Pologne a vécupendant près de cinquante ans sousla dictature. Il n’y avait pas d’autrepossibilité. Et on ne peut pas, au-jourd’hui, à coups de scalpel, sépa-rer les bons et les mauvais. La sépa-ration passait à l’intérieur dechaque individu. Trente millions dePolonais ne pouvaient pas se re-trouver au maquis ou sur les barri-cades. Il fallait vivre. La Pologne po-pulaire était une forme, boiteuse,de vie “normale”. Les Français de-vraient bien le comprendre. Pétainn’était pas un traître, mais unhomme qui, au moment où il a si-gné la capitulation, avait le soutiende la vaste majorité des Français.

– Dans le passé, vous aveztoujours placé de grands espoirsdans l’Eglise polonaise, etmême dans une sorte d’alliancepour le bien commun entrel’Eglise et la gauche. Au-jourd’hui, l’Eglise polonaisen’est-elle pas engagée sur unepente dangereuse ?

– Mais non. L’Eglise polonaise estsoumise à la même transformationque le reste de la société, on ytrouve ce qu’il y a de meilleur et cequ’il y a de pire dans notre société.Elle a joué un rôle immense depuismille ans, et continuera à le jouer.Mais elle a du mal à trouver saplace dans un système démocra-tique, car elle est habituée à la dic-tature, à la nécessité de luttercontre toutes sortes de manœuvreshostiles, l’athéisation forcée, lesservices secrets, etc. Et de cettelutte elle a gardé quelques habi-tudes. Il y a un débat au sein del’Eglise, et même si, pour une brèvepériode, les intégristes devaientl’emporter, même si l’Eglise devaits’isoler au sein de la société, il seraitstupide de croire qu’elle ne retrou-verait pas, ensuite, son rôle histo-rique.

– Où vaut-il mieux vivre ?Dans un pays qui n’intéresseplus grand monde, ou dans unpays qui, dans les années 80,passait pour un moteur de l’His-toire ?

– Sans la moindre hésitation, ilvaut beaucoup mieux vivre dans unpays démocratique, prospère, etdonc ennuyeux. Je suis vraimenttrès très heureux de me retrouverdans cette Pologne qui n’intéresseplus les journalistes. »

Propos recueillis parJan Krauze

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12 / LE MONDE / MARDI 11 NOVEMBRE 1997 H O R I Z O N S - D É B A T S

Nanisme politique et couardise sont les paralysantes contradictions des Arabes contemporains, qui n’ont les yeux rivés que sur leurs théâtres locaux

AU COURRIER DU « MONDE »

LA FONCTION PUBLIQUESOUS VICHY

Il m’est impossible de laissersans réponse le passage meconcernant dans l’article duMonde daté du 5 novembre,« Portrait d’une administrationsur fond d’Occupation ». Celui-ci cite correctement ma défini-tion du type d’administrationque voulait établir le gouverne-ment de Vichy, mais il ajouteaussitôt : « Le phrasé lisse du po-sitivisme juridique recouvre ici –et légitime peut-être – une bienréelle épuration. » Laisser en-tendre que j’approuvais ainsi larévocation des fonctionnairesrépublicains par la quasi-dicta-ture que subissait alors laFrance, c’est exprimer exacte-ment le contraire de ma pensée.

Si votre collaborateur avait

pris la peine de lire la conclu-sion des 251 pages de mon ar-ticle publié dans la Revue dedroit public de 1941, il aurait vuque j’opposais « l’ancien régimedémocratique » fondé sur « latendance connue sous le nom de“dépolitisation” de la fonctionpublique », laquelle dépolitisa-tion ayant pour objectif de« préserver autant que possiblel’administration des passions par-tisanes », et « le nouveau ré-gime », qui « a suivi la tendanceinverse : au lieu d’atténuer le ca-ractère politique de l’administra-tion, il s’est efforcé de l’accen-tuer... Le nouvel Etat n’étant plusneutre, ses fonctionnaires nedoivent plus être neutres égale-ment, mais accepter et propagersa doctrine politique ».

Maurice DuvergerParis

La barbarisation des armées est un processus banal et bien connu. On avu cela en Colombie,au Brésil,en Argentine

Repentons-nous sur l’Algérie et parlons vraipar Alain Joxe

L’opinion démocratique française peut-ellesoutenir une dictature militaire sanglanteproche de l’Europe au nom de la défense desprincipes républicains ? La réponse est non

L ES Français restentpresque muets sur l’Al-gérie, sur sa dictaturemilitaire bloquant la

victoire électorale du FIS, sur lesmassacres horribles des derniersmois. Un mutisme fait de stupeuret de manque d’analyse politiqueet sociale. De manque de mé-moire. Aucune nation pourtantn’est plus présente que l’Algérie àla conscience de milliers de ci-toyens français. L’Algérie, c’étaitla France ; la guerre fut une guerrecivile ; l’Algérie française fut sou-mise à une dictature militaire. Desmillions de jeunes soldats ducontingent ont vécu cette guerre ;ils sont aujourd’hui d’âge mûr. Unmillion de pieds-noirs ont subil’expulsion finale. Des milliersd’officiers y ont joué leur carrièreet leur honneur. Des dizaines demilliers d’Algériens vivant enFrance sont devenus Français, euxet leurs enfants.

La guerre d’Algérie a marqué lajeunesse d’il y a trente-cinq ans.Elle continue à marquer de ma-nière silencieuse la jeunesse d’au-jourd’hui. Qui donc oublie sa jeu-nesse ? Personne, ni hier niaujourd’hui. Les Algériens mani-festent depuis quelques jours pourla démocratie. Il faut les soutenir,et pour cela retrouver une mé-moire vive.

La mode est aux repentancescorporatives, cette forme plutôtanglo-saxonne de la confessionsans absolution. Ces cérémoniesdu souvenir me déplaisent, maispas pour les mêmes raisons qu’àM. Pasqua : parce qu’elles s’ar-rêtent aux crimes du passé loin-tain et ne vont pas jusqu’au bout,c’est-à-dire jusqu’à aujourd’hui. Ilserait temps que la police et lepréfet Papon se repentent desrafles de Bordeaux et du Vel’d’Hiv,

mais aussi qu’ils se repentent desmassacres et des noyades du17 septembre 1961, dont quatremille personnes seulement ont crubon de célébrer le souvenir placeSaint-Michel cette année.

Mais pas seulement la police :l’armée française pourrait aussi serepentir des massacres et des tor-tures de la guerre d’Indochine, desopérations de ratissage des dje-bels, des viols et des tueries, de laBataille d’Alger. C’est ce non-ditaussi qui nourrit les fantasmes duFront national d’une lueur af-freuse qui reste cachée : le refoulédes ratonnades, de la Shoah, de laSaint-Barthélemy, c’est une légiti-mation du massacre.

Aller jusqu’au bout, cela signifiequ’il faut qu’on se repente aussi etactuellement des injustices qu’onfait subir aux familles et enfantsd’immigrés, avec ou sans papiers,qui ont vocation à devenir fran-çais. Ils risquent de rejoindre ainsi

les prédélinquants que le chômagefabrique dans les banlieues.

Repentons-nous comme ci-toyens de cette imbécile cruautéqui fait qu’un pays riche hébergedans la rue, hiver comme été, desmilliers de sans-abri. Repentons-nous aussi de n’avoir pas secouruactivement les populations assié-gées de Sarajevo, Goradze, Sre-brenica et d’avoir assisté aux mas-sacres sans avoir cherché à châtierles assassins et d’avoir enclenché

les génocides au Rwanda. Repen-tons-nous ou désignons les res-ponsables.

Supposons tout ce repentir pas-sé-présent affiché par le présidentde la République et le premier mi-nistre. Nous pourrions, après cela,avoir un parler vrai, même surl’Algérie. Il ne sera évidemmentpas vrai de dire : « Tous des sau-vages, ça c’est l’islam ! On vousl’avait bien dit ! » Les Espagnols,les Allemands, les Croates, les Is-raéliens, les Serbes, les Colom-biens, les Français, tous des sau-vages aussi, ont pratiqué lemassacre de villages entiers, au-trefois ou récemment, sans êtremusulmans le moins du monde,mais bien en pratiquant la dicta-ture militaire. La « torsion » so-ciale et les régimes militaires ex-pliquent toutes les barbaries, etcela partout dans le monde.

Ayant toujours été pour l’indé-pendance de l’Algérie, contre

l’OAS, contre le FN et leurs amisles nazis serbes de Seselj, je nevois pas pourquoi je devrais arrê-ter mon analyse, étranglé par lerespect de quoi ? De la résistancealgérienne, dont l’armée algé-rienne et l’Etat algérien descen-draient en droite ligne ? Mais larésistance algérienne va devoir re-commencer, contre le nouvel em-pire sans tête, et nous devrons lasoutenir, en France, de tout notrecœur, comme un morceau de

notre jeunesse. Si tout cela se pas-sait en Amérique latine, il y a long-temps que les langues se seraientdéliées. Nous aurions devantnous, parfaitement décrite et dé-noncée, une dictature militairesanglante, de plus en plus corrom-pue par la prédation conflictuellede la rente pétrolière qui est rede-venue juteuse. L’Algérie est richede ses royalties, conséquence desnouvelles découvertes et des in-vestissement anglo-saxons dans leSahara. C’est ce pactole qui en-gendre des chocs entre clans mili-taires. L’armée a interdit l’expres-sion politique d’un islam qui sevoulait fondamentaliste, mais aus-si activiste au niveau de l’aide so-ciale, et qui avait des soutiensdans les catégories les plus défa-vorisées de la population. Si on nedéfend pas la démocratie contre lepeuple, on ne défend pas non plusles femmes contre les femmes. Lescontradictions étaient aiguës ausein des deux camps dès le départ.

Le génocide n’est pas une carac-téristique de l’islam, qui est contreles massacres d’innocents commetoutes les religions du Livre, maisc’est une caractéristique des ré-gimes militaires, et tous veulentaussi une religion à leur bottepour se sentir justifiés de leurscrimes. L’armée algérienne deve-nue une armée latino-américaineordinaire ne déplaisait pas du toutaux Etats-Unis.

Interdit d’élection, le FIS a pro-clamé la résistance armée, mais ila été notoirement incapable de lamener, ce qui n’est pas son pireméfait, car cela prouve qu’il ne s’yétait pas du tout préparé. Les mili-taires, par définition surarmés, ontimmédiatement mené une lutterépressive essentiellement antiso-ciale, puisque c’est dans lescouches populaires que le FIS

s’était implanté. Cette répressionn’était nullement proportionnée àla menace militaire que représen-taient quelques guérillas isolées.Le mouvement armé a glissé versl’impuissance sans rien maîtriserpolitiquement, et sans pouvoirprotéger ses bases populairescontre la violence d’Etat.

La pulvérisation en groupes ar-més peu unifiés, qui se baptisentGIA, a manifesté ensuite par quel-ques actes barbares, en s’atta-quant aux femmes et aux ensei-gnantes, qu’on entrait dans uneforme d’anarchie morbide. Lesmassacres de populations civilessans défense les ont disqualifiéscomme représentants de l’islam, sitant est que tous ces crimes leursoient imputables. Or, il y a undoute.

On constate en effet, à un stadeassez précoce, la transformationde certains de ces groupes en cel-lules totalement incontrôlées, po-litiquement parlant, et donc mani-pulables : elles peuventaujourd’hui agir pour le comptede forces locales de groupes poli-ciers, voire de certains secteurs del’armée qui ont intérêt à montrerque la violence islamiste est pireque la violence policière. L’hypo-thèse que certains secteurs mili-taires aient contribué à fabriquercette image, en laissant faire ou enorganisant les tueries par milicesinterposées, est désormais émisepar tout observateur rationnel.Dispose-t-on des informations né-cessaires pour lancer de telles ac-cusations ? Certainement oui.

L’étude sociologique de la vio-lence anarchique contemporainepermet dans bien d’autres cas deformuler l’hypothèse de crimesd’Etat. La barbarisation des ar-mées est un processus banal etbien connu par des exemples« chrétiens » récents. On a vu celapartout. En Colombie, au Brésil,par exemple. En Argentine.

On remarque que les principauxmassacres récents, en Algérie, sesituent dans la zone la plus peu-plée, la mieux desservie en routeset la mieux quadrillée de l’Algérieutile : la riche plaine de la Mitidja,la grande banlieue d’Alger. Qu’ilsont eu lieu souvent à quelquescentaines de mètres de casernesou de postes de police, forces del’ordre qui se sont conduites en« neutres » non intervenants, quece soit sur ordre ou sans ordre.

Tout observateur de massacresorganisés dans des régions deterres riches et d’expansion ur-baine sait qu’on ne massacre pasdans ce types de territoires sansque s’y cache une opération fon-cière. Soit on veut recréer de lagrande propriété, en faisant fuirles paysans des coopératives fon-dées à l’indépendance. Soit qu’onveuille libérer des terrains pour laspéculation urbaine. Pour fairefuir les populations rurales, il fautet il suffit, dans un Etat de non-droit ou de dictature militaire, demassacrer quelques villages en-tiers. L’effet de terreur produit uneffet multiplicateur de fuite.

L’absence de réaction de l’ar-mée et de la police pendant lesmassacres suggère ou bien quel’appareil répressif algérien estcomplètement « démoralisé » etque l’Etat n’existe plus, ou bienque des complicités ont existéentre le commandement et lescommandos d’assassins. L’ab-sence de tout commentaire sur cesfaits stupéfiants révèle, de toutefaçon, que la division de l’armée

en groupes de tueurs et l’absenced’Etat est une seule et mêmechose. Les exemples latino-améri-cains sont légitimes car l’Algérie sesitue désormais au sein du nouvelempire américain. Les bandes ar-mées algériennes téléguidées agi-raient, techniquement, selon lemode de « sous-traitance » carac-téristique de l’époque de la dicta-ture militaire argentine. Celle-ciréprimait les groupes gauchistes,péronistes et autres, par des tue-ries, des enlèvements, des exé-cutions et des tortures conduites àmoitié au hasard, par des groupescivils paramilitaires. La période laplus terrible de la répression àBuenos Aires fut appelée « la ba-taille d’Alger » par des militairesinspirés par les spécialistes de larépression coloniale française, au-tant que par les spécialistes en-voyés par la CIA. L’armée colom-bienne sous-traite aussi. Elle adonné des armes à des milices oulaissé faire des bandes qui pra-tiquent le massacre contre les pay-sanneries de régions où l’oncherche à établir le règne des ma-fias, ou bien qui prennent de la va-leur, par exemple à cause du pro-jet d’un nouveau canal de Panamaen territoire colombien. A l’origineorganisés contre les guérillas

communistes, les paramilitairescolombiens finissent par détruirel’Etat et l’armée.

Malgré l’apparence d’untriomphe brutal et silencieux de ladictature, l’appareil militaire algé-rien, divisé, est en voie d’autodes-truction. Ce qui peut entraîner lafaillite générale du pays. Cet affai-blissement peut aussi présager unretour à la démocratie, mais passans appuis démocratiques.

Que la société algérienne se dé-compose en même temps que cequi reste de l’Etat ne gêne pas lesEtats-Unis, pourvu que les gise-ments, les pipe-lines, les ports mé-thaniers ou pétroliers, les zonesagraires modernisables, soientbien sous contrôle d’un systèmerépressif efficace et d’une oligar-chie rentière désormais attachée àla propriété privée et au libre mar-ché. Ce n’est pas là de l’anti-amé-ricanisme primaire. Les Etats-Unissont parfois contre les dictaturesmilitaires. La société américaineaussi est en état de souffrance.Mais balayons devant nos portes.

L’opinion démocratique fran-çaise doit prendre position : peut-elle soutenir une dictature mili-taire sanglante proche de l’Europeau nom de la défense des prin-cipes républicains ? La réponse estnon. Les républicains en Francedoivent prendre parti beaucoupplus clairement contre ce régimeet soutenir ses opposants.

Alain Joxe est directeurd’études à l’Ecole des hautesétudes en sciences sociales (Ehess).

Pourquoi le silence arabe ? par Mohammad-Mahmoud Mohamedou

D ’UN carnage àl’autre, l ’Algériepoursuit sa des-cente aux enfers.

Mais, alors qu’après six années decrise et cent mille morts, lacommunauté internationale sedécide à rompre le silence, lemonde arabe est curieusementabsent du débat sur le drame al-gérien. De par le monde ons’émeut. Lettres ouvertes, prisesde position, éditoriaux des grandsjournaux et rapports des organi-sations non gouvernementales sesuccèdent. Le sort de l’Algérie estau cœur de toutes les réflexions,sauf celles du monde arabe où,mis à part de timides et épiso-diques dénonciations sotto voce,un consensus s’est formé selonlequel il ne faut pas exacerber lanature radicale des événements à

Alger. Pour autant, de Nouak-chott à Bagdad, les Arabes dé-plorent de manière tortueuse uneAlgérie qui se meurt, un pays fouqu’il faut ramener à la raison.

Le non-dit de ces hésitations,dissimulations et contradictionsn’est que la peur de l’islamisme.Alors que le monde arabe s’étaitmobilisé entier contre la répres-sion coloniale française dans lesannées 50 et 60, peu de voixs’élèvent aujourd’hui pour dé-noncer les massacres.

La réalité est que ce conflit in-dispose les Arabes. Après avoir,dans un bref premier temps, ex-primé leur sympathie au mouve-ment du Front islamique du salut(FIS), la grande majorité des po-pulations arabes a par la suitesuccombé à l’effet d’une théoriedes dominos inversée par laquelleles régimes ont agité avec succèsle spectre d’une évolution « à l’al-gérienne » afin de contrer toute

vélléité d’émancipation de leur ci-toyens. « Mieux vaut un ordre au-toritaire qu’une anarchie démo-cratique » est alors devenu lecredo de beaucoup d’Arabes secomplaisant dans le confort d’uneconfiguration politique statique.

Une impuissance volontaire adès lors été rationalisée sansgrands efforts, et, cyniquement,la lutte contre les islamistes a étéacceptée comme un mal néces-saire. Cette logique abrégéeignore néanmoins les conditionsqui ont menées au « désordre » :l’illégitimité et la violence du gou-vernement algérien actuel. LesArabes sont-ils dupes ou se-raient-ils complices ?

Levons une équivoque : demême que l’argument que la crisealgérienne est le fruit d’un trau-matisme historique n’est plus te-

nable, les ambiguïtés de la guerrecivile ne sont pas légion. Un coupd’Etat a eu lieu le 11 janvier 1992pour prévenir la victoire électo-rale du FIS au second tour des lé-gislatives. Il fut suivi d’une impla-cable répression contre lesmilitants de ce parti. En réaction,ces derniers ont lancé une san-glante insurrection généralecontre l’armée et le gouverne-ment algérien. D’assassinats enattentats à la bombe et prisesd’otage, tout a été ensuite faitpour médiatiser et internationali-ser un conflit que l’Etat algérien atoujours voulu et longtemps puétouffer avec un tranquille mé-pris de la vérité.

Depuis deux ans, le conflit apris une nouvelle dimension avecl’introduction des milices armées– les groupes de légitime défensedit « patriotes » – et les factionsparamilitaires. Cette privatisationde la violence a engendré à son

tour une escalade dans la naturedes tueries ; égorgements, déca-pitations et macabres mutilationsde toutes sortes se succèdent dé-sormais quasi quotidiennement.

Face à cette agonie, le mondearabe est coupable de complicitéavec une junte militaire qu’il sup-porte passivement par crainted’une marée islamiste. L’indiffé-rence ambiante ne peut en effets’expliquer que par la peur de lacontagion. De plus, cette peur –et c’est là une nouveauté – estpartagée par les régimes et lespopulations. Un effet pervers decette paralysie est le renforce-ment des Etats autoritairesarabes qui font désormaiscommerce de la crainte du dé-sordre. Le néo-autoritarisme estné.

Tout aussi coupables sont lesdémocrates arabes autoprocla-més – dont un trop grand nombrea bénéficié des largesses des mé-dias occidentaux – qui ap-prouvent la lutte contre l’inté-grisme. Et l ’on mesuremaintenant l’impéritie de ceuxqui, cramponnés à des valeurspseudo-humanistes, ont légitiméex post le coup de force de janvier1992 en diabolisant les islamisteset en survalorisant le discours deces derniers.

Ce glissement quant à l’identitédu responsable premier de lacrise dénote une trop vivace pro-pension à ignorer les crimes del’État algérien : exécutions som-maires, pratique systématique dela torture, disparitions forcées,implication indirecte dans lesexactions des milices ainsi que laprobable participation à quatreassassinats politiques prémédi-tés ; ceux du président MohamedBoudiaf, de l’ancien directeur dela sécurité militaire, Kasdi Mer-bah, de l’ancien ministre de l’inté-rieur, Aboubakr Belkaïd et du di-rigeant de l’Union générale destravailleurs algériens (UGTA) Ab-delhaq Benhamouda.

Un gouvernement illégitime, is-su d’un pronunciamiento mili-taire, tue sa population. La ques-tion algérienne n’est donc plusconfinée à ce pays. Nanisme poli-tique et couardise sont les paraly-santes contradictions des Arabescontemporains qui n’ont les yeuxrivés que sur leurs théâtres lo-

caux. La solidarité des intellec-tuels occidentaux est la bienve-nue – les atteintes aux droits del’homme relèvent de laconscience universelle – mais ellereste tout de même géographi-quement et culturellement se-condaire. Pour quelle raison lesappels à la paix viennent-ils dusecrétaire général des Nationsunies, Kofi Annan, et pas de celuide la Ligue des Etats arabes, Es-mat Abdel-Meguid ?

Le fait que ce soit des Arabes etdes musulmans qui sont massa-crés (dans des conditions horri-fiantes, il faut le souligner) de-vrait interpeller la consciencearabe avant toute autre. Le voisi-nage et la communauté de reli-gion impliquent des responsabili-tés particulières. I l fautimpérativement rompre le tabouet dénoncer la superficialité del’argument spécieux de non-im-mixtion dans les affaires algé-riennes. Ce dernier et le silencedominant reflètent l’état déplo-rable des sociétés civiles arabesoù l’action des démocrates arabesn’a que trop souvent été otagedes considérations politicienneset des jalousies nationales subli-mées.

Le chauvinisme est le pendantde cette approche dont le perni-cieux raisonnement politico-stra-tégique informe l’aveuglementdes humanistes arabes en mêmetemps qu’il favorise la floraisondes radicalismes réactionnaires.La routinisation des massacres etla frénésie sanguinaire sont ainsiignorés de manière à demi-complice parce qu’ils constituentun honteusement soulageant dé-foulement à distance. La chute del’Algérie est pourtant celle dumonde arabe. Elle n’est que laculmination d’un processus histo-rique régional par lequel les ré-gimes autoritaires ont, à contre-courant de l’histoire, mené leurspays à la dérive. L’aveuglementarabe sur la question algérienneest une déchéance de plus.

Mohammad-MahmoudMohamedou est directeur derecherches pour l’Afrique du Nordet le Moyen-Orient au RalphBunche Institute on the United Na-tions à New York.

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H O R I Z O N S - D É B A T S LE MONDE / MARDI 11 NOVEMBRE 1997 / 13

Le dernier articlede François Furettémoigne de l’itinéraire d’une génération qui, en deuil du communisme, s’est juré qu’on ne l’y reprendrait plus

France, ton « IST » fout le camp ! par Serge Chambaud et Denis Varloot

R UMEURS sur l’éven-tuelle reprise dugroupe CEP – 70 %de l’édition scienti-

fique et technique française – parune multinationale étrangère. Il ya là de quoi préoccuper tous ceuxqui, depuis plus de trente ans, sebattent pour que la France main-tienne un niveau de développe-ment en information scientifiqueet technique (IST) compatibleavec ses ambitions politiques,économiques et industrielles.

Au niveau international, l’his-toire de l’IST remonte au lance-ment, en 1957, du premier satel-l ite, Spoutnik, par lesSoviétiques. Piqués au vif, lesAméricains décident de lancer leprojet Apollo, qui débouchera en1969 sur la conquête de la Lune.Ce projet s’appuie sur une mobi-lisation de tous les moyens trèsrapidement disponibles, et, aupremier chef, des ressources enIST, ce qui conduira à la créationdes premières banques de don-nées.

En France, il faudra attendre1971 pour que soit créé le bureaunational de l’information scienti-fique et technique (BNIST) char-gé, au sein du ministère de l’in-dustrie, de proposer augouvernement les grandes lignesd’une politique nationale dans cedomaine. Dès l’origine, trois axesmajeurs seront privilégiés : sou-

tien au secteur national de l’édi-tion scientifique et technique ;aide à la production de banquesde données, tant dans le secteurprivé que dans les organismes pu-blics de recherche (universités,CNRS, Inserm, etc.) ; enfin, miseen place d’une capacité de diffu-sion de cette information « élec-tronique » au niveau national.C’est ainsi que sera créé le centreserveur national Questel, portépar la direction générale des télé-communications (aujourd’huiFrance Télécom), et baptisé plustard Questel-Orbit après le rachatdu serveur américain Orbit.

Ces mesures visaient d’abord àassurer une certaine indépen-dance nationale dans la produc-tion et la diffusion de l’IST. Celaafin d’apparaître comme un par-tenaire solide, et non comme unsimple client aux yeux des acteursinternationaux dominants. I ls’agissait aussi de ne pas êtreabsent d’un marché potentielprometteur, alimentant les indus-tries françaises de l’informationélectronique. Ces industries, untemps dopées par le Minitel, sontaujourd’hui pratiquement en ja-chère, avec comme conséquenceune fuite des cerveaux vers la Sili-con Valley.

Alors que, dans son discours deHourtin, en août dernier, le pre-mier ministre a montré les enjeuxd’Internet pour la France, en par-

ticulier en termes de créationd’emplois dans l’édition et la dif-fusion de l’information électro-nique, il serait paradoxal que laCEP en vienne à relever decentres de décision étrangers. Cegroupe constitue en effet un desgrands gisements français d’in-formation spécialisée – richessedont on ne mesure bien l’impor-tance que lorsqu’on l’a perdue. Ace titre, il représente un formi-dable potentiel d’informationssusceptibles d’être rendues dis-ponibles sur Internet. Il contribueau rayonnement de la créativitéscientifique et technique de laFrance, sans parler de sa langue –à laquelle un éditeur étrangern’accorderait évidemment qu’uneimportance toute relative.

A la période glorieuse des an-nées 70 et 80 a succédé une phasede désaffection pour l’IST au seinde l’appareil d’Etat, alors mêmeque se banalisait l ’usage desbanques de données, aussi biendans les entreprises que dans larecherche publique. Aujourd’hui,trois des piliers du dispositif na-tional de production et de diffu-sion de l’IST sont en péril :

– l’édition scientifique et tech-nique, dès lors que le rachat dugroupe CEP priverait la France dela maîtrise d’une de ses princi-pales sources d’informations ;

– le serveur Questel-Orbit, quise désengage du secteur scienti-

fique et technique, réputé moinsrentable que la mise en ligne desannuaires ;

– l’Institut de l’informationscientifique et technique (Inist) duCNRS, où quatre cents personnessont en attente d’orientationsclaires après l’audit réalisé en jan-vier 1997.

Dans le même temps, les autresgrands pays industriels pour-suivent et même intensifient leursefforts dans ce secteur stratégique.Le gouvernement allemand vientde lancer un plan sur le thème« L’information, matière premièrede l’innovation », doté d’un bud-get d’environ 2 milliards dedeutschemarks (6,7 milliards defrancs) sur quatre ans. Les pou-voirs publics français, que l’on saitattentifs à ce qui se passe outre-Rhin, vont-ils enfin, eux aussi, me-surer le caractère urgent de la miseen œuvre d’une politique ambi-tieuse de l’information scientifiqueet technique ?

Serge Chambaud est an-cien président du Groupementfrançais de l’industrie de l’informa-tion.

Denis Varloot est ancien di-recteur des bibliothèques, des mu-sées et de l’information scientifiqueet technique au ministère de l’édu-cation nationale.

Le bel avenird’une illusionpar Sylvain Kahn

L ES lecteurs de FrançoisFuret avaient pris l’ha-bitude de voir sa pen-sée récupérée à droite.

Il leur faut se préparer à son ins-trumentalisation à gauche. Dansleur point de vue « Fin de siècle »(Le Monde du 15 octobre), DanielBensaïd et Philippe Corcuff fontde Furet le porte-drapeau du« prêt-à-penser libéral », attri-buant à son texte une valeur testa-mentaire à laquelle son auteur n’ajamais songé.

Dans « L’énigme française » (LeMonde du 23 septembre), qui nedoit son statut de dernier textequ’à un tragique accident, Fran-çois Furet interprète les dernièresélections législatives comme unevictoire de la démagogie dont ladésagrégation du communismeaurait dû vacciner les Français : eneffet, de la réduction de la fracturesociale (Jacques Chirac en 1995) àla réduction massive du chômage(l’alliance PS-Verts-PC en 1997),c’est sur l’illusion d’une séparationde la démocratie et du capitalismequ’ont été gagnées les élections.

Toutefois, en ferraillant avec Fu-ret sur la pensée unique et la na-ture du mouvement social de 1995(additions de corporatismes indif-férents aux ravages du chômage

pour l’un, germes de nouvelles so-lidarités et d’autres possibles pourles autres), Bensaïd et Corcuffpassent à côté de la critique per-tinente qu’on peut faire de cet ar-ticle. S’il pèche, c’est par désen-chantement. Plus que d’unerésignation à « l’ordre existant », iltémoigne de l’itinéraire d’une gé-nération qui, en deuil du commu-nisme, s’est jurée qu’on ne l’y re-prendrait plus. Mais pour lagénération suivante, dont je faispartie, et qui n’a connu ducommunisme que sa tragique réa-lité, chercher à aménager le capi-talisme et à approfondir la démo-cratie, est-ce retomber dansl’illusion idéologique ?

Pour Furet, en effet, la démocra-tie produit immanquablement l’il-lusion qu’il est possible de fonderun contrat social neuf et coupé detoute tradition historique, grâce àla toute-puissance de l’action poli-tique, capable de concrétiser enfait la société idéale. Inauguréepar la Révolution française, cetteillusion a été massivement parta-gée par des millions d’Européensau XXe siècle, victimes de la puis-sante attraction de l’idéologiecommuniste et de la passion révo-lutionnaire, surtout dans l’horizonde l’antifacisme. Furet en a retracél’histoire dans Le Passé d’une illu-sion (1993) après en avoir longue-ment exploré la genèse et le pro-cessus dans l’histoire de laRévolution française qu’il définitcomme « la naissance de la démo-cratie » (préface du Dictionnairecritique de la Révolution fran-çaise, 1988).

Dans La République du centre(1988), il diagnostiquait pourtantla fin de l’exception française etl’entrée de la France dans « le droitcommun des démocraties » à la-quelle il avait lui-même contribuéen affirmant, dans Penser la Révo-lution française, publié en 1978,que la Révolution française étaitterminée.

Dès 1789 sont posées les problé-matiques, toujours actuelles, quipermettent et la démocratie repré-sentative et libérale et la Terreur etle totalitarisme : comment penseret mettre en œuvre la souveraine-té populaire conçue comme indi-visible et absolue ? Comment arti-

culer l’universalisme des droits del’homme avec les inégalités so-ciales et les différences indivi-duelles ? Comment instituer unecommunauté politique de citoyensà partir de la société d’individuslibres et égaux que parachèventles trois mois de l’été 89 ? Dès lors,la Révolution invente la politiquedémocratique : une compétitioninfinie entre des systèmes idéolo-giques légitimant l’ensemble desmoyens à mettre en œuvre pourpromouvoir la liberté et l’égalitédes individus comme la participa-tion du peuple au pouvoir.

L’épisode de la Terreur est l’ar-chétype de ce surinvestissementidéologique des secteurs social,culturel, économique et privé etde cette « subjectivisation de l’uni-vers » caractéristique de la poli-tique démocratique. Chaque évé-nement est le produit d’unevolonté, et l’histoire le théâtred’un affrontement manichéenentre le peuple et les comploteursqui veulent sa perte.

Malheureusement, au motif quela pensée de Furet serait aveugléepar « une confrontation obsession-nelle avec le communisme stali-nien », « Fin de siècle » ne soufflemot de l’illusion idéologique. Enfait, persuadés que « la libérationsociale » est le moteur de l’his-toire, Bensaïd et Corcuff en sontencore prisonniers. Toute l’œuvrede Furet montre au contraire queles révolutions et le mouvementdémocratique ont une dimensionpolitique et idéologique irréduc-tible à la condition sociale de leursacteurs, quoi qu’ils en disent eux-mêmes. Une révolution ne peutchanger en quelques années lesstructures sociales. Mais le croireet le tenter peut déraciner touteune société.

Cette interprétation démystifiela politique démocratique etl’idéologie égalitariste, notam-ment dans leur prétention à latoute-puissance sur le cours deschoses, à l’homogénéisation desconditions sociales et des indivi-dus et à l’idée d’un peuple un. Cequi laisse place à une marge demanœuvre raisonnée et plus lé-gère pour l’action politique indivi-duelle et collective. Puisque nousn’avons pas prise sur tout, et quenous ne savons pas exactementsur quoi nous avons prise, es-sayons au maximum de changerles choses sans chercher à toutchanger. Opération qui rappelle laphilosophie kantienne de l’histoireselon laquelle, dans la mesure oùnous ne pouvons pas avoir la cer-titude que l’histoire n’a aucunsens, nous préférons lui en donnerun.

Mais cette démystification, dontnous sommes tributaires, amènel’historien à disqualifier, au nomdu désenchantement, tout projetpolitique. Elle ne lui permet pasd’envisager comment approfondiret actualiser la démocratie auXXIe siècle, ni comment aménagerle système capitaliste pour en cor-riger les inégalités. Maintenantque le suffrage universel constituela toile de fond, il s’agit pourtantd’articuler démocratie représenta-tive et citoyenneté active ; d’adap-ter la nation et la citoyenneté, no-tamment, mais pas seulement, parle droit de vote aux étrangers, àune Europe pacifiée, en voie d’in-tégration, ouverte aux migrations ;de canaliser le capitalisme pourqu’il ne corrompte pas la démo-cratie mais la renforce en donnantcorps à l’entreprise citoyenne.

Notre génération ne craint pasd’être bernée par l’histoire ; elle neconnaît du progrès que ses contra-dictions et elle n’est pas utopiste.La démocratie existe et fonc-tionne ; il n’y a plus à l’inventer. Ily a au contraire à l’étendre, no-tamment hors d’Europe, et à l’ap-profondir, là où elle existe. Dansce cadre, l’illusion est nécessairepuisqu’il n’y a pas de projet poli-tique sans illusion. Une illusiondébarrassée de la pieuse vénéra-tion du mouvement social passé età venir ; une illusion dans laquellela démocratie, n’est pas un leurreni une promesse éternellementdéçue, mais une frontière sanscesse repoussée par le projet etl’action politiques.

Sylvain Kahn est agrégéd’histoire.

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14 / LE MONDE / MARDI 11 NOVEMBRE 1997 H O R I Z O N S - A N A L Y S E S

IL Y A 50 ANS, DANS 0 123

0123 est édité par la SA LE MONDEPrésident du directoire, directeur de la publication : Jean-Marie ColombaniDirectoire : Jean-Marie Colombani ; Dominique Alduy, directeur général ;

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Le Monde est édité par la SA Le MondeDurée de la société : cent ans à compter du 10 décembre 1994.

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ÉDITORIAL

Coup franc par Leiter

Quand Paris fait toiletteENFIN Paris a retrouvé ce matin

ses balayeurs, ses jardiniers, sesbennes municipales. Sans jouersur les mots, le besoin s’en faisaitsérieusement sentir. La prome-nade sur les boulevards, qui attiretous les dimanches, entre Répu-blique et Madeleine, de nombreuxflâneurs, en était hier tout empoi-sonnée. Ce n’étaient que gravats,ce n’étaient que poubelles, arron-dissant, sous les bâches dont onles avait pudiquement affublées,des formes montueuses assezignobles.

Dès la première heure, boueurset cantonniers se sont donc mis àl’œuvre. Les Halles, bastion cen-tral de la malpropreté publique,ont été attaquées au jet d’eau. Lestrains de wagonnets affectés à lacorvée de nettoiement croulaientsous une moisson aux affreusesexhalaisons. Toute une populations’affairait là, la fourche ou le balai

en main, et l’on n’entendait, sousles pavillons et tout autour, que lerâclement des pelles sur l’asphalte,le gémissement familier desbennes ingurgitant double et tripleprovision d’immondices.

Bien entendu, la toilette de Parisne se fera pas en un jour. Il va enfalloir des voyages pour déblayer,balayer, ramasser tout ce qu’unegrande ville qui se néglige a pu en-tasser en huit jours.

Mais en recouvrant sa propreté,Paris perdra, aussi, un certain pit-toresque. On ne verra plus ces ci-metières de ferrailles s’étalant enpleine rue, où l’on découvrait lesobjets les plus invraisemblables,tel ce vieux fauteuil de cuir, dissé-qué jusqu’à la bourre, qui ce matinencore tendait aux passants, ruede Richelieu, des bras dont per-sonne ne voulait.

(11 novembre 1947.)

RECTIFICATIF

TROTSKI ET STALINEUne erreur a été commise, en

page 7 de nos éditions datées 9-10novembre, dans notre tableau« Les trois grandes familles de l’his-toriographie du communisme ».Ouvrage posthume, qu’il terminaitquand il fut assassiné par un agentsoviétique en août 1940, le Stalinede Léon Trotski a été publié pour lapremière fois en 1946 – et non en1948 – chez Harper and Brothersaux Etats-Unis. Il faisait notam-ment suite à un autre livre de Trot-ski, Les Crimes de Staline, publié àParis en 1937 chez Grasset et tra-duit du russe par Victor Serge.

Generalicontre AGF,l’OPA qui obligeà réfléchirSuite de la première page

Sauf à démontrer que Generalin’a pas la solidité financière pourse lancer dans une telle entrepriseou que son objectif est de déman-teler le groupe, l’opération estpeut-être souhaitable. Elle est entout cas juridiquement imparable.Car elle émane d’un groupe euro-péen. A l’heure où la taille est lesésame pour tenir son rang dansun marché mondial, faut-il uni-quement le déplorer lorsque cesont des entreprises françaises quifont les frais de ces appétits ? Le ci-mentier Lafarge ne vient-il pas des’élancer sur le britannique Re-dland ?

Aujourd’hui, la bataille se dé-place sur le terrain financier. Ladifférence est de taille ; c’est ce quiprovoque le sursaut des politiques.L’impact sur l’emploi que peutavoir la prise de pouvoir d’unétranger sur une société françaiseest une inquiétude commune àtous les secteurs de l’industrie.S’agissant des institutions finan-cières, cette inquiétude s’étendaux conséquences que pourrait en-traîner la perte de souverainetéd’acteurs qui ont un rôle-clé dansl’économie. Les compagnies d’as-surances sont des investisseursinstitutionnels par excellence. LesAGF géraient, au 31 décembre1996, 136 milliards de francs d’obli-gations françaises et 52 milliardsde francs d’actions françaises. LeGAN, à la même date, gérait111 milliards d’obligations et21 milliards d’actions. Les banquessont, elles, au cœur du finance-ment des entreprises et particuliè-rement des PME. Ces montants

énormes se placeront-ils toujoursdans des entreprises françaises ouen obligations assimilables au Tré-sor en cas de contrôle étranger ?

On semble découvrir cette hypo-thèse. Et de nombreuses questionssont soulevées à cette occasion.Existe-t-il un effet de seuil, s’agis-sant de la présence de capitalétranger dans les entreprises fran-çaises ? Jusqu’où veut-on l’Eu-rope ? L’Etat a-t-il un rôle de régu-lateur dans l’organisation dusecteur financier ? Comment fontnos voisins ? Faut-il avoir un ouplusieurs acteurs de taille mon-diale dans chaque secteur d’activi-tés ?

Laurent Fabius a le mérited’avoir lancé le débat, cantonnéjusqu’à présent aux couloirs desministères. Jeudi 6 novembre, leprésident de l’Assemblée nationalea résumé, de façon abrupte, la si-tuation. Au micro d’Europe 1, ils’est inquiété du fait que « nos en-treprises sont de plus en plusopéables, c’est-à-dire achetables àmerci. Autant il est très difficile pourdes entreprises françaises d’acquérirde grandes entreprises à l’étranger,autant la réciproque n’est pas vraie.C’est une menace forte. Je crois qu’ilva falloir réfléchir ultra-rapidementà tout cela, car on ne peut pas lais-ser nos grandes entreprises partir àl’étranger ». Plus discrètement,Henri Emmanuelli, président de lacommission des finances de l’As-semblée, estime que « mainteniren France les pôles de décision desétablissements financiers est essen-tiel ».

Le constat renvoie à l’incurie despouvoirs publics qui n’ont pas suamener harmonieusement les ins-titutions financières d’une écono-mie administrée à une concur-rence de marché et ontdéréglementé, sans fournir aux ac-teurs de la sphère financière unenvironnement concurrentieléquitable. Les banques en ont gar-dé une fragilité particulière qui neles met pas à l’abri des raiders. Lesgouvernements successifs n’ont ja-mais vraiment défini la place et lerôle qu’ils veulent donner aux ins-

titutions financières dans quinzeans. La prise de conscience des ef-fets de l’Union européenne a lieu,mais dans la douleur.

Au gouvernement de Lionel Jos-pin de gérer ces erreurs. Fauted’avoir anticipé en créant despôles nationaux forts, il est enporte-à-faux. Les socialistes, quiont toujours quelque chose àprouver, se veulent bons élèves.Sous Pierre Bérégovoy, ils ontdonné libre cours aux marchés. Ilssont maintenant prêts à tout pas-ser à l’Europe.

L’AVENIR FINANCIERNos voisins seraient-ils moins

naïfs ? L’Allemagne, la Grande-Bretagne, l’Italie, les Pays-Bas ontfait émerger, par rapprochementssuccessifs, des gros centres finan-ciers. Si les activités des banquessont mondiales dans le domainedes marchés ou des banques d’af-faires, chaque pays privilégie laconstitution de gros mastodontesnationaux. L’UAP a certes achetéle deuxième assureur allemand,Colonia, mais il s’agissait àl’époque de la vente par la familleallemande propriétaire de sa parti-cipation à l’homme d’affaires fran-çais Jean-Marc Vernes, aujourd’huidécédé. L’entrée des AGF dansl’autre assureur allemand AMB nes’est faite qu’à la demande du ma-nagement, l’assureur françaisn’ayant d’ailleurs pas les droits devote correspondant à sa participa-tion.

Les institutions financières fran-çaises sont-elles fongibles dansl’Europe ? Oui, à condition qu’ellesparviennent culturellement à subs-tituer une économie administrée,où l’Etat met en musique, à uneéconomie de connivence, où jouela solidarité. Oui, à condition quele champ ne soit pas laissé entière-ment libre à un seul acteur domi-nant. Oui, à condition que l’Etatconserve pour mener sa proprepolitique, un bras séculier fort, cequi pourrait conduire à renforcerle rôle de la Caisse des dépôts.

Quelle est la marge de ma-nœuvre du gouvernement ? Dans

le dossier des AGF, le coup est par-ti. Faute d’avoir favorisé l’émer-gence d’un second pôle d’assu-rance en rapprochant les AGF et leGAN, il ne peut qu’être vigilant surla cession des deux entreprisesqu’il va privatiser, le GAN et legroupe bancaire CIC. Le choix descandidats se fera sur des critèrespatrimoniaux, industriels et so-ciaux. Il se fera aussi désormais enprenant en compte le poids deseuropéens dans le secteur finan-cier. Les AGF aux Italiens, le GANaux Allemands et le CIC aux Néer-landais, par exemple : tout celacontribuerait peut-être à l’intégra-tion de l’Europe, mais aboutirait àl’abandon d’une partie importantede l’industrie financière française.Avec des champions tels qu’AXAdans l’assurance et le Crédit agri-cole dans la banque, certainspensent que la France serait hono-rablement représentée au niveaumondial. D’autres estiment qu’iln’est pas sain de laisser un seul ac-teur national dominer le marché.

L’OPA de Generali sert de révé-lateur. Le gouvernement ne peutfaire l’économie d’une réflexion enprofondeur sur l’avenir de l’indus-trie financière française. Il doit lafaire sans crainte d’être taxé de na-tionaliste.

Babette Stern

Le nouveau partenariat sino-américainLA RÉCENTE visite de Jiang Ze-

min aux Etats-Unis sera-t-elle aus-si féconde que celle effectuée parDeng Xiaoping en 1979 ? Levoyage du « petit timonier » avaitcontribué à normaliser les rela-tions sino-américaines après vingtans de méfiance et de tension. Leprésident Jiang, pour sa part, peutd’ores et déjà se flatter d’avoir re-noué un dialogue brusquementinterrompu par la répression du« printemps de Pékin », en juin1989. « Dépasser Tiananmen» : telétait l’objectif poursuivi par BillClinton et son hôte.

Ce résultat a été globalementobtenu parce que les deuxhommes ont dressé un constatsemblable : les divergences entrel’Amérique et la Chine à proposdes droits de l’homme, de la dé-mocratie, du Tibet, voire de l’ave-nir de Taïwan, ne seront pas apla-nies avant la fin de la décennie, etil est probable qu’elles perdure-ront longtemps après le début dusiècle prochain. Dès lors, mieuxvaut faire en sorte que ces désac-cords n’empoisonnent pas l’en-semble de la relation sino-améri-caine, laquelle promet d’êtrefructueuse pour chaque pays.C’est en ce sens qu’un nouveaupartenariat entre la Chine et lesEtats-Unis a vu le jour lors du sé-jour américain de M. Jiang.

Il s’agit certainement de realpo-litik, mais qui est l’expression

d’une nouvelle maturité diploma-tique. Il n’est pas question, dupoint de vue américain, d’« ou-blier » Tiananmen, simplement dene plus envisager les relationsaméricano-chinoises à travers ceseul prisme. A dresser la liste desdésaccords bilatéraux qui n’ontpas reçu l’amorce d’une solution,on pourrait douter que cette ren-contre se soit soldée par le « suc-cès » tant salué à Washington et àPékin. Pourtant, les priorités dechaque pays ont été, dans l’en-semble, atteintes, parce qu’ellesétaient complémentaires.

Un rapprochement entre laChine et l’Amérique se justifie surles plans diplomatique etcommercial, et aussi parce queleurs présidents espèrent en reti-rer des bénéfices de politique inté-rieure. En se rendant à Washing-ton, Jiang Zemin recherchait unestabilisation des relations bilaté-rales, mais peut-être plus encorele respect. La Chine souhaitait ob-tenir de l’Amérique un statut etdes égards équivalents à ceux dela Russie, et son président étaitanxieux d’être accueilli aussi bienque le fut Deng Xiaoping il y a dix-huit ans.

L’administration Clinton a ac-cordé sans barguigner à son hôteles fastes qu’il demandait, sachantque celui-ci entendait ainsi faire ladémonstration qu’il n’est plus un« pestiféré», en dépit du stigmate

de Tiananmen. En Chine, lesimages les plus flatteuses du sé-jour de Jiang Zemin ont été am-plement diffusées et celles desmanifestations de protestationcontre les atteintes aux droits del’homme soigneusement censu-rées. Pour son audience chinoise,comme pour le public américain,M. Jiang s’est efforcé d’apparaîtrecomme un chef d’Etat moderne,curieux de technologie et parlantd’égal à égal avec le président dela première puissance mondiale.

PETITE PHRASELes évolutions eurent-elles pour

prix une petite phrase ambiguësur les « erreurs » peut-êtrecommises à Tiananmen, il est vraipréalablement corrigée par uncommentaire patelin sur le carac-tère « naturel » des divergencesentre deux si grands pays ? A l’évi-dence, cette timide reconnais-sance n’aurait pas été suffisantesans une certaine complicité amé-ricaine. L’« ouverture » (au moinssur la forme) que M. Jiang a vouluincarner lors de son voyage auxEtats-Unis, est allée au-devant dela politique d’« engagementconstructif » dont Bill Clinton s’estfait l’avocat, dans la mesure oùelle la justifiait a posteriori.

Le nouveau « partenariat straté-gique » avec Pékin a permis auchef de la Maison Blanche de ren-forcer l’isolement de l’Iran, un ré-

sultat d’autant plus appréciablequ’il s’inscrit après un double ca-mouflet : celui infligé par une Rus-sie qui refuse de cesser sa coopé-ration nucléaire avec l’Iran, lesecond sous la forme de l’impor-tant accord pétrolier récemmentsigné par Téhéran avec troiscompagnies étrangères, notam-ment la française Total.

Le Congrès est loin d’êtreconvaincu par la thèse de l’admi-nistration, pour qui c’est en serapprochant du gouvernement deJiang Zemin que l’Amérique seraen position d’infléchir la politiquechinoise. Les parlementaires sontégalement sensibles aux avertisse-ments de certains sinologues quicraignent que le transfert detechnologies américaines à l’em-pire du Milieu se solde par un ac-croissement de la puissanceéconomique, mais aussi militaire,de la Chine. Un tel résultat iraitévidemment à l’encontre de l’ob-jectif à long terme que s’est fixéel’administration Clinton : faire ensorte que la Chine aborde de ma-nière pacifique le XXIe siècle.

C’est donc le principe même del’« engagement constructif » qui esten cause, c’est-à-dire un élémentmajeur du bilan de politiqueétrangère que souhaite laisser BillClinton en quittant la MaisonBlanche.

Laurent Zecchini

Une journéepour les Algériens

Q UE faire pour l’Algé-rie ? La question estmal posée. Mieuxvaudrait deman-der : que faire pour

les Algériennes et les Algériens ?Que faire pour une populationdepuis cinq ans prise entre deuxfeux, deux violences, deux tyran-nies qui s’entretiennent l’unel’autre ? Car la sauvagerie de l’is-lamisme militant, du moins cer-taines de ses incarnations, paraîtsouvent n’être que le produitd’un pouvoir trop longtempsconfisqué par le même petitgroupe de militaires. Au milieu,la population. Elle compte sesmorts, ses enfants, ses vieillardsassassinés par les groupes isla-miques armés ou autres bandesqui ont confisqué le nom de l’is-lam pour pratiquer le grand ban-ditisme. Elle compte ses « dispa-rus » – enlevés par l’un desservices de « sécurité » du pou-voir – ses torturés, ses embastil-lés sans le moindre procès, pourne pas parler des victimes d’exé-cutions sommaires. La popula-tion algérienne est saoûlée deviolence ; elle est saturée de ter-reur, épuisée de brutalités. C’estune population martyre.

Lionel Jospin a eu le mérite dedire que l’Algérie subissait à lafois la terreur des islamistes etune certaine violence d’Etat. Ilreste que le gouvernement fran-çais – tout gouvernement fran-çais – est condamné à une ma-nière d’attentisme prudent face àla crise algérienne. Pour les Algé-riens, l’écho de la France offi-cielle est toujours, peu ou prou,

celui de l’ex-puissance coloniale.Radicaux islamistes ou membresdu régime ont beau jeu de ren-voyer Paris à l’histoire. Lacommunauté internationale nepeut guère faire plus. Les mili-taires algériens profèrent depuistoujours un discours extrême-ment sourcilleux sur l’indépen-dance du pays. Toute velléité dedémarche de l’ONU – à vrai direimprobable – est dénoncéecomme une « ingérence » inad-missible dans les affaires inté-rieures d’un Etat membre.

Reste, alors, ce qu’il faut bienappeler la « société civile » fran-çaise, les partis, syndicats, asso-ciations, qui, en décidant de fairedu lundi 10 novembre, « Un jourpour l’Algérie », entendentadresser un message à la sociétécivile algérienne. C’est un mes-sage de sympathie, de solidarité,doublé d’une pression sur l’Etatfrançais pour qu’il respecte àl’égard des Algériens tous les en-gagements pris en matière de vi-sas et de droit d’asile.

On sait les limites de l’exercice.Pourtant, le geste compte. Il estimportant pour les Algériens deFrance et pour les Français d’ori-gine algérienne. Il est importantparce que l’histoire, la géogra-phie, la démographie (algé-rienne), et peut-être un peu plus,font que les deux populationsvont continuer à vivre ensemble ;à entretenir d’intenses relationscommerciales et humaines, tou-jours marquées par la passion.Autant de justifications surabon-dantes de cette journée de mobi-lisation.

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E N T R E P R I S E SLE MONDE / MARDI 11 NOVEMBRE 1997

Bruxelles et Paris divergent sur le plan d’aide au Crédit lyonnaisLES SERVICES du commissaire européen à la

concurrence, Karel Van Miert, espèrent que laCommission de Bruxelles pourra rendre sa déci-sion sur le troisième plan d’aide d’Etat au Créditlyonnais, le 17 décembre, lors de sa dernière réu-nion de l’année. La date paraît bien optimisme sil’on en juge par la manière dont s’engagent lesdiscussions techniques avec les autorités fran-çaises.

Elles démarrent sur une profonde divergence.Alors que la France demande à Bruxelles son feuvert pour pouvoir couper le lien financier quiunit la banque publique au mécanisme de défai-sance mis en place pour la sauver, les services deM. Van Miert sont décidés à réévaluer l’en-semble du dossier Crédit lyonnais.

Les Français estiment que l’aide d’Etat supplé-mentaire qu’ils soumettent à autorisation est del’ordre d’une dizaine de milliards de francs (unequinzaine selon Bruxelles). Cela correspond aucoût que représente la suppression du taux pré-férentiel que le Lyonnais devait consentir àl’Etablissement public de financement et de réa-lisation (EPFR), la structure écran qui finance leConsortium de réalisation (CDR), chargé, lui, devendre les actifs sortis du bilan du Crédit lyon-nais au 1er janvier 1995. Ce montant comprendaussi le manque à gagner pour l’Etat provenantdu fait que l’EPFR n’a jamais souscrit d’obliga-tion à coupon zéro comme cela était prévu.

Bruxelles considère qu’il faut ajouter à cemontant la dérive du CDR dont les pertes sont

aujourd’hui estimées à plus du double de ce quiétait prévu dans le texte de la décision rendueen juillet 1995. Si l’on globalise, l’aide de l’Etatau Lyonnais atteint 110 milliards de francscontre 45 milliards initialement annoncés.Bruxelles pourrait donc se sentir fondé à de-mander au Lyonnais une nouvelle cure d’amai-grissement.

« LOGIQUE PUNITIVE »Pour Bercy – et pour Jean Peyrelevade, le pré-

sident du Crédit lyonnais, qui a obtenu l’auto-risation de participer aux discussions –, ce rai-sonnement paraît inacceptable. C’est Bruxellesqui a poussé en 1995 pour que la gestion duCDR soit complètement coupée de celle du Cré-dit lyonnais : on ne peut donc tenir rigueur auLyonnais de l’aggravation des pertes du CDR. Lagestion des deux entités étant séparée, les auto-rités françaises ont beau jeu de plaider au-jourd’hui pour les dossiers ne soient plusconfondus. Le Crédit lyonnais ayant confirméson redressement au premier semestre de 1997,leur objectif est de protéger la banque, pourpouvoir la privatiser, en en tirant un prix maxi-mum, qui viendra réduire d’autant la factured’aide d’Etat.

« Bruxelles est dans une logique punitive vis-à-vis des autorités françaises », estime toutefois unproche du dossier. Le commissaire à la concur-rence n’admet pas d’avoir été trompé par le pre-mier plan de sauvetage, bouclé par Edmond Al-

phandéry, alors ministre de l’économie. D’où sacolère face aux dossiers Stardust ou SDBO(Le Monde du 6 novembre)et sa volonté d’êtreinformé régulièrement sur les actifs cédés par leCDR, comme le prévoyait d’ailleurs la décisionde juillet 1995. Ce qui n’est pas vraiment le casaujourd’hui selon les services de M. Van Miert.

Au CDR, on supporte mal le droit de regard etles critiques de la Commission sur le traitementdes affaires : « il y a déjà suffisamment decontrôles sur le CDR pour qu’on n’ajoute pas celuide Bruxelles ». Les remarques de Bruxelles, quise cumulent avec les rapports critiques de l’Ins-pection générale des finances, plaident toutefoispour que la réforme de l’organisation du CDRsoit bouclée rapidement. « La première chose àfaire serait de doter le CDR d’un vrai conseil d’ad-ministration », estime un proche du dossier. Pourl’heure, aussi étonnant que cela puisse paraître,le conseil du CDR n’est composé que de cadresqui appartiennent à la structure. Il comprend lesquatre membres du comité de direction du CDR– Michel Rouger, son président, François Lemas-son, le directeur général, Jean-Pierre de Sarrau,le directeur financier, et Jean-Pierre Monestié, ledirecteur juridique –, et les présidents de direc-toire des cinq filiales du CDR (CDR Entreprises,CDR Participations, CDR Immobilier, CDRCréances, CDR Finance), qui se contrôlent donceux-mêmes. Une situation absurde.

Sophie Fay

Une entreprise française branche le téléphone sur InternetUNE JEUNE société française,

Aplio, entend profiter de l’essor duréseau Internet pour y acheminerdes communications télépho-niques. Créée il y a un an par deuxdes dirigeants de Kortex, spécialistedes modems, et un ancien respon-sable de la société de logiciels Arti-soft, Aplio (qui emploie aujourd’huineuf personnes) s’apprête àcommercialiser un boîtier qui, placéentre la prise et le combiné télépho-niques, permettra d’appeler un cor-respondant avec un téléphone, viaInternet, où qu’il se trouve dans lemonde, grosso modo pour le prixd’une communication locale.L’avantage sera immédiat pour descommunications nationales et sur-tout internationales, dont les tarifssont plus onéreux que ceux des ap-pels locaux.

L’appelé devra cependant êtreéquipé lui aussi d’un boîtier, dont leprix devrait se situer entre 1 490 et1 990 francs. L’un ou l’autre des in-terlocuteurs devra évidemment dis-poser d’un abonnement à un four-nisseur d’accès à Internet.L’appelant devra par ailleurs acquit-ter, pour au moins quelques se-condes, le prix d’une communica-tion à travers le réseautéléphonique normal pour joindreson interlocuteur. Ce n’est qu’aprèsl’avoir joint qu’il pourra se connec-ter à Internet : en pressant un bou-

ton situé sur le boîtier, il activera unlogiciel qui le mettra en liaison avecson fournisseur d’accès à Internetet lui permettra de rétablir lacommunication, celle-ci étant dèslors facturée à la durée sur la based’un appel téléphonique local.

2 MILLIONS DE CONSOMMATEURS« Ce sera plus facile et moins coû-

teux qu’avec un ordinateur personnel(PC) », relève Eric Constantini, l’undes trois fondateurs d’Aplio. Ac-tuellement, la téléphonie sur Inter-net se fait essentiellement de PC àPC. Pour cela, les interlocuteursdoivent être équipés du même logi-ciel de traitement et prendre ren-dez-vous pour se connecter aumême moment à Internet. La socié-té d’études IDC estime, au niveaumondial, à 2 millions les consom-mateurs de téléphonie sur Internetà travers des PC et considère queleur nombre devrait monter à16 millions en 1999, notammentsous l’effet de l’installation en stan-dard des logiciels adéquats.

C’est le marché des services télé-phoniques longue distance (appelsnationaux et internationaux) desopérateurs téléphoniques clas-siques qui devrait être de plus enplus affecté. « Ces communicationspasseront en majorité par Internetdans cinq à dix ans », avait affirméen juin Tom Evslin, vice-président

d’AT&T, lors du Salon PC Expo, àNew York.

Les sociétés d’études et de conseilqui se sont penchées sur le sujetsont plus prudentes. Forrester Re-search considère par exemple que,aux Etats-Unis, la téléphonie via In-ternet devrait représenter un mar-ché de 2 milliards de dollars en2004, soit 4 % des communicationslongue distance. Action Informa-tion Services évoque le chiffre de8 milliards de dollars en 2001 au ni-veau mondial, estimant qu’à cettedate Internet captera environ 4,5 %du marché de la téléphonie inter-nationale.

« Nous pensons qu’avec notre pro-duit nous ne mordrons pas sur lemarché de la téléphonie classique,mais que nous créerons un besoin »,explique M. Constantini. Aplio,dans laquelle les sociétés de capital-risque CDC Innovation Galileo etBanexi ont injecté environ 10 mil-lions de francs, espère vendre« 20 000 boîtiers la première an-née », selon M. Constantini, quiprécise que leur « fabrication estsous-traitée en Asie ». Leur vente sefera « essentiellement à travers lesfournisseurs d’accès à Internet et pardes accords de revente avec des fa-bricants de modems, de terminauxtéléphoniques, etc. ».

Philippe Le Cœur

La chimie européenne entame un dialogue social novateur

EN FRANCE, le dialogue social ausein de la branche « chimie » n’estguère plus approfondi que dans laplupart des autres industries. Celan’a pourtant pas empêché les orga-nisations patronales et syndicalesfrançaises, italiennes et espagnolesde ce secteur d’établir un dialoguesocial tout à fait novateur. C’est ainsique, les 5 et 6 novembre, soixantepersonnes venues de ces trois paysont assisté à Bagnolet (Seine-Saint-Denis) à un premier séminaireconsacré aux politiques de forma-tion les plus innovantes.

Tout a commencé, en 1992, pardes rencontres informelles entre desreprésentants italiens – le patronatet les trois fédérations syndicales dela chimie –, espagnols – le patronatet les deux syndicats – et français –l’Union des industries chimiques etla CFDT. Conviées, la CFTC et Forceouvrière n’ont pas donné suite, pasplus que les Allemands, qui ju-geaient ce forum trop latin pour êtreefficace.

« TRILATÉRALE »Après trois rencontres annuelles

passées à créer un climat deconfiance, la « trilatérale », commel’appellent ceux qui y participent,décide de comparer les politiques deformation les plus intéressantes.Chacun prend à sa charge une partiedu travail : les Français élaborent lequestionnaire qui sera envoyé dansune vingtaine d’entreprises par pays,les Italiens négocient les subven-tions européennes dans le cadre duprojet « Leonardo » et les Espagnolssont chargés de rédiger la synthèsefinale des travaux. Les question-naires ont tous été envoyés. Les 5 et6 novembre, les Français ont pré-senté à leurs homologues six actionsde formation dignes de retenir l’at-tention.

Rhône-Poulenc chimie puis Euro-Aspartame ont explicité leur nou-velle organisation du travail baséesur une « logique compétences », Elf-Atochem a détaillé une opération dereconversion de salariés âgés peuqualifiés, Chevron Chemical a expli-qué comment l’encadrement a par-ticipé à la formation d’ouvriers quirefusaient toute formation de typescolaire, Arco-chimie a détaillé com-ment des ouvriers ont appris à exer-cer un second métier et AlsachimieRhône-Poulenc a montré commentvingt-six ouvriers étaient devenustechniciens. Malgré certaines réti-cences à dévoiler leurs « secrets defabrication », les entreprises onttoutes joué le jeu sous l’œil attentifdes délégués syndicaux présents. Enfévrier, ce sera au tour des Italiensde présenter leurs réalisations à Mi-

lan, et en mars à celui des Espa-gnols.

« Ce type de rencontres nous esttrès utile et peut influencer par la suiteles négociations nationales », estimeun représentant du patronat de lachimie italienne. « Il n’y a pas d’autredémarche sectorielle en Europe. C’estune première », ajoute une syndica-liste espagnole. Pour FrançoisGaschka, directeur du départementsocial de l’Union des industrieschimiques, ces expériences vont « ir-riguer les entreprises », d’autant que98 % des 33 000 entrepriseschimiques européennes ont moinsde 500 salariés. Pour Jacques Kheliff,secrétaire général de la FCE-CFDT,« cette expérience concrétise la di-mension européenne du dialogue so-cial ». D’ores et déjà, chacun envi-sage de poursuivre en 1999 ledialogue sur des sujets comme l’en-vironnement et la sécurité. Signeque cette démarche prend de l’am-pleur : les Allemands souhaitentcette fois s’y associer.

Frédéric Lemaître

FINANCE Le deuxième établisse-ment bancaire de Belgique, laBanque Bruxelles Lambert (BBL), se-rait sur le point d’être racheté par legroupe financier néerlandais ING,

qui en détient déjà quelque 20 %.L’opération prendrait la formed’une offre publique d’échange(OPE), combinée au rachat d’un blocde 5,28 % d’actions BBL détenues

par l’assureur suisse Winterthur.b LE SORT DE BBL dépendra de l’at-titude de ses autres actionnaires,notamment AXA-UAP et le financierbelge Albert Frère. Outre ING, le ca-

pital de la banque est réparti entrele groupe Bruxelles Lambert(12,44 %), l’assureur Royale belge(12,37 %), propriété conjointe d’Al-bert Frère et d’AXA-UAP, et le Crédit

communal de Belgique-Dexia(12,33 %). b LES RAPPROCHEMENTSse multiplient dans le secteur ban-caire belge, le plus dense après laSuisse et le Luxembourg.

Le néerlandais ING est prêt à s’offrir la Banque Bruxelles LambertLe premier groupe financier des Pays-Bas lancerait cette semaine une offre publique d’échange pour prendre le contrôle

de la deuxième banque belge, fleuron de l’empire de l’homme d’affaires Albert Frère. ING détient déjà 20,13 % du capital de BBLBRUXELLES

de notre correspondantL’avenir de la Banque Bruxelles

Lambert (BBL), deuxième banquebelge et fleuron du groupe du mêmenom, dirigé par l’homme d’affairesAlbert Frère, risque d’être scellé dansles tout prochains jours. La banqueest depuis des mois l’objet d’inces-santes spéculations, alors que le pay-sage bancaire belge est en pleine res-tructuration. Les manœuvres semultiplient depuis la fusion en 1996du Crédit communal de Belgique(CCB) et du Crédit local de France(CLF) pour former le groupe Dexia.A l’approche de l’introduction del’euro, les établissements belgescherchent désespérément à acquérirla « masse critique ».

Cette fois-ci, la saga BBL sembleprendre un tour décisif. L’affaire op-pose trois « alliés » – Albert Frère, legroupe d’assurances AXA-UAP et leCCB, actionnaires de BBL – et legéant néerlandais de la finance, In-ternational Nederlanden Groep(ING), qui convoite l’établissement.Selon des sources proches du dos-sier, citées par la presse belge spécia-lisée et les quotidiens Le Soir et LaLibre Belgique, l’opération prendrait

la forme d’une offre publiqued’échange (OPE), combinée au ra-chat d’un bloc de 5,28 % d’actionsBBL sur les 8,23 % que détient ac-tuellement l’assureur suisse Winter-thur. C’est donc lui qui ferait officed’arbitre.

L’opération serait annoncée aulendemain du grand week-end du11 novembre. Sans préciser qu’ils’agissait bien de ce projet, le direc-teur général de la filiale belge deWinterthur, Claude Desseille, a indi-qué, vendredi 7 novembre, qu’uneannonce concernant cette participa-tion serait faite dans le courant de lasemaine. Winterthur est déjà consi-déré comme vendeur par de nom-breux analystes financiers.

BBL est actuellement contrôléepar un pacte réunissant le groupeBruxelles Lambert (12,44 %), l’assu-reur Royale belge (12,37 %), proprié-té conjointe d’Albert Frère et d’AXA-UAP, via la holding Royale Vendôme,et le CCB-Dexia (12,33 %). ING dé-tient pour sa part directement 13,4 %des titres, auxquels s’ajoutent 6,73 %supplémentaires contrôlés via la hol-ding Befco Investments. Le capitalde la banque est également verrouil-lé par une convention syndicale si-

gnée par l’ensemble des protago-nistes. Celle-ci oblige tout vendeur« à présenter ses titres en priorité à sespartenaires ».

Réputé pour son sérieux, le quoti-dien financier bruxellois, L’Echo de laBourse, annonçait dans ses éditionsdes 7 et 8 novembre que la Commis-sion bancaire et financière (CBF) –l’équivalent belge de la Commissiondes opérations de Bourse (COB) –aurait posé ces derniers jours pourcondition à un rachat de la participa-

tion de Winterthur par Royale belgele lancement d’une offre publiliqued’achat (OPA). Celle-ci se révéleraitcoûteuse et aucun des protagonistesne souhaiterait s’y lancer.

9 000 FRANCS BELGES PAR ACTIONING serait donc bien placé pour

racheter la participation de Winter-thur en lançant une offre publiqued’échange de ses propres titrescontre ceux de BBL. L’offre valorise-rait l’action BBL à plus de

9 000 francs belges (environ1 461 francs français) contre un coursactuel de 8 820 francs belges, préci-sait L’Echo de la Bourse.

La BBL a démenti ces informa-tions, que Royale belge et GBL ontrefusé de commenter. La CBF s’estretranchée derrière sa « règle deconfidentialité ». Citant « des sourcesmultiples » proches des négocia-tions, Le Soir affirmait toutefois sa-medi que Royale belge n’avait pasrépondu à l’injonction de la CBF« ouvrant ainsi un boulevard à ING ».

Le groupe néerlandais reste pourl’instant muet. Ses velléités de re-prise de BBL ne sont pas nouvelles.Une tentative d’OPA, en 1993, s’étaitsoldée par un échec. Le scénariod’une prise de contrôle indirect avaitencore été évoqué début 1997, à lasuite de spéculations sur l’acquisi-tion de Royale Belge par ING. Le fi-nancier néerlandais dispose de 5 à6 milliards de florins (15 à 18 mil-liards de francs) en réserve pour defutures acquisitions. Même s’il jugeofficiellement « plus urgent » de sepositionner en France et en Alle-magne, un de ses représentants enBelgique rappelait le mois dernierque « BBL reste un placement très in-

téressant ». L’épilogue du feuilletondevrait dépendre de l’attitude finaled’AXA-UAP et d’Albert Frère face àING. Le groupe de M. Bébéar a, dansle passé, évoqué son souhait de ren-forcer les accords de bancassuranceliant Royale Belge à la BBL. Mais saréticence à l’égard de tout « risquebancaire » pourrait bénéficier auxvisées du groupe néerlandais.

Plus enclin à résister à ING, dont ila déjà fait échouer la tentatived’OPA de 1993, M. Frère est toutefoisaffaibli par le rejet de son scénariod’une « grande banque belge » écar-té par la Générale de Banque, pro-priété de la Société Générale de Bel-gique. La perspective d’une belleplus-value sur ses titres BBL, dont lavaleur a triplé en quelques années,pourrait finir de faire céder la diguequ’il s’évertue à bâtir contre les fi-nanciers bataves, notent les mêmesanalystes.

Quant au Crédit communal, un re-trait de BBL lui enlèverait une sé-rieuse épine du pied : la présence deson président, François Narmon, ausein du comité stratégique de BBL,concurrent direct de Dexia, est dansle collimateur de la Commission eu-ropéenne. – (Intérim.)

Un réseau bancaire surdimensionné

DÉPÊCHESa MERCEDES-BENZ : le PDG du groupe allemand Daimler-Benz,Jürgen Schrempp, aurait menacé de stopper immédiatement la fabri-cation de la Classe A, la dernière-née de sa filiale d’automobiles Mer-cedes-Benz, si les mesures prévues pour pallier ses défauts ne garantis-saient pas totalement la sécurité, selon le quotidien Stuttgarter Zeitungdu 8 novembre. « Nous ne nous exprimons pas sur de telles spéculations »,a répondu à l’AFP un porte-parole de l’entreprise. La direction de Mer-cedes doit décider d’ici au mois de décembre du sort de son nouveaumodèle, dont il a dû reconnaître le 29 octobre certaines défaillances.a HAMBROS : la banque britannique aurait reçu, selon le Daily Tele-graph du 10 novembre, une offre d’achat de l’allemand WestdeutscheLandesbank. Cette dernière s’est déjà montrée intéressée par le françaisNatexis.a UNILEVER : le groupe anglo-néerlandais a annoncé le 7 novembreune provision de 4,7 milliards de francs sur ses comptes 1997, afin decouvrir des moins-values sur des cessions d’actifs, ainsi qu’une provi-sion pour dépréciation d’actifs de 1,6 milliard.a PROTON : le prince saoudien Al Walid Bin Talal a annoncé, lundi10 novembre, avoir acquis 3 % du capital du groupe automobile malai-sien. Il avait investi, en octobre, dans le sud-coréen Daewoo.a EDF-GDF : la direction et les syndicats CFDT, CFTC, et CGC ontétabli le 7 novembre un « programme de négociation » sur l’emploi, letemps de travail et les salaires. La direction a annoncé une augmenta-tion de 1,2 % des salaires, rétroactive au 1er août 1997.a APPLE : le groupe américain devait annoncer, lundi 10 novembre,qu’il était prêt à s’orienter vers la vente directe et la fabrication à la de-mande. Le constructeur devait également présenter un MacNC, ordina-teur allant chercher les logiciels sur des serveurs via les réseaux.a MICROSOFT : Bill Gates, le PDG du groupe américain, expliquedans une tribune publiée par le Wall Street Journal le 10 novembre que ledépartement de la justice savait depuis trois ans que Microsoft intégre-rait des capacités d’accès à Internet dans son logiciel Windows, ce quelui reprochent certains concurrents. « L’intérêt des consommateurssemble moins important que les plaintes de concurrents qui veulent que legouvernement les aide à être compétitifs », a-t-il déclaré.a LAFARGE : le groupe français a annoncé la prolongation, au21 novembre, de son offre sur le fabricant britannique de matériaux Re-dland.

Le réseau bancaire belge est le plus dense d’Europe après la Suisse etle Luxembourg. En 1996, la Belgique recensait 105 banques dont 60étrangères et 7 600 succursales. Dans ce contexte, les rapprochementsse multiplient. Le Crédit communal de Belgique (CCB) a été le premierà bouger en fusionnant en octobre 1996 avec le Crédit local de Francepour former Dexia. En décembre 1996, la Banque coopérative Cera,sixième du pays, avec six milliards de francs français de fonds propres,a acquis 80 % d’Indosuez Belgique. Depuis mai, la Bacob, huitièmebanque belge, a pris le contrôle de 70 % de Paribas Belgique, et bénéfi-cie d’une option sur le rachat, d’ici à 2000, des 30 % restants. Cobepa,autre filiale de Paribas, s’est partagé avec Almanig, maison-mère de laKredibank, les 12,6 milliards de francs français de la holding financièreGevaert. La Kredibank, qui souhaite renforcer sa dimension internatio-nale avant 1999, a reconnu mener des « discussions » avec plusieurspartenaires potentiels, dont la Rabobank néerlandaise.

Page 16: Virginia Tech Scholarly Communication University Libraries · LeMonde Job: WMQ1111--0001-0 WAS LMQ1111-1 Op.: XX Rev.: 10-11-97 T.: 11:00 S.: 111,06-Cmp.:10,11, Base : LMQPAG 21Fap:99

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REPRODUCTION INTERDITE

La BBC lance sa chaîne « tout-info » et un site InternetLa télévision publique britannique estime pouvoir tenir la dragée haute à CNN et à Sky News.

Mais News 24 ne dispose pas de fréquence spécifique et ne sera disponible qu’en 1998 dans les bouquets numériquesLONDRES

de notre correspondantDimanche 9 novembre, à 17 h 30

(heure anglaise), la BBC a lancé sesdeux nouveaux bébés : une chaînenationale « tout-info », News 24, etun site Internet en accès direct,BBC News Online. Si les fanas de laToile, à l’affût de toutes les nou-veautés, doivent trouver vite cesite, il n’en sera pas de même – dumoins pour le moment – des télé-spectateurs. Prévenus par quelquesarticles de presse, ils ne pourrontprofiter de News 24 qu’après mi-nuit sur BBC 1, et par intermittencesur BBC World Television (la chaîneinternationale) ainsi que sur quel-ques réseaux câblés.

Malgré tout, le but des initiateursde News 24 est, selon Tony Hall, leresponsable des informations à laBBC, d’aller au-devant de ceux quine veulent plus se contenter de re-garder les nouvelles à heure fixe,mais au moment où ils le sou-haitent. D’où ce concept, long-temps discuté – et critiqué –, dontl’objectif à long terme est deconcurrencer CNN, mais qui auraauparavant à faire avec le rival lo-cal, Sky News, du groupe de RupertMurdoch. Grâce à des économiesféroces sur d’autres programmes(de 30 % parfois), 15 millions delivres (soit environ 14,5 millions defrancs) ont été dégagées pour lan-cer News 24, dont le budget de

fonctionnement annuel devraitavoisiner les 30 millions.

Il faudra attendre l’an prochainpour que cette chaîne info soit dis-ponible sur le futur réseau digital.En attendant, News 24 devra secontenter de squatter les réseauxexistants.

DOUTES ET AMBITIONSL’heure est à la frugalité : le stu-

dio dans lequel enregistrait CharlesWheeler est celui utilisé en semainepour couvrir le Parlement, et quiest donc vide le dimanche. CharlesWheeler fait partie de ceux qui onteu des doutes sur ce projet, tout enestimant que la BBC ne pouvait selimiter à faire du sur-place face à la

concurrence. Il craignait que Auntie(« La Tante », comme on sur-nomme gentiment la BBC) voietrop loin et n’ait pas les moyenshumains de ses ambitions ; il s’in-quiétait de la multiplicité des pro-grammes et du risque qu’une infla-tion de la demande ne transformeles correspondants en commenta-teurs d’images achetées sur place,le temps manquant pour faire eux-mêmes des reportages. « Ce dangerexiste encore », nous a-t-il confié ausortir de l’enregistrement, mais il aété écouté : Tony Hall a annoncé lerecrutement de nouveaux journa-listes.

Secouée par des réformes pro-fondes et brutales, mal à l’aise en-

vers celui qui la dirige d’une mainde fer, John Birt, la BBC doute par-fois. Ses moyens ont été réduits.Mais elle garde des ambitions,qu’elle doit financer avec sespropres moyens, c’est-à-dire avecle revenu de la redevance télévi-sion.

RÉPUTATIONNews 24 fait partie, nous a-t-on

dit, du service public qu’elle doit àceux qui paient chaque année leurs86,50 livres de redevance. CharlesWheeler compte, pour que la BBCtélévision réussisse à s’implanterdans le reste du monde, sur le res-pect que la radio a su obtenir ensoixante-quinze ans d’existence :« Les gens, à l’étranger, ont plusconfiance en nous qu’en CNN. Nousavons une extraordinaire réputationfondée sur notre crédibilité, alors queCNN est trop ouvertement commer-ciale. »

Les nouveaux programmes se-ront rythmés par un bulletin d’in-formations d’une dizaine de mi-nutes toutes les heures, et del’annonce brève des titres chaquequart d’heure. Entre-temps, des re-portages et des interviews serontdiffusés. Mais, nous a-t-on expli-qué, les présentateurs disposerontd’une marge de manœuvre : ilspourront intervenir directement,choisir de prolonger un entretien,d’allonger ou de raccourcir un re-portage. Bref, ils seront de véri-tables journalistes.

Reste à savoir si une chaîne sanslongueur d’onde propre et difficiled’accès trouvera assez rapidementle public qui lui permettra de sefaire un nom avant de devenir dis-ponible au sein des bouquets dechaînes numériques.

Patrice de Beer

Telepiù reste une bonne affaire pour Canal PlusL’ANNONCE de la survalorisation du

nombre d’abonnés de Telepiù, lors de la fusionentre Canal Plus et NetHold, serait « un non-événement boursier » pour les analystes finan-ciers. Selon ces derniers, les 120 000 abonnésfantômes – soit 15 % du portefeuille de lachaîne cryptée italienne – ne remettent pas encause la valeur intrinsèque de Telepiù et, sur-tout, laissent intactes les perspectives de déve-loppement de la chaîne cryptée.

Mieux, la mise au net du portefeuille d’abon-nés valorise encore plus l’expertise et le savoir-faire de Canal Plus sur le marché de la télé-vision payante. Telepiù, reprise en main enmars par Michel Thoulouze, directeur généralde Canal Plus chargé de l’international, n’a ces-sé de gagner des abonnés. Calculée à partird’une base de départ plus basse que prévu(663 000, au lieu de 780 000 annoncés au31 août 1996), la performance est réellepuisque, aujourd’hui, la chaîne cryptée ita-lienne revendique près de 900 000 souscrip-teurs.

Toutefois, le « processus de cleaning » (net-toyage des fichiers d’abonnés) n’est pas termi-

né, signale Telepiù, et devrait être achevé finnovembre. Côté numérique, parti avec5 000 abonnés, Canal Plus revendique un por-tefeuille de 142 000 souscripteurs, en Italie, finseptembre.

A l’occasion de la fusion Canal Plus-NetHold,la chaîne cryptée française avait prudemmentfait inscrire dans le contrat des « garanties »concernant le nombre d’abonnés. Pour être in-demnisé par Richemont et MIH, détenteurs au31 août 1996 de 45 % du capital de Telepiù, Ca-nal Plus a choisi une solution « à l’amiable ».

RÉMUNÉRATION EXCEPTIONNELLESur la base de 1 600 dollars, l’abonné – à

5,70 francs le dollar –, la chaîne cryptée pour-rait recevoir 450 millions de francs en rembour-sement. Une somme à moduler selon lenombre d’abonnés manquants. Cette indemni-té pourra être versée « en cash ou en actions ».Richemont, MIH et Canal Plus sont convenusde parvenir à un accord dans un délai de trentejours.

Remboursé par NetHold, Canal Plus devraitl’être aussi par Leo Kirch, qui était alors aussi

actionnaire à 45 % de Telepiù. Toutefois, la based’abonnés manquants est plus réduite : moinsde 100 000. Lors de l’échange des participationsrespectives de Canal Plus dans Premiere,chaîne cryptée allemande, et de Kirch dans Te-lepiù, le prix par abonné à la chaîne cryptée ita-lienne avait été évalué à 1 250 dollars. Enfin,Canal Plus pourrait aussi recadrer les accordsde fourniture de films et de sports conclus surune base d’abonnés surévaluée.

Au final, Canal Plus devrait percevoir une ré-munération exceptionnelle en 1997 tout enconservant le contrôle d’une chaîne premium,Telepiù, aux vastes perspectives de développe-ment. Avec l’entrée de partenaire italiens dansle capital de la plate-forme numérique D +, lachaîne cryptée française opère un partage desénormes investissements demandés par le nu-mérique. Et principal fournisseur des chaînesthématiques de la plate-forme via les pro-grammes de sa filiale Multithématiques, CanalPlus dispose d’un important relais de crois-sance future.

Guy Dutheil

DÉPÊCHESa TÉLÉVISION NUMÉRIQUE :les groupes audiovisuels Kirchet CLT/UFA (Compagnie luxem-bourgeoise de télédiffusion et fi-liale audiovisuelle du groupeBerte lsmann) ont final isé lacréat ion d’une té lévis ion àpéage commune en s ignant ,vendredi 7 novembre, un contratregroupant leurs activités numé-riques au sein de la chaîne alle-mande payante Premiere. Cecontrat entérine l’accord passéen juin entre Kirch et Bertels-mann, pour se partager le capi-tal de Premiere. La Commissioneuropéenne et les autorités alle-mandes doivent encore donnerleur accord à la nouvelle sociétécommune. L’Office allemand descartels, qui surveille la concur-rence en Allemagne, avait émisde sérieuses réserves en juilletsur cet accord entre Kirch et Ber-telsmann. – (AFP).a CÂBLE : 1,57 mil l ion defoyers étaient abonnés au ser-vice base du câble – au moinsquinze chaînes – à fin octobre,contre 1,42 million un an plustôt. Selon les chiffres de l’Asso-ciation des villes câblées (Avica),publiés jeudi 6 novembre, lahausse annuelle est de 10,64 %.Fin octobre, 2,27 mill ions defoyers étaient raccordés contre2,04 millions (+ 11,23 %) un anauparavant.a RADIO : Radio France Inter-national (RFI) a profité duSommet de la francophonie, quia lieu au Vietnam du 14 au 16 no-vembre, pour obtenir l’autorisa-tion d’émettre en FM sur Hanoïet sa région, à partir du 10 no-vembre. Seule radio internatio-nale à être présente au Vietnam,RFI diffusera désormais l’inté-gralité de ses émissions en fran-çais vingt-quatre heures survingt-quatre.a PRESSE : Olivier Barrot a étéremplacé par Jacques Dupontchez Gault-Millau. Jacques Du-pont devient directeur des ré-dactions de l’ensemble des pu-bl icat ions ( les guides , lemagazine et La Cote des vins).

Page 17: Virginia Tech Scholarly Communication University Libraries · LeMonde Job: WMQ1111--0001-0 WAS LMQ1111-1 Op.: XX Rev.: 10-11-97 T.: 11:00 S.: 111,06-Cmp.:10,11, Base : LMQPAG 21Fap:99

LeMonde Job: WMQ1111--0022-0 WAS LMQ1111-22 Op.: XX Rev.: 10-11-97 T.: 11:06 S.: 111,06-Cmp.:10,11, Base : LMQPAG 22Fap:99 No:0232 Lcp: 196 CMYK

22 / LE MONDE / MARDI 11 NOVEMBRE 1997 C A R N E T

ABONNEZ-VOUS* Vendue uniquement par abonnement

Chaque semaine, toute l’actualité pour les professionnels de l’éducation et de la formation

La liste complète des mesures prévues dans le plan de lutte contre la violence ; les doutes d’unprincipal de collège sur l’efficacité immédiate des aides-éducateurs ; quelle place pour l’enseignementde l’histoire à l’école primaire ?

A lire, dès lundi 10 novembre, dans « La Lettre de l’éducation du Monde ».

Le nouveau

est

arrivé...

...chezvotrelibraire

NOMINATIONS

EPISCOPATL’assemblée plénière des évêques,

réunie du 4 au 10 novembre àLourdes (Hautes-Pyrénées), a renou-velé les présidents de trois commis-sions de la conférence des évêques : àla tête de la commission sociale, MgrOlivier de Berranger, évêque deSaint-Denis, succède à Mgr AlbertRouet, évêque de Poitiers, arrivé enfin de mandat ; Mgr Albert de Mon-léon, évêque de Pamiers, est élu pré-sident de la commission de pastoraleliturgique et sacramentelle, où il suc-cède à Mgr Michel Moutel, arche-vêque de Tours, arrivé en fin de man-dat ; Mgr Emile Marcus, évêque deToulouse, devient président de la

commission des ministères ordon-nés ; il succède à Mgr Georges Gil-son, archevêque de Sens-Auxerre,également arrivé en fin de mandat.

[ Né le 10 novembre 1938 à Courbevoie (Hauts-de-Seine), Olivier de Berranger a été ordonnéprêtre en 1964 pour le diocèse de Versailles, aprèsdes études au séminaire du Prado et à l’universitégrégorienne de Rome. De 1976 à 1993, il a étéprêtre en Corée du Sud pour le diocèse de Séoul,avant d’être nommé, en 1994, secrétaire du comi-té épiscopal français de la Coopération mission-naire et directeur national des Œuvres pontifi-cales missionnaires. Nommé évêque deSaint-Denis en octobre 1996, c’est lui qui, le30 septembre, avait lu à Drancy, la « déclarationde repentance » de l’épiscopat français. ]

[ Né le 20 janvier 1937 à Paris, Albert de Mon-léon a fait ses études au lycée Louis-le-Grand et àl’Institut catholique de Paris, ainsi qu’aux facultés

de théologie et philosophie dominicaines duSaulchoir. Il est entré en 1957 dans l’ordre des do-minicains. Ordonné prêtre en 1964, il a exercé desresponsabilités dans la communauté charisma-tique de l’Emmanuel. Il est évêque de Pamiers(Ariège) depuis 1988. ]

[Né le 29 juin 1930 à Neuilly-Plaisance (Seine-Saint-Denis), Emile Marcus a fait ses études auséminaire Saint-Sulpice d’Issy-les-Moulineaux età l’université Saint-Thomas-d’Aquin à Rome.Membre de la compagnie des prêtres de Saint-Sulpice, docteur en théologie, il a été ordonné en1955 pour le diocèse de Paris, a enseigné dansplusieurs séminaires (Rodez, Mission de France,Institut catholique), avant d’être nommé évêqueauxiliaire de Mgr François Marty, archevêque deParis, en 1977. Evêque de Nantes de 1982 à 1996,vice-président de la conférence des évêques deFrance de 1990 à 1996, Mgr Marcus est, depuis1996, archevêque de Toulouse. ]

AU CARNET DU « MONDE »

Anniversaire de naissance

Joyeux anniversaire à

Sophie,

ma fille bien-aimée !

Un gros baiser pour toi et ta chèremère.

Papa Francis.

Décès

Norbert CARBONNAUX18 mars 1918-6 novembre 1997.

Les roses de Bagatellesont tristes ce matin...Le vieux bougonneur voltairienne viendra plus les visiter...Elles ne connaîtront pasla fin du siècle des Lumièresqu’il venait leur conter.Las de vivre dans les convulsionsde l’inquiétude ou dans la léthargiede l’ennuiNorbert nous a quittés,préférant de beaucoupla compagniede ses vieux camarades de jeu.Ne soyez pas tristes,il ne l’aurait pas supportéet malgré son foutu caractère,Souvenons-nousqu’il nous aura bien fait rire...Messieurs Blondin, Jeanson,Carmet, Audiard, Brasseuret quelques autresPréparent déjà la fête sousle regard amusé de Voltaire.Et si vous avez une petite pensée pour lui,tendez bien l’oreille,Je crois que vous pourrez entendretinter les verresdans un Grand Eclat de Rire...

Jean-Michel Carbonnaux/chez madameDrancourt (sa première femme)

22, avenue du Général-Leclerc,92200 Neuilly-sur-Seine.

Mme Gérard Carlander,son épouse,

Jérôme et Corinne Bévin,Clotilde et Jean-Louis Guéret,Le docteur Jean-Baptiste Carlander,Marina et Christophe Ducharme,ses enfants et beaux-enfants,Vanina et Agathe,Capucine et Arthur,Matthieu, Charlotte et Nicolas,

ses petits-enfants,M. et Mme Robert Carlander,Mme Ingrid Carlander,

ses frères et sœurs,ses neveux et nièces,ont la tristesse de faire part du décès de

M. Gérard CARLANDER,ancien administrateur en chef des A.O.M.,

président de chambre honoraireau tribunal de commerce de Paris,

survenu le 8 novembre 1997, à l’âge dequatre-vingts ans.

La cérémonie religieuse sera célébréeen l’église Saint-Pierre de Neuilly-sur-Seine le mercredi 12 novembre à11 heures.

Cet avis tient lieu de faire-part.

75, rue Perronet,92200 Neuilly-sur-Seine.

– Lucie L’HeureuxEt les familles Mamy et Dessault,

ont la douleur d’annoncer le décès, à l’âgede soixante-quinze ans, de

Georges MAMY,journaliste,

officier de la Légion d’honneur,Croix de guerre 1939-1945 avec palmes,

Rosette de la Résistance.

Parents et amis sont invités à se réunirle vendredi 14 novembre 1997, à 9 heures,au crématorium du Père-Lachaise.

5, villa des Pyrénées,75020 Paris.4, rue Auguste-Perret,75013 Paris.

(Lire ci-dessus.)

– Les familles de ses enfants,André du Castel,

François du Castel,Florence Bernard,Charles-Antoine du Castel,Valentine Therre,

ont la tristesse de faire part du décès de

M me Etienne du CASTELnée Françoise PAUL-DUBOIS,

survenu le 7 novembre 1997, dans sa centunième année, à Joigny (Yonne).

La cérémonie religieuse sera célébréele mercredi 12 novembre, à 14 h 30, en lachapelle de l’Est du cimetière du Père-Lachaise.

François du Castel103, avenue Félix-Faure,75015 Paris.Florence Bernard28, bd des Invalides,75007 Paris.

– Mme Jean Ganem,son épouse,ses enfants,ses petits-enfants,ont la tristesse de faire part du décès de

Jean GANEM,

survenu le jeudi 6 novembre 1997.

La cérémonie religieuse a été célébréeen l’église Saint-Saturnin à Antony le10 novembre.

Si vous désirez manifester votre affec-tion ou votre sympathie par un geste, lesfleurs pourraient être remplacées par undon que vous pouvez envoyer à :

Secours catholique, 34, rue Stephan-Stessen, 92600 Asnières.

Association des amis de l’ORBE :Hôpital Charles-Foix, 94200 Ivry-sur-Seine.

Anniversaires de décès

Annie GRAZIETTI-JEANBRAU

Oran 25 décembre 1942Montpellier 11 novembre 1985.

« Je ne suis pas née pour partagerla haine,

je suis née pour partager l’amour ».

(Antigone) Sophocle.

– Il y a dix ans, le 11 novembre 1987,

Pierre-Aimé TOUCHARD

nous quittait.

Ses anciens élèves ne l’ont pas oublié.

Conférences

– Conférence de l’Etoile.Six mercredis de suite à 20 h 30 :

temple protestant de l’Etoile, 54, avenuede la Grande-Armée, Paris-17e, entréelibre, libre participation aux frais. Intro-duction par le pasteur Alain Houziaux.

Le droit à la désobéissance, jus-qu’où ? Le 12 novembre, Jean-FrançoisBurgelin ; Hélie de Saint-Marc ; MgrGaillot.

Le pouvoir de l’économie de marché,jusqu’où ? Le 19 novembre. LouisSchweitzer ; Jean-Baptiste de Foucauld ;Etienne Petitmengin, pasteur.

Le devoir d’ingérence, jusqu’où ? Le26 novembre. Rony Brauman ; PhilippeMoreau Desfarges ; Alain Houziaux.

Le pouvoir de l’Etat, jusqu’où ? Le3 décembre. Pierre Truche ; Antoine Ga-rapon ; Gilles Bemheim, rabbin.

Le droit de l’étranger, jusqu’où ? Le10 décembre, François Bayrou ; AlainTouraine ; Mgr de Berranger.

La mondialisation, jusqu’où ? Le17 décembre, Jacques Attali ; Jean Bois-sonat ; Michel Wagner, pasteur.

Séminaires

COLLÈGE INTERNATIONALDE PHILOSOPHIE

b SéminairesAnne BOISSIÈRE : « Nature, mimesiset musique »,

13 novembre, 18 h 30-20 h 30, Domainemusiques, 2, rue des Buisses, Lille.

Lucette FINAS : « La “rage de la vérité”chez Proust et Bataille »,17 et 24 novembre, 18 h-20 heures, amphiA, Carré des Sciences, 1, rue Descartes,Paris.

Michel MEYER : « Rhétorique et philo-sophie : argumentation, esthétique etpolitique »,12 et 19 novembre, 18 h-20 heures, am-phis B et A, Carré des sciences, 1, rueDescartes, Paris.

Marce l DRACH : « La de t te e tl’échange. Destitution et institution dela raison économique »,17 novembre, 13 h-15 heures, Maison dessciences de l’homme (salle 215), 54, bdRaspail, Paris.

Stéphane RIALS : « Questions de formedans la culture juridique moderne »,18 novembre, 18 h-20 heures, amphi A,Carré des sciences, 1, rue Descartes, Paris.

Giorgio AGAMBEN : « Qu’est-ce que laphilosophie » ?17 et 24 novembre, 18 h-20 heures, amphiB, Carré des sciences, 1, rue Descartes,Paris.

Stéphane ARGUILLÈRE : « L’autopro-duction circulaire de l’âme dans lebouddhisme tardif »,12 et 26 novembre, 18 h 30-20 h 30, am-phi A, Carré des sciences, 1, rue Des-cartes, Paris.

Alain BADIOU : « Théorie axiomatiquedu sujet (II) »,12 et 26 novembre, 20 h-22 heures, am-phi 44, université Paris-VII, 2, place Jus-sieu, Paris.

Alessandro DELCO et Robert VAL-LIER : « Métamorphoses de l’(Ur)stif-tung : recherches en cours sur Mer-leau-Ponty »,13 et 27 novembre, 18 h 30-20 h 30, salleRC2, université Paris-VII, 2, place Jus-sieu, Paris.

Dietmar KOVEKER : « Le différend etson principe régulateur. Les enjeuxd’une pensée antitotalitaire »,13 novembre, 18 h 30-20 h 30, salle RC3,université Paris-VII, 2, place Jussieu, Pa-ris.

Elisabeth RIGAL : « Questions witt-gensteiniennes II : de la certitude »,14 novembre, 18 h 30-20 h 30, amphiStourdzé, Carré des sciences, 1, rue Des-cartes, Paris.

Marc DE LAUNAY : « Le problème dela sécularisation »,13 novembre, 18 h-20 heures, amphi B,20 novembre, 19 h-21 heures, amphi A,Carré des sciences, 1, rue Descartes, Paris.

Bernardo CORREA, Stéphane DOUAIL-LER, Eric LECERF, Georges NAVET,Etienne TASSIN et Patrice VERME-REN : « Les d ia logues ph i loso-phiques » ; conférence de Graciella FRI-GERIO : « Passions, lien social etéducation en Argentine »,18 novembre, 18 h 30-21 heures, Maisonde l’Amérique latine, 217, bd Saint-Ger-main, Paris.

b Rencontreautour de Charles TAYLOR, qui donneraune conférence sur « Les impasses de laphilosophie morale contemporaine »,suivie d’un débat animé par Jean-PierreMARCOS, avec la participation de P. DELARA,12 novembre, 18 h 30-21 h30, amphi Poin-caré, Carré des sciences, 1, rue Descartes,Paris.

b Samedi autour d’un livre« Proust et la théorie du roman » deMariolina BERTINI,sous la responsabilité de Lucette FINAS,avec Françoise ASSO, Paul BRAFFORTet Paolo TORTONESE,15 novembre, 9 h 30-12 h 30, amphiStourdzé, Carré des sciences, 1, rue Des-cartes, Paris.

L’accès à toutes les activités du Col-lège est libre et gratuit (dans la limitedes places disponibles).Renseignements sur salles, répondeur :01-44-41-46-85. – Autres renseigne-ments : 01-44-41-46-80.

DISPARITION

Georges MamyDe la Résistance au journalisme politique

GEORGES MAMY, journaliste,est mort à Paris samedi 8 no-vembre des suites d’un cancer. Ilétait âgé de soixante-quinze ans.

Comme bien d’autres de sesconfrères de l’après-guerre, il étaitdirectement passé de la Résis-tance au journalisme politique,suivant une démarche naturelle etdiscrète. Il s’agissait de poursuivreun autre combat, dans uneépoque pleine de promesses, dansun pays à reconstruire à partird’autres valeurs. Ces valeurs,Georges Mamy les portait en lui,sans ostentation mais avec une fi-délité qui ne s’effacera pas, mêmelorsqu’il lui faudra constater « lesdésillusions de la Libération» : sacarrière illustre la fermeté de sesconvictions qui allait de pair aveccelle du caractère.

Ainsi promenait-il dans l’agita-tion, souvent exaspérée et parfoisexaspérante, du journalisme poli-tique, une discrétion distante,hautaine s’il le fallait. Ce qu’ilavait à dire, il l’exprimait par seschoix, par ses écrits, ou par des re-marques d’une ironie aiguë.

Il ne faisait guère état de lui-même, ni de ses origines dans unefamille modeste de Corrèze ni deson action dans la Résistance. Néle 14 novembre 1921, à Allassac,dans ce département, il fit sesétudes à Brive, jusqu’à ce qu’onappelait à l’époque le primaire su-

périeur. De formation chrétienne,de culture républicaine, il prendses premières responsabilitésdans un mouvement de jeunesse,puis dans l’action clandestinecontre l’occupation allemande.

Le Front Populaire a marquédurablement sa jeunesse, commele prouve l’article qu’il a donné auMonde en 1986 pour le cinquan-tième anniversaire de l’événe-ment. Le fugace employé debanque devient rédacteur deL’Aube en 1944 ; il est très proche,alors, de Georges Bidault, pré-sident du Conseil National de laRésistance, qui deviendra l’un desdirigeants du MRP (Mouvementdémocrate chrétien) et l’un desprincipaux hommes de gouverne-ment de la Quatrième République.

En 1952, Georges Mamy, qui acollaboré aussi à Terre Humaine,est recruté par le service de poli-tique intérieure du Monde, où ilassiste Jacques Fauvet. Il est l’unde ceux qui, dans la rédaction, sedémarque du directeur-fondateur,Hubert Beuve-Méry, lorsque ce-lui-ci décide d’approuver la nou-velle Constitution proposée par legénéral de Gaulle en 1958.

Georges Mamy reste attaché àune forme de régime parlemen-taire, même s’il en combat les fai-blesses, que le retour au pouvoirdu gaullisme remet en cause. Il estdu côté de Pierre Mendès France

et collabore, du reste, aux Cahiersde la République, publicationmendésiste.

En 1962, il va prendre la direc-tion du service de politique inté-rieure de France-Soir et il y resterajusqu’à sa rupture de 1965 par dé-saccord avec la nouvelle formuleet ligne politique de ce journal.Editorialiste de Ouest-France sousle pseudonyme d’Yves Bres-sandes, il devient celui de L’Est Ré-publicain en 1966, puis chef de larédaction parisienne de ce jour-nal.

De 1974 à 1985, il collabore auNouvel Observateur, comme chefdu service politique et rédacteuren chef adjoint : là encore, un dé-saccord sur la ligne politique decet hebdomadaire le conduit à sedémettre de ses fonctions en 1985,avec trois autres de ses confrères.Il se consacre ensuite à des tra-vaux personnels, notamment larédaction inachevée d’une biogra-phie de Guy Mollet qui fut le pa-tron de la SFIO, à sa collectiond’outils anciens et à son péchépréféré : la lecture.

Ce vice d’un vertueux lui faisaitdécouvrir, à partir d’un coin de lasalle des pas-perdus du PalaisBourbon, au milieu des allées etvenues, Robert Musil et L’Hommesans qualités.

André Laurens

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A U J O U R D ’ H U ILE MONDE / MARDI 11 NOVEMBRE 1997

BULLETIN D’ABONNEMENT à retourner à : LE MONDE, service abonnements, 24, avenue du Général-Leclerc,

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Bulletin à retourner obligatoirement pour profiter de ce tarif spécial.

LOGEMENT Le Salon Marjo-laine, qui se déroule jusqu’au 16 no-vembre au Parc floral de Paris, estdevenu un rendez-vous incon-tournable pour les consommateurs

écologistes. Pour sa 23e édition, lamanifestation met l’accent sur unevision « naturelle » de l’habitat.b LES MATÉRIAUX de constructionprésentés doivent respecter au

maximum l’environnement. La pa-noplie va des ciments biologiquessans résidus industriels aux briquesisolantes en terre cuite avec des co-peaux de bois, en passant par les

peintures naturelles. b CONSEILS degrands-mères et recommandationsplus ou moins scientifiques destinésà organiser sa maison pour qu’ellesoit plus proche de la nature font

florès. b POUR LES ENFANTS, la mai-son est remplie de dangers domes-tiques. Un magasin s’est spécialisédans les outils nécessaires à lasécurité des petits.

La mode écologiste s’étend à l’univers de la maisonLe Salon Marjolaine, qui se déroule à Paris jusqu’au 16 novembre, met l’accent cette année sur une tendance « bio » de l’habitat,

en faisant appel à des matériaux de construction sains, en harmonie avec l’environnementLE SALON Marjolaine reste un

haut lieu pour les écologistes purset durs. Ceux qui n’ont pas attendula crise de la « vache folle » pours’en remettre à l’alimentation biolo-gique et qui, défenseurs sourcilleuxde leur environnement, choisissentavec mille précautions les produitsqu’ils achètent, même le plus ano-din. Pourtant, vingt-trois ans aprèssa première édition, le « plus grandmarché bio de France » et son am-biance très baba cool, qui ont attiré60 000 visiteurs en 1996 (15 % deplus qu’en 1995), sont soudaine-ment redevenus à la mode. Aucercle des écolo-militants s’ajoutentdésormais des visiteurs plus attiréspar le goût du terroir et préoccupés

par leur propre sécurité alimentaireque guidés par une prise deconscience collective pour la dé-fense de l’environnement. Rendez-vous militant, le Salon Marjolaineest aussi et surtout devenu une ma-nifestation consumériste.

La nouvelle clientèle, qui appréciele côté foire provinciale de ce Salon,remplit volontiers son panierd’osier de bouteilles de brouilly bio-logique, de pain au levain, de fro-mages de chèvre, voire de lait de ju-ment. Mais ces citadins anxieuxveulent davantage d’authenticitéoriginelle dans tous les aspects deleur quotidien. L’émotion et les in-quiétudes liées aux dangers du flo-cage à l’amiante ont ouvert en

grand les portes de la maison aumode de vie « bio ». Conséquence :de nouveaux exposants, apparte-nant au secteur du bâtiment, s’ins-tallent à proximité des salles deconférence où sont organisés desateliers sur des thèmes aussi variésque « Débloquer la mémoire émo-tionnelle », « Lire le psychisme surle corps », « Rajeunir aujourd’hui »ou « La radiesthésie médicale ».

Cette année, la tendance est doncrésolument à la « maison natu-relle ». De toute évidence, l’activitéporteuse est celle des matériaux deconstruction. Pierre Thibaut, entre-preneur belge installé en France de-puis avril où il a déja ouvert deux(et bientôt quatre) points de vente,

fait état d’une « énorme demande ».Ses Comptoirs de la maison saineproposent des ciments biologiquessans résidus industriels et desbriques isolantes en terre cuite avecdes copeaux de bois (et non pas dupolystyrène). On peut aussi trouverdes peintures naturelles et des char-pentes en bois de châtaignier – ré-puté pour chasser les araignées –« coupé entre octobre et décembre àla Lune descendante et séché natu-rellement, comme le faisaient les bâ-tisseurs de cathédrales ».

Egalement disponibles : des pan-neaux de cellulose réalisés avec dessacs de toile de jute et des journauxrecyclés plus isolants que la clas-sique laine de verre. Selon Pierre

Thibaut, le coût supplémentaire deces matériaux de « bio construc-tion » – dont il jure qu’ils sont plusécologiques et « moins nuisiblespour l’organisme » – peut aller jus-qu’à 30 %.

« Toujours soucieux de préserverl’homme et son environnement », lemagasin parisien D’après natureprésente lui aussi des produits qui« ne dégagent pas d’émanationstoxiques, laissent la maison respirer etne sont pas agressifs ». Les mo-quettes (à partir de 280 francs lemètre carré) sont en pure lainevierge ou en poil de chèvre et enjute, le linoléum (145 francs le mètrecarré au minimum) intègre de la fa-rine de liège ou de bois, les papierspeints (à partir de 65 francs lemètre) ne contiennent pas de PVCet sont renforcés avec des fibrestextiles alors que les peintures, dontles couleurs sont réalisées avec despigments minéraux, utilisent un« diluant naturel à l’orange ».

CONSEILS DE GRANDS-MÈRESConseils de grands-mères et re-

commandations plus ou moinsscientifiques destinés à organiser samaison pour qu’elle soit plusproche de la nature font florès.L’ouvrage La Maison au naturel(Flammation, 199 francs) est l’undes produits les plus vendus dansles magasins Nature et Découverte.« Ce livre correspond tout à fait aunouveau rapport que le public entendnouer avec l’environnement : un rap-port interactif. Le consommateur nese contente plus d’acheter un produit.Il faut que celui-ci lui permette defaire, de créer quelque chose », sou-ligne François Lemarchand, pré-sident de Nature et Découverte.

Intitulé Le Guide de l’habitat sain(Médiéco Editions, Soleils diffusion,135 francs), un autre manuel seraprésenté à Marjolaine par ses au-

teurs, les docteurs Suzanne etPierre Déoux. Cet ouvrage dé-conseille de placer son radio-réveil,source de rayonnements magné-tiques, à proximité de son lit. Il at-tire l’attention du lecteur sur quel-ques sournoises pollutions (ledioxyde d’azote libéré par la cuis-son au gaz, les infrasons engendréspar le vent si la maison est située enhaut d’une colline). Pour fairebonne mesure, les auteurs de celivre – qui en font un peu trop dansce que l’on pourrait appeler la bio-paranoïa – vendent dans la fouléeun détecteur de champ magnétiquemais aussi un purificateur d’eau« par osmose » capable de filtrerpesticides, nitrates et métauxlourds.

Enfin, pour aller encore plus loindans la recherche de la sérénité etdu bien-vivre, certains se sont déjàfaits les adeptes du feng shui, tech-nique chinoise millénaire (évidem-ment !), qui consiste à organiser lamaison en harmonie avec les fluxvitaux, telluriques et cosmiques quitraversent l’habitat. Extraordinaire-ment complexes, les principes dufeng shui se traduisent in fine parquelques exhortations sans doutebien senties mais qui n’ont, pour lesOccidentaux, apparemment rien detrès convaincant ; éviter, entreautres, de mettre du bleu au mur ouau sol, de placer la table au milieud’une pièce ou le canapé en face dela porte.

Jean-Michel Normand

. Marjolaine, jusqu’au 16 no-vembre au Parc floral de Paris. De11 heures à 19 h 30 ; nocturnes jus-qu’à 22 heures le mardi 11 et levendredi 14 novembre. Prix :40 francs (tarif réduit 25 francs),gratuit pour les moins de 12 ans,handicapés, RMistes.

Pour protéger les enfants des pièges domestiquesLA DEVANTURE est rouge vif, comme le feu

d’un stop, comme la couleur qui annonce ledanger. A l’intérieur du magasin, tout un attirailde crochets, barrières de portes, de piscine etde lit, cadenas, systèmes de blocage de tiroirsou de portes, filets de protection, gilets gon-flables, casques, mallette premiers soins, détec-teurs-avertisseurs de gaz, de fumée, de mono-xyde de carbone... Parechute et parachoc estune boutique qui regroupe tous les outils né-cessaires à la sécurité domestique des enfants.De quoi rendre paranoïaques les parents qui nele sont pas trop et d’accentuer la pathologiechez ceux qui le sont déjà.

L’accumulation de ces produits provoque unchoc et soulève une interrogation dans l’espritde celui qui pénètre en cette boutique : est-ilréellement nécessaire de transformer sa maisonen bunker lorsqu’un enfant y circule ? « Bien sûrque non , répond instantanément Michel Ma-rais, gérant des lieux. Il s’agit seulement de pro-poser aux parents les outils nécessaires à la sécuri-té de leur enfant au fur et à mesure qu’il grandit :coins de table lorsqu’il commence à prendre ap-pui sur les tables pour se lever, la protection decuisinière lorsqu’il peut atteindre les casseroles. »

C’est en découvrant la façon dont les paysanglo-saxons avaient, depuis longtemps, appor-ter une offre complète aux problèmes de sécuri-té domestique que Michel Marais a prisconscience du retard de la France. Il a décidéd’ouvrir un magasin et de créer un cataloguespécialisé. « Je me suis rendu compte que les ca-talogues de vente par correspondance, lesgrandes surfaces, les magasins de puériculture of-fraient tous à peu près les mêmes produits et quecertains étaient – à moins de réaliser un véritableparcours du combattant – pratiquement introu-vables. Avec l’aide d’experts, j’ai donc choisi surles marchés américain et européen plus d’unecentaine de dispositifs de sécurité, parmi les plusutiles et les plus fiables. » L’initiative est au-jourd’hui soutenue par différents praticiens etmédecins spécialisés, témoins quotidiens desaccidents dont sont régulièrement victimes lesenfants. Ils voient dans cette entreprise unmoyen supplémentaire de prévention mais aus-si d’information.

Le sait-on suffisamment ? La maison est undanger permanent pour les petits. Décès (500enfants meurent chaque année par accidentdomestique), traumatismes, séquelles phy-

siques et psychologiques sont les tristes consé-quences que peut entraîner sur eux un envi-ronnement mal adapté. La noyade, lesasphyxies, les chutes et les intoxications sont,dans l’ordre, les principales causes de mortalitédes enfants. Celle-ci touche surtout la trancheun à quatre ans, et particulièrement les garçonsde deux à trois ans.

A ces chiffres de mortalité s’ajoutent ceux,impressionnants, des hospitalisations et desconsultations en urgence. Selon l’avis des mé-decins, une bonne partie des accidents pour-raient être évités grâce à quelques équipementssimples. Il ne s’agit pas, pour autant, de surpro-téger l’enfant. « Notre souci est d’apporter unesolution adaptée à chaque environnement et àchaque enfant, en particulier », précise MichelMarais, avant d’avouer, pour conclure, que rienne remplace la vigilance des parents. Une vigi-lance qui peut commencer par l’apprentissagedu danger.

V. Ca.

. Parechute et parachoc, 39, rue du Docteur-Roux, 75015 Paris. Tél. : 01-53-69-03-00.E-mail : parechute@aol. com

De la salle au salon de gym, la forme et les formes de la FranceLA MODE vient des Etats-Unis.

Le fitness et la musculation font, là-bas, partie du quotidien. Entretenirson corps pour une tête bien faiteest considéré, outre-Atlantique,comme un signe extérieur debonne santé. Les stars du spectaclequi s’adonnent en club ou à domi-cile à ces activités physiques ontlargement contribué à médiatiser lephénomène. En France, le courantest arrivé dans les années 80 sous laforme d’une fièvre d’aérobic. Lamode a laissé des traces plus dis-crètes et a surtout ancré dans lesesprits l’utilité _d’une activité phy-sique régulière. En vingt ans, lesport et la forme sont entrés dansles mœurs. Les tensions de la vie ci-tadine et l’influence des magazinespour une apparence svelte et mus-clée ont encouragé ce mouvement.Plus de temps libre, une durée devie plus longue ont aussi permis detrouver de nouveaux adeptes.

Résultat : 50 % des Français dé-clarent aujourd’hui pratiquer unsport, contre 38 % en 1980 et 28 %en 1960. Parmi eux, ils sont près de8 millions (soit 22 % de la popula-tion française) à pratiquer de lagymnastique d’entretien, du fitnesset de la musculation. Les espacespour la forme ont suivi cette vagued’engouement. On compte environ4 000 salles de sport privées aux-quelles s’ajoutent de nombreusesautres infrastructures qui ont, pro-

gressivement, mis à la portée detous la pratique de la remise enforme. Tout le réseau associatif apermis aux collectivités localesd’avoir une salle de musculationmais aussi les clubs de tennis, lespiscines, les campings, les clubs devacances, les centres de thalasso-thérapie, les grandes entreprises,les hôtels...

Entretenir sa forme, se défoulerou se détendre sont les motivationsprincipales des clients qui fré-quentent les salles de gymnastique.Dans ce besoin grégaire, entrentégalement en ligne de compte lebesoin de la collectivité qui encou-rage à une certaine discipline et larecherche d’un cadre convivial quipermet de laisser au vestiaire lessoucis quotidiens. Selon PhilippeGoethals, président du salon BodyFitness, le jeu est aussi une donnéequi séduit de plus en plus declients. Rameurs et vélos s’équipentaujourd’hui d’écrans sophistiquéset de consoles qui montrent, sur unrameur, les concurrents virtuels ou,à vélo, un paysage. « Toutes ces évo-lutions ont entraîné une fréquenta-tion plus variée des clubs ; on y ren-contre des jeunes, des seniors, deshommes et des femmes au corps pasforcément sculptural. On vient ensalle pour se faire du bien, riend’autre », précise Philippe Goe-thals.

Pour les autres, ceux qui ne sou-

haitent pas fréquenter les clubs ouqui ont été déçus par un précédentabonnement, la gymnastique à do-micile offre une alternative quisemble séduire de plus en plus depersonnes. Selon une étude menéepar la Sofres en 1995 pour le salonBody Fitness et le Fiform (syndicatinterprofessionnel et internationaldes constructeurs, importateurs,distributeurs d’appareils, articles etproduits de forme), les salles desport, qu’elles soient privées ou as-sociatives, « sont les lieux privilégiésdes pratiquants de musculation, defitness et de gymnastique d’entre-tien ». Elles regroupent, en effet,46 % d’adeptes parmi les prati-quants. Mais comme le soulignel’étude, l’avance n’est pas très im-portante – de deux points seule-

ment – par rapport à la pratique àdomicile (44 %).

« La musculation ou le fitness àdomicile, un marché qui ne cessede croître », annonce l’enquête dela Sofres. Vélos d’appartement, ra-meurs, haltères, extenseurs (pro-duits les plus vendus) mais aussisteppers, tapis roulants, bancs demusculation... trouvent désormaisleur place dans les appartements.

MARCHÉ EN CROISSANCESe tenir en forme, maigrir et se

muscler dictent l’achat. « Le besoinde séduire n’est plus seulement unphénomène lié à la jeunesse. C’estdevenu un fait de société. Il y a desgens qui s’achètent un appareilparce qu’ils veulent bien préparer lepassage de la quarantaine », sou-

ligne Christophe Peteil, respon-sable de marché chez Go Sport. Ledésir d’acquisition varie ensuite se-lon le client. Il se fait sur le conseild’un ami, d’un kinésithérapeute, ousur une envie subite. De l’avis desmagasins spécialisés comme GoSport ou Décathlon mais aussi desgrandes surfaces qui occupent de-puis quelques années le marchéavec succès, les produits vantésdans les téléachats provoquent desraz-de-marée. Ces émissions ontainsi entraîné de véritables ruéessur les appareils d’électrostimula-tion, produits proprement fémi-nins. La vente des produits de mus-culation ne connaît pas de réellesfluctuations saisonnières, même sil’on note que le printemps (maigriravant l’été), les débuts d’année et

septembre (périodes de bonnes ré-solutions) encouragent l’achat.

Le choix de l’appareil se fait enmagasin. Sur ce type de produit,plus que pour tout autre, le conseildu vendeur est le bienvenu. ChezDécathlon, on constate que la fia-bilité, le confort et le design sontles qualités qui décident générale-ment le client. C’est d’ailleurs surces quelques points que lesconstructeurs ont porté leurs ef-forts, durant ces dernières années.Le manque de place étant un pro-blème récurrent chez les utilisa-teurs, les appareils sont devenusplus compacts. Rares sont ceux quipeuvent s’offrir le luxe d’une salleréservée à la forme. Pour ces quel-ques privilégiés, « le budget réservéà l’achat d’équipements de muscula-tion et de fitness remplace souvent lebudget de la deuxième voiture »,souligne Philippe Goethals.

Malgré tous ces adeptes, laFrance reste à la traîne et se placeencore, en Europe, derrière l’Angle-terre, l’Allemagne, l’Italie et l’Es-pagne. Cette situation rend les pro-fessionnels plutôt optimistes surl’avenir du marché. Selon eux, lesFrançais ont un réel besoin d’entre-tenir leur forme, mais, pour bonnombre d’entre eux, il est encorenécessaire de leur donner envied’en faire l’effort.

Véronique Cauhapé

Conseils d’utilisationb Le vélo d’appartement :principalement conseillé auxpersonnes désireuses d’entretenirleur condition physique. Bienrégler selle et guidon pour éviterles problèmes de dos.b Le rameur : il simule la pratiquede l’aviron. Plutôt conseillé auxpersonnes un peu sportives. Il estl’appareil le plus complet, faisanttravailler les abdominaux, lesmuscles des bras, des jambes, dudos. Bien régler son appareil en

fonction de sa taille, biendécomposer son mouvement (nepas commencer par tirer sur lesbras puis se pencher en arrière)pour éviter les problèmes de dosqu’entraîne très souvent ce typed’appareil lorsqu’il est mal utilisé.b Le stepper : il simule la montéedes marches et faitparticulièrement travailler lesmuscles des jambes et del’abdomen. Bien régler lesdifférents niveaux d’exercices afind’éviter les problèmes articulaires(genoux, chevilles).

b Tapis roulant : il simule lejogging. Bon pour les personnessouhaitant travailler leurendurance. Bien choisir sonrythme de course et caler le bustedans l’axe du bassin. Déconseilléaux personnes qui ont desproblèmes articulaires (chevilles,genoux). . Avant tout achat, demanderavis à un kinésithérapeute. Pour en savoir plus : 60 millions de consommateurs, « Le guide de la forme », no 49, juin-juillet-août 1997. 40 francs.

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24 / LE MONDE / MARDI 11 NOVEMBRE 1997 A U J O U R D ’ H U I - S P O R T S

Un calendrier chargéb Samedi 15 novembre :France-Afrique-du-Sud à Lyon ;Angleterre-Australie à Twickenham ;Irlande-Nouvelle-Zélande à Dublin.b Dimanche 16 novembre :Galles-Tonga à Swansea.b Samedi 22 novembre :France-Afrique-du-Sud à Paris ;Angleterre-Nouvelle-Zélande à Manchester ; Ecosse-Australie à Edimbourg.

b Samedi 29 novembre :Angleterre-Afrique-du-Sud à Twickenham ;Galles-Nouvelle-Zélande à Wembley.b Dimanche 30 novembre :Irlande-Canada à Dublin.b Samedi 6 décembre :Angleterre-Nouvelle-Zélande à Twickenham ;Ecosse-Afrique-du-Sud à Edimbourg.

Toulouse, Pau et Brive se sont qualifiéspour les demi-finales de la Coupe d’Europe

Des demi-finales équilibréesLe tirage au sort des demi-finales de la Coupe d’Europe a eu lieu di-

manche 9 novembre à Londres. Les rencontres opposeront, les 20 et 21décembre, Toulouse à Brive, et Bath à Pau. Les Corréziens, cham-pions d’Europe en titre, se déplaceront au Stadium, tout comme laSection paloise à Bath. « Pour nous, l’Europe, c’était plutôt de ren-contrer un club anglais, commentait Laurent Seigne, l’entraîneur deBrive. Mais de toute façon il fallait bien rencontrer Toulouse à un mo-ment ou à un autre. » « On ne pouvait rêver meilleure affiche, rétorquaitGuy Novès, son collègue toulousain, recevoir Brive sera un léger avan-tage grâce au public. Je suis persuadé que ce match sera une grande fête. »Bath, vainqueur samedi 8 novembre de Cardiff (32-21), partira favoriface à Pau. En Conférence européenne, les demi-finales opposerontaux mêmes dates Colomiers au Stade français, et Agen à Newcastle.

John Hart, entraîneur des All Blacks néo-zélandais

« Trop de matchs internationaux risquentde dévaloriser notre produit »

ENTRAÎNEUR du Quinze néo-zélandais depuis deux ans, JohnHart n’a pas l’habitude de mâcherses mots. Dans un entretien accor-dé au Monde, il s’insurge contreles cadences infernales imposées àses joueurs.

« Les All Blacks en tournée,c’est toujours un événement, etpartout où vous allez les ren-contres se joueront à guichetsfermés. Mais quatre tests-mat-ches en quatre semaines, est-cebien raisonnable ?

– Raisonnable, je ne le pensepas. Pour ma part, j’espère quec’est la dernière fois que les AllBlacks se voient obligés de jouerautant de matchs internationauxen si peu de temps. Si nous vou-lons maintenir la qualité du rugbyinternational, on ne peut pas de-mander aux joueurs d’être perfor-

mants semaine après semaine. Untest match demeure quelquechose de spécial, il exige des ingré-dients spéciaux. Il faut du temps, àla fois pour s’y préparer et pour enrécupérer. Ce qu’on nous de-mande, et ce qu’on demande auXV d’Angleterre – c’est-à-dire4 tests en 4 semaines – ne fait paspartie de ma vision de l’avenir duprofessionnalisme.

– Que pensez-vous de cettefrénésie de tournées ?

– Trop de matchs internationauxrisquent de se dévaloriser. Il fautfaire très attention de ne pas créerune indigestion auprès des specta-teurs. Aujourd’hui, le programmeinternational est géré n’importecomment – j’ai l’impression qu’ilsnaviguent à vue. Mais il faut quequelqu’un prenne les choses enmain et commence à gérer l’agen-

da international en fonction desnouvelles structures du rugby pro-fessionnel.

– Comment cette situation a-t-elle pu se produire.

– Le dollar est la cause de tout.Le professionnalisme est tombétrès vite sur le rugby, et il a falludépenser des fortunes en très peude temps afin de conserver la basedes effectifs. Les dirigeants fonttout ce qu’ils peuvent pour rattra-per les pertes et pour générer desrevenus pour financer les struc-tures salariales. La frénésie ac-tuelle est un sous-produit directde cette situation, ainsi que lesnouveaux contrats TV quiviennent d’être négociés.

– Les joueurs sont devenus desimples marionnettes ?

– Non, je ne dirais pas cela : ilfaut qu’ils méritent l’argent qu’ilsgagnent. Mais si, en termes de jeuet de spectacle, nous voulons de laqualité, il faut un agenda interna-tional qui nous permette d’amé-liorer le produit.

– Revenons au jeu. Depuis unan, vous avez pris de l’avancesur tout le monde, notammentsur le rugby européen. Qu’est-ceque vous espérez apprendre envenant ici ?

– D’abord, je ne crois pas quenous devancions tout le monde.Certes, nous venons de réussirdeux belles années, mais, pourmoi, il y a toujours quatre ou cinqéquipes dans le monde qui sevalent. Etre considéré comme lenuméro un n’est jamais une posi-tion enviable : face à nous, la mo-tivation de toutes les autreséquipes est décuplée, et si onperd, la chute est d’autant plusdure.

– Malgré tout, qu’est-ce que lerugby européen peut vous ap-porter ?

– Je suis sûr que nous pouvonsapprendre des choses de toutes leséquipes britanniques, si ce n’est lavariation des approches tactiques,surtout dans le contexte d’unemeilleure compréhension desnouvelles règles. Au reste, il fautabsolument maintenir des rela-tions entre les hémisphères Sud etNord. C’est primordial pour lamondialisation du rugby... aprèstout, c’est l’objectif fondamentalde ceux qui dirigent le rugby au-jourd’hui. Pour moi, une compéti-tion régulière entre les meilleureséquipes des deux hémisphères faitpartie intégrante de cette mondia-lisation. »

Propos recueillis parIan Borthwick

L’ARRIVÉE en France dimanche9 novembre des Springboks pourune courte tournée (4 matchs, dont2 tests) signale le début d’un au-tomne chargé, pour ne pas dire in-

sensé, surl’agenda inter-national rug-bystique.L’Afrique duSud, l’Australieet la Nouvelle-Zélande, lestrois poids

lourds de l’hémisphère Sud, dé-barquent simultanément sur les ter-rains de la vieille Europe. Une au-baine pour le public, les fédérationset, sans doute, pour les ayants droitde l’audiovisuel. Mais déjà certainesvoix se lèvent contre cette gourman-dise qui débouche sur dix tests en unmois, et qui exige de la part desjoueurs quatre matchs internatio-naux en quatre week-ends succes-sifs.

Jamais dans l’histoire du rugbyune telle « invasion » ne s’était pro-duite. Naguère, les tournées d’au-tomne étaient une mise en boucheavant la dégustation du Tournoi descinq nations. Cette fois-ci on se de-mande si la surabondance de ren-contres programmées entre le 15 no-vembre et le 6 décembre ne

provoquera pas une indigestion au-près des spectateurs. Pour John Hart,l’entraîneur du XV néo-zélandais(lire l’entretien ci-dessous), et CliffBrittle, le président de la Fédérationanglaise, cette séquence de matchsest « insensée ». « C’est quelque chosequi ne doit jamais se reproduire », in-sistait Brittle, dont les joueursdoivent affronter les équipes d’Aus-tralie, de Nouvelle-Zélande (deuxfois) et d’Afrique du Sud l’une aprèsl’autre.

« GAGNER TOUS LES MATCHES »Quant à Vernon Pugh, président

de l’International Board, il craint une« dévaluation » importante du rugbyinternational : « C’est ridicule, etcontraire au sens commun. Je ne voispas une seule bonne raison pour lefaire, et, si quelqu’un dit que c’est pourdes raisons financières, c’est un trèsmauvais économiste. Le rapport im-médiat de quatre matchs à 20 millionsde francs par match n’est pas négli-geable, mais dans cinq ans ces matchsne vaudront plus que la moitié. »

Reste que le magnat australo-américain Ruppert Murdoch, par lebiais de Sky TV, a signé un contrat de87 millions de livres (environ870 millions de francs) pour tous lesmatchs du XV anglais pendant cinqans. En plus de copieusement rem-

plir les caisses des fédérations, cestournées permettent donc d’alimen-ter la chronique sur les méritescomparés des rugby du Sud et duNord, vieux débat tendant à seconcentrer sur la question de la su-prématie des All Blacks sur tous lesautres. A l’image de leurs prestigieuxaînés, les hommes de Sean Fitzpa-trick – vainqueurs 81-3 samedi 8 no-vembre sous la pluie à Llanelli – s’ap-prêtent vraisemblablement àremporter chacun de leurs neufmatchs en Grande-Bretagne. « Notreobjectif est de gagner tous les matchs.Et de gagner avec la manière », in-siste John Hart.

Contrairement aux All Blacks quiont indéniablement pris de l’avance

sur tout le monde, les Sud-Africainset les Australiens sont dans unepériode de transition. Pour lesSpringboks, Nick Mallett est le cin-quième entraîneur en cinq ans de-puis leur retour dans le giron inter-national. L’ancien joueur-entraîneurde l’ACBB à Paris a réussi son exa-men d’entrée contre les Italiens àBologne samedi (victoire des Spring-boks 62-31), mais il a hérité d’uneéquipe qui n’arrive pas à trouver sonstyle, et qui vacille encore entre lerugby de puissance et défi physiquetraditionnel et l’exemple du jeu aérédes Néo-Zélandais.

Auteurs d’une magnifique victoire(61-22) sur l’Australie à Pretoria aumois d’août, avec huit essais à la clé,

les Springboks avaient ensuite perdula série de tests contre les Lions bri-tanniques, qui avaient proposé unrugby peu ambitieux, inscrivant troisessais seulement en trois rencontres.Il n’empêche que la qualité intrin-sèque de leurs joueurs et le niveauélevé de compétition en Afrique duSud, que ce soit dans le Super-12, oule Currie Cup, championnat nationaldes provinces, font des Springboksdes favoris, que ce soit contre laFrance (le 15 novembre à Lyon et le22 novembre à Paris) ou contrel’Ecosse et l’Angleterre.

NOUVELLES DONNÉESEn revanche, les Wallabies sont

dans le flou le plus total. Le malheu-reux Greg Smith débarqué, c’estl’entraîneur de la province de Can-berra (ACT) Rod Macqueen qui vientde prendre les rênes du XV national.Très fort dans la préparation psycho-logique d’une équipe, et moins sim-pliste que son prédécesseur, Mac-queen a fait des merveilles avec lasélection de l’ACT. Pourtant, il n’apas encore réussi à rassembler les ta-lents du XV d’Australie, et samedi àBuenos Aires les Wallabies ont perdule deuxième test (18-16).

Quant aux Néo-Zélandais, ils ontprofité peut-être plus que tous lesautres des nouvelles données du

professionnalisme. Leur jeu, qui fai-sait déjà merveille à la Coupe dumonde 1995, a fait encore un bonden avant, et grâce à la science de leurpréparation physique les joueurssemblent capables de faire encoredes progrès sur ce plan. Frank Bunce(35 ans), ou Zinzan Brooke (32 ans)sont aussi frais qu’à leurs débuts,tandis que l’increvable capitaineSean Fitzpatrick (34 ans et 91 sélec-tions) n’a toujours pas manqué uneseule sélection sur blessure depuisses débuts en 1986.

Avec leur capacité à maîtriser laconquête et à assurer le mouvementpar un soutien permanent du por-teur du ballon, avec une générationde jeunes joueurs exceptionnels, telsl’arrière Christian Cullen, l’ailier JeffWilson ou le troisième ligne JoshKronfeld, sans parler de Jonah Lo-mu, qui lutte pour retrouver son an-cien niveau, avec le meilleur cinq dedevant du monde et leurs bases tra-ditionnelles de discipline et de ri-gueur, c’est peut-être la meilleureéquipe qui ait jamais quitté la Nou-velle-Zélande. On ne voit guèrecomment les équipes britanniques, àcommencer par l’Irlande samediprochain, pourront résister à la nou-velle marée noire.

I. B.

PAU, TOULOUSEde nos envoyés spéciaux

Le rugby français se souviendralongtemps de ce week-end ensoleil-lé de novembre, conclu par un triplégagnant pour les demi-finales de laCoupe d’Europe. Toulouse, Pau,Brive, trois clubs qualifiés sur troisclubs engagés, une réussite totale.Les 20 et 21 décembre prochains, iln’y aura plus qu’une seule équipeanglaise pour contester cette écra-sante suprématie. Bath, le plus fran-çais des clubs anglais par son style,recevra Pau. Brive, le championd’Europe en titre, ira à Toulousepour une affiche aux airs de grandefinale nationale.

Au Stadium, il ne sera pourtantpas question du bouclier de Bren-nus, mais bien de grosse affaire eu-ropéenne entre les deux premiersvainqueurs de la compétition. LaFrance du rugby en frémit déjà. Plai-sir du jeu, férocité de défenses quis’efforcent de bâtir, et rebâtir sanscesse les murs du désespoir adverse,elle rêve de revoir en grand ce queses clubs lui ont si joliment esquisséce week-end, comme pour en re-montrer à la rumeur. On lui avaitchuchoté à l’oreille : force anglaise,supériorité d’un professionnalismedes clubs d’outre-Manche qui ne

laisse rien au hasard. On lui avaitpromis à demi-mot une grande dé-sillusion, un cruel rappel à l’ordre.Ce fut une apothéose en trois cou-leurs, en trois équipes et en troisstyles. Le Stade toulousain a eul’honneur de tirer le premier sur lesHarlequins de Londres, cette drôled’armada au maillot bariolé. Sur lapelouse du Stadium en pleine réno-vation pour la Coupe du monde defootball, Jérome Cazalbou et lessiens ont montré leur nouveau vi-sage. Ce Stade-là ressemble à songlorieux devancier des années 80,mélange d’intelligence tactique, derigueur défensive et de parti prisd’oser. S’y ajoute une plus grande vi-tesse d’exécution, appuyée par unemeilleure condition physique. Le ré-

sultat fut une terrible domination,une de ces victoires qui blessent ethumilient le vaincu (51-10).

Les Rouge et Noir ont étouffé lesHarlequins de leurs initiatives. Ils lesont écœurés par l’acharnement deleur défense, au point que ThierryLacroix et ses co-équipiers sont re-partis sans un mot après une longueengueulade de leur entraîneur dansle vestiaire. Emile N’Tamack, dontc’était le retour après neuf moisd’absence pour cause de blessure,était, lui, un homme heureux. Il amarqué le premier des six essaistoulousains, dès la troisième minute.« Tout de suite, nous avons senti quele match se passerait bien si nouscontinuions à imposer cette pres-sion », confiait l’ailier international.

« SÉRÉNITÉ, MATURITÉ »A Pau, ce fut une belle histoire de

revanche. Le rugby britannique, laplupart des joueurs de la Section pa-loise l’avaient découvert en 1996,pour leur première participation à laCoupe d’Europe. La prise de contactavait laissé aux Béarnais un arrière-goût plutôt amer, pimenté par deuxexplusions chez les Gallois de Lla-nelli et une défaite à domicile faceaux Anglais de Leicester, provoquéeen grande partie par l’indiscipline de

la mêlée paloise. La leçon a porté sesfruits : avant la « revanche », lequart de finale disputé dimanche9 novembre à Pau, face à Leicester,les Français s’étaient juré, à l’imagedu pilier gauche Pierre Triep-Capde-ville, « de ne pas paniquer, ne pass’affoler et de mieux s’adapter à l’ar-bitrage de la Coupe d’Europe ».

Mais la réalité rugueuse du terrainne résiste pas toujours aux bellespromesses, et le pilier internationalde Pau est sans doute celui qui a lemoins bien respecté ses propresconsignes. Plus fidèles à leurs enga-gements, ses coéquipiers ont, en re-vanche, fort bien reçu les sages pro-pos de leurs entraîneurs, les deuxBayonnais Francis Leta et Jean-LouisLuneau : « Sérénité, maturité. » Ils

ont aussi prêté une oreille attentiveaux chœurs du public, qui, aux ac-cents d’Aquerros Mountanes, unchant d’amour aux Pyrénées voi-sines, les invitait à soulever la mon-tagne anglaise.

Jamais, pendant toute une pre-mière mi-temps accrochée, scandéepar une interminable succession demêlées, touches et pénalités, les Pa-lois ne se sont laissé prendre aupiège qui leur avait été fatal l’annéeprécédente. « On n’avait pas toutcompris, se souvient Pierre Triep-Capdeville. Les organisateurs de laCoupe d’Europe veulent du spectacle :dès qu’un ballon est au sol, il faut lelaisser, il ne faut pas aller le chercher.Alors, on a fait comme ça. » Oupresque...

Bob Dwyer, l’entraîneur de Lei-cester, était furieux contre ce qu’il aappelé « les tricheries à répétition »des avants béarnais. Ce sont pour-tant les lignes arrière de la Sectionpaloise, qui, en seconde période, ontconstruit la victoire de Pau, grâce àd’audacieux mouvements offensifs.Le plus beau d’entre eux, lancé parl’arrière Nicolas Brusque, a permis àPhilippe Bernat-Salles d’inscrire sondeuxième essai de la journée. Lejeune arrière de la Section a ensuiteconclu une dernière phase de domi-nation de ses avants par un qua-trième essai. Plus que la victoire (35-18) et la qualification pour les demi-finales de la Coupe d’Europe, Nico-las Brusque a fêté dans les vestiairesl’annonce de sa sélection dansl’équipe des Barbarians, où il est ap-pelé à suppléer le Briviste SébastienViars, blessé.

Affaire de courage, de cœur, devolonté. A Londres, Brive affrontaitsans doute le défi le plus difficile àrelever. Les Wasps, champions d’An-gleterre, champions du beau jeu, sepromettaient de faire tomber lechampion d’Europe. Ce sont eux quiont fini par rompre, faute d’avoirtrouvé dans la défense corrézienneun trou de souris où se glisser. La-wrence Dallaglio, le capitaine, et seshommes ont lâché de multiples bor-dées offensives. Ils ont essayé, es-sayé encore. Sur leur route, il y avaittoujours, un, deux, voire trois bri-vistes, animés d’une sublime rage deplaquer. A cette aune, l’esprit de sa-crifice devient un talent. Combiende tonnes de muscles anglais Phi-lippe Carbonneau et David Vendittiauront-ils retournées en ce di-manche 9 novembre ? Entre deuxplaquages, les champions d’Europeont réussi à marquer trois essaissans en encaisser un seul (25-18).Cela valait bien le droit de pour-suivre la route européenne.

Pascal Ceauxet Eric Collier

Le rugby de l’hémisphère Sud menace de submerger l’EuropeAll Blacks, Springboks, Wallabies et Tongans sont en tournée sur le Vieux Continent jusqu’au début de décembre. L’épreuve sera redoutable

pour les Français, dont les clubs sont pourtant particulièrement performants en Coupe d’EuropeToutes les équipes de rugby de l’hémi-sphère Sud, Néo-Zélandais, Sud-Africains,Australiens, Tongans, sont en tournée enEurope jusqu’au début du mois de dé-cembre. Fort lucratives pour les fédérations

qui les organisent, ces rencontres seronttrès éprouvantes pour les joueurs, qui de-vront enchaîner quatre tests en quatre se-maines. L’entraîneur des All Blacks, JohnHart, craint d’ailleurs dans un entretien au

Monde qu’une telle profusion de matchesau sommet ne finisse par lasser le public etuser les équipes. Quoi qu’il en soit, lestermes de l’échange semblent extrême-ment déséquilibrés au profit des sélections

du Sud, où le professionnalisme s’est impo-sé. C’est donc deux rencontres à hautsrisques que disputera l’équipe de Francecontre les Springboks le 15 novembre àLyon et le 22 novembre à Paris, au moment

où les clubs nationaux brillent en Couped’Europe. Toulouse, Brive et Pau se sontqualifiés pour les demi-finales, auxquellesune seule équipe anglaise, Bath, est parve-nue à accéder.

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A U J O U R D ’ H U I - S P O R T S LE MONDE / MARDI 11 NOVEMBRE 1997 / 25

Le championnat de France de football de D1

RougesJaunes

CLASSEMENT

LES CARTONS

Point

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ts

Série

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LES DÉFENSES

LES BUTEURS

LES ATTAQUES

30 9 3 31530 9 3 31530 9 3 31529 8 5 21526 8 2 51525 7 4 41523 7 2 61522 6 4 51520 5 5 51520 6 2 71520 5 5 51516 4 4 71515 4 3 81515 4 3 81514 3 5 71513 2 7 61513 3 4 81511 3 2 1015

1 Paris-SG 2 Metz 3 Marseille 4 Bordeaux 5 Monaco 6 Lens 7 Auxerre 8 Bastia 9 Montpellier10 Lyon11 Toulouse12 Nantes13 Guingamp14 Châteauroux15 Strasbourg16 Le Havre17 Rennes18 Cannes

+ 16+ 10

+ 10+ 6+ 7+ 4+ 6+ 5

0- 1- 4- 2- 6

- 10- 8

- 12- 16

- 5

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16e JOURNÉE : samedi 15 novembre • Bordeaux-Paris-SG • Nantes-Metz • Marseille-Auxerre• Montpellier-Bastia •Toulouse-Monaco • Guingamp-Rennes (le 16) • Le Havre-Strasbourg (le 16) •Lens-Cannes • Lyon-Châteauroux.

1 Paris-SG 29 buts • 2 Auxerre 25 • 3 Metz, Monaco 23.

1 Marseille 11 buts • 2 Paris-SG • 2 Metz 13 buts

Metz-Guingamp 2-1

Auxerre-Le Havre 0-0

Cannes-Montpellier 1-0

Bastia-Strasbourg 2-0

Bordeaux-Lyon 0-0

Châteauroux-Toulouse 2-1

Rennes-Lens 2-3

Monaco-Nantes 3-2

Paris-SG-Marseille 1-2

1

1

1

1

2

2

1

1

2

2

1

3 1 Nantes 0 20 2 Monaco 0 21 3 Marseille 0 27

15e JOURNÉE

16 Paris-SG 3 32 17 Bastia 4 36 18 Bordeaux 5 34

1 Guivarc'h (Auxerre) • Laslandes (Bordeaux) • Ikpeba (Monaco) 8 buts.

Domination américaine au supercross de BercyA son palmarès, il ne manquait qu’un titre à Bercy. C’est désormais

chose faite. Jeff Emig, champion du monde en titre de supercross(250 cc), a gagné, dimanche 9 novembre, le rendez-vous parisien. A l’is-sue de trois journées de course, Emig (Kawasaki) a devancé les autres ve-dettes américaines de la discipline, qui ont pris quatre des cinq pre-mières places du classement général. Les Etats-Unis, une fois encore, ontmontré leur expérience de vingt ans dans ce sport spectaculaire, fait debonds, de culbutes et de bosses. Le supercross, ou motocross en salle, aété inventé outre-Atlantique. Les pilotes français ont été d’excellentsfaire-valoir, notamment Yves Demaria et Frédéric Bolley (Kawasaki),sans compter David Vuillemin (Yamaha) et Stéphane Roncada (Honda)(ci-dessus) particulièrement brillants en 125 cc.

L’aspect de la pelouse du Stade de France est « provisoire »La direction du Stade de France a précisé, samedi 8 novembre, que

l’aspect esthétique de la pelouse est provisoirement altéré (Le Mondedaté 9-10 novembre) en raison de divers travaux d’entretien. « Cesopérations consistent notamment en un verticutage – extraction dufeutre, produit résiduel des tontes –, en un décompactage – aération dusol – et en un sablage. Celui-ci a été appliqué la semaine dernière et estencore visible aujourd’hui. L’aspect actuel de la pelouse est bien sûr pro-visoire. Toutes ces opérations sont normales et conformes à ce qui a étéannoncé lors de la présentation de la pelouse, en septembre dernier », aindiqué la direction du Stade de France. Un jaunissement de la pe-louse avait été constaté jeudi 6 novembre, lors de la visite du site parle président de la Fédération internationale de football (FIFA),M. Joao Havelange.

Rolland Courbis fait de l’Olympique de Marseilleun sérieux prétendant au titre

Vainqueur (2-1) au Parc des princes, l’OM rejoint le PSG en tête du championnat de France de footballUn but de Xavier Gravelaine (14e) et un penaltyde Laurent Blanc (64e) malicieusement obtenupar Fabrizio Ravanelli – contre un but de Jérôme

Leroy (34e) – ont suffi pour que l’Olympique deMarseille s’impose à Paris face à un PSG privéd’attaquants après la blessure de Florian Mau-

rice. Pour sa première année sur la Canebière,Rolland Courbis est en passe de réussir à faire del’OM un champion de France en puissance.

a Blessés en première mi-temps, l’attaquant du PSG FlorianMaurice souffre d’une entorse dela cheville gauche et le milieu deterrain Vincent Guérin d’une en-torse du genou gauche. SelonClaude Le Roy, directeur sportif, lePSG, déjà privé de Marco Simone(claquage), aura engagé un « jo-ker » offensif avant la rencontrecontre Monaco, mercredi 20 no-vembre.a Douze policiers ont été légère-ment blessés et sept personnesont été interpellés au cours d’in-cidents qui ont eu lieu à la sortiedu Parc des Princes. Des suppor-teurs ont jeté des pierres et desbouteilles de bière sur les forces del’ordre qui protégeaient la sortiedes 43 000 spectateurs présents aumatch. Auparavant, un CRS avaitété blessé par un projectile lancésur la pelouse.

LE TEMPS passe, les joueurschangent, mais la tradition est res-pectée. Dimanche 9 novembre,dans un Parc des Princes plein debruit et de fureur, l’Olympique deMarseille a battu le Paris Saint-Germain (2-1) à l’issue d’un matchaussi tendu qu’excitant. Traditionrespectée, puisque, depuis que Ca-nal Plus a pris en mains la destinéedu club de la capitale, en 1991, ja-mais le PSG n’est parvenu à s’im-poser sur sa pelouse face à l’OM enchampionnat. Tradition respectée,puisque les PSG-OM ont toujoursdébouché sur des rencontres heur-tées. Tradition respectée enfinconcernant l’ambiance électriquerégnant dans des tribunes, où600 fans marseillais ont donné dela voix et du geste face à43 000 supporteurs parisiens ren-dus nerveux par leur présence.

Malgré cette atmosphère sur-chauffée, Rolland Courbis n’estpas homme à perdre la tête. La vic-toire obtenue à Paris, c’est d’abordla sienne. Celle d’un maître tacti-cien dont le sens du « coaching » etdu dialogue permet à ses joueurs,quels qu’ils soient, de se sublimerau moment voulu. Natif de Mar-seille, mais ayant roulé sa bossedans des endroits aussi diversqu’Athènes, Ajaccio, Toulon, Mo-naco, Toulouse ou Bordeaux, Rol-land Courbis est devenu, au fild’une existence mouvementée,l’un des grands entraîneurs fran-çais, un homme qui, selon la jolieformule de Paul Vissiano, vice-pré-sident du petit club marseillaisd’Endoume, cité par L’Equipe Ma-gazine, reste « capable de fairepousser des roses dans un désert ».

CHARISME ET SENS DU DIALOGUEAujourd’hui, Rolland Courbis est

l’un des rares entraîneurs deFrance à pouvoir convaincrenombre de joueurs de venir le re-joindre. Une qualité inestimable àlaquelle s’ajoutent son charisme,son sens du dialogue et ses prépa-rations minutieuses – physique,tactique et psychologique. Il y adeux saisons, l’Olympique de Mar-seille évoluait en deuxième divi-sion. Son nouveau président, Ro-bert Louis-Dreyfus – le patrond’Adidas, – cible son objectif enparlant d’une qualification enLigue des champions. Autrementdit d’un classement final à la pre-mière ou deuxième place du cham-pionnat de France. Pour y parvenir,les nouveaux reponsables olym-piens ont remplacé Gérard Gili parRolland Courbis.

Courbis à Marseille ? L’évidencene s’imposait pas si facilement auxyeux de certains responsables poli-

tiques locaux, qui, soucieux de voirl’OM se refaire une virginité aprèsl’ère Tapie, craignaient de voir dé-barquer à la tête de l’équipe pre-mière un homme toujours en déli-catesse avec le fisc et ayant passéun séjour en prison à la suite demalversations financières surve-nues au Sporting Club de Toulon.Aujourd’hui, il n’y a plus de

craintes. Parce que Rolland-le-ma-gicien, fidèle à sa ligne de conduite,est en train de bâtir en un tempsrecord une équipe de premier plan.Et qu’ici on pardonne beaucoup àcelui qui semble capable de fairerevivre le Stade-Vélodrome.

La saison dernière, c’est à Bor-deaux que le talent de bâtisseur duMarseillais avait fait merveille. Hé-

ritant d’un effectif totalement bou-leversé à l’intersaison, RollandCourbis avait rapidement su trou-ver l’amalgame et fait des Giron-dins une équipe efficace, qua-trième en championnat et finalistede la Coupe de la Ligue. A Mar-seille, on l’attendait au tournant.Qu’allait-il faire de cet effectif ausein duquel trois joueurs de classe

internationale (l’Allemand AndreasKöpke, l’Italien Fabrizio Ravanelliet Laurent Blanc) côtoient des coé-quipiers doués, mais dont la cartede visite ne laissait pas entrevoirde miracles ?

Comme d’habitude, RollandCourbis s’est mis au travail, cher-chant d’abord à trouver une assisedéfensive solide. Le résultat est là :

l’OM possède la meilleure défensede première division, avec onzebuts encaissés après quinze jour-nées de championnat. Ensuite, il amis en pratique au fil des ren-contres une technique qu’il maî-trise parfaitement, à savoir le« coaching ». Nul mieux que lui nesait faire tourner son effectif – uneleçon que le Portugais Ricardopourra méditer. « J’ai une vingtainede gars capables de bien jouer enéquipe première. C’est une richesseinestimable », avouait-il après lavictoire du Parc des Princes.

PAS D’EUPHORIEUn succès qui doit tout à la mé-

thode Courbis, faite de regroupe-ments défensifs parfaits et decontres rapidement menés. Unmarquage strict, un Laurent Blanccapable de transversales millimé-trées, des joueurs utilisant beau-coup les « couloirs » (« Titi » Ca-mara sur l’aile gauche, ClaudeMakélélé à droite), et voilà com-ment cet OM solide devient, au fildes rencontres, une formation deplus en plus difficile à manœuvrer.

Mais le maître refuse encore decéder à l’euphorie. « Pour êtrechampion, lançait-il après le match,il faut posséder un niveau de jeu su-périeur à celui qui est le nôtre ac-tuellement. Pour le moment, l’OMest une bonne équipe, pas unegrande équipe. Mon objectif reste determiner dans les cinq premiers. »Le président Robert Louis-Dreyfus,lui, pense toujours à la Ligue deschampions. Un objectif que sembleen mesure d’atteindre RollandCourbis, l’homme capable de fairepousser des roses dans un désert.

Alain Constant

Les Etats-Unis qualifiésGrâce à leur victoire au Canada (3-0), dimanche 9 novembre, les

Etats-Unis se sont qualifiés pour la Coupe du monde 1998 en France.Ils rejoignent ainsi le Mexique, qui les précède au classement de lazone Concacaf, et deviennent le 23e pays à avoir gagné le droit departiciper à la phase finale de l’épreuve. En 1994, les Etats-Unisétaient qualifiés d’office en tant que pays organisateur. Au premiertour, ils avaient pris la troisième place de leur groupe derrière laRoumanie et la Suisse pour jouer les huitièmes de finale face auBrésil, qui s’était imposé (1-0). La dernière des trois places qualifica-tives de la zone Concacaf se jouera entre la Jamaïque et le Salvador,lors de la dernière journée, le 16 novembre. Le match nul (2-2) de laJamaïque au Salvador, dimanche, place les Jamaïcains en situationde favoris, puisqu’ils devancent désormais les Salvadoriens de troispoints. Ils devront au moins obtenir un match nul face au Mexique,chez eux, tandis que les Salvadoriens doivent absolument battre lesEtats-Unis.

Le Japon compte sur le Mondial 98 pour relancer son footballTOKYO

de notre correspondantLe football nippon languissait.

Les victoires successives del’équipe nationale lors des matchesqualificatifs pour la Coupe dumonde 1998 – le 1er novembrecontre son rival sud-coréen, àSéoul (2-0), puis, samedi 8 no-vembre, à Tokyo, sur le Kazakhstan(5-1) – lui ont redonné espoir. Lesfootballeurs japonais joueront lesbarrages qui pourraient leur per-mettre de visiter la France aprèsavoir disputé la plus populaire desépreuves sportives du 10 juin au12 juillet.

Si la fièvre footballistique qui asuivi le lancement, en 1993, de la J-League (le championnat profes-sionnel) est vite retombée, la pers-pective du Mondial 2002 – la pre-mière Coupe du monde jouée enAsie – dont le Japon partage l’orga-nisation avec la Corée, a ravivé lespassions nationalistes : en raisonde leur contexte historique, l’am-biance des Corée-Japon est compa-rable à celle des France-Allemagne.

Certes, les spécialistes expliquentla victoire des Japonais à Séoul parune démobilisation des Sud-Co-réens, déjà assurés de participer auMondial français. N’empêche, laqualification du Japon est bien lagrande affaire du moment. Le paysest suspendu aux performances del’équipe nationale si bien que lepiètre résultat (0-0) du match

contre les Emirats arabes unis, il y aquelques semaines, a donné lieu àune première : un ouragan de cri-tiques qui ont conduit à la démis-sion de l’entraîneur national.

FAIBLESSES STRUCTURELLESLe football japonais a besoin

d’un nouvel élan. Au cours desdeux premières saisons, les stadesétaient pleins et les matches sem-blaient en passe de détrôner lebase-ball, très populaire ici, entermes d’Audimat. Mais l’annéedernière la foule a déserté lesstades : de 19 500 en 1994, lenombre moyen des spectateurs esttombé à 13 300 en 1996. Et l’au-dience télévisée s’est effritée : de

plus de 10 %, elle est passée à 7,2 %.Un désintérêt qui a eu des réper-cussions sur les revenus de la J-League (– 19 % en 1996). Les entre-prises qui avaient misé sur la voguedes gadgets liés à la J-League dé-chantent aussi : les ventes de SonyCreative Products sont tombées de3,6 milliards de yens en 1993 à934 millions en 1996.

La J-League s’est étoffée dequatre équipes depuis 1995, pouren présenter dix-sept. Mais lesnouveaux venus n’ont guère faitremonter la cote du football chezles jeunes et éprouvent beaucoupde mal à fidéliser des supporters.La création d’une deuxième divi-sion en 1999 accentuera cette infla-

tion d’équipes et risque d’accroîtrela dispersion du public. Mais lesentreprises ont tant investi dans lapromotion du football qu’elles nepeuvent qu’aller de l’avant (avecdes soutiens de 4,5 milliards deyens par an) au risque de perdreleur mise.

La J-League ne ménage pas sesefforts pour rester à flot : elle a lan-cé au printemps une campagne pu-blicitaire à la télévision et elle apassé un accord avec la chaîne na-tionale NHK, lui donnant la priori-té de retransmission d’une cen-taine de matches. L’introduction,en 1999, d’un totocalcio, qui devraitflatter le goût japonais du jeu,contribuera-t-elle à soutenir l’élandonné par les Coupes du monde aufootball nippon ?

Le ballon rond a profité entre1993 et 1995 d’un effet de mode.Mais le football nippon souffre defaiblesses structurelles. Pour les ré-soudre, les clubs ont recruté, àl’aide de contrats mirobolants, desjoueurs et des entraîneurs étran-gers. Une politique qui a grevé lesbudgets sans résoudre le problème.Le système de formation des en-traîneurs locaux se met en place àla vitesse d’un ailier poussif et, si leJapon célèbre les exploits de Ka-zuyoshi Miura ou Masakiyo Mae-zono, il tarde à se constituer un vé-ritable vivier de joueurs.

Philippe Pons

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Fabrice Tiozzo champion du monde des lourds-légers version WBALE FRANÇAIS FABRICE TIOZZO a renoué, dimanche 9 novembre,avec la victoire, après deux années d’errements, en conquérant auxpoints, à Las Vegas, le titre de champion du monde des lourds-légers(WBA) aux dépens de l’Américain Nate Miller. Sacré champion (WBC)des mi-lourds en juin 1995 à Lyon, Fabrice Tiozzo avait été destitué dece titre en janvier pour ne pas l’avoir défendu dans les délais régle-mentaires. Agé de vingt-huit ans, le boxeur de Saint-Denis a déjouéles pronostics qui donnaient Miller gagnant à quatre contre un et afrappé par sa maîtrise du match et sa persévérance. Les juges ne s’ysont pas trompés, qui lui ont unanimement accordé la victoire à ladouzième reprise. « Je m’étais bien entraîné et j’étais en pleine forme »,a dit le nouveau champion du monde. Chez les lourds, l’AméricainEvander Holyfield, tenant du titre WBA, a unifié le titre dans deux fé-dérations (WBA-IBF)en battant Michael Moorer, par arrêt de l’arbitreà la huitième reprise. Il devrait affronter Lennox Lewis au printemps1998 pour tenter de conquérir également la ceinture WBC. – (Reuters)

DÉPÊCHESa TENNIS : Evgueni Kafelnikov a gagné le tournoi de Moscou, di-manche 9 novembre, en battant le Tchèque Petr Korda en finale (7-6[7-2], 6-4). Le Russe est qualifié pour la finale du circuit qui se disputeà Hanovre du 11 au 16 novembre. Les sept autres joueurs retenussont : Pete Sampras – qui est désormais sûr d’être sacré numéro unmondial à la fin de l’année – Michael Chang, Patrick Rafter, JonasBjorkman – vainqueur du tournoi de Stockholm, dimanche –, CarlosMoya, Greg Rusedski, Sergi Bruguera. La Française Nathalie Tauziats’est qualifiée pour la finale du circuit féminin en simple comme endouble, dimanche 9 novembre, grâce à une place de finaliste ensimples du tournoi de Chicago contre Lindsay Davenport (6-0, 7-5).a AUTOMOBILISME : les écuries McLaren-Mercedes et Williams-Renault se seraient entendues pour faire la course contre Ferrari lorsdu Grand Prix d’Europe de formule 1 à Jerez, le 28 octobre. Selon desrévélations de la presse britannique, un échange radio entre JacquesVilleneuve et son stand laisse entendre que David Coulthard (McLa-ren) contrôlait Eddy Irvine (Ferrari). Le Canadien, assuré d’être cham-pion du monde après l’accrochage avec Michael Schumacher (Ferrari)aurait ainsi remercié Mika Hakkinen et David Coulthard en les lais-sant lui passer devant quelques mètres avant la ligne d’arrivée. Lesdeux hommes avaient ainsi réalisé un doublé pour leur écurie.a HOCKEY SUR GLACE : l’équipe de France a terminé à la der-nière place du tournoi de Morges (Suisse). Les Français, qui s’étaientdéjà inclinés face à la Suisse B (3-2) et la Russie B (5-2) ont été battus,dimanche 9 novembre, par le Japon.a PATINAGE ARTISTIQUE : Surya Bonaly a pris la troisième placedu Skate Canada, samedi 8 novembre, à Halifax, derrière l’Améri-caine Michelle Kwan et la Russe Maria Butyrskaya.a VOILE : le départ de la deuxième étape de la Whitbread a étédonné, samedi 8 novembre, au Cap (Afrique du Sud). Neuf concur-rents sont encore en lice qui ont mis le cap vers Fremantle (Australie).Cette étape, longue de 5 600 miles est considérée comme la pluséprouvante des neuf que comporte cette course autour du mondeavec escales. L’Américain Paul Cayard (EF Language) avait remportéla première étape, entre Cowes (Angleterre) et le Cap.

a LOTO : les tirages numéro 90 du loto effectués samedi 8 no-vembre ont donné les résultats suivants : b Premier tirage : 25, 30, 32, 35, 39, 47, numéro complémentaire 22.Les rapports sont pour six bons numéros de 8 552 600 F, pour cinqbons numéros et le complémentaire de 90 000 F, pour cinq bons nu-méros de 10 425 F, pour quatre bons numéros et le complémentairede 402 F, pour quatre bons numéros de 201 F, pour trois bons numé-ros et le complémentaire de 42 F, pour trois bons numéros de 21 F.b Second tirage : 15, 17, 32, 35, 41, 47, numéro complémentaire 27.Les rapports sont pour six bons numéros de 32 754 635 F, pour cinqbons numéros et le complémentaire de 111 535 F, pour cinq bons nu-méros de 7 435 F, pour quatre bons numéros et le complémentaire de330 F, pour quatre bons numéros de 165 F, pour trois bons numéros etle complémentaire de 36 F, pour trois bons numéros de 18 F.

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LeMonde Job: WMQ1111--0026-0 WAS LMQ1111-26 Op.: XX Rev.: 10-11-97 T.: 10:52 S.: 111,06-Cmp.:10,11, Base : LMQPAG 22Fap:99 No:0236 Lcp: 196 CMYK

26 / LE MONDE / MARDI 11 NOVEMBRE 1997 A U J O U R D ’ H U I

MOTS CROISÉS PROBLÈME No 97249

HORIZONTALEMENT

I. Formation d’un cadre. – II.Evite les ruptures en bout dechaîne. Peut finir dans un fauteuil.– III. Bossait dur. En doute. – IV.Qui fait le reste. Ce n’est souventqu’une apparence. – V. D’un auxi-liaire. Une arme pour les pom-piers. – VI. Partie depuis peu detemps. Envoyé spécial au MoyenAge. – VII. Le trop-plein des sens.Saint dans la Manche. – VIII. Blancet bulbeux. Nous environnent vul-gairement. Circulent en Rouma-nie. – IX. Agent de liaison. Mêmebien cultivé, il ne devient jamais

AFFAIRE DE LOGIQUE PROBLÈME No 43

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12

gros. – X. Se met en quatre pour lepoète.

VERTICALEMENT

1. Une information que l’on neverra pas à la « une » du Monde. –2. Entre en contact. Ne rentre pasen contact. – 3. Indiquent la posi-tion. – 4. Où l’on trouve de la vie.En mer. – 5. Une protection depuisZeus. S’attaqua au tronc. – 6. Faitla be l le et guide le berger.Découpent la terre en bandes. – 7.Lettres d’Adeline. Sa messe et samusique sont pour le tempsprésent. – 8. Jeu sur deux notes.

Note. – 9. Relâchement gazeux. Leseptième n’est que centenaire. Amoitié bleu. – 10. Dans la gamme.Plein de bons mots. La premièremadame Jacob. – 11. Rend toutinsignifiant. – 12. Garde les dis-tances.

Philippe Dupuis

SOLUTION DU No 97248

HORIZONTALEMENT

I. Tarlatane. JT. – II. Amaigrie.Roi. – III. Rot. Aimanter. – IV. Ares.Pénal. – V. Basane. TV. Af. – VI. Il.Pa. Tsé-tsé. – VII. Sigma. Tics. –VIII. Crâneurs. Mes. – IX. Oie. Asti-cote. – X. Ta. Cicérones.

VERTICALEMENT

1. Tarabiscot. – 2. Amoral. Ria. –3. Ratés. SAE. – 4. Li. Sapin. – 5.Aga. Nageai. – 6. Tripe. Musc. – 7.Aime. Tarte. – 8. Néants. Sir. – 9.Navet. Co. – 10. RTL. Timon. – 11.Joe. Ascète. – 12. Tire-fesses.

g SOS Jeux de mots :3615 LEMONDE, tapez SOS (2,23 F/min).

I

II

III

IV

V

VI

VII

VIII

IX

X

Situation le 10 novembre à 0 heure TU Prévisions pour le 12 novembre à 0 heure TU

Les nombres secretsDEUX CANDIDATS s’af-

frontent lors du jeu télévisé « Lesnombres secrets ». L’animateurprécise que les nombres secretssont deux entiers (le premier eststrictement plus petit que ledeuxième) compris entre 1 et 7.Le but des candidats est de lesdeviner. « Je calcule le double dupremier que j’ajoute au triple dusecond, j’écris le résultat sur cemorceau de papier, et je vous leconfie, monsieur Léonhardt . »Puis, se tournant vers ledeuxième candidat : « Je calculele double du second que j’ajouteau triple du premier, j’écris le ré-sultat sur ce deuxième morceau depapier, et je vous le confie, mon-sieur Blaise. » Puis, s’adressantaux deux : « Vous avez une minutepour me donner la réponse. »

Les deux candidats, qui sontd’excellents logiciens, grif-fonnent quelques calculs. Puischacun rend une feuille de résul-tat à l’animateur, qui les dé-pouille, et s’écrie : « Les deux ré-ponses sont fausses. » Quels sontles deux nombres secrets ?

Solution du problème dans LeMonde du 16 novembre.

Elisabeth Busser et Gilles Cohen

© POLE 1997

SOLUTION DU PROBLÈME No 42 paru dans Le Monde du 4 novembre.

Un tire-bouchon rapide pour beaujolais nouveauUn négociant bourguignon va profiter du lancement, le 20 no-

vembre, du beaujolais nouveau pour commercialiser le tire-bou-chon intégré. La maison Emile Chandesais, qui fut déjà la première,en 1962, à embouteiller ce vin primeur jusqu’alors livré en barriquesdans les bars, a l’exclusivité de ce procédé nouveau en France, maisdéjà sorti en Australie et en Afrique du Sud. Mis au point il y a plusde huit ans par un œnologue canadien, David Hojnoski, le méca-nisme se compose d’un piston en plastique solidement chevillé àl’intérieur du bouchon de liège et surmonté d’une bague en plas-tique. La bouteille se débouche en soulevant le piston avec lesdoigts. Le tire-bouchon, appelé kwik-kork (dérivé de l’anglais quickcork, bouchon rapide en français), est réutilisable à l’infini. L’étan-chéité de ce bouchon/tire-bouchon serait identique à celle des bou-chons classiques. « Réservé aux vins faciles d’accès, comme les vins depays ou des AOC régionales comme le beaujolais, les côtes-du-rhône,voire quelques bordeaux », selon Jean-Pierre Durand, directeur dumarketing pour la maison Chandesais, ce prodédé ne devrait avoiraucune incidence sur le prix de la bouteille.

PRATIQUE

Pour conserver son vin quand on ne dispose pas d’une vraie caveIL N’EXISTE PAS de star plus exi-

geante – d’aucuns diraient caracté-rielle – que le vin. Il déteste : vibra-tions, légumes, fromages, fruits,vinaigre, fleurs, bois vert, racines,paille... peintures, carburants, lubri-fiants, colles, produits d’entretien,livres, journaux et tuyaux en toutgenre. Il tolère le béton (bien sec),mais exige une température de13o C, constante ou variant très len-tement ; une hygrométrie de 72 % ;une aération haute au nord-est etbasse au sud-ouest, sans courantsd’air ! Et surtout... silence et obscuri-té. Bref tout le « confort » d’unevraie cave – lieu improbable dansl’habitat moderne. Heureusementpour l’amateur de vin, la technolo-gie est venue au secours de sa pas-sion. On ne compte donc pas moinsde trois solutions pour garder seschères, voire très chères, bouteilles.

b Les armoires à vins. C’est lasolution la plus accessible, la pluscommode et la plus répandue, quioffre même deux avantages par rap-port à la cave traditionnelle : lesbouteilles sont à portée de la mainet cette armoire est mieux protégéequ’une cave d’immeuble. Elle res-semble en fait à un réfrigérateurmieux isolé et mieux « habillé »,parfois encastrable, qui s’installe àpeu près n’importe où.

L’analogie avec le réfrigérateurs’arrête à l’élément moteur, qui estsouvent le même, un compresseur,mais très lent et silencieux, avec unvolume sonore de l’ordre de 36 dbA,à comparer aux 47 dbA des lave-vaisselle les plus silencieux et aux30 dbA du silence absolu pourl’oreille humaine. Un autre méca-nisme, à absorption, est encore plussilencieux, mais, moins répandu, ilpeut se révéler plus difficile à répa-rer en cas de problème.

Les armoires à vins sont diviséesen deux grandes familles : celles àtempérature unique (réglable) etcelles qui ont en plus un comparti-ment à « frapper » à cinq ou sixbouteilles en partie basse et unautre à chambrer (dix-huit) en partiehaute. L’armoire fonctionnant dansdes plages de température réduites,avec des systèmes régulateurs d’hy-grométrie peu gourmands, laconsommation en électricité revienten moyenne à moins de 20 francs

par mois. En revanche, le prixd’achat reste assez élevé. Il varieavec les options, dont la plus dis-cutable – mais la plus prisée – est laporte vitrée, certes anti-UV, mais pastrès conseillée pour les vins délicats.

La couleur majore le prix, commeles clayettes intérieures coulissantes,à empreintes... et bien entendu l’op-tion « multi-températures ». Il fautcompter environ 5 000 à 6 000 francspour 60 bouteilles ; 8 000 francspour 100 à 150 bouteilles ;12 000 francs pour 200 bouteilles ; etjusqu’à 50 000 francs. Les modèlesles plus intéressants se situent aumilieu de la gamme. Chez Euro-Cave, le plus vendu coûte12 000 francs pour 230 bouteilles... àcomparer à son homologue à9 000 francs pour 90 bouteilles. Anoter aussi un modèle à 4 500 francspour 60 bouteilles chez Idéal Cav.

b Vraies ou fausses caves« améliorées ». Plusieurs tech-niques permettent d’améliorer unecave existante, ou d’aménager unepièce bien isolée, grâce à une instal-lation comme en proposent lesgammes Eurokit et Eurosplit d’IdéalCav. Les premières climatisent seu-lement ; les secondes peuvent ré-chauffer, refroidir et humidifier à lademande (de 14 000 à 28 000 francs).

Plus élaborée, la cave à vins de Vi-

nosafe transforme un local quel-conque en véritable cave : porte cli-matiseur, régulation d’hygrométrie,panneaux d’isolation, groupe de cli-matisation, étagères, etc. Les prixvont de 40 000 francs pour 500 bou-teilles à 100 000 francs pour 3 000bouteilles, mais porte ou climatiseurpeuvent s’acheter séparément.

Il tolère le béton(bien sec), mais exigeune températurede 13o C, constante,et surtout... silenceet obscurité

b Les vraies caves « ajoutées ».C’est la solution par excellence enpavillon. La cave enterrée de Poly-cave s’installe en deux jours, et seprésente sous forme d’un parallélé-pipède enterré et accessible par unetrappe, qu’on peut éventuellementblinder. Les prix vont de 18 000 à68 000 francs environ, pour 450 à2 250 bouteilles. Seules les plusvastes permettent de se tenir de-

bout, mais l’accès aux autres est fa-cilité par un ingénieux tabouret quiglisse sur la poutre porteuse.

Il faut huit jours pour installer laplus inventive de toutes, l’HélicaveHarnois distribuée par Transtherm,qui est constituée par... un escalieren colimaçon modulaire, dontchaque « marche » devient à la foisparoi et espace de rangement. Tousles impératifs exigés par le vin sontréunis, jusqu’au plus délicat : l’aéra-tion basse, qui remonte astucieuse-ment par le noyau de l’escalier. Plusde 10 000 de ces caves ont déjà étéinstallées en France, pour 50 000 à150 000 francs environ, les plus pe-tites tournant dans un puits cir-culaire de 2 mètres de diamètre, lesplus grandes dans un ovale de4 × 2,27 mètres.

Marcel Donzenac

. EuroCave : 81, boulevard de Sta-lingrad 69100 Villeurbanne. Idéal Cav : 5, rue du Général-Clergerie, 75116 Paris. Polycave : ZA des Quatre-Na-tions, 44360 Vigneux-de-Bretagne. Transtherm : Bercy Expo, 26,avenue des Terroirs-de-France75609 Paris Cedex 12. Vinosafe : BP 5, 68280 Sundhof-fen

Jeuxde mots36 15 LEMONDE

2,23 F la minute

LE CARNETDU VOYAGEUR

a EUROPE. Le Microsoft Auro-Route Express Europe 98, atlasroutier et guide de voyages in-teractif sur Cédérom, permet detrouver le meilleur itinéraire enFrance et en Europe, de choisirun hébergement, d’admirer dessites historiques ou naturels etaffiche des photos de lieux tou-ristiques (199 F).a FRANCE. La SNCF a confiél’essentiel de sa restauration àbord des trains aux Wagons-Lits,filiale du groupe Accor, qui avaitjusqu’à présent 30 % du marchéen concurrence avec Servair, fi-liale d’Air France, (70 %).a ESPAGNE. Situé Plaza de lasCortes, en plein cœur de Madrid,face au Musée du Prado, le Pa-lace Hotel vient de rouvrir sesportes après les plus importantstravaux de rénovation réalisésdepuis sa création en 1912. DeParis, réservations au 0800-90-65-35.

Des aversesLE TEMPS va rester agité en ce

début de semaine : les passagespluvieux seront brefs mais fré-quents. Mardi le vent souffleramoins fort, mais des rafales seproduiront encore. Les tempéra-tures seront dans les normes desaison.

Bretagne, pays de Loire,Basse-Normandie. – Entre lesaverses les embellies seront decourte durée. Le vent de sud-ouestdonnera encore quelques rafalesjusqu’à 60 km/h. Il fera de 12 à14 degrés.

Nord-Picardie, Ile-de-France,Centre, Haute-Normandie, Ar-dennes. – Dans le Nord-Picardieet le nord de l’Ile-de-France,nuages et éclaircies se succèderontavec parfois une averse. Ailleurs,les nuages donneront de fré-quentes averses. Il fera de 11 à13 degrés.

Champagne, Lorraine, Alsace,Bourgogne, Franche-Comté. – Letemps sera changeant toute lajournée, alternant éclaircies etaverses. Il fera de 11 à 14 degrés.

Poitou-Charentes, Aquitaine,Midi-Pyrénées. – Le temps serabien maussade, avec de fréquentspassages pluvieux, parfois ac-compagnés de tonnerre et de gré-sil. Les accalmies seront de courtedurée. En Aquitaine, le vent desud-ouest soufflera jusqu’à60 km/h en rafales. Il fera de 13 à15 degrés.

Limousin, Auvergne, Rhône-Alpes. – Sur le relief, la journéesera médiocre, avec des passagespluvieux ; il neigera au-dessus de1400 m. En plaine, les éclaircies se-ront assez belles le matin, puis leciel se chargera de nuages, et ilpleuvra l’après-midi. Il fera de 13 à15 degrés.

Languedoc-Roussillon, Pro-vence-Alpes-Côte d’Azur,Corse. – Dans le Roussillon etl’ouest du Languedoc, le temps se-ra sec, avec simplement des pas-sages nuageux. Partout ailleurs, lesnuages donneront quelquesaverses, généralement brèves,mais parfois accompagnées detonnerre. Il fera de 17 à 19 degrés.

10o 20o0o

40 o

50 o

Belfast

Belgrade SofiaToulouse

Barcelone

Dublin

Londres

Paris

Lyon

Nantes

Bruxelles

Amsterdam

Liverpool

StockholmOslo

Berlin

Prague

VienneBudapest

Bucarest

Strasbourg

Moscou

Kiev

MadridLisbonne

Séville

Alger

Rabat

Tunis

Berne

Milan

RomeNaples

Athènes

Istanbul

Varsovie

Prévisions vers 12h00

Ensoleillé

Peu nuageux

Couvert

Averses

Pluie

Orages

Brume brouillard

Brèves éclaircies

Vent fort

Neige

PRÉVISIONS POUR LE Ville par ville, les minima/maxima de température et l’état du ciel. S : ensoleillé ; N : nuageux ; C : couvert ; P : pluie ; * : neige.FRANCE métropole AJACCIO BIARRITZ BORDEAUX BOURGES BREST CAEN CHERBOURG CLERMONT-F. DIJON GRENOBLE LILLE LIMOGES LYON MARSEILLE

NANCY NANTES NICE PARIS PAU PERPIGNAN RENNES ST-ETIENNE STRASBOURG TOULOUSE TOURS FRANCE outre-mer CAYENNE FORT-DE-FR. NOUMEA

PAPEETE POINTE-A-PIT. ST-DENIS-RÉ. EUROPE AMSTERDAM ATHENES BARCELONE BELFAST BELGRADE BERLIN BERNE BRUXELLES BUCAREST BUDAPEST COPENHAGUE DUBLIN FRANCFORT GENEVE HELSINKI ISTANBUL

KIEV LISBONNE LIVERPOOL LONDRES LUXEMBOURG MADRID MILAN MOSCOU MUNICH NAPLES OSLO PALMA DE M. PRAGUE ROME SEVILLE SOFIA ST-PETERSB. STOCKHOLM TENERIFE VARSOVIE

VENISE VIENNE AMÉRIQUES BRASILIA BUENOS AIR. CARACAS CHICAGO LIMA LOS ANGELES MEXICO MONTREAL NEW YORK SAN FRANCIS. SANTIAGO/CHI TORONTO WASHINGTON AFRIQUE ALGER DAKAR KINSHASA

LE CAIRE MARRAKECH NAIROBI PRETORIA RABAT TUNIS ASIE-OCÉANIE BANGKOK BOMBAY DJAKARTA DUBAI HANOI HONGKONG JERUSALEM NEW DEHLI PEKIN SEOUL SINGAPOUR SYDNEY TOKYO

11 NOVEMBRE 1997

12/19 P 8/13 P 7/12 P 4/10 N 6/11 P 7/12 P 6/12 P 6/12 N 5/11 P 4/12 P 5/10 P 4/9 P

6/14 N 11/18 P

4/12 P 4/11 P

11/17 P 5/11 P 5/13 P 9/18 N 4/12 P 6/14 P 3/10 N 4/12 P 4/12 P

23/30 P 25/31 P 19/24 S

13/18 P 14/20 S 7/11 P

21/27 N

24/29 S 23/31 S

5/9 P 11/17 S 4/11 S -2/9 S 6/9 P 5/17 S 8/14 N 5/8 N 6/9 P 3/11 S 4/10 S 2/4 C

11/16 S

8/14 P 8/11 P 4/8 N

7/11 P 7/11 P

8/10 N 12/16 P

1/4 C 3/10 S

13/19 N 4/5 P

12/20 N 1/7 S

14/19 S 13/19 N 7/15 N 1/5 P 4/7 C

15/21 S 6/9 N

-3/2 S 25/31 S 13/20 P 20/29 P

10/14 N 5/12 S

19/24 N 13/16 P 14/18 P 0/4 N 3/8 N

12/15 P 6/14 P -1/4 C 4/11 S

14/22 N 26/31 S 24/27 P

16/21 S 14/20 N

15/23 S 19/22 P

16/24 S 12/20 N

25/35 S 27/32 P 26/32 C 24/31 S 24/30 N 22/27 N 16/24 S 15/24 P 12/18 P 8/18 S

27/31 P 21/27 N 14/21 S

11 NOVEMBRE 1997

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LeMonde Job: WMQ1111--0027-0 WAS LMQ1111-27 Op.: XX Rev.: 08-11-97 T.: 17:36 S.: 111,06-Cmp.:10,11, Base : LMQPAG 22Fap:99 No:0237 Lcp: 196 CMYK

27

C U LT U R ELE MONDE / MARDI 11 NOVEMBRE 1997

En 1996 déjà, le gouvernement chinois avait menacé Disney/Bue-navista de représailles économiques pendant le tournage de Kun-dun, le film de Martin Scorsese, réalisé au Maroc où avaient été re-constitués lamaseries et paysages tibétains. La compagnie n’a paspris ces menaces à la légère. Elle engagea aussitôt Henry Kissingercomme conseiller politique. L’ancien secrétaire d’Etat de RichardNixon, âgé de soixante-quatorze ans, particulièrement rompu auxnégociations avec les Chinois, avait été l’un des artisans du rap-prochement des Etats-Unis avec Pékin au début des années 70. « Jen’ai pas de formation politique en ce domaine, a expliqué le PDG deDisney, Michael Eisner, mais j’apprends. Kissinger me dit ce qu’il fautfaire... » Selon la presse américaine, M. Kissinger percevrait 5 mil-lions de dollars en honoraires pour ce job...

Henry Kissinger conseiller spécial de Disney

CINÉMA Agacés par la succes-sion de films antichinois ayant poursujet l’occupation du Tibet, les auto-rités de Pékin ont décidé de sanc-tionner les studios qui les pro-

duisent et les distribuent. b SONY,DISNEY ET MGM sont menacés deboycottage au moment où l’indus-trie cinématographique de Holly-wood s’apprête à partir à la

conquête de l’immense marchéchinois. b PRODUCTEUR de Kundun,de Martin Scorsese, un récit sur lavie du dalaï-lama, Disney, qui a degrands projets de développement

en Chine, est particulièrement visé.Henry Kissinger a été chargé des né-gociations avec Pékin pour lecompte de la major. b L’INDUSTRIECHINOISE du cinéma, en voie de pri-

vatisation, est désormais partagéeentre films de propagande officielset films indépendants qui abordentdes sujets de société, montrés aurécent Festival de Shanghaï.

Le grand marchandage entre Pékin et Hollywood Le gouvernement chinois a décidé le boycottage des studios américains qui produisent des films pro-tibétains.

Au-delà de ce conflit, la Chine et les Etats-Unis se disputent le marché des images le plus prometteur de la planèteLOS ANGELEScorrespondance

Les patrons des studios holly-woodiens seraient-ils plus sen-sibles aux mises en garde chinoisesque ne le laissent supposer leursréactions officielles ? Dix joursaprès l’annonce du boycottage parPékin de trois grands studios (So-ny, Disney et MGM), l’affairecontinue d’agiter les états-majorsdes compagnies américaines. Elleéclate au moment où les majorsdu cinéma américain, profitant del’ouverture économique de laChine, s’apprêtent à partir à laconquête du marché prometteuren profits faramineux que consti-tue le milliard de spectateurs enpuissance de l’empire du Milieu.La Chine est la « nouvelle fron-tière » de l’industrie cinématogra-phique américaine. Pékin le saitbien, et c’est donc un grand mar-chandage qu’elle vient d’engagerpour tenter d’obtenir le silence deHollywood sur la situation poli-tique en Chine, notamment au Ti-bet occupé.

Trois films ont provoqué l’ire dePékin. Sept ans au Tibet de Jean-Jacques Annaud, Kundun de Mar-tin Scorsese, et Red Corner de JonAvnet, qui ont en commun de dé-fendre le pays du dalaï-lama. Sonyest le distributeur de Sept ans auTibet, de Jean-Jacques Annaud, quiretrace l’histoire de l’alpiniste naziHeinrich Harrer, devenu le précep-teur du dalaï-lama. Le film, quiprésente un portrait édifiant del’ancien SA, puis SS, autrichien,provoque déjà une polémiqueavant sa sortie en France. Ce n’estpas l’« affaire Harrer » qui choquePékin, mais les scènes finales dufilm qui montrent l’invasion dupays par l’armée chinoise.

De son côté, MGM/UA vient desortir Red Corner, avec RichardGere dans le rôle d’un entrepre-neur américain à l’assaut du mar-ché des télécommunicationschinoises, et qui se retrouve pris

au piège d’un système judiciaireparticulièrement inique et brutal.De surcroît, Richard Gere, un dis-ciple du dalaï-lama, est à Holly-wood le défenseur le plus actif desdroits du Tibet, et la sortie de RedCorner a coïncidé avec la visite of-ficielle du président Jiang Zeminaux Etats-Unis. La MGM a résistéaux demandes de report des offi-ciels chinois. Enfin, le 25 décembreprochain, Disney sortira Kundun,réalisé par Martin Scorsese, sur lavie du dalaï-lama. Ces trois films,selon le mémorandum de Pékin du29 octobre, « attaquent vicieuse-ment la Chine et blessent les senti-ments du peuple chinois ».

« TIBÉTOMANIA »Depuis trois ans, les Chinois ont

ouvert leurs écrans de cinéma àHollywood, avec un quota de dixfilms par an. C’est ainsi qu’ont étédistribués, entre autres grossesproductions américaines, Le Fugi-tif, Le Roi Lion, Forrest Gump,Speed, Die Hard 3, Sur la route deMadison, Waterworld, Toy Story, Ju-manji, Twister, Mission : Impossible,Sabrina, et récemment Space Jamet Le Monde perdu. Mais, visible-ment, les autorités de Pékincraignent beaucoup l’impact desfilms « anti-Chinois » de Holly-wood sur l’opinion publique amé-ricaine et mondiale.

La « tibétomania » est la der-nière cause en vogue à Hollywood,et le sujet est devenu très « ven-deur ». Aux côtés de Richard Gere,Harrison Ford (dont l’épouse, Me-lissa Mathison, a écrit le scénariode Kundun) et Steven Seagal sou-

tiennent activement le leader spiri-tuel tibétain en exil. D’autres filmssur le même sujet sont en prépara-tion. Dans Dixie Cups, Steven Sea-gal interprétera un agent de la CIAen mission auprès de résistants ti-bétains, et les productions Mer-chant Ivory préparent le récitd’une rébellion à Lhassa en 1987.

Quelques semaines avant d’en-treprendre un voyage dans la capi-tale chinoise dont l’importancen’échappe à personne, Jack Valen-ti, le représentant des grands stu-dios, essaie de calmer le jeu. « J’airecommandé à nos compagnies derester calmes et respectueuses de laculture chinoise, en ne cherchantpas la confrontation, déclare-t-il auMonde. Nos studios veulent investiravec leurs partenaires chinois dansdes salles de cinéma qui font défautlà-bas, souhaitent tourner en Chineavec des cinéastes et producteurs lo-

caux, et placer le savoir-fairetechnologique américain. LesChinois sont des entrepreneurs intel-ligents qui comprennent que la coo-pération avec l’industrie américainesera bénéfique pour l’économie ducinéma chinois. » Quant à savoir siHollywood est prêt à négocier, leroublard Valenti s’en tire par unepirouette : « Après tout, nous fai-sons bien des films qui déplaisent auprésident des Etats-Unis, ou à la CIAet au FBI. »

« RÉACTION DISPROPORTIONNÉE »Le producteur Mike Medavoy,

qui est né à Shanghaï et va bientôtdistribuer le film chinois de propa-gande Red River Valley – l’histoired’une incursion... britannique auTibet en 1904 –, fait une analysetrès « réaliste » de l’affaire : « LesChinois, dit-il, ont une réaction dis-proportionnée. Un studio ne peut

pas se laisser dicter le contenu deses films, et comme Hollywood s’in-téresse principalement à l’argent, siun film doit en rapporter, ils le fe-ront de toute façon. Car il ne fautpas oublier que les studios gagnentplus d’argent en dehors de la Chinequ’à l’intérieur. Pour le moment. »

On est plus inquiet chez Disney/Buenavista. Des trois majors, quitoutes affirment que les affairescontinuent (« business as usual »),c’est elle qui joue le plus gros. Sonchiffre d’affaires à l’étrangers’élève à 1,09 milliard de dollars(6 milliards de francs environ), leplus élevé de tous les studios hol-lywoodiens. Disney a déjà ouvertune succursale en Chine, y vendson merchandising, y produit(avec la chaîne américaine ABC,dont elle est le propriétaire) desprogrammes pour enfants, desémissions de sports, et projetted’ouvrir un Disneyland près deShanghaï. C’est dire l’importancede l’enjeu.

« Nous devons traiter ce pro-blème avec beaucoup de tact, a ex-pliqué, visiblement embarrassé,Michael Eisner, PDG de Disney,conseillé par l’ancien secrétaired’Etat Henry Kissinger, sur lachaîne PBS. Mais notre compagniene prend pas de position sur lesdroits de l’homme. Nous faisons ducinéma, nous produisons du spec-tacle... Martin Scorsese a pris uneposition. Mais je ne sais pas si elleest correcte ou non. » Et pour ache-ver de rassurer ses partenaires dePékin, il ajoute sans craindre deminimiser le message du réalisa-teur américain : « Les Chinoiscomprendront. Dans notre pays,quand on sort un film, on en parlebeaucoup pendant six secondes, et ila disparu trois semaines après. »Ainsi annoncée, une telle cam-pagne de lancement a un parfumde boycott... par son propre distri-buteur.

Claudine Mulard

Du dernier « nanar » idéologiqueau « Roi Lion » en CD vidéo

PÉKINde notre correspondant

Il n’y a pas besoin de déambulerlongtemps dans les villes de Chine,même les plus petites, pour avoirune idée des rapports ambigus quele pays entretient avec la machinede production hollywoodienne etavec ses imitations asiatiques (enprovenance de Taïwan, de Hong-kong, de la Corée du Sud ou du Ja-pon). Ici, le cinéma officiel diffusepour un maigre parterre de specta-teurs fatigués le dernier « nanar »idéologique à la gloire d’un hérosdu Parti communiste. Ce cinéma-là, coûteux, essentiellementcomposé de superproductionssubventionnées par le régime, esten faillite non déclarée (lire ci-contre).

Ailleurs (généralement plus prèsdu marché de nuit), la boutiqueprivée de projections vidéo faitsalle comble avec de mauvais filmsde guerre, policiers ou sentimen-taux – dans certains cas avec unzeste de très gentilles scènes decharme discrètement vantéescomme « pornographiques » par lacaissière, complice. Les amoureux,les traîne-savate, les combinardsdu système économique parallèles’y retrouvent plutôt pour passerun moment ensemble que pourdes raisons cinéphiliques.

LE FRISSON DE LA CONTREFAÇONMais il est un domaine où ces

deux segments sociaux se re-trouvent : le film familial, et depréférence la toute dernière nou-veauté disponible. Le Roi lion desstudios Walt Disney était dispo-nible en Chine en CD vidéo avantmême sa sortie mondiale. Il y avait,pour les consommateurs de cescopies pirates, le frisson de lacontrefaçon devançant le produit

authentique... D’autant plus facile-ment accessible que les « néo-bourgeois » chinois s’équipent àprésent – après le magnétoscope etla hi-fi – du lecteur approprié, fa-briqué désormais en Chine (sous li-cence américaine ou japonaise).

Récemment, une chaîne de télé-vision japonaise, Wo-Wo, essen-tiellement consacrée au cinéma, ettrès populaire auprès des proprié-taires d’antennes de réception sa-tellite (en principe soumises à au-torisation spéciale), a été coupéesans autre forme de procès. On au-rait pu croire à la censure s’il yavait eu motif à censurer. En réali-té, c’était, là aussi, affaire de grossous.

Le conflit Pékin-Hollywood n’apas fait de vagues dans la capitalechinoise, et la presse n’en apresque pas parlé. On voit surtout,derrière cette affaire, se profiler unproblème commercial. La Chine nepeut plus se permettre de repous-ser les productions américaines.Elle ne peut que tenter de défendrepied à pied des intérêts écono-miques en usant de l’arme politico-sentimentale pour acheter au plusbas prix ce qu’elle est contrainte dene pas piller.

La « querelle tibétaine » entrePékin et les trois principaux studioshollywoodiens soupçonnés de sefaire les vecteurs d’une revendica-tion politique antichinoise tombeainsi dans une faille monumentaledu régime : ceux qui s’indignent ducontenu de telles productions sontliés à des entreprises, elles-mêmesla plupart du temps liées auxcaciques politiques, qui produisentle matériel de diffusion des œuvresjugées impropres à la consomma-tion populaire.

Francis Deron

Le cinéma chinois entre censure et privatisation sauvageSHANGHAÏ

de notre envoyé spécialL’annonce des sanctions contre

Sony, MGM et Disney est interve-nue pendant le troisième Festivalinternational de Shanghaï, du24 octobre au 2 novembre. Elle n’apas troublé le déroulement de lamanifestation. Près de trois centsfilms étrangers ont été projetés,soit trois fois plus qu’il n’en est dis-tribué dans toute la Chine chaqueannée. Et les salles qui projetaientdes films américains – y comprisceux des majors visées par le boy-cottage – jouaient à guichets fer-més...

Depuis 1995, seule une petite di-zaine de superproductions holly-woodiennes et de Hongkong sontdistribuées sur le territoire, selonun principe expérimental de par-tage des recettes avec les majors.La quarantaine d’autres filmsétrangers, achetés à un prix forfai-taire, ont une carrière difficile à re-tracer. Quant aux films chinois, leFestival de Shanghaï en montraitcette année près de quarante. On ya vu notamment Red River Valley,superproduction sur le Tibet qui seveut la réplique fanfaronne de laChine aux films réalisés en Oc-cident sur le sujet, et qui ont pro-voqué la colère de Pékin.

On y a vu aussi des choses plusoriginales dont Zhang da chen ren(« Devenir adulte »), premier filmindépendant de Lu Xuechang, quia mis plus de deux ans à trouverune version acceptable pour lacensure. Entre ces deux extrêmes(cinéma de propagande et jeunecinéma flirtant avec les sujets ta-bous de la drogue, du rock ou dusexe), toute une série de films dequalité sur la Chine contempo-raine (comédies urbaines deHuang Jiangxin, l’auteur de Sur-veillance, ou fables des campagnesà la Fan Yue, le réalisateur de Bro-ther Wu Invites God) témoignent

d’un cinéma bien vivant et maîtrede ses moyens artistiques et tech-niques.

Les Américains ont égalementfait leur marché à Shanghaï. La20th Century Fox a acquis les droitsde distribution de son premier filmchinois, La Pierre à l’encre. UnitedArtists et Warner ont de leur côtéacheté chacun un film.

L’industrie du cinéma chinoiseest loin d’être imperméable auxtransformations de l’économie, enproie à une fièvre de privatisa-tions. C’est dans les studios (seizeen Chine : la moitié de réelle im-portance, dont trois grands, Pékin,Shanghaï et Changshun) que leschangements sont les plus specta-culaires. La plupart des films sontcoproduits avec des fonds prove-nant d’entreprises d’Etat auto-nomes officiant dans d’autres sec-teurs : industrie, banque,assurance, restauration.

DEUX MONDES CONTRADICTOIRESLe vétéran Xie Jin a tourné la su-

perproduction Opium War, avec100 millions de yuans rassemblésauprès des sociétés de la nouvellezone industrielle de Pudong àShanghaï, et la bénédiction des au-torités. Guan Hu, un réalisateur devingt-neuf ans, auteur de Dirt(« En marge »), un premier film re-marqué dans les festivals étran-gers, a tourné son deuxième, CelloIn The Cab, grâce à l’argent gagnéen réalisant des publicités ou desclips. Son histoire d’un conducteurde taxi et d’une jeune musiciennedans le Pékin d’aujourd’hui a tou-tefois dû être remontée quatre foispour satisfaire les censeurs.

Ce contexte de privatisationchaotique et d’économie parallèles’accommode mal de l’attentionparticulière réservée aux films parle pouvoir. Surtout que la télévi-sion, dont l’influence dépasse au-jourd’hui celle du cinéma, échappe

aux censeurs, incapables decontrôler la production de télé-films, trop volumineuse et trop ra-pide. Red River Valley fait partiedes films mis en chantier pourexalter le patriotisme : le directeurdu Bureau du cinéma, l’organe res-ponsable notamment de la cen-sure, en a programmé cinquanteen 1996 pour le IXe plan quinquen-nal chinois, de 1996 à 2000. Le filmde Lu Xuechang, Devenir adulte, aété produit avec les moyens dubord par Tian Zhuang Zhuang,qui, un temps interdit de tourneraprès la sortie illicite du Cerf-volantbleu au Festival de Tokyo en 1993,se consacre depuis à aider lesjeunes cinéastes.

Les contradictions entre cesdeux mondes semblent s’exacer-ber. La promotion de la « civilisa-tion spirituelle », chère au chef dela propagande du parti, DingGuangen, bête noire des cinéastes,

est plus que jamais au programme.Sur le mini-marché du film ouvertà l’occasion du Festival de Shang-haï, les professionnels re-connaissent que la fréquentations’est effondrée. La production del’année 1997 devrait tomber endessous des cent films, alorsqu’elle atteignait cent cinquanteles autres années. On signale éga-lement que les succès au box-of-fice des films de propagandetiennent avant tout à l’obligationqu’ont les sections des grandes en-treprises d’Etat d’acheter leur quo-ta de billets. Tiraillés entre plansquinquennaux et capitalisme sau-vage, les réalisateurs chinois pré-féreraient encore une troisièmevoie, celle de Chen Kaige, en trainde finir sa fresque historique Assas-sins, en plein milieu de la Chine,avec de l’argent étranger.

Brice Pedroletti

Une scène de « Sept ans au Tibet », le dernier film de Jean-Jacques Annaud.

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LeMonde Job: WMQ1111--0028-0 WAS LMQ1111-28 Op.: XX Rev.: 08-11-97 T.: 17:38 S.: 111,06-Cmp.:10,11, Base : LMQPAG 22Fap:99 No:0238 Lcp: 196 CMYK

28 / LE MONDE / MARDI 11 NOVEMBRE 1997 C U L T U R E

QUITTANT la banlieue, la voiture roulait lelong des quais vers Paris. Fumées d’usines,éclats de néons, silence. A minuit passé, Ma-cha officiait de sa voix grave sur France-Inter.C’étaient des femmes qui l’appelaient, cettenuit-là. L’une avait fait de la prison, quelquesmois, à cause d’un amour malvenu qui l’avaitembarquée dans de mauvaises affaires. Elleracontait que, depuis, elle vivait recluse, écri-vant. Quand elle parlait de son passé, elle nedisait jamais « la prison », mais « là-bas ».

Une autre, jeune étudiante en faculté, tra-vaille sur les courriers envoyés par e-mail.Elle demandait qu’on lui en envoie pour lesanalyser. Elle n’a pas Internet.

La troisième femme semblait jeune ; elleavait une voix claire – un cristal dans la nuit.Elle s’est présentée : « Je suis comédienne,pour l’instant en tout cas. » Elle n’a pas dit sonnom, elle a parlé de l’argument de la pièce

qu’elle joue en ce moment dans un petitthéâtre parisien de la rive gauche. Un mono-logue sur téléphone portable. Elle semblaitpenser que c’était triste, le portable : ça laissepeu de liberté, c’est un peu ridicule, ça isoleplutôt que ça ne rapproche. Mais non, lui ré-pondait Macha, je suis pour le téléphone por-table, c’est très bien. J’en ai un depuis long-temps, bien avant que ça devienne « d’uncourant navrant » ; ça me permet d’appelerma mère quatre fois par jour ; elle est âgée,et on sait que tout ce qui raccroche à la vieest très important pour les personnes âgées.

A l’autre bout de la ligne, la comédienneécoutait. Elle paraissait calme, mais on sen-tait à quelque léger frémissement qu’ellen’était pas assurée. Macha s’enquit de sonâge : « J’ai quarante-quatre ans. » « C’estétonnant, on ne le croirait pas, à vous en-tendre. » « Je sais », répondit l’inconnue, de

sa voix qui sonnait toujours aussi clair. Et ellerevint à sa pièce : « Je vais vous donner le titre,mais avant, il faut que je vous dise quelquechose : je suis une comédienne bègue, ça vaêtre difficile. La pièce s’appelle La Voix... »Long silence.

Macha attendait la suite, qui est restéelongtemps en suspens, dans la confidence dela nuit. Elle a laissé le temps passer, pour quese raccordent les mots bloqués par les diffi-cultés d’énonciation de la comédienne. Enfin,ils vinrent. Un adjectif : « inhumaine ». « Lavoix inhumaine. » « J’aime beaucoup La Voixhumaine de Cocteau, dit Macha. C’est trèsbeau. » « Oui, répondit la comédienne, maisvous savez, ce n’est pas pour parler de ma pièceque je vous ai appelée. Je cherche un amou-reux. »

Brigitte Salino

Petit théâtre de nuit

DÉPÊCHESa CINÉMA : Chimère, film pour latélévision du dernier spectacle duthéâtre équestre Zingaro de Bar-tabas, a été sélectionné pour lesEmmy Awards qui seront décernésle 24 novembre à New York.Chimère, déjà diffusé sur France 2 etbientôt sur Arte, figure dans la caté-gorie Arts de la scène. Après Mazep-pa et Chamane, Bartabas prépareun nouveau long métrage, dont leshéros seront un vieux clown et soncheval.a MUSIQUE : le projet de contratde James Levine à la tête de l’Or-chestre philharmonique de Municha été provisoirement gelé pour desraisons de coût jugé excessif par leconseil municipal de Munich. Le-vine, cinquante-quatre ans, qui di-rige actuellement le MetropolitanOpera de New York, a été pressentipour succéder à Munich au Rou-main Sergiu Celibidache, mort enaoût 1996. Il a fait savoir qu’il atten-drait la décision finale de la villeavant de s’exprimer.a PHOTOGRAPHIE : le prix Na-dar 1997 de la photographie a étédécerné, le 7 novembre, à l’ouvrageDes années folles aux années noires,la nouvelle vision photographique enFrance, 1920-1940, de Christian Bou-queret (Editions Marval). Le prixNadar, purement honorifique,considéré comme le « Goncourt del’ouvrage photographique », ré-compense chaque année le meilleurouvrage photographique ou illustrépar la photographie, édité enFrance ou en langue française. Didier Levallet, directeur de l’Orchestre national de jazz.

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CONCERTS

Mer.12/Jeud. 20 NOVEMBRE - 20 h 30

J.-M. Fournier Prod.SALLE GAVEAU

Intégrale CHOPINpar

Garrick OHLSSONLoc. : 01-49-53-05-07

LUNDI 17 NOVEMBRE - 20 h 30

SALLE GAVEAU

JUNEANDERSON

sopranoScarlatti - Rossini - DonizettiTél. rés. : 01-49-53-05-07

MARDI 18 NOVEMBRE - 20 h 30

SALLE GAVEAU

BarryDOUGLAS

pianoRécital Beethoven

Tél. rés. : 01-49-53-05-07

MARDI 25 NOVEMBRE - 20 h 30

SALLE GAVEAU

PhilippeBIANCONI

pianoHaydn - Schumann - Liszt

Tél. rés. : 01-49-53-05-07

Luxe et volupté à la Foire des antiquaires de BâleBÂLE

de notre envoyé spécialPour la troisième année consé-

cutive, Bâle accueille le Tefaf (TheEuropean Fine Art Foundation),une émanation du Salon des anti-quités organisé à Maastricht, unedes plus importantes foires dumonde dans cette spécialité. Etpour la troisième année consé-cutive, les habitués de Maastrichttrouvent que sa petite sœur suissepeine à trouver sa spécificité. Pour-tant, l’édition 1997 est de loin lameilleure des trois. Disparus, lescoucous et autres meubles paysanshelvétiques peints qui, si sympa-thiques qu’ils soient, juraient unbrin face aux commodes Louis XV.Renforcée, la section des antiquitéségyptiennes, gréco-romaines, maisaussi pré-colombiennes et asia-tiques.

Avec cent trente exposants seule-ment, répartis sur trois étages, ceSalon est aux antipodes desgrandes machines à broyer le visi-teur et se parcourt comme en flâ-nant, ce qui permet de prendre letemps de se pencher sur la statuetted’une courtisane à peine âgée detrois mille ans ou de méditer face àune figure du Bodhisattva.

« DE VÉRITABLES CONNAISSEURS »Les visiteurs apprécient cette am-

biance presque intime. Eux si stres-sés d’habitude louvoient d’un standà l’autre, se renseignent sur les pro-venances et l’historique des piècesqui les intéressent, et qu’ilsconnaissent parfois presque aussibien que les marchands qui les leurproposent.

En cas de doute, ils peuvent tou-jours faire un saut chez ThomasHeneage, un extraordinaire librairelondonien qui a charrié jusqu’à Bâlequelques tonnes de livres d’art ra-rissimes. Des ouvrages de référencedont le vendeur est capable de vousvanter les qualités, et surtout les dé-fauts, quand il y en a. Bref, un Salontrès professionnel.

C’est d’ailleurs ce qui y attirecette année la galerie Gmurzynska,de Cologne. Elle pourrait semblerdéplacée au milieu des antiquaires.Pourtant, ses expositions sont par-fois dignes de musées, comme celle

qu’elle consacre jusqu’au mois dedécembre aux travaux réalisés parRobert et Sonia Delaunay pourl’Exposition internationale de Paris,en 1937.

A Bâle, elle présente un bel en-semble de Delaunay, mais aussi destableaux d’un niveau très supérieurà ceux qu’elle montre lors des foiresd’art contemporain auxquelles elleparticipe : deux Kandinsky de 1934,par exemple. L’un, Blanc mouve-menté, est un des derniers réalisésau Bauhaus ; l’autre, Entre deux, estun des premiers peints à Paris, où ilétait encore accroché, ces derniersmois, dans une collection privée. Etun Picasso de 1959, un chien dalma-tien devant une armoire difforme,étourdissant de liberté.

« Nous sommes à Bâle à la de-mande des organisateurs du Salonde Maastricht, confie le responsablede la galerie, mais sans réticence : lescollectionneurs qui viennent ici sontde véritables connaisseurs, qui sontcapables d’apprécier ce que nousmontrons, et de se l’offrir. »

C’est vrai qu’ils ont le choix :entre la haute joaillerie, les icônesrusses ou les objets de Fabergé, lesmanuscrits et les incunables, les ar-mures arabes et les pendulesLouis XVI, sans oublier la très re-marquée section consacrée aux artsdéco, il faudrait être difficile – oupauvre – pour ne pas trouver sonbonheur. Même Ernst Beyeler, quivient d’inaugurer sa fondation àproximité (Le Monde, du 21 octo-

bre), est venu en voisin pour pré-senter un choix de céramiques ori-ginales provenant de la successionde Jacqueline Picasso. Des piècesuniques, ou des maquettes, dontcertaines datées de 1947, parmi lespremières qu’il ait réalisées.

LE VILAIN PETIT CANARDUn ensemble remarquable donc,

mais qui, à force de luxe, de calmeet de volupté, pourrait paraître unpeu trop feutré, s’il ne recelait unvilain petit canard : il s’agit d’YvesMikaeloff, autrefois un des meil-leurs spécialistes de tapisseries an-ciennes de Paris, qui a été pris d’uncoup de sang. Il a vendu ses collec-tions et s’est mis à la sculpture et àla peinture. Non, il ne les vend pas,il les fait. Des artistes ratés qui de-viennent marchands, cela s’est vu ;des marchands réussis qui de-viennent artistes, le cas est moinsfréquent. Cela donne un standébouriffant, qui est à la foire deBâle ce que la peinture de Dubuffetest au XVIIIe siècle français.

Outre les œuvres du maître deslieux, on peut y voir une commodeen bronze, fondue à partir d’un ori-ginal calciné par Arman dans lesannées 80, mais aussi, posé à l’hori-zontale sur une palette de chariotélévateur, un charmant tableautinde Martin Drolling (1752-1817), re-présentant La Leçon de dessin. Ouencore six fauteuils attribués à Til-lard, et réalisés vers 1750 : l’un estposé sur une table, l’autre est de

guingois, le troisième de travers, unautre encore est complètement ren-versé.

L’architecte Jean Nouvel avaitpris un parti semblable pour l’ac-crochage de l’exposition « Les An-nées 50 », au Centre Georges-Pom-pidou, et avait transformé le Centrede création industrielle en cauche-mar de brocanteur. Pourtant, le par-ti pris de Mikaeloff est d’une finesseet d’une intelligence extrêmes : sesfauteuils sont vus sous tous lesangles, et se regardent comme dessculptures, qu’ils sont d’ailleurs peuou prou devenus.

Un stand « grunge », au sol debéton brut, mais qui met paradoxa-lement les objets en valeur mieuxque ne le feraient l’écrin d’une boi-serie ou la douceur d’une mo-quette. Malheureusement, lesconfrères de Mikaeloff n’apprécientguère, et parlent de l’exclure de cescénacles internationaux et policésque sont les foires d’antiquités.Tant pis pour eux.

Harry Bellet

. TEFAF Basel 1997, Bâtiment 4,Messeplatz, CH 4021 Bâle. Tél. :(00) 41-61-686-20-20. Jusqu’au16 novembre. Tous les jours, de11 heures à 20 heures, samedi etdimanche de 11 heures à18 heures. Entrée 20 francs suisses(80 francs environ). Catalogue350 pages, 30 francs suisses(120 francs environ).

L’empreinte de Didier Levalletsur l’Orchestre national de jazzL’ONJ et son nouveau directeur en ouverture du Festival de Nevers

GARE DU NORD, à Paris, jeudi6 novembre, 22 heures, Chris Bis-coe et Harry Beckett, les deux Bri-tanniques membres de l’Orchestrenational de jazz (ONJ), arrivent deLondres par l’Eurostar. Ils sont ac-cueillis par Didier Levallet, contre-bassiste, compositeur et nouveauchef de l’ONJ, qui les conduit jus-qu’à un petit hôtel, près de la ruede Tolbiac. Le lendemain matin, illes récupère, direction Louviers(Eure), pour un concert. L’ONJ,souvent considéré comme une ma-chine sompteuse que l’Europe etles Etats-Unis souhaiteraient bienposséder, montre là que le brico-lage et la débrouille ne lui sont pasétrangers.

Et pourtant : une saison de huitmois de concerts ; du temps et unlocal pour répéter – mais c’estdans les bâtiments du « Quai de lagare », près de la Bibliothèque deFrance, promis régulièrement à ladisparition – ; un conseil d’admi-nistration et une administratrice ;un sonorisateur et un éclairagisteattitrés ; un budget d’un peu plusde 6 millions de francs, dont letiers provient des recettes propres,le reste de subventions de l’Etat...mais calculé au plus juste. Trouverun chauffeur pour que deux dessolistes puissent se déplacer avecleur matériel dans Paris est déjà uncasse-tête.

DES DÉFISCe problème des moyens, sou-

ligné par les cinq précédents chefs– « on a une Rolls Royce mais pasl’essence pour la faire rouler », di-sait le pianiste Denis Badault –, Di-dier Levallet y reviendra quandl’orchestre aura fini de tourner.Pour l’heure, c’est à la musiqued’exister. Levallet a commencé àcomposer pour la formation débutjuillet. L’orchestre s’est mis enplace en septembre, a eu trois se-maines de répétitions pour un ré-pertoire de près de deux heures,un premier concert à Angers puistrois soirs au Théâtre de la Cité in-ternationale, à Paris, début octo-bre, puis Louviers, Nevers le 11 no-vembre, enfin Limoges le 29, dansle cadre de Jazz en Limousin. Dansle même temps, la matière d’unpremier disque vient d’être enre-gistrée au studio Ferber, à Paris.

On retrouve dans le répertoireplusieurs des préoccupations deLevallet, en plus grand : à la fois lasomme de trente ans de présence

dans les mouvements du jazz enEurope – notamment dans les mu-siques improvisées – et la traduc-tion de son panthéon personnel(Duke Ellington, Charles Mingus etGil Evans au sommet). En si peu detemps d’existence, c’est déjàénorme. Levallet aime souventdire que l’arrangeur-orchestrateur-compositeur doit être un drama-turge. Une suite en trois mouve-ments avec des climats qui sefondent, la présence de DaunikLazro en soliste invité, des mouve-ments orchestraux qui impercepti-blement se superposent, montrentune grande ambition d’écriture quine perd jamais les notions deswing, de partage et d’énergie col-lective qui font qu’un grand or-chestre donne l’envie d’accompa-gner ses envolées.

Au passage, Didier Levallet réus-sit quelques défis qu’il s’était im-posés. Celui de mettre deux batte-ries, celle de Ramon Lopez – uneapproche de percussionniste par-fois – et celle de François Laizeau– un sens du drive exceptionnel,cette poussée du batteur qui faitavancer l’orchestre. Celui de réunirdes musiciens aux références etaux histoires contrastées : EricBarret, saxophoniste lié auxgrands ténors de l’Histoire ; PhilAbraham, tromboniste fou descat ; une jeune génération desconservatoires qui laisse le seul re-cours à la virtuosité au magasindes accessoires, comme le trom-pettiste Nicolas Folmer ou le cor-niste Lionel Surin ; des frondeursqui ont annoncé la nouvelle vague,comme le tromboniste Yves Ro-bert ou la pianiste Sophia Doman-cich ; le saxophoniste Chris Biscoeet le trompettiste Harry Beckett,qui, comme tout bon Britanniquede la génération des années 60,sait tout faire...

A son tour, après François Jean-neau, Antoine Hervé, Claude Bar-thélémy, Denis Badault et LaurentCugny, Didier Levallet fait avancerle langage du grand orchestre. Ilveut d’abord établir l’identité del’orchestre autour de son travail.Trente années de musiques. Il a ac-compagné les solistes américains,a fondé Perception, une formationfree devenue mythique, a travaillétrès tôt sur les cordes– Confluence, Swing String Sys-tem – avant d’y mélanger descuivres dans Générations, quia posteriori annonçait en partie

son ONJ. Homme de terrain, il afondé les Ateliers de Cluny, où, de-puis vingt ans, on repère les créa-teurs du jazz en France ; il en-seigne ; crée avec le saxophonisteSylvain Kassap et Roger Fontanel,le directeur des Rencontres inter-nationales de jazz de Nevers, unemicro-compagnie de disques, Evi-dence. A Nevers, il ouvrira le Festi-val. En marque d’amitié sûrement,de présence surtout, dans un festi-val qui a accompagné sa musiquedepuis sa fondation.

Didier Levallet a été nommépour deux ans – contrairement àses deux prédécesseurs –, avec lapossibilité d’une prolongationd’un an. Dans le nombre chaquejour un peu plus nombreux desprojets pour l’an 2000, celuid’amener cet orchestre au passagedu siècle s’impose déjà.

Sylvain Siclier

. ONJ, en ouverture du Festivalde jazz de Nevers, théâtre munici-pal, le 11 novembre à 20 h 30. Da-nilo Sanchez Quintet au mêmeprogramme. Tél. : 03-86-36-90-16.

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C U L T U R E LE MONDE / MARDI 11 NOVEMBRE 1997 / 29

SORTIR

NEVERS

11e Rencontres internationalesde jazzDevenu un des lieux de lacréation du jazz en France, leFestival de Nevers affirme un peuplus chaque année son choix d’unjazz qui ne se contente pas deregarder vers son passé. Après untour de chauffe avec LuckyPeterson, La Bête à bon dos etDidier Lockwood, le nouvelOrchestre national de jazzdémarrera, le 11 novembre, unesemaine riche en propositionsparmi lesquelles : Joëlle Léandre,Vincent Courtois et Marc Ducreten solo, le collectif Mu, lequartette de Sylvain Kassap, letrio Celea-Liebman-Reisinger, leVienna Art Orchestra, Zot, LaMarmite infernale, Bill Frisell etJoey Baron, L’Effet vapeur,« Sound and Fury » d’EdwardVesala ou le trioRomano-Sclavis-Texier.Du 11 au 15 novembre,renseignements au bureau duFestival face au Théâtre municipal,place des Reines-de-Pologne, 58Nevers. Tél. : 03-86-36-90-16.

RENNES

Stances I et IIde Catherine Diverrès. Lachorégraphe cherche à rompre

avec un certain type despectacles, plutôt « déconstruits »et qui jouent lesnéo-performances. Là, ellepropose de la danse, rien que dela danse, toujours inventée,imprévisible, inconvenante. Etelle-même en scène à démontrerd’une manière mystérieuse que ladanse est une et indivisible...Théâtre national de Bretagne,1, rue Saint-Hélier, BP 675, 35Rennes. Salle Serreau. Jusqu’au15 novembre à 20 heures, le12 novembre à 19 heures. Tél. :02-99-31-12-31. De 65 F à 130 F.

CHAMBÉRY

Le testament d’Ismaïl Zotos de Francesca Lattuada. Enrésidence à Annecy, lachorégraphe italienne, grandevoyageuse, a eu envie pour sanouvelle création de plonger dansla vie de l’anthropologue albanaisIsmaïl Zotoset pour interroger lesrisques de la classification, levouloir tout-comprendre. A voiraussi les 20 et 21 novembre àGrenoble, le 25 à Valence, le 27 àBourg-en-Bresse.Espace Malraux, scène nationalede Chambéry, 67, PlaceFrançois-Mitterrand, Carré Curial73 Chambéry. Le 12 novembre à20 h 30. Tél. : 04-79-85-55-43. 60 Fet 130 F.

Publicité

Le brio de Michel Galabru irradie dans tout PagnolLES MARCHANDS DE GLOIRE, de MarcelPagnol. Mise en scène : Michel Fagadau.Avec Michel Galabru, Jacques Boudet, PierreMeyrand, Pascale Roberts, Javotte Rouge-rie...COMÉDIE DES CHAMPS-ÉLYSÉES, 15, ave-nue Montaigne, 8e. Mo Alma-Marceau. Tél. :01-53-23-99-19. Du mardi au vendredi à20 h 30 ; le samedi à 17 heures et à 20 h 30 ; ledimanche à 15 heures. De 110 F à 250 F. Du-rée : 2 h 30.

Parce qu’elle aborde une actualité irritante– les cuisines et abus de quelques-uns de nosélus –, la pièce de Marcel Pagnol Les Marchandsde gloire est reprise à Paris pour la troisième foisen douze ans, alors qu’elle était, en 1926, lors desa création, tombée à plat, et, ensuite, restée surla touche.

Nommé professeur d’anglais au lycéeCondorcet, Pagnol, en 1925 (il a trente ans), ren-contre un journaliste, Paul Nivoix. Pour s’amu-ser, et dans l’idée de gagner trois sous, ilsécrivent à deux un vaudeville pas génial, Tonton,refusé partout à Paris, mais accueilli à bras ou-verts à Marseille. Sur leur lancée, les deuxcompères récidivent : ils bâclent Les Marchandsde gloire. C’est – les massacres de Verdun sont

récents – une charge antimilitariste qui bascule,vers les derniers actes, dans la satire politique.On se partage la besogne : Nivoix écrit les ré-pliques des femmes, Pagnol celles des hommes.

Marcel Pagnol, vers la fin de ses jours, relutcette ancienne pièce. Il la jugea trop carrée. Il laréécrivit. Il n’était pas sûr de lui, il disait, mon-trant sa poitrine : « Me voici cuit jusque-là, suis-jeencore bon à grand-chose ? C’est la boule de feu,au centre de la Terre : elle nous cuit tous, çacommence par la plante des pieds, et ça grimpe !Je ne suis pas grand, je suis cuit aux trois quarts. Al’Académie, le jeudi, je suis assis près de Weygand :lui, c’est le gabarit junior, il m’arrive à la ceinture,il est cuit entièrement ! Jusqu’à l’occiput ! Toutcramé ! » Pagnol, quoique cuit aux trois quarts,améliora nettement ses Marchands de gloire,mais ne parvint pas, en 1963, à la faire jouer.

MISE EN SCÈNE ÉNERGIQUELa pièce ne fut reprise qu’en 1984, dans une

excellente mise en scène, simple et directe, deJean Rougerie. Seconde resucée en 1993, bellemise en scène de Jean-Louis Martinelli, où sur-tout un acteur hors pair, Charles Berling, parvintà faire accepter le rôle très tangent de la pièce,celui d’un soldat tenu pour tué au front, quiréapparaît, et va se refaire une santé sur la Côted’Azur.

A présent, Les Marchands de gloire, énergique-ment mis en scène par Michel Fagadau, bénéfi-cient de l’interprétation comme d’habitudeépoustouflante de Michel Galabru. Pagnol avaitété déjà très bien « servi » par Galabru, dans LaFemme du boulanger, mise en scène par JérômeSavary.

L’art de Galabru est insaisissable : il se permetdes gags de prononciation, de grimaces, quisont énormes ; il fait hurler de rire la salle par leseffets les plus gros – à ce point-là, c’est à peine« permis » ; mais plus il force sur le « clow-nesque », plus il exprime, juste au même mo-ment, des finesses, des profondeurs, desnuances du subconscient, et peut-être avanttout des qualités de cœur, dont on ne voit pas,aujourd’hui, quel acteur pourrait en être ca-pable, dans ces couleurs-là. Michel Galabru à luiseul est toute une fête, et la pièce de Pagnol s’enressent.

Aux côtés de Michel Galabru, une équiped’excellents acteurs, au premier rang desquels,très attachant, très juste dans son imaginaire,Jacques Boudet. Bons aussi sont les décors si-gnés de Ghislain Uhry, qui rappellent les inté-rieurs un peu rêvés des derniers portraits deVuillard.

Michel Cournot

GUIDE

FILMS NOUVEAUX100 % arabicade Mahmoud Zemmouri (France,1 h 25), avec Khaled, Cheb Mami,Mouss, Najim Laouriga, Farid Fedjer,Youssef Diawara.La Femme de chambre du Titanicde Bigas Luna (France, 1 h 39), avec Oli-vier Martinez, Romane Bohringer, Aita-na Sanchez Gijon, Didier Bezace, AldoMaccione, Jean-Marie Juan.Hana-bide Takeshi Kitano (Japon, 1 h 43), avecTakeshi Kitano, Kayoko Kishimoto, RenOsugi, Susumu Terajima, Tetsu Wata-nabe, Hakuryu.Imuhar, une légendede Jacques Dubuisson (France, 1 h 22),avec Ibrahim Paris, Mohamed Ixa, Mo-hamed Ichika, Rhali Ixa, Atibou Abou-bacar, Oumou Algabid. Mariande Petr Vaclav (République tchèque,1 h 49), avec Stefan Ferko, Milan Cifra,Radek Holub, Jaroslava Vyslouzilova,Ludmila Krokova, Terza Zajickova-Gry-garova.Ne pas avaler (*)de Gary Oldman (Grande-Bretagne,1 h 59), avec Ray Winstone, CharlieCreed Miles, Laila Morse, Kathy Burke,Edna Dore, Jamie Foreman.The Gamede David Fincher (Etats-Unis, 2 h 08),avec Michael Douglas, Sean Penn, De-borah Kara Unger, James Rebhorn, Car-roll Baker, Peter Donat.Violetta, la reine de la motode Guy Jacques (France, 1 h 32), avecFlorence Pernel, Dominique Pinon, Da-niel Prévost, Eva Darlan, Julien Guio-mar, Chantal Neuwirth.Vive la république ! d’Eric Rochant(France, 1 h 30), avec Aure Atika, An-toine Chappey, Gad Elmaleh, HippolyteGirardot, Atmen Kelif, Florence Pernel.

(*) Film interdit aux moins de 12 ans.

TROUVER SON FILMTous les films Paris et régions sur le Mi-nitel, 3615 LEMONDE, ou tél. : 08-36-68-03-78 (2,23 F/mn).

ENTRÉES IMMÉDIATESLe Kiosque Théâtre : les places du jourvendues à moitié prix (+ 16 F decommission par place). Place de la Ma-deleine et parvis de la gare Montpar-nasse. Du mardi au samedi, de 12 h 30 à20 heures ; le dimanche, de 12 h 30 à16 heures.Boris Godounovde Moussorgski. Solistes, chœur et or-chestre du Théâtre Mariinski de Saint-Pétersbourg, Valery Gergiev (direction),Alexander Adabashian (mise en scène).Théâtre des Champs-Elysées, 15, avenueMontaigne, Paris 8e. Mo Alma-Marceau.Le 10 novembre à 20 heures. Tél. : 01-49-52-50-50. De 60 F à 690 F.Paul WellerBataclan, 50, boulevard Voltaire, Paris11e. Mo Voltaire. Le 10 novembre à20 heures. Tél. : 01-47-00-55-22. 157 F.

REPORTSLa Place du diamantL’adaptation du roman de l’EspagnoleMercé Rodoreda, qui devait être jouéeau Théâtre national de Chaillot du20 novembre au 31 janvier, a été repor-tée en mars 1998, dans la petite salle.Ce report a été ordonné par la commis-sion de sécurité, qui n’autorise pasChaillot à représenter « de manièreconcomitante », Cyrano dans la grandesalle, Dommage qu’elle soit une putaindans la petite salle et La Place du dia-mant dans le grand foyer.Théâtre national de Chaillot, 1, placedu Trocadéro, Paris 16e. Mo Trocadéro.Tél. : 01-53-65-30-00.Margaret PriceLe récital de Margaret Price initiale-ment prévu lundi 24 novembre est re-porté au samedi 10 janvier 1998.Salle Gaveau, 45, rue La Boétie, Paris 8e.Mo Miromesnil. Tél. : 01-49-53-05-07.

RÉSERVATIONSLes Fourberies de Scapinde Molière, mise en scène de Jean-Louis Benoit, avec Philippe Torreton.Comédie-Française, salle Richelieu, 2,rue de Richelieu, Paris 1er. Mo Palais-Royal. Du 22 novembre à juillet. Tél. :01-44-58-15-15. De 70 F à 185 F.Check-upd’Edward Bond, mise en scène de CarloBrandt.Théâtre national de la Colline, 15, rueMalte-Brun, Paris 20e. Mo Gambetta. Du27 novembre au 21 décembre. Le mardià 19 heures, 110 F. Du mercredi au di-manche à 21 heures, de 110 F à 160 F.Tél. : 01-44-62-52-52.La Tête dans les nuagesde Marc Deruelle, mise en scène deJean Bouchaud.Comédie-Française Théâtre du Vieux-Colombier, 21, rue du Vieux-Colombier,Paris 6e. Mos Saint-Sulpice ou Sèvres-Ba-bylone. Du 18 novembre au 21 dé-cembre. Tél. : 01-44-39-87-00. 160 F.Kiyohime Mandara(marionnettes du Japon)par le Dondoro Theater.Maison des cultures du monde, 101,boulevard Raspail, Paris 6e. Mo Raspail.Du 14 au 18 novembre. Tél. : 01-45-44-72-30. De 60 F à 110 F.

DERNIERS JOURS15 novembre :Produire-créer-collectionnerMusée du Luxembourg, 19, rue de Vau-girard, Paris 6e. Mo Luxembourg. Tél. :01-42-34-25-95. De 13 heures à19 heures ; jeudi de 12 h 30 à 21 heures.Fermé lundi. 20 F.16 novembre :Dans la compagnie des hommesd’Edward Bond, mise en scène d’AlainFrançon. Théâtre national de la Colline,15, rue Malte-Brun, Paris 20e. Mo Gam-betta. Mardi à 19 h 30 ; de mercredi àsamedi : 20 h 30 ; dimanche à 15 h 30.Tél. : 01-44-62-52-52. De 110 F à 160 F.

DANS LA JUNGLE DES VILLESde Bertolt Brecht. Mise enscène : Hubert Colas et PhilippeDuclos. Avec Eric Caravacca, Da-niel Martin, Jean-Louis Grinfeld,Nathalie Nambot, AgatheDronne, Jany Gastaldi, NicolasPirson, Nicolas Bouchaud,Vincent Guédon, AntoineRégent, David Gouhier.THÉÂTRE GÉRARD-PHILIPE, 59,boulevard Jules-Guesde, Saint-Denis. Mo Saint-Denis. Tél. : 01-48-13-70-00. Du mardi au samedià 20 h 30, le dimanche à16 heures. Durée : 3 h. 70 F et110 F. Jusqu’au 30 novembre.

Œuvre du jeune Brecht (il avingt-trois ans), Dans la jungle desvilles ne montre pas la jungle, elleest la jungle. Une fois entré, on nepeut plus en avoir de vision glo-bale. Elle offre des trouées de lu-mière subite, de longs tunnels, des

impasses où il faut bien rebrousserchemin. Dans cet enchevêtrement,deux hommes taillent une voiequ’ils se disputent. Un roi de lacombine et un prince de la débine.Une lutte pas vraiment de classe,sans symétrie réelle, où il s’agitd’administrer une leçon à l’autre,de lui faire mal tout en décrochantles étoiles. Chaque scène est unereprise. Un terme qui appartient àla fois à la boxe et au théâtre pourun match qui doit aller jusqu’auK.-O.

A ma gauche, un poids léger,employé de librairie, Garga (EricCaravacca), avec pour capital sajeunesse, sa sœur (AgatheDronne) et sa femme (NathalieNambot). A ma droite, un poidslourd, négociant en bois, Shlink(Daniel Martin), dont tous lescoups se paient au comptant, enbel argent liquide. Leur combat estun commerce. Chacun vend,achète, défend ce qui paraît res-

sembler à sa vie avec un allant quine ressemble en rien aux balance-ments entre le rien et le trop, entremisère et richesse. Tout de même,Shlink a le règlement pour lui.Garga lui dit : « Vous avez installé leFar West. J’accepte le Far West. Vousm’avez écorché la peau par plaisir.Vous ne rembourserez rien avec unenouvelle peau. Je vais faire tablerase avec vous. Œil pour œil, dentpour dent. »

COURSE DE LENTEURS’adressant autant au metteur

en scène qu’au spectateur, Brechtprévenait : « Ne vous cassez pas latête sur les motifs de cette rivalité,participez à l’engagement hu-main. » Participation impossiblesans tentative de décryptage de cequi semble un entrelacs de fablesesquissées et dissoutes à la « vacomme la vie pousse ». Brecht nese soucie pas de morales, mais enesquisse quelques-unes, qu’il

laisse à la discrétion du metteur enscène. C’est pourquoi Dans lajungle des villes exige de celui-ciqu’il se mette à découvert. Uneépreuve redoutable. Philippe Du-clos, prudent, a commandé unenouvelle traduction à Hubert Co-las, qui cosigne finalement le tra-vail. Le mélange de sentences, dejugements crus, de parler de larue, l’inimitable sens du raccourcipoétique de Brecht a été préservé.Mais (est-ce pour donner touteson importance au traducteur-metteur en scène ?) cela se traduitmalheureusement sur scène nonpar le match attendu, mais par unecourse de lenteur, une sorte de re-lais, monotone, entre les adver-saires supposés. La Jungle a été vi-dée de ses cris, de ses paroxysmes,et même le métier d’un DanielMartin ne peut lui rendre sa véhé-mence.

Jean-Louis Perrier

Et le match de boxe n’a pas eu lieu

Mogwai ranime la fée électricitéau dixième Festival des Inrockuptibles

Les groupes scandinaves ont connu le triomphe annoncéPour sa dixième édition, le Festival FNAC-Inroc-kuptibles aura suscité l’engouement d’un publictrès divers dans les différentes salles parisiennes

et régionales qui l’auront abrité. A Paris, malgréquelques défauts d’organisation et problèmesde sonorisation, le public aura pu satisfaire son

goût de la découverte (Lauren Hoffman et Mog-wai) et s’assurer des séductions du son scandi-nave (Jay Jay Johanson et Gus Gus).

Xe FESTIVAL FNAC-INROCKUP-TIBLES, Jim White, BentleyRythm Ace, Lauren Hoffman,Finley Quaye, Mono, Mogwai,Guy Chadwick, Stereophonics,Jay-Jay Johanson, Theo Hakola,Elysian Fields, Luna, Strange-love, Jonathan Fire Eater, Fran-çoiz Breut, Alpha, Embrace, GusGus, Locust, Crustation. La Ci-gale et le Divan du Monde, Paris,les 7, 8 et 9 novembre.

Comme prévu, les Scandinavesont triomphé au cours du Xe Festi-val FNAC-Inrockuptibles : le Sué-dois Jay Jay Johanson, invité demarque, et les Islandais de GusGus, avec leur techno intelligenteet festive. A lui seul, Jay Jay Johan-son a symbolisé la tendance d’uneédition très marquée par les an-nées 70 et le son de Bristol.

Sa voix de crooner chaleureuse,entre Chet Baker et Scott Walker,peut prolonger une chanson a cap-pella quand un synthétiseur tombeen panne. Reste que la mélancoliede son album Whiskey sied plus auspleen domestique, un verre descotch à la main, qu’à la scène, oùelle tarde à griser l’auditeur.

CLINS D’ŒIL Dandy érudit, Jay Jay Johanson

adresse en tout cas des clins d’œilaux musiques de films des an-nées 70 moins appuyés que Monoet son easy listening, qui cite en per-manence Burt Bacharach, compo-siteur considéré comme un monu-ment de ringardise il y a unevingtaine d’années et en passe dedevenir, aujourd’hui, la référencepop suprême. Au point que Locust,au cours de sa soirée samples etdiapos, reprendra Make It Easy OnYourself. Avant de se rendre cou-pable d’une réinterprétation catas-trophique du So What, de Miles

Davis. Les échantillonneurs ont ré-gné au cours de ce festival. Et la sa-tisfaction est venue de Mogwai,quatre jeunes Ecossais souscontrat avec la fée électricité. Cegroupe est l’antithèse de Jay Jay Jo-hanson. Ses instrumentauxn’offrent aucun confort d’écoute àdomicile.

Ils sont captivants sur scène.Mogwai a ouvert une nouvellebrèche dans le mur du son érigéavant lui par Sonic Youth et MyBloody Valentine : des fréquencesbasses de bombardiers, des stri-dences et des larsens – pour unefois contrôlés – agressant le nerfauditif.

Le quartette, qui joue devant unposter de Lady Diana, passe d’uncalme inquiétant à une fureurblanche, sauvage, fascinante. Il re-joint l’axe nippo-américain dubruitisme savant. Révélation dufestival, son déluge sonique aurapermis de rompre brutalement

avec les monotonies électroniques.Après cette bourrasque, il fallut,samedi, les ballades acoustiques deGuy Chadwick, ancien leader deHouse of Love, pour reposer lestympans, prélude à un retour à lapop britannique, ancien cheval debataille des Inrockuptibles. Hélas !les Stereophonics, avec un accentgallois trop fort pour être honnêteet des refrains racoleurs, cultiventles stéréotypes les plus éculés de lapower-pop. Le lendemain, Embracea réédité l’exploit de faire passerOasis pour un groupe avant-gar-diste.

SORTI DE L’OUBLI La sincérité, elle, n’a jamais fait

défaut à Theo Hakola. Le festival aeu le mérite de sortir de l’oubli cetAméricain francophile, ancien lea-der de Passion Fodder qui débutait,samedi à 23 heures, la soirée au Di-van du Monde. Humoriste sombre,Theo Hakola n’a pas dévié de sa

route, tracée dans la poussièred’un folk à velléité punk mené parun violon dingue.

Le même soir, au même endroit,il fallait veiller jusqu’à 3 heures dumatin pour accompagner l’invité-surprise, Strangelove. Six énergu-mènes – dont un batteur qui pour-rait être le père des cinq autres –jouant – et plutôt bien un rock dé-cadent et kitsch.

Aussi perturbé que l’acteur SlimPickens chevauchant la bombedans Docteurr Folamour, le film deStanley Kubrick auquel le nom deson groupe fait référence, le chan-teur androgyne Patrick Duff se jet-tera dans le public dès le premiertitre, Superstar. C’est finalement cemauvais goût, revendiqué et corro-sif, proche de Phantom Of The Pa-radise et de Rocky Horror PictureShow, qui nous aura réconciliésavec les années 70.

Bruno Lesprit

INSTANTANÉ

LAUREN HOFFMANET LES « APPLAUDISSEURS »

Aux habitués du Festival des In-rockuptibles, la frêle silhouette deLauren Hoffman en aura rappeléune autre, révélée, il y a quelquesannées, sur cette scène de La Ci-gale. Le même imposant volumed’une guitare demi-caisse armaitalors P. J. Harvey, comme une mi-trailleuse lourde dans les mainsd’une enfant. L’Anglaise n’étaitque nerfs à vif. Vendredi 7 no-vembre, l’Américaine envoûte enentrelaçant sa rage de ronronne-ments. Sa présence déjà est trou-blante. Un profil aquilin, deslèvres effrontément charnelles.Mais aussi la minceur et le stra-

bisme d’une grande timide. Est-elle pétrifiée par la peur ou l’arro-gance ? A peine le public parisiena-t-il pris le parti de se laisser ber-cer par son murmure fragile,qu’elle le cingle d’un blues âpre.On n’attend pas d’une fille devingt ans l’affirmation decontrastes aussi vifs.

Après la douceur de la Virginienatale, la rude école des clubsnew-yorkais a forgé son caractèreet le répertoire aigre-doux d’unpremier album très recomman-dable, Megiddo. Croisement intri-gant de retenue et d’abandon, desuavité et de sécheresse – commele velouté d’une Suzanne Vega hé-rissé de la hargne d’une Liz Phair–, Lauren poudroie sa six cordes delégèreté acoustique, plaque surson manche des brisures élec-triques.

A ses côtés, un contrebassistestylé et un batteur économe lou-voient entre rondeur et construc-tions anguleuses. Ils savent joueravec drôlerie de leur minimalisme.Une planche à laver, une brosse àcheveux, une poubelle métalliquerythment, par exemple, une coun-try song décalée. Etonnammentmatures, les mélodies séduisentautant que le personnage. Le pu-blic de La Cigale fait un petittriomphe à une inconnue dont onreparlera. Sourire ému ou taquin,elle vante la qualité des « applau-disseurs ». Et confirme sa dualitéprofonde en donnant une versionfiévreuse de Rock Star, titrequ’elle avait transformé quel-ques minutes plus tôt en jazz laid-back.

Stéphane Davet

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K I O S Q U ELE MONDE / MARDI 11 NOVEMBRE 1997

Suédois étroitement surveillésDepuis plusieurs décennies, la police contrôle les activités des citoyens « sensibles », notamment des communistes.

La presse de Stockholm dénonce ses excès de zèle et demande l’ouverture des archives« OUVREZ les archives ! », « Il

est grand temps d’enquêter »,« Contrôler les contrôleurs ». Lapresse suédoise réclame enchœur, depuis quelques jours,que toute la lumière soit faite surcertaines activités de surveillancede la SAPO, l’équivalent de ladirection de surveillance du ter-ritoire (DST) française. A l’originede cette polémique, le sort d’unmenuisier du sud de la Suède.Torsten Leander avait été licencié,en 1979, du Musée de la marine dela ville de Karlskrona, sur la based’informations confidentielles dela SAPO dont il n’avait alors paspu prendre connaissance. Dix-huit ans plus tard est tombée laconfirmation de ce que beaucoup

soupçonnaient à l ’époque :l’employé n’avait été renvoyé quepour ses opinions politiques.Adhérant du Parti communistesuédois, il avait manifesté contreles bombardements américainspendant la guerre du Vietnam.

« Combien de Suédois se sont vurefuser un travail pour une raisoncomparable ? De vieilles infor-mations nuisent-elles encore au-jourd’hui à certaines personnes ? »,s’interroge le quotidien Expressen.C’est notamment pour répondre àces questions que vingt-huit per-sonnalités du monde politique,culturel et des médias ont lancéun appel à la création d’unecommission indépendante. Parégard pour ceux qui « ont souffert

de la surveillance des autorités etde l’enregistrement de leurs opi-nions politiques », écrivent-ilsdans le quotidien Dagens Nyheterdu mercredi 5 novembre.

Les Suédois prirent conscience,en 1973, de l’existence d’un réseaude surveillance des citoyens, avecle dévoilement d’une organisation

secrète parallèle à la SAPO, le Bu-reau d’information (IB). Forméede militaires, elle n’était alorsconnue que d’une poignée dehauts responsables du Parti so-cial-démocrate au pouvoir.

Depuis, aucune enquête indé-pendante n’a établi d’état deslieux des activités des services derenseignement en la matière,alors que la SAPO a toujours l’œilsur des centaines de milliers deSuédois occupant des emplois« sensibles », souligne la presse.

Bien que souhaitée par cinqpartis d’opposition, la créationd’une commission apolitique a,jusqu’à présent, été rejetée par lessociaux-démocrates, au pouvoirencore aujourd’hui, ainsi que par

les conservateurs, tous favorablesà des solutions moins radicales.

« Il est difficile de comprendrepourquoi [ces deux partis] s’op-posent à une radiographie de l’his-toire de la SAPO et de ses archi-ves », commente Aftonbladet,journal pourtant de tendance so-cial-démocrate.

« Ce qui est sûr, c’est que, parcette obstruction, ils donnent ducrédit aux affirmations plus oumoins méchantes quant aux illé-galités que la SAPO auraitcommises avec le consentement deshauts dirigeants politiques »,ajoute-t-il. Expressen croit appor-ter un élément de réponse enestimant que « la génération ac-tuelle des hommes politiques n’en-tretient pas seulement des liensd’amitié avec leurs prédécesseurs,elle éprouve aussi de la loyautévis-à-vis de ce que firent, en ca-chette, les anciens “chasseurs decommunistes” ».

Au passage, le journal relève un« paradoxe » dans l’attitude dugouvernement, qui « appliquechez lui la politique la plus restric-tive en matière d’accès aux archi-ves », tout en militant à Bruxellespour plus de transparence au ni-veau européen. « Pour travaillerde façon efficace, la SAPO devrait,sans doute, garder confidentielleune partie de ses activités »,concède pour sa part Dagens Ny-heter, mais cela crée précisément« le besoin d’un contrôle publicpour garantir » qu’il n’y aura plusd’abus.

Benoît Peltier

www.cyber-rebelles.com Un distributeur d’électroménager lance un site d’initiation au Net pour attirer les femmes

« ET INTERNET sera plus fémi-nin... » D’emblée, le ton est don-né : Cyber Rebelles s’adresse auxfemmes qui résistent à Internet.L’ambition première de ce sitefrançais est de proposer un moded’emploi simple et pratique, dansun style souvent drôle, ressem-blant à celui d’un magazine fémi-nin. Une rubrique destinée auxdébutantes explique le b.a.-ba duNet : comment se connecter, na-viguer sur le Web, utiliser le cour-rier électronique...

Un second volet permet auxplus avancées de découvrir lesautres possibilités du réseau,telles que le dialogue en direct, leson, la vidéo, ou la réalité vir-tuelle. Il propose également desforums, un répertoire de liensavec des sites à contenu culturel,éducatif ou pratique, une ru-brique « Coups de cœur, coupsde griffes », et un courrier deslectrices. L’ensemble est illustréde dessins d’Inès de La Fres-sange.

Cyber Rebelles a été créé parune fondation dépendant de la

société Boulanger, qui distribuedes appareils électroménagers, etaime à se définir comme une« entreprise citoyenne », attentiveà la formation et à l’entraide so-ciale. Le raisonnement de départest simple : si, dans l’ensemble,les hommes et les enfants ne se

font pas prier pour s’équiperd’ordinateurs et s’attaquer à In-ternet, les femmes adultes, en re-vanche, sont plus difficiles àconvaincre.

Il faut donc tout faire pour re-médier à cette situation, ce quipermettra du même coup d’appa-

raître proche des préoccupationsdes consommatrices : « Notre ob-jectif est de montrer qu’Internetn’est pas une fatalité à subir », ex-plique Benoît Vermersch, pré-sident de la fondation, et lui-même rétif à l’informatique jus-qu’à une date récente. « Nousvoulons humaniser ce qui apparaîtd’abord trop technique. » Pour at-tirer les apprenties surfeuses, ilcompte sur le bouche-à-oreille :« Il faut pouvoir trouver sur Inter-net ce qu’on ne trouve pas ailleurs.Cyber Rebelles peut aussi être utilesi vous allez à Chartres et que vousvoulez un tuyau pour bien visiter lacathédrale. »

La fréquentation du site est dé-jà très internationale : il attire desvisiteuses de France, de Belgiqueet de Suisse, mais aussi des Etats-Unis, du Portugal, du Japon, deSingapour ou de Pologne. Et, sil’on en croit une rapide étuderéalisée sur le forum de dis-cussion, un cinquième de ces re-belles seraient des hommes.

Judith Silberfeld

SUR LA TOILE

INTERNET SUR LE CÂBLEa Le réseau de télévision par câbledu quartier de Metz-Vallières (Mo-selle) a inauguré, jeudi 6 no-vembre, un service d’accès à Inter-net à haut débit, coûtant 279 francspar mois, dont 90 francs pour la lo-cation du « modem-câble ».L’abonné peut se connecter en uti-lisant un micro-ordinateur, maisaussi un simple poste de télévision,grâce à une télécommande spé-ciale et un clavier sans fil. L’expé-rience devrait être étendue à l’en-semble de la ville de Metz dans lecourant de 1998. – (AFP.)

CHASSE AUX CHARLATANSa Un groupe de travail, mis surpied par diverses agences offi-cielles et associations de consom-mateurs américaines, canadienneset mexicaines, a repéré plus de 400sites Web proposant des remèdesmiracles contre le cancer, le sida,l’arthrite, le diabète, la sclérose enplaques et les maladies du cœur. LaCommission fédérale américainedu commerce leur a adressé descourriers électroniques leur rappe-lant qu’ils devaient apporter lespreuves de l’efficacité de leurs pro-duits et projette de vérifier, dansquelques semaines, si leur contenua été modifié. – (AP.)

DANS LA PRESSE

FRANCE INTERDominique Brombergera L’Algérie est-elle un Etat terro-riste ? Le régime algérien setrouve-t-il derrière les assassinatsattribués aux extrémistes isla-mistes ? S’il faut en croire lesconfidences faites par un mysté-rieux Youssouf Joseph à l’hebdo-madaire britannique The Obser-ver , la réponse ne fait aucundoute. Ce sont les services secretsalgériens qui sont à l’origine dedeux au moins des attentats quiont ensanglanté Paris pendantl’été 95. Leur but, dit-il : dresserl ’opinion publique françaisecontre les islamistes, obtenir unecoopération plus étroite des dif-férents services de police de

notre pays. Ces affirmations nepeuvent pas être prises au piedde la lettre, tout simplementparce que ce Youssouf Josephn’est pas identifié, qu’il est doncimpossible de savoir s’il décritdes faits dont il a eu une connais-sance directe, comme il le dit aujournal, s’il ne fait que rapporterdes rumeurs qui courent depuislongtemps ou s’il ne s’agit pasd’un agent provocateur, destiné àêtre démasqué, ce qui permet-trait de tordre le cou à ces ru-meurs.

LIBÉRATIONJacques Amalrica Que faire face à la catastrophealgérienne ? La question taraudedepuis longtemps déjà laconscience de beaucoup plus de

Français qu’on ne pourrait pen-ser. Mais les réponses n’étaientpas évidentes. Elles ne le sonttoujours pas d’ailleurs, ne serait-ce qu’en raison du contentieuxhistorique qui existe entre laFrance et l’Algérie. Les multiplesassociations et clubs qui se sontentendus pour organiser cettejournée pour l’Algérie n’en four-nissent pas moins un début de ré-ponse en deux parties. Il faut,disent-ils, faciliter l’accueil provi-soire en France des personnes lesplus menacées grâce à une poli-tique de visas spécialement étu-diée pour le cas de l’Algérie, et ilfaut réclamer sans se lasser, etavec une insistance croissante, lacréation d’une commission d’en-quête internationale et son envoisur le terrain.

LCIPierre Luc Séguillona L’intransigeance américaine etla poursuite de l’embargo pétro-lier à l’encontre de l’Irak ne fontque renforcer la mainmise du dic-tateur Saddam Hussein sur sonpeuple et prolonger le martyre dece dernier. La mise en quaran-taine de l’Irak, depuis sept ans,est en effet une escroquerie in-ternationale et un scandale mo-ral. Tant la guerre du Golfe, me-née par les Etats-Unis souscaution onusienne, que les sanc-tions économiques décrétées etmaintenues à l’encontre de l’Irakpar Washington au nom de lacommunauté internationale,n’ont d’autre mobiles que des in-térêts pétroliers et stratégiquesaméricains.

EN VUE

a Après avoir rappelé la tradition(verser l’équivalent de 1 % à 2 %du revenu mensuel, davantage sion le peut) et la parole de saintPaul (« Il ne s’agit pas de vousmettre dans la gêne, mais quechacun donne selon son cœur »),l’Association diocésaine deVersailles vante, dans unebrochure invitant les jeunescatholiques à participer au denierdu culte, le prélèvementautomatique des dons. « C’estsimple, pratique, souple »,explique le dépliant.

a Kenneth Behring,soixante-neuf ans, un hommed’affaires californien « pesant »500 millions de dollars, vientd’offrir 20 millions de dollars à laSmithsonian Institution, le plusgrand musée des Etats-Unis, pourremercier le pays qui l’a renduriche. M. Behring, roi del’immobilier, serait comblé sil’argent servait à la reconstitutiond’un habitat naturel d’animauxsauvages « donnant l’impressiond’être assis autour d’un feu enregardant le soleil se lever, enentendant les cri des bêtes et,même, en sentant les odeurs ».

a Une aquarelle d’Adolf Hitlerreprésentant la ville d’Ypresaprès son bombardement en1916, assez terne selon lesexperts, récemment mise à prix1 000 livres (10 000 francsenviron) à Brigg, enGrande-Bretagne, a atteint4 600 livres, soit près de cinq foisle montant de son estimation. « Iln’y a vraiment aucun moyen dedonner une valeur à ce genre dechose », a déclaré le commissairepriseur Robert Horner.

a Un CD-livre d’Yves Montand,intitulé Plaisirs inédits, vient desortir alors que la justice veutexhumer son corps pour lesbesoins d’une recherche enpaternité. Parmi les dix titresnouveaux et des arrangementsoriginaux, une interprétation dela chanson de Trenet Quereste-t-il de nos amours ?

a Jeudi 6 novembre, à New York,Andre Burgess, dix-sept ans, quiflânait sans le savoir non loind’une voiture de policiersfédéraux en planque, sorttranquillement de sa poche unebarre de chocolat ThreeMusketeers (les TroisMousquetaires), emballée dansdu papier d’argent. Il entendsoudain une voix hurler : « Lâcheton arme ! », aperçoit vaguementun policier fébrile en train dedégainer, regarde son chocolatinoffensif, ne comprend rien,hausse les épaules et s’éloignesans s’émouvoir. « Il ne m’amême pas laissé une chance deréagir », a raconté sur son litd’hôpital Andre Burgess, blesséd’une balle dans le gras de lacuisse.

a Victor Mills vient de mourir àson domicile de Tucson, enArizona, à l’âge de cent ans. Millsétait l’inventeur de lacouche-culotte.

Christian Colombani

Les mots de Simone Lagrange par Alain Rollat

ELLE N’ÉTAIT qu’un témoi-gnage de papier, une archiveclassée, une mémoire déjà ou-bliée. Simone Lagrange a enfinune image, donc un visage, unevoix. Et elle parle. Et ce qu’elleraconte a le poids du cauchemarqui la hante depuis une éternité :« Moi, petite fille de treize ans, jeme suis souvenue surtout de cevoyage dans ce wagon à bestiaux,le 30 juin 1944. Il fallait s’asseoirles jambes écartées pour que lesautres puissent s’asseoir aussi,s’imbriquer en vous. Il y avait desenfants, des vieillards. J’étais avan-tagée parce que je n’étais pas loinde la porte qui donnait un peud’air... » La caméra fixe qui lafilme en plongée, de trois quartsface, la montre en gros plan, de-bout à la barre. Elle devient untémoignage de chair : « Au milieudu wagon, il y avait une tinette, unbidon où tout le monde devaitfaire ses besoins. La pudeur étaitplus forte que maintenant, et il

était très difficile pour des hommeset des femmes de faire leurs be-soins comme ça, devant tout lemonde... »

C’est une femme rousse au re-gard clair, au teint pâle, aux jouesrondes, sans signe particulier.Elle pourrait s’appeler SimoneToutlemonde, comme n’importequelle autre ménagère de cin-quante ans. Elle s’adresse au tri-bunal d’une voix posée. Avec sesmots de tous les jours : « Je mesouviens de ces deux hommes quitenaient des vêtements pour queles premières personnes puissentfaire leurs besoins... » Soudain,elle marque un temps d’arrêt :« C’est très sale, ce que je raconte,mais beaucoup moins sale quel’esprit de ceux qui nous ont en-voyés là-bas... » Elle dit l’indicibleà mots polis : « Le trajet a durécinq jours et quatre nuits. Les en-fants étaient malades, vomissaient,hurlaient. Tous les matins, il y avaitdes morts. Je pense que c’est à ce

moment-là qu’on est devenus, petità petit, des gens différents. Diffé-rents en ce sens que, nos premiersmorts, on les a pleurés ; mais,chaque matin, on était pratique-ment soulagés d’avoir un tout petitpeu de place en plus... On entassaitces morts, comme ça, au fond,pour avoir un peu plus d’air... C’estterrible à dire maintenant, voussavez, mais c’était pourtant vrai.C’était, si vous voulez, le commen-cement de la fin... »

Merci à « Arrêt sur images » età La Cinquième d’avoir diffusé,dimanche, avec l’accord des au-torités judiciaires, et de Mme La-grange, née Kadouche, ce témoi-gnage enregistré pour l’Histoirele vendredi 22 mai 1987 au coursdu procès de Klaus Barbie. Mercipour nos enfants, auxquels nousne savons pas toujours commentdire que le commencement ducrime contre l’humanité n’est ja-mais quelque chose de compli-qué.

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R A D I O - T É L É V I S I O N LE MONDE / MARDI 11 NOVEMBRE 1997 / 31

LUNDI 10 NOVEMBRE

MARDI 11 NOVEMBRE

GUIDE TÉLÉVISION

MAGAZINES

14.00 E Escales francophones.Afriques. La Cinquième

18.30 et 19.10 Nulle part ailleurs. Invités :Aerosmith ; Pierre Palmade ; MichèleLaroque. Canal +

19.00 Envoyé spécial, les années 90.Histoire

19.00 Cap’tain Café. France Supervision20.00 Thalassa.

Des tracteurs sur la mer. TV 5

20.00 20h Paris Première. Paris Première

21.00 Enjeux - Le Point. Recherche sur lesida : cobayes humains africains. TV 5

22.30 Le Droit de savoir. Enquête sur lesmystères de l’assassinat de Yann Piatet du suicide des frères Saincené. TF 1

22.40 D’un monde à l’autre.La justice des mineurs. L’affaireMontand. Invitées : Aurore et AnneDrossard. France 2

0.30 Le Cercle des arts. Anthropologie.Invités : Jean Rouch ; Alain de Botton ;Armelle Aliette... France 2

DOCUMENTAIRES

20.00 Reportage. Le Village des chasseursde cobras. Arte

20.00 Mémoires d’ex. [1/3]. Histoire

20.35 Le Défi alimentaire. Planète

20.55 Paroles d’hommes. Téva

22.25 Dominique Rolin :l’Infini chez soi. Planète

23.45 La Forêt tropicale expliquéeaux enfants. [1/3]. Planète

23.45 Jazz Collection.Count Basie. Muzzik

0.10 Jinebana, la possessionau quotidien. Planète

0.10 Les Seigneurs des animaux.Les cueilleurs de ciel. Disney Channel

0.15 Woodstock Diaries.[1/3]. Canal Jimmy

0.50 La Case de l’oncle Doc.Les Derniers Pirates. France 3

MUSIQUE

21.00 Les Huguenots. Mise en scène de John Dew. Muzzik

23.40 Haendel à Arlon.France Supervision

0.45 Antonin Dvorak :Quatuor no 12. Muzzik

0.55 Jazz 6.Hank Jones & Milt Jackson. M 6

TÉLÉFILMS

20.45 Une femme d’action.De Didier Albert. TF 1

21.55 Un Français libre.[4/4] De Jim Goddard Festival

SÉRIES

18.05 Sliders, les mondes parallèles.Un monde d’exode. M 6

20.55 Urgences.Tribus. Pile ou face. France 2

21.00 Le Caméléon.Un virus parmi nous. Série Club

21.30 New York Police Blues.La nouvelle. Canal Jimmy

22.00 Molière. [3/5]. Histoire

22.00 Daktari.Le voleur d’éléphants. Série Club

22.20 Dark Skies : L’Impossible Vérité.Futur antérieur. TSR

23.00 Félicien Grevèche. Série Club

23.00 Les Anges du bonheur.Un secret bien gardé. Téva

23.10 Murder One :L’Affaire Jessica. TSR

0.00 Département S. Série Club

FILMS DU JOUR13.15 Sois belle et tais-toi a

De Marc Allégret (France, 1958, N.,100 min). Festival

13.45 Les Cousins a aDe Claude Chabrol (France, 1958, N.,110 min). Ciné Cinéfil

14.05 Maniac Cop aDe William Lustig (Etats-Unis, 1987,90 min). Ciné Cinémas

15.35 Ciel rouge aDe Robert Wise (Etats-Unis, 1948, N.,90 min). Ciné Cinéfil

15.35 L’Aveu a aDe Constantin Costa-Gavras (France,1969, 135 min). Ciné Cinémas

17.05 Les Comédiens a aDe Georg Wilhelm Pabst (Allemagne,1941, N., v.o., 110 min). Ciné Cinéfil

17.25 Les Amants de Tolède aDe Henri Decoin (France, 1952, N.,90 min). Festival

17.50 Colonel Blimp a aDe Michael Powell et EmericPressburger (Grande-Bretagne, 1943,v.o., 160 min). Ciné Cinémas

18.15 La Chasse à l’homme aD’Edouard Molinaro (France, 1964, N.,99 min). M 6

18.55 Le Voyage fantastique aDe Henry Koster (Grande-Bretagne,1951, N., v.o., 95 min). Ciné Cinéfil

20.10 La Machine à explorerle temps a aDe George Pal (Etats-Unis, 1960,100 min). Disney Channel

20.30 La Tour de Londres aDe Rowland V. Lee (Etats-Unis, 1939,N., v.o., 95 min). Ciné Cinéfil

20.30 Rendez-vous a aD’André Téchiné (France, 1985,85 min). Ciné Cinémas

20.35 La Grande Attaque du train d’or a aDe Michael Crichton (Etats-Unis, 1979,115 min). TMC

20.35 Green Card aDe Peter Weir (France - Australie,1990, 110 min). TSR

20.45 Sang chaudpour meurtre de sang froid a4 De Phil Joanou (Etats-Unis, 1992,130 min). TF 1

21.55 True Lies, le caméléon aDe James Cameron (Etats-Unis, 1994,v.o., 140 min). Ciné Cinémas

22.05 La Fosse aux serpents a aD’Anatole Litvak (Etats-Unis, 1948, N.,110 min). Ciné Cinéfil

22.20 La Veuve joyeuse aDe Curtis Bernhardt (Etats-Unis, 1952,105 min). France Supervision

22.25 Suspect dangereux aDe Peter Yates (Etats-Unis, 1987,120 min). RTL 9

22.30 Trafic a aDe Jacques Tati (France, 1971, 95 min).

Paris Première22.55 Une étrangère parmi nous a

De Sidney Lumet (Etats-Unis, 1992,105 min). France 2

23.10 Soudain,l’été dernier a a aDe Joseph L. Mankiewicz (Etats-Unis,1960, N., v.o., 110 min). Arte

23.55 The Phantom Light aDe Michael Powell (Grande-Bretagne,1934, N., v.o., 80 min). Ciné Cinéfil

0.05 Le Cri de la soie aD’Yvon Marciano (France, 1995,100 min). Canal +

0.15 L’amourest une grande aventure aDe Blake Edwards (Etats-Unis, 1988,100 min). Ciné Cinémas

0.55 Toi, le venin a aDe Robert Hossein (France, 1958, N.,90 min). RTL 9

1.15 Le Mariagede Chiffon a aDe Claude Autant-Lara (France, 1941,N., 100 min). Ciné Cinéfil

SIGNIFICATION DES SYMBOLES : LES CODES DU CSA :E Signalé dans « Le Monde 4 Accord parental souhaitable

Télévision-Radio-Multimédia ». 5 Accord parental indispensablea On peut voir. ou interdit aux moins de 12 ans

a a Ne pas manquer. 6 Public adultea a a Chef-d’œuvre ou classiques ou interdit aux moins de 16 ansLe Monde publie chaque semaine, dans son supplément daté dimanche-lundi, les pro-grammes complets de la radio et – accompagnés du code ShowView – ceux de la télévisionainsi qu’une sélection des programmes du câble et du satellite.d Sous-titrage spécial pour les sourds et les malentendants.

GUIDE TÉLÉVISION

DÉBATS22.00 Spécial procès Papon.

Histoire

MAGAZINES13.00 Une heure pour l’emploi.

La Cinquième14.00 E Escales francophones.

Le Vietnam. Paris Première17.00 Envoyé spécial, les années 90.

Les fous à Trieste.L’arrivée des Juifssoviétiques en Israël.Les camionneuses. Histoire

18.00 Stars en stock. Gina Lollobrigida.James Cagney. Paris Première

18.30 et 19.10 Nulle part ailleurs. Invités :Albert Jacquard ; Bernard Cathelat ;Marc Lavoine. Canal +

20.30 et 22.30 Téva Interview.Le professeur René Frydman. Téva

20.40 E E = M 6 junior spécial.Les mystères de la forêt vierge. M 6

21.20 Défis. Le programme européenObjectif 1 en Hainaut. RTBF 1

22.35 Bouillon de culture.Le passé d’une espérance. Avec Stéphane Courtoiset Nicolas Werh ; Georges Wayzand ;Roland Leroy ; Roger Martelli. TV 5

22.55 Y a pas photo ! Invités : CyrielleClaire ; Marie-Claire Noah ;Marc Jolivet. TF 1

23.00 De l’actualité à l’Histoire.Un budget de gauche.La francophonie. Histoire

23.15 Nimbus. Antibiotiques :la rébellion des microbes.Invités : Christian Perrone ; DenisCorpet ; Roland Leclerc. France 3

0.10 Capital. La chasse aux trésors. Untrésor dans votre maison. Collections :des tops et des flops. Reliques de stars.L’héritage Tintin. Voitures cultes :gouffre ou bonne affaire ? M 6

0.10 Femmes dans le monde. A travers levoile. Une femme du Sahel. Téva

1.00 Les Grands Entretiens du Cercle.France 2

DOCUMENTAIRES

18.30 Le Monde des animaux.Le Désert de Namibie. La Cinquième

19.00 Carnets de prison. [2/2]. Planète19.00 Sweet Home Chicago. Muzzik

20.10 Des hommes dans la tourmente.De Gaulle versus Pétain. Planète

20.35 La Royal Air Force. [6/8]. Sous lesradars, le Bomber Command. Planète

20.45 La Vie en face.La Saga des Massey Ferguson. Arte

21.25 Animaux imposteurs. Planète

21.40 E Tennessee Williams.Orpheus of the American Stage. Arte

22.25 La Course aux étoiles. Planète

23.25 Le Défi alimentaire. Planète0.20 Madagascar, la parole poème.

Planète1.00 Mercredi, 19-7-61. Arte

SPORTS EN DIRECT

14.00 et 19.30 Tennis. Masters messieursà Hanovre (1er jour). Eurosport

14.55 Football. Coupe de la Ligue :Lorient - Red Star. France 3

16.00 Rugby. Tournée des Springbocks :Barbarians - Afrique du Sud. Canal +

21.30 Boxe. Poids lourds-légers :Dominic Negus - Konstantin Okhrey.

Eurosport2.00 Basket-ball NBA.

Minnesota - San Antonio. Canal +

MUSIQUE

19.15 Beatles Go Baroque. Dir. : Peter Breiner. France Supervision

20.45 Les Inrockuptibles à l’Olympia 96.France Supervision

21.00 Symphonie no 3 de Mendelssohnpar Chailly. Muzzik

21.35 Les Inrockuptibles à la Cigale 96.France Supervision

21.45 Symphonie no 7, de Mahler.Muzzik

23.10 Le Tour d’écrou. Mise en scènede Michael Hampe. Muzzik

0.05 Didon et Enée. Mise en scènede Peter Maniura.

France Supervision

VARIÉTÉS

20.50 Monsieur Montand. France 3

TÉLÉFILMS

18.00 Nord et Sud.De Richard T. Heffron [4/15]. Téva

18.55 Les Rives du paradis.De Robin Davis. Festival

20.30 Marie-Antoinette.De Caroline Huppert. Festival

22.10 Capitaine James Cook.De Gordon Clark [1/4]. Festival

22.35 Rendez-moi mon enfant.4 De François Labonté. M 6

SÉRIES

19.05 Walker, Texas Ranger.Vive les vacances. TF 1

20.00 François Kléber.La Gueule du loup. TV 5

20.45 Murder One : L’Affaire Jessica.Chapitre X. Série Club

20.55 Guerres privées. Pour l’honneur. L’avocat ne désarme pas. Téva

21.30 Twin Peaks. Episode no 5. Série Club

21.45 Docteur Quinn, femme médecin.Les otages. M 6

22.15 Profit.Forgiveness (v.o.). Canal Jimmy

23.00 Les Disparues de l’îleaux mouettes. [4/5] Série Club

23.00 Les Anges du bonheur.Tout est bien qui finit bien. Téva

23.05 Star Trek : la nouvelle génération.Prise de commandement (v.o.).

Canal Jimmy

1.25 Bottom.Burglary (v.o.). Canal Jimmy

PROGRAMMESTÉLÉVISION

TF 119.05 Walker, Texas Ranger.19.50 et 20.40 Météo.20.00 Journal, Coupe du monde 98

passionnément.20.45 Une femme d’action.

Téléfilm de Didier Albert.22.30 Le Droit de savoir.

Enquête sur les mystèresde l’assassinat de Yann Piatet du suicide des frères Saincené.

23.50 Juliette et Juliette aFilm de Remo Forlani.

1.25 TF1 nuit, Météo.

FRANCE 219.20 1 000 enfants vers l’an 2000.19.25 C’est toujours l’heure.19.55 Au nom du sport.20.00 Journal, L’Image du jour,

A cheval, Météo.20.55 Urgences.

Tribus. Pile ou face.22.40 D’un monde à l’autre.

La justice des mineurs.0.10 En fin de compte.0.15 Journal, Météo.0.30 Le Cercle des arts.

Anthropologie.

FRANCE 318.55 Le 19-20 de l’information.20.00 et 22.30 Météo.20.05 Fa si la chanter.20.35 Tout le sport.20.50 Crésus a a

Film de Jean Giono.22.35 Soir 3.23.00 L’Homme à l’imperméable a

Film de Julien Duvivier.0.50 La Case de l’Oncle Doc.

Les derniers pirates.

CANAL +

E En clair jusqu’à 20.3518.30 et 19.10 Nulle part ailleurs.

Avec Pierre Palmade, Michèle Laroque.

20.30 Pas si vite.20.35 Hommes, femmes,

mode d’emploi aFilm de Claude Lelouch.

22.35 Flash infos.22.40 Mona et moi a

Film de Patrick Grandperret.

0.15 Mort subite.Film de Peter Hyams (v.o.).

ARTE19.00 The Monkees.19.30 7 1/2.20.00 Reportage.

Le Village des chasseurs de cobras.20.25 Contre l’oubli, pour l’espoir.20.30 8 1/2 Journal.20.45 La Discrète a a

Film de Christian Vincent.22.15 Kinorama.22.25 Rosine a

Film de Christine Carrière.0.05 Court circuit.0.35 Slacker a

Film de Richard Linklater.

M 619.00 FX, effets spéciaux : la série.19.54 6 minutes, Météo.20.05 Notre belle famille.20.35 Décrochages info, 6 sur 6.20.50 Conan le destructeur.

Film 4 de Richard Fleischer.22.45 Les Séducteurs a

Film de Bryan Forbes, EdouardMolinaro, Dino Risi, Gene Wilder.

0.55 Jazz 6. Hank Jones & Milt Jackson.

RADIO

FRANCE-CULTURE20.00 Les Chemins de la musique.20.30 Agora. Luc Forlivesi.21.00 L’Histoire en direct.

1977-1981 : Les radios libres.22.10 Fiction. Obériou [1/2],23.00 Nuits magnétiques.

Georges Bataille à perte de vue.0.05 Du jour au lendemain.0.48 Les Cinglés du music-hall.

FRANCE-MUSIQUE20.00 Concert.

Festival d’Ambronay. Persée, de Lully.22.30 Musique pluriel.

Œuvres d’Einaudi, Stroppa.23.07 Le Bel Aujourd’hui.

Festival de Hollande 96.

RADIO-CLASSIQUE20.40 Les Soirées.

Federico Garcia Lorca et la musique.Œuvres de Chopin, Debussy, Albeniz,Santa Maria, De Falla, Ravel, Revueltas.

22.40 Les Soirées... (suite).Musiques au temps de Dante.

PROGRAMMESTÉLÉVISION

TF 113.50 Les Feux de l’amour.14.40 Arabesque.15.35 Patinage artistique.16.30 TF ! jeunesse.17.10 Savannah.18.00 Paradis d’enfer.18.30 Mokshû Patamû.19.05 Walker, Texas Ranger.19.50 et 20.40 Météo.20.00 Journal, Résultat des courses.20.45 Sang chaud pour meurtre

de sang froid aFilm 4 de Phil Joanou.

22.55 Y a pas photo !0.25 Le docteur mène l’enquête.1.20 TF1 nuit, Météo.1.30 Reportages.

Les déserteurs de l’école.

FRANCE 213.50 Derrick.14.55 Dans la chaleur de la nuit.15.45 Tiercé.16.00 La Chance aux chansons.16.40 Lucky Luke.

Les Dalton en cavale.18.00 et 22.50 Un livre, des livres.18.05 C’est l’heure.18.50 Qui est qui ?19.20 1 000 enfants vers l’an 2000.19.25 C’est toujours l’heure.19.55 Au nom du sport.20.00 Journal, L’Image du jour,

A cheval, Météo.20.55 Le Choix d’aimer.

Film de Joel Schumacher.22.55 Une étrangère parmi nous a

Film de Sidney Lumet.0.40 En fin de compte.0.45 Journal, Météo.1.00 Les Grands Entretiens du Cercle.

FRANCE 313.30 Les Petites Bonnes.

Téléfilm de Serge Korber.14.55 Football.

Coupe de la Ligue.Lorient - Red Star.

16.55 Minikeums. (Sous réserve.)17.45 Je passe à la télé. (Sous réserve.)18.20 Questions pour un champion.18.50 Un livre, un jour.18.55 Le 19-20 de l’information.20.01 et 22.40 Météo.20.05 Fa si la chanter.20.35 Tout le sport.20.50 Monsieur Montand.22.50 Soir 3.23.15 Nimbus.

Antibiotiques :la rébellion des microbes.

0.10 Magazine olympique.0.40 Rencontres à XV.1.05 New York District.

CANAL +13.35 L’Affaire Angel Harwell.

Téléfilm de Brian Dennehy.

15.05 Les Animaux aux urgences.15.50 Rugby.

16.00 La tournée des Springbocks.Barbarians - Afrique du Sud.

18.00 C Net.E En clair jusqu’à 20.3518.20 Cyberflash.18.30 et 19.10 Nulle part ailleurs.

Invités : Albert Jacquard, BernardCathelat, Marc Lavoine.

20.30 Le Journal du cinéma.20.35 Trois vœux.

Film de Martha Coolidge.22.25 Flash infos.

22.35 Le Cavalier du diable.Film d’Ernest Dickerson.

0.05 Le Cri de la soie aFilm d’Yvon Marciano.

1.45 Surprises.

LA CINQUIÈME/ARTE13.00 Une heure pour l’emploi.14.00 E Escales francophones.

Le Vietnam.14.30 Droit d’auteurs.15.30 Le Diable au corps.

Téléfilm de Gérard Vergez.17.00 Cellulo.17.50 Le Journal du temps.18.00 Artisans du Rajasthan.18.30 Le Monde des animaux.19.00 The Monkees.19.30 7 1/2. Spécial Algérie.20.00 Archimède.20.30 8 1/2 Journal.20.45 La Vie en face.

La Saga des Massey Ferguson.21.35 E Soirée thématique.

Tennessee Williams.21.40 Tennessee Williams.

Orpheus of the American Stage.23.10 Soudain, l’été dernier a a a

Film de Joseph L. Mankiewicz (v.o.).1.00 Grand format.

Mercredi, 19-7-61.

M 613.30 L’Or du fond des mers.

Téléfilm de Dick Lowry.15.15 Commissaire San Antonio,

Béru et ces dames.Film de Guy Lefranc.

17.00 Plus vite que la musique.17.25 Agence Acapulco.18.15 La Chasse à l’homme a

Film d’Edouard Molinaro.19.54 6 minutes, Météo.20.05 Notre belle famille.20.35 Décrochages info.20.40 E E = M 6 junior spécial.

Les mystères de la forêt vierge.21.45 Docteur Quinn, femme médecin.

Les otages.22.35 Rendez-moi mon enfant.

Téléfilm 4 de François Labonté.0.10 Capital. La chasse aux trésors.

RADIO

FRANCE-CULTURE19.45 Les Enjeux internationaux.20.00 Les Chemins de la musique.20.30 Agora. André Comte-Sponville.21.00 Poésie studio.22.10 Mauvais genres.

Catherine Paoletti pour les disquescompacts Dark Wavo.

23.00 Nuits magnétiques.Georges Bataille.

0.05 Du jour au lendemain.0.48 Les Cinglés du music-hall.

FRANCE-MUSIQUE18.36 Scène ouverte.19.30 Prélude.20.00 Concert. Goya, de Prodromidès,

à l’Opéra de Montpellier.22.30 Musique pluriel.

Œuvres de François, De Vienne.23.07 Le Dialogue des muses.

RADIO-CLASSIQUE18.30 Le Magazine de Radio-Classique.19.30 Classique affaires-soir.20.40 Les Soirées.

Daniel Barenboïm et l’Orchestre deParis. Œuvres de Bizet, Vieuxtemps,Saint-Saëns, Wagner, Wolf, Scriabine.

22.25 Les Soirées... (suite).Œuvres de Messiaen, Mozart.

NOTRE CHOIX

b 20.25 ArteContre l’oubli, pour l’espoirLe « petit » magazine (cinq mi-nutes) réalisé en collaborationavec la Fédération internationaledes ligues des droits de l’hommeinvite à découvrir l’immense cou-rage de Salima Ghezali, une Algé-rienne de trente-neuf ans quimène chaque jour dans son paysun véritable combat contre la vio-lation des droits de l’Homme. Fer-vente militante féministe, prési-dente fondatrice de l’Associationpour l’émancipation des femmes,en 1989, cette journaliste engagéea fondé, en 1990, le bimensuel Nys-sa, aujourd’hui disparu, avant dedevenir directeur de publicationde l’hebdomadaire de langue fran-çaise La Nation, interdit depuis unan. Le 23 octobre, le Parlement eu-ropéen lui décernait le prix Sakha-rov. – Pa. L.

b 20.35 M 66 sur 6Dotée d’un titre en forme de clind’œil au défunt magazine de TF 1« 7/7 », cette mini-émission, diffu-sée tous les lundis, est apparue àla rentrée. L’ambition est mo-deste, mais le résultat est efficace.Chaque semaine, la rédaction deM 6 sélectionne dans l’actualité unsujet qui, selon elle, mérite d’êtrecreusé. L’ouverture du marché dutéléphone à la concurrence, laCSG, les 35 heures : les journa-listes disposent de sept minutesseulement pour éclairer le télé-spectateur, à l’aide de courts re-portages, d’interviews, et d’illus-trations schématiques. Présentépar Serge Molitor, ce rendez-vousd’information bénéficie d’unemise en page claire et moderne.Rigoureux et rythmé, il s’inscritdans la lignée des petits modulesspécifiques à la chaîne, et que sonpublic semble apprécier. – S. Ke.

NOTRE CHOIXb 1.00 France 2Les Grands Entretiensdu Cercle :Christian de Portzamparc

Deux ou trois chosesqu’il sait des villes

UN ARCHITECTE PARLE de laville. Laure Adler reçoit Christiande Portzamparc, seul, en face àface, pour un de ces entretiensplutôt « long drink » qui ont rem-placé « Le Cercle de minuit » où laconversation se jouait selon plu-sieurs diagonales. La télévisions’accorde rarement le temps de laréflexion sur un sujet qui pourtantentoure, forme et déforme la viede chacun : la ville, l’urbanisme. Leplus souvent, elle ne souligne queles extrêmes, applaudissant de-vant les monuments nouveaux ous’alarmant des débordements vio-lents que suscite la mauvaise ville,la banlieue.

Homme sincère et architectesubtil, Portzamparc est présent surles deux fronts. Premier Françaisrécompensé par le Pritzker Price, ila joué sa partition dans le registredu modernisme bien tempéré avecla Cité de la musique, à la Villette.Mais il s’est d’abord fait connaîtreavec de simples logements qui, àla fin des années 70, dessinaientun quartier, une rue, une place.Car c’est la ville qui l’occupe.

Son parcours personnel montrecomment : un brin de sociologiedans les quartiers durs de NewYork dans les années 60, unebonne dose d’admiration pour LeCorbusier, architecte et prophète,et tout de suite après l’entrée auxBeaux-Arts, une mobilisation quile conduit, lui et ceux de sa géné-ration, à une critique violente del’enseignement, et à la reconstruc-tion d’une pensée sur la ville, sonhistoire, sa mémoire. Le refus de latable rase, des barres tirées au cor-deau, des grands gestes vides. Unenouvelle vague.

C’est le cinéma, Antonioni, Go-dard, avoue-t-il, qui lui a ouvertles yeux sur les cités sans joie qui,parfois, brûlent de colère. « On neparle jamais de la responsabilitédes architectes », suggère LaureAdler. « Les architectes devraientêtre les premiers à pouvoir direnon », répond celui qui au-jourd’hui, avec d’autres, « ré-pare » les grands ensembles. Etcherche à inventer une nouvellemanière de concilier ordre et ma-jesté de la forme urbaine, surpriseet poésie de la vie urbaine. En sa-chant que l’architecture ne se ré-sume pas à la façade.

Michèle Champenois

FILMS DE LA SOIRÉE20.15 Land and Freedom a a

De Ken Loach (GB - Esp. - All.,1993, 115 min). RTBF 1

20.30 Les Cousins a aDe Claude Chabrol (France, 1958,N., 110 min). Ciné Cinéfil

20.30 Taking Off aDe Milos Forman (Etats-Unis,1971, 95 min). Ciné Cinémas

20.30 Les Pirates du rail aDe Christian-Jaque (France, 1937,N., 85 min). Festival

20.35 Hommes, femmes,mode d’emploi aDe Claude Lelouch (France,1996, 120 min). Canal +

20.35 French Cancan a aDe J. Renoir (Fr., 1954, 110 min). TMC

20.45 La Discrète a aDe Christian Vincent (France, 1990, 90 min). Arte

20.45 Orfeo a aDe Claude Goretta (France,1984, 130 min). France Supervision

20.50 Crésus a aDe Jean Giono (France, 1960,N., 100 min). France 3

21.00 Une femmeest une femme a aDe Jean-Luc Godard (France,1961, 105 min). Paris Première

22.05 Les Quatre Malfrats aDe Peter Yates (Etats-Unis, 1972,v.o., 100 min). Ciné Cinémas

22.05 Horizons lointains aDe Ron Howard (Etats-Unis,1992, 140 min). RTL 9

22.20 Les Comédiens a aDe Georg Wilhelm Pabst(Allemagne, 1941, N., v.o.,110 min). Ciné Cinéfil

22.20 La Loi de la rue a aDe John Singleton (Etats-Unis,1991, 115 min). Canal Jimmy

22.25 Rosine aDe Christine Carrière (France, 1994, 100 min). Arte

22.25 Guêpierpour trois abeilles a aDe Joseph L. Mankiewicz (Etats-Unis,1966, 130 min). TMC

22.40 Mona et moi aDe Patrick Grandperret (France,1989, 94 min). Canal +

22.45 Les Séducteurs aDe B. Forbes, E. Molinaro, D. Risi, G.Wilder (Fr. - It., 1980, 130 min). M 6

22.45 Made in USA a aDe Jean-Luc Godard (France,1966, 85 min). Paris Première

23.00 L’Homme à l’imperméable aDe Julien Duvivier (France, 1956, N., 110 min). France 3

23.45 Trois places pour le 26 a aDe Jacques Demy (France,1988, 100 min). Ciné Cinémas

23.50 Juliette et Juliette aDe Remo Forlani (France,1973, 95 min). TF 1

0.10 Ciel rouge aDe Robert Wise (Etats-Unis, 1948,N., 90 min). Ciné Cinéfil

0.25 La Brigade aDe René Gilson (France, 1974,N., 105 min). RTL 9

0.35 Slacker aDe Richard Linklater (Etats-Unis,1989, 95 min). Arte

1.40 Le Voyage fantastique aDe Henry Koster (Grande-Bretagne,1951, N., v.o., 95 min). Ciné Cinéfil

Page 27: Virginia Tech Scholarly Communication University Libraries · LeMonde Job: WMQ1111--0001-0 WAS LMQ1111-1 Op.: XX Rev.: 10-11-97 T.: 11:00 S.: 111,06-Cmp.:10,11, Base : LMQPAG 21Fap:99

LeMonde Job: WMQ1111--0032-0 WAS LMQ1111-32 Op.: XX Rev.: 10-11-97 T.: 11:00 S.: 111,06-Cmp.:10,11, Base : LMQPAG 22Fap:99 No:0242 Lcp: 196 CMYK

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MARDI 11 NOVEMBRE 1997

(Publicité)

Tirage du Monde daté dimanche 9 - lundi10 novembre : 569 574 exemplaires. 1 3

Boris Eltsine signe deux accords avec Pékin PÉKIN

de notre correspondantLors d’une visite officielle de

deux jours à Pékin, le présidentrusse Boris Eltsine a signé, lundi10 novembre, deux accords : l’unsur la délimitation de la frontièresino-russe, mais qui exclut troisîles disputées , l’autre sur laconstruction d’un gazoduc de3000 kilomètres entre la Sibérie etla Chine dont le financement resteà assurer. Présenté comme de laplus haute importance dans lesrelations entre deux Etats qui ontbesoin de s’affirmer face à Was-hington, ce cinquième sommetsino-russe en cinq ans traduit lapoursuite d’une banale normalisa-tion entre deux grandes puis-sances.

Pékin et Moscou affectent d’yvoir les bases d’un « partenariat

stratégique », symbolisé notam-ment par les achats chinoisd’armements russes (chasseursSukhoi-27, notamment). La Chinepasse pour avoir acquis les com-pétences de nombre de savantsde l’ex-URSS spécialistes dedomaines sensibles : balistique,nucléaire, etc. Il y a peu, Washing-ton s’émouvait de telles transac-tions. Mais le Pentagone sembleparvenu à la conclusion qu’elles neprésentent pas un risque considé-rable, dans l’immédiat à tout lemoins.

JEU DE BALANCEMaintenant que l’idéologie a

disparu des relations entre lesdeux pays, leurs liens seconcentrent principalement dansle domaine commercial. De l’aveumême des Chinois, le « record his-

torique » des échanges atteinten 1993, de 7,7 milliards de dollars(près de 45 milliards de francs,dont une large part en troc) estpourtant retombé à 6,9 milliardsde dollars en 1996 (40 millirads defrancs). La Russie manque de liqui-dités pour acheter comptant lesbiens chinois. Les Chinois seplaignent, pour leur part, de lamauvaise qualité des équipementsrusses.

La Chine a conclu également unaccord théorique pour la construc-tion d’une centrale nucléaire russe.Mais la récente visite du présidentchinois Jiang Zemin aux Etats-Unisa montré qu’après avoir acquisdeux centrales françaises, Pékinétait loin de négliger les apportstechnologiques américains. Deplus, la Chine n’a pas de raisond’apprécier l’exercice auquel vientde se livrer M. Eltsine avec lesJaponais lors d’un sommet nippo-russe en Sibérie, visiblement des-tiné à instaurer un jeu de balancestratégique entre puissances duthéâtre de l’Asie du Nord-Est.

Francis Deron

Kim Phuc devient ambassadrice de la paix pour l’UnescoAUCUN DES PASSAGERS du vol Toronto-Paris

qui s’est posé lundi matin 10 novembre à Roissy nepouvait imaginer que la jeune femme qui allaitaitson bébé dans l’avion recevrait l’après-midi même,dans le grand amphithéâtre de l’Unesco, la plusardente des ovations. Aucun ne pouvait en effetconnaître le passé de la voyageuse, ni soupçonnerun lien entre cette mère attentive et discrète et lapetite fille nue, brûlée par le napalm, que le photo-graphe Nick Ut avait figée dans sa course infernale,en pleine guerre du Vietnam, et transformée àjamais en symbole. Vingt-cinq ans, il est vrai,séparent les deux scènes (Le Monde du 19 août).

Elle arrivait à Paris, étourdie, avec son grand sou-rire et sa peau gondolée, ses migraines obsédantes,un asthme récalcitrant. Fragile, si fragile depuis cebombardement du 8 juin 1972 qui la laissa plusieursmois entre la vie et la mort. Lors d’une cérémonieorganisée en présence de l’ensemble des déléguésdes Etats membres de l’Unesco, Kim Phuc,l’« enfant symbole du Vietnam », devait être nom-mée « ambassadeur de bonne volonté pour uneculture de la paix ». Un titre cher au directeur géné-ral de l’Organisation des Nations unies pour l’édu-cation, la science et la culture, Federico Mayor, qui

n’aura de cesse de rappeler la phrase inscrite dansson acte constitutif : « Les guerres prenant naissancedans l’esprit des hommes, c’est dans l’esprit deshommes que doivent être élevées les défenses de lapaix. »

C’est, au fond, l’engagement de Kim Phuc, qui neveut plus incarner ce symbole de la barbariequ’illustrait avec force le cliché de Nick Ut et qui,aime-t-elle à penser, a peut-être précipité la fin dela guerre au Vietnam. « L’idéal de paix, dit-elle, nesouffre pas qu’on s’appesantisse sur le passé et qu’onrevisite obstinément l’histoire. C’est tous les jours qu’ilse défend, se renforce, se partage. » La fondationqu’elle vient de créer pour venir en aide auxenfants victimes des guerres recevra ainsi le sou-tien de l’Unesco, qui parie sur le rayonnement de lajeune femme pour donner au concept « culture dela paix » une nouvelle visibilité. Quel meilleur mes-sager pour défendre les notions de réconciliation,de pardon et de tolérance que celle qui, confrontéel’an dernier au pilote américain ayant ordonné lebombardement de son village, n’a pas hésité uneseconde à lui ouvrir ses bras ?

Annick Cojean

La Bourse de Tokyo en baisseLA PLACE boursière de Paris était

fermée, lundi 10 novembre. Lesautres Bourses européennes étaientorientées à la hausse à l’ouverture. AFrancfort, l’indice DAX gagnait1,49 % après une heure de transac-tions, et Amsterdam s’appréciait de1,06 %.

Quelques heures auparavant, laBourse de Tokyo avait terminé laséance en baisse de 0,88 %. Elle avaitperdu 4,22 % à la veille du week-end.Les opérateurs continuent à s’in-quiéter de la situation de l’économiejaponaise et de la fragilité du sys-tème bancaire nippon.

Les autres marchés asiatiquesavaient aussi cédé du terrain, lundi.La Bourse de Hongkong avait reculéde 1,11 % en clôture et celle de KualaLumpur (Malaisie) de près de 3 %.

Le won sud-coréen, enfin, victimede nouvelles attaques, était tombé àson plus bas niveau historique faceau dollar.

Sur le marché international deschanges, le dollar se redressait légè-rement face aux monnaies euro-péennes. Il cotait 1,7125 mark et5,7350 francs. Face à la devise nip-pone, le billet vert était très ferme, à123,90 yens.

Claude Allègre est décidé à engager une nouvelle réforme des lycées

Le ministre de l’éducation nationale annonce la tenue d’« un grand colloque » fin novembre JAMAIS EN PANNE d’un chan-

tier, Claude Allègre, ministre del’éducation nationale, de larecherche et de la technologie, aannoncé, dimanche 9 novembresur TF 1, le lancement d’un « grandcolloque national sur les lycées » quidevrait aboutir à une réorganisa-tion de ce « point clé » du systèmeéducatif et des programmes qui ysont dispensés.

Invité de l’émission « Public », deMichel Field, M. Allègre a préciséque ce colloque démarrerait « trèsrapidement, dans quinze jours » etdurerait « deux ou trois mois, peut-être plus ». Le lycée est « le pointcharnière entre l’enseignementsupérieur et l’enseignement obliga-toire jusqu’à seize ans (...), donc ilfaut concevoir les programmes pri-maire-collège ensemble. Et puis il y al’université dans laquelle plus de50 % [des lycéens] maintenant va.Le lycée est la transition. Et du coup,il faut donner au lycée une vocationet voir comment organiser cette tran-sition », a analysé Claude Allègre.

Les enseignants devraient parti-ciper à ce grand colloque, qui tra-vaillera à la fois sur « le plan disci-plinaire, sur le plan régional, puisnational », pour « fabriquer autrechose, qui soit moins cloisonné,moins isolé », selon le ministre. Des« grands noms de la science fran-çaise » seront sollicités, notam-ment pour définir ce que devraientêtre les nouveaux programmes, caril faut arrêter d’« empiler et ne rienretirer ». Georges Charpak, PrixNobel de physique, co-invité del’émission, a estimé, pour sa part,que « l’enseignement des sciencesdans les lycées et dans les grandesécoles [devait] être entièrementrevu ».

Réitérant ses critiques contre leSNES (FSU), principal syndicatd’enseignants du second degré,M. Allègre a estimé que si l’ensei-gnement secondaire était « le sys-tème le plus en panne dans ce pays »– et si l’on admettait « que ce sys-tème avait été cogéré » – la respon-sabilité de la panne revenait « pourau moins la moitié » au SNES. Enrevanche, Claude Allègre n’a pastari d’éloges sur les syndicats del’enseignement primaire, où ilentend « des tas de suggestionspédagogiques intéressantes, inno-vantes ».

En proposant un tel chantier,

M. Allègre n’a pas soufflé mot de laréforme des lycées décidée lorsqu’ilétait conseiller aux universités deLionel Jospin, alors lui-mêmeministre de l’éducation nationale.

REFONTE DES PROGRAMMESMise en œuvre par Jack Lang et

poursuivie par François Bayrou,cette réforme, qui avait pour objec-tif de simplifier les filières du lycéeet de mieux les « typer », s’estappliquée pour la classe de secondelors de l’année scolaire 1992-1993.Elle a abouti, progressivement, à laréforme du baccalauréat, effectivepour la première fois lors de la ses-

sion 1995. Parallèlement, une largerefonte des programmes avait étéengagée par Lionel Jospin, par lebiais de nombreux colloques régio-naux, aboutissant à un colloquenational.

Dans sa charge contre le seconddegré, Claude Allègre n’a pas, nonplus, soufflé mot du collège, auquelLionel Jospin s’était gardé de tou-cher, et que François Bayrou n’aréformé qu’à la marge. Il n’a rien ditde l’enseignement professionnelqui compte près de 1 900 lycées etprès de 700 000 élèves au total.

Béatrice Gurrey

« Le Monde de l’éducation » de novembrea L’Histoire est le thème du dossier central du Monde de l’éducation,

de la culture et de la formation de novembre, dirigé par Jean-NoëlJeanneney. Sous sa direction, Emmanuel Laurentin (« La fièvre hexago-nale »), Pierre Vidal-Naquet (« Tu ne jugeras point »), Jean Lebrun(« Sources de malentendus »), Gérard Noiriel (« Les pairs dansl’impasse »), Christian Amalvi (« Des luttes passées faisons table rase »),Isabelle Veyrat-Masson (« Concubinage médiatique ») parlent du besoind’histoire. Ce dossier comprend un entretien entre Jean-Luc Godard etGilles Perrault.

Egalement au sommaire : « Les douze travaux d’Allègre », une enquêtesur les musées et un débat autour « des menaces libérales sur l’école ».

. Chez les marchands de journaux : 28,00 F.

Le fil de la baïonnettepar Pierre Georges

TOUT ÉTAIT CALCULÉ, pro-grammé, prêt. Paré pour le lan-cement. Une formidable cam-pagne de publicité, en millionsde francs, après un non moinsformidable investissement, enmilliards de marks. La firmeattaquait sur le créneau despetites voitures. Et quand lafirme s’appelle Mercedes, celafait nécessairement quelquebruit.

Mercedes, en effet, ce n’estpas rien dans l’imaginaire auto-mobile. Du solide, du confor-table, de l’épais. Une belle répu-tation de longévité des véhiculeset de sérieux de l’entreprise.Mercedes – n’était une coursefolle et princière une nuit pari-sienne sous le tunnel de l’Alma àlaquelle même un char n’auraitpoint résisté –, c’est aussi uneimage non usurpée de sécurité.

Patatras ! Voici que la der-nière-née, la petite Mercedes,annoncée comme de Classe A,celle par qui « l’automobile réin-ventait la voiture », vient de subirune sortie de route médiatique.En Suède, au cours d’un essai depresse, le bébé Mercedes n’a passupporté un test assez banal etperversement dit de « la baïon-nette » : deux virages à angledroit, l’un à gauche, l’autre àdroite, à 60 km/h.

Tout cela a été largementraconté. La baïonnette fut fataleà la Classe A qui se retrouva surle toit, journalistes cul par-des-sus tête. Voilà qui ne fait pastoujours de la bonne publicité.La petite Mercedes, haute surpattes, avait tendance à chavirerdans les situations d’urgence.Mercedes l’admit très vite – tou-jours ce fameux sérieux –, maisen soulignant que la mésaven-ture n’était due qu’à un type de

pneumatiques, des Goodyear,trop mous.

Bref, la firme de Stuttgart pro-mit d’y remédier et de doter, àl’avenir, ce bébé mal chaussé depneus plus résistants à l’effort etdu système électronique de sta-bilité (EPS), qui équipe sesainées. Le repentir était sincèreet l’addition salée : 500 millionsde francs en 1998.

Fin du premier épisode. Leconstructeur avait bien réagi etaprès tout, la Classe A n’étaitpas la première automobile, loinde là, à devoir corriger quelquedéfaut de jeunesse imprévu.Tout un système de communica-tion fut donc mis en place pourrassurer la clientèle potentielleet faire comme cela était indi-qué, samedi, dans Le Monde« toute la clarté sur la Classe A ».

hélas, ce bel effort de trans-parence risque d’être réduit ànéant. On vient d’apprendrequ’au cours de tests réalisés àStuttgart par les spécialistes dela firme, la Classe A a récidivé enmatière de culbute. A la vitessede 80 km/h cette fois. Les res-ponsables de Daimler-Benz l’ontadmis. Mais ils se sont refusés àconfirmer l’information donnéepar un quotidien de Stuttgart, leStuttgarter Zeitung, selon lequelle patron du groupe, JuergenSchrempp aurait donné unesemaine aux ingénieurs pourremédier aux défauts de jeu-nesse de la « Baby-Benz ». Fautede quoi il déciderait l’arrêtimmédiat de la production.

Vrai ou faux, on venait dechanger de niveau : à l’essai depresse calamiteux succédait unrisque d’accident industrielmajeur. Car voici Mercedes,maintenant, vraiment sur le filde la baïonnette.