s6 : séries entièresmpstar.lamartin.free.fr/fichiers/matieres-2166... · 2020. 11. 28. · s6 :...

27
S6 : Séries entières I Convergence des séries entières I.1 Définition On appelle série entière toute série de la forme X nN a n z n (a n ) nN étant une suite de nombres complexes et z un nombre complexe (qui va assez vite être restreint à R). I.2 Convergence ponctuelle ; rayon de convergence a. Lemme d’Abel Proposition Soit z 0 C. Si la suite (a n z n 0 ) n0 est bornée, alors, pour tout z C tel que |z |<|z 0 |, la série X n0 a n z n est absolument convergente. Démonstration Il est naturel d’écrire a n z n (le terme général de la série que l’on étudie) à l’aide de a n z n 0 (le terme général de la suite sur laquelle on sait quelque chose). 1

Upload: others

Post on 02-Feb-2021

6 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

  • S6 : Séries entières

    I Convergence des séries entières

    I.1 Définition

    On appelle série entière toute série de la forme∑n∈N

    an zn

    (an)n∈N étant une suite de nombres complexes et z un nombre complexe (quiva assez vite être restreint à R).

    I.2 Convergence ponctuelle; rayon de convergence

    a. Lemme d’Abel

    Proposition Soit z0 ∈ C. Si la suite (an zn0 )n≥0 est bornée, alors, pour toutz ∈ C tel que |z| < |z0|, la série

    ∑n≥0

    an zn est absolument convergente.

    Démonstration Il est naturel d’écrire an zn (le terme général de la série que

    l’on étudie) à l’aide de an zn0 (le terme général de la suite sur laquelle on

    sait quelque chose).

    1

  • séries entières (S6)

    b. Rayon de convergence

    Proposition - Définitions

    Soit∑

    n≥0an z

    n une série entière. Il existe R ∈ R+∪ {+∞} unique tel que :

    • si |z| < R, la série ∑n≥0

    an zn est absolument convergente

    (ce cas ne se produit pas si R = 0)

    • si |z| > R, la série ∑n≥0

    an zn est (très) grossièrement divergente : la suite

    (an zn)n≥0 n’est pas bornée, et donc a fortiori ne converge pas vers 0.

    (ce cas ne se produit pas si R =+∞)

    R est le rayon de convergence de la série entière∑

    n≥0an z

    n .

    D(0,R) est le disque ouvert de convergence de la série entière∑

    n≥0an z

    n .

    Si R =+∞, ce disque ouvert est C. Si R = 0, c’est ;. Sinon, c’est un « vrai »disque.

    Démonstration

    L’unicité est assez simple. Pour l’existence, le lemme d’Abel suggère d’étu-

    dier

    X = {r ∈ R+ ; (anr n)n≥0 bornée}

    Remarques sur la définition On a donc défini le rayon de convergence d’une

    série entière∑

    an zn : c’est l’unique R ∈ [0,+∞[∪{+∞} tel que, si |z| < R,

    la série converge absolument, et si |z| > R, la suite (an zn) n’est pas bor-née.

    On peut formuler cette définition autrement : par exemple, on peut dé-

    cider de définir

    R = Sup({r ∈ R+ ; (anr n)n≥0 bornée})(avec la convention bien évidente que, si l’ensemble n’est pas majoré, sa

    borne supérieure est +∞).Remarque Et si |z| = R ? on ne peut rien dire a priori, tout peut arriver !

    2

  • séries entières (S6)

    c. Méthodes de détermination pratique du rayon de convergence

    Méthode 1. Critère de D’Alembert

    Typiquement utilisé pour la plupart des déterminations de rayons de conver-

    gence dans les énoncés d’écrit. Il faut être bien attentif, lors de la rédaction, à

    n’appliquer le critère de d’Alembert qu’à des séries à termes réels strictement

    positifs.

    Exemples Déterminer le rayon de convergence des séries entières∑ zn

    n!et

    ∑n2zn .

    Méthode 2. Une remarque qui résout tout

    Si on a la chance de trouver un z tel que∑

    an zn converge, mais non absolu-

    ment, ou un z tel que la suite (an zn) soit bornée mais la série∑

    an zn diverge,

    on est sûr que R = .Exemples Déterminer le rayon de convergence des séries

    ∑ znn

    et∑

    (sinn)zn .

    Le critère de D’Alembert leur est-il applicable ?

    Méthode 3. Suites bornées

    Les exercices les plus délicats de détermination de rayons de convergence se

    font en utilisant plutôt les suites bornées et les deux considérations suivantes :

    si la suite (an zn) est bornée, alors |z| R ; si la suite (an zn) est non bornée,alors |z| R.On utilise aussi : si la suite (an zn) converge vers 0, alors |z| R ; si la suite(an zn) ne converge pas vers 0, alors |z| R.

    Exemple : Déterminer le rayon de convergence de∑

    an zn où an est le n-ième

    chiffre du développement décimal dep

    3.

    Exemple : Soit R le rayon de convergence de∑

    an zn . Déterminer en fonction

    de R le rayon de convergence de∑

    a2n zn .

    Il est bon de retenir qu’il n’est jamais nécessaire d’utiliser la convergence des

    séries pour déterminer le rayon de convergence d’une série entière. En revanche,

    il peut s’avérer indispensable d’utiliser les suites bornées.

    3

  • séries entières (S6)

    d. Comparaison de rayons de convergence

    Proposition On note Ra et Rb les rayons de convergence respectifs des sé-

    ries entières∑

    an zn et∑

    bn zn . Alors,

    si an =O (bn),et si an ∼ bn ,

    On peut remarquer que an = o(bn) est un cas particulier de an =O (bn).

    4

  • séries entières (S6)

    II Produit de Cauchy de deux séries absolument conver-

    gentes

    Définition : Soit (un) et (vn) deux suites de nombres réels ou complexes. Le

    produit de Cauchy de la série∑

    un et de la série∑

    vn est la série∑

    wnoù, pour tout n ∈ N,

    wn =n∑

    k=0uk vn−k =

    ∑p+q=n

    up vq

    Proposition : Si∑

    un et∑

    vn sont absolument convergentes,∑

    wn l’est, et

    +∞∑n=0

    wn =(+∞∑

    n=0un

    )(+∞∑n=0

    vn)

    Remarques : Si l’une des deux séries∑

    un et∑

    vn seulement est absolu-

    ment convergente, et si l’autre est convergente,∑

    wn l’est (théorème de

    Mertens, h.p.).

    Si les deux séries∑

    un et∑

    vn convergent, mais pas absolument, alors∑wn peut diverger.

    Application Si (z, z ′) ∈ C2, alors(+∞∑n=0

    zn

    n!

    )(+∞∑n=0

    z ′n

    n!

    )=

    +∞∑n=0

    (z + z ′)nn!

    Un conseil pratique Quand on effectue le produit de Cauchy de deux sé-

    ries, il est conseillé de « faire commencer ces deux séries à 0 » : Si on veut

    faire le produit de Cauchy de∑

    n≥1un par

    ∑n≥2

    vn , on pose u0 = v0 = v1 = 0et on fait le produit de Cauchy de

    ∑n≥0

    un par∑

    n≥0vn .

    5

  • séries entières (S6)

    III Opérations algébrique sur les séries entières

    III.1 Somme, produit par un scalaire

    Proposition

    Soit∑

    n≥0an z

    n et∑

    n≥0bn z

    n de rayons de convergence respectifs Ra et Rb .

    On note ρ le rayon de convergence de la série entière∑

    n≥0(an + bn)zn .

    Alors

    ρ ≥ min(Ra ,Rb)De plus,

    ∀z ∈ D(0,min(Ra ,Rb)) +∞∑n=0

    (an +bn)zn =+∞∑n=0

    an zn +

    +∞∑n=0

    bn zn

    Enfin, si Ra 6= Rb , on a : ρ = min(Ra ,Rb).

    Proposition

    Siλ est un nombre complexe non nul, le rayon de convergence de∑

    n≥0(λan)z

    n

    est égal au rayon de convergence de∑

    n≥0an z

    n .

    6

  • séries entières (S6)

    III.2 Produit de Cauchy de séries entières

    Définition - Proposition

    On considère deux séries entières∑

    n≥0an z

    n et∑

    n≥0bn z

    n de rayons de conver-

    gence respectifs Ra et Rb .

    Définition

    La série entière produit de Cauchy de ces deux séries entières est la série

    entière∑

    n≥0cn z

    n où, pour tout entier naturel n,

    cn =n∑

    k=0ak bn−k

    Proposition Notons Rc son rayon de convergence ; alors

    Rc ≥ min(Ra ,Rb)

    et

    ∀z ∈ D(0,min(Ra ,Rb)) +∞∑n=0

    cn zn =

    (+∞∑n=0

    an zn)×

    (+∞∑n=0

    bn zn)

    Remarque Même si Ra 6= Rb , il se peut que l’on ait Rc > min(Ra ,Rb). Se mé-fier d’une confusion avec 1., donc.

    Remarque Il est déconseillé de faire l’économie de ce résultat en se disant

    qu’on pourra toujours appliquer le produit de Cauchy « général ».

    7

  • séries entières (S6)

    IV Classe d’une somme de série entière

    Dorénavant, on considère des séries entières de la variable réelle : on étudie la

    série de fonctions ∑nφn

    où φn : x 7−→ an xn . La suite (an)n∈N peut être une suite de nombres réels oucomplexes, mais x reste réel.

    IV.1 Rayon de convergence d’une série dérivée

    Proposition Soit (an)n≥0 une suite de nombres réels ou complexes ; les sé-ries entières

    ∑n≥0

    an zn et

    ∑n≥0

    nan zn−1 ont même rayon de convergence.

    Démonstration C’est un exercice intéressant sur les rayons de convergence ;

    le principe en est une croissance comparée : multiplier par n le coeffi-

    cient de zn influe peu sur la convergence, car le terme géométrique zn

    est prépondérant.

    IV.2 Classe de la somme d’une série entière

    Lemme Soit R le rayon de convergence de la série entière∑

    an xn . On sup-

    pose R > 0. Alors la série ∑(x 7→ an xn) converge normalement, donc uni-formément, sur tout segment inclus dans ]−R,R[.

    Proposition On suppose que la série entière∑

    n≥0an x

    n a un rayon de conver-

    gence R > 0. AlorsS : x 7→

    +∞∑n=0

    an xn .

    Alors S est de classe C∞ sur ]−R,R[, et se dérive terme à terme sur cetintervalle : pour tout k ≥ 1, pour tout x ∈]−R,R[, on peut écrire :

    S(k)(x) =+∞∑n=k

    n!

    (n −k)! an xn−k =

    +∞∑p=0

    (p +k)!p !

    ap+k xp

    (toutes ces séries ayant le même rayon de convergence R).

    8

  • séries entières (S6)

    IV.3 Primitivation de la somme d’une série entière

    Proposition On suppose que la série entière∑

    n≥0an x

    n a un rayon de conver-

    gence R > 0. Alors une primitive de S : x 7→+∞∑n=0

    an xn sur ]−R,R[ est

    x 7→+∞∑n=0

    anxn+1

    n +1

    (cette série entière ayant encore pour rayon de convergence R).

    IV.4 Quelques calculs

    Partons d’une série entière simple et plutôt célèbre :

    ∀x ∈]−1,1[+∞∑n=0

    xn =

    On peut dériver ou primitiver autant qu’on veut. Par exemple :

    ∀x ∈]−1,1[+∞∑n=1

    xn

    n=

    ∀x ∈]−1,1[+∞∑n=0

    nxn =

    Et ainsi de suite. . .On prend vite l’habitude de « bricoler » si on n’a pas exacte-

    ment la forme voulue pour les séries entières que l’on veut calculer :

    ∀x ∈]−1,1[+∞∑n=0

    n2xn =

    ∀x ∈]−1,1[+∞∑n=0

    xn

    n2=

    9

  • séries entières (S6)

    Il n’y a pas que la primitivation et la dérivation : les opérations algébriques

    (combinaison linéaire, produit) sont aussi bien utiles. Par exemple, définissons,

    si n ≥ 1,hn = 1+ 1

    2+ 1

    3+·· ·+ 1

    n

    Alors le rayon de convergence de∑

    n≥1hn x

    n est r = et on calcule

    ∀x ∈]− r,r [+∞∑n=1

    hn xn =

    Remarquons que, pour tout n, hn ≥ 1. Donc r ≤ 1 (la série∑

    hn1n diverge gros-

    sièrement, donc 1 n’est pas dans le disque ouvert de convergence). Mais aussi,

    pour tout n ≥ 1,hn ≤ n ×1 = n

    (majoration d’une somme par le nombre de termes multiplié par le plus grand

    d’entre eux). Donc r ≥ 1 (en effet, si |x| < 1, hn xn −−−−−→n→+∞ 0 par croissances com-

    parées, donc |x| ≤ r ).Notons que l’équivalent célèbre hn ∼ lnn n’est pas nécessaire ici : très souvent,la détermination d’un rayon de convergence est assez grossière.

    Posons, pour tout n ∈ N, an = 1 et, si n ≥ 1, bn = 1n

    . On définit aussi b0 = 0. On aconstruit ces deux suites pour avoir, en posant h0 = 0 :

    ∀n ∈ N hn =n∑

    k=0bk an−k

    On peut alors appliquer le théorème sur le produit de Cauchy :

    ∀x ∈]−1,1[+∞∑n=1

    hn xn =

    (+∞∑n=0

    bn xn)(+∞∑

    n=0xn

    )d’où

    ∀x ∈]−1,1[+∞∑n=1

    hn xn = − ln(1−x)

    1−x

    10

  • séries entières (S6)

    IV.5 Sur le bord

    Les résultats vus dans cette section sont énoncés sur ]−R,R[, où R est le rayonde convergence de la série entière. Si R =+∞, c’est parfait. Sinon, en−R et en R,tout peut arriver, on ne peut rien dire de général. Le résultat suivant n’est plus

    au programme, mais comme il est simple et utile, mieux vaut le comprendre :

    Proposition Si le rayon de convergence de∑

    an xn est R, si R ∈]0,+∞[, et si∑ |an |Rn converge, alorsS : x 7−→

    +∞∑n=0

    an xn

    est continue sur [−R,R].Démonstration

    Définissons φn sur [−R,R] par

    φn : x 7−→ an xn

    Alors ‖φn‖∞ = |an |Rn . L’hypothèse fait qu’alors ∑φn converge normalementsur [−R,R], donc uniformément, or les φn sont continues. . .

    Mais attention : si on veut dériver, il faut se replier prudemment sur ]−R,R[.Par exemple,

    x 7−→+∞∑n=1

    xn

    n2

    est continue sur [−1,1], mais est C∞ sur ]−1,1[ seulement.

    11

  • séries entières (S6)

    V Fonctions développables en série entière

    V.1 Fonction développable en série entière

    a. Définition du programme

    Soit r > 0, f une fonction à valeurs réelles ou complexes définie au moins sur]−r,r [ ; on dit que f est développable en série entière sur ]−r,r [ lorsqu’il existeune série entière

    ∑n≥0

    an xn de rayon de convergence au moins égal à r telle que

    ∀x ∈]− r,r [ f (x) =+∞∑n=0

    an xn

    b. Autres définitions assez compréhensibles

    On dit parfois que f est développable en série entière, ou développable en série

    entière au voisinage de 0, lorsqu’il existe r > 0 tel que f soit développable ensérie entière sur ]− r,r [.On dit que f est développable en série entière au voisinage de a lorsque la fonc-

    tion h 7→ f (a+h) est développable en série entière au voisinage de 0, c’est à direlorsqu’il existe r > 0 et une série entière ∑

    n≥0an x

    n de rayon de convergence au

    moins égal à r telle que

    ∀x ∈]a − r, a + r [ f (x) =+∞∑n=0

    an(x −a)n

    V.2 Stabilité par combinaison linéaire et produit

    Proposition

    Une combinaison linéaire de fonctions développables en série entière

    sur ]− r,r [ l’est. Démonstration : Il suffit d’appliquer III.1.Proposition

    Un produit de fonctions développables en série entière sur ]− r,r [ l’est.Démonstration : Il suffit d’appliquer III.2.

    12

  • séries entières (S6)

    V.3 Stabilité par dérivation et primitivation

    Proposition

    La dérivée d’une fonction développable en série entière sur ]− r,r [ l’est.Démonstration : Il suffit d’appliquer IV.2.

    Proposition

    Toute primitive d’une fonction développable en série entière sur ]− r,r [l’est. Démonstration : Il suffit d’appliquer IV.3.

    V.4 Condition nécessaire; série de Taylor

    Constatons d’abord que pour que f soit développable en série entière sur

    ]− r,r [, il est nécessaire qu’elle soit de classe C∞ sur cet intervalle.

    Définition Soit f une fonction d’une variable réelle, à valeurs réelles ou

    complexes, de classe C∞ au voisinage de 0 (i.e. de classe C∞ sur au moinsun certain intervalle ]−δ,δ[, δ> 0). On appelle série de Taylor de f la sé-rie entière ∑

    n≥0

    f (n)(0)

    n!xn

    Proposition (condition nécessaire et unicité)

    Si f est développable en série entière sur ]−r,r [ (r > 0), elle est de classeC∞ sur ]− r,r [ et somme de sa série de Taylor sur cet intervalle (cettesérie de Taylor a donc un rayon de convergence au moins égal à r ).

    Il y a donc unicité du développement en série entière si il existe.

    Simple mais important ! « par unicité du développement en série entière »

    sera un argument fréquemment utilisé.

    On sait déjà que si f est développable en série entière sur ]− r,r [ (r > 0),

    13

  • séries entières (S6)

    elle est de classe C∞ sur ]− r,r [. Ecrivons alors

    ∀x ∈]− r,r [ f (x) =+∞∑n=0

    an xn

    Alors, par IV.2., on peut dériver terme à terme : pour tout k ≥ 0, pour toutx ∈]− r,r [,

    f (k)(x) =+∞∑n=k

    n!

    (n −k)! an xn−k

    et donc f (k)(0) = k ! ak . C’est bien ce qu’on voulait :

    ∀k ≥ 0 ak =f (k)(0)

    k !

    Proposition (unicité du d.s.e.) Si

    ∀x ∈]− r,r [ f (x) =+∞∑n=0

    an xn =

    +∞∑n=0

    bn xn

    (on suppose r > 0, et on suppose que les rayons de convergence de cha-cune des séries sont ≥ r ), alors

    ∀n ∈ N an = bn = f(n)(0)

    n!

    C’est juste une réécriture de ce qui précède.

    Un exemple montrant que la condition n’est pas suffisante

    x 7→ exp(−1

    x2

    )prolongée par continuité en 0, est de classe C∞ sur R. Sa série de Taylora un rayon de convergence infini.

    Et pourtant la fonction n’est pas développable en série entière.

    Notons en effet f cette fonction. On a vu (fin de C3) que f était de classe C∞, etque, pour tout k ∈ N,

    f (k)(0) = 0

    14

  • séries entières (S6)

    Si f est développable en série entière sur ]−r,r [ (r > 0), alors elle est somme desa série de Taylor sur cet intervalle, c’est-à-dire

    ∀x ∈]− r,r [ f (x) = 0

    ce qui est manifestement faux. Donc f n’est pas développable en série entière

    autour de 0.

    V.5 Critère de développabilité en série entière

    Proposition Soit f une fonction de classe C∞ sur ]− r,r [ (r > 0), à valeursréelles ou complexes. On note, pour tout x ∈]− r,r [,

    Rn(x) = f (x)−n∑

    k=0

    f (k)(0)

    k !xk

    Alors f est développable en série entière sur ]− r,r [ si et seulement si,pour tout x dans ]− r,r [, la suite (Rn(x))n∈N converge vers 0.En effet, il y a équivalence entre les lignes suivantes :

    f est développable en série entière sur ]− r,r [

    Pour tout x ∈]− r,r [, f (x) =+∞∑k=0

    f (k)(0)

    k !xk

    Pour tout x ∈]− r,r [,n∑

    k=0

    f (k)(0)

    k !xk −−−−−→

    n→+∞ f (x)

    Pour tout x ∈]− r,r [ Rn(x) −−−−−→n→+∞ 0

    Plus qu’une « proposition », c’est une constatation. . .qui prend toute sa

    valeur quand on se souvient de certains résultats :

    Mode d’emploi On rappelle que

    Rn(x) =∫ x

    0

    (x − t )nn!

    f (n+1)(t )d t

    15

  • séries entières (S6)

    et surtout que ∣∣Rn(x)∣∣≤ |x|n+1(n +1)! sup[0,x]

    ∣∣ f (n+1)∣∣

    16

  • séries entières (S6)

    VI Développements en séries entières des fonctions

    usuelles

    Comment montrer qu’une fonction est développable en série entière ? La réponse

    est un peu analogue au problème des développements limités : un théorème nous

    permet de trouver des développements en série entière de fonctions usuelles (exp,

    sin, cos, x 7→ (1+ x)α. . .). Puis, ces développements « de base » connus, on trouveen général les développements en série entière par opérations. Pour les dévelop-

    pements limités, le résultat permettant d’obtenir les DL de départ est le théorème

    de Taylor-Young. Pour les développements en série entière, c’est la formule de

    Taylor avec reste-intégrale ou l’inégalité de Taylor-Lagrange qui donne les DSE

    dits « usuels ».

    VI.1 Fonction exponentielle et associées

    a. Exponentielle réelle

    Proposition : La fonction x 7→ ex (c’est-à-dire l’unique solution de l’équa-tion différentielle y ′ = y qui prend en 0 la valeur 1) est développable ensérie entière sur R, et

    ∀x ∈ R ex =+∞∑n=0

    xn

    n!

    On a, pour tout k, exp(k) = exp. Donc la majoration de Taylor-Lagrange donne,pour tout x réel, pour tout n ∈ N,∣∣∣∣∣ex − n∑

    k=0

    xk

    k !

    ∣∣∣∣∣≤ M(n +1)! |x|n+1où M = sup

    [0,x](exp) (= 1 si x ≤ 0, = ex si x ≥ 0). Or par croissances comparées,

    |x|n+1(n +1)! −−−−−→n→+∞ 0

    et doncn∑

    k=0

    xk

    k !−−−−−→n→+∞ e

    x

    17

  • séries entières (S6)

    b. Sinus et cosinus, trigonométriques et hyperboliques

    Proposition : Les fonctions sin, cos, ch, sh sont développables en série en-

    tière sur R, et

    ∀x ∈ R sin x =+∞∑n=0

    (−1)n x2n+1

    (2n +1)!

    ∀x ∈ R cos x =+∞∑n=0

    (−1)n x2n

    (2n)!

    Les dérivées successives de sin sont toutes égales à ±sin ou ±cos et doncsont bornées par 1. La majoration de Taylor-Lagrange donne alors, pour

    tout x ∈ R, ∣∣∣∣∣sin x − n∑k=0

    sin(k)(0)

    k !

    ∣∣∣∣∣≤ 1(n +1)! |x|n+1Or par croissances comparées,

    |x|n+1(n +1)! −−−−−→n→+∞ 0

    et doncn∑

    k=0

    sin(k)(0)

    k !xk −−−−−→

    n→+∞ sin x

    Ne reste plus qu’à calculer sin(k)(0), qui vaut 0 si k est pair (car si k est

    pair, sin(k) =±sin).Souvenons-nous que la dérivée k-ème de x 7−→ e i x est x 7−→ i k e i x . Ouencore x 7−→ e i (x+kπ/2). En prenant les parties imaginaires, on retrouve laformule célèbre

    sin(k) : x 7−→ sin(x +kπ/2)Donc sin(2p+1)(0) = sin(pπ+π/2)= (−1)p sin(π/2) = (−1)p . On en déduitbien le développement souhaité. Pour cosinus, on fait évidemment le

    même genre de chose.

    ∀x ∈ R sh x =+∞∑n=0

    x2n+1

    (2n +1)! , ∀x ∈ R ch x =+∞∑n=0

    x2n

    (2n)!

    18

  • séries entières (S6)

    Tout simplement,

    ∀x ∈ R ch x = 12

    (ex +e−x)

    et on utilise le développement de l’exponentielle. Idem pour sh.

    Autre méthode : on coupe le développement de l’exponentielle en 2, les

    termes d’indice pair et les termes d’indice impair. On obtient exp =φ+ψavec φ paire et ψ impaire, or cette décomposition est unique (voir Al1),

    c’est exp = ch+ sh.

    c. Exponentielle complexe

    Définition : On définit, pour tout z ∈ C,

    exp(z) =+∞∑n=0

    zn

    n!

    Proposition : Pour tous z et z ′ dans C,

    exp(z + z ′) = exp(z) exp(z ′)

    Vu comme illustration du produit de Cauchy.

    Proposition : Pour tout θ réel,

    exp(iθ) = cosθ+ i sinθ

    Il suffit pour cela de séparer les termes d’indice pair et les termes d’indice

    impair dans e iθ.

    19

  • séries entières (S6)

    VI.2 Fonction x 7→ (1+x)α

    Proposition Pour tout α réel, la fonction x 7→ (1+ x)α est développable ensérie entière sur ]−1,1[.

    ∀x ∈]−1,1[ (1+x)α = 1++∞∑n=1

    α(α−1) . . . (α−n +1)n!

    xn

    On va utiliser une méthode importante : la recherche de solutions déve-

    loppables en série entière d’une équation différentielle.

    Notons

    fα : x 7−→ (1+x)α

    La fonction fα est de classe C 1 sur ]−1,+∞[ et vérifie sur cet intervallel’équation différentielle

    (1+x)y ′−αy = 0 (E)

    (on le voit très simplement en dérivant fα). Cherchons d’éventuelles so-

    lutions de (E) développables en série entière.

    Soit φ vérifiant, sur ]− r,r [ avec r > 0,

    φ(x) =+∞∑n=0

    an xn

    où (an)n≥0 est une suite de nombres réels. On suppose donc implicite-ment que le rayon de convergence de

    ∑n≥0 an xn est ≥ r .

    Par théorème, φ est de classe C∞ sur ]− r,r [, et se dérive terme à termesur cet intervalle. Les lignes suivantes sont donc équivalentes :

    φ est solution de (E) sur ]− r,r [

    ∀x ∈]− r,r [ (1+x)+∞∑n=1

    nan xn−1 − α

    +∞∑n=0

    an xn = 0

    ∀x ∈]− r,r [+∞∑n=1

    nan xn−1 +

    +∞∑n=1

    nan xn − α

    +∞∑n=0

    an xn = 0

    (On coupe en petits morceaux. L’objectif est de n’avoir que des dévelop-

    pements en série entière, pour pouvoir appliquer l’unicité)

    20

  • séries entières (S6)

    ∀x ∈]− r,r [+∞∑n=0

    (n +1)an+1xn ++∞∑n=1

    nan xn − α

    +∞∑n=0

    an xn = 0

    (on réindexe, pour pouvoir appliquer le théorème d’unicité du DSE)

    ∀x ∈]− r,r [+∞∑n=0

    [(n +1)an+1 + (n −α)an] xn = 0

    ∀n ∈ N an+1 = α−nn +1 an (1)

    (par unicité du développement en série entière)

    Ici, il y a quelque chose de très important. On a procédé par équiva-

    lences, mais on a supposé au début que le rayon de convergence de∑an xn était r > 0. Il faut donc déterminer ce rayon de convergence ou,

    au moins, le minorer.

    Soit (an) une suite de réels vérifiant (1). Si il existe n0 tel que an0 = 0, alors∀n ≥ n0 an = 0, donc le rayon de convergence de ∑an xn est +∞.Sinon, on a ∀n ≥ 0 an 6= 0. Posons alors, si x 6= 0,

    un = |an xn |

    On remarque que un > 0 et queun+1

    un−−−−−→n→+∞ |x|

    Le critère de D’Alembert dit donc que si |x| < 1, ∑ |an xn | converge, et si|x| > 1, ∑ |an xn | diverge. Le rayon de convergence de ∑an xn est donc 1.Dans tous les cas, le rayon de convergence est ≥ 1.Donc, si a0 = 1 et ∀n ∈ N an+1 = α−n

    n +1 an , la fonction

    φ : x 7−→+∞∑n=0

    an xn est solution sur ]− 1,1[ de (E), et vérifie φ(0) = 1. Il

    y a une unique solution de (E) qui prend en 0 la valeur 1, c’est fα. On

    a donc montré la développabilité en série entière. Reste à calculer les

    coefficients, ce qui se fait facilement avec la relation de récurrence (1) :

    a0 = 1a1 =α

    21

  • séries entières (S6)

    a2 = α(α−1)2

    puis, par une récurrence simple, pour tout n ≥ 0,

    an = α(α−1) . . . (α−n +1)n!

    =∏n−1

    k=0(α−k)n!

    (par convention, pour n = 0, le produit est vide donc vaut 1).Remarque Dans le casα ∈ N, on retrouve le développement du binôme. . .c’est-

    à-dire un dse polynomial. Dans le cas contraire, on évitera de noter

    (n

    α

    )un coefficient qui n’a pas de signification en termes de dénombrement.

    Proposition Si z ∈ C, |z| < 1,

    1

    1− z =+∞∑n=0

    zn

    22

  • séries entières (S6)

    VI.3 ln(1+x), ln(1-x)

    S’obtiennent directement par primitivation, à partir de

    ∀x ∈]−1,1[ 11−x =

    et de

    ∀x ∈]−1,1[ 11+x =

    On a donc

    ∀x ∈]−1,1[ ln(1−x) =

    et

    ∀x ∈]−1,1[ ln(1+x) =

    Ce dernier développement donne la méthode la plus rapide pour retrouver la

    formule +∞∑n=1

    (−1)n+1n

    = ln2

    VI.4 Arctan, Arcsin

    Le développement en série entière de Arctan s’obtient de la même manière que

    les deux précédents : on sait développer la dérivée, on primitive.

    On en déduit encore une belle somme de série dûe à Euler :

    1− 13+ 1

    5− 1

    7+·· · =

    Pour le développement en série de Arcsin, c’est plus laborieux, mais c’est un

    calcul qu’il faut savoir faire.

    23

  • séries entières (S6)

    VII Recherche de solutions dse d’une équation dif-

    férentielle

    Il est parfois possible de trouver des solutions d’équations différentielles sous

    forme de sommes de séries entières. Cela concerne surtout des équations de la

    forme

    a(x)y ′+b(x)y = c(x) ou a(x)y ′′+b(x)y ′+ c(x)y = d(x)

    (spécialement quand a, b, c, d sont des fonctions polynômes de petits degrés).

    Considérons par exemple l’équation différentielle :

    (x2 +2)y ′′+6x y ′+6y = 0 (E)

    Soit (an) ∈ RN telle que le rayon de convergence de la série entière∑

    an xn soit

    supérieur ou égal à r > 0. Définissons φ : x 7→+∞∑n=0

    an xn sur ]− r,r [. Alors φ est

    solution de (E) sur ]− r,r [ si et seulement si

    ∀x ∈]−r,r [ (x2+2)+∞∑n=2

    n(n−1)an xn−2+6x+∞∑n=1

    nan xn−1+6

    +∞∑n=0

    an xn = 0 (1)

    On réécrit alors (1) en « coupant en morceaux », rentrant les puissances dans

    les sommes, puis réindexant les sommes qui doivent l’être pour obtenir une

    condition équivalente à (1) de la forme

    ∀x ∈]− r,r [+∞∑

    n=n0(. . .)xn = 0

    qui permette d’utiliser l’unicité du développement en série entière. Ici, on abou-

    tira donc à :

    Par unicité du développement en série entière,

    (1) ⇔∀n ∈ N an+2 =− n +32(n +1) an

    Le calcul « formel » est alors terminé. . .mais même si on a procédé par équiva-

    lences, il faut faire une « réciproque » : les suites (an) trouvées donnent-elles

    bien un des séries entières à rayon de convergence non nul ? et quel est ce

    rayon de convergence? On peut aussi se poser la question subsidiaire suivante :

    24

  • séries entières (S6)

    les fonctions développables en série entière que l’on a trouvées sont-elles ex-

    primables au moyen des fonctions usuelles? (par exemple, ici, pour a0 = 0 eta1 = 0, on trouve entre autres la fonction solution x 7−→ 4−2x

    2

    (2+x2)2 )

    D’un exemple à l’autre les choses se passent parfois un peu différemment; on

    peut chercher les solutions développables en série entière de l’équation

    x(x +1)y ′′−2y = 0

    25

  • séries entières (S6)

    Table des matières

    I Convergence des séries entières 1

    I.1 Définition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1

    I.2 Convergence ponctuelle ; rayon de convergence . . . . . . . . . . . 1

    a. Lemme d’Abel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1

    b. Rayon de convergence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2

    c. Méthodes de détermination pratique du rayon de conver-

    gence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3

    d. Comparaison de rayons de convergence . . . . . . . . . . . 4

    II Produit de Cauchy de deux séries absolument convergentes 5

    III Opérations algébrique sur les séries entières 6

    III.1 Somme, produit par un scalaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6

    III.2 Produit de Cauchy de séries entières . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7

    IV Classe d’une somme de série entière 8

    IV.1 Rayon de convergence d’une série dérivée . . . . . . . . . . . . . . 8

    IV.2 Classe de la somme d’une série entière . . . . . . . . . . . . . . . . 8

    IV.3 Primitivation de la somme d’une série entière . . . . . . . . . . . . 9

    IV.4 Quelques calculs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9

    IV.5 Sur le bord . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11

    V Fonctions développables en série entière 12

    V.1 Fonction développable en série entière . . . . . . . . . . . . . . . . 12

    a. Définition du programme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12

    b. Autres définitions assez compréhensibles . . . . . . . . . . 12

    V.2 Stabilité par combinaison linéaire et produit . . . . . . . . . . . . . 12

    V.3 Stabilité par dérivation et primitivation . . . . . . . . . . . . . . . . 13

    V.4 Condition nécessaire ; série de Taylor . . . . . . . . . . . . . . . . . 13

    V.5 Critère de développabilité en série entière . . . . . . . . . . . . . . 15

    VI Développements en séries entières des fonctions usuelles 17

    VI.1 Fonction exponentielle et associées . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17

    a. Exponentielle réelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17

    26

  • séries entières (S6)

    b. Sinus et cosinus, trigonométriques et hyperboliques . . . . 18

    c. Exponentielle complexe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19

    VI.2 Fonction x 7→ (1+x)α . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20VI.3 ln(1+x), ln(1-x) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23

    VI.4 Arctan, Arcsin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23

    VIIRecherche de solutions dse d’une équation différentielle 24

    27