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PANORAMA DE PRESSE
20/04/2017 08h19
CGT
Panorama réalisé avec Pressedd
SOMMAIRE
SYNDICALISME(7 articles)
jeudi 20 avril 2017
Les syndicats ramenés en position de simples spectateurs(629 mots)
Cela fait maintenant longtemps que les syndicats, y compris la CGT, ne donnentplus de consigne de vote. Cela ne les a pas empêchés d'occup…
Page 6
jeudi 20 au mercredi 26avril 2017
Les syndicats attaquent le programme du Front national(1376 mots)
Jeudi 13 avril, Philippe Martinez, le secrétaire général de la CGT, a réaffirmé que« la lutte contre l’extrême droite et l…
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jeudi 20 avril 2017
Contre le FN, des cours de la CGT pour savoir riposterà la pause café (896 mots)
Depuis quatre ans, Pascal Debay sillonne la France pour le compte de la CGT. Samission : contrer la progression des idées …
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jeudi 20 au mercredi 26avril 2017
Ports : la Fédération nationale des ports et docks CGT présenteson plan de relance (372 mots)
La Fédération nationale des ports et docks CGT participe à sa manière au débatprésidentiel. Elle a présenté le 11 avril sa vision …
Page 11
jeudi 20 au mercredi 26avril 2017
La CFDT a piqué la place de premier à la CGT (1390 mots)
Combinant une démarche réformiste et un démarchage accrocheur sur le terrain,le syndicat a fini par supplanter la C…
Page 12
jeudi 20 au mercredi 26avril 2017
C'est la lutte rivale (183 mots)
Philippe Martinez (CGT) et Laurent Berger (CFDT). Deux visions du combatsyndical s'affrontent. …
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jeudi 20 au mercredi 26avril 2017
Laurent Berger « On ne peut pas tout attendre du politique »(1182 mots)
La Vie. Comment expliquez-vous que la loi Travail agite encore les débats de laprésidentielle ? …
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ACTUALITE SOCIALE(7 articles)
jeudi 20 avril 2017
Moins de salariés saisissent les prud'hommes depuis la loiMacron (839 mots)
Le bilan d'Emmanuel Macron au gouvernement aura décidément été délétère pourles droits des salariés. Plus d'un an et demi …
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jeudi 20 avril 2017
La CGT met la pression sur Fincantieri (669 mots)
ÀSaint-Nazaire, le futur repreneur des ex-Chantiers de l'Atlantique était, hier,attendu de pied ferme pour sa première vis…
Page 20
jeudi 20 avril 2017
Fincantieri en opération séduction à Saint-Nazaire (656 mots)
Fincantieri poursuit son opération séduction à Saint-Nazaire, après avoir…Page 21
jeudi 20 avril 2017
Chez McDo, la foire aux revendications sociales (370 mots)
«évasion fiscale, bas salaires, contournement du droit de la représentation dupersonnel, absence de majoration pour le tra…
Page 23
jeudi 20 avril 2017
A l’usine PSA de Sochaux, le bulletin «espoir» contre lebulletin «ras-le-bol» (739 mots)
A13 h 12, à l’usine PSA de Sochaux, c’est l’heure du changement d’équipe. Unmoment où les rues de la commune de 4 000 habi…
Page 24
jeudi 20 avril 2017
Aux Herbiers, «le faible taux de chômage est encoreun rempart» (779 mots)
Immergés en plein bocage vendéen, Les Herbiers semblent vaccinés contrela sinistrose. Une dizaine d’agences de recrutement…
Page 26
jeudi 20 avril 2017
Un record d'intentions d'embauche pour 2017 (438 mots)
Du jamais vu depuis 2002, date de la première enquête annuelle de Pôle emploisur les intentions d'embauche des entreprise…
Page 28
MOUVEMENTS SOCIAUX(2 articles)
jeudi 20 avril 2017
A Paris, les ouvriers d'Amiens font le deuil de leurs emplois(529 mots)
Ras le bol des politiques ! C'est Marine - Le Pen - la solution ! ", s'époumone unemployé de Whirlpool qui interpelle Ed…
Page 30
mercredi 19 avril 201711:11
Des salariés de GM&S manifestent à Paris (475 mots)
Environ 150 salariés du fabricant de pièces automobiles GM&S de La Souterraine(Creuse) se sont invités mercredi sur les Champs-Elysées pour "de…
Page 31
EUROPE ET INTERNATIONAL(3 articles)
jeudi 20 avril 2017
Le renouveau de Lodz, bastion polonais de Whirlpool (1667 mots)
Al'heure du changement d'équipe, devant les grilles de l'usine Whirlpool de Lodz,dans le centre de la Pologne, on ne s'att…
Page 34
jeudi 20 avril 2017
Bras de fer entre Tesla et le syndicat IG Metall outre-Rhin(514 mots)
C'est un premier choc culturel pour Tesla en Allemagne. En rachetant en no…
Page 36
jeudi 20 avril 2017
Japon : robots et véhicules autonomes pour combler lemanque de main-d'œuvre (1007 mots)
Démographie Selon les données publiées le 15 avril, la population japonaise aperdu 162 000 individus en 2016 ; c'es…
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SYNDICALISME
5
Les syndicats ramenés en position de simples spectateursEn 2007 et en 2012, les organisations de salariés avaient pesé dans la campagne. Pas cette fois.
N° 22429jeudi 20 avril 2017
Page 3629 mots
FRANCE—POLITIQUE
C ela fait maintenant longtemps
que les syndicats, y compris la
CGT, ne donnent plus de consigne de
vote. Cela ne les a pas empêchés
d'occuper le devant de la scène lors
des élections présidentielles précé-
dentes. Mais cette fois-ci, ils en sont
réduits à regarder passer la cam-
pagne, à la tonalité, il est vrai, hors
norme en raison des affaires.
Une page semble se tourner.
L'évolution de Nicole Notat en est un
symbole. En 2001, c'est elle qui diri-
geait la CFDT lors du bras de fer en-
gagé contre le gouvernement Jospin
par la centrale sur le champ d'action
de l'Etat. A l'occasion d'un renouvel-
lement de la convention d'assurance-
chômage, elle revendiquait un pou-
voir législatif propre aux partenaires
sociaux. La même, aujourd'hui, ne
parle plus au nom de la CFDT. Il
n'empêche que son soutien, mardi, à
Emmanuel Macron n'est pas anodin.
Alors même que le candidat d'En
marche prône un renforcement de
l'Etat au détriment du patronat et des
syndicats, notamment en matière
d'assurance-chômage. Il n'est
d'ailleurs pas le seul dans ce cas : la
plupart de ses concurrents font de
même.
Cela ne veut bien sûr pas dire que
la CFDT va voter Emmanuel Macron
comme un seul homme. Benoît Ha-
mon, qui est partisan d'un dialogue
social national mais veut abroger la
loi El Khomri, séduit aussi au sein de
la centrale. « A eux deux, ils repré-
sentent ce qu'il faut faire », s'amusait
son numéro un, Laurent Berger, au
micro de France Inter la semaine der-
nière. Où il a critiqué, en revanche,
violemment Jean-Luc Mélenchon,
sans grand risque en interne.
Pas de consigne de vote
« Les militants sont partagés entre
Macron et Hamon », estimait un cé-
détiste en marge de l'audition des
candidats à la présidentielle à la
CFDT, mi-mars. Mais à l'époque, le
candidat du PS n'avait pas encore
chuté, et Jean-Luc Mélenchon n'était
pas aussi haut. L'argument du vote
utile pour faire barrage au Front na-
tional, employé par Nicole Notat
pour justifier son soutien à l'ancien
ministre de l'Economie, pourrait sé-
duire nombre de cédétistes.
Le vote utile pourrait aussi être un
argument massue à la CGT dans la
dernière ligne droite, mais pour le
candidat de La France insoumise
cette fois. Contrairement à une idée
reçue, toute la centrale ne vote pas
Jean-Luc Mélenchon. Son secrétaire
général, Philippe Martinez, s'est re-
fusé à donner une consigne de vote.
Il a même pris soin d'épingler le can-
didat de La France insoumise avec
d'autres, critiquant sa méconnais-
sance du monde du travail.
Signe révélateur : cette fois-ci, il y
a bien eu aussi un appel de syndica-
listes CGT à voter Mélenchon, mais
il n'a pas dépassé les Bouches-du-
Rhône. Son projet de « planification
écologique » hérisse les pro-nu-
cléaires de la centrale. Une partie des
communistes de la CGT, ceux qui dé-
fendaient une candidature estam-
pillée PCF, compte s'abstenir. Une
autre est sensible au discours ancré
à gauche de Benoît Hamon. Reste à
savoir combien vont le rester jusqu'à
dimanche.
Du côté de Force ouvrière, la tradi-
tion de l'auberge espagnole sera res-
pectée. En envoyant aux principaux
candidats une liste de revendications
longue comme le bras, la centrale a
pris garde à ne surtout pas se posi-
tionner. Dans son dernier éditorial
avant le premier tour, son leader,
Jean-Claude Mailly, a choisi
d'épingler… François Hollande. ■
par Leïla De Comarmond
Tous droits réservés Les Echos 2017
3B9F732D84C05F0555E21D20BD04414845E576242851385FF6E576B
Parution : Quotidienne
Diffusion : 127 475 ex. (Diff. payée Fr.) - © OJD PV 2015/2016
Audience : 566 000 lect. (LNM) - © AudiPresse One 2015/2016
↑ 6
ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE
Les syndicats attaquent le programme du Front national
N° 3512jeudi 20 au mercredi 26 avril 2017
Pages 14-151376 mots
ESSENTIEL—ÉVÉNEMENT
J eudi 13 avril, Philippe Martinez,
le secrétaire général de la CGT, a
réaffirmé que « la lutte contre
l’extrême droite et le Front national,
et contre toutes les formes de ra-
cismes reste une […] priorité » de la
CGT. Deux jours avant, il participait
à une journée débat à Valence
(Drôme) intitulée « Extrême droite,
l’envers du décor », un meeting qui
succédait à plusieurs autres ren-
contres organisées avec Solidaires et
la FSU, dans le Vaucluse en dé-
cembre, près de Hénin-Beaumont
(Nord) en février. Des territoires
choisis en raison du fort ancrage lo-
cal du Front national. La FSU, elle, a
envoyé une lettre à tous les fonction-
naires pour les mettre en garde
contre un parti qui « n’est pas un par-
ti comme les autres, […] représente
un danger réel que nous appelons à
contrer ». CGT, FSU et Solidaires ont
par ailleurs publié, avec la Ligue des
droits de l’homme et les syndicats ly-
céens et étudiants, « En finir avec les
idées fausses propagées par
l’extrême droite », un ouvrage qui ré-
fute près de quatre-vingts affirma-
tions du Front national. La CFDT,
elle, a choisi de distribuer à ses
équipes un argumentaire de
quatre pages sur les conséquences de
propositions du Front national,
comme la préférence nationale et la
sortie de l’euro.
Formation syndicale pour la CGT
Pour les syndicats, l’enjeu est de
taille. Le programme de Ma-
rine Le Pen reprend certaines de
leurs revendications sur les salaires
et les retraites, se pose en défenseur
des travailleurs et des bas revenus,
attaque les multinationales et la po-
litique libérale de l’Union euro-
péenne… Des thèmes auxquels sont
sensibles les salariés, mais aussi par-
fois les militants syndicaux. Dans un
tract sur l’« imposture sociale du
FN », la Fédération mines-énergie de
la CGT proteste contre le fait « que
le FN fasse croire qu’il reprend sur
nombre de sujets l’argumentaire de
défense de l’intérêt des travailleurs
que porte depuis toujours la CGT ».
La FSU tente de convaincre des fonc-
tionnaires déboussolés que « le FN
n’est pas la solution ».
La CGT, si elle a accéléré le rythme
de ses rencontres depuis septembre,
a adopté une démarche de longue ha-
leine. Fin 2013, elle s’est dotée d’un
groupe de travail d’une douzaine de
personnes, dont l’objectif est « de
mener une campagne syndicale
contre les idées de l’extrême droite »,
selon les termes choisis de Pascal De-
bay, membre de la direction confé-
dérale et responsable de ce groupe.
« Notre but n’est pas de faire une
chasse aux sorcières, mais de
convaincre, par une démarche
d’éducation populaire, et d’amener
un salarié tenté par le FN à com-
prendre la vraie nature de son pro-
gramme. »
Le pôle Formation syndicale de la
CGT a élaboré une dizaine de fiches
thématiques, envoyées aux unions
départementales et syndicats. Celle
sur le travail explique que la taxation
des importations de 3 % entraînerait
une perte du pouvoir d’achat, alors
que le FN la présente comme un
moyen de financer une prime. La
fiche sur la fiscalité proteste contre
les baisses de cotisations patronales
préconisées par le Front national
pour les TPE et PME. Celle sur
l’industrie reconnaît que si les pro-
positions du parti de Marine Le Pen,
prises une par une, paraissent favo-
rables à l’industrie, « en faisant le
lien avec les autres propositions du
FN et surtout avec ses conceptions
fondamentales, l’ensemble devient
contradictoire et sans cohérence ».
Tout militant CGT peut suivre une
formation sur le sujet. Le problème,
explique Pascal Debay, « c’est que
pour contrer des propositions
simples, il faut parfois entrer dans
des choses plus complexes… » S’il re-
connaît quelques résistances ici et là
de militants qui ne souhaitent pas in-
tervenir sur le champ politique, il
souligne que fiches et journées de
formation connaissent un grand suc-
cès.
La CFDT met l’accent sur le projet
du FN
La CFDT a aussi ressenti le besoin de
présenter le programme dans sa glo-
balité. « Les arêtes historiques du
programme du Front national,
comme la préférence nationale, sont
ensevelies sous un galimatias de pro-
positions glanées de-ci de-là, qui
tentent de camoufler sa vraie lo-
gique, décrypte le secrétaire national
de la CFDT, Frédéric Sève, chargé du
↑ 7
ENCADRÉS DE L'ARTICLE
Le patronat critique, mais invite Marine Le Pen
Pour la première fois, le Medef a invité cette année le Front national à exposer son programme devant ses
adhérents, fin mars, aux côtés des autres partis politiques. Une décision de son président, Pierre Gattaz, qui
rompt avec les positions de celle qui l’a précédé à ce poste, Laurence Parisot. Les Medef territoriaux
avaient ouvert la brèche en 2015, en recevant les candidats FN à l’occasion des élections régionales. La
même année, Pierre Gattaz avait refusé à Marine Le Pen le débat qu’elle lui réclamait. Mais la Confédéra-
tion des PME (CPME), elle, la reçoit. Le monde patronal n’est pas imperméable aux idées de son parti. Avec
son discours pro-PME, le Front national convainc certains petits patrons. « Pourquoi la France
n’introduirait-elle pas des mesures protectionnistes ? » s’interroge un dirigeant de PME industrielle pendant
l’exposé de son programme par Marine Le Pen à la CPME, début mars. « Je n’arrive pas à exporter mes pro-
duits au Brésil parce que ce pays se protège. Pourquoi la France ne fait-elle pas pareil ? » Mais beaucoup de
patrons ne veulent pas sortir de l’euro ni de l’Europe, leur ligne rouge. D’ailleurs, si Pierre Gattaz a invité
Marine Le Pen, faisant grincer quelques dents dans son organisation, il ne perd pas une occasion de criti-
quer son programme. « Voter Mélenchon, Le Pen, Hamon, c’est ruine, désespoir et désolation, pauvreté gé-
néralisée », a-t-il notamment déclaré dans « Le Parisien », citant le coût, évalué par l’institut Coe-Rexecode,
des propositions de ces trois candidats. Un amalgame qui lui a valu une volée de bois vert de Benoît Ha-
mon. Rompant avec une autre tradition, celle de la neutralité du Medef, il a clairement manifesté sa préfé-
rence pour le candidat François Fillon. ❚❚
sujet. Nous avons ressenti le besoin
d’introduire un décodage non seule-
ment du programme, mais aussi du
projet du FN. » Dans son document,
la CFDT explique que « le protection-
nisme ne sauvera pas l’industrie
française », que « le FN nuit grave-
ment aux femmes », que « le FN a
toujours montré une volonté de bri-
der les associations et les syndicats ».
« Toutes les propositions […]
tournent autour de l’idée qu’il suf-
firait de… sortir de l’euro, taxer les
importations, appliquer la préférence
nationale, pour régler tous les pro-
blèmes, s’insurge Frédéric Sève. Ce
simplisme est un refus de la com-
plexité du monde. » Le secrétaire na-
tional entend poursuivre cette action
en sortant du milieu syndical : « Il y a
un besoin de revaloriser le débat dé-
mocratique plutôt que de laisser les
gens se forger une opinion en restant
seuls chez eux devant la télé… »
Comme en 2002, CFDT et CGT appel-
leront à faire barrage au Front natio-
nal s’il est présent au deuxième tour
de l’élection présidentielle. Ces syn-
dicats le soulignent : tous les milieux
professionnels sont touchés. Éduca-
tion nationale, services sociaux,
commerces, industrie… Pour
l’avenir, la CGT souhaite s’adresser
prioritairement aux jeunes. « Dans
tous mes déplacements, remontent
des témoignages sur le succès des
idées de l’extrême droite auprès des
jeunes », s’inquiète Pascal Debay.
Seule Force ouvrière reste en dehors
de ce mouvement anti-FN. « Nous
n’avons pas de consigne de vote à
donner, directe ou indirecte, justifie
Jean-Claude Mailly, son secrétaire
général. Mais nous n’hésitons pas à
prendre position contre le racisme et
la xénophobie, sans aucune ambiguï-
té, et nous combattons les politiques
d’austérité, européenne ou natio-
nale, qui sont à l’origine de ces mou-
vements partout en Europe. » Jean-
Claude Mailly promet un 1er mai
« purement syndical » pour FO. ?? ■
par Cécile Maillard
Tous droits réservés L'Usine Nouvelle 2017
A69F43DD84A0F70805561FA0DD0E61AC4CE5882C085C3CCC0AB514E
Parution : Hebdomadaire
Diffusion : 25 355 ex. (Diff. payée Fr.) - © OJD DSH 2015↑ 8
Contre le FN, des cours de la CGT pour savoir riposter à la pause café
Le syndicat propose des formations à ses délégués pour leur apprendre à réfuterles discours frontistes. Exemple à Toulon.
N° 11169jeudi 20 avril 2017
Édition(s) : PrincipalePages 3-4896 mots
ÉVÉNEMENT
D epuis quatre ans, Pascal Debay
sillonne la France pour le
compte de la CGT. Sa mission :
contrer la progression des idées
d’extrême droite au travail. Un rôle
sur-mesure pour ce grand gaillard af-
fable. Responsable de la CGT de
Meurthe-et-Moselle, il est né dans
une famille sidérurgiste de la vallée
de la Fensch, où la mort à petit feu
des hauts-fourneaux nourrit le repli
sur soi.«Là où j’ai grandi, ça vote fort
FN depuis les années 90», rappelle ce
quadra, éducateur spécialisé, que le
«traumatisme» du 21 avril 2002 a
convaincu de se syndiquer. En 2011,
Fabien Engelmann, cadre cégétiste
lorrain, se présente sur les listes
frontistes aux cantonales - il est au-
jourd’hui maire de Hayange. Un
«électrochoc» pour le syndicat ou-
vrier. Deux ans plus tard, sa direction
crée une commission de lutte contre
l’extrême droite, dont Debay prend la
tête.
Ce jeudi d’avril, une quarantaine de
membres de la CGT du Var
l’attendent à la bourse du travail de
Toulon pour une formation. Sept
heures pour disséquer le discours du
FN et s’armer pour la riposte. Chef de
la section, Olivier Masini a sollicité
son aide car dans le Var, «le terreau de
l’extrême droite s’enrichit». Brignoles,
ex-ville rouge, a voté à 42 % FN au
premier tour des régionales de 2015.
Ses mines de bauxite ont fermé il y a
trente ans. Aujourd’hui, les ménages
du littoral s’y réfugient en quête
d’une vie moins chère. L’emploi pa-
tine, mais la population grimpe,
comme le chômage et la pauvreté.
D’où «un fort sentiment de déclasse-
ment».
Virage social. L’extrême droite fait
son miel de ce cocktail amer. Une in-
firmière de la Seyne-sur-Mer brandit
le programme de Marine Le Pen reçu
dans sa boîte aux lettres. «Garantie
de la sécurité sociale gratuite, retraite
à 60 ans, retrait de la loi travail… Au-
delà des idées racistes, je comprends
que des gens votent pour elle.» Depuis
son virage social, le FN s’approprie
de plus en plus de thématiques, voire
de revendications, cégétistes.
«Quand on manifeste contre la ferme-
ture d’un bureau de poste ou d’un
centre des impôts, on côtoie des gens
séduits par ses idées», soupire Olivier
Masini. Les militants sentent les sa-
lariés de plus en plus perméables aux
thèses frontistes, xénophobie com-
prise. Et de moins en moins soucieux
de le cacher. «J’entends mes collègues
dire que les immigrés profitent des al-
locations pendant qu’eux bossent au
smic», raconte Jean-Louis, syndica-
liste à l’arsenal de Toulon. Pour
contrer l’adversaire et s’en différen-
cier, encore faut-il le connaître. Pas-
cal Debay commence par diffuser un
film historique sur le FN, son dis-
cours traditionnellement «anti-syn-
dical et anti-ouvriériste». Puis un ex-
trait d’un reportage d’Envoyé spécial
dans lequel des chercheurs analysent
la rhétorique frontiste. Ou comment
Marine Le Pen camoufle le discours
raciste de son parti sur l’immigration
sous des arguments économiques. Le
syndicaliste s’est aussi «coltiné un pa-
quet de fois» le programme du FN. Il
en a tiré une dizaine de fiches façon
«fact-checking», qu’il recommande
de potasser. Une note prend en
exemple la promesse du maintien des
35 heures. Rectification de la CGT :
le FN autorisera des négociations au
niveau des branches, certains salariés
pourraient donc perdre leurs heures
sup. La hausse du pouvoir d’achat
grâce à une prime sur les petits sa-
laires ? Annulée par une taxe sur les
produits importés. La défense de la
fonction publique ? Inconciliable
avec le retour du délai de carence en
cas de maladie, la suppression des ré-
gions et des intercommunalités. La
clé, insiste Olivier Masini, c’est «bos-
ser le fond». «On doit pouvoir argu-
menter entre deux portes ou à la pause
café.»
Autruche. Le problème se corse
quand l’extrême droite contamine les
syndicalistes. Gérard, de l’union lo-
cale de Draguignan, a proposé au res-
ponsable d’une section voisine de
distribuer les fiches à ses équipes. Sur
quinze militants, huit ont refusé.
L’un d’eux a déclaré qu’il votait FN.
Du coup, un collègue a claqué la
porte : pas question de «déjeuner avec
un facho». Soupirs dans la salle. «Si tu
n’avais rien proposé, on ne l’aurait ja-
mais su, tente Pascal Debay. Ça veut
dire qu’on avance.» Le syndicaliste
s’est promis de ne jamais faire
l’autruche. Il rappelle au public
qu’aux départementales de 2015, 13
% des personnes proches de la CGT
avaient voté FN. C’est moins que
pour l’ensemble des Français (25 %)
↑ 9
ou que chez les sympathisants de FO
(37 %), mais «important» quand
même. Depuis le cas Engelmann, la
CGT épluche les listes à chaque élec-
tion. Une vingtaine de militants éga-
rés dans des équipes Bleu Marine ont
été exclus depuis 2013 (cinq dans le
Var). A qui la faute ? Un retraité, Che
Guevara tatoué sur l’avant-bras, re-
grette que la CGT «manque d’une
ligne politique claire depuis qu’elle a
cessé d’être la soi-disant courroie de
transmission des communistes». Oli-
vier Masini charge les lacunes de la
formation syndicale. «Avant, on rap-
pelait nos valeurs aux nouveaux adhé-
rents. On a délaissé ce sujet au profit
des questions liées au quotidien des
boîtes.» Désormais, la CGT considère
que combattre le FN implique de sa-
voir fermer ses portes. Gérard se sou-
vient d’une vendeuse précaire, par-
tante pour adhérer, qui lui «a servi
tout le vocabulaire d’extrême droite sur
les assistés et les immigrés». Il lui a
tendu un livre édité par des syndicats
sur «les idées fausses de l’extrême
droite» : il ne l’a plus revue. Gérard
réfléchit à haute voix. «J’ai peut-être
été con, c’était une salariée au smic…»
Pascal Debay le coupe : «T’as réagi
comme il fallait.» ■
par Alexia Eychenne
Tous droits réservés Libération 2017
c492938b8df03c0695691170930a112548054e2bd84e30c1b3adf77
Parution : Quotidienne
Diffusion : 77 094 ex. (Diff. payée Fr.) - © OJD PV 2015/2016
Audience : 923 000 lect. (LNM) - © AudiPresse One 2015/2016
↑ 10
Ports : la Fédération nationale des ports et docks CGT présente son plan derelanceLa Fédération nationale des ports et docks CGT participe à sa manière au débat présidentiel. Ellea présenté le 11 avril sa vision sur la relance de l'activité dans les ports français.
N° 3639jeudi 20 au mercredi 26 avril 2017
Page 14372 mots
SHIPPING
La FNPD assure s'appuyer sur« l'expérience des travailleurs et do-ckers ainsi que sur notre massive re-présentativité ». Photo : Éric Houri
E n plein débat électoral, la
Fédération nationale des ports et
docks CGT présente son plan (à
consulter sur lemarin. fr) pour « re-
lancer réellement l'activité des ports
français » qui, dit-elle, s'appuie sur «
l'expérience des travailleurs et do-
ckers ainsi que sur notre massive re-
présentativité ».
La CGT estime que les « ports fran-
çais restent décrochés en termes de
part de marché ». Selon elle, la
France ne dispose pas d'une véritable
stratégie pour ses ports avec une
« concurrence réelle entre les ports
d'un même territoire » et un « inves-
tissement insuffisant ».
Face aux velléités de privatisa-tion
ou de régionalisation, la CGT martèle
que « les ports ne doivent souffrir
d'aucun processus de privatisation
lequel serait préjudiciable à la vision
long terme et à l'intérêt général na-
tional ».
Sept propositions
À l'issue d'un constat souvent lucide
que devrait partager beaucoup de
connaisseurs des ports français, la
CGT fait sept propositions : renforcer
le rôle des ports avec notamment une
intégration plus large des collectivi-
tés locales et une gestion complé-
mentaire des ports de même façade ;
maintenir et valoriser les espaces
fonciers ; améliorer les dessertes ter-
restres ; faire de l'État actionnaire un
État stratège promoteur de ses ports
; promouvoir une politique
d'investissement ambitieuse ; ren-
forcer et maintenir la profession de
docker ; amplifier le caractère indus-
triel des ports en misant notamment
sur la filière navale. ■
par Thibaud Teillard
Tous droits réservés 2017 Le Marin
a39a431084e01d09d5b11f30cb02212f4105d42ee8283327d716df2
Parution : Hebdomadaire
Diffusion : 7 139 ex. (Diff. payée Fr.) - © OJD DSH 2015/2016↑ 11
La CFDT a piqué la place de premier à la CGTCombinant une démarche réformiste et un démarchage accrocheur sur le terrain, le syndicat a fini parsupplanter la CGT dans le secteur privé.
N° 518jeudi 20 au mercredi 26 avril 2017
Pages 50-511390 mots
STRATÉGIE
Laurent Berger (2eà gauche), secrétairegénéral de la CFDT, en déplacement
sur le site de Toyota à Valenciennes, le15 mars. Le syndicat, qui multiplie les
visites sur le terrain pour gagner laconfiance des salariés, y avait obtenu40 % des voix aux élections profes-
sionnelles de 2014. Photo : SDP
La veille de la publication, le 31 mars,
de la mesure de la représentativité
syndicale, Laurent Berger, secrétaire
général de la CFDT, stressait un peu.
En revenant d'un déplacement dans
le Nord à Arras, il ne lâchait pas son
portable dans l'attente d'un appel du
ministère du Travail annonçant les
résultats. Le lendemain, délivré, il
exulte : « La CFDT devient le premier
syndicat dans le privé ! C'est historique
! Mes premières pensées sont pour les
militants, cette victoire est la leur. »
L'organisation de Belleville devance
la CGT, une grande première dans
l'histoire sociale française. Ce succès
est dû à la stratégie adoptée par le
leader cédétiste qui préfère – et pri-
vilégie – la négociation au conflit.
Depuis 2012, la confédération a signé
quasiment tous les accords interpro-
fessionnels (sécurisation des par-
cours, formation) et apporté son sou-
tien aux deux mesures phares de
l'exécutif, le pacte de solidarité et de
responsabilité et la loi travail. « Notre
démarche réformiste, ce n'est pas de
l'eau tiède. Nous avons obtenu deux
avancées majeures pour les travailleurs
: le compte pénibilité et le compte per-
sonnel de formation », rappelle
Laurent Berger. Sur le terrain, la lo-
gique est identique : la CFDT n'hésite
pas à parapher des accords
d'entreprise comme chez Renault, à
STX France, chez ThyssenKrupp, au
Printemps ou encore à la Fnac. « Cer-
tains préfèrent être dans les postures et
défendre le statu quo. Nous, à la CFDT,
nous ne regardons pas dans un rétro-
viseur pour envisager le monde de de-
main », poursuit-t-il.
Méthodes de « fidélisation » La clé
de cette réussite, c'est le travail
d'implantation dans les entreprises.
En multipliant les visites sur le ter-
rain, la CFDT a su convaincre des sa-
lariés d'adhérer et de porter les cou-
leurs de la confédération. Et dans
certaines entreprises comme à Toyo-
ta (Valenciennes), les résultats sont
spectaculaires. « En 2010, la section
syndicale a été renouvelée. Cela a per-
mis de lancer une belle dynamique de
conquête avec l'obtention de 40 % des
voix aux élections professionnelles de
2014 », détaille Thomas Mercier, se-
crétaire général de la section. Pour
gagner la confiance des salariés, je
passe beaucoup de temps à les écouter.
Je réponds aussi à toutes les questions
et fais des comptes rendus de chaque
comité d'entreprise », poursuit celui
qui a choisi de montrer l'exemple en
continuant de travailler sur la ligne
de production. « A la différence
d'autres syndicats, nous sommes là au
quotidien pour aider nos adhérents,
précise un cadre de la fédération des
services CFDT des Hauts-de-France.
Nous multiplions les supports
d'information pour leur livrer des mé-
thodes clés en main pour négocier. »
D'autres sections assument carré-
ment utiliser des « techniques com-
merciales » pour « fidéliser » les sala-
riés. C'est le cas de celle de la BNP
Paribas Ile-de-France à Nanterre, qui
envoie tous les trimestres des lettres
individualisées à chaque employé et
organise des afterworks. Briseuse de
tabous, laa CFDT promeut sans états
d'âme un syndicalisme de services
pour ses adhérents. « Nous expéri-
mentons beaucoup pour moderniser
l'organisation. L'important c'est d'être
en mouvement et pour s'adapter à
l'évolution des pratiques militantes »,
détaille Laurent Berger. Dans cette
optique, la confédération a lancé une
grande enquête auprès de 200 000 sa-
lariés, intitulée « parlons travail » et
publiée en mars. « Ces résultats sont
une mine d'or. Ils nous permettent
d'identifier les attentes des tra-
vailleurs », poursuit-il. Dans la même
veine, la CFDT a lancé en 2015 « Ré-
ponses à la carte », un dispositif des-
tiné aux encartés. « Par téléphone, ces
derniers peuvent poser toutes les ques-
tions qui les préoccupent. Cela peut
porter sur leur parcours professionnel,
↑ 12
ENCADRÉS DE L'ARTICLE
leurs droits, des problèmes avec leur
employeur et même sur des théma-
tiques personnelles comme le logement.
Nous nous engageons à répondre dans
les plus brefs délais », expose Hervé
Garnier, secrétaire national de la
CFDT.
Projet d'adhésions « à la carte » Pour
mettre en musique cette stratégie,
tout l'appareil est mobilisé. Par
exemple, la CFDT Cadres a créé le
Créfac, un centre de formation pour
l'accompagnement des cadres. « Nous
voulons les aider à mieux faire leur tra-
vail. L'idée, c'est de les former au ma-
nagement et à ses évolutions », té-
moigne Jérôme Chemin, le trésorier
de la fédération. Ce travail de fond
pour renforcer les liens de
l'organisation avec ses militants
fonctionne puisque celle-ci reven-
dique plus de 800 000 encartés à jour
de cotisations. Seul bémol, « nous
avons un turnover très important. Et
avec les départs à la retraite, nous per-
dons beaucoup d'adhérents. Cela nous
oblige à faire un gros travail pour sé-
duire les jeunes », commente Inès Mi-
nin, secrétaire confédérale. La CFDT
réfléchit à lancer plusieurs offres
d'adhésion, un peu « à la carte », pour
s'adapter aux différents publics et
des applications pour smart-phone
sont en préparation.
En interne, ce réformisme bouscule
parfois les troupes cédétistes. Alors,
pour convaincre, Laurent Berger
sillonne la France une à deux fois par
semaine pour rencontrer des mili-
tants. « C'est primordial de garder le
lien avec la vie quotidienne des tra-
vailleurs », confie le secrétaire géné-
ral. A chaque visite, il se prête au jeu
des questions-réponses, quitte à se
faire malmener par des adhérents en
désaccord comme ce fut le cas avec la
loi travail.
Cette méthode a permis à la CFDT de
ne pas se déchirer, une situation dont
la CGT avait souffert entre 2012 et
2015. Désormais en position de force
dans le privé, la confédération de
Belleville ne compte pas s'arrêter en
si bon chemin. L'objectif ? Détrôner
la centrale de Montreuil dans la fonc-
tion publique en 2018 lors du pro-
chain scrutin. ■
par Florian Fayolle
« Avec les départs à la retraite, nous perdons beaucoup d'adhérents. Cela oblige à faire un gros travail pour sé-
duire les jeunes. » Inès Minin, secrétaire confédérale à la CFDT.“
Tous droits réservés 2017 Challenges
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Parution : Hebdomadaire
Diffusion : 190 233 ex. (Diff. payée Fr.) - © OJD PV 2015/2016
Audience : 632 000 lect. (LDP) - © AudiPresse One 2015/2016
↑ 13
C'est la lutte rivale
N° 518jeudi 20 au mercredi 26 avril 2017
Page 51183 mots
Philippe Martinez (CGT) etLaurent Berger (CFDT). Deuxvisions du combat syndicals'affrontent. Photo : Mei-
gneux/Réa
A u fil du quinquennat, Laurent
Berger est devenu la tête de
Turc de la CGT. A tel point que le lea-
der cédétiste s'est fait copieusement
siffler, début 2016, au dernier
congrès de la centrale de Montreuil.
La raison ? La CFDT est devenue le
partenaire de l'exécutif sans qui au-
cune réforme ne peut se faire. Ce qui
a le don d'énerver le syndicat de Phi-
lippe Martinez, qui voit son influence
et son audience diminuer ces der-
nières années. Les résultats de la re-
présentativité font foi : la CGT perd
1,9 point par rapport à 2013 pour at-
teindre 24,8 % d'audience, contre
26,3 % pour sa rivale de Belleville.
Si les deux hommes se respectent et
s'appellent de temps à autre, ils
s'opposent dans les médias sur de
nombreux sujets et incarnent deux
stratégies radicalement différentes :
l'un revendique un syndicalisme de
lutte, l'autre préfère négocier.
Témoin la loi travail votée en
juillet 2016. Quand Philippe Marti-
nez a appelé à bloquer la France pour
retirer le texte, Laurent Berger a im-
posé au gouvernement ses condi-
tions. • ■
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↑ 14
LE POUVOIR DES INDÉCIS
Laurent Berger « On ne peut pas tout attendre du politique »
Pour le secrétaire général de la CFDT, la question du travail est mal abordée par lescandidats. Surtout, il s'inquiète de la montée du populisme et de la xénophobie, àcontre-courant des valeurs prônées par son syndicat.
N° 3738jeudi 20 au mercredi 26 avril 2017
Pages 16-171182 mots
ENTRETIEN—LE CHOIX DE LA VIE
La Vie. Comment expliquez-vous
que la loi Travail agite encore les
débats de la présidentielle ?
Laurent Berger. Notre pays se nourrit
de symboles : la loi Travail est deve-
nue une ligne de démarcation. Ceux
qui veulent abroger cette loi
s'appellent Marine Le Pen et Jean-
Luc Mélenchon. L'une parce qu'elle
ne croit pas au syndicalisme ; l'autre
parce qu'il est sur une ligne populiste
- « un dirigeant, un peuple » - et qu'il
nie le fait que notre société ait besoin
de se mettre en mouvement. Or, elle
se compose de corps intermédiaires
qui permettent à chacun de partici-
per et de peser sur les décisions
prises collectivement. Je crois à la dé-
mocratie participative pour faire
avancer le bien commun. On ne peut
pas tout attendre du politique.
La question du travail est-elle cor-
rectement abordée au cours de la
campagne ?
L.b. Le sujet est abordé sous des
prismes souvent très réducteurs. Je
pense notamment à la loi Travail ou
à la question du temps de travail qui,
d'après notre enquête, n'est pas la
question centrale pour les salariés.
La plupart d'entre eux veulent rester
à une durée légale de 35 heures.
Comment réagissez-vous à la posi-
tion d'Emmanuel Macron qui veut
réformer le code du travail par or-
donnance ?
L.b. Il méprise l'article 1 de la loi Lar-
cher, qui prévoit que toute réforme
du code du travail doit faire l'objet
d'une négociation. Vouloir réformer
le marché de cette manière est
contraire à la vision de la CFDT.
D'autre part, il estime que les syndi-
cats n'ont pas à concourir à l'intérêt
général et les renvoie donc à la né-
gociation d'entreprise. Nous ne
sommes évidemment pas d'accord.
Benoît Hamon et Jean-Luc Mélen-
chon considèrent de leur côté que la
négociation est un risque pour les
travailleurs et qu'il faudrait tout ca-
drer au niveau national. Je
n'approuve pas davantage.
Emmanuel Macron veut étatiser
l'assurance chômage. Votre point
de vue ?
L.b. J'y suis opposé. Je crois davan-
tage au paritarisme. L'État à lui seul
n'a pas tous les éléments pour dé-
cider des conditions d'indemnisation
et étudier la situation des deman-
deurs d'emploi. Les acteurs du monde
du travail, syndicats et patronat,
doivent continuer à y contribuer. Je
me méfie toujours de ces proposi-
tions qui prétendent renverser la
table.
François Fillon veut porter l'âge
du départ à la retraite à 65 ans.
Qu'en pensez-vous ?
L.b. Nous sommes contre une ré-
forme paramétrique qui consisterait
à jouer sur l'âge, parce que les ré-
formes successives des retraites, de-
puis 2003, produisent des résultats.
Progressivement, nous allons vers
l'équilibre. On peut encore rendre le
système plus juste pour ceux qui ont
des carrières hachées, démarrent tôt,
ont des périodes de chômage, notam-
ment pour les femmes. On peut tra-
vailler sur le qualitatif, pas sur le pa-
ramétrique. Mais mettre la retraite à
65 ans pour tout le monde, c'est une
méthode à la Brutus. Cela n'a aucun
intérêt.
Avez-vous un candidat préféré ?
L.b. Nous ne donnons aucune
consigne de vote. En revanche, nous
avons clairement pris position contre
Marine Le Pen et publié un argumen-
taire pour nos militants. Tant sur la
construction européenne, qui nous
semble indispensable, que sur
l'égalité hommes-femmes (contre
l'idée de salaire maternel pour ren-
voyer les femmes à la maison) ou sur
la question des migrants. Nous refu-
sons toute forme de xénophobie. À la
différence d'autres instances, comme
le Medef, nous n'avons jamais invité
le FN à nos rencontres. Du coup, on
outille nos militants pour aller à la
rencontre des salariés. Le programme
du FN nous conduirait dans une im-
passe économique, sociale et démo-
cratique. Notre vivre-ensemble s'en
trouverait fragilisé.
↑ 15
Comment réagiriez-vous dans le
cas d'un second tour Mélenchon-
Le Pen ?
L.b. Je viens de vous dire que nous
avons un adversaire : le Front natio-
nal. Nous allons tout faire pour
contribuer à ce que Le Pen ne soit
pas qualifiée au second tour. Nos mi-
litants s'activent déjà sur le terrain.
Votre regard général sur la prési-
dentielle ?
L.b. Toutes les outrances marchent.
Nous avons chacun notre part de res-
ponsabilité : nous attendons tous la
mesure phare qui serait facile à expli-
quer. Il n'y en a pas. Cette campagne
est aussi noircie par les affaires. Cela
pèse lourd, y compris dans la capacité
à gouverner par la suite.
Vous êtes engagés sur la question
des migrants. Ce n'est pas banal
pour un syndicat...
L.b. On travaille avec certaines entre-
prises, notamment avec France terre
d'asile et son dispositif Duos de de-
main. Mais ces initiatives restent in-
visibles. Personne ne souhaite trop
que cela se sache. On préfère surfer
sur des trucs qui ne vont pas bien,
alors que des actions positives se
passent.
Cette thématique est-elle traitée
sérieusement ?
L.b. Le démantèlement de Calais a
été bien fait. Des maires ont eu du
courage dans leur politique d'accueil.
Mais l'Europe, par cet accord indigne
avec la Turquie et la France, n'est pas
à la hauteur de son devoir de frater-
nité. La France a un devoir d'accueil,
mais aussi d'intégration pour les ré-
fugiés. Il est important de se rendre
compte que l'on ne migre pas par
choix. Les gens arrivent aux fron-
tières de l'Europe par nécessité : ils
fuient la guerre, la misère...
Traiter des enjeux des migrations de-
mande du courage, des convictions et
de l'objectivité. Pour la CFDT, il est
urgent qu'une politique européenne
globale soit mise en place pour ré-
pondre à la crise migratoire. Il faut
bien évidemment aussi traiter les
causes, qui font que des millions de
gens sont obligés de quitter leur
pays, par des politiques de dévelop-
pement et de fin des conflits. Il faut
répondre à cette crise par une ap-
proche humanitaire.
L'Europe est-elle trop oubliée dans
la campagne ?
L.b. Oui. Pourtant, le vrai sujet est :
va-t-on construire une Europe beau-
coup plus humaine ou la laissera-t-
on décliner ? Quand, lors du second
débat télévisé, Emmanuel Macron dit
à Marine Le Pen : « Je viens d'une ré-
gion qui est pleine de cimetières », elle
lui rétorque que ce sont « de vieux
lieux communs ». Ce n'est pas vrai.
Aujourd'hui, la paix n'est plus ac-
quise.
Aux dernières élections profes-
sionnelles, la CFDT est devenue le
premier syndicat sur le plan natio-
nal dans le secteur privé, devant la
CGT. Est-ce une révolution ?
Nous vivons un moment historique,
parce que la CGT a toujours été la
première centrale de ce pays. Et
maintenant, dans le privé, c'est nous.
C'est une reconnaissance du travail
quotidien effectué par des milliers de
militants de la CFDT, pour défendre
leurs collègues. Cela prouve qu'il y
a de la place pour un syndicalisme
qui regarde la réalité en face, sans
concessions, mais qui s'engage à la
transformer plutôt que de rester dans
le commentaire ou la simple contes-
tation. C'est important de le relever,
car nous avons besoin aujourd'hui
d'une société qui se mette en mou-
vement. C'est ce qui nous manque.
La campagne présidentielle en est la
preuve.
Pourriez-vous être tenté de bascu-
ler en politique ?
L.b. Les secrétaires généraux de la
CFDT se sont engagés à ne pas le
faire. Cela brouillerait le message.
Surtout, on ne fait pas le même job.■
par Pascale Tournier
Tous droits réservés La Vie 2017
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Parution : Hebdomadaire
Diffusion : 90 034 ex. (Diff. payée Fr.) - © OJD DSH 2015/2016
Audience : 499 000 lect. (LDP) - © AudiPresse One 2015/2016
↑ 16
ACTUALITE SOCIALE
↑ 17
JUSTICE
Moins de salariés saisissent les prud'hommes depuis la loi MacronLa réforme de la justice prud'homale introduite par un décret issu de la loi Macron en mai 2016,qui complexifie les procédures pour les requérants, dissuade nombre de salariés de faire valoirleurs droits.
jeudi 20 avril 2017Page 10
839 mots
SOCIAL-ECO
L e bilan d'Emmanuel Macron au
gouvernement aura décidément
été délétère pour les droits des sala-
riés. Plus d'un an et demi après la loi
du 6 août 2015 « pour la croissance,
l'activité et l'égalité des chances éco-
nomiques », dite « loi Macron »,
l'impact de la réforme des
prud'hommes commence à se faire
sentir dans les différents conseils de
France. Entré en application au
1er août 2016, le décret qui précise
les contours des nouvelles procé-
dures a notamment introduit
l'obligation de saisir les
prud'hommes par le dépôt d'une re-
quête écrite extrêmement complexe,
qui semble dissuader nombre de jus-
ticiables de faire valoir leurs droits. Si
les statistiques du ministère de la
Justice s'arrêtent à l'année 2015, trop
tôt donc pour observer l'effet de la
réforme à l'échelle nationale, un peu
partout en France, les conseils de
prud'hommes en perçoivent déjà les
conséquences. « Sur la période allant
d'août à décembre 2016, nous avons
constaté une baisse de 40 % du
nombre de saisines par rapport à la
même période en 2015 », affirme
Anne Dufour, présidente CFDT du
conseil de prud'hommes (CPH) de
Paris, qui précise que cette tendance
s'est poursuivie en janvier et février
2017 avant de s'infléchir légèrement
en mars, où elle a observé « un fré-
missement de reprise ».
Une forte baisse constatée aussi du
côté des prud'hommes de Bobigny,
où l'on observe environ un tiers
d'affaires nouvelles en moins entre le
premier trimestre 2016 et le premier
trimestre 2017. Une diminution telle
que la juridiction a été « obligée
d'annuler un bureau de conciliation
sur le collège de l'encadrement par
manque de demandes », affirme Ja-
mila Mansour, présidente CGT du
conseil de prud'hommes de Bobigny
(Seine-Saint-Denis), pourtant le
deuxième conseil en France en
nombre d'affaires derrière celui de
Paris. « Beaucoup d'entreprises
s'installent, et la Seine-Saint-Denis
compte de grosses structures. On a
beaucoup de plans sociaux sur le ter-
ritoire. La baisse du nombre
d'affaires ne correspond pas à la réa-
lité », précise la juge, qui déplore que
la réforme de la requête « décourage
plus d'un salarié de faire valoir ses
droits ».
Du côté des prud'hommes de Lyon,
on a enregistré une baisse d'environ
40 % des saisines sur la période allant
du mois d'août au mois de février
entre 2015-2016 et 2016-2017, af-
firme Bernard Augier, président du
CPH de Lyon et représentant CGT au
Conseil supérieur de la prud'homie.
Une problématique qui concerne les
affaires au fond mais encore plus les
référés, c'est-à-dire les affaires ur-
gentes. Aux prud'hommes de Paris,
« si on fait la comparaison entre les
trois premiers mois de 2016 et les
trois premiers mois de 2017, les réfé-
rés ont chuté de 47 % », précise Anne
Dufour. A Lyon, le nombre de référés
a chuté quasiment de moitié entre la
période août 2015-février 2016 et
août 2016-février 2017. « En référé,
ce sont souvent des salariés de PME
qui saisissent les prud'hommes seuls,
pour obtenir des rappels de salaire ou
des attestations Pôle emploi, qui
n'ont pas l'argent pour prendre un
avocat et qui ne côtoient pas de syn-
dicalistes. Ce sont parfois des per-
sonnes qui ne maîtrisent pas bien le
français, et qui ne sont pas en capaci-
té de remplir la requête écrite », ana-
lyse Anne Dufour.
Pour Claude Lévy, défenseur syndical
CGT aguerri, cette réforme participe
d'une tentative de « professionnali-
sation des prud'hommes ». « Avant,
on pouvait mandater un syndicaliste
d'une union locale pour défendre un
salarié. Maintenant, il faut être dési-
gné défenseur syndical, sur une liste
agréée. Il faut constituer tout le dos-
sier dès la saisine. On n'a pas le droit
à l'erreur dans les demandes, il faut
produire l'ensemble des pièces dès le
début. Si on oublie quelque chose, il
faut refaire une procédure »,
explique-t-il. Des tâches impossibles
à réaliser dans le crédit de dix heures
mensuelles magnanimement alloué
aux défenseurs syndicaux par le dé-
cret issu de la loi Macron. « On a un
peu perdu l'esprit des prud'hommes,
qui sont censés être une juridiction
de proximité, où les salariés peuvent
venir s'expliquer devant les juges »,
↑ 18
déplore Claude Lévy. « On subit la
volonté du patronat, bien aidé par
Macron, de complexifier les règles
d'accès aux prud'hommes », analyse
Bernard Augier. ■
par Loan Nguyen
Tous droits réservés L'Humanité 2017
7199C3DB8E70680C95101B30D00F11C04C05AB2EE81E30C51F5DAF9
Parution : Quotidienne
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Audience : 363 000 lect. (LNM) - © AudiPresse One 2015/2016
↑ 19
CONSTRUCTION NAVALE
La CGT met la pression sur FincantieriLe patron du futur repreneur des chantiers STX s'est rendu hier à Saint-Nazaire pour rencontrerla direction actuelle et les syndicats.
jeudi 20 avril 2017Page 11
669 mots
SOCIAL-ECO
À Saint-Nazaire, le futur
repreneur des ex-Chantiers de
l'Atlantique était, hier, attendu de
pied ferme pour sa première visite,
après l'annonce le 12 avril dernier
d'un accord de principe sur la reprise
de STX France. Une centaine de sala-
riés avaient débrayé pour se rassem-
bler devant les bureaux de la direc-
tion, où le staff de l'armateur italien
Fincantieri ainsi que son patron, Giu-
seppe Bono, avaient rendez-vous
avec les syndicats pour un comité
d'entreprise extraordinaire. L'objectif
pour le patron italien est de rassurer
les salariés sur l'accord de principe
conclu avec l'état français, qui refuse
une nationalisation temporaire du
chantier.
Le groupe s'était engagé à ne pas dé-
truire d'emplois « dans les cinq ans
qui viennent », avait indiqué le secré-
taire d'état à l'Industrie, Christophe
Sirugue. Hier, le PDG de Fincantieri
a réitéré sa promesse d'un modèle de
gouvernance « autonome » à Saint-
Nazaire. « Je suis convaincu que ce
glorieux chantier pourra enfin at-
teindre la stabilité qu'il n'a pas eue au
cours des dernières années », a lan-
cé Giuseppe Bono aux journalistes. «
Nous sommes venus ici parce que
nous pensons que, ensemble, nous
pouvons augmenter la valeur de
l'entreprise », a-t-il ajouté, après
avoir précisé que des « synergies »
entre les deux entités étaient réali-
sables au niveau des achats de ma-
tières premières. « On n'est pas un
investisseur qui arrive et qui repart
en courant : on n'est pas investisseur
de métier, on est industriel », a-t-il
certifié.
A la sortie, la déception était pal-
pable. « Nous n'avons rien appris de
nouveau, a tranché le délégué syn-
dical CGT STX, Sébastien Benoît. Ils
ont tenté de nous rassurer en nous
expliquant que l'équipe de direction
actuelle de STX France serait mainte-
nue et que rien ne changerait. Ce qui
ne nous satisfait pas puisque c'est la
continuation d'une politique que l'on
dénonce depuis des années. » Depuis
deux semaines, les salariés multi-
plient les débrayages. En cause, la
suppression cette année de la prime
d'intéressement, alors que les carnets
de commandes sont pleins. « Ce qui a
provoqué la colère de tout le monde.
Lors des dernières négociations sala-
riales, la direction a lâché une hausse
générale des salaires de 0,7 %, soit
une moyenne de 10 à 15 euros brut
de plus par mois », explique la CGT.
Or, selon le syndicat, les nouveaux
embauchés sont payés 9,23 euros de
l'heure, soit en deçà du taux horaire
du Smic, à 9,76 euros brut. Dans les
chantiers italiens, la part variable est
de plus en plus importante et indivi-
dualisée en fonction de la producti-
vité de chaque salarié, s'inquiète Sé-
bastien Benoît. Grâce à cette mobili-
sation, le patron de Fincantieri est «
prévenu ». « Nous ne lâcherons rien
sur le volet social », insiste le syndi-
caliste, qui promet de nouvelles ac-
tions, la semaine prochaine.
La veille de la venue de Fincantieri,
une nouvelle offre de reprise via les
deux principaux clients de STX, les
armateurs Royal Caribbean Cruise
Line (RCCL) et Mediterranean Ship-
ping Company (MSC), a fait surface.
Un projet dans lequel les armateurs
disposeraient de 40 % des parts des
chantiers, l'état 33 %, la DCNS 15 %
et le reste serait détenu par les sa-
lariés. Un projet qui pourrait voir le
jour uniquement si l'état se décide,
au nom des intérêts stratégiques, à
préempter les parts de STX. Ce qu'il
a jusqu'ici refusé. Reste que cette op-
tion est loin d'être le plan B des sa-
lariés. « Je ne vois rien de bénéfique
pour les travailleurs. L'objectif des
croisiéristes est d'obtenir la baisse la
plus importante du prix des navires »,
a balayé le syndicaliste. ■
par Clotilde Mathieu
Tous droits réservés L'Humanité 2017
249BF3088C60450EA57310204202D1EE4445CC2F287637D4F25BF1E
Parution : Quotidienne
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↑ 20
Fincantieri en opération séduction à Saint-NazaireLe président du groupe italien est venu mercredi sur le site des chantiers navals.Objectif : rassu-rer les syndicats de STX France.
N° 22429jeudi 20 avril 2017
Page 17656 mots
INDUSTRIE & SERVICES—CONSTRUCTION NAVALE
Fincantieri poursuit son opération
séduction à Saint-Nazaire, après
avoir signé, le 12 avril dernier, avec
l'Etat français (actionnaire à 33 %) un
accord établissant un nouveau tour
de table pour STX France, qui lui
conférera 48 % du chantier naval
contrôlé jusqu'à présent par les Sud-
Coréens.
En visite sur place mercredi, Giu-
seppe Bono, le patron du groupe na-
val italien, a exposé dans la matinée
son projet aux représentants syndi-
caux. « Nous leur avons dit qu'étant
italiens, nous n'avions pas une âme
colonialiste », a-t-il indiqué lors
d'une conférence de presse. Renou-
velant sa confiance à l'actuelle direc-
tion, le PDG de Fincantieri a promis
un modèle de gouvernance « auto-
nome » pour les ex-Chantiers de
l'Atlantique. Ce qui n'empêchera pas
d'importantes synergies, a signalé le
dirigeant, notamment dans les
achats d'acier. Fincantieri en achète
150.000 tonnes par an et STX France
50.000.
Un contexte idéal
Pour Giuseppe Bono, le contexte est
idéal pour une telle fusion, Saint-Na-
zaire disposant d'un carnet de com-
mandes de 10 navires plus 4 en op-
tion, lui assurant du travail pour les
dix prochaines années. STX France
jouera, qui plus est, un rôle essentiel
dans la construction des grands na-
vires, au-delà de 180.000 tonneaux,
gabarit pour lequel le groupe italien
est mal équipé. Côté Fincantieri, «
nous avons livré 52 navires en quinze
ans, et nous en avons encore 29 dans
notre portefeuille et ce chiffre va en-
core augmenter dans un avenir
proche », a rappelé le PDG, avant
d'ajouter : « Nous allons travailler
pour préparer l'avenir. Nous ne
sommes pas des investisseurs, nous
sommes des industriels. Ce que nous
regarderons, ce n'est pas la dernière
ligne du bilan. »
Giuseppe Bono a aussi voulu désa-
morcer les craintes des syndicats sur
un éventuel transfert d'activité vers
l'Italie. « Les navires se construisent
là où ils sont conçus », a-t-il expli-
qué, en affirmant qu'il n'est pas ques-
tion non plus de dépouiller les bu-
reaux d'études nazairiens. « Les
nôtres travaillent déjà pour huit
chantiers, cela leur donnerait de
nouvelles migraines », a-t-il lancé.
Quant à l'avenir de la sous-traitance
locale, « cela ne sert à rien d'importer
des choses d'Italie, car ça coûte cher
», a répondu le dirigeant.
Autre inquiétude exprimée par les
syndicats, celle relative à l'accord
scellé avec le chinois CSSC. Le patron
de Fincantieri a indiqué qu'il n'était
en rien un transfert de savoir-faire
mais seulement de plans pour des pa-
quebots « spécifiquement construits
pour répondre à une demande chi-
noise ». Enfin, sur la diversification
engagée par STX France dans le mi-
litaire, là encore Giuseppe Bono s'est
voulu rassurant. Selon lui, Saint-Na-
zaire a davantage de chances
d'exister sur ce marché avec DCNS et
Fincantieri pour alliés. « Je pars du
principe que l'on doit consolider
l'industrie européenne car cela nous
permettra de nous renforcer face à la
concurrence », a-t-il indiqué.
« Carte postale d'Italie »
« Cette rencontre avait un côté carte
postale d'Italie, a réagi François Jan-
vier, responsable de la CFE-CGC chez
STX France. Toutes nos exigences
ont été acceptées et nous aurons,
comme nous le demandions, accès au
pacte d'actionnaires. » Reste une in-
certitude : si le prochain président de
la République française décidait de
revenir sur la décision prise par
l'actuel exécutif, en faisant valoir son
droit de préemption. Giuseppe Bono
a admis qu'il « pourrait nous déclarer
persona non grata. Ce serait un peu
dur après avoir accepté, en 2008, les
Coréens. Mais je suis serein », a-t-il
conclu. ■
par Antoine Boudet
↑ 21
ENCADRÉS DE L'ARTICLE
Nous n'avons pas une âme colonialiste.
Tous droits réservés Les Echos 2017
8D9AC36E8030E900B5421840660EC1044C15A327983137EC46F8641
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↑ 22
Chez McDo, la foire aux revendications socialesIci, les raisons d'interpeller les candidats sur les conditions de travail ne manquent pas.
jeudi 20 avril 2017Page 8
370 mots
SOCIAL-ECO
«évasion fiscale, bas salaires,
contournement du droit de la repré-
sentation du personnel, absence de
majoration pour le travail du di-
manche et de nuit Les revendications
sont nombreuses et variées chez Mc-
Donald's et nous devons nous faire
entendre. Nous avons interpellé les
candidats à la présidentielle afin de
poser dans le débat ces sujets absents
des premiers tours de table, en leur
indiquant bien de rester dans le credo
de notre marque : « Venez comme
vous êtes. » Emmanuel Macron s'est
illustré en refusant de nous rencon-
trer Absence assumée mais regret-
table au vu de son omniprésence mé-
diatique, car nous aurions voulu sa-
voir pourquoi nous, salariés, devrions
payer l'impôt que notre employeur
ne paie pas, ce qu'il veut dire par «
renforcer » le dialogue social alors
que McDonald's contourne le droit de
la représentation pour ne pas avoir
d'interlocuteur et réprime à tout va
quand il en existe, pourquoi conti-
nuer à donner autant d'aides pu-
bliques à ces multinationales qui
confisquent les richesses colossales
que nous créons au quotidien, com-
ment il est possible de vivre décem-
ment lorsqu'on vous impose un
contrat à temps partiel rémunéré au
Smic horaire. Il aurait sans doute fal-
lu un peu plus que sa novlangue libé-
rale pour nous convaincre
Cette foire aux questions sociales a
interpellé d'autres candidats. Tous
ont condamné avec plus ou moins de
vigueur ces techniques de maximisa-
tion sauvage des profits, avec une in-
tention manifeste de responsabiliser
ces entreprises. Chose inédite, les ré-
férences à McDonald's ont été nom-
breuses dans les meetings de Jean-
Luc Mélenchon. « Ils nous volent 75
millions (d'impôts par an) et on leur
donne 50 millions (de Cice par an) »,
pouvait-on entendre lors de ses dis-
cours, jusqu'à même annoncer sur un
plateau de télévision : « Ceux-là (les
dirigeants de McDo), je les pour-
chasse jusqu'en enfer. » Des paroles
concrètes qui pourraient légitime-
ment inciter à aller voter. Reste à sa-
voir si nos conditions de vie et de tra-
vail changeront par les luttes dans
lesquelles nous restons pleinement
engagés, ou bien grâce à une poli-
tique nouvelle. »
Gilles Bombard ■
Propos recueillis par Pierric Maris-
sal
Tous droits réservés L'Humanité 2017
239B23C58E30A90F15E81190DB0951E249C5692F481C319713089B2
Parution : Quotidienne
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↑ 23
A l’usine PSA de Sochaux, le bulletin «espoir» contre le bulletin «ras-le-bol»
Sur les chaînes du constructeur, les ouvriers parlent racisme et fatalisme. Et hésitent entreMélenchon, Le Pen et l’abstention.
N° 11169jeudi 20 avril 2017
Édition(s) : PrincipalePage 4
739 mots
ÉVÉNEMENT
A 13 h 12, à l’usine PSA de
Sochaux, c’est l’heure du chan-
gement d’équipe. Un moment où les
rues de la commune de 4 000 habi-
tants collée à Montbéliard
connaissent un pic d’activité éphé-
mère. Il y a les ouvriers qui arrivent
et ceux qui repartent. Les salariés
de«la Peuge» font les trois huit. Long-
temps plus gros employeur industriel
de France (c’est désormais Airbus) le
site compte aujourd’hui moins de 10
000 employés, contre 40 000 dans les
années 70. A l’un des portiques de
sortie, Eric rejoint sa voiture. Regard
azur et oreille gauche percée, cet ou-
vrier - on dit «opérateur» - sur une
ligne de Citroën DS5 est certain
d’aller voter dimanche. Pour Le Pen
ou Mélenchon. Ce qui les distingue ?
«Les migrants et tout ce qui y touche.
L’un veut tout ramener, et l’autre tout
dégager.Moi, je pense qu’il en faut un
peu. Mais il faut remettre de l’ordre, vu
ce qui se passe.» Comprendre : le ter-
rorisme.
«Extrême bleu». Sur l’Europe, en re-
vanche, Eric trouve que les deux can-
didats se rejoignent. Il ajoute : «En-
fin, c’est peut-être pas le bon moment
pour quitter l’Europe, on risque la troi-
sième guerre mondiale. Peut-être que
Le Pen pourrait repousser un peu tout
ça…» Dans le flot qui sort par un
autre accès, si on confie volontiers
son vote Mélenchon, le choix pour le
bulletin Le Pen est plus difficile à for-
muler. C’est parfois une périphrase
qui le dit : «Je voterai extrême bleu.»
Sur le parking, Emilie, «intérimaire
chez PSA depuis toujours», assure
qu’elle ne se déplacera pas dimanche.
«En France, soit on est cassos [cas so-
cial, ndlr] et on a toutes les aides, soit
on travaille et on ga-
lère.»«L’assistanat» est aussi un pro-
blème pour Séverine, et sa solution
s’appelle «Marine».
Cette mère de famille, employée ici
depuis seize ans, estime que «la
France multiculturelle, elle est belle de
loin, mais dure de près». A côté d’elle,
son ami Charly l’attend. Ils partagent
la voiture et les mêmes idées. «Elle
sent bon la France, Marine», abonde
le jeune intérimaire. «Des fois je suis
le seul Français au boulot. Ils parlent
tous arabe. Pas australien, hein,
arabe», insiste-t-il. Séverine affirme
que dans l’usine, on choisit Mélen-
chon ou Le Pen «en fonction de sa
confession religieuse». Pour Cédric, un
délégué CGT rencontré un peu plus
tôt au PMU voisin, il n’y a pas de
mystère : «Le vote FN est un vote ra-
ciste. Moi, je ne suis pas raciste alors je
vote Mélenchon.»
Christian, un autre mélenchoniste
qui vient de finir sa journée, propose
une autre grille de lecture : La France
insoumise est un vote «espoir» - «le
salaire à 1800 euros, la retraite à
60 ans…» - et le choix FN, un vote
«ras-le-bol». Dimanche, il prévoit un
«monde ouvrier» coupé en ces deux
blocs. Au grand dam de Richard, mi-
litant PS et technicien chez PSA,
unique soutien de Benoît Hamon
croisé ce jour-là. «Les gens sont un
peu fatalistes, et quand on est fata-
listes, on fait des conneries en général»,
avance-t-il, s’inquiétant d’une abs-
tention «supérieure à 2002». Il fustige
une campagne où «celui qui n’est pas
engagé n’y comprend rien. Il faut voir
l’épaisseur du brouillard dans les yeux
des gens…»
Oubliés. Sur le bitume de PSA, dans
ce territoire traditionnellement de
gauche, la colère est souvent pal-
pable. Pour Christophe, la gauche
maintenant, c’est Mélenchon : «J’ai
toujours voté PS, mais ce que Hollande
nous a fait…» Vendredi, en déplace-
ment dans son usine, le chef de l’Etat
regrettait les «poussées extrémistes»
récurrentes en Franche-Comté. «On
doit dire que l’extrême droite n’a pas sa
place», déclarait-il. Mais ici, et mal-
gré l’aide financière de l’Etat qui a
contribué à relancer leur entreprise
en 2014, les salariés ont le sentiment
d’être oubliés. D’être privés
d’augmentation de salaire quand le
grand patron touche des millions.
A la permanence CGT de Sochaux,
Anthony et Patrick cogitent sur ce
vote FN qui «évolue gentiment» depuis
des années. Pour ces délégués syn-
dicaux, c’est l’échec de la gauche.
L’échec des mouvements sociaux,
aussi : «On n’a pas eu de lutte victo-
rieuse massive depuis un moment. Les
retraites, la loi travail…» Anthony vo-
tera Nathalie Arthaud, Patrick hésite
: «Dommage que Mélenchon et Hamon
ne se soient pas entendus.» Devant
l’usine, Badreddin aussi est indécis.
Un dilemme «Mélenchon-Macron»
qu’il n’avait pas vu venir. Il veut vo-
ter utile, et pour un candidat un peu
«social», alors jusqu’à récemment, il
ne voyait que le candidat d’En
marche. Mais voilà, contre toute at-
↑ 24
tente, Mélenchon est devenu «gros»,
et Badreddin, bien embarrassé. ■
Tous droits réservés Libération 2017
0d9c038383f0a80395841d402f06911c45259020087a33809e6ceb3
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↑ 25
Aux Herbiers, «le faible taux de chômage est encore un rempart»
En cette terre de Vendée, proche du plein-emploi, les ouvriers se disent malgré tout encolère et comptent la partager. Mais peu admettent pencher pour le FN.
N° 11169jeudi 20 avril 2017
Édition(s) : PrincipalePage 6
779 mots
ÉVÉNEMENT
I mmergés en plein bocage
vendéen, Les Herbiers semblent
vaccinés contre la sinistrose. Une di-
zaine d’agences de recrutement aux
vitres saturées d’annonces coha-
bitent dans cette commune de 15
000 habitants. «On recrute, on
forme», proclame, en rouge, une en-
treprise de viande à l’orée de la zone
industrielle. Fin 2016, le chômage
plafonnait à 5,3 %, soit un niveau
proche du plein-emploi. Le souvenir
des guerres de Vendée, pivot de
l’identité locale, aurait renforcé
les solidarités et stimulé l’initiative
individuelle. Depuis une trentaine
d’années, les entrepreneurs locaux
ont accouché de PME prospères.
Dans les environs, 116 entreprises
industrielles se sont installées, dont
des fleurons de l’agroalimentaire, de
la construction et de la métallurgie :
Fleury-Michon, La Boulangère, Ge-
neral Transmissions, Briand, K-
Line… Les postes d’ouvriers repré-
sentent encore 40 % des emplois.
Charles a emménagé aux Herbiers il y
a un mois, sur les conseils d’un ami.
Ce trentenaire aux yeux bleus, ancien
électricien dans le bâtiment, équipe
désormais les bateaux de plaisance
des Chantiers Jeanneau, deuxième
constructeur au monde.«J’ai quitté
Paris le vendredi, se souvient-il. Dès le
mardi, j’embauchais.»
A 13 heures, devant l’entrée de
l’usine, le portique libère les salariés
qui ont pris leur poste à l’aube. La
présidentielle commence à occuper
les esprits. La poussée du vote FN se
ressent aussi en Vendée. Le Mouve-
ment pour la France (MPF) de Phi-
lippe de Villiers, résident des Her-
biers, a longtemps monopolisé le cré-
neau de l’extrême droite. En 2012,
Marine Le Pen avait recueilli 10,6 %
des suffrages, derrière Nicolas Sarko-
zy, François Hollande et François
Bayrou. Mais à 10 kilomètres du Puy
du Fou, «le FN a des velléités
d’avancer», observe Daniel Charrier,
président de Forum citoyen,
l’opposition de gauche à la maire
MPF.
Ouvrière chez Jeanneau, Claudine,
55 ans, chevelure rousse, votera Ma-
rine Le Pen. En 2012, elle «était de
gauche pour Hollande», mais trouve
que «l’on fait trop de social» : «Des
gens qui ne travaillent pas» gagne-
raient plus que des ouvriers, comme
elle, à 1 200 euros par mois. Claudine
s’appuie sur le témoignage de sa fille,
employée dans l’immobilier. «Elle a
du mal à récupérer les loyers des ou-
vriers au smic, alors que des familles
qui reçoivent des aides bouclent sans
problème les fins de mois.» Elle
compte sur Marine Le Pen pour «faire
le ménage et arrêter de faire entrer des
étrangers en France».
Stéphanie, 40 ans, est tout aussi lasse
de travailler pour pas grand-chose.
La jeune femme qui semble flotter
dans sa tenue de chantier a perdu
«250 euros par mois» depuis que sa
boîte, une entreprise de béton, a sup-
primé des primes en contrepartie du
compte pénibilité. «Mère seule avec
deux petites filles», elle n’a «droit à au-
cune aide» parce qu’elle travaille,
alors que, pense-t-elle, d’autres
«touchent plus sans rien faire». Aux
Herbiers, «les salariés n’ont jamais
ménagé leurs efforts, observe Patrick
Legras, membre de l’exécutif dépar-
temental à la CFDT. Ils ont accepté
des salaires bas pour aider à
l’attractivité du territoire, mais ils
commencent à en avoir marre.» Dans
les entreprises familiales à tendance
paternaliste, les syndicats sont peu
puissants, les mouvements sociaux
très discrets. Mais, de l’avis de la CGT
et de la CFDT, cette frustration
n’ouvre pas un boulevard au FN. Sté-
phanie n’est «pas Le Pen du tout».
Comme Gaël, qui fabrique des pièces
en acier et rejette «son racisme».
Alain, 51 ans, au service découpe du
polyester, a été un temps «attiré» par
le Front, «par dépit, pour faire bouger
les autres». Il en est revenu. «Le Pen
est convoquée par le juge et n’y va pas,
alors que nous, les gendarmes seraient
venus nous chercher !»«Dans une ré-
gion comme la Vendée, très tournée
vers le tourisme, on a besoin de rester
ouverts sur le monde», soutient aussi
Lionel, magasinier. Patrick Legras es-
time que «le faible taux de chômage
est encore un rempart». D’autres
évoquent l’influence encore forte,
sur ces terres catholiques, des jeu-
nesses ouvrières chrétiennes.
Qui alors pour emporter le vote ou-
vrier ? Aux Herbiers comme ailleurs,
leur premier parti pourrait être
l’abstention. Stéphanie et Gaël ne se
rendront pas aux urnes. Charles, abs-
tentionniste depuis cinq ans, va don-
ner sa voix à Jean-Luc Mélenchon,
↑ 26
qui promet la lutte contre l’évasion
fiscale et le retrait de la loi El Khom-
ri, «ce meurtre des ouvriers». Le jeune
homme a parlé politique «au taf» ces
derniers jours. Ses collègues
penchent comme lui «presque tous
pour Mélenchon ou Le Pen». Le week-
end de Pâques, les militants du Front
de gauche ont d’ailleurs tapissé
d’affiches la zone industrielle.
Plombier-électricien, Quentin,
21 ans, choisira Philippe Poutou. Le
seul qui «sait ce que vivent les ouvriers
et s’intéresse plus aux petits qu’aux
gros». Alain pourrait aussi se laisser
tenter par «ce petit gars tranquille qui
ne se croit pas au-dessus des lois». «Au
moins j’aurai voté, ça me donnera le
droit de critiquer celui qui sera élu». ■
par Alexia Eychenne
Tous droits réservés Libération 2017
499503f78e30560ce57911e0d80271ac4385072e3881391e89ccc3e
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↑ 27
Un record d'intentions d'embauche pour 2017Pour cette année, les entreprises françaises ont l'intention d'embaucher 150 000 personnes deplus qu'en 2016. Selon Pôle emploi, cette progression constitue un record depuis 2002.
jeudi 20 avril 2017Page 12
438 mots
ECONOMIE—RUBRIQUE
D u jamais vu depuis 2002, date
de la première enquête an-
nuelle de Pôle emploi sur les inten-
tions d'embauche des entreprises
françaises. Pour 2017, ces dernières
envisagent de recruter près de 2 mil-
lions de personnes, soit 8,2 % de plus
qu'en 2016. « C'est un record », a pré-
cisé hier Stéphane Ducatez, directeur
des statistiques de Pôle emploi, à
l'occasion de la présentation du cru
2017.
Deux autres indicateurs montrent
que des vents favorables soufflent sur
le marché du travail : dans près des
deux tiers des cas, ces intentions
d'embauche sont motivées par un
surcroît d'activité ou par la création
d'une activité, et non pas pour rem-
placer des salariés sur le départ ;
quant à la part des embauches en
CDI, elle progresse d'une année sur
l'autre, passant de près de 36 % à 38,4
% en 2017. Au total, la part des em-
plois durables – CDI et CDD de plus
de six mois – représentent 57,5 % des
intentions d'embauche.
« Ce mouvement est tiré par les PME
», souligne Stéphane Ducatez. Et
même par les très petites entreprises
: les intentions d'embauche des en-
treprises de moins de 5 salariés enre-
gistrent un bond de près de 14 %. Une
tendance importante à relever « alors
même que les demandeurs d'emploi
n'ont pas toujours le réflexe de dé-
marcher les petites entreprises »,
rappelle Stéphane Ducatez.
Reflet de la structure de l'économie
française, le secteur des services sera
encore en 2017 le plus gros pour-
voyeur d'emplois. À lui tout seul, le
secteur des services à la personne de-
meure le premier recruteur de
France, avec un besoin total estimé
cette année à 794 000 personnes.
Mais Pôle emploi souligne le dyna-
misme du secteur de la construction
qui prévoit, autre record, de recruter
22,5 % de plus en 2017. « La reprise
amorcée l'an dernier se confirme
après plusieurs années difficiles »,
précise l'étude. Le secteur industriel
donne lui aussi des signes de
meilleure santé, avec une progres-
sion attendue des embauches de 8,7
%.
Comme toujours en période de re-
prise, les entreprises anticipent des
difficultés de recrutement. Les mé-
tiers les plus en tension – pour les-
quelles les entreprises pensent avoir
le plus de mal à trouver des candidats
répondant à leurs besoins – sont
cette année les carrossiers, certains
métiers qualifiés de la construction
ou de l'industrie (couvreurs zin-
gueurs, chaudronniers, etc.) mais
aussi les médecins. ■
par Emmanuelle Réju
Tous droits réservés La Croix 2017
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↑ 28
MOUVEMENTS SOCIAUX
↑ 29
A Paris, les ouvriers d'Amiens font le deuil de leurs emplois
jeudi 20 avril 2017Page 4
529 mots
INTERNATIONAL
Ras le bol des politiques ! C'est Marine
- Le Pen - la solution ! ", s'époumone
un employé de Whirlpool qui inter-
pelle Edouard Martin devant les ca-
méras. L'ancien délégué syndical de
l'usine ArcelorMittal de Florange
(Moselle), devenu député européen
en 2014, devait probablement
s'attendre à cette scène lorsqu'il a dé-
cidé de venir témoigner son soutien
aux salariés amiénois du fabricant de
sèche-linge. Elu sous l'étiquette so-
cialiste, soutien affiché de Benoît Ha-
mon, il cristalliseune partie de la co-
lère des employés de Whirlpool. Eux
qui voient leur travail délocalisé en
Pologne, sous la mandature d'un pré-
sident de gauche.
" Si c'est ça l'Europe, mieux vaut que la
France se retire ", affirme de son cô-
té Evelyne Sinoquet, opératrice dans
la chaîne de production de Whirlpool
depuis vingt-deux ans, venue mani-
fester à Paris comme 150 autres sa-
lariés de l'usine d'Amiens. Elle confie
que le sentiment de dégoût à
l'encontre de la classe politique est
" largement partagé " parmi ses col-
lègues. " Il y en a beaucoup qui veulent
essayer autre chose ", assure-t-elle,
évoquant sans la nommer Marine Le
Pen. Plusieurs salariés portent des
autocollants pour soutenir François
Ruffin, le réalisateur de Merci Patron
!, candidat à Amiens aux législatives.
En attendant des réponses des actuel
et prochain gouvernements, les ma-
nifestants ont symboliquement " en-
terré " les 286 emplois d'Amiens sur
les marches du monument des droits
de l'homme. " Tués par Whirlpool ",
peut-on lire sur la tombe en carton
confectionnée pour l'occasion.
Des ouvriers désabusés
Aux abords de la tour Eiffel, des re-
présentants de Jacques Cheminade
(Solidarité et progrès), François As-
selineau (Union populaire républi-
caine) et donc de Benoît Hamon
étaient venus officiellement soutenir
les salariés de Whirlpool. Entre par-
tisans du " Frexit ", comme M. As-
selineau, et tenants d'une Europe so-
ciale, ils ont surtout débattu des ef-
fets, ou méfaits, de la législation eu-
ropéenne sur l'industrie française.
Sans réellement réussir à capter
l'attention des ouvriers, majoritaire-
ment désabusés par les discours des
prétendants à l'Elysée.
Le candidat d'En marche ! à la prési-
dentielle, Emmanuel Macron, ne s'est
pas déplacé mais a promis, mardi,
qu'il rendrait visite " entre les deux
tours " aux salariés de l'usine, même
s'il était éliminé dimanche au pre-
mier tour.
Christine Leitao, ouvrière de Whirl-
pool, a tout même pris le temps de
discuter avec Nathalie Arthaud
(Lutte ouvrière), seule candidate ve-
nue en personne rencontrer les sala-
riés de Whirlpool. Elle ira voter di-
manche 23 avril, sans pour autant
croire à une reprise. La manifestation
de mercredi est " pour les générations
futures ", affirme-t-elle. Son cas per-
sonnel ? Rien de concret n'est à es-
pérer avant la fermeture de l'usine :
" J'ai déjà commencé à rechercher un
autre travail. Mais il faut attendre
d'être au chômage pour pouvoir postu-
ler. "
Arthur Laffargue■
par Arthur Laffargue
Tous droits réservés Le Monde 2017
CB98532F84F0F803459C1FA00205A1424625382BD8C43FDB5B7AB59
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↑ 30
Des salariés de GM&S manifestent à Paris
mercredi 19 avril 2017 11:11475 mots
Environ 150 salariés du fabricant de pièces automobiles GM&S de La Souter-
raine (Creuse) se sont invités mercredi sur les Champs-Elysées pour "deman-
der du travail" à leurs principaux donneurs d'ordre P...
Environ 150 salariés du fabricant de pièces automobiles GM&S de La Souter-
raine (Creuse) se sont invités mercredi sur les Champs-Elysées pour "deman-
der du travail" à leurs principaux donneurs d'ordre PSA et Renault, a consta-
té une journaliste de l'AFP. GM&S Industry, spécialisée dans la fabrication de
pièces pour l'industrie automobile et l'un des premiers employeurs du dépar-
tement (283 personnes), a été placé en redressement judiciaire le 2 décembre
et est sous observation jusqu'au 23 mai.
Les manifestants, en tenue de travail grise et bleue, sont restés une heure de-
vant le showroom de Renault avant de rejoindre celui de PSA, fermé par pré-
caution.
A grand renfort de trompes, klaxons et pétards, ils ont brièvement entravé la
circulation sur les Champs-Elysées, puis autour de l'Arc de triomphe, avant de
gagner l'usine PSA de Poissy (Yvelines) où ils entendent rester "au moins jus-
qu'à jeudi". Depuis le début d'après-midi, ils ont entrepris de bloquer les en-
trées des camions dans l'usine, selon la direction du site interrogée par l'AFP.
La CGT affirme que les sorties sont elles aussi empêchées. Pour autant, "la pro-
duction se fait normalement", précise la direction.
Le DRH du groupe, Xavier Chéreau, a dénoncé auprès de l'AFP une situation
"inacceptable", "de nature à remettre en cause la contribution de PSA qui a
toujours initié une dynamique positive". Le groupe affirme être le seul à avoir
maintenu son niveau de commandes quand "les autres clients ont sciemment
abandonné GM&S", selon un porte-parole. Une délégation devait être reçue
dans l'après-midi. Début avril, le PDG de PSA, Carlos Tavares, avait déjà ren-
contré les organisations syndicales.
Sur les Champs-Elysées, les ouvriers ont distribué aux touristes des tracts ex-
pliquant leurs difficultés. Avec sur leur dos les slogans publicitaires des deux
constructeurs ("Les immanquables PSA" et "La French Touch de Renault") ac-
compagnés de l'inscription: "la casse d'une entreprise planifiée".
Leur revendication : que les donneurs d'ordre, déjà cible de plusieurs actions
ces dernières semaines, augmentent leur volume de commandes à hauteur de
40 millions d'euros, contre 15 millions actuellement, selon la CGT. "On de-
mande du travail, rien de plus, à Renault et PSA", résume Guy Decars, entré
chez GM&S en 1975.
Une seule offre de reprise, venant du groupe GMD, permettrait pour l'heure
de conserver "entre 90 et 100 personnes", selon le délégué CGT Yann Augras.
Mais celle-ci "peut évoluer, tout dépend de Renault et PSA", veut croire un sa-
larié.
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"On est sûr qu'il va y avoir une grosse casse sociale", mais "on se bat pour es-
sayer de gagner quelques personnes", précise Christophe Bailly, 52 ans, qui re-
doute de vivre prochainement un quatrième licenciement.
Lire aussi :
>> Des salariés de GM&S Industry bloquent des sites de Renault et PSA
dans l'Yonne et l'Allier
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EUROPE ET INTERNATIONAL
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Le renouveau de Lodz, bastion polonais de Whirlpool
La ville attire les entreprises avec sa tradition industrielle, ses bas salaires et sesexemptions de taxe
jeudi 20 avril 2017Page 4
1667 mots
INTERNATIONAL
Al'heure du changement d'équipe,
devant les grilles de l'usine Whirlpool
de Lodz, dans le centre de la Pologne,
on ne s'attarde pas vraiment. Les
rares ouvriers qui acceptent de ré-
pondre aux questions sur la ferme-
ture annoncée de l'usine d'Amiens du
géant américain de l'électroménager,
le font avec prudence. " Oui, on a vu
sur Facebook ", répond rapidement
l'un d'entre eux, en sirotant une bière
avant de sauter dans son bus. La plu-
part ne savent pas que les 300 sup-
pressions de postes sont devenues un
sujet de préoccupation majeure dans
la campagne présidentielle française.
" C'est triste pour eux ", avancent tou-
tefois Ryszard et Maciej, qui tra-
vaillent depuis une quinzaine
d'années dans cette usine que tout le
monde appelle encore ici " Indesit ",
du nom de la marque italienne rache-
tée par Whirlpool en 2014.
Derrière les grilles, ils sont 2 200 –
sur les 5 500 salariés de la marque
dans le pays –, à produire des ré-
frigérateurs et des cuisinières pour
toute l'Europe.
Depuis l'annonce du transfert, d'ici à
2018, de la ligne de sèche-linge pi-
carde, la direction de Whirlpool re-
fuse d'ouvrir les portes de l'usine à la
presse " en raison des négociations en
cours à Amiens ". Et les ouvriers polo-
nais n'ont pas été informés de la fu-
ture organisation de la production. "
On n'est même pas sûr qu'il y aura plus
de travail ici ", ajoutent d'ailleurs im-
médiatement Ryszard et Maciej. " Et
ça reste mal payé. " Environ 2 300 zlo-
tys (540 euros) par mois pour eux. Et
encore, c'est parce que ces syndiqués
de Solidarnosc ont obtenu, en sep-
tembre 2016, une augmentation de
300 zlotys brut après plusieurs jours
de grève.
Reste que si Amiens pleure, Lodz rit.
En plus des sèche-linge, Whirlpool va
ouvrir d'ici à la fin de l'année un
centre de fonctions administratives
pour toute sa -filiale -Europe et
Moyen-Orient. Situé en plein centre,
il emploiera 200 personnes.
Et la marque américaine est loin
d'être la seule à se ruer vers Lodz
pour profiter de sa tradition indus-
trielle, de ses bas salaires et des
exemptions de taxe de sa zone éco-
nomique spéciale. Après avoir dure-
ment souffert après la fin du commu-
nisme, l'ancienne capitale polonaise
du textile, 700 000 habitants (150 000
de moins qu'en 1988), est en plein
boom. Dans le centre, les bâtiments
murés et les usines abandonnées
sont progressivement réhabilités et
reconvertis.
Baptisé " Nowe Centrum ",
l'ambitieux projet de réhabilitation
sera bouclé en 2022, notamment
grâce aux financements de plusieurs
milliards de zlotys par l'Union euro-
péenne (UE). L'ancienne grande ma-
nufacture de textile est devenue un
immense centre commercial qui
abrite toutes les grandes enseignes
occidentales et un musée d'art mo-
derne, digne héritage d'une cité qui
a -toujours allié rayonnement indus-
triel et culturel. L'ancienne centrale
thermique a, elle, été transformée en
planétarium et en centre de confé-
rences.
Afflux des Ukrainiens
Signe de cette ambition, la mairie a
posé sa candidature pour organiser
l'Expo internationale 2022. Et Lodz
vient de s'offrir une gigantesque gare
qu'elle qualifie avec emphase de "
plus moderne d'Europe ". Démesurée,
elle est vide la plupart du temps, mais
fait la fierté des habitants, qui disent
avoir enfin le sentiment d'habiter
une métropole européenne.
Comme beaucoup de Polonais, ils
considèrent ce boom comme un juste
retour des choses dans une longue
histoire faite de cataclysmes et de re-
naissances. Simple village devenu
centre industriel majeur au XIXe
siècle, la ville avait déjà été détruite
pendant la seconde guerre mondiale.
" Lodz est une des grandes villes de Po-
logne où il n'y a désormais presque plus
de chômage ", proclame fièrement la
maire de la ville, Hanna Znadowska
(Plate-Forme civique, libéral). Si le
taux officiel est encore de 8,5 % de
la population active, il a considéra-
blement baissé, et elle estime qu'il ne
s'agit plus que de " chômage structurel
" de ceux " qui ne veulent pas travailler
ou se reconvertir ".
Aux nombreux journalistes français
qui l'interrogent sur le destin
d'Amiens en ce moment, elle ex-
plique poliment " qu'elle ne peut pas
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s'inquiéter pour tout le monde " et pro-
digue ses conseils ; " le marché global
et libre marche comme ça ".
Plutôt que de s'opposer aux délocali-
sations, " il faut trouver du travail pour
les gens dans d'autres usines, ou les
faire changer de travail ", explique-t-
elle. Son attaché de presse se fait en-
core plus clair : " Qu'est ce que vous
avez, vous, les Français ? Les usines
viennent tout simplement ici parce que
c'est moins cher. Peut-être que dans dix
ans elles partiront plus loin, mais là,
c'est notre tour… "
Après vingt-cinq ans d'hémorragie de
sa population, Lodz s'enorgueillit
d'être redevenue une cité attractive.
Même si l'agence d'investissement de
la ville assure que les usines ne
viennent pas ici que pour les bas sa-
laires, ses plaquettes de promotion
vantent une rémunération moyenne
de 3 344 zlotys seulement, inférieur
à celui des autres grandes villes du
pays. Quand on la questionne sur le
sujet, la maire préfère insister sur son
son credo : " Faire de Lodz une ville
moins chère pour rendre la vie plus fa-
cile. "
Fuyant la guerre et la crise, des mil-
liers d'Ukrainiens sont venus occuper
ces dernières années les emplois dé-
laissés par les Polonais partis en Eu-
rope de l'Ouest, ou qui refusent les
tâches ingrates payées au salaire mi-
nimum – soit 13 zlotys (3 euros) de
l'heure.
Avertissement
Chez Whirlpool, les Ukrainiens sont
ainsi souvent employés en renfort en
période de forte activité. " Leur travail
est beaucoup plus propre et ils n'ont
pas peur des heures supplémentaires,
c'est beaucoup mieux pour les entre-
prises ", explique la directrice d'une
agence d'intérim qui en fait travailler
400 dans la ville. Une véritable
manne. Son adjointe précise toute-
fois " qu'ils sont parfois un peu
bruyants et pas très polis ".
La venuedes " frères ukrainiens ",
comme les appelle la maire, est cru-
ciale. Les Ukrainiens ne sont pas ci-
toyens de l'UE, mais ils bénéficient
d'une procédure simplifiée pour ob-
tenir en quelques jours des permis de
travail de six mois.
Nombre d'entre eux restent ensuite
sur le territoire illégalement ou en
demandant un titre de séjour plus
long. En tout, un million
d'Ukrainiens seraient présents en Po-
logne, selon des estimations non of-
ficielles. A Lodz, le nombre de de-
mandes de titre de séjour a triplé en
trois ans et les autorités locales de
l'immigration sont débordées.
La principale profession déclarée est
" chauffeur poids lourd ", signe que
ces Ukrainiens sont aussi souvent en-
voyés avec leurs papiers polonais sur
les routes d'Europe, concurrençant
encore un peu plus les transporteurs
ouest-européens. La grande crainte
des milieux économiques est
d'ailleurs que la fin des visas pour les
Ukrainiens souhaitant se rendre dans
l'UE – annoncée pour juin – les
pousse à quitter la Pologne pour ten-
ter eux aussi leur chance plus à
l'ouest.
" La vie est bien ici, j'aimerais faire ve-
nir rapidement ma famille ", assure
toutefois Andrij Makserskij, 48 ans,
qui a quitté son emploi de vendeur
de machines agricoles dans le centre
de l'Ukraine. En quatre mois, il a déjà
changé d'entreprise et travaille dé-
sormais pour l'équivalent polonais de
La Redoute pour 2 200 zlotys par
mois. Il dort dans les locaux sombres
de l'association historique des Ukrai-
niens de Lodz, qui vient d'ouvrir sa
propre agence d'intérim.
Mais si le boom est réel, l'association
polonaise des industriels de
l'électroménager prévient déjà que
l'avenir n'est pas garanti. " Nos
grandes usines ont été presque toutes
rachetées par des multinationales
étrangères et nous sommes plus chers
que la Roumanie, la Bulgarie ou la Tur-
quie, s'inquièteson directeur, Woj-
ciech Konecki. Heureusement, on n'a
pas encore de concurrence d'Ukraine
ou de Russie. "
En plein centre de Lodz, les restes
de l'usine Archimode valent avertis-
sement. Ancienne propriété d'un
géant du textile français qui l'a fer-
mée en 2008, elle est actuellement
démontée boulon par boulon par son
ancien homme à tout faire. A 70 ans,
Stanislaw Tluscki a vu tous ses an-
ciens collègues licenciés. Il ne par-
tage pas l'euphorie ambiante. " Ces
nouvelles usines, elles n'emploient pas
autant du monde qu'avant. Cette gare,
c'est la folie des grandeurs… "
Derrière lui, Lukasz Dlugolecki, 27
ans, né à Lodz et diplômé de la cé-
lèbre école de cinéma de la ville, dé-
place des vieilles -machines à coudre
en vue d'une fête électro qu'il organi-
sera le 22 avril dans ce spectaculaire
paysage industriel.
" On sait qu'on fait d'abord la fête ici
et qu'après, ça deviendra peut-être une
banque, s'amuse-t-il. Mais si ce boom
est bon pour l'industrie, je m'inquiète
pour le développement culturel de la
ville. Il ne faudrait pas que Lodz de-
vienne juste une simple destination de
délocalisations comme toutes les
autres en Europe. " Une ville qui
n'aurait plus que pour seule ambition
de vendre ses bras à un prix défiant
toute concurrence.
Jean-Baptiste Chastand ■
par Jean-Baptiste Chastand
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Bras de fer entre Tesla et le syndicat IG Metall outre-RhinLe Syndicat allemand de la métallurgie n'exclut pas de lancer une grève chez Grohmann.Legroupe allemand a été racheté fin 2016 par le constructeur de la Silicon Valley.
N° 22429jeudi 20 avril 2017
Page 19514 mots
INDUSTRIE & SERVICES—AUTOMOBILE
C'est un premier choc culturel pour
Tesla en Allemagne. En rachetant en
novembre l'allemand Grohmann, un
spécialiste des systèmes de fabrica-
tion automatisés, le groupe d'Elon
Musk souhaitait se doter d'une tech-
nologie clef pour l'aider à produire
massivement ses véhicules élec-
triques. Mais le constructeur de la Si-
licon Valley pourrait bien se heurter
de plein fouet aux traditions de
l'industrie allemande et aux revendi-
cations des partenaires sociaux
outre-Rhin.
Le puissant syndicat de la métallur-
gie IG Metall n'exclut pas, en effet,
de lancer des grèves d'avertissement
au sein du groupe rebaptisé « Tesla
Grohmann Automation », situé dans
le Land rural de Rhénanie-Palatinat
près de la frontière belge. Une action
de protestation qui vise à faire pres-
sion sur la direction lors de négocia-
tions. En cause : les salaires et la pro-
tection de l'emploi. Le syndicat de-
mande à Tesla d'appliquer les
conventions de la branche de la mé-
tallurgie, alors que le niveau des ré-
munérations de la filiale - qui
n'appliquait déjà pas la convention
collective avant son rachat - y est au-
jourd'hui de 25 % à 30 % inférieur.
La proposition de Tesla de relever les
salaires de 150 euros par mois n'a pas
satisfait IG Metall.
Demande de garanties
sur l'emploi
Inquiet pour l'avenir de la société qui
a dû renoncer à d'anciens clients
comme Daimler ou BMW pour ne tra-
vailler que pour sa nouvelle maison
mère Tesla, le syndicat demande éga-
lement des garanties sur l'emploi. Le
pari d'Elon Musk, qui a absorbé
l'équipementier allemand pour envi-
ron 150 millions de dollars (140 mil-
lions d'euros), va complètement à re-
bours du recours à la sous-traitance
dans l'automobile. Le dirigeant, déjà
aux prises en février avec le syndicat
automobile américain UAW après
qu'un employé a critiqué publique-
ment les conditions de travail dans
son usine californienne, a réagi dans
une lettre envoyée aux salariés en
début de semaine. Il rappelle avoir
proposé de distribuer à chaque em-
ployé pour 10.000 dollars d'actions
Tesla dans les quatre prochaines an-
nées ainsi qu'un bonus de 1.000 euros
en liquide. Et rassure sur l'emploi,
excluant tout licenciement dans un
futur proche, alors que le groupe a
promis lors du rachat de porter les ef-
fectifs de la filiale d'environ 700 ac-
tuellement à plus de 1.000 d'ici à
deux ans.
Tesla compte sur le savoir-faire de
Grohmann pour l'aider à produire
500.000 véhicules électriques par an
d'ici à 2018… et notamment la Model
3, son premier véhicule grand public
et dont la production doit démarrer
cet été. « Nous continuons à tra-
vailler directement avec les employés
de Tesla Grohmann et sommes prêts
en cas d'action lancée par le syndicat.
Nous ne prévoyons pas d'impact sur
le calendrier de la Model 3 », a réagi
un porte-parole de Tesla.
Correspondante à Berlin ■
par Pauline Houédé
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Parution : Quotidienne
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EN 2065, L'ARCHIPEL NE COMPTERA PLUS QUE 88 MILLIONS D'HABITANTS CONTRE 127 MILLIONS ACTUELLEMENT. UNEPERSPECTIVE QUI PÈSE DÉJÀ SUR LE MARCHÉ DU TRAVAIL
Japon : robots et véhicules autonomes pour combler le manque demain-d'œuvreDémographie Selon les données publiées le 15 avril, la population japonaise a perdu 162 000 individusen 2016 ; c'est la sixième année de baisse consécutive enregistrée dans le pays. Le ministère des Af-faires générales met aussi en évidence le phénomène de dépopulation de la province, laquellevoit une partie de ses habitants lui tourner le dos au profit des grands centres urbains, en parti-culier Tokyo et sa région.
N° 992jeudi 20 avril 2017
Page 71007 mots
Sorti le 16 avril 1988 sur les écrans
nippons, Mon voisin Totoro, le film
d'animation qui a rendu célèbre
Hayao Miyazaki, mettait en scène le
Chat-Bus, « Nekobasu » en japonais,
un véhicule autonome qui annonçait
la révolution à venir dans ce secteur.
Trente ans plus tard, les habitants de
la ville de Fujisawa, au sud de Tokyo,
ont pu découvrir Roboneko Yamato,
que l'on pourrait traduire par le
Robot-Chat de Yamato. Sur la vidéo
promotionnelle, il est difficile de ne
pas faire le rapprochement avec le
véhicule imaginé par le cinéaste
lorsque la camionnette autonome
imaginée par le transporteur Yamato
sort de la pénombre.
Il y a bien sûr la volonté de créer une
complicité entre ce nouveau service
de livraison et la population qui va
devoir s'habituer à ne plus être en
rapport avec des êtres humains.
Avant d'étendre cette innovation à
l'ensemble du pays, elle va être testée
pendant un an dans plusieurs quar-
tiers de Fujisawa. Mise au point par
Yamato et le groupe de commerce en
ligne DeNA, elle concernera une po-
pulation de 30 000 personnes qui
pourront ainsi retirer leurs colis dans
le véhicule devant chez eux grâce à
un code qui déverrouillera le casier
où il aura été placé.
Si l'expérience est concluante, elle
permettra au premier service de li-
vraison à domicile de l'archipel de ré-
soudre un problème qui menace à
terme la survie de l'entreprise : la pé-
nurie de chauffeurs. Comme d'autres
entreprises du pays, Yamato est
confronté à un manque de personnel
qui l'a obligé, fin février, à annoncer
la suppression de ses livraisons entre
midi et 14 heures. Au pays où le
client est un roi respecté et choyé,
la possible remise en cause du fonc-
tionnement de cette entreprise a sus-
cité un certain émoi et a été
l'occasion de remettre sous les feux
de l'actualité la réalité du phéno-
mène de dépopulation dans lequel le
Japon est engagé.
Vieillissement accéléré. Le 10 avril,
le National institute of population
and social secu-rity research, qui dé-
pend du ministère de la Santé et du
Travail, a publié ses nouvelles pré-
visions démographiques qui ont
confirmé la tendance. Selon
l'organisme, le pays ne comptera plus
que 88,08 millions d'habitants en 2
065 contre 126,9 millions en 2016, un
chiffre plus mauvais que ce que le
gouvernement envisageait-il y a
quelques mois encore. Il évoquait
même la possibilité de stabiliser la
population autour de 100 millions à
la même période.
Cela s'accompagne d'un vieillisse-
ment accé-léré du pays. Avec d'ores
et déjà 27,3 % des Japo-nais âgés de
plus de 65 ans, le pays devrait voir
leur proportion passer à 38,1 % d'ici
2 060. Cela ajoute évidemment aux
pressions sur le marché du travail, en
particulier dans le domaine des ser-
vices, qui nécessite une forte pré-
sence humaine. Les entreprises
doivent donc innover pour répondre
à la fois au haut niveau d'exigence et
à la pénurie de main-d'œuvre qui se
fait de plus en plus sentir.
En 2016, le taux de chômage a atteint
3,1 %, son niveau le plus bas depuis
vingt-deux ans et, dans certains sec-
teurs, il devient de plus en plus dif-
ficile de recruter. Alors que le ratio
d'offres par demandeur d'emploi
était en moyenne de 1,36 en 2016
dans la distribution, il est passé en
février à 2,48, soulignant ainsi
↑ 37
l'urgence à trouver des solutions
pour répondre à un marché du travail
de plus en plus tendu. L'immigration
reste aujourd'hui une option que les
autorités évoquent avec une relative
prudence devant les réticences des
Japonais, qui craignent un change-
ment trop brutal dans leurs habi-
tudes de vie.
Les efforts portent surtout vers
l'automatisation de certaines tâches
et la présence de robots qui permet-
traient de réduire la présence hu-
maine. On a ainsi vu apparaître dans
certains restaurants des machines
qui gèrent les commandes et per-
mettent d'éviter de recruter du per-
sonnel de service. Cela reste pour
l'instant ponctuel et relève de
l'insolite pour la plupart des Japo-
nais. Mais ces derniers vont devoir
rapidement s'habituer à ne plus être
servis comme par le passé et ce chan-
gement n'aura rien d'anecdotique.
Mardi, le ministère de l'Economie, du
Commerce et de l'Industrie ainsi que
les cinq principales chaînes de kon-
bini – ces supérettes ouvertes 24
heures sur 24 – ont annoncé leur in-
tention d'introduire d'ici 2 025 dans
les quelque 50 000 magasins du pays
un système de caisses automatiques
qui calculera l'ensemble des achats
faits par un client, sans qu'il ait be-
soin de les valider un à un. Cela passe
par la création d'étiquettes intelli-
gentes qui va nécessiter un investis-
sement de 50 à 100 milliards de yens
(de 430 à 860 millions d'euros) par
entreprise à compter de 2018. D'ici
sept ans, Lawson, 7 Ele-ven ou en-
core Family Mart auront ainsi créé les
100 milliards d'étiquettes indispen-
sables chaque année pour la réussite
de leur projet.
Comme Yamato et beaucoup d'autres
entreprises nippones, ils auront
contribué à réduire leur dépendance
à l'égard de la main-d'œuvre. Mais il
est peu probable que cela suffise à
régler l'immense problème démogra-
phique du pays. ■
par Claude Leblanc
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