niedermann, max. phonetique historique du latin
DESCRIPTION
Fonética Histórica do LatimTRANSCRIPT
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RIOE DU LATIK
PAR M.NIEDERMANN
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PARIS
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(NOUVELLE COLLECTION A L'USAGE DES CLASSESk
XXVIII
PRCISy
de
PHONTIQUE HISTORIQUEDU LATIN
PAR
MAX NIEDERMANNPR.OFESSEUR AU GYMNASE DE LA CHAUX - DE-FONDS
ET A L'ACADMIE DE NKUCHATEL
-> AVEC UN AVANT-PROPOSPAR
A. MEILLETPROFESSEUR AU COLLGE DE FRANCE
DIRECTEUR ADJOINT A L'COLE DES HAUTES -ETUDES DE PARIS
PARISLIBRAIRIE C. KLINCKSIECK
11, rue de Lille, 11
1906TOUS DROITS RSERVS
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AVANT-PROPOS
La grammaire compare, qui a renouvel toutes
les conceptions linguistiques, n'a pour ainsi dire
pas pntr dans renseignement scolaire des langues
anciennes et n'a presque pas modifi les doctrines
des grammaires qui sont entre les mains des lves ;
nulle part, certes, le divorce n'est plus absolu entre
des doctrines scientifiques dsormais incontestes
et renseignement usuel.
Et c'est, sans doute, ce qui contribue le plus
rendre strile et ennuyeux Venseignement gramma-
tical qu'on donne d'ordinaire ; spar de toutes
les ides modernes, rest scolastique dans son fond
et dans sa forme, il est devenu un lment mort ;il se borne des faits qu aucune ide ne relie, ou
que relient seulement des ides aujourd'hui pri-mes et contraires tout ce qu apprennent par
ailleurs les lves. Aussi l'opinion devient-elle
PRCIS DE PHONTIQUE HISTORIQUE DU LATIN. 1
-
II
chaque jour plus hostile la grammaire, et les
heures sont-elles chaque anne plus troitement
mesures un enseignement, dont chacun sent
obscurment la strilit.
Il semble pourtant qu'une science dont l'objet
essentiel est d'tudier le principal moyen d'exprs-
sion de la pense humaine mrite l'attention des
lves et soit capable, si elle est convenablement
enseigne, de provoquer un vif intrt.
Malheureusement, les difficults sont immenses.
L'abord de la grammaire compare est dfendu
par la ncessit d'tudier un grand nombre de
langues trs diverses et lointaines, depuis le sans-
krit vdique jusqu' l'irlandais et aux dialectes
des inscriptions osques et ombriennes. Beaucoup
de bonnes volonts de matres ont recul devant
un pareil effort, et il ne peut naturellement tre
question de l'imposer aux lves, bien moins encore
de leur enseigner des doctrines, dont on ne saurait
mme leur faire entrevoir un commencement de
preuve.
M. Max Niedermann, dont tous les linguistes
apprcient l'rudition tendue, la mthode cor-
recte, la sagacit critique et l'ingniosit, a eu le
-
III
courage de ne pas se laisser effrayer par les diffi-
cults. Il a entrepris de mettre la porte d'un
jeune latiniste, qui ne serait que latiniste, lesprincipaux rsultats de la phontique historique
du latin ancien. Et, ce qui semble peine croyable,
??iais ce que montrent assez les pages qui suivent,
il y a russi.
L'auteur s'est interdit, avec raison, d* introduire
en un ouvrage de ce genre des hypothses person-
nelles. Toute son originalit y consiste exposer
rvolution du systme phontique latin en se ser-
vant des dcouvertes de la grammaire compare
,
mais sans jamais faire interveir les ancienneslangues indo-europennes autres que le latin, et
en mettant profit seulement les textes archaques,
en particulier les vieilles inscriptions, et aussi et
surtout les alternances conserves en latin classique.
Seules les personnes qui ont du sujet une connais-
sance approfondie pourront se rendre compte de
ce qiiil a fallu Vauteur de tact, d'adresse et de
science pour demeurer constamment prcis et cor-
rect, et pour ne jamais sacrifier l'exactitude laplus rigoureuse aux exigences de la clart, tout en
tant aisment intelligible d'un bout l'autre.
-
IV
Il y a quelques annes seulement, personne
ri aurait hsit rapprocher les formes grecques
des formes latines correspondantes. Mais, aujour-
d'hui, beaucoup des lves qui tudient le latin ne
reoivent pas pour cela renseignement de la langue
grecque; et c'est cette circonstance de fait qui a
dtermin M. Niedermann carter absolument
les rapprochements entre le latin et le grec. Cette
abstention a d'ailleurs de srieux avantages un
point de vue purement scientifique; en effet, le
latin ria pas avec le grec de rapports dialectaux
particulirement troits : c'est avec l'osque et
l'ombrien et les dialectes celtiques que le latin a
une ressemblance spciale. D'ailleurs il importe
que chaque langue soit examine en elle-mme,
de manire ce que ses traits propres et caract-
ristiques soient mis en pleine vidence. Grce la
limitation au latin seul, l'expos de M. Nieder-
mann a un accent tout particulier qui lui donne
du prix mme pour le spcialiste qui. de par la
volont arrte de l'auteur, rig apprendra aucun
dtail nouveau.
A. Meillet.
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AVERTISSEMENT DE L'AUTEUR
Lors de la publication de notre Spcimen cCun
prcis de phontique historique du latin Vusage
des Gymnases, Lyces et Athnes au printemps
1904 (*), nous avons pris l'engagement de donner
une suite cet opuscule, s'il obtenait le succs que
nous lui souhaitions. Nos esprances cet gard,
ayant t ralises et au-del, nous accomplissons
aujourd'hui notre promesse en joignant le conso-nantisme au vocalisme prcdemment tudi.Que le moment est venu de donner enfin l'ensei-
gnement grammatical, dans nos coles du degr
moyen, la prcision scientifique, dont l'absence a
jet tant de discrdit sur cet ordre d'tudes, que,
dans ce domaine comme dans toutes les branches
(1) Max Niedermanw, Spcimen d'un prcis de phontique histo-rique du latin l'usage des Gymnases, Lyces et Athnes. Avecun avaot-propos par A. Meillet, Directeur adjoint l'Ecole desHautes-Etudes de Paris. Esquisse linguistique annexe au rapportannuel du Gymnase de La Chaux-de-Fonds sur l'exercice 1903-1904.La Chaux-de-Fonds, 1904, vni-39 p. in-4.
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VI
enseignes dans les tablissements d'instruction
secondaire, le professeur ne peut plus, dornavant,
se contenter de la constatation pure et simple des
faits, mais qu'il en doit ses lves la justification
historique et psychologique, c'est ce que l'avant-
propos de M. Meillet, qu'on vient de lire, l'accord
des critiques de notre Spcimen, enfin d'autres
tentatives rcentes de vulgarisation linguistique (!
)
nous dispensent de dmontrer notre tour. Tout au
plus y aurait-il peut-tre lieu d'examiner la question
de savoir, si ce petit volume sera mis entre les
mains des lves mmes ou si le matre seul devra
s'en servir, sauf leur en prsenter le contenu sous
la forme qui lui plaira. Mais nous prfrons laisser,
sous ce rapport, toute latitude nos confrres : cha-
cun d'eux jugera par lui-mme de ce qui convient le
mieux ses lves ; pourvu que nous finissions par
triompher de la force d'inertie que la routine a, de
(i) Nous signalons notamment : Bocqdbt, Principes de phontique
grecque l'usage des Athnes et Collges. Tournai, 1899.
William Gardner Hale and Carl Darli.ng Bcck, A Latin Grammar.
Boston, 1903. C. Willing, Grundzge einer genetischen Schul-
grammatik der lateinischen Sprache. Halle, 1903. - Tore Torn-
birnsson, Imfrande sprkvetenskap ur allmnnbildande ocli
pedagogisk synpunkt. Dpsal, 1904. - Consulter aussi les
intressants articles de MM. Charles Pagot dans La Revue anci nne
Revue des Revues) du 15 octobre 1904 et L. Malry dans la Revue
internationale de l'enseignement du 15 mai 19U.
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VII
tout temps, oppose aux ides nouvelles, peu importe
la manire, dont ce rsultat aura t obtenu.
Qu'on nous permette, par contre, d'insister sur deux
points qui nous paraissent essentiels.
Le premier, c'est que ce cours n'est point destin
aux dbutants, mais que l'auteur table sur une
connaissance suffisante des lments de la langue
latine. Au regard de la logique pure, il serait prf-
rable, sans doute, de substituer rsolument, ds le
dbut, la grammaire scientifique la grammaire
empirique, mais au point de vue d'une saine pda-
gogie, nous estimerions dangereux, pour le moment
tout au moins, de compliquer l'tude pratique des
formes, assez ardue en elle-mme, d'claircisse-
ments linguistiques. Il suffit que, dans les manuels
qui servent la premire initiation des jeunes lati-nistes, on ne trouve rien qui soit en contradiction
avec les rsultats tablis par la science. C'est donc
aux lves des classes suprieures des Lyces,
Gymnases et Athnes, et eux seuls, que nous
nous adressons, et si, comme nous l'ont affirm
plusieurs confrres, notre travail peut tre appel
rendre quelques services aussi aux tudiants des
Facults, il demeure entendu que nous avons scru-
puleusement vit d'anticiper en quoi que ce soit
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VIII
sur renseignement universitaire. Nous avons la
conviction intime qu'aucune des explications que
nous donnons n'est au-dessus de la porte d'un
jeune collgien de 15 18 ans.En second lieu, on ne doit pas oublier que l'ensei-
gnement prconis ici ne saurait porter des fruits
que s'il est donn par un professeur rompu auxhabitudes scientifiques et possdant une srieuse
culture linguistique. Nous aimons croire que,
d'ores et dj, le nombre de ceux qui remplissent
cette condition n'est pas trop restreint et qu'il
s'accrotra d'anne en anne pour le plus grand bien
des humanits classiques.
D'aucuns parmi les critiques de notre Spcimen
nous ont reproch d'avoir dlibrment et de
parti pris renonc toute comparaison du latin
avec d'autres langues. Ils verront que nous avons
cherch leur donner satisfaction, dans une cer-
taine mesure, en faisant intervenir le franais
toutes les fois qu'il nous semblait offrir des concor-
dances de nature rendre notre expos plus
intelligible. Quant au rapprochement du grec,nous continuons le repousser. Nous pensons, en
effet, qu'il n'est pas lgitime, en bonne mthode,
de faire appel un idiome, dont la majeure
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IX
partie de nos lves latinistes connaissent peine
l'alphabet.
On pourra s'tonner aussi que nous nous soyons
cantonn dans la phontique en mettant complte-
ment part la morphologie et la syntaxe. A cela
nous rpondrons que, en attendant que le principe
mme de l'introduction des notions essentielles dela grammaire historique dans nos classes ait fait du
chemin, nous estimons que cette innovation
demande tre prudemment dose; et c'est enmatire de phontique que se fait le plus cruellement
sentir l'absence d'un enseignement mthodique.
Nous ne saurions terminer sans remercier de tout
cur notre cher matre M. Meillet de l'intrt
bienveillant qu'il n'a cess de prendre ce travail
et des conseils prcieux, par lesquels il nous a
aid mener bonne fin une tache que nous tions
plus d'une fois prs d'abandonner. Notre proccu-
pation constante a t de mettre profit les leons
de mthode que nous avons eu le bonheur de rece-voir de lui, et notre unique ambition est d'y avoir
russi. Nous devons un tmoignage de sincre
gratitude aussi aux professeurs trop nombreuxpour tre cits ici qui, lors de la publication de
notre Spcimen, ont bien voulu nous faire part
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x
de leurs observations. Si nous n'avonspu les
utiliser toutes, c'est qu'elles allaient parfois ren-
contre les unes des autres, ou qu'elles eussent
t en contradiction avec la conception gnrale
que nous nous tions faite de notre travail.On
verra cependant que nous avons introduit dans
la partie prcdemment publie plusieurs change-
ments notables qui seront, esprons-nous, autant
d'amliorations.
La Chaux-de-Fonds, ce 1 er mars 1906.
Max NlEDERMANN.
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XI
Explication de quelques signes et termes techniques
employs dans le prsent volume.
* devant un mot indique une forme hypothtique,restitue par induction.
y signifie a volu en ; p. ex. y veut dire : a volu en .
Selon qu'un signe alphabtique est suivi ou pr-cd d'un petit trait ou plac entre deux petits traits,il indique un phonme initial, final ou mdial; p.ex. s- = s initial, -s = s final, -s- == s mdial. Lamme remarque s'applique naturellement auxgroupes de signes alphabtiques.Le latin offrant de nombreuses concidences
grammaticales avec le grec, le germanique, le cel-tique, le slave et bien d'autres idiomes encore, laconclusion s'impose que toutes ces langues remon-tent une source commune, qu'elles continuentune langue prhistorique commune au mme titreque le franais, l'italien, l'espagnol, etc. continuentle latin. On est convenu de dsigner cette langueprhistorique sous le nom d'indo-europen etses diffrentes transformations, reprsentes par lesidiomes dont il vient d'tre parl, sons celui delangues indo europennes.On appelle thme ce qui reste d'un mot dont on
a retranch la dsinence, c'est--dire l'lmentvariable qui sert marquer le rle du mot dans la
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XII
phrase. On dira ainsi que duc- est le thme de dux,
manu- celui de mnus, m- celui de mre et
ainsi de suite. La sparation de la dsinence et du
thme, en latin, est souvent malaise et, dans
nombre de cas, tout fait impossible sans le secours
des langues congnres. Quelquefois le thme est
irrductible (comme p. ex. duc- dans dux), mais le
plus souvent il peut se dcomposer en deux l-
ments bien distincts, dont chacun se retrouve dans
d'autres combinaisons. Prenons, p. ex., cantu-,
thme de canins, -s, chant . L'lment con-
figure aussi dans cno, je chante , cnor chant ,
cantor, chanteur, musicien , etc.. et l'lment
-te- dans gustus, -ils, dgustation, got , partus,
-s, enfantement , sumplus, -s, dpense
etc.' De mme, l'analyse de rub-, thme de rubre,
tre rouge , nous fournit un lment rib- qui
est contenu galement dans ruher, rouge ^rbor,
couleur rouge, rougeur , ruina, garance,plante
dont la racine fournit une teinture ronge etc.,et
un lment -- qu'on retrouve dans clre tre
chaud , llre, tre cach , ntre, tre bril-
lant , etc. De ces deux lments constitutifsdu
thme', le premier reoit le nom de racine, le
second celui de suffixe. Ainsi donc, un mot com-
prend normalement trois parties : la racine, le
suffixe et ta dsinence.
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OBSERVATIONS PRLIMINAIRES
1 . La phontique est la science des phonmesqui constituent le langage. Par phonmes, onentend toutes les sensations auditives dter-mines parlesmodifications que les organesde la parole impriment au courant d'airchass des poumons. Ces sensations peuventtre tudies au double point de vue de leur produc-
tion physiologique et de leur volution historique.
Les phonmes, en effet, voluent dans le temps etdans l'espace. Les transformations qui les affectent
sont inconscientes, c'est--dire indpendantes dela volont rflchie des sujets parlants. Elless'oprent par degrs insensibles et avec uneconstance absolue, c'est--dire que tous lesphonmes ou groupes de phonmes placsdans les mmes conditions se dveloppentd'une manire identique. Les exceptions cettergle, qui est le principe fondamental de la mthodelinguistique, ne sont jamais qu'apparentes. Elless'expliquent, la plupart du temps, comme tant le
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- 2
rsultat de perturbations apportes au jeu normaldes lois phontiques par une cause d'ordre psycho-logique qu'on appelle l'analogie. Si, par exemple,
en latin en syllabe intrieure ouverte (c'est--dire
dont la voyelle n'est suivie que d'une seule con-
sonne) parat intact dans comdo, appto, obtgo,dlssco, subvno, tandis qu'il est devenu danspraesdeo en regard de sdo, cnstiti en regard de
stti, collgo en regard de lgo, anspcis gnitif de
auspx, sustno en regard de tno, nous devons
nous garder de conclure de cette diffrence de
traitement un caprice de la langue. En effet, le
passage de t a eu lieu dans tous les mots cits,
mais l'analogie a rtabli Y primitif dans comdo,
appto, obtgo, dissco, subvenio pour accentuer
leur affinit avec do,
pto,tgo
,sco
,vno.
L'analogie agit donc comme une tendancenivellatrice, s'exerant sur des mots appa-rents par le sens ou la fonction gramma-ticale.
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THORIE GNRALE DES PHONMES
2. La parole est produite par le courant d'air
expiratoire. Chass des poumons, le souffle traverse
d'abord la trache-artre pour s'engager ensuite
dans le larynx. Le larynx est form de plusieurscartilages, entre lesquels sont tendues deux mem-branes, les cordes vocales, bordant une fente appele
la glotte. Si la colonne d'air expir rencontre la
glotte ferme, elle force le passage en une srie de
secousses qui font vibrer les cordes vocales; si, au
contraire, elle la trouve ouverte, elle passe libre-
ment sans dterminer de mouvements vibratoires.Dans le premier cas, le phonme produit serasonore, dans le second, il sera sourd. Pours'assurer pratiquement, si un phonme appartient l'une ou l'autre de ces deux catgories, il suffit dese boucher les oreilles en l'articulant. Si l'on entendun bourdonnement dans la tte, c'est une sonore, siaucun bourdonnement n'est peru, c'est une sourde.Aprs avoir franchi la glotte, l'air dbouche dansle pharynx, d'o il s'coule soit par la bouche, soit
par le nez, soit par les deux sorties la fois, suivant
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4
que le voile du palais, cloison membraneuse quispare les deux cavits buccale et nasale, estrelev, abaiss ou maintenu dans une positionintermdiaire par les muscles constricteurs. Le rle
de la bouche dans la phonation est double. Tanttelle se borne servir de caisse de rsonance au sonlaryngien, tantt elle cre divers obstacles sur le
passage du souffle, lui faisant subir des arrts ou
des resserrements. En consquence, des phonmes,les uns sont essentiellement des tenues, tandis que
les autres consistent uniquement ou essentiellementen un mouvement de fermeture et d'ouverture.On donne aux premiers le nom de voyelles, auxseconds celui de consonnes. Mais il importe debien faire remarquer ds le dbut qu'il est impos-sible de fixer des limites prcises entre ces deuxsries de phonmes. Ainsi, i, ou, u sont en franaisdes tenues dans il lie, il loue, il tue, mais comme ilscomportent un fort relvement de la langue, ilspeuvent aussi fonctionner comme mouvements defermeture et d'ouverture, c'est--dire comme con-
sonnes; comparez : nous lions, nous louons, noustuons, o le verbe ne forme qu'une syllabe dans laprononciation courante du franais. Sous le bnficede cette rserve, nous pouvons conserver pour lacommodit de l'expos les termes traditionnelsvoyelle et consonne.
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g 3. En partant de la voyelle neutre a qui se
prononce avec la langue mollement tendue sur le
plancher de la bouche dans la position d'indiffrence,
nous pouvons diviser les voyelles en voyellesd'avant et en voyelles d'arrire, suivant quela langue se trouve masse dans la partie antrieureou dans la partie postrieure de la bouche. Un autrelment de classification peut tre emprunt ladistance verticale qui spare le sommet du renfle-
ment de la langue et la vote palatine. De ce chef,
nous distinguons voyelles basses et voyelleshautes, appeles plus gnralement voyellesouvertes et voyelles fermes.Deux voyelles de timbre diffrent, prononces en
une mme syllabe de manire continue, forment unediphtongue.
4. Les consonnes se partagent en deux grandes
classes, les occlusives et les constrictives,
caractrises, les premires par la fermeture com-
plte, les secondes par un simple resserrement dupassage de l'air. Les occlusives sont des bruits
explosifs instantans ; les constrictives, au con-
traire, peuvent se soutenir pendant un temps plus
ou moins long. C'est pourquoi on donne aussi celles-l le nom de momentanes et celles-cicelui de continues. Les constrictives se divisent
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en quatre catgories, dnommes selon la maniredont l'air s'chappe pendant leur articulation : les
fricatives, les vibrantes, les latrales et lesnasales. Pendant la production des fricatives, le
courant d'air, sortant par une fente troite, provoque
un bruit de frottement. Les vibrantes sont dter-mines par le mouvement vibratoire rapide d'unorgane lastique, dplac par le souffle expiratoire
et revenant sa position premire. Les latrales se
forment en barrant le passage de l'air par l'extrmit
ou le dos de la langue appuys contre un point quel-conque de la ligne mdiane du palais depuis lesdents jusqu'au voile du palais et laissant le courantd'air sortir des deux cts. Les nasales enfin seprononcent avec une occlusion en un point de la
bouche, mais avec abaissement du voile du palaisqui permet l'coulement ininterrompu de l'air par
les fosses nasales.
Un autre classement des consonnes peut tretabli d'aprs la rgion de la bouche o se produitl'obstacle qui donne naissance au bruit caractris-tique pour chacune d'elles. De l la division en
labiales, dues au rapprochement des lvres, den-tales, formes par le contact de la pointe de lalangue et des dents d'en haut et gutturales, sup-posant l'action combine du dos de la langue et dupalais.
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CLASSEMENT DES PHONMES LATINS
5. Les voyelles latines , classes d'aprs lesprincipes noncs ci-dessus, se rsument dans leschma suivant qui reprsente les positions rela-tives de la langue :
masse en avant masse en arrire
ci _vo
CD *
!
minima -> 1 s_ re
s - 1
Remarque. - La voyelle y, qui ne figure pas dans ceschma, ne se rencontre que dans des mots latins em-prunts du grec; voir 6, remarque IV, 3.
Les diphtongues du latin classique taient aunombre de quatre : eu (trs rare, voir 22), ae,au, oe.
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S 6. Voici un tableau qui runit les consonnes
latines classes au double point de vue du moded'articulation et du point d'articulation :
MODEd'articulation
POINTd'articulation
\ 1
J
Dentales Gutturales
Occlusives.
sonores. Jb d g
sourdes. P t c, k, q
Constrictives
>
o
sonores.
sourdes. f s
xn
r
]
sonores. r
sourdes.
ci
sonores. 1
sourdes.
53
sonores. m n n
sourdes.
-
9
Remarques. I. Le point d'articulation des occlu-sives gutturales n'est pas xe. La langue touche le palais
plus ou moins en arrire selon le timbre de la voyelle sui-vante. Devant i et e on articule une prpalatale, devant aune mdiopalatale, devant o et u une postpalatale ou vlaire(du lat. vlum, voile du palais ). A ces trois positions arti-culatoires correspondait, dans l'ancien latin, l'emploi destrois signes c, k, q. Il semble, en effet, qu' l'origine on
orthographiait normalement c devant i et e [cvis, cna),k devant a (kpt, krus), q devant o et u (qoms, qra). Mais,peu peu, l'usage du c fut gnralis, le k disparut, nelaissant de rares traces que dans quelques sigles (K-= Kaeso[nom propre], K ou KAL = clendae, KA = cptlis, KK ==casirrum etc.), et q ne fut gard que dans la combinaisonqu, figurant la gutturale sourde labialise dans des motscomme qui, quae, quod (voir 39).Le latin connaissait aussi deux varits de la constrictive
latrale l, dont le point d'articulation se trouvait tantt la naissance des incisives suprieures (l palatal), et tanttau voile du palais {l vlaire). On avait L palatal l'initialeet, l'intrieur, devant i et dans le cas de la gmine -II-,( vlaire la finale, et, l'intrieur, devant e, a, o, u etdevant consonne.
II. f latin tait form, l'origine, en pressant les deuxlvres l'une contre l'autre. Mais d'assez bonne heure, cet fbilabial s'est converti en un f dentilabial, s'articulant,
comme en franais, avec les incisives suprieures appliquescontre la lvre infrieure.
III. n dsigne la nasale gutturale crite n devantocclusive gutturale (anglus, an ceps) et g devant nasale('lignas; voir 69). Le pote Accius (n en 170 av. J.-G.)avait propos d'orthographier aussi aggulus, agceps etc.,conformment l'usage grec, mais il n'est pas parvenu faire adopter cette innovation ses concitoyens.
PRCIS DE PHONTIQUE HISTORIQUE DU LATIN. 2
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IV. Ne figurent pas dans le tableau ci-dessus :1 h, qui, l'poque classique, tait muet, comme en fran-
ais moderne (voir U\2 j et v qui, au moins jusqu'au premier sicle ap. J.-C,
taient des semi-voyelles, c'est--dire les formes consonan-
tiques des voyelles i et w, offrant respectivement le son del'i franais dans pierre (prononc pyr) et de l'on franaisdans chouer prononc chw). L'emploi des caractres j etv est moderne; leur introduction est due aux rudits de laRenaissance. L'alphabet latin ne connaissait que i et u.
3 La fricative dentale sonore s, trangre aux mots pro-prement latins (comp. Quintilien, Instit. nvat. XII, 10,28 :namque est ipsis statim sonis durior s.-e. Latina facundia),quando et jucundissimas ex Graecis litteras non habemus,vocalem alteram, alteram consonantem, quibus nullae apudeos dulcius spirant, quas mutuari solemus quotiens illorumnominibus utimur quod cum contingit, nescio quo modovelut hilarior protinus renidet oratio, ut in zephyris etzophoris : quae si nostris litteris scribantur surdum quid-dam et barbarum efficient ).
4 Les occlusives sourdes aspires ch, ph, th, rserves, l'origine, aux mots grecs d'un emprunt relativement rcent(chorus chur , machina machine, appareil , philtrum breuvage magique , romphaea cimeterre , thsaurus trsor , cthra cithare ), sous l'influence desquelles
l'aspiration s'est introduite, il est vrai, ds la fin dudeuxime sicle av. J.-C, dans un certain nombre de motsde source latine comme pulcher beau (la prononciationpulcer tait vieillie au temps de Cicron, comme il nous ledit lui-mme dans YOrator 48,160), spulchrum tombeau (prononciation qui n'tait pas encore gnrale l'poque deCicron et que, pour son compte, il repousse; comp. lepassage prcit de VOrator), Umpha eau transparente ,sulphur soufre etc. (voir 3o .
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H -
V. La dualit qu'on observe, en franais, dans l'pella-tion des signes alphabtiques reprsentant les consonnes
f% l, m, n, r, s pels f, l, m, en, r, es, mais 6, c, d, g, k,
p, q, t pels b, ce, d, je, ka, p, ku, l remonte l'anti-quit, cette diffrence prs que, jusqu' la seconde moi-ti du iv e sicle, les lettres du premier groupe, /*, J, m etc.s'nonaient sans voyelle d'appui. Elles taient donc, jus-qu' cette poque, litterae per se nominativae sive quaeper se prolatae nomen suum ostendunt (Gharisius I, p. 9,4 K et Priscien II, p. 8, 10 K), au mme titre que a, e, i, o, u.C'est ce qui, dans la terminologie des grammairiens romains,leur a valu le nom de semivocales, par opposition 6, c, d, getc. appels mutae quod per se sine adminiculo vocaliumnon possunt enuntiari (Diomde I, p. 423, 24 K).
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L'ACCENTUATION LATINE
g 7. Dans les groupes d'articulations appels
mots, l'une des syllabes peut tre mise en relief par
un surcrot d'effort musculaire ou par une lvation
plus ou moins considrable de la voix. La nuance
qui rsulte de l'nergie particulire du travail arti-
culatoire constitue l'accent d'intensit ou l'ac-
cent tout court; celle qui provient du passage
une note musicale plus aigu forme l'accent dehauteur ou le ton.
L'accent et le ton peuvent exister simultanment
l'intrieur d'une mme langue. C'tait le cas dulatin prlittraire, o, indpendamment de l'alter-nance de syllabes aigus et graves que cette langue
avait hrite de l'indo-europen, une intensit trs
forte s'tait dveloppe sur la syllabe initiale des
mots. Mais, au dbut de la priode littraire, cette
intensit initiale qui s'adaptait mal aune langue, ola quantit des syllabes tait rigoureusement obser-
ve, a t limine, et, depuis le deuxime sicleav. J.-G. jusqu'au quatrime sicle de notre re, le
-
13
latin n'a plus eu qu'un ton, dont la place tait
dtermine par la quantit de la syllabe pnultime.
Il n'y a pas trace que le ton ait exerc, avant la
priode romane, une influence quelconque sur le
systme phontique du latin. L'intensit initiale, au
contraire, a profondment altr le vocalisme primi-tif des syllabes intrieures en les affaiblissant au
profit de la premire qu'elle renforait. Il est remar-
quable, toutefois, que ces altrations n'ont atteint
que les voyelles brves. Les voyelles longues non
seulement n'ont jamais subi aucun changement nide timbre, ni de dure sous l'action de l'intensitinitiale, mais c'est prcisment la suite du conflitentre syllabes longues et syllabes intenses, dtermi-
nant deux rythmes contradictoires, que l'intensit
initiale a disparu.
-
VOLUTION DES VOYELLES LATINES
TRANSFORMATIONSDUES A L'INTENSIT INITIALE
8. Les effets de l'intensit initiale se ramnent
deux principaux :1 La modification du timbre des voyelles brves
intrieures ou apophonie et2 leur chute ou syncope.
Il n'a pas encore t possible de faire le dpart des
cas d'apophonie et des cas de syncope, c'est--dire
d'expliquer pourquoi, dans tel mot, la voyelle est
tombe plutt que d'tre simplement altre dans
son timbre et inversement. Tout ce que l'on peut
dire, c'est que l'apophonie a d se produire partout
o il n'y a pas eu de syncope.
CAS D'APOPHONIE
g 9. _ L'afiection du timbre des voyelles brves
intrieures sous l'influence de l'intensit initiale a
-
15
t diffrente suivant que ces voyelles se trouvaient
en syllabe ouverte ou en syllabe ferme, c'est--
dire selon qu'elles taient suivies d'une seule con-
sonne ou de plusieurs. Nous avons donc examinersparment leur traitement dans chacune de cespositions.
A. Apophonie en syllabe intrieure ouverte
10. En syllabe intrieure ouverte, sauf devantr et aprs i, les voyelles brves ont toutes tramenes l'une des deux voyelles brves les plusfermes ou , quel qu'ait t le timbre primitif.La rpartition d'S et d' tait rgle par la nature
des phonmes voisins. On a ainsi :1 devant d, t, n, g, c ;2 devant l suivi d% mais devant l suivi de
toute autre voyelle;
3 tantt et tantt z (sans qu'on ait russi, jus-qu' prsent, tablir la formule exacte des lois
qui ont prsid au choix de l'un ou de l'autre desdeux timbres) devant &, p, f, m.Exemples :1 a ) subsiste :
video, je vois
pervldo, je vois distinctement >
vdens, visible, clair, vident
prvdus, prvoyant, avis .
-
16
clo, je meus
eclo, je fais sortir, je provoque,
j'excite
suscto, je soulve, je suscite .
mno, je diminue
commino, je diminue, je morcelle, jemets en pices
immno, j'amoindris, j'affaiblis .
rgo, je mouille, j'arrose
irrgo, j'arrose
irrgtios, qui arrose et qui est
arros .
mco, je m'agite vivement, je brille
dmiec, je m'escrime, je combats
mco, je m'lance dehors, j'clate, je
sors brillant .
rcis gn. (nom. inusit), succession, alter-
native 3>
invcem adv., a tour tour, rciproque-
ment .
b) > :
sdo, je suis assis
obsdo, je suis assis devant, j'assige
praesdo, je suis assis la premire
place, je prside .
-
17
ddl parfait, j'ai donn reddldi, j'ai rendu
trdi, j'ai remis .
mdias, qui est au milieu, central
dmdhis, partag par le milieu,
demi .
stti parfait, je me suis tenu debout
dslti, c< j'ai renonc, j'ai disconti-
nu restti, j'ai fait halte, j'ai rsist .
stps nom. (pour *stpt-s), souche, tronc
stptis gn.
pto, je me dirige vers
compitam, endroit, o aboutissent plu-sieurs chemins, carrefour .
tno, je tiens
abstno, j'carte, je m'abstiens
suslno, je soutiens .
flmn nom., fleuve
flminis gn.
lgo, je ramasse, je choisis
collgo, je rassemble, je ramasse, jerunis
slgo, je spare en triant .
rgo, je dirige, je conduis
rgo, j'lve
porrgo, je tends, je prsente .
-
18
aaspx [aiispc-s,* vi-spc-s) nom., celuiqui observe les oiseaux, devin
aaspcis gn.
c) a > i :
facto, je tombe
dcdo, je tombe du haut de
incido, je tombe dans, je me jette sur
ccidi parfait, je suis tomb
succdos, o qui s'affaisse .
i, ainsi, de cette manire
tdem, prcisment ainsi, de la mmemanire .
ftor, je reconnais, j'avoue
diffitor, je nie
prfitor, je proclame hautement .
stlo, je place, je dresse
reslto, je remets en place, je rtablis,je restitue
subsilo, o je place dessous, je soumets,
je substitue .
tfto ptc. parf. passif, donn
ditas, mis au jour, publi
prdtus, livr, trahi .
ratas, ratifi, valable
irritas, non ratifi, non valable, nul,
vain )>.
-
19
cno, je chante
concno, je chante avec, je suis d'accord
praecno, je chante ou je joue d'uninstrument devant quelqu'un
ceci ni parfait, j'ai chant
tbcnum> art de jouer de la flte .##, je pousse, je conduis
bgo, j'loigne, je chasse
trnsgo, je conduis de l'autre ct,
je mne bonne fin, j'achve prdgus, qui jette (son argent) devant
soi, dpensier, prodigue .
pango (racine^^), je stipule, je conviens de
ppigi parfait.
tango (racine tg), je touche
ttgi parfait.
fco, je fais
cnfco, j'achve offclo, je fais obstacle, je nuis
cliffclis,
malais, difficile
aedfcwn, btiment, difice .
tco, je tais, je me tais
conticescOy je cesse de parler, je me taisrtco, je passe sous silence .
fctus, gracieux, lgant, spirituel
nfichis,
sans got, sans esprit,
sot .
-
20
d) > :
lcus, lieu, endroit, emplacement (ancien-
nement stlcus, d'aprs Quintilien, lns-
tit. oral. I, 4, 16)
lic (de % %n stlc), sur-le-champ .
nvs, nouveau (devenu novus dans les
premiers temps de l'empire ; voir 29)
nvils (de *nv-ts), nouveaut .
e) > :cpt nom., tte
cap1Us gn.
cornu (thme cornu-), la corne n
cornger, qui porte des cornes, cornu .
mns (thme mn-), main mnca, manche de tunique et me-
Dotte .
2 exluan, exil
mais
exlans, exil .
fmlla, ensemble des habitants de la mai-
son , plus particulirement ensemble
des esclaves obissant un mme matre mais
fmlas, serviteur, domestique .
Scla, la Sicile
-
21
mais
Seliis, habitant de la Sicile, Sicilien .
similis, semblable
mais
smlo, je rends semblable, j'imite, jereproduis .
Comparez encore :
dslo, je saute du haut de , compos deslo, je saute
et
sdl, loyalement, consciencieusement ,de se dl, sans fraude .
3 hbo, je tiens, j'ai
dhbo, j'approche, j'applique prhbo, je tiens loign, j'carte .
tbema, cabane, tente contbernliSy qui loge sous la mme
lente, camarade .
lbety il plat, il fait plaisir
quodlibet, ce qu'on voudra, n'importe
quoi (des composs de ce genre on atir un ibet qui est entr en concur-
rence avec la forme primitive lbet
et a fini par triompher de celle-ci).
arcs^-s nom. sing., arc
arcbus, dat. abl. plur.
-
22
rnns,-s nom. sing., main
mnibus dat. abl. plur.
Comparez aussi :
intbum et intbum, chicore
.
ancps nom., oiseleur
aucpis gn.
mancps nom., acqureur, adjudicataire
mancpis gn. archaque et
mancpis gn. classique,
cpzo, je prends
rcipro et rcpro, a je rentre en pos-
session de, je recouvre
accpo, je reois, j'accepte
mais
occpo, je m'empare de, j'occupe .
rpo, je saisis vivement, j'enlve *
surrpo prsent, je drobe
mais
surrpi parfait chez Plaute.
aurifex et aurfex, orfvre, bijoutier .
manifestes (graphie classique) et m^/^/ws(graphie archaque), vident, mani-
feste
.
frmus, nous portons , lgmus, nous
lisons
-
23 -
mais
possmus, nous pouvons , vlmus, nousvoulons .
spcimen, preuve, chantillon
mais
dcmentum, enseignement, exemple .
Pour ce qui est des superlatifs en -mus, -mus,comme optmus optmus, Quintilien nous apprendque la voyelle apophonique y reprsentait un son
intermdiaire entre et (Instit. orat. I, 4, 8 : m-dius est quidam u et i litterae sonus : non enimoptwnum dicimus aut optimum) et que u tait lagraphie archaque et i la graphie classique (ibid. I,
7,21 : jam optimus, maimus ut mediam i litteramquae veteribus u fuerat acciperent, Gai primumGaesaris inscriptione traditur factum). Cette obser-
vation se trouve confirme, d'une manire gnrale,par l'orthographe des inscriptions et des meilleurs
manuscrits qui permet mme de l'tendre un cer-tain nombre d'autres mots appartenant cette troi-sime catgorie (comp. p. ex. les gnitifs mancpismancpis et mnfestus mnifestus ci-dessus). Ilest remarquable, toutefois, que, pour mnimus, laforme en -mas n'est jamais atteste, et ce fait,combin avec l'opposition de frmus. lgmus etde possmits, vlmus et celle de spcimen et de
-
24 -
dcmentiim, semble trahir une influence du voca-lisme initial sur le timbre de la voyelle de la seconde
syllabe. Dans d'autres cas, comme dans celui d'ac-
cpo en regard 'occpo, c'est plutt le vocalisme
de la syllabe suivante qui parat avoir dtermin lacouleur de la voyelle apophonique.
11. Devant r, toute voyelle brve intrieure
a le timbre .
Exemples :
cmis nom., cendre
cnris gn. (de *cnsi$y*c>nris\ voir
% 41).
pidvs nom., poussire
pulvris gn.
Flsci, Falisques (peuple d'trurie)Flri, Falries (capitale des Fa-
lisques, e*Flsii*FUri;YoirM).lgifer, lgislateur
lgrpa, qui viole les lois (forme
donne par les meilleurs manuscritsde Plaute, Persa 68).
frus, sauvage, froce
effrus, mme sens verbr nom., fouet et coup de fouet
verbris gn.
-
25
tiare, donner
reddre, rendre
trddre, remettre .
pro, je produis, j'engendre, je mets aumonde
rpro, je trouve, je dcouvre, j'in-vente
ppri parfait, j'ai produit, engendr,mis au monde .
Comparez encore :
legre, . lire
nmrus, nombre volnris, gn. de volnus, blessure .
12. Enfin, la voyelle apophonique est aprs i.Exemples :
ptcis, pit, affection filiale , vrts, a va-
rit, diffrence (drivs de pus, pieux et v-
ftus, vari, diffrent , anciennement ps, vris,comme nvits de nvos, nouveau ;voir 10, l,d).
btis, rlis, prtis, gn. de bs, sapin ,
rls, blier , partes, paroi (la voyelle longue
au nominatif de ces trois mots est exactement com-
parable celle de ps nom., pied en regard depdis gn.).
-
26
B. Apophonie en syllabe intrieure
FERME.
13. En syllabe intrieure ferme, a est devenu
, quels que fussent les phonmes voisins, s'est chang en ds la fin du troisime sicle avantJ.-C, sauf lorsqu'il tait prcd de u voyelle ouconsonne; dans cette dernire position, il a persist
jusqu'au sicle d'Auguste. Les autres voyelles sontdemeures intactes.Exemples :1 > :
rco, je contiens, j'empche crco, je maintiens, je rprime
exrco, je dgage, j'exerce .crpo, je cueille, je dchire
discrpo, je dchire, j'parpille
excrpo, j'extrais .
sendo, je monte sur, j'escalade ascndo, je monte sur, je gravis
descendu, je descends .
trcto, je trane, je manie, je traite
dlrcto, je lire en bas, je rabaisse, je
dprcie
oblrcto, je combats, je critique, je
dnigre .
-
27 -
fctus ptc. parf. passif.,
-
28 -
mont-, thme de mns (avec allongementcompensatoire de Y d'aprs le 25, 2),
a montagne
prmntoum (telle est la vritableorthographe de ce mot), a contrefort
d'une montagne, promontoire .
anc. lat. vns, -ris, grce, charma (on
lit Venos sur deux miroirs de date trs
ancienne)
vnslics, gracieux .
Par contre, pendant toute la priode rpublicaine,
on ne disait jamais autrement que frintur, ils
jouissent , squntur, ils suivent etc. (voir g 29,.
3 . , persistent :
dsco, j'tudie, j'apprends
ddisco, je dsapprends, j'oublie
perdsco, j'apprends fond .
frmus, ce solide, fort, sain
nfnnus, c< faible, souffrant .
snto, je sens, je pense
cnsnto, je suis du mme avis, jem'accorde avec
dissnto, je suis d'avis diffrent, je suis
en dsaccord avec .
srvos, l'esclave
cnsrvos, le compagnon d'esclavage .
-
- 29 -
fndo, je verse, je rpands
effndo, j'panche trnsfndo, je transvase, je reporte
sur .
crvos, courbe, recourb
rcrvos, recourb, crochu .
ANALOGIE ET CAS PARTICULIERS
g 14. L'action normale de ces lois d'affaiblisse-
ment vocalique a souvent t traverse par l'analo-
gie. Ainsi les composs cmdo, je dvore ,ddcas, dshonneur , posthbo, je place enseconde ligne, je nglige pour , perfa.clis, trs
facile , convco, je convoque , bfris, qui adeux battants, deux panneaux, deux portes , dis.-pto, je soutiens un avis diffrent, je discute ,impdcus, hont , Ulcrmor, je pleure sur ,subrancidus, un peu rance , dopto, je choisis,
j'adopte , etc., sont refaits sur les simples do, jemange , dcus, honneur , hbo, j'ai, je tiens ,fclis, facile , vco, j'appelle , fris (ordinai-
rement au pluriel fors), porte , pto, je calcule,
j'estime, je suis d'avis , pdcus, pudique,rserv , lermo, je pleure , rncdus, rance ,pto, je choisis, je souhaite . La forme apopho-nique s'est parfois maintenue dans le parler popu-
-
30 -
laire. Pour ne citer qu'un exemple, alors que la
langue littraire employait exclusivement la recom-
position analogique spro, je disjoins, je spare (proprement a je dpareille, je ddouble , de sd,prfixe marquant la dsunion
-f- pro je mets depair , voir 57), certains textes vulgaires offrent
spro, et leur tmoignage se trouve confirm par
celui des langues romanes (fr. sevrer ; sprre
aurait donn *sverer). Dans corpris, gn. de
corpus, corps , dcris, gn. de dcus, honneur ,
temporis, gn. de lempus, temps , qui sont pour
*corpris, +dcris, *tempris, V vient des anciensnominatifs *corps, *dcs, *tempos ; le vocalisme
rgulier s'est conserv dans l'adverbe tempr,
temps, au bon moment qui tait l'abri des
influences analogiques par le fait qu'il n'appartenait
plus la flexion.
Dans d'autres cas, l'tat qui rsultait des lois de
l'apophonie se trouve masqu par des altrationssecondaires, indpendantes de l'intensit initiale.
C'est ainsi que s'expliquent, par exemple, atilngo,
j'atteins , au lieu de *attngo en regard de tango,
je touche (voir 16) ; nslsus, non sal, fade,
sot , au lieu de Hnslsus en regard de slsus, sal,
piquant, spirituel (voir 17); scldo, j'enferme
part, j'isole , pour *scludo en regard de cludo,
je ferme (voir 22). En ce qui concerne ce der-
-
31
nier exemple, il faut remarquer que, des deux l-
ments constitutifs de la diphtongue au de claudo,
c'tait le premier le plus intense. Il s'ensuivait que
la position articnlatoire du second, w, au lieu d'tretenue, tait abandonne aussitt, en d'autres termes,que cet u se consonnifa en passant l'tat de semi-
voyelle (voir 6, remarque IV, 2). L'a de claudo
se trouvant donc plac devant deux consonnes [vu),les composs de ce verbe affectaient rgulirementla forme *
cludo qui, comme il vient d'tre dit,
a abouti ensuite cldo. Comparez encore :
caus(s)a, a cause, procs
accs(s)o, j'accuse .caedo (anciennement caido, voir 20), j'abats,
je tue
cecdzparfait ;tapeintermdiaire *ceceiYi
(ei > I conformment au 19).laedo (anciennement laido), je broie, je
brise
illdo, je broie, je brise contre ; tape
intermdiaire *illeido.
CAS DE SYXCOPE
15. A rencontre de l'apophonie, la syncopene parat pas avoir t dtermine par l'intensitinitiale toute seule, quoique celle-ci en ft, n'en
-
32 -
pas douter, le principal agent. Les exemples que
nous allons numrer montrent, en effet, que, dansbien des cas, la chute complte d'une voyelle brveintrieure tait lie la quantit longue de la syllabe
suivante. Mais il ne suffit pas de faire intervenir la
quantit pour rendre compte de tous les phno-mnes de syncope. 11 doit y avoir eu d'autres fac-teurs, sur la nature desquels, dans l'tat actuel de
la science, il n'est pas permis de rien affirmer de
prcis.
La syncope n'a pas toujours entraide la perted'une syllabe. Dans les mois, en effet, o elle s'estproduite en prsence d'un j ou d'un v, ces phonmesse sont vocalises et, moins d'tre plac s aprs une
voyelle, ont maintenu le nombre de syllabes pri-mitif.
Exemples :
a) La syncope est le rsultat de l'action combinede l'intensit et de la quantit longue :
arclre, tfrus, infrieur (par ex. dans mare
infcrum, la mer d'eu bas , c'est--dire
la mer Tyrrhnienne ).
-
- 33 -
supr, au-dessus, plus haut , en regard de
sprus, suprieur (par ex. dans mare
saperam, la mer d'en haut , c'est--dire
l'Adriatique .
vald, fort, beaucoup , en regard de validas, vigoureux .
Le paradigme d'un mot comme caldus, chaud ,tait donc l'origine.
Nom. caldus
Ace. cldumGn. caldDat. cald
Abl. cald.
Mais cet tat primitif n'a pas t conserv intact.
L'analogie, d'une part, a propag la forme syncopedans le nominatif et dans l'accusatif, crant ainsi
le doublet caldas, dont l'empereur Auguste se ser-
vait, d'aprs le tmoignage de Quintilien, de prf-rence caldus qu'il trouvait pdant et affect
(Instit. orat. I, 6, 19 : sed Augustus quoque in epis-
tulis ad G. Gaesarem scriptis emendat quod is cali-dum dicere quam caldum malit, non quia id non sitlatinum, sed quia sit otiosum), et, d'autre part, artabli la voyelle syncope au gnitif, au datif et l'ablatif. L'explication que nous venons de donnerde caldus s'applique galement soldas, c< solide,massif, compact, entier > (employ, par ex., par
PRCIS DE PHONTIQUE HISTORIQUE DU LATIN. 3
-
34
Horace, Sat. I, 2, 113 et II, 5, 65) ct de
sldus,raucas, enrou, rauque , pour *rv()cus,
driv de ravis, enrouement , etc.
b) La syncope est le rsultat de l'action combinede l'intensit et d'un facteur autre que la quantit
longue, mais impossible prciser davantage.
bco,
je rejette, j'abandonne , de* abj{,clo.
auceps, oiseleur , de * v[i)ceps.
conutw, je secoue fortement , de * con-
qu()lo.
fnor, plus jeune , de * jv[nor, * j-nior (pour la contraction de * jnior enjunior, voir > 32).
reccdi, reppli, retili, parfaits de rcdo,
je retombe, je faiblis, rpello, a je %repousse, refro, je rapporte, de*rc(
/Cdi i *rp()puli t *ret tli (tlli
comme parfait de fro est souvent attest
dans le latin archaque).
Dans les composs dejco, je jette, je lance ,ra forme rgulire -co se trouve remplace par
-pcw ds l'poque classique, sinon dans l'ortho-
graphe, du moins dans la prononciation, ainsi qu'en
fait foi la scansion mtrique de abicio, adicio, coni-
cio, obicio, subicio, dont le prfixe est toujourslong par position daus lp lyrique et dans l'pope
-
35
classique. Virgile, par exemple, commence dans
YEnide VI, 421 et VII, 480 un hexamtre parobicit, et Aulu-Gelle, Nuits attiques IV, 17, 8, ob-
serve expressment, propos de subicit, que Yi vim consonantis capit et idcirco ea syllaba pro-ductius latiusque paulo pronuntiata priorem sylla-
bam brevem esse non patitur, sed reddit eam positulongam . Cette innovation s'est effectue par voie
d'analogie : conjco pour cnco, par exemple, estrefait sur un modle comme cnfco, d'aprs laformule fco : cnfco = jco : x.
TRANSFORMATIONS INDPENDANTESDE L'INTENSIT INITIALE
A. Changements qualitatifs en syllabeNON FINALE
16. devant nasale gutturale est de-
venu .
Exemples :septingenti, sept cents , de *septrncenti.
cnfrmgOy je brise, je romps , de * cn-frngo, issu de *cnfrngo (voir 14).
suppngo, j'enfonce sous , de* subpngo,issu de * subpngo (voir 14).
-
- 36
dgnas, digne de, qui mrite , de *dgnos,* dcnos (appartient la racine de dcet,
a il convient, il sied ; c > g d'aprs le
62).
lgnum, bois brler , de *lgnom [lgo,
je ramasse ; lignum signifiait l'ori-gine le bois que l'on ramasse ).
Sur la notation de la nasale gutturale par g dans
les deux derniers exemples, voir 6, remarque III ;
consulter aussi le 69.
v yj \j w
17. est devenu devaat l suivi de , , , ;dans le groupe -l- suivi d'une consonne (sauf le
cas de la gmine -II-), il est devenu en passant par (voir ci-dessous).
Exemples :verbe vlle, vouloir , racine vl- : volo,
vlbam, vlam, vll, mais tlimyvl-
lemtvlle.
hlits n., lgume, plante potagre , enancien latin hlus.
exslto, je sautille, je bondis de joie ; de* eocslto, issu de * exsalto (voir 14).
puisas, ptc. parf. passif de pllo, je pousse .
18. 6 est devenu devant l-f- consonne
(except le groupe-U-),
-
37 -
Exemples :
clmen, fate, sommet , en regard deelmen qui a le mme sens.
plvis, poussire, poudre , en regard de
pollen, poudre trs fine, fleur de farine .
stltus, sot, niais , en regard de stldus
qui a le mme sens.
19. ei est devenu ds le deuxime sicleavant notre re.
Exemples :
dlco, je dis , de deico (dicerent se trouvesur une inscription latine de l'an 186 av.
J.-C).diffldens, dfiant , de diffeidens, attest
par une inscription.
incdo, je fais une entaille , de inceido
(inceideretis dans l'inscription prcite
de 186 av. J.-C).
20. ai est devenu ae partir du ne sicleav. J.-G.
Exemples :
aeds, temple , de aids (aide = aedem selitsurl'inscription spulcrale d'un Scipion
qui date de la fin du me sicle av. J.-C,tandis que l'inscription de l'an 186, dont il
vient d'tre parl, offre dj aedem).
-
38
qnaero, je cherche, je demande , de quairo(quairatis dans une inscription du 11e
sicle av. J.-C).
Dans les campagnes autour de Rome, ae cessa de
bonne heure d'tre une diphtongue. Varron nous ap-prend, en effet que, de son temps , les paysans disaient
Meshis et edas pour Maesias et haedus (De lingualatina Vil, 96 : rustici pappum Mesium nonMaesiam; ibidem Y, 97 : in Latio rure edas qui inurbe, ut in multis, a addito aedus). Sous l'empire,
cette prononciation gagna petit petit la capitale et
finit par devenir gnrale. Ue sorti d'un ancien aetait un ouvert (), la diffrence de Y primitif
qui tait une voyelle ferme (). Aussi, lorsque,
vers la fin de l'poque impriale, le latin a perdu la
distinction de la dure des voyelles en ne retenant
que celle du timbre, ae s'est-il entirement confondu
avec (c--d. e\ dont primitif (c--d. e), au con-
traire, est toujours rest nettement spar. Tmoinles langues romanes, o ae et ont abouti au mmersultat, tandis que a t trait diffremment;
comparez lat. quaerit > fr, 'quiert, lat. hri > fr.
hier, en regard de lat. cra > fr. cire.
21. oi est devenu , en passant par oe, ds le
commencement du n e sicle av. J.-G.
-
39
Exemples :
nus, un , de oinos (oino = num dansl'inscription spulcrale d'un Scipion,
mentionne plus haut; oenus chez Plaute,Truculentus 104).
commnis, commun , de commoinis(comoinem se rencontre dans l'inscriptionde l'an 186, cite ci-dessus plusieurs
reprises).
sus, usage, utilit , de oisos (comparezMartianus Gapella III, 236 : oisus etiam
dicitur; sicenim veteres usum dixere).Dans un certain nombre de mots, on a conserv
la graphie oe, mme une poque o l'on prononait depuis longtemps. Ainsi mrus, mur, se trouvesouvent crit moeras encore dans les manuscrits de
Virgile. Enfin, par suite d'une raction de la langue
crite sur la prononciation, dont le franais de nos
jours offre de nombreux exemples, oe a t rtablidans la prononciation dans des cas comme poena, peine, punition (en regard de pnre, punir ),moena,-um, muraille, rempart (en regard de
munis), etc.Dans coepi, je commence , il ne s'agit pas de la
diphtongue indo-europenne oi devenue oe, maisd'une contraction postrieure de o
-f- . coepi pour
co-pi (la scansion trisyllabique ^_w, par exemple
-
40 -
chez Lucrce, Dererum natura IV, 619), contient leparfait d'un verbe po, j'attache , qui sembletre tomb en dsutude de bonne heure.
22. eu est devenu ou, puis (voir 23). Lepassage de eu ou ayant eu lieu l'poque prlitt-raire, le latin lui-mme ne nous fournit plus aucunexemple de la diphtongue primitive eu. Mais, d'unepart, la comparaison des langues congnres nouspermet d'affirmer que, par exemple, l't de dco,a je tire, je conduis , remonte un ancien eu (laforme intermdiaire ou est atteste par une ins-
cription du n e sicle av. J.-C. o l'on lit abdoucit)et, d'autre part, les lois apophoniques nous autorisent
ramener, par exemple, accs(s]o, j'accuse * *dceus(s;o, provenantrgulirementde*atfcaus(s;odriv de caus(s)a, cause, procs, (voir 14).
Pour ceu adv. et conj., comme , eu, doublet
de nve, et ne pas, ou ne pas, ni s, seu,
doublet de sve, ou si , neuter, ni l'un ni
l'autre , qui semblent faire exception, il y a lieu
de rpter l'observation faite ci-dessus propos de
coepi. Dans tous ces mots, eu provient d'une con-
traction postrieure de e + M- En ce qui concerneplus particulirement neuter, il n'est mme pascertain qu'en prose il ait jamais t prononcautrement que neuter.
-
41
23. ou est devenu vers la fin du 111 e sicle
av. J.-G.
Exemples :
lcus, clairire dans un bois , de loucos
qui se lit dans une vieille inscription de
Spolte.
nlrix, nourrice , de noutrix. La forme
primitive nous est fournie par une ddi-
cace pigraphique trs ancienne.
24. au a persist dans le latin littraire de
Rome. Dans les patois campagnards des environs
et dans la langue populaire de la capitale elle-mme,
au contraire, il s'est chang de bonne heure en .Ce double traitement a parfois provoqu des con-fusions en ce sens que, un moment donn, l'on ne
savait plus si, dans tel mot contenant un, on avaitaffaire un ancien ou bien un au deveuuodansla prononciation vulgaire. Sutone, dans sa biogra-
phie de l'empereur Vespasien, 22, nous raconte,
ce sujet, l'amusante anecdote que voici : (Vespa-sianus) Mestrium Flrum consularem admonitus abeo, plaustra potius quam plstra dicenda, posterodie Flaurum, salutavit . Dans les cas douteux, les
gens qui se piquaient de bien parler optaient pour
an, au risque d'introduire cette diphtongue dans
des mots qui n'y avaient pas droit. C'est ainsi que
-
42
plaudo, je frappe, je bats des mains a remplacpldo, bien que ce dernier renfermt un primitif,
comme le prouvent les composs compldo, jechoque deux objets l'un contre l'autre , displdo, je fais clater , expldo, je chasse en battant
des mains, je hue En effet, si an dans plaudotait ancien, nous aurions * compldo, * displdo,* expldo (voir 14).
B. Changements quantitatifs en syllabe
non finale
a) Allongement de voyelles brves.
25. Une voyelle brve a t allonge par
compensation :1 Ensuite de l'amussement d'un s devant con-
sonne scnore (voir 86).
Exemples :
dinsco, je discerne, je distingue , de* disnsco.
dco, je conduis hors de, je fais sortir ,
de * xdco (x = es),idem, le mme , de * sdem [is + dem).pno, je pose, je place , de * ps()7io ;
comparez le ptc. pslus = p (prfixe)
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43
-f- stas ptc. parf. passif de sno, je d-
pose, j'abandonne .sdcim, seize , de * sxdcim.
2 Devant-nf- et -ns-, la nasale ayant perdu son
occlusion et ses vibrations glottales s'tant ajoutes la voyelle prcdente (voir 87).
Gicron, Orator 48,159 : quid verohoc elegantius,
quod non fit natura, sed quodam instituto, ndoctusdicimus brevi prima littera, insanus producta,
nhumanus brevi, infelix longa et, ne multis, qui-bus in verbis eae primae litterae sunt quae in
sapiente atque felice , producte dicitur in,
in ceteris omnibus breviter ; itrmque cnposuit,cnsaevit, cncrepuit, cnfecit : consule veritatem,
reprehendet ; refer ad aures, probabunt. Cette
observation est confirme par les inscriptions qui
montrent en mme temps que l'allongement enquestion n'tait pas limit Y du prfixe in- et Y du prfixe cn-. Dans les monuments pigraphi-ques latins, en effet, la voyelle, quelle qu'elle soit,
qui prcde l'un des deux groupes-nf- ou -ns- est
souvent marque comme longue par un signe sp-cial dit apex. L'alphabet grec possdant deuxcaractres diffrents pour et et de mme pour et, la transcription grecque de mots latins dans des
inscriptions et chez des auteurs peut, elle aussi,
nous renseigner, dans une certaine mesure, sur la
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44
quantit de la voyelle suivie de-nf- ou -ns-. Or, ce
tmoignage encore prouve absolument en faveur dela longue.
Qu'il s'agit bien, dans l'espce, d'un allongement
compensatoire, c'est ce que montre, entre autres,
une notice de Quintilien, Instit. orat. I, 7, 29 qui
dit que, dans le mot cnsv.les, la nasale n n'tait
pas prononce (... consules exempta n littera legi-mus).
26. En dehors de l'allongement compensa-
toire, une voyelle brve a t allonge dans les
participes du parfait passif des verbes, dont le radi-
cal se terminait par une consonne sonore et dans
les formes verbales et nominales drives de ces
participes (voir 62, 1).
Exemples :cins ptc. de go, je pousse, je conduis .
lctus ptc. de lgo, 1 c< je ramasse, je choi-
sis , 2 je lis .
(La longueur de la voyelle radicale, dans
ces deux participes, est garantie par le
tmoignage d'Aulu-Gelle, Nuits attiques
IX, 6 et XII, 3, et par l'apex dans de nom-
breuses inscriptions).
csus ptc. de cdo, je tombe (pour cet
exemple et le suivant, voir 83).
-
45
visas ptc. de video, je vois
mais
fctus ptc. de /aco, je fais .
(Si l'a de factus tait long, nous aurions* cnfactus, *effactns etc. au lieu de cn-
fectus, effectus ; comparez dactus.)mssus ptc. de mto, je moissonne (voir
S 83).
(L' de messas est attest comme bref par
le fait que, vers la fin du Ier sicle av.
J.-C, ss tait rduit s simple aprs
voyelle longue et que, par consquent,
messas, s'il avait eu un e long, serait
devenu *mesus cette poque, ce qui n'a
pas t le cas ; voir g 58).
On a de mme ctto, je plaide souvent , prtc-tor, protecteur, dfenseur , en regard de fcito,je fais habituellement ,.sc0o, coupure, partage .
Les exceptions la rgle, telles que sssas ptc.
de sdo, je suis assis , fssus ptc. de fdo, je
creuse , sont probablement de formation analo-
gique.
b) Abrgement des voyelles longues.
27. A. l'poque classique, toute voyelle longue
suivie, mais non prcde d'une autre voyelle taitabrge.
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- 46
Exemples :
fno, je finis , en regard de l'infinitif
ftnlre.
plus, pieux , forme archaque plus (unhexamtre d'Ennius commence par lesmots : pectora pia tenet desiderium).
ri, gn. de rs, chose * (maisdi, gn. de
dws, jour , glcii, gn. de glcis, glace , parce que, dans ces mots, l' est
non seulement suivi, mais aussi prcd
d'une voyelle).
flo, je pleure , en regard de l'imparfait
flbam.
gr^is, gn. de grs, a grue .
so, je couds , en regard de stor, save-
tier *.
Les potes classiques scandent rgulirement
illus, ipsas, tmiiis, mais en prose, on disait, du
moins au temps de Quintilien, illlus, ipsius, nlus
(Instit. orat. I, 5, 18 : unus... extra carmen non
deprendas). Les causes de ce rtablissement de la
longue sont encore mal claircies. Par contre, si
Servius, commentateur de Virgile, nous apprend
que la prose opposait aadit, lniit (parfait de au-
dio, a j'entends ,etde/mo, j'adoucis, je calme ) la scansion aadlit, lnit des potes, l'influence
analogique est manifeste : aitdit, lniit sont refaits
-
47
sur les doublets audvit, lnvit, o VI n'tait passuivi d'une voyelle et, partant, ne devait pas s'abr-
ger. 11 en est de mme de fo, je deviens (pour*fo) refait sur fis, fmas.
Sur un autre cas assez obscur, d'ailleurs, d'abr-
gement d'une voyelle longue, en syllabe non finale,
voir ci-dessous 55).
G. Changements qualitatifs en syllabe finale
S 28. En finale absolue, s'est maintenu intact ;comparez :
gnr, frgra, nom. ace. plur. de gnus n.,
-
- 48
mr nom. ace. sing., mer , en regard demr-a nom. ace. plur.
ln neutre en regard de ln-s masculin etfminin, doux .
29. En finale non absolue, le traitement desvoyelles brves a t tout diffrent. Dans les mono-syllabes, elles n'ont subi aucune altration. Dans
les dissyllabes et les polysyllabes, et ont per-sist, aussi sauf devant s, o il est devenu . asuivi de deux consonnes a volu dans le mmesens qu'en syllabe intrieure, c'est--dire a abouti
; quant son traitement devant une seule con-
soune, l'absence d'exemples probants ne permet
pas d'en affirmer rien de prcis. Enfin, est devenu au nominatif et l'accusatif singuliers de ladeuxime dclinaison, au nominatif et l'accusatifsinguliers des substantifs neutres de la troisime
dclinaison et la troisime personne du pluriel duprsent et du parfait de l'indicatif des verbes. Cetteaffection de remonte la fin du troisime sicleavant notre re dans les mots, o n'tait pas pr-cd !u ou de v. Aprs u et v, le passage d' nes'est effectu qu' partir des premiers temps de
l'Empire.
-
49
Exemples :
Monosyllabes :
rix, niviSf neige .
px, pcis, poix .
ml, mllis, miel .
nx, ncis, mort violente .
lc, lctis, lait .
fax, fcs, torche .
os, ssis, os .
nx, noctis, nuit .nx, ncis, noix .trx, trcis adj., farouche .
Dissyllabes et polysyllabes :
a) 1 nsis, pe (thme ns- ; comparez legn. plur. nsl-um).
clix,-Icis, coupe .
gls, agile (thme agi 11-).2 turtr,
-ris, tourterelle .
mgistrts,-s, magistrat (thme mgis-
trl-).
rdx,-cis, qui est de retour .
b) flmn, -Inis, fleuve .
forfx, -icis, ciseaux
.
hlms, fimis, hiver .
hrnspx, icis, devin qui tirait des prsagesde l'observation des entrailles des victimes(spco en ancien latin je regarde ).
-
- 50
mais
gnrs de * gnres, gn. de gnas, a genre,
race .
ordhs de * ordns, gn. de ordo, rang .
On lit sur d'anciennes inscriptions Apoloyies =
Apollns,
Cereres = Crrs,
Saintes
Sltls, Vnres = Vners.Des cas comme dss, -sdis, indolent, oisif ,
dvs,
-/is, riche ne font exception qu'en
apparence. En effet, le premier est pour * dsd-s
et le second pour * dvt-s (voir g 68). V des motsde ce type n'tait donc pas plac devant s ds ledbut comme dans les exemples qui viennent d'trecits. C'est ce qui nous explique pourquoi il s'est
maintenu.
c) aucps, oiseleur , de * v()-cp-s (avis,
oiseau + cpo, je prends ).rmx, rameur , de * rm-g-s (rmus,
rame -f- go, je manie ).
aurfx, orfvre , de * aurJ-fc-s (aarum, or, objet en or -j- fcio, je fais ).
d) ftls de fls, nom. sing., fils .
vrm de virm, ace. sing. de rr, homme .dnm de dnm, nom. ace. sing., don,
cadeau .
ops de pos, nom. ace. sing., uvre .
-
51 - .
cnsentnt de cnsentwni, 3 e personne plur.
du prsent de l'indicatif de cnsento, jesuis d'accord avec .
ddrnt de ddrnt, 3 personne plur. duparfait de l'indicatif de d, je donne .
Les formes flws, vtrom, dnm, ps, c[n)-senint, ddrnt sont attestes soit par d'anciennes
inscriptions, soit par des citations d'auteurs (compa-rez p. ex. Quintilien, Instit. orat. I, 4, 16).
Pour ce qui est des mots du type de bdm, espace de deux jours , qus, cheval , vvnt,a ils vivent , il ne faut pas que les ditions moder-nes de Csar, par exemple, qui orthographient bidu-
um,equus, vvwit, nous donnent le change. Les ins-
criptions prouvent de faon premptoire que ces der-nires formes sont postrieures l're rpublicaine
;
leur introduction dans un texte comme les Commen-taires sur la guerre des Gaules constitue, par con-
squent, un anachronisme.
30. Les voyelles longues n'ont subi d'altra-
tion qualitative ni en finale absolue, ni en finale
non absolue. Par contre, les diphtongues qui se
trouvaient places dans l'une ou l'autre de ces posi-
tions ont t transformes en voyelles longues. Il
s'agit en particulier d'ei, ai, oi qui sont devenus et d'o qui a abouti .
-
52 -
Exemples :
slbi dat. sing. du pronom rflchi, de sbei.ttd parfait de timdo, je frappe , de
* ttdai.
rosis dat. abl. plur. de rsa, rose , de* rsais.
bis 2 e personne sing. du prsent de bo, je m'en vais , de *beis.
vri nom. voc. plur. de vr, homme , de* virai.
dnls dat. abl. plur. de dnum, don,cadeau , de * danois,
currs gn. sing. de currns, char , de* currous.
Quelquefois, la diphtongue primitive nous estatteste par des documents pigraphiques (c'est lecas pour sibei) ou par des citations de grammairiens(Paul Diacre p. 14, 17 Th. : ab oloes dicebant proab iUIs), mais la plupart du temps son existence ne
nous est rvle que par la comparaison des autres
langues indo-europennes.
ai tant donc reprsent par , la dsinence
ae du gn. dat. sing. , et du nom. voc. plur. des
mots de la premire dclinaison ne peut provenir
d'ai. Elle est, en effet, pour ai ; comparez le
gnitif archaque aidai, chez Virgile, Enide, III,
354:
-
53
aidai medio libabant pocula Bacchi.
(On trouve encore chez le mme pictai,Enide IX, 26; aurai ibid. VI, 747 ; aquai,
iUd. VII, 464).
D. Changements quantitatifs en syllabe finale
g 31. La partie vocalique d'une syllabe finale
de mot tendait subir une diminution de dure.
Cette tendance se manifeste dans les cas suivants :
1 Toute voyelle brve en finale absolue a t
rduite une fraction de l'unit de dure et, par-
tant, tendait vers zro.
Exemples :les impratifs dc, dis , duc, conduis ,
fc, fais , fer, porte , ct de cape,
a prends , mitt, a envoie , tund,
u frappe etc.
les doublets e (voir 82) et atqu, et ,nc (voir 82) et nequ, et ne. . . pas
(noter que ac et nec se trouvant normale-
ment devant consonne initiale d'un mot
suivant ne peuvent tre dus des li-
sions), neu et nv, ou ne.. . pas .
tt, autant de , de * tt; comparez tot-
dem, prcisment autant de, un nombregal de .
-
54
2 Toute voyelle longue devant consonne autreque s s'abrgeait.
Exemples :
punt, il punit , mais pws, tu punis .spm, ace. de sps, esprance .animal, tre vivant, animal , gn. mmlis.calcar, peron , gn. calcris.cantbm, je chantais , mais cantbs,
tu chantais .
lictor, licteur , gn. lictrte.
3 En finale absolue, la posie archaque pouvaitcompter toute voyelle longue pour une brve dans lesdissyllabes de forme iambique, et il est hors de douteque cette rgle mtrique refltait la prononciationgnrale de l'poque. L'usage classique, par contre,n'admettait plus gure la scansion w que dansquelques mots accessoires de la phrase trs fr-quemment employs et par cela mme articulsd'une faon moins complte que le reste, commepar exemple :
bn, bien , mle, mal , ct dect, adroitement, finement , fr, presque
;
ct, vite , modo, seulement, tout l'heure , ct de , l (avec mou-vement), retr, en arrire
;
-
pl, par exemple , proprement, fais
entrer en ligne de compte (impratif de
ptre), hve, saint , proprement rjouis-toi (impratif de (h)vre ;l'pel v est qualifi de pdantesque parQuintilien, bistit. orat. I, 6, 21), mais
m,
-
56
groupes i + voyelle autre que i et u + voyelle autreque u. Toutefois, les groupes + et + , bienqu'appartenant la premire des deux catgories
que nous venons d'tablir, paraissent n'avoir jamaissubi de contraction.
Gela dit, passons en revue les exemples les plus
usuels et les plus typiques de ce processus,
+ = :nll, rien , de nl(h)Il.
m, dat. sing. de ego, moi , de mi(h)l.
+ = e :nmo, personne , de *n-[h)7no [hmo =
hmo est attest par Paul Diacre p. 71,18 Th.).
dmo, j'te, j'enlve , de *d->no.dgi, parfait de dgo (contract de *d-go,
voir ci-dessous), je passe le temps ,
de *d-gi.
a + = :lirma : 1 salle de bain , 2 latrines ,
de la (v) trna.
+ = :copia, abondance, ressources de * cpu
(comparez hi-pa, indigence ).cram adv. et ( partir de Gicron) prp., ei
prsence de , de * c-ram (le seconi
terme du compos se rattache ~s } ris,
-
57
figure, visage ;pour la dsinence,
comparez clam, en secret et plam,
ouvertement ).
+ = :junior comparatif de jvnis, jeune , de
* jnor (voir g 15, b). + a = :
d^o, je passe le temps , de * d-go.
-\- 1 = oe :
coetus, rencontre, union , de c ws.
+ & = :cmo, j'unis, j'arrange, je pare , de* c-
mo.
-\- = oe :
coepi, j'ai commenc , dec-pi (Voir 21).
-f- = :
cgo, je rassemble, je restreinsJe force ,de* c-ago.
cpla, union, lien , de * c + apla (presignifiait, en ancien latin, attacher
;
voir g 21).
Dans nombre de cas, l'analogie a rtabli la formenon contracte. Ainsi mihi a t rgulirement con-
tract en m, mais refait postrieurement, parce que
mh accusait plus nettement l'affinit avec tib
toi et sb soi qui taient toujours restsdissyllabiques,
PRCIS DE PHONTIQUE HISTORIQUE DU LATIN, 4
-
58 -
La mme observation s'applique dsse, man-quer ct de dsse, dmo, j'aime per-dment eu regard de dgo, je passe le temps .clesco, je m'uuis eu regard de cgo, je ras-semble etc. L'opposition du prsent cgo et duparfait cgi, dont le second a subi la recomposition
analogique, alors que le premier y a chapp, tient
peut-tre au fait que, dans cgo, la contraction
remonte une date fort ancienne, tandis que la
fusion de -f- en semble, au contraire, relati-
vement trs rcente, ce qui donnait ncessairement
plus de prise l'analogie sur le parfait que sur le
prsent. Ajoutons, cependant, que, en thse gn-rale, la chronologie des lois de la contraction latine
forme un chapitre bien obscur que, selon toute
vraisemblance, on ne parviendra jamais claircird'une faon satisfaisante.
Avec la contraction il ne faut point confondre la
synizse, c'est--dire la licence prosodique, parlaquelle deux voyelles contigus, toutes deux pro-
nonces, peuvent compter, dans la mesure du vers,
pour une seule syllabe ; comparez :
Virgile, Gorgiques IV, 34 :
seu lento fuerint alvearia vimine texta.
Virgile, Enide VII, 190 :aurea percussum virga versumque venenis
-
59 -
Ovide, Mtamorphoses IX, 143 :diffudit miseranda suom ; mox deinde quid
autem.'
Virgile, Enide I, 131 :Eurum ad se Zephyrumque vocat, dehinc
talia fatur
mais, par ex.,
Virgile, Gorgiques III, 167 :cervici subnecte ; dehnc, ubi libra colla
MOUVEMENT VOCALIQUE
33. En dehors des alternances vocaliquescomme fado : cnfco, sallo : exsulto, vlim : volo,Infrus : nfr, rs : rem etc, qui, ainsi que nousl'avons vu plus haut, ont leur origine dans l'volu-tion du latin mme et qui, par consquent, sontparticulires cette langue, il en existe d'autres
qui se retrouvent dans les langues congnres etqui remontent donc l'indo-europen. En effet,ds l'poque proethnique, chacun des trois lmentsconstitutifs du mot dfinis p. xn pouvait revtirdiffrents vocalismes pour indiquer diffrents typesde formation. Ce procd morphologique, dontl'application tait rgle, l'origine, avec une cons-
-
60
tance rigoureuse, a reu le nom de mouvementvocalique.Le mouvement vocalique est encore trs vivace
en grec. En latin, au contraire, il ne joue plus qu'unrle bien effac. A la suite de circonstances qu'il nenous appartient pas de rechercher ici, l'tat primitif
y a t si profondment altr que le systme
de ces alternances en est devenu mconnaissable.
Nous devons, partant, nous borner rmunration
pure et simple de quelques-uns des exemples les
plus caractristiques.
Exemples :
Le degr alterne avec le degr :
pndo, je pse : pondo indcl. , en poids,
pesant (abl. d'un substantif inusit *pon-
dus, -i).
tgo, je couvre : tga, couverture, vte-
ment, toge .
qa voc. : qu-s nom., cheval .
Le degr alterne avec le degr zro :
d-o, je mange : d-ns, dent (qui est
le participe prsent primitif de do).
s-t, il est : s-unt, ils sont .
gn-i parfait : gi-gn-o prsent, j'engendre,je produis .
Les trois degrs : : zro se trouvent runis :
Ancien latin fido (latin classique fido ;
-
- 61
voir 19), je me fie : ancien latin fidos
(l'abl. foidere se lit sur une inscription
archaque ; latin classique foedas), al-
liance, pacte : fds, foi, loyaut, cr-
dit
.
Le degr alterne avec le degr :
mi parfait : mo prsent, j'achte .tgla, tuile : tgo, je couvre .
Les degrs : : : zro se trouvent runisdans sdo, je suis assis , sds, sige , slum,
sige lev, trne (voir 37),stfo, je me perchesur , de *si-sd-o, formation comme gi-gn-o ci-
dessus (*sisdo > *sizdo > s?do d'aprs les 25,
1 et 86).
Le degr alterne avec l degr :
Ancien latin majsem (latin classique majo-rent) ace. sing. masc. et fm. du compa-
ratif de magnas, grand : majstas, grandeur, majest (le degr subsistedans le neutre majus, ancien *majs).
Ancien latin * hnsem (latin classique Jin-rem) ace. sing. de hnor, honneur :hnstas, a honorable, honnte .
Le degr alterne avec le degr :fdi parfait : fdo prsent, je creuse .
di parfait, je hais : ium, haine .Le degr alterne avec le degr zro :
-
- 62 -
n-pt-em, ace. sing. de neps, petit-fils,neveu : ne-pt-em, ace. sing. de neptis, petite-fille, nice .
gn-tr-em, ace. sing. de gntor, a cra-teur : gne-tr-cem, ace. sing. de gne-trix, celle qui produit, mre ,
Le degr alterne avec le degr a :fci parfait : fco prsent, a je fais .smen, semence, graine : stus ptc. parf.
passif, sem .Le degr alterne avec le degr :
cs, pierre aiguiser : etas, proprement aiguis , d'o fin, habile .
dnum, cadeau, prsent : dtus ptc. parf.passif, donn .
Remarque. Le balancement entre.les syllabes accen-tues et les syllabes non accentues a produit un jeu tout fait analogue d'alternances vocaliques dans la conjugai-son et la drivation franaises; comparez je viens : nousvenons, je dois : nous devons, je meurs : nous mourons etbuf : bouvier, main : menotte, pain : panier, meule : mutin,corbeille : corbillon, etc.
-
VOLUTION DES CONSONNES LATINES
CONSONNES SIMPLES
Occlusives
34. Places entre deux voyelles, les occlusiveslatines, en particulier les occlusives sourdes, ont
subi peu de changements. A noter les altrationssuivantes :
Sourdes.
35. Ds la fin du deuxime sicle av. J.-C,la mode se rpandit d'introduire l'aspiration desocclusives sourdes des trois ordres, rserve d'abord
aux mots emprunts du grec (voir S 6, remarque IV4) aussi dans un certain nombre de mots d'originelatine. La culture hellnique tant transplante
Rome et y faisant de plus en plus d'adeptes, cer-taines familles romaines trouvrent lgant de don-ner leurs noms un cachet grec en les affublant de
l'aspiration. Ainsi Sempronius changea son surnom
-
64
Oraccus, geai en Gracchus pour le faire rimeravec Bacchus -, sur des monnaies de l'an 103 av.J.-C. on trouve Pulcher; Cctgus
,Oto, Trus
devinrent Cthgus, Otho, Thorius. Del, cette pro-nonciation s'tendit aux noms communs. L'on se
prit dire anch'ra, ancre , lachruna, larme ,
pu cher, be&u. . spulchrwn , c tombeau, sitlphur,c soufre etc. au lieu de ancra, lacnnia, pulcer.
spulcnim, sulpirr. Nous possdons sur ce phno-mne plusieurs tmoignages trs instructifs d'au-teurs antiques, dont voici les deux principaux :Cicron. Orator 48.160 : quin ego ipse, cumscirem,ita majores locutos esse, ut nusquam nisi in vocaliaspiratione uterentur, loquebar sic, ut pulcros, Ce-
tegos, triianpos, Kartaginem dicerem. aliquandoidque sero convicio aurium eum extorta mihi veritas
esset, usum loquendi populo concessi , scien tiain mihi
reservavi. Orcivios tamen et Matones, Otones, Cae-
piones, sepulcra, coronas, lacrimas dicimus, quia
per aurium judicium licet. Quintilien, Instit. orat.I, 5, 20 : diu deinde servatum, ne consonantibus
[veteres] adspirarent, ut in Graccis et in triumpis.
erupit brevi tempore nimius usus, ut choronae,
chenturiones, praechones adhue quibusdam in ins-criptionibus maneant, qua de re Gatulli nobile epi-
gramma est. La pice de Catulle, laquelle Quinti-
lien fait allusion, est le carmen 84 qui dbute ainsi:
-
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chommoda dicebat si quaado commoda velletdicere et insidias Arrius hinsidias.
Les langues romanes ne portent pas la trace de
cette affectation ; il faut donc croire que la mode,
aprs avoir dgnr en manie, finit par tomber en
dsutude et se perdit compltement.Remarque importante : La valeur articulatoire de
ch, ph, th latins tait exactement celle de h, p, t
allemands devant voyelle. Il faut donc proscrire
rigoureusement des prononciations comme filtrum,
limfa, salfur.
Sonores.
g 36. b s'est chang en fricative offrant le sondu v franais dans des mots comme vin partir de
la seconde moiti du premier sicle ap. J.-C, d'abord
l'intrieur des mots entre deux voyelles, ensuite(mais dans une partie seulement de l'empire romain)aussi l'initiale. De l de nombreuses confusions,dans l'orthographe des inscriptions, avec v (c'est--
dire n consonne), devenu galement une fricativevers la mme poque (voir 52). Voici quelquestmoignages pigraphiques :
incomparavilis pour incornprblis, incom-parable .
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IWertavus pour Ubertbus, dat. plur. de
Uberta, affranchie .
vene pour bne, a bien .
et inversement
bni pour vni, parf. de vnre, je viens .
Jb/.ri pour W.ri, parf. de vivo, je vis .
lebare pour lvre, allger, dlivrer .
Cette confusion s'accentua de plus en plus, tel
point qu'au cinquime sicle de notre re un gram-mairien en fit l'objet d'un trait spcial intitul De
b vocali et v vocali. Elle se reflte aussi dans les
langues romanes ; comparez :
franais Besanon du latin Vesunfinem.fr. devoir du lat. debre.fr. fve du lat. fba.
37. da t remplac par 1 dans
.
lat. archaque dacrma, c larme > lat. classique
lacrma (comparez Paul Diacre p. 48, 15 Th. :dacrimas pro lacrimas Livius [Andronicus]saepe posuit).
lat. arch. dautla. -.rum. a hospitalit qu'on
accordait aux ambassadeurs et qui consistait
dans la table, le bain et autres choses nces-
saires au confort y lat. clas. lauta (compa-rez Paul Diacre p. 48, 16 Th. : dautia [Livius
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(Andronicus) saepe posuit] quae lauta dici-
mus, et dantur legatis hospitii causa ; lauta
p. ex. chez Tite-Live XXX, 17, 14).lat. arcb. dingua, langue > lat. class. lingaa
(comparez Marins Victorinus vi p. 9, 17 K :nos nunc... linguam per l potius quam perd [scribamus]).
Parfois d et l alternent dans des formes apparte-
nant la mme racine, p. ex :dor, odeur : lre, rpandre une odeur,
sentir .
sdo, je suis assis : slum, sige (pour
l'alternance vocalique, voir 33).
Les conditions dans lesquelles cette altration
du d s'est opre ne sont encore que trs insuffi-
samment connues. La transformation de dingua en
lingua est peut-tre due l'tymologie populaire,
le peuple, pour qui l'origine de dingua tait obs-
cure, ayant voulu donner un sens ce mot en le
rapprochant de lingre lcher . On a aussi song une influence des patois ruraux des environs de
Rome sur le parler des habitants de la capitale, maiscette hypothse mrite contirmation.
38. d final a persist aprs voyelle brve,mais est tomb aprs voyelle longue ds le dbutdu deuxime sicle av. J.-G.
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Exemples :4 ad prp., a vers et auprs de .
ld, neutre de lius, autre .
illd, neutre de Mie, celui-l .
sd conj., mais .
2*Les ablatifs du singulier des cinq dclinai-
sons, la deuxime personne du singulier etla troisime personne du singulier et dupluriel de l'impratif futur des verbes :
a) praed, abl. sing. depraeda, proie, butin ,anciennement praidd.
mrita adv., c bon droit , abl. sing. demrtum, mrite , anciennement mr-td.
aer (remplac de bonce heure par are quiest un ancien locatif, comme tous les abla-
tifs en -e de la troisime dclinaison), abl.
sing. de aes, airain, cuivre , ancien-
nement airld.
mgistrt, abl. sing. de mgisirlus, ma-
gistrature, magistrat , anciennement
mgistrid.
d, abl. siog. de aies, jour, anciennement* did.
praidd, meritd, airld, magislrald sont attests
par des inscriptions archaques ; pour la cinquime
dclinaison, les tmoignages pigraphiques man-
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quent. Comparez encore Nvius, Bellum Punicum7 M. :
Noctu Troid exibant capitibus opertis.
b) data, deuxime et troisime personne sing.de l'impratif futur de dre, donner ,
procdant de dtd.
sunt, troisime personne plur. de l'impratif
futur de esse, tre , procdant de sun-
td.
datd et suntd sont attests pigraphique-
ment.
La ngation haad a conserv le d, bien que ladiphtongue au, dont il tait prcd, quivalt,
comme dure, une voyelle longue, parce qu'elle
tait proclitique, c'est--dire qu'elle faisait corps
avec le mot suivant et que, ds lors, son d n'tait
pas en position finale.
g, g v -
39. La gutturale sonore pure grn'a pas subi
d'altrations. Par contre, la gutturale sonore labia-
lise que nous transcrivons par g et que l'ortho-graphe latine figurait par gu se trouvait remplacepar v, partout o elle tait place entre deuxvoyelles.
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Exemples :
nvis, gn. de nix (qui remonte une forme
primitive * nig v s ; voir 82), neige *,
en regard de ninguit, c il neige .
strvo, crit struo en vertu du % 47, prsent
j'entasse, j'lve, je construis , ct
destruction supin, issu de *stru&*tum
d'aprs 82.
Remarque importante : Se garder de prendre gv
et de mme q v , crits gu et qu dans l'orthographed'usage, pour des groupes de consonnes. C'taient
non des combinaisons d'une occlusive gutturale
avec la semi-voyelle v, mais des occlusives guttu-
rales avec un appendice labial, articul beaucoup
plus faiblement que la semi-voyelle v.
Aussi qu ne suffit-il pas, lui seul, pour allonger
une syllabe < par position (voir, sur ce terme,
g 95), comme ce serait le cas, s'il s'agissaitd'une
union de deux consonnes distinctes; comparez
Virgile, Enide, II 15 :
instar montis equom divina Palladis arte
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Fricatives
40. f n'tait pas tolr l'intrieur des mots,
le latin rpondant par b ou d 1Y mdian des autresdialectes italiques. Toutefois, les exemples, o f setrouve dans cette position ne manquent pas; com-
parez p. ex. :
ffelli, parfait de fallo, je fais trbucher, je
trompe .
dfro, je transporte n bas, je dfre, je
dnonce .rfco, je refais, je rtablis .
rfus, roux, rouge .
scrfa, truie .
vfer, fin, rus .
L'explication de ces exceptions est aise. Dans le
cas de ffelli, dfero, rfcw, il s'agit de recompo-
sitions analogiques et rfus, scrfa, vfer sont des
emprunts dialectaux ayant obtenu droit de cit dans
le latin de Rome. Quant aux mots de cette secondecatgorie, attendu que c'est surtout le latin vulgaire
qui a subi l'empreinte des patois voisins, nous les
rencontrons souvent dans le parler populaire, l ola langue littraire a conserv la forme vraimentlatine. Ainsi, il rsulte d'un passage de Nonius
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Marcellus que les Romains cultivs (lisaient sbtrea siffler , le peuple sflre (Nonius p. 531,2 M. :sifilare quod nos, vijitatem verbi vitalits, sibilaredicimus), et c'est sur cette dernire forme que repose
le fr. siffler. De mme, les auteurs latins appellent latruffe tber, mais les langues romanes, comme enfait foi le franais truffe, supposent un doublet
vulgaire * ifer.
41. La fricative dentale sourde s est demeureintacte l'initiale. Par contre, elle est devenue
sonore et s'est change ensuite en r l'intrieurdes mots entre deux voyelles. Les exemples de ce
processus, qu'on dsigne communment sous lenom de rhotacisme (driv de rh, nom grec duson et de la lettre r), sont trs nombreux. En voici
quelques-uns :
aeris. gn. de aes, airain, cuivre .
jris, gn. dejs, droit .pris, gn. de pus, travail, uvre .
ferme fm. plur., jours consacrs au repos,ftes , en regard de festas adj., consa-
cr aux ftes, solennel .
hri adv., hier , en regard de hesternus
adj., d'hier .
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haurlo, je puise , en regard da supinhanstum.
queror prsent, je me plains , en regard
de questus sum parfait.
cirmo, je spare , de * disrno.
rt, il sera , en regard de est, il est .
mre, a aimer , dlre, dtruire , lgre, lire , aud're, entendre , en regard
de esse, tre
.
Comparez encore Yarron, De lingua latina VII,
26 : in multis verbis, in quo antiqui dicebant s,
postea dicunt r... foedesum foederum, plusimaplurirna, meliosem meUorem, asenam arenam
;
Quintilien, Tnstit. oral. I, 4, 43 : nam ut Valesii
Fu