brochard la theorie platonicienne de la participation d apres le parmenide et le sophiste pdf

18
Pillon. –Annfc philos. 1907. 1 L'ANNÉE PHILOSOPHIQUE 1907 LA THÉORIE PLATONICIENNE nE LA PARTICIPATION D'APRÈS LE PARMENIDE ET LE SOPHISTE La théorie de la participation est, comme celle de la démons- tration de l'existence des idées, et autant qu'elle, la partie essentieUe du système de Platon car à quoi serviraient les idées si elles neparticipaientles unes auxautres, si on ne pou-- vait les unir dans une proposition? Mais dire que les idées participent les unes aux autres, les rapprocher dans une affir- mation, n'est-ce pas les identifier au moins partiellement, ire que chacune d'elles est autre qu'elle-même, ou, comme on disait au tempsde Platon, affirmer l'existence du non-être? La difficulté, d'ailleurs, n'est pas particulière au platonisme; elle est commune à toutes les doctrines. Iln'y a pas lieu de reve- nir sur le chapitre définitif Gomperz a magistralement dé- montré qu'eu s'attaquant à ce problème, c'est la question même de l'attribution ou de l'affirmation, négativement résolue par plusieurs écoles contemporaines, que Platon ten- tait d'élucider. Tout au plus est-il utile de rappeler la forme particulière que revêtait le problème aux yeux de notre philo- sophe il s'agit de savoir si l'erreur est possible, si on peut dire qu'il existe des sophistes et si on a le droit de les con- damner c'est l'existence même de l'erreur, et par suite celle de la vérité, qui est en cause. Or on sait qu'au temps de Platon plusieurs écoles s'accordaient, pour des raisons qui ne sont point méprisables, à nier qu'il fût possible à l'homme de se tromper. Comment y aurait-il des erreurs si, comme le disaient l'année philosophique. 190i Protagoras et ses disciples, la sensation était la source et la mesure de la vérité, si la science ue différait pas de la sensa- tion ? D'autre part, les rigoureux logiciens de l'école d'Elée et les Cyniques déclaraient qu'il est impossible de dire autre chose que ce qui est, car ce serait affirmer le non-être, dont une maxime célèbre de Parmênide interdisait de parler jamais. On allait même plus loin, et Antistlièue soutenait qu'on ne peut affirmer uu attribut d'un sujet, dire, par exemple, que l'homme est bon, car l'homme et la bonté sont deux eboses distinctes qu'on n'a pas le droit de confondre sans doute, le sens commun ne s'embarrassait pas de toutes ces difficultés eton continuait à affirmer les adjectifs des substantifs, à dire -qu'il y a des sophistes artisans de mensonge et de fourberie. Mais la philosophie naissante aurait manqué à uu de ses devoirs essentiels si elle ne s'était pas appliquée à porter la lumière sur tous ces problèmes, à réconcilier le sens commun et la raison, à justifier en droit ce que tout le monde admet- tait en fait. Telle est précisément la tache que s'est donnée Platon en traitant le problème de la participation. Il l'a si bien remplie qu'après lui la difficulté a été généralement considé- rée comme résolue l'ombre s'est dissipée, les subtilités des écoles rivales ont été prises pour ce qu'elles étaient, de simples chicanes, et au moins pour un temps assez long on n'a plus mis eu doute la diflérence de lavéritéet del'crrcur. C'est dans le Parmênide et dans le Sophiste que Platon a exposé ses vues sur un problème si important. t. 1 Nous ne nous proposons ici, ni de revenir sur l'authenticité du Parmênide après tant de discussions, nous la tenons pour acquise, -ni dedéterminer l'époque probableoùcedia- logue a été écrit avec beaucoup d'historiens contemporains, nous le considérons comme apparteuaut à la dernière période de la vie de Platon, et nous le situons soit avant, soit après le Tkiitete, en tout cas avant le Sophiste, le Politique, le Phi- Lèbe, le Timée et les Loin. Nous n'avons même pas l'intention d'analyser eu détail, une fois de plus, le Parmênide, encore moins de discuter les innombrables interprétations dont ce dialogue a été l'objet Toutefois il sera nécessaire d'en résu-

Upload: va-lula

Post on 22-Oct-2015

30 views

Category:

Documents


2 download

DESCRIPTION

philosophy, epistemology. on the late

TRANSCRIPT

Pillon.–Annfcphilos.1907.

1

L'ANNÉE

PHILOSOPHIQUE

1907

LA

THÉORIE

PLATONICIENNE

nELA

PARTICIPATION

D'APRÈS

LE

PARMENIDE

ET

LE

SOPHISTE

Lathéorie

delaparticipation

est,

comme

celle

dela

démons-

tration

del'existence

des

idées,

etautant

qu'elle,

lapartie

essentieUe

dusystème

dePlaton

car

àquoi

serviraient

les

idées

sielles

neparticipaientles

unes

auxautres,

sion

nepou--

vait

les

unir

dans

une

proposition?

Mais

dire

que

les

idées

participent

lesunes

aux

autres,

lesrapprocher

dans

une

affir-

mation,

n'est-ce

pas

les

identifier

aumoins

partiellement,

ire

que

chacune

d'elles

est

autre

qu'elle-même,

ou,

comme

ondisait

autempsde

Platon,

affirmer

l'existence

dunon-être?

La

difficulté,

d'ailleurs,

n'est

pas

particulière

auplatonisme;

elle

estcommune

àtoutes

les

doctrines.

Iln'y

apaslieu

dereve-

nir

sur

lechapitre

définitif

oùGomperz

amagistralement

dé-

montré

qu'eu

s'attaquant

àce

problème,

c'est

laquestion

même

del'attribution

oude

l'affirmation,

négativement

résolue

par

plusieurs

écoles

contemporaines,

que

Platon

ten-

tait

d'élucider.

Tout

auplus

est-il

utile

derappeler

laforme

particulière

que

revêtait

leproblème

aux

yeux

denotre

philo-

sophe

ils'agit

desavoir

sil'erreur

est

possible,

sion

peut

dire

qu'il

existe

des

sophistes

etsi

onale

droit

delescon-

damner

c'est

l'existence

même

del'erreur,

etpar

suite

celle

dela

vérité,

qui

esten

cause.

Oron

sait

qu'au

temps

dePlaton

plusieurs

écoles

s'accordaient,

pour

des

raisons

qui

nesont

point

méprisables,

ànier

qu'il

fûtpossible

àl'homme

dese

tromper.

Comment

yaurait-il

deserreurs

si,

comme

ledisaient

l'année

philosophique.

190i

Protagoras

etsesdisciples,

lasensation

était

lasource

etla

mesure

dela

vérité,

sila

science

uedifférait

pas

dela

sensa-

tion

?D'autre

part,

lesrigoureux

logiciens

del'école

d'Elée

et

les

Cyniques

déclaraient

qu'il

est

impossible

dedire

autre

chose

que

cequi

est,

carce

serait

affirmer

lenon-être,

dont

une

maxime

célèbre

deParmênide

interdisait

deparler

jamais.

Onallait

même

plus

loin,

etAntistlièue

soutenait

qu'on

ne

peut

affirmer

uuattribut

d'un

sujet,

dire,

par

exemple,

que

l'homme

est

bon,

car

l'homme

etla

bonté

sont

deux

eboses

distinctes

qu'on

n'a

pas

ledroit

deconfondre

sans

doute,

le

sens

commun

nes'embarrassait

pas

detoutes

ces

difficultés

eton

continuait

àaffirmer

lesadjectifs

des

substantifs,

àdire

-qu'il

yades

sophistes

artisans

demensonge

etde

fourberie.

Mais

laphilosophie

naissante

aurait

manqué

àuu

deses

devoirs

essentiels

sielle

nes'était

pas

appliquée

àporter

la

lumière

sur

tous

cesproblèmes,

àréconcilier

lesens

commun

etla

raison,

àjustifier

endroit

ceque

tout

lemonde

admet-

tait

enfait.

Telle

estprécisément

latache

que

s'est

donnée

Platon

entraitant

leproblème

delaparticipation.

Ill'a

sibien

remplie

qu'après

luila

difficulté

aétégénéralement

considé-

réecomme

résolue

l'ombre

s'est

dissipée,

les

subtilités

des

écoles

rivales

ont

été

prises

pour

cequ'elles

étaient,

de

simples

chicanes,

etau

moins

pour

untemps

assez

long

onn'a

plus

mis

eudoute

ladiflérence

delavéritéet

del'crrcur.

C'est

dans

leParmênide

etdans

leSophiste

que

Platon

aexposé

ses

vues

sur

unproblème

siimportant.

t.

1

Nous

nenous

proposons

ici,

nide

revenir

sur

l'authenticité

duParmênide

après

tant

dediscussions,

nous

latenons

pour

acquise,

-ni

dedéterminer

l'époque

probableoùcedia-

logue

aété

écrit

avec

beaucoup

d'historiens

contemporains,

nous

leconsidérons

comme

apparteuaut

àla

dernière

période

dela

vie

dePlaton,

etnous

lesituons

soit

avant,

soit

après

le

Tkiitete,

entout

cas

avant

leSophiste,

lePolitique,

lePhi-

Lèbe,

leTimée

etlesLoin.

Nous

n'avons

même

pas

l'intention

d'analyser

eudétail,

une

fois

deplus,

leParmênide,

encore

moins

dediscuter

les

innombrables

interprétations

dont

ce

dialogue

aété

l'objet

Toutefois

ilsera

nécessaire

d'en

résu-

LA

THÉORIE

PLATONICIENNE

DE

LA

PARTICIPAT

10

mer

brièvement

quelques

parties

afiu

dedéterminer

quel

est,

selon

nous,

lesens

etquelle

est

laportée

del'ouvrage.

Nous

voudrions

montrer

comment

leParménide

prépare

l'établis-

sement

définitif

dela

théorie

dela

participation

etcomment

ilse

complète

par

leSophiste,

oùse

trouve

lasolution

de

toutes

lesdifficultés

qu'il

soulève-

Gomperz,

dans

lesubstantiel

chapitre

qu'il

aconsacré

au

Parménide,

laissant

decôté

lesinterprétations

plus

aumoins

ambitieuses

oùse

sont

complus,

àla

suite

et,àl'exemple

des

Alexandrins,

beaucoup

d'historiens

modernes,

secontented'y

voir

unsimplejeu

dialectique.

La

raisou

qu'il

invoque

est

que

ladernière

partie

dudialogue,

laplus

importante

àcoup

sûr

etla

plus

difficile

àinterpréter,

nous

estexpressément

donnée

par

leprincipal

interlocuteur

comme

unexercice

dialectique

destiné

uniquement

àpréparer

lejeune

Socrate

àapprofon-

dir

cesdifficiles

problèmes,

etqui

n'engage

enaucune

façon

lapensée

del'auteur

dudialogue

puisqu'il

n'aboutit

àaucune

conclusion.

Cette

opinion

deGomperz

nous

paraît

incontes-

table

etréalise

ànos

yeux

ungrand

progrès

sur

toutes

les

interprétations

antérieures.

Ajoutons

que

non

seulement

le

Parménide

estun

exercice

dialectique,

mais

qu'il

est

appelé

par

Parménide

lui-même,

dans

unpassage

auquel

les

critiques

antérieurs

n'ont

peut-être

pas

attaché

une

assez

grande

im-

portance

unjeu

laborieux

etpénible

».Parmén,

137

B

7:p~y:er.wolj

1"t8'.iv

Nous

voudrions

seulement

serrer

laquestion

d'uu

peu

plus

près

etessayer

dedémêler

enquoi

consiste

précisément

ce

jeu

sicompliqué

etdans

quelle

intention

ouavec

quelle

arrière-pensée

Platon

apris

plaisir

àle

jouer.

Le

début

de

l'ouvrage

nous

paraît

offrir

àce

point

devue

une

indication

précieuse

Cen'est

sans

doute

passans

intention

que

Platon,

dans

une

sorte

deprélude,

met

enscène

Zenon

d'Elée

enmême

temps

que

Parménide

les

célèbres

arguments

dece

philosophe

contre

lemouvement

sont

aussi

unjeu,

mais

deson

propre

aveu,

c'est

unjeu

sérieux

qui

apour

objet

dedéfendre

les

thèses

deParménide

etde

confondre

lesadversaires

del'Eléa-

tisme

eulesforçant

d'aboutir

àdes

conséquences

encore

plus

absurdes

que

celles

qu'ils

reprochaient

àla

doctrine

duMaître.

Cette

déclaration

duvieux

philosophe,

placée

entête

dudia-

logue,

nenous

autorise-t-elle

pas

àcroire

que

Platon

va,

lui

aussi,

employer

une

méthode

analogue,

aumoins

dans

uue

partie

deson

ouvrage

etréfuter

par

l'absurde

quelques-uns

de

i.'anmïe

philosophique.

1907

sesadversaires

ilrestera

seulement

àchercher

quels

sont

cesadversaires

etquelle

estexactement

lathèse

qu'il

prétend

combattre.

Ilestvrai

que

Zenon

ajoute

que

cen'est

pas

seule-

ment

dans

l'intérêt

dela

vérité

etpar

amitié

pour

son

maître

qu'il

ilentrepris

cette

discusiou,

c'est

aussi

par

amour

dela

dispute,

ç'AovsixiGt,

128D.

Mais

rien

n'empêche

desupposer

que

par

Ces

paroles,

Platon

nous

avertit

délicatement

qu'en

écrivant

son

dialogue,

iln'est

pas

dupe

desespropres

argu-

ments

etqu'il

acédé

àun

penchant

tout

semblable

Ilavait

affaire

aux

disputeurs

lesplus

subtils,

auxdialecticiens

lesplus

retorsqu'on

aitpeut

être

jamais

vus;

pourquoi

n'aurait-il

pas

voulu

prouver

qu'il

était

detaille

àse

mesurer

avec

eux

et

mômeà

les

surpasser

envirtuositéeteiisubtilité?Noussavons

par

ailleurs

que

Platon

neselaisaitpas

scrupule

deretourner

contre

sesadversaires

leurs

propres

arguments

etde

lescom-

battre

avec

leurs

armes:

déjà,

dans

l'Euthydéme,

ilmet

enscène

des

disputeurs

qui

secondamnent

eux

mêmes

par

l'absurdité

deleurs

affirmations,

Sans

aucun

doute,

c'est

àdes

adver-

saires

plus

sérieux

qu'il

s'attaque

dans

leParménide,

mais

peut-être

est-ce

aufond

lemême

principe

etla

même

doctrine

essentielleque,

sous

des

formes

très

diflérentes,

mais

toujours

par

des

moyens

dialectiques,

ilprend

àpartie

dans

lenou-

veau

dialogue.

LeParménide

secompose

dedeux

parties

très

distinctes.

Dans

lapremière,

Platon

accumule

contre

sapropre

doctrine,

lathéorie

des

Idées,

les

plus

fortes

objections

qu'on

lui

ait

jamais

opposées

laseconde

estprésentée

comme

unexercice

logique

purement

formel,

pédagogique

oupropédeutique,

qui,

àpremière

vue,

neprésente

aucun

rapport

avec

lapremière

ouqui

dumoins

s'y

rattache

par

unlieu

assez

frêle.

Nous

essaierons

demontrer

plus

loin

que

cette

dissymétrie

oucette

irrégularité

decomposition

n'est

qu'apparente.

La

seconde

partie

duParménide

n'est

pas

seulement

unjeu

scolaire,

ou

dumoins,

enmême

temps

qu'il

joue

cejeu,

enmême

temps

qu'il

donne

uuexemple

remarquable

dela

méthode

dialec-

tique

ouhypothétique

qui

doit

préparer

ladécouverte

dela

vérité,

levieux

Parménide,

sans

avoir

l'air,

obéit

àune

peu-

sée

uuique

etpoursuit

unbut

qu'il

nedécouvre

pas,

mais

qu'il

neperd

pas

uninstant

devue.

Aufond,

toute

cette

partie

dialectique

estune

nouvelle

objection

contre

lathéorie

des

Idées,

laplus

formidable

detoutes,

qui

s'ajoute

àtoutes

les

précédentes

etles

complète.

Ainsi

qu'il

l'adéjà

fait

toutà

l'heure,

LATHÉORIE

PLATONICIENNE

DE

LaPARTICIPATION

lesubt.il

Eléate

sejoue

élégamment

del'inexpérience

dujeune

Socrate

qui

croit

s'être

écarté,

jusqu'à

laperdre

devue,

de

laquestion

précédemment

posée

etne

sedoute

pas

qu'il

s'agit

toujours

dumême

problème

ladiscussiou

reste

toujours

au

cœur

dumêmesujet.

Non

moins

abusé

que

Socrate,

lelecteur

qui

suit

d'un

œil

curieux,

amusé,

oupeut-être

uupeu

irrité,

les

ripostes

etles

feintes

decette

prestigieuse

escrime,

nes'a-

perçoit

pas

que

l'agile

dialecticien,

eumême

temps

qu'il

dis-

trait

son

attention,

pose

unnouveau

problème

d'une

impor-

tance

capitale,

enprépare

lasolution,

ladonne

déjà

plus

qu'à

moitié

sans

que

personne

yprenne

garde.

Platon

s'arrête

àtemps,

ilne

laisse

pas

échapper

son

secret,

non

seu-

lement

ilne

donne

pas

encore

lemot

del'énigme,

mais

ilne

laformule

même

pas

d'une

manière

claire.

Illui

aplu

de

l'envelopper

deténèbres,

soit

qu'il

nejugeât

pas

l'heure

venue

derévéler

toute

sapensée

surune

des

questions

quiluitenaient

leplus

àcœur,

soit

que

cette

pensée

nefût

pas

encore

entiè-

rement

déterminée

dans

son

esprit,

soit

enfin,

etcette

hypo-

thèse

n'est

pas

lamoins

vraisemblable,

qu'il

prit

plaisir

àem-

barraser

des

adversaires

comme

Zenon

dont

ilaeu

soin

de

rappeler

lesouvenir.

11n'est

pas

ici,

comme

d'ordinaire,

ins-

piré

par

leseul

amour

dela

vérité:

ilcède

àl'amour

dela

dispute

etil

neluidéplaît

pas

defaire

admirer

son

adresse

et

saforce.

Peut-être

aussi

savait-il

qu'on

stimule

lacuriosité

d'un

auditeur

oud'un

lecteur

àla

laisser

plus

longtemps

eu

suspens:

lemot

d'une

énigme,

lorsqu'il

aété

vainement

cher-

ché,

oula

solution

d'un

problème,

lorsqu'on

afait

delongs

et

inutiles

efforts

pour

latrouver,

s'impose

bien

plusfortement

à

tous

les

esprits

ceux

qui

n'ont

pas

surésoudre

ladifficulté

sont

aussi

moins

prompts

aux

objections.

Ansurplus,

nous

n'avons

pas

iciàjustifier

Platon

ouàplaider

sacause.

Après

tout,

leprocédé

quiconsiste

àprésenter

tout

d'abord,

fut-ce

en

lesdramatisant

unpeu,

toutes

les

difficultés

d'une

question

qu'on

seréserve

derésoudre

bientôt

n'a

rien

d'il

légitime.

C'est

laméthode

qu'Aristote

emploiera

constamment,

etc'est

peut-

être

lameilleure.

Mais,

avant

d'entrer

dans

l'examen

decette

seconde

partie

duParméuide,

ilnous

faut

rappeler

brièvement

lesprincipales

objections

présentées

dans

lapremière.

On

verra

eneffet

que

lasolution

detoutes

ces

difficultés

donnée

par

Platon

dans

le

Sophiste

estimpliquée

dans

celle

dela

dernière

objection

et

nepeut

secomprendre

sans

elle.

l'a.VNÉi;

PHILÛsOPHIQIE.

1907

Ilestàremarquer

d'abord

que

tous

les

interlocuteurs

du

dialogue

admettent

d'un

commun

accord

lathéorie

des

Idées

etcelle

dela

participation

dumonde

sensible

aux

idées

intel-

ligibles

mais

ces

deux

théories

sont

l'objet

dans

lapremière

partie

dudialogue

dedifficultés

graves

qu'on

peut

ramener

àcinq

principales

1°Socrate

admet

sans

contestation

que

leschoses

sensibles

qui

participent

aux

idées

sont

àla

fois

semblables

etdissem-

blables

entre

elles,

unes

etmultiples.

Socrate

estmulliplepuis-

qu'ou

peut

distinguer

enluile

gauche

etle

droit,

l'avant

et

l'arrière,

lehaut

etle

bas

enmême

temps

ilestun,

puisque

entre

sept

hommes

ilest

unindividu

distinct

detous

les

autres

iln'y

apas

làde

quoi

s'étonner.

Mais

cequi

lui

paraît

prodigieux,

c'est

que

lemême

rapport

reste

entre

les

idees

elles

mêmes,

que

laRessemblance

ensoiparticipe

àla

Dissemblance

ensoi,

l'Unité

eusoi

àla

Pluralité

ensoi.

Voilà

cequ'il

demande

àParménide

deluiexpliquer

(129

A-

130

A.)

Siquelqu'un

commençait

par

distinguer

etséparer

lesidées

absolues

dont

jeviens

deparler,

tellesquela

ressem-

blance

etla

dissemblauce,

l'unité

etla

pluralité,

lerepos

et

lemouvement,

ettoutes

les

autres

idées

pareilles,

etqu'ensmte

ildémontrât

qu'elles

peuvent

être

mêlées

les

unes

avec

les

autres

etséparées

lesunes

desautres,

jeserais

frappé

détonue-

ment.

»Zéuou

etParménide

approuvent

eusouriant

etlouent

lasagesse

deSocrate

telle

estla

première

difficulté

signalée

avec

insistance

parSocrate,

nous

pouvons

nous

attendre

àce

qu'il

soit

question

dans

lasuite

dela

participation

des

idées

entre

elles,

etnous

verrons

que

c'est

laquestion

essentielle

posée

parlel'arminiie

etle

Sophiste.

2°Qu'il

yaitdes

idées

séparées

dumonde

sensible,

telles

que

lejuste,

lebeau,

etle

bon,

c'est

ceque

Socrate

accorde

sans

difficulté

àParménide,

mais

quand

celui-ci

luidemande

s'il

yaaussi

des

idées

des

choses

sensibles

telles

que

l'homme,

l'eau

etle

feu,

Socrate

hésite

etilhésite

encore

bien

davan-

tage

quand

ils'agit

desavoir

s'il

yades

idées

ensoi

des

choses

lesplus

viles,

telles

que

poil,

boue,

ordure.

Par

pru-

dence

ilpréfère

détourner

son

attention

deces

questions

et

s'en

tenir

àl'affirmation

des

premières

idées

(130

C)Notons

cependant

qu'il

adéjà

une

tendance

àadmettre

des

idées

de

toute

chose,

etParménide

luiprédit

que,

quand

ilsera

plus

avancé

enâgeet

que

laphilosophie

sesera

tout

fait

emparée

delui,

ceshésitations

disparaîtront.

LA

ÎHÉURIE

PLATOMCIEN^E

DEIA

PUtTICIPATlON

3'Les

choses

quiparticipent

aux

idées

participent-elles

aux

idées

tout

entières

ouseulement

àune

partie?

Siles

choses

participent

àla

totalité

del'idée,

l'idée

étant

tout

entière

en

elle

etdans

les

choses

etséparée

d'elle-même

devient

multi-

ple?On

nepeut

pas

dire

avec

Socrate

qu'il

euest

del'idée

comme

dela

lumière

dujour

qui

éclaire

toutes

choses

sans

cesser

d'être

une

Parménide

répond

tout

aussitôt

par

un

exemple

tout

contraire

celui

d'un

voile

qui

couvre

enmême

temps

plusieurs

hommes

etqui,

évidemment,

n'est

sur

cha-

cun

deces

hommes

que

par

une

deses

parties.

Dira

t-on

que

les

choses

participent

àune

même

partie?

Ilfaudra

accorder

alors

que

les

choses

deviennent

grandes

par

une

partie

dela

grandeur,

égales

par

une

partie

seulement

del'égalité,

petites

par

une

parlie

dela

petitesse,

qui

alors

deviendra

grande

par

rapport

àsa

partie

tandis

que

lachose

deviendra

petite

par

cela

seul

qu'on

lui

aura

ajouté

quelque

chose.

En

outre

sic'est

parce

qu'on

aperçoit

dans

ungrand

nombre

dechoses

un

même

caractère,

par

exemple

lagrandeur,

qu'on

admet

l'exis-

tence

d'une

idée

dela

grandeur,

nefaudra-t-il

pas,

puisqu'en

tre

les

diverses

grandeurs

ohservécs

etl'idée

dela

grandeur

ilyaencore

uucaractère

commun,

reconnaître

une

seconde

idée

dela

grandeur

àlaquelle

participent

toutes

les

autres,

puis

une

troisième

etainsi

àl'infini

11yaura

ainsi

nonpas

une

grandeur

unique,

mais

une

infinité

degrandeurs.

11ne

sert

àrien

de

répondre

comme

lefait

Socrate

que

l'idêe

pourrait

bien

être

simplement

une

pensée

del'âme,

carcette

pensée

estla

pensée

dequelque

chose,

dequelque

chose

qui

est

partout

ettou-

jours

lemême

etpar

conséquent

une

idée

déplus

,ilfaudrait

alors

que

touteequi

existe

étant

une

pensée

{ut

douéde

pensée

(131A

132

Ddeux

conséquences

également

absurdes.

4°Considérons

maintenant

laparticipation

sous

unautre

aspect.

Concevons

lacomme

une

ressemblance;

les

idées

seront

alors

des

modèles

etles

choses

sensibles

des

copies

mais

siles

copies

sont

semblables

aumodèle,

ilfaudra

ad-

mettre

une

seconde

idée

àlaquelle

participent

les

unes

etles

autres

etqui

sera

leur

modèle

commun,

puis

une

troisième,

etainsi

à1'innni

(132

D)C'estdéjà,

très

nettement

formulée,

la

célèbre

objection

dutroisième

homme

qu'Aristote

repreu-

dra. 5°

Voici

une

difficulté

encore

plus

grave

les

idées

telles

qu'on

vient

deles

définir

nesauraient

être

l'objet

dela

con-

naissance

humaine.

En

effet

les

idées

nesont

pas

ennous

l'année

PHILOSOPHIQUE.

1907

puisqu'elles

sout

ensoi.

Celles

des

idées

qui

sont

cequ'elles

sont

par

leurs

rapports

réciproques

ont

une

essence

relative

entre

elles

etnon

aux

choses

qui

setrouvent

ennous;

de

même

les

choses

qui

sont

ennous

etqui

tirent

leur

nom

deces

idées

sontà

leur

tour

eurapport

entre

elles

etnon

avec

lesidées.

Par

exemple,

unhomme

estesclave

d'uu

maitrc

qui

est

unhomme

etnon

pas

dumaitre

ensoi,

etun

maître

qui

estun

homme

commande

non

àl'esclave

ensoi,

mais

àun

homme.

Lepouvoir

ensoin'est

cequ'il

estqu'à

l'égard

del'esclavage

ensoi,

etl'esclavage

ensoin'existe

qu'à

l'égard

dupouvoir

ensoi.

Ilen

estde

même

delascience

lascience

ensoi

nepeut

avoir

pour

objet

que

les

êtres

ensoi

demême

lascience

humaine

nepeut

saisir

que

des

vérités

quisont

ennous.

Ilest

donc

detoute

impossibilité

que

lapen-

sée

humaine

atteigne

jamais

aucune

chose

ensoi

nous

ne

pouvons

connailre

nile

beau,

nila

justice,

niaucune

idée.

Delà

résulte

une

conséquence

encore

plus

grave

Dieu

oules

dieux

pourront

bien

connaître

ensoi,

mais

non

pas

l'homme

oules

choses

humaines

nileur

pouvoir

nes'exercera

sur

nous,

nileur

science

nenous

connaîtra.

Demême

l'homme

ne

pourra

pas

connaître

lesdieux

(133-135

A)

ilparait

impos-

sible

àSocrate

dene

pas

reculer

devant

l'impiété

d'une

telle

assertion.

Remarquons

qu'en

commençant

(133

13)

eten

finissant

(13o

A)l'exposé

decette

dernière

objection,

Platon

asoin

d'indiquer

qu'il

nelaconsidère

pas

comme

insoluble

pour

des

esprits

très

heureusement

doués

etprofondément

versés

dans

une

science

presque

divine,

àlaquelle

ilfait

une

allusiou

assez

mystérieuse

IIajoute

d'ailleurs

qu'on

pourrait

soulever

contre

laparticipation

eucore

beaucoup

d'autres

difficultés,

mais

il

s'en

tieut

àcelles

qui

viennent

d'être

indiquées.

Arrivons

àla

seconde

partie

dudialogue.

Au

lieu

deconti-

nuer

àénumérer

des

objections

contre

lathéorie

des

idées,

Parménide,

par

unbrusque

détour,

indique

àSocrate

une

méthode

dont

l'usage

l'aménera

àrésoudre

toutes

les

difficul-

tés.

Car

ilest

àremarquer

que,

pas

uuinstant,

dans

tout

l'ouvrage

lesobjections

nesont

considérées

commeinsolubles

mais

bien

aucontraire,

ainsi

que

nous

avons

eusoin

dele

noter

dans

l'analyse

précédente,

ilest

dit

expressément,

pour

laplupart

d'entre

elles,

qu'une

science

plus

éten-

due

etplus

approfondie

que

celle

dujeune

Socrate

peut

enavoir

raisou.

Ici

eucore,

sinégative

que

doive

être

la

LATKÉOIUE

l'LATOKICIEXXE

DE

LA

PAKTICIFATIO.V

conclusion

del'exercice

dialectique

dont

Parmcnideva

donuer

unexemple

àsesauditeurs,

lamanière

même

dont

cette

sub-

tile

discussiou

estamenée

nous

avertit

àl'avance

qu'il

ne

faudra

pas

nous

entenir

ces

conclusions,

mais

chercher

ailleurs

etplus

loin

unpoint

devue

qui

permette

deles

ré-

soudre.

Laméthode

dont

Parménide

préconise

l'emploi,

etqui

est

celle

deZénon,

estindiquée

très

clairement

ils'agit

deposer

une

idée,

par

exemple

celle

del'un,

etde

déterminer

rigou-

reusement

toutes

les

conséquences

qui

résultent

decette

idée

ensupposantqu'elleexiste.Pour

quelaméthodesoitcomplète,

ilfaudra

déterminer

les

conséquences

qui

résultent

del'exis-

tence

del'un,

nonseulement=pour

l'un

lui

même,

mais

encore

pour

lesautres

choses,

eten

outre

rechercher

encore

cequi

arrivera

àl'un

etaux

autres

choses

ensupposant

que

l'un

n'existe

pas.

Ilyaainsi

quatre

moments

ouquatre

hypo-

thèses

àexaminer

sil'un

est,

qu'en

résulte

t-il:

1°pour

lui-

même

2"pour

les

autres

choses;

sil'un

n'est

pas,

qu'en

iésulte-t-il

3°pour

lui-môme;

4°pour

lesautres

choses

Mais

chacune

decesquatre

hypothèses

est

examinée

elle-même

à

undouble

point

devue;

ilyaainsi

huit

hypothèses

aulieu

dequatre

qui

sont

successivement

examinées

Quelle

estla

différence

entre

les

deux

points

devue

aux-

quels

seplace

successivement

Platon

pour

examiner

chacune

des

quatre

hypothèses

principales?

Acette

question

nous

ne

trouvons

point

deréponse

précise

dans

letexte

dudialogue,

excepté

aucommencement

dela

seconde

hypolèse,

oùnous

rencontrons

une

indication

précieuse;

partout

ailleurs,

Platon

secontente

dedire,

après

avoir

énuméré

les

consé-

quence,sd'une

hypothèse

«Revenons

enarrière

etreprenons

les

choses

dès

ledébut.

»Il

doit

cependant

yavoir

présente

àsa

pensée

une

règle

ouune

loiqui

préside

acette

sorte

de

rythme

auquel

estsoumise

toute

ladiscussion.

Iln'est

pas

bien

Lllïicile

dedonner

laréponse

etde

trouver

unfil

conducteur

qui

nous

guide

dans

celabyrinthe,

sil'oii

veutbieu

faire

attentionàla

manièredonteommence

laseconde

hypothèseet

si,àla

lumière

dece

renseignement,

onexamine

attentivement

toute

lasuite

dela

discussion.

142

B

142

C.

«Vois

dès

lecommencement.

Sil'un

existe,

est-il

possible

qu'il

existe

etqu'il

neparticipe

pas

àl'être

1–Cela

n'est

pas

possible.

–IIyaura

l'être

del'un,

qui

nesera

pas

lamême

l'avnge

philosophique.

190"

chose

que

l'un

car

autrement,

ilne

serait

pas

Pêtrede

l'un,

etcelui

cin'y

participerait

pas,

etil

serait

indifférent

de

dire

l'un

?existe

etde

dire

l'un

un;

ortelle

n'est

pasàprésent

notre

hypothèse,

àsavoir

cequi

résultera

del'un

pris

ensoi,

mais

del'un

eutant

qu'il

existe.

N'est

cepas

lànotre

objet'?

–Sans

doute.

L'être

signifie

donc

autre

chose

que

l'un?

Nécessairement.

Lorsque

quelqu'un

dit

sommai-

rement

que

l'un

est,

donne-t-il

aentendre

autre

chose

que

lorsqu'il

dit

que

l'un

participe

l'être?

Sans

doute.

»

Nous

allons

essayer

deprouver

qu'en

môme

temps

qu'il

présente

unexercice

dialectique,

l'arménide

formule

uue

objection

très

grave

contre

lathéorie

dela

participation

Déjà

l'énoncé

del'alternative

posée

par

lui

«Si

l'un

est,

ail'un

n'est

pas

»,indique

qu'il

s'agit

dela

participation;

car

l'exis-

tence

del'un

semble

indiquer

saparticipation

àl'être,

etsa

non-existence,

sanon-participation

Toutefois

ceténoncé

est

encore

trop

général,

etainsi

qu'il

résulte

dupassage

que

nous

venons

deciter,

cen'est

pas

lamême

chose

dedire

l'un

est,

l'un

participe

àl'étre;

etl'un

n'est

pas,

neparticipe

pas

àl'être.

Eneffet,

endisant

simplement

l'uu

estou

n'est

pas,

on

peutêtre

attentif

seulement

àl'un

sans

pensera

l'être;

c'est

comme

sion

disait:

l'un

unet

lenon-un,

non-un.

Aucontraire

onpeut,

ense

servant

des

mêmes

formules,

tenir

compte

de

l'être

etdu

non

être,

carnous

verrons

quel'un,

tout

enn'étant

pas,

peutd'une

certaine

manière

cependant

participer

àl'être.

Dans

lepremier

cas

onsupprime

laparticipation,

dans

le

second

cas

onl'affirme.

Voilà

pourquoi

lapremière

etla

seconde

hypothèsesont

euv

isagéessuecessi

vemen

tàdeux

points

devueselon

qu'on

exclut

ouqu'on

pose

laparticipation.

Nous

allons

voir

qu'il

enestde

même

dans

toutes

lesautres

hypo-

thèses.

C'est

donc

bien

toujours

dela

participation

qu'il

s'agit,

etce

que

Platon

veut

établir,

cen'est

pas

seulement

qu'on

peut

tout

affirmer

ettout

nier

del'un

etdesautres

choses,

soit

que

l'un

existe,

soit

qu'il

n'existe

pas;

c'est

encore

qu'on

peut

faire

lamême

démonstration,

soit

que

l'uu

participe

à

l'être,

soit

qu'il

n'eu

participe

pas

Pour

rendre

plus

sensible

cet

aspect

duproblème,

onpourrait

transposer

l'ordre,

d'ail-

leurs

très

rationnel

ettrès

clair,

adopté

par

Platon,

etordon-

ner

aiusi

les

huit

hypothèses

deParménide.

Nous

aurions

d'abord

deux

hypothèses

sil'un

participe

à

l'être,

s'il

n'en

participe

pas.

Ladémonstration

platonicienne

'aconsiste

àprouver

que

dans

lepremier

casl'un

admet

tous

les

LATHÉORIE

PLATONICIENNE

DE

LAPARTICIPATION

contraires,

ouqu'on

enpeut

tout

affirmer

(deuxième

hypo-

thèse)

queles

autres

choses

admettent

tous

les

contraires

ou

qu'on

enpeut

tout

affirmer

(troisième

hypothèse);

que

sil'un,

même

n'étant

pas,

participe

àl'être,

ilreçoit

encore

tous

les

contraires

ouqu'on

enpeut

tout

affirmer

(cinquième

hypo-

thèse)

enfin,

que

les

autres

choses

reçoivent

aussi

tous

les

contraires

etqu'on

enpeut

tout

affirmer

(septième

hypo-

thèse).

D'autre

part,

sil'uu

neparticipe

pas

àl'être,

onne

peut

lui

attribuer

aucune

qualité

(première

hypothèse);

les

autres

choses

sont

dans

lemême

cas

eton

n'en

peut

rien

dire

(quatrième

hypothèse);

enfin,

sil'un

n'est

pas

etne

par-

ticipe

pas

àl'être.

onne

peut

plus

rien

affirmer,

nide

lui

(sixième

hypothèse),

nides

autres

choses

(huitième

hypo-

thèse).

En

d'autres

termes,

sil'uu

participe

àl'être,

enexis-

tant

ouen

n'existant

pas,

onpeut

tout

dire

deluietdes

autres

choses;

s'il

neparticipe

pas

àl'être,

enexistant

ouen

n'ex-

istant

pas,on

nepeut

rien

dire

nide

lui

nides

autres

cho-

ses.

Dans

lepremier

cas

tout

est

vrai,

dans

lesecond

rien

n'est

vrai

deux

conséquences

également

absurdes.

Par

cou-

séquent,

laparticipation

estimpossible

etpar

suite

lathéorie

des

idées

disparait

tout

entière;

caràquoi

servent

les

idées

siou

nepeut

rien

dire

ousi

onpeut

tout

dire

d'elles

et

des

autres

choses?

9

Examinons

maintenant,

dece

nouveau

point

devue,

la

marche

dela

démonstration.

Supposons

d'abord

que

l'un

est

etqu'il

parteipe

àl'être

(deuxième

hypothèse)

142

B–1S7

B.

Plalou

démontre,

par

des

arguments

dont

ilest

inutile

de

reproduire

icitout

ledétail,

que

l'uu,

parce

qu'il

participe

à

l'être,

ades

parties

etestun

tout,

ilestdéterminé,

ilestsem-

blahle

etdissemblable,

enmouvement

eten

repos;

ilest,

il

devient,

ilestdevenu,

ildeviendra

plus

jeune

etplus

vieux

que

lui-même

etque

les

autres

choses,

qui

sont

elles-mêmes

plus

jeunes

etplus

vieilles

que

lui

En

unmot,s'il

est,

ence

sens

qu'il

participe

àl'être,

ilreçoit

tous

lescontraires

onen

peut

tout

affirmer.

Dans

latroisième

hypothèse

(157

B-159

B)

sil'un

est,

qu'en

résulte-t-il

pour

les

autres

choses

?–

les

autres

choses

parti-

cipent

enquelque

manière

del'unité,

car

elles

nesont

autres

que

l'un

que

parce

qu'elles

ont

des

parties,

etayant

des

par-

ties

elles

ont

untout.

Platon

insiste

sur

ladillérence

qui

sépare

l'unité

absolue

dont

ilaétéd'abord

question,

del'unité

relative

qui

estcelle

d'un

tout

etimplique

laparticipation

à

L'AMSÊË

THILOûOrHlQUE.

1907

l'uQité.

Dece

commerce

dumultiple

avec

l'un

ilrésulte

que

lemultiple

estàla

fois

infini

etfini,

semblable

etdissemblable

àlui-même,

etl'uu

par

rapport

àl'autre;

ilesten

mouvement

eteu

repos,

enun

mot

ilpossède

tous

lescontraires.

Pour

lacinquième

etlaseptième

hypothèses,

l'interprétation

que

nous

proposons

iciparaît

être

endéfaut.

Comment

dire,

enellet,

que

leraisonnement

dePlaton

implique

laparticipa-

tion

entre

l'un

etl'être,

puisque

l'hypothèse

est

précisément

que

l'un

n'est

pas.

Mais

ouavu

que

Platon

distingue

cesdeux

cas,

etilsuffit

d'examiner

attentivement

ses

raisonnements

pour

s'apercevoir

que

l'objection

n'est

que

spécieuse

etque

Platon

revient

par

undétour

aumême

point

devue

que

dans

laseconde

etlatroisième

hypothèses.

Voici,

eneffet,

lerésumé

dela

cinquième

hypothèse

(100

B-163

C)

L'uu

n'est

pas

et

ils'agit

desavoir

cequien

résulte

pour

luimême.

Endisant

que

l'un

n'est

pas,

onsait

ceque

l'on

dit

c'est

del'un

qu'on

affirme

lanon-existence

etnon

pas

d'une

autre

idée

telle

que

laressemblance

oula

grandeur.

La

formule

est

le

contraire

decelle-ci

lenon-un

n'existe

pas.

Par

suite,

l'un

est

l'objet

dequelque

science;

deplus,

onpeut

l'ap-

peler

ceci

oucela,

car

c'est

lanon-existence

del'uu

etnon

d'aucune

autre

chose

que

l'on

affirme.

Aussi,

tout

enn'exis-

tant

pas,

l'un

aplusieurs

propriétés

différentielles

etparticipe

àplusieurs

idées

ilestsemblable

etdissemblable,

égal

et

inégal,

grand

etpetit

dès

lors

ilparticipe

enquelque

mauière

àl'être

lui-même.

Car

sice

qu'on

diten

disaut

que

l'un

n'est

pas

estvrai,

ilparticipe

encela

àl'être

ilal'être

deson

non-être

Nous

voilà

donc

revenus,

par

undétour,

àla

participation

del'un

àl'être,

etcette

participation

entraine

seseflets

habituels

l'unqui

n'est

pas

estmobile

eten

repos,

enun

mot

ilparticipe

àtous

lescontraires.

Ilfaut

seulement

ajouter

qu'il

s'agit

ici,

puisque

l'un

n'est

pasréellement,

d'une

apparence

d'existence

ilparait

être,

ilparait

présenter

tous

les

contraires.

C'est

ledomaine

del'opinion

etdu

devenir.

Nous

avons

icila

dialectique,

non

plus

dela

réalité,

mais

de

l'apparence.

Dans

laseptième

hypothèse

(164

B-163E),

ils'agit

desavoir

cequi

arrive

aux

autres

choses

sil'un

n'est

pas.

Les

autres

choses

sont

autres,

non

par

rapport

àl'unité

puisqu'elle

n'existe

pas,

mais

par

rapport

àelles-mêmes,

etpuisque

l'unité

n'existe

pas

c'est

uniquement

par

leur

multitude

qu'elles

peuvent

être

cequ'elles

sont,

c'est-à-dire

autres

les

LA

THÉOHIE

PL.VTOÎilCIENN'E

DE

LA

PAHTICIFAI

IOX

unes

que

les

autres.

Cependant,

pour

différer

les

unes

des

autres,

ilfaut

que

chacune

d'elles,

quoique

essentiellement

multiple,

aitau

moins

l'apparence

del'unité.

Ainsi,

chacune

des

choses

autres

que

l'un

paraît

d'abord

une,

mais

elle

ne

l'est

paspuisque

l'uu

n'est

pas,

et,si

onl'examine

attentive-

ment,

elle

serésoud

enune

pluralité,

dont

chaque

partie

à

son

tour,

quelle

que

soit

sapetitesse,

subit

lemême

sort

etse

divise

àl'infini.

Nous

sommes

donc

enprésence

d'une

pous-

sière

d'êtres,

(l'une

apparence

qui

sans

cesse

uous

échappe

comme

dans

nusonge

mais

cela

n'empêche

pas

que

cette

apparence

évanouissante

neparaisse

avoir

unnombre,

puisque

d'abord

elle

paraît

une.

Elle

estpaire

ouimpaire,

ladécrois-

sance

parait

avoir

uncommencement,

unmilieu

etune

fin;

par

suite

elle

paraît,

quoique

sans

fondement,

participer

à

l'égalité

etàl'inégalité,

àla

grandeur

etàla

petitesse,

au

mouvement

etau

repos,

audevenir

etàla

destruction,

àtous

les

contraires.

S'il

enest

ainsi,

c'est

que

d'abord

elle

paraît

une.

En

attribuant

l'existence

aux

autres

choses

onleur

a

implicitement

reconnu

quelque

unité;

quoique

l'un

n'existe

pas,

ilsubsiste

donc

quelque

chose

delui,

unsouvenir,

une

trace Tous

les

simulacres

dont

onvient

deparler

empruntent

donc

cequ'il

yade

réel

dans

leur

apparence

àce

qui

reste

del'unité

supposée

non

existante.

Rien

deplus

curieux

que

cette

analyse

oùl'unité,

tout

enn'existant

pas,

reste

cepen-

dant

présente,

comme

deloin,

aux

autres

choses

qui

nepeu-

vent

différer

les

unes

des

autres

qu'en

participant

encore,

en

quelque

manière,

àl'unité.

L'un

projette

aiusi

dutond

deson

néant

une

sorte

d'intel-

ligibilité

crépusculaire

qui

est

tout

ceque

nous

pouvons

savoir

dureste

des

choses.Ilsemble

bien

que

cesoit

icinon

plus

seulement

ledevenir

oula

sensation,

mais

l'apparence

dudevenir,

lesimulacre

oule

rêve

que

Platon

avoulu

expli-

quer

dialectiquement.

Ilyapeut-être

une

allusion

àcette

théorie

dans

lepassage

dulimée

oùla

matière

nous

estpré-

sentée

comme

entrevue

àtravers

unsonge.

Dans

tous

lescas,

onvoit

comment,

dans

lacinquième

etdans

laseptième

hypo-

thèse,

Platon,

enattribuant

aunon

être

une

certaine

participa-

tion

àl'être,

anticipe

sur

lasolution

qu'il

présentera

avec

tout

son

développement

dans

leSophiste

c'est

pourquoi

nous

avons

pudire

qu'en

formulant

l'objection

ilen

indique

plus

qu'à

moitié

lasolution.

l'année

PHILOSOPHIQUE.

1007

Passons

maintenant

audeuxième

cas,

ladémonstration

toute

négative

sera

beaucoup

plus

simple.

N'oublions

pasque

désormais

nous

prenons

les

mots

ausens

absolu

etqu'en

disant

l'un

est,

oul'un

n'est

pas,

c'est

l'unité

elle-même

et

non

pas

l'être

oule

non-être,

c'est

l'unité

sans

participation

que

nous

avons

envue.

D'abord

première

hypothèse,

137

C-

142B

l'un

est,

mais

sans

participer

àl'être,

c'est

l'un

un.Platon

démontre

que

l'un

neparticipe

àaucun

des

contraires,

iln'a

pas

departies

etiln'est

pas

untout,

iln'a

aucune

détermi-

nation,

iln'est

nisemblable

nidissemblable,

niégal

niiné-

gal,

nien

mouvement

nien

repos,

nidans

letemps

nidans

J'espace,

iln'est

niceci

nicela;

bref,

oun'en

peut

rien

dire,

il

n'est

l'objet

nide

science

nid'opinion,

nide

sensation

nide

discours

ilestpur

unnéant.

Dans

laquatrième

hypothèse

(189

B-160

B),l'un

existe

sans

participer

àl'être,

ils'agit

desavoir

cequi

advient

desautres

choses.

Cequiestautre

estabsolument

autre,

iln'y

arien

en

quoi

l'un

etles

autres

choses

puissent

serencontrer.

Elles

n'ont

donc

pas

departies,

elles

neforment

pas

untout,

elles

n'ont

pasde

nombre

puisqu'elles

sont

étrangères

àl'unité;

par

suite,

elles

n'ont

aucune

qualité

etne

sont

nisemblables

ni

dissemblables,

niégales

niinégales,

nigrandes

nipetites,

ni

enmouvement

nien

repos,

elles

nedeviennent

nine

péris-

sent,

onn'en

peut

rien

dire.

Supposons

avec

lasixième

hypothèse

que

l'un

n'est

pas

sans

admettre

aucune

participation

avec

l'être,

qu'en

résulte-

t-il

pour

lui-même?

Ils'ensuit

plus

clairement

encore

que

dans

lapremière

hypothèse,

toute

communication

ètantroinpue

entre

l'un

etl'être,

qu'il

n'est

nisemblable,

nigrand

nipetit,

nieu

mouvement

nien

repos,

onne

peut

ledésigner

par

ces

mots

ceci,ou

celfl,

avant

ouaprès,

nirien

desemblable.

Bref,

iln'est

l'objet

d'aucune

opinion,

d'aucune

science,

d'aucune

sensation,

d'aucun

discours.

Voilà

cequi

résulte

del'hypo-

thèse

pour

l'un

lui-même.

Voici

cequi

résulte

dela

non

participation

del'un

pour

lesautres

choses;

c'est

lahuitième

hypothèse

(IBS

E–

166

C).Ces

autres

choses

n'auront

même

plus

l'intelligibilité

cré-

pusculaire

oul'apparence

d'existence

que

leur

laissait

encore

laseptième

hypothèse,

puisqu'on

les

suppose

maintenant

privées

detoute

communication

avec

l'unité.

Aussi

oune

pourra

pas

dire

qu'elles

sont

multiples

parce

que

lamultipli-

cité

suppose

l'unité,

etpar

conséquent

nepeut

subsister

sans

LATHÉORIE

PLATONICIENNE

DE

LA

PARTICIPATION

elle.

Elles

nesont

nisemblables,

nidissemblables,

nien

mouvement

nien

repos

c'est

lepur

néant

L'unité,

endis-

paraissant,

aemporté

avec

elle

ladernière

lueur

qui

rendait

possible

l'apparence

même

des

choses.

Quatre

hypothèses

positives

etquatre

hypothèses

négatives

aboutissant

àdeux

conclusions

enapparence

contraires,

mais

aufond

identiques,

oupeut

tout

affirmer

del'un

etdes

autres

choses,

onne

peut

rien

affirmer

del'un

nides

autres

choses:

telest

lerésumé

decette

discussion.

Dans

tous

les

cas,

qu'on

puisse

tout

dire

ouqu'on

uepuisse

rien

dire,

iln'y

apas

descience

possible;

c'est

ceque

déclare

expressément

laconclusion

dudialogue.

«Disous

donc

que,

selon

toute

apparence,

soit

que

l'unité

existe,

soit

qu'elle

n'existe

pas,

l'unité

elle-même

etce

qui

estautre,

dans

leurs

rapports

avec

eux-mêmes

etdans

leurs

rapports

réciproques,

sont

absolument

tout

etne

lesont

pas,

leparaissent

etne

leparaissent

pas.

»166

C«EipiiaOw

^o0t6

tsxalfoi,

w;so'.y.EV,ëvsve'

è'rrciye'{te[j.

É'suv,aù-utits

xaltsàax

xal

7Tpôçau-uixal^pis

SaItj/.x

itxVTaTtâvTWçIsti

texxI

oùxlrj-i.

xai^31'ETaC

TEXalOJÇSÛ'/ETîU.'A),Y|0î5-XTX.

»

Nous

pouvons

toutefois

préciser

encore

davantage.

Cequi

fait

lenerf

del'argumentation,

c'est

cette

vérité

découverte

par

Platon

que

l'un

(etsans

doute

ilen

serait

demême

pour

toute

autre

idée)

peut,

tout

euexistant,

nepas

participer

à

l'être,

oudu

moins,

cequi

revient

aumême,

nepasêtre

con-

sidéré

comme

yparticipant;

inversement

l'un,

tout

enn'exis-

tantpas,

peut

participer

àl'être

sion

donne

aumot

<cun

»,un

sens

déterminé,

sion

distingue

cette

idéede

toutes

lesautres.

Par

suite,

rargumentationduParménidepeut

serésumer

ainsi

sil'un

estet

qu'il

participe

àl'être,

onpeut

affirmer

deluiet

des

autres

choses

tous

les

contraires

s'il

est

saus

participer

àl'être,

onne

peut

rieu

affirmer

nide

lui

nides

autres

choses;

sil'un

n'est

pas

etcependant

participe

àl'être,

on

peut

tout

affirmer

delui

etdes

autres

choses;

s'il

n'est

pas

sans

participer

àl'être,

oune

peut

rien

dire

nide

lui

nides

autres

autres

choses

eud'autres

termes,

posez

laparticipa-

tion

d'une

idée

quelconque

àl'être

ettout

estvrai,

niez

cette

participation

etrien

n'est

vrai.

La

participation,

dequelque

manière

qu'où

l'entende,

estdonc

tout

àfait

impossible,

et

avec

elle

s'écroule

lathéorie

des

idées.

Nous

avions

donc

raison

dedire

que

ladeuxième

partie

duParménide

n'est

pas

seu-

lement

unexercice

dialectique

elle

formule

contre

lathéorie

I.'A^ÉE

PIIILOSOPIirQUE.

1907

desidées

une

sixième

objection,

laplus

formidable

detoutes.

Ladouble

conclusion

négative

àlaquelle

Platon

est

cou-

duit

par

cette

discussion

estd'ailleurs

d'accord

avec

lestlièses

soutenues

par

ses

adversaires

Protagoras

disait

aussi

que

l'erreur

estimpossible,

les

Cyniques

avec

Antisthène,

etles

Mégariques

soutenaient

qu'on

nepeut

affirmer

aucun

attribut

d'aucun

sujet.

Platon

aseulement

démontré

ceque

sesadver-

saires

sebornaient

àaffirmer

pour

des

raisons

différentes.

Toutefois

ilestimpossible

que

Platon

ensoit

resté

là,

et

comme

nous

l'avons

déjà

fait

remarquer,

lamanière

même

dont

ilprésente

les

objections

duParménide,

etsurtout

la

cinquième,

atteste

qu'il

neles

considère

pas

comme

insolu

u

blés,

ettout

autorise

àcroire

qu'ilpossède

déjà

par

devers

lui

cette

solution.

Quel

est

donc

lemot

decette

énigme

sicompliquée

?La

réponse

setrouve

très

clairement

indiquée

dans

unpassage

duSophiste,

dans

lequel

ilnous

parait

impossible

dene

pas

voir

une

allusion

directe

auParméuide.

(231

D):«N'attribue-

rous-nous

l'être

uiau

mouvementni

aurepos,

niaucune

autre'e

chose

àaucune

autre

chose,

etadmettrons-nous

dans

nos

dis-

cussious

qu'aucune

nepeut

entrer

euparticipation

avec

une

autre;

oubien

identifierons-nous

toutes

choses

parce

qu'elles

peuvent

être

encommunauté

les

unes

avec

lesautres,

oubien

dirons-nous

que

les

unes

secombinent

avec

les

autres,

et

les

autres,

non

Lequel

deces

trois

partis,

Théctète,

dirons-nous

qu'ils

prendront?.

»

Platon

prouve

ensuite

qu'on

nepeutnier

toute

participation

outout

mélange

entre

lesidées

sans

bouleverser

lesdoctrines

admises

par

tous

les

philosophes,

aussi

bien

par

Parménide

ouHéraclite

que

parJesAtomistes

oules

Pythagoriciens.

Les

contradicteurs

logent

d'ailleurs

l'ennemi

chez

eux

puisque

àchaque

instant,

lelangage

les

oblige

àemployer

des

mots

tels

que

autre,

être,

séparément.

Iln'est

pas

moins

impossible

desupposer

que

toutes

choses

communiquent

entre

elles,

car

ilfaudrait

alors

que

lemouvemeut

fiU

identique

aurepos,

ceque

l'Eléale

déclare

absurde.

(9o2

R).«II

nereste

plus

que

latroisième

supposition.

Etil

taut

que

l'une

deces

trois

suppositions

soit

vraie

oulemélange

estpossible

pour

toutes

leschoses

ouilne

l'est

pour

aucune,

ouill'est

pour

les

unes

etnon

pour

lesautres

Puisque

parmi

les

choses

lesunes

peuvent

semêler

etque

lesautres

nelepeuventpas,

elles

ont

àpeu

près

lamême

propriété

que

les

lettres

dont

les

unes

IATHÉORIE

PLATONICIENNE

DE

LAPARTICIPATION

2

s'accordent

eutre

elles

etdont

les

autres

nes'accordent

pas.

Les

voyelles

ontl'avantage

sur

lesautres

lettres

des'uuir

à

toutes

etde

leur

servir

delien,

ensorte

que

sans

l'une

d'entre

elles,

aucune

lettre

nepeut

s'accorder

avec

une

autre

»

C'est

ladialectique

qui

apprend

àconnaître

celles

des

idées

qui

s'accordent

entre

elles

ladialectique

est

aux

idées

ce

que

lagrammaire

est

auxlettres

del'alphabet,

oula

musique

aux

sous

graves

etaigus.

Ainsi,

entre

lesdeux

termes

del'alternative

posée

par

Par-

ménide,

onpeut

affirmer

detout

eton

nepeut

rien

affirmer

derien,

ouencore

tout

est

vrai,

etrieu

n'est

vrai,

ilyaun

moyen

terme

qui

est

dedire

ilyades

idées

qu'on

peut

affirmer

les

unes

des

autres,

etd'autres

qui

nepeuvent

se

combinerentreelles.

Pour

justifier

l'alternative,

ilfalitprouver

que

l'être

peut

participer

aunon

être,

etle

non-être

àl'être,

voilà

ceque

leParménide

avait

montré

pour

uncas

parti-

culier

etce

que

leSophiste

établira

eugénéral

Mais

cela

même

n'est

passuffisant

ilfaut

encore

établir

que

toutes

les

idées

neparticipent

pas

indistinctement

les

unes

aux

autres,

mais

que

leur

liaison

estsoumise

àcertaines

loisou

àcertaines

règles

qui

nerelèvent

pas

duraisonnement

seul

etque

peut

seul

atteindre

une

science

royale

oudivine

ladialectique.

Voilà

ceque

leParméuide

n'a

pas

dit

etce

que

met

enpleine

lumière

leSophiste.

On

aquelquefois

considéré

leParménide

comme

untissu

desophismes

etil

faut

avouer

que

les

raisonnements

oùse

complaît

lasubtilité

dePlaton

ont

dequoi

confondre

etdécon-

certer

toutes

nos

habitudes

d'esprit.

Mais

avant

deporter

une

accusation

sigrave

contre

legrand

philosophe,

ilfaudrait

être

enmesure

deprouver

ouque

Platon,

enpartant

des

principes

sur

lesquels

repose

son

argumentation,

acommis

des

fautes

deraisonnement,

ouque

ces

principes

eux-mêmes

contestables,

oumême

certainement

inexacts

pour

nous,

n'étaient

pas

admis

d'un

commun

accord

par

les

contradic-

teurs

qu'il

voulait

réfuter.

Ornous

nesachions

pas

que

lapre-

mière

decesdémonstrations

aitjamais

ététentée

avec

succès

etquant

àla

seconde,

ilesthistoriquement

prouvé

que

les

con-

temporains

dePlaton

égarés,

soit

par

l'éléatisme,

soitpar

leseu-

sualisme

deProtagoras,

raisonnaient

exactement

comme

lui

etsoutenaient

fort

sérieusement

que

tout

estvrai

etque

rieu

n'est

vrai.

C'est

aucontraire

parce

qu'il

voulait

faire

justice

deces

assertions

destructives

detoute

science

que

Platon

a

Pillon.–Annocphilos

1007.

l'aknék

PHILOSOPHIQUE.

1907

entrepris

l'argumentation

dont

lel'arménide

marque

undes

stades.

Onne

saurait

lui

faire

unreproche

d'avoir

raisonué

comme

ses

adversaires

pour

les

réfuter,

etde

n'avoir

paspris

parti

avant

demontrer

lafaussetéde

propositions

quepersonne

nesougeait

àcontester.

Sil'interprétation

qu'on

vient

d'in-

diquer

estexacte,

leParméuidc

nerenferme

aucun

sophisme

car

i!estcertain

qu'au

point

devue

qui

est

celui

detous

les

philosophes

del'époque,

onpeut

prouver

que

tout

estvrai

et

que

tout

estfaux.

Ilspèchent

seulement

par

omission,

ilsn'in-

diqueut

pas

lasolution

que

Platon

sans

doute

avait

déjà

par

devers

lui.

Lejeu

consiste

àne

discuter

que

deux

solutions

duproblème

alors

qu'en

réalité

ilyen

atrois.

Mais

unphilo-

sophe

abien

ledroit

d'exposer

les

difficultés

sans

endonner

tout

desuite

lasolution.

Ilpeut

avoir

des

raisons

sérieuses

(le

laréserver

etde

choisir

son

heure.

Rien

nel'oblige

à

ouvrir

samain

tout

entière

etàdire

tout

son

secret,

surtout

quand

ils'agit

devérités

qu'il

adécouvertes

lui-même

par

un

patient

effort

etque

personne

avant

lui

nes'était

avisé

d'y

penser.

Platon

neserait

coupable

que

s'il

avait

emporté

son

secret

avec

lui

lePannënide

neserait

untissu

desophismes

que

sison

auteur

n'avait

pas

écrit

leSophiste.

Cependant

lasolution

sisimple

donnée

par

cedernier

dia-

logue

nes'impose

pas

d'elle-même

ilfaut

justifier

par

une

argumentation

rigoureuse

etrésoudre

les

difficultés

qu'elle

soulève.

Telle

est

latâche

que

Platon

s'est

dounée

dans

le

Sophiste.

II

LeSophiste

pour

objet

dedémontrer

cette

proposition

para-

doxale

que

lenon

être

existe

àcette

condition

seule

onpourra

dire

que

l'erreur

estpossible

etqu'il

yades

sophistes.

L'existence

dunon-être

une

fois

prouvée,

leproblème

de

l'erreur

sera

résolu

l'erreur

consistera

àdire

autre

chose

que

cequi

estréellement

puisqu'il

yadu

non-être,

etcependant

àdire

quelque

chose

puisque

lenon-être

existe.

Mais

il

faudra

pour

cela

que

lenon-être

soit

quelque

chose

d'inter-

médiaire

entre

l'être

etle

non-être

absolu,

manifestement

contradictoire

àl'être

11faudra

que

lenon-être,

puisqu'il

est

réel,

soit

unêtre,

et,puisqu'il

est

non-être,

qu'il

soit

autre

chose

que

l'être.

Ilsera

unantre

être.

LA

TiléOME

PLATONICIENNE

DE

LAPABTICIPATIOÎi

Comme

leParménide,

leSophiste

seprésente

d'abord

sous

laforme

d'un

exercice

logique;

mais

tandis

que

lcParme-

nide,

encherchant

lesconséquences

qui

résultent

d'une

hypo-

thèse,

est

l'exemple

d'une

sorte

dedéduction,

leSophiste

nous

montre

unautre

aspect

dela

méthode

platonicienne,

déjà

indiqué

très

clairement

dans

lePhèdre

laméthode

dedivi-

sion

Mais

dans

ledeuxième

dialogue

comme

dans

lepre-

mier,

l'exercice

dialectique

quiesten

apparence

lebut

prin-

cipal

esten

même

temps

unargument

positif

àl'appui

dela

thèse

que

l'auteur

veut

faire

prévaloir.

LeParménule

formule

une

objection

très

grave

contre

laparticipation;

leSophiste

donne

unexemple

particulier

dece

que

doitêtre

laparticipa-

tion,

avant

même

que

celle-ci

soit

définie

etque

lapossibilité

ensoit

établie.

L'exemple

dupécheur

àla

ligne

nous

montre

ceque

doit

être

ladichotomie-

qui

divise

ungenre

endeux

parties

opposées,

puisl'une

d'elles,

celle

qu'on

ainscrite

àdroite

endeux

autres

parties

opposées

etainsi

desuite,

jusqu'à

ceque

l'on

trouve

ladéfinition

cherchée.

Appliquant

cette

méthode

àl'idée

duSophiste,

Platon

montre

que

lesophiste

appartient

àun

grand

nombre

degenres

différents.

Ilestun

chasseur

salarié

d'hommes

jeunes

etriches,

untrafiquant

des

connais-

sances

qui

serapportent

àl'âme,

undébitant

endétail,

puis

unvendeur

depremière

main

deces

mêmes

connaissances,

unathlète

s'exerçant

dans

l'art

dediscuter,

unpurificateur

del'àme

qu'il

débarrasse

dece

qui

s'oppose

àl'acquisition

dela

science,

enfin

unfaiseur

desimulacres.

Ilparticipe

donc

àplusieurs

idées

Nous

voyons

par

cet

exemple

com-

ment

unmême

être

peut

réunir

les

qualités

les

plus

dis-

tinctes,

comment

plusieurs

genres

seconfondent

enlui

mais

arrivé

àcette

dernière

définition,

fabricant

defan-

tômes

oude

simulacres,

Platon

setrouve

brusquement

arrêté.

Un

simulacre

représente

cequi

n'est

pas,

ilestfaux

etmen-

songer,

ilimplique

l'erreur;

mais

l'erreur

est

impossible,

car

dire

cequi

n'est

pas,

ceserait

nerien

dire.

C'est

un

axiome

incontesté

dans

l'école

deParménide

etaccepté

par

tous

les

contemporains,

que

jamais

oune

comprendra

que

ce

qui

n'est

pas

est.

Cequi

n'est

pas

nesaurait

donc

enaucune

façon

être

exprimé.

Dans

une

discussion

qui

rappelle

celle

duParménide,

l'étranger

Éléate

montre

qu'on

nesaurait

sans

secontredire

attribuer

aunon-être

l'unité

oula

plura-

lité,

238C,l'être

aunon-être,

etque

cependant

onle

luiattri-

bue

par

lefait

même

qu'on

lui

donne

unnom

ouqu'on

en

l'année

PHILOSOPHIQUE.

1907

parle.

Eu

lui-même

iléchappe

àla

science,

àl'opinion,

au

langage;

comment

donc

dire

que

leSophiste

exprime

cequi

n'est

pas?

Tel

estl'asile

ténébreux

etinviolable

oùse

réfugie

leSophiste

etd'où

ildéfie

ironiquement

tous

ses

contradic-

teurs

qui

nesauraient

avoir

aucune

prise

sur

lui.

Toule

cette

dialectique

nous

étonne

unpeu

aujourd'hui

et

nous

avons

dela

peine

àcomprendre

l'importance

que

Platon

yattache.

Ilfaut

songer

cependant

que

laformule

duprin-

cipe

d'identité

donnée

pour

lapremière

fois

par

Parméuide

avait

fortement

saisi

lesesprits

ets'était

imposée

àtous

c'est

l'acte

par

lequel

laraison

humaine

prenait

enquelque

sorte

possession

d'elle-même

etaffirmait

laloi

suprême

dela

pensée.

Iln'est

donc

pas

surprenant

que

l'esprit

subtil

et

ingénieux

des

Grecs

sesoit

d'abord

attaché

àla

rigueur

de

cette

formule

etaitécarté

comme

suspect

tout

cequi

parais

sait

lamettre

endoute.

Cefutprécisément

l'œuvre

dePlaton

d'indiquer

pour

lapremière

fois

leslimitations

etlesrestric-

tions

nécessaires

et,en

déterminant

levrai

sens

duprincipe,

d'en

proscrire

lesabus

oulesapplications

erronées.

C'était

une

entreprise

difficile

que

dedémontrer

l'existence

dunon-être,

etlestermes

decette

formule

semblent

exprimer

une

contradiction

C'est

ceque

Platon

indique

dès

ledébut

lorsque

l'étranger

Eléate

prie

Théétete

dene

pas

leconsidérer

comme

unparricide

(241

D);

ledisciple

deParménide,

tout

eu

professant

ungrand

respect

pour

son

maître,

vaeneffet

por-

ter

lamain

surla

maxime

qu'il

necessait

derépéter,

prouver

coutre

luique

lenon-être

est

enquelque

manière,

etque

l'être

enquelque

manière

n'est

pas

«II

est

nécessaire

que

pour

nous

défendre

nous

soumettions

àl'épreuve

lamaxime

denotre

père

Parménide

etque

nous

établissions

par

foice

que

lenon-être

estsous

quelque

rapport

etque

d'autre

part

l'être

euquelque

manière

n'est

pas.

»tèvtoûjraTpàsllxp^evtâo'j

dydv

¡j:X'(X~~QVviuiv

cip.uVQ¡.L!vo~çrr¡n~

~M:XV[~~W,xzl

~d~E'10:l~

cd

TE[l"t\5v

(JÇ^GXtY.WZÎ.XLXCCL10Sv

C£U1U3&IV(în;OVX,EoilU'I^.

Cette

démonstration

présente

naturellement

detrès

grandes

difficultés.

En

effet,

ilest

bien

impossible

qu'on

démontre

déductivement

l'existence

dunon-être,

ouqu'on

fasse

sortir

lenon

être

del'être

oul'être

dunon-être.

Ilfaut

cependant,

si

l'on

veut

donner

une

preuve,

trouver

des

raisons

quicontrai-

gnent

l'esprit

ets'imposent

àlui.

Hs'agit

detrouver

une

démonstration

endehors

desconditions

mêmes

dela

démons-

tration.

Aussi

laméthode

employée

par

Platon

est-elle

indî-

LA

THÉOIUE

rLATONIQEXXE

DE

LAPARTICIPAI

IOK

recte

etla

contrainte

qu'il

prétend

imposer

àl'esprit

deses

contradicteurs

n'est-elle

pas

d'ordre

purement

logique.

II

accorde

momentanément

àses

adversaires,

etille

faut

bien,

que

l'idée

dunon-être

présente

d'insurmontables

difficultés

et

illa

laisse

d'abord

decOté.

Mais

ilprouve

ensuite

que

l'idée

del'être

estexactement

dans

lemême

cas,

et,quand

onl'exa-

mine

deprès,

donne

lieu

àd'inextricables

coudradictious.

On

nepeut

cependant

abandonner

t'une

etl'autre,

car

ceserait

renoncer

àtoute

affirmation,

àtoute

science,

àtoute

philoso-

pliie.

Ilfaut

donc

serésigner

àles

admettre

l'une

etl'autre

malgré

leurs

difficultés,

faire

comme

les

enfants

qui,

lors-

qu'on

leur

donne

àchoisir

entre

deux

choses,

les

prennent

toutes

deux.

Bref,

ilfaut

affirmer

laréalité

dunon

être

comme

celle

del'être

etpasser

outre

àtoutes

lesprotestations

que

ne

manqueront

pas

defaire

entendre

lesadversaires.

Ce

point

établi,

toutes

les

autres

difficultés

serésoudront

enquelque

sorte

d'elles-mêmes.

Voici

maintenant

lerésumé

dela

critique

àlaquelle

Platon

soumet

l'idée

del'être.

Les

philosophes

antérieurs

enont

pris

àleur

aise

avec

laquestiou

dela

nature

del'être

les

uus

admettent

trois

êtres

tantôt

enguerre,

tantôt

eupaix

les

uns

avec

lesautres;

unautre

deux

seulement,

lesec

etl'humide,

oule

chaud

etle

froid.

Selon

Pannénide

etsou

école,

iln'y

a

qu'un

seul

principe,

unseul

être.

Enfin,

les

Muses

dlonie

et

deSicile

déclarent

l'être

àla

fois

unet

multiple,

ooit

que

l'être

s'opposant

lui-même

s'accorde

toujours

avec

lui-même,

soit

que

l'Amour

etla

Discorde

interviennent

tour

àtour

pour

rétablir

l'unité.

Toutes

cesformules

paraissent

claires

elles

nele

sont

pas

siou

lesexamine

deprés,

elles

sont

même

aussi

obscures

que

lanotion

duuon-êlre

En

effet,

quand

onditpar

exemple

que

lechaud

etle

froid

sont

deux

êtres,

lemot

être

désigne-t

il

unnouveau

principe?

ilyeu

aalors

trois

etnon

plus

deux;

dùsigne-t-il

aucontraire

uudes

deux

êtres?

alors

iln'y

ena

plus

qu'un;

l'être

appartient-il

àtous

lesdeux?

alors

encore

ilsne

font

qu'un

IIfaut

adresser

une

question

analogue

aux

partisans

del'unité

oudemandera

ainsi

àParméuide

si,en

disant

que

l'un

est,

ilentend

ounon

que

l'uu

est

lamême

chose

que

l'être.

Dans

ledeuxième

cas

ilyaura

deux

noms

pour

une

même

chose

eton

retombera

dans

lapluralité;

dans

lepremier

ilfaudra

dire

que

lenom

n'est

lenom

derienou

qu'il

est

lenom

d'un

nom,

etil

yaura

encore

dualilé

La

l'ansée

PHILOSOPHIQUE.

1907

discussion

qui

s'engage

ici,

etqui

est

expressément

dirigée

contre

lechef

del'école

d'Elée,

rappelle

detrès

près

celle

du

Parménide

(2i4F

–245A),

elle

n'en

estàvrai

direqu'un

abrégé

etsemble

même

seterminer

par

une

allusion

directe

àce

dia-

logue.

Sion

entend

l'unité

ausens

absolu,

c'est-à-dire

sans

participation

àl'être,

elle

sera

absolument

indivisible,

n'aura

point

departies

elle

nesera

pas

untout,

elle

n'aura

nicom-

mencement

nimilieu,

nifin,

elle

n'aura

aucune

quantité.

Mais

ilne

faudra

pas

dire

alors,

comme

lefait

Parménide,

que

l'être

estune

sphère

bien

arrondie

dont

toutes

les

extrémités

sont

àégale

distance

ducentre,

etqu'il

estun

tout

dumoins

sion

affirme

del'un

toutes

ces

déterminations,

c'est

qu'on

le

considère

non

plus

enluimême,

mais

entant

que

participant

àl'être

Rien

alors,

eneffet,

n'empêche

que

l'un

aitdes

parties

etqu'il

soit

untout;

mais

ens'exprimant

ainsi,

eudisant

que

l'un

n'a

que

l'unité

d'un

tout,

etnon

plus

comme

tout

à

l'heure

l'unité

absolue,

ilne

faut

pas

sedissimuler

qu'on

lui

refuse

quelque

chose

qui

appartient

cependant

àl'être,

onle

limite

eton

lerestreint

bref,

onaffirme

enquelque

manière

qu'il

n'est

pas

puisque

illui

manque

quelque

chose.

Nous

voilà

donc

obligés,

sinous

voulons

donner

unsens

àla

for-

mule

deParméuide,

dedire

que

l'être

n'est

pas,

etnous

sommes

ainsi

enformelle

contradiction

avec

nous-mêmes

et

avec

lui.

D'autres

difficultés

surgissent

si,au

lieu

deconsidérer

ceux

qui

regardent

l'être

comme

unou

multiple,

ons'attache

à

ceux

qui

ledéfinissent

comme

corporel

ouincorporel.

Les

fils

dela

terre,

etparlà

ilfaut

entendre

probablement

lesparti-

sans

deDémocrite,

nereconnaissent

comme

existant

que

ce

qu'ils

peuvent

percevoir

àl'aide

deleurs

sens,

voir

deleurs

yeux

oupresser

deleurs

mains;

onleur

demandera

cepen-

dant

sil'âme,

lajustice,

lasagesse

sont

des

corps.

Ilsrépon-

dront

peut-être

affirmativement

ence

qui

concerne

l'âme,

mais

ilsn'oseront

pas

dire

que

les

vertus

soient

visibles

ou

tangibles.

Ilfaut

pourtant

qu'elles

soient

quelque

chose

puis-

qu'elles

sont

des

qualités

dont

laprésence

oul'absence

modi-

fie

lanature

des

âmes.

Dès

lors,

sion

attribue

l'être

àautre

chose

que

lecorps,

ilfaudra

dire

cequ'est

cetêtre,

etPlaton

leur

propose

d'accorder

provisoirement

(et

ilfait

lamême

réserve

pour

lui-même)

quel'être

est

tout

cequi

estcapable

deproduire

oude

subir

une

action,

une

puissance.

Enopposition

complète

avec

lesprécédents,

d'autres

philo-

L\

THÉORIE

PLATO.NICIEM.E

DE

LA

TAIITICIPATION

sophes

que

Platon

désigne

seulement

par

cemot

«amis

des

idées

(248A)

»,soutiennent

que

l'être

estincorporel

leurs

rai-

sonnements

réduisent

enpoussière

cette

réalité

corporelle

que

lesfils

dela

terre

croyaient

saisir

iln'existe

que

des

formes

incorporelles

etpurement

intelligibles.

Ils

distinguent

le

monde

dudevenir,

connu

par

lasensation,

etle

monde

intel-

ligible

que

seule

peut

atteindre

laraison.

Nous

nediscuterons

pas

ici

laquestion

desavoir

quels

sont

ces

philosophes

«amis

des

idées

»on

acru

longtemps

qu'il

s'agissait

des

Mégariqucs

c'est

une

opinion

qu'il

estbien

difficile

desou-

tenir

après

lacritique

deGomperz

11ne

l'est

pas

moins

d'ad-

mettre

avec

cethistorien

qu'il

s'agit

dePlaton

lui-méme

dans

sapremière

manière

onverra

tout

àl'heure

pourquoi.

Lais-

sons

decôté

cette

question

siintéressante

qu'elle

soit,

puisque,

après

tout,

clle

esten

dehors

duproblème

purement

dialec-

tique

que

nous

essayons

d'éclaircir.

Quels

qu'ils

soient,

ces

philosophes

refusent

d'admettre

ladéfinition

del'être

qui

vient

d'être

posée

ilsveulent

bien

accorder

que

tout

cequi

devient

agit

oupàtit,

mais

quand

ils'agit

del'être

lui-même

oudes

idées,

iln'en

estplus

demême,

car

lesidées

sont

absolument

immuables.

Cependant,

ilsaccordent

que

l'âme

connaît

le

devenir

par

lessens

etl'être

par

laraison

cette

communica-

tion

n'implique-t-elle

pas

une

action

etune

passion

sil'âme

connait,

nefaut-il

pas

qu'il

yaitquelque

chose

quisoit

connu

?7

sil'être

estconnu,

nefaut-il

pas,

par

làmême,

qu'il

subisse

une

passion

etpar

conséquent

soit

enmouvement?

Vient

ensuite

unnouvel

argument,

mais

ici

ilnous

faut

inter-

rompre

cette

analyse

pour

essayer

d'éclaircir

unpassage

bien

obscur

qui

adonné

lieu

aux

controverses

les

plus

graves,

et

dont

l'importance

estcapitale

non

seulement

pour

laquestion

qui

nous

occupe,

mais

pour

l'interprétation

duplatonisme

tout

entier.

Voici

d'abord

letexte

dece

passage

«Mais

quoi,

par

Jupiter!

nous

laisserons-nous

facilement

persuader

qu'en

réalité

àl'être

absolu,

™mtv-tlûç

St.

n'appartiennent

nile

mouvement,

nila

vie,

nil'âme,

nil'intelligence

mais

que,

auguste

etvénérable,

dépourvu

depensée,

ilestimmo-

bile

ettoujours

enrepos

(248

E)1»est

tout

naturel

depen-

ser

que

l'être

absolu

™xavis>.û;

5vdont

parle

iciPlaton

dési-

gne

lesidées

etpar

làon

aété

amené

àconclure

que

Platon

attribue

aux

idées

lemouvement,

l'intelligence,

lavieet

même,

comme

l'exige

letexte,

une

âme,

car

l'intelligence

estinsépa-

rable

del'âme.

Ed.

Zeller

invoque

cepassage

enmême

temps

l'azotée

philosophique.

1007

qu'un

texte

duPbilèbe

pour

soutenir

que

lesidées,

selon

Pla-

ton,

sont

descauses

actives

ouefficientes

D'autres

interprètes,

etc'est

leplus

grand

nombre,

refusant

d'étendre

une

telle

assertiou

aux

idées

engénéral,

ont

tiré

duSophiste

cette

con-

clusion

grave

que

Platon,

aumoment

oùilécrit

cedialogue,

modifie

sapremière

philosophie

etla

remplace

par

une

con-

ception

toute

nouvelle.

C'est

ainsi

que

Lutoslawski

prétend

que

dans

ladernière

philosophie

dePlaton

les

idées

nesont

plus

des

réalités

transcendantes,

mais

desimples

concepts.

D'autres

enfin,

sans

aller

aussi

loin,

admettent

qu'il

yaeu

une

évolution

dans

lapensée

dePlaton

et.que

les

idées

lui

apparaissent

désormais

sous

untout

autre

aspect

que

dans

sa

philosophie

antérieure

Sil'ou

entend

comme

oule

fait

d'or-

dinaire

letexte

duSophiste,

ilfaut

indubilablcment

soutenir

que

lesidéesde

Platonsont

non

seulement

des

causes

actives,

mais

des

intelligences

oudes

âmes

end'autres

termes,

que

Platon

soutient

déjà

avant

Aristcte

lathèse

que

défendront

plus

tard

Plotin

etlesAlexandrins.

Mais

pour

affirmer

une

con-

clusion

aussi

grave

ilfaudrait

sans

doute

autre

chose

qu'un

texte

unique,

dont

l'interprétation,

d'ailleurs,

estfort

sujette

àcaution.

Remarquons,

enoutre,

que

lamanière

dont

Platon

parle

des

idées

dans

undialogue

incontestablement

postérieur

anSopluste,

comme

leTimée,

nediffère

pusbeaucoup

destermes

qu'il

emploie

dans

sesouvrages

antérieurs

auSophiste;

ilfaut

bien

dela

subtilité

oudu

parti-pris

pour

découvrir

une

diffé-

rence.

Peut-être

toutes

lesdifficultés

soulevées

àce

sujet

dispa-

raissent-elles

sion

serre

deprès

etsiou

interprète

exactement

lapage

(2i8

E)du

Sophiste.

Ces

mots

«l'être

absolu

»(ta^ïv-elû;

»'v)

nedésignent

pas

directement

lesidées

oule

monde

intel

ligible.

Surtout

ilsne

s'appliquent

pas

nécessairement

à

toutes

lesidées

enparticulier.

Lavraie

traduction

n'est

peut-

être

pas

comme

onl'admet

d'ordinaire,

«l'être

absolu

»ou

«l'être

ensoi»,

mais

«l'être

total

p,«l'être

complet

»,l'être

qui

embrasse

etcontient

enmême

temps

toutes

les«réalités

»,

c'est-à-dire

toutes

les

idées,

etil

ya,

même

dans

lemoude

intelligible,

autre

chose

que

lesidées,

s'il

estvrai

que,

selon

Platon,

l'intelligence

etl'âme,

malgié

leur

parenté

étroite

avec

lesIdées,

ensont

cependant

distinctes.

C'est

del'être

ainsi

entendu

qu'il

aété

question

dans

toute

ladiscussion

précé-

dente,

etde

même

que

l'être

désignait

tout

àl'heure

lechaud

oule

froid,

l'uu

oule

multiple,

lecorporel

oul'incorporel,

il

désigne

icitoutes

lesréalités

sans

distinguer

entre

elles.

Aiusi

LATHEORIE

PLATONICIENNE

DE

LAPARTICIPATION

encore

unpeu

plus

haut,

examinant

les

rapports

del'être

et

dutout'

(tôo>ov),

ilfait

voir

que

sil'être

n'est

pas

untout,

il

yaquelque

chose,

letout,

qui

existe

endehors

del'être.

Par

suite

l'être

estincomplet,

ilse

manque

àlui-même

puisqu'il

laisse

quelque

chose

endehors

delui.

[K*l

nvliv

ye-o

Sv-5

[i-

oXov8t.i

TOïTETTGvOlvat.~àûît'IxsEvo'j

Tcàâoî,

^joè

aCxo-zà

o).ov,

I/Seè?-:ô6'véx'jtou

£'j[A6aivei]

(245

C.)

Lapreuve

que

Platon

l'en-

tend

bieu

ainsi,

c'est

que,

quand

ladiscussion

prend

fin,

nous

voyons

reparaitre

les

expressions

letout

etl'être

Onvoit

par

làque

Platon,

comme

Parménide

lui-même

et

tous

lesautres

philosophes

qui

ont

parlé

del'être,

atoujours

envue

l'être

total

oul'ensemble

del'univers.

11faudrait

d'ailleurs

s'entendre

surla

signification

desmots

hmeîv,

uis/tiv,

k'vb?v

etxnswBai.

Apelt,

dans

son

excellente

édition

duSophnte

(p.131,

note

10),

remarque

avec

beaucoup

deraison

que

Pla-

ton

n'exprime

pas

exactement

savéritable

pensée.

11ne

croit

pas

enréalité

que

zgiêw

désigne

une

action

véritable

ou

-iï/jw

une

passion2.

Les

idées

qu'il

déclare

passives

et

mobiles

entant

qu'elles

sont

connues

sont

enréalité

impas-

sibles

etimmuables.

Mais

ilse

conforme

ici

àl'usage

dela

langue

ilaffirme

que

l'être

estpassif

entant

que

connu

etactif

entant

que

connaissant,

parce

que

les

deux

verbes

sont

l'un

actif,

l'autre

passif,

c'est-à-dire

contraires

La

preuve

qu'il

s'agit

icid'une

vue

toute

provisoire

etextérieure,

c'est,

indépendamment

desraisons

invoquées

par

Apelt,

qu'uu

peu

plus

haut

(247

K),

définissant

l'être

par

lapuissance

d'agir

oude

pâtir,

Platon

s'est

réservé

ledroit

d'exprimer

ailleurs

une

autre

opinion

'fcwcstpffo

<j-

uttî^ov

l^jj-t-c*y.aî

-oltot;

ï-.spvi

hipamsir,.En

supposant

même

qu'on

prenne

ces

termes

ausens

littéral,

ils'agirait

non

pas

d'une

causalité

efficiente

etactive

ausens

ordinaire

dumot,

mais

d'une

cau-

salité

purement

idéale,

restreinte

uniquement

àl'acte

decou-

naître

oud'être

counu.

On

n'aurait

pas

ledroit

deconclure

que

les

idées

eugénéral

sont

des

causes

actives.

Deplus

il

s'agit

icinon

d'ldentification,

mais

departicipation,

c'est

ce

qu'atteste

avec

évidence

l'expression

(r.%pzhin)

quidésigne

la

1249

D"o

r,d.vb-T¡.d"

~O-3"p16:x~

macty.1VT¡"tCty.x!r=r.mr~N.€vx,

-.h5v

-e-a:-h

-Ai

Çuvançutapx

Aèysiv.

Cesont

àpou

près

lesmol»

mêmes

deParménide

svxaïTratv.

2Des

deux

interprétalions

proposées

parApelt(Sophiste,

Lipsiae,

1897,

pliO,note

la],

c'estla

seconde

quinous

paraît

comme

lui

3dplus

acceptable.

L'AHYGC~

YHILOSOPIIIQUE.

190i

présence

d'un

attribut

etnon

pas

l'identité

dusujet

etde

l'attribut

lemême

mot

estemployé

dans

lePhêdon

pour

exprimer

lasimple

participation.

Par

làil

entend

que

l'être

dont

onparle

nes'identifie

pas

entièrement

avec

lesattributs.

qu'on

affirme

delui,

mais

s'unit

seulementàeux

«unirsans

confondre

»,voilà

précisément

cequi

constitue

laparticipa-

tion.

L'être,

diten

propres

termes

Platon

quelques

lignes

plus

loin,

participe

aumouvement

etau

repos

siétroitement

qu'il

doit

être

nécessairement

ouen

mouvement

ouen

repos.

Cepen-

dant

onpeut

reprendre

icil'argument

déjà

invoqué

àpropos

duchaud

etdu

froid

etmontrer

que

l'être

nese

confond

ni

avec

lemouvement

niavec

lerepos,

puisqu'alors

ces

deux

contraires

irréductibles,

lemouvement

etlerepos,

seconfon-

draient

entant

qu'identiques

àl'être.

Tout

enparticipant

du

mouvement

etdu

repos,

l'être

estdonc

une

troisième

chose

ilestàpart:

lemouvement

etle

repos

nerésultent

pas

desa

nature,

ilss'yajoutent.

Lelien

qui

lesunit

est,

comme

nous

dirions

aujourd'hui

,un

lien

synthétique

etnon

analytique.

La

formuleplatoniciennesiguifiedonc,

non

pascommeon

l'entend

sisouvent,

que

l'idée

désignée

par

lemot

«être

»,estdouée

par

elle-même

ouessentiellement

demouvement,

d'âme,

de

sagesse

etd'intelligence,

mais

simplement

que

l'être,

pris

en

général,

participe

aumouvement,

àl'intelligence,

àlavieetà

lapensée,

qu'on

peutenafflrmertous

cesattributs,ou

end'autres

termes

qu'il

pense,

qu'il

vitet

qu'il

connaît.

Le

même

texte

signifie

aussi

que

lemouvement,

l'intelligence,

l'âme

etla

pensée

nesont

pas

exclus

del'être

total,

maintenus

endehors

delui

comme

levoudrait

lathèse

soutenue

par

les

amis

des

idées;

mais

qu'ils

sont

aussi

des

réalités,

qu'ils

existent

et

font

partie

non

seulement

dumonde

sensible,

mais

encore

du

inonde

réel

ouintelligible

etc'est

encore

cequ'attestent

les

expressions

mêmes

dePlaton.

(219

B)

Kai

-.bx'.vojpsvov

8»,

xx;:xJn¡IJ"

anp~wpns~ov

cb;ôvn.

Ladoctrine

que

soutient

icil'auteur

duSophiste

n'implique

doncà

aucun

degré

l'abandon

delathéorie

desidées,

nimême

une

modification

àcette

théorie.

Les

idées

prises

enelles-

mêmes

sont

toujours

cequ'elles

sont

dans

tous

lesdialogues,

séparées

etimmuables,

mais

elles

peuvent

aussi

sous

un

autre

point

devue

serapprocher

etse

mêler.

Ilestsurprenant

qu'on

aitpu

seméprendre

sur

cepoint

sil'on

prend

garde

que

dans

letexte

même

dont

ils'agit

Platon

affirme,

comme

partout,

que

laconnaissance

suppose

deux

conditions

uu

LA

THÉORIE

PLATONICIENNE

DE

LA.

PARTICIPATION

objet

immuable

qui

estconnu

(-0za-à

ix'm

x=ùùsaitio;

m!rE?i

Toaùià

SoxeïïOLywpii;

a^iœt»;'{ïizaQxi

r.oz'«v

OjSajiâj;.

–(240

B-C),

etla

connaissance

même

qui

est

unmouvement,

etqu'il

faut

combattre

avec

une

égale

ardeur,

sion

veut

sauver

la

science,

ceux

qui

disent

que

tout

esten

mouvement

etceux

qui

disent

que

tout

esteu

repos

ilne

s'agit

donc

pas

d'aban-

donner

lathèse

suivant

laquelle

ilyades

choses

absolument

enrepos.

En

pénétrant

dans

lemonde

réel,

lemouvement

etl'âme

n'altèrent

pas

lanature

des

idées.

Enfin,

cequ'il

a

voulu

prouver

par

là,c'est

que

l'être,

pris

dans

son

ensemble,

participe

aunon-élre;

end'autres

termes

introduire

lemouve-

ment

etla

pensée

dans

lemonde

réel

comme

l'exige

lesens

commun,

c'est,qu'on

leveuille

ounon,

introduire

unélémentde

contradiction

etainsi

sevérifie

cette

assertion

sisouvent

répé-

tée

par

Platon

que

l'idée

del'être

neprésente

pas

moins

de

difficulté

que

l'idée

dunon-être,

etc'est

ceque

nous

avons

déjà

rencontré

dans

l'analyse

duVannénids.

Nous

pouvons

maintenant

revenir

àla

question

principale

etcontinuer

àchercher

lanature

duSophiste.

Nile

repos

ni

lemouvement

nerésultent

delanaturedc

l'être

cependant

il

faut

detoute

nécessité

que

l'être

soit

enrepos

ouen

mouvement,

carc'est

unpoint

surlequel

Platon

netransige

pas

iln'yapas

demilieu

entre

cesdeux

termes.

Quelle

que

suit

ladifficulté

que

présente

une

telle

affirmation,

onne

doit

donc

pas

hési-

ter

àconsidérer

l'être

comme

pouvant

s'unir

aurepos

etau

mouvemeut,

oucomme

participant

àl'un

etàl'autre.

Onosera

donc

affirmer

dumême

être

plusieurs

choses,

luidonner

plu-

sieurs

noms,

dire

par

exemple

que

l'homme

est

bon

etqu'il

aencore

d'autres

qualités

ouencore

qu'il

estàla

fois

unet

plusieurs:

oune

selaissera

pas

arrêter

par

les

chicanes

de

ceux

qui

voient

làdes

contradictions.

Seulement,

dece

que

certains

genres

peuvent

s'unir

entre

eux,

ilne

s'ensuit

pas

quetous

lepuissent;

etdansun

passage

que

nous

avons

déjà

cité,

Platon

démontre

qu'à

côté

des

genres

qui

peuvent

s'unir

àd'au-

tres

ilen

estquelques-uns

qui

résistent

àtoute

combinaison.

Quelques-uns

peuvent

s'unirà

tous,

quelques-uns

s'accordeut

seulement

avec

unpetit

nombre.

Distinguer

ces

différentes

classes,

voilà

l'objet

dela

science

supérieure,

dela

dialecti-

que.

C'est

làqu'on

trouvera

lephilosophe

lorqu'on

lecher-

chera

mais

ils'agit

d'abord

d'en

finir

avec

leSophiste.

Ilne

saurait

être

question

d'examiner

endétail

toutes

les

idées

qui

peuvent

s'accorder

les

unes

avec

les

autres

etde

l'Ai>NIÏE

PHILOSOPHIQUE.

1907

résoudre

tous

lesproblèmes

quisont

l'objet

dela

dialectique.

Mais

onpeut

dumoins

examiner

quelques

unes

des

idées

les

plus

hautes

etse

rendre

compte

deleurs

rapports

entre

elles. Nous

voici

arrivés

àla

théorie

des

cinq

genres:

l'être,

le

mouvement,

lerepos,

lemême

etl'autre,

siobscure

etsi

abs-

traite,

quiestle

point

culminant

detoute

cette

discussion

et,

onpeut

ledire

sans

exagération,

laclef

devoûie

detout

le

système

platonicien.

Essayons

d'indiquer

nettemeut

(2j-4

C

sqq),

lesdivers

moments

decette

subtile

démonstration.

D'abord

Platou

établit

que

les

cinq

genres

sont

irréductibles

l'un

àl'autre.

L'étre

peut

s'unir

aumouvement

etau

repos,

car

ilssont

tous

deux,

mais

ilne

seconfond

niavec

l'un

ni

avec

l'autre,

cars'il

était

identique

àl'un

d'eux,

lemouvement

etle

repos

neferaient

qu'un

(254

D284

E)et

Platon

nous

a

déjà

deux

outrois

fois

affirmé

(234

Aet

251E,2S2

D)que

ces

deux

termes

nesauraient

seconfondre

Ces

trois

genres

étant

distincts,

chacun

d'eux

estle

même

que

lui-même

etautre

que

lesautres

voilà

donc

deux

genres

nouveaux,

lemême

etl'autre.

Ils

sont

dillérents

dumouve-

ment

etdu

repos,

carce

qu'on

affirme

micommun

dumouve-

mcutou

durepos

nesaurait

seconfondre

avec

l'un

d'eux

sans

que

tous

deux

devinssent

identiques.

De

même

l'être

dillère

dumême,

car

s'il

seconfondait

avec

lui,

lemouvement

qui

participe

del'étrese

confondrait

avec

lemême,

cequ'ou

vieul

demontrer

impossible.

Enfin,

l'être

diffère

del'autre,

car

l'autre

estuneidée

essentiellement

relative

sion

proclamait

l'identité

del'être

etde

l'autre

ils'ensuivrait

que

rien

n'est

jamais

ensoiou

qu'il

n'y

apoint

d'être

(254

E25S

B).

Seule-

ment

ilfaut

ajouter

que

l'autre

setrouve

répandu

entoute

chose,

chaque

être

étant

autre

que

lesautres

(235

B).

Quoique

l'être

nesoit

jamais

autre

par

sanature,

ill'est

toujours

par

lefait

qu'un

être

estdistinct

d'un

autre,

sibien

que

l'idée

de

l'autre

aautant

d'étendue

que

l'idée

del'être.

Ilyadonc

bien

ciuq

genres

irréductibles

etil

nesaurait

yeu

avoir

moins On

remarquera

que

lenerf

decette

argumentation

estl'irré-

duclibilité

dumouvement

aurepos.

Bien

loin

donc,

comme

onl'a

dit

quelquefois,

dedéduire

les

cinq

premiers

genres

oude

les

faire

sortir

del'idée

del'être,

Platon

les

pose

dès

ledébut

comme

essentiellement

dilférents

lesuns

des

autres.

De

cette

distinction

des

genres

entre

eux,

résulte

nue

impor-

LA

THKOREB

l'LATOXlCIENIVE

DE

L1PARTICIPATION

tante

conséquence

c'cst

que

malgré

l'union

oula

partici-

pation

dont

nous

avons

tant

defois

parlé,

chacun

d'eux

ren-

ferme

unélément

d'opposition

etd'altérité;

par

suite

ils

présentent

tous

des

caractères

opposés.

Chacun

d'eux

est

en

lui-même

etparticipe

deson

contraire,

sauf

lemouvement

etle

repos;

eneffet,

lemouvement

est

autre

que

lerepos,

Platon

l'adéjà

plusieurs

fois

affirmé.

Participe-t-il

aussi

du

repos

?H

ya

ici

unpassage

assez

embarrassant

pour

que

Schleiermacher

aitcru

que

letexte

dePlaton

était

incomplet,

etil

n'a

pas

hésité

àajouter

quelques

ligues

pour

rétablir

le

véritable

sens.

Cette

correction

n'est

peut

être

pas

indispen-

sable,

mais

ilfaut

avouer

qu'il

yadans

laformule

dePlaton

une

ellipse

assez

forte.

«Si,dit-il,

lemouvement

participait

aurepos

etle

repos

aumouvement,

nous

nedevrions

pas

plus

nous

faire

scrupule

àdire

qu'il

yaun

mouvement

stable

etun

repos

mouvant

que

nous

n'hésiterons

tout

à

l'heure

àdire

que

lemouvement

est

àla

fois

etqu'il

n'est

pas

lemême;

qu'il

est

àla

fois

etqu'il

n'est

pas

l'être1.

»

Mais

c'est

précisément

cequ'il

refuse

d'admettre

pour

des

rai-

sons

antérieurement

indiquées;

cequi

prouve

qu'il

l'entend

ainsi,

c'est

qu'il

répète

àplusieurs

reprises

que

lemouvement

etle

repos

sont

absolument

opposés,

etnous

avons

vutout

àl'heure

que

cette

oppositiou

estle

nerf

detoute

ladémons-

tration

précédente.

Tandis

que

trois

genres,

l'être,

lemême

etl'autre

sont,

malgré

leur

différence,

deceux

qui

peuvent

se

combiner

entre

eux,

lemouvement

etlerepos

sont

dunombre

des

genres

incommunicables;

entre

eux

iln'y

apas

une

opposition

decontrariété,

mais

une

opposition

contradictoire.

Ilsuffit

d'ailleurs,

pour

ladémoustratiou

présente,

d'avoir

rappelé

que

lemouvement

estautre

que

lerepos.

Demême

lemouvement

estle

même

que

lemême

etiln'est

pas

lemême

ilestle

même

sion

considère

sanature

ousa

définition;

iln'est

pas

lemême

puisqu'il

change

toujours

Il

1Il

nous

paraît

impossible

d'iidmettie

aucune

desdeux

interprétations

proposées

parApell(p

174,note10)Nousécartons

lapremière

palqu'elle

repobe

surune

intejprêtai

ion,quiparait

inexacte,

delapage

249

La

paraît

bien

subtile

etartificielle

etd'ailleurs

n'est

autoiisée

par

aucuntexte.

Nil'une

nil'iiutie

enlin

nefunt

contradiction

qui

paraît

exister

entre

cepassage

etceuï

oudu

mouvement

etdu

repos

estexpressement

affirmée

L'interprétation

quenous

donnons

ici,etquiestcelle

deSchleiennachcr,

supprime

aucontraire

lacontradic-

tion,

puisque

laparticipation

dumouvement

etdu

repos,

niée

formelle-

mentparPlaton,

n'estprésentée

iciquecomme

unehypothèse.

l'année

philosophique.

1901

nefaut

pas

s'effrayer

decette

contradiction,

puisque

c'est

sous

des

rapports

différents

que

les

contraires

sont

affirmés.

De

même

ilestet

iln'est

pas

autre

que

l'autre.

Autre

que

lerepos,

lemême

etl'autre,

lemouvement

pour

les

mêmes

raisons

estautre

que

l'être,

quoiqu'il

soit.

En

d'autres

termes,

ilestet

iln'est

pas;

ilyaen

1ui

beaucoup

d'être

etbeaucoup

denon-être,

etcomme

tous

les

genres

participent

àl'autre

ainsi

qu'on

l'avu,

puisque

chacun

d'eux

estautre

que

les

autres,

ilsparticipent

tous

aussi

dunon-être.

En

posant

laréalité

dugenre

del'autre,

nous

avons

donc

posé

laréalité

dunon-être

etcomme

lanature

del'autre,

ainsi

qu'on

l'avu,

s'étend

aussi

loin

que

celle

del'être,

et

qu'elle

estrépandue

entoutes

choses,

ilyapartout

dunon-

être

àcûté

del'être.

Tout

être

est

culuimême,

mais

étant

autre

que

tous

lesautres,

iln'est

pas

autant

defois

qu'il

ya

des

êtres

autres

que

lui

ainsi

setrouve

démontrée

l'existence

dunon-être.

Platon

emploie

des

expressions

singulièrement

fortes

pour

affirmer

cette

réalité

dunon-être.

Ilasa

nature

propre.

Ilestmême

ungenre

ouune

idée

Saréalité

n'est

en

aucune

façon

inférieure

àcelle

del'être

luimême.

"258

Bos".

GxppoovT*?|3r(H-^e'.vov.-côjjLr;ov

^EfiœLu};sait

~r(vauToù

^'jt'.v

ejfov

èvxpiûfiov

TtijvTioXÀùv

ov-cwveîoo;£v;

2o8

D'II[i£Ïç

Siysoù

jjiovov

(OîI'tu

-A(iTjÔvt*ànsSï^a^ev,

àXXàv.n.\to

dfcç

oviffjivzï

ft'vtou

(jl^

or-oq

àït;ç/,ïcînîO»

imvSvtiw;ic,^t,5v.Il

faut

entendre

seule-

ment

que

lenon-être

n'est

pas

lecontraire

absolu

del'être

Platon

déclare

expressément

qu'il

laisse

entièrement

de

côté

lenon-être

(258

E)absolu

oula

contradiction

del'être

ils'agit

donc

d'un

être

autre

que

l'être

lenon-être

cen'est

pas

lenéaut,

mais

l'autre.

Toutceci

peut

s'expliquer

par

des

exemples

lenon-beau

n'est

pas

unpur

néaut,

c'est

quelque

chose

deréel,

dilïérent

dubeau;

lenon-graud

n'est

pas

la

négation

delagrandeur,

mais

quelque

chose

d'autre

puisqu'il

désigne

aussi

bien

lepetit

que

l'égal.

«Les

choses

précédées

d'une

négation

sont

donc

tirées

dela

nature

desêtres

elles

sont

tout

aussi

réelles

que

lesêtres

mêmes

dont

elles

sont

la

négation

(257

C).

»Eu

d'autres

termes,

lenon-être

existe

au

même

degré

que

l'être.

Lanature

del'autre,

comme

celle

de

l'être

répandue

entoutes

choses,

sesubdivise

enune

multitude

departies

dont

chacune

estréelle

comme

elle.

Ainsi

setrouve

démontrée

dialectiquement

cette

existence

dunon-être

qui

apparaissait

tout

d'abord

comme

unscandale.

Nous

voilà

bien

loin

dela

maxime

del'armènide

non

seulement

nous

avons

LA

THÉOME

PLATONICIEXÎsE

DE

LAPAHTICIPATION

prouvé

que

lenon-être

est,

mais

nous

avons

ditce

qu'il

est.

Leproblème

posé

par

leSophiste

estdonc

résolu.

Platon

reconnaît

d'ailleurs

que

sadémonstration

n'est

pas

entièrement

satisfaisante;

ilsent

bien

cequ'elle

ade

détourné

etde

violent,

mais

ils'en

contente

faute

demieux

etilattend

qu'on

leréfute

(259

A)

c'est

ceque

personne

n'a

tenté.

Bien

loin

delà,la

solution

qu'il

adonnée

duproblème

s'est

imposée

àl'esprit

humain

etla

difficulté

sera

désormais

considérée

dans

laphilosophie

grecque

comme

définitivement

tranchée.

L'existence

dunon-être

une

fois

établie,

toutes

lesdifficultés

que

nous

avons

rencontrées

sur

notre

route

deviennent

aisées

àrésoudre.

D'abord

laquestion

sicontroversée

del'erreur

se

rattache

étroitement

àcelle

dunon-être.

Le

discours

oula

proposition

sont

quelque

chose

deréel

comme

tels

ilscon-

tiennent

del'être

etdu

non-être.

Pas

plus

quand

ils'agit

du

discours

que

quand

onparle

del'être,

onne

peut

considérer

leséléments

dont

ilse

compose

comme

isolés

etindépendants

les

uns

des

autres.

Une

série

denoms,

une

série

deverbes

n'offrent

pas

desens

etne

constituent

pas

undiscours

il

est

nécessaire

d'unir

les

uns

avec

les

autres

comme

nous

avons

vutout

àl'heure

qu'il

estnécessaire

d'unir

les

genres

entre

eux.

Mais

dans

lesdeux

cascette

combinaison

peut

être

oune

pas

être

correcte.

Elle

sera

correcte

sion

dit

par

exemple

Théétète

est

assis

elle

nele

sera

pas

sil'on

dit

Théétète

vole.

En

exprimant

cedernier

discours,

ondit

quelque

chose

puisqu'on

parle

deThéétète,

etvoilà

cequi

donne

satisfaction

àl'objection

duSophiste;

mais

ondit

quelque

chose

qui

n'est

pas,

c'est-à-dire

autre

chose

que

ce

qui

est,

etcela

estpossible

puisque

lenon-être

nediffère

pas

del'autre.

Le

Théétète

avait

prouvé

que

l'erreur

neconsiste

pas

dans

lasimple

méprise,

c'est-à-dire

àconfondre

une

chose

avec

une

autre,

cequiesttoujours

impossible,

elle

consiste

à

unir

d'une

manière

incorrecte

une

chose

avec

une

autre.

L'er-

reur

nese

produit

jamais

dans

laconnaissance

directe

d'une

idée

oud'une

chose,

mais

seulement

dans

lacombinaison

ou

lasynthèse

dedeux

idées

oude

deux

choses,

etcette

proposi-

tion

estdevenue

par

lasuite

une

vérité

banale

ouuu

axiome

évident.

Lapossibilité

del'erreur

une

fois

établie,

ils'ensuit

qu'il

peut

yavoir

unart

defabriquer

des

simulacres

oudes

fantômes,

etainsi

ladéfinition

duSophiste

proposée

tout

à

l'heure

setrouve

justifiée.

L'existence

del'erreur

n'est

pas

laseule

difficulté

que

l'année

piiilosophiqce.

lii07

résoud

l'argumentation

duSophiste;

Platon

indique

eupas-

saut,

d'une

manière

indirecte

etpar

allusion,

lasolution

de

tous

lesproblèmes

antérieurement

posés

Nous

avons

déjà

montré,

enterminant

l'étude

duParménide,

comment

ladernière

etla

plus

grave

des

objections

soulevées

par

cedialogue,

c'est-à-dire

l'impossibilité

dela

participation,

disparait

sion

admet

que

lacommunication

des

genres

est

soumise

àcertaines

règles

etqu'il

appartient

àune

science

supérieure,

ladialectique,

dedéterminer

dans

quel

caselle

est

légitime,

dans

quel

cas

elle

nel'est

pas.

On

trouve

encore

disséminée

dans

leSophiste,

mais

toujours

dérivée

dumême

principe,

laréponse

aux

principales

objections

suscitées

par

leParménide.

Nous

avons

signalé

les

textes

dece

dernier

dialogue

oùPlaton,

après

avoir

exposé

l'objection

relative

à

lascience

divine

etàlascience

humaine,

insiste

àdeux

reprises

sur

l'idée

que

cette

objection

n'est

pas

insoluble

pour

une

science

plus

parfaite

etplus

profonde

que

celle

dujeune

Socrate.

Ne

trouva-t

onpas

l'explication

dela

diversité

des

sciences

distinctes

delascience

unique

dans

lepassage

(257

C),

oùil

est

dit

que

l'idée

del'autre

étant

répandue

entoute

chose

etlesparties

del'autre

ayant

chacune

son

existence,

il

enestde

même

dela

science

qui

setrouve

ainsi

être

àla

fois

une

etmultiple

`IIOx~_?ou

~aovp5a:ç~x:v~cxu

it~xY.¡¡:it¡:.p¡..r.be:tt

x~O:btE-p'sz:Q:r,.

(Itûç;

–ilia

[jl£vlit',

itouv.

èxîwi],

zb&[

xqj

t-yvijASvov[xlpo;

aû-rf^

e/.aTcovà^opwO'îv

èiïtovufiîav

isyv.

Tivikavzr,<;toîav

otàtt-'})%\ti/vxi

tViui

XeyojiEva;v.a\Èïtl(teï;(lai.

Ilest

difficile

dene

pas

rapprocher

deces

passages

les

ligues

suivantes

duSophiste

lorsque

Platon

adéfini

ladialec-

tique

(2o3

E)

«Par

Jupiter

sommes-nous

tombés

ànotre

insu

dans

lascience

des

hommes

libres

etse

peut

ilbien

qu'en

cherchant

d'abord

lesophiste

nous

ayons

trouvé

lephi-

losophe

?.Diviseren

genres

etne

pasprendre

lamême

espèce

pour

différente,

nipour

lamême

celle

qui

est

différente,

ne

dirons-nous

pas

que

c'est

lafonction

dela

science

dialec-

tique?

Ou

nepeut

guère

douter

qu'en

s'exprimant

ainsi

Platon

seflatte

d'avoir

découvert

lascience

universelle,

le

point

devue

supérieur

oùtoutes

les

difficultés

apparaissent

comme

résolues,

lesénigmes

comme

éclaircies.

Un

des

caractères

quidistinguent

leSophiste

duParménide.

c'est

qu'il

n'y

estplus

question

dela

participation

dumoude

sensible

aux

idées,

mais

beulement

dela

participation

des

LA

THÉORIE

PLATONICIENNE

DE

IAPABTICIPATIOX

idées

entre

elles.

C'est

ceque

nous

avons

vueu

étudiant

les

cinq

genres

les

plus

élevés,

c'est

ceque

montre

encore

lepas-

sage

qui

suit

immédiatement

celui

que

nous

venons

deciter

«Ainsi

l'homme

capable

defaire

cela

distingue

comme

il

convient

une

seule

idée

répandue

dans

une

multitude

d'autres

qui

existent

chacune

séparément

etbeaucoup

d'autres

diffé-

rant

lesunes

des

autres,

mais

enveloppées

dans

une

seule

idée

qui

endiffère

etencore

une

idée

commune

àtoutes

les

autres

etgardant

cependant

son

unité

enfin

d'autres

entière-

ment

distinctes

les

unes

des

autres

oWjv

ôfs

toûio

S'jvïtJ;

Spàiv^Jav

EoÉjev3:àTtoXAùJV,evoç

kxzj-coy

7,ît[xlvQJ^wptç,

r.x-t~.rt5:aT£-s-

|jiÉv/(v\r.x'/w;

SiaisOxv^at,

r.xi

TioXÀiç

l-:spa;

«aXï^wv

Otto

fjuSst?w0ev

irepts^Ofjivaç

y.a![jifxvau

01'6Xwytto),).u>vbi

t'A£jv7]jjljjlIvt,v,

y.%1îio/Xà^

Xujpisr-.ir.riSicupmixiva;;

233D.C'est

làce

quis'appelle

savoir

dis-

cerner

parmi

les

genres

ceux

qui

peuvent

entrer

encommu-

nauté

les

uns

avec

lésautres

etceux

qui

nele

peuvent

pas.

»

Montrer

comment

une

même

idée,

sans

cesser

d'être

elle-

même,

peut

être

présente

dans

une

multitude

d'autres,

c'est

la

participation

même,

etc'est

l'objet

dela

dialectique.

Quand

onarésolu

cette

question,

onn'a

plus

besoin

desavoir

siles

idées

sedivisent

entre

leschoses

àla

manière

d'un

voile

qui

couvre

plusieurs

hommes

ouà

lamanière

dela

lumière

solaire

qui

reste

unique

euéclairant

toutes

choses;

onn'a

plus

même

àse

poser

laquestion

desavoir

siles

choses

sen-

sibles

sont

unies

aux

idées

par

unrapport

deressemblance,

l'objection

dutroisième

homme

perd

toute

saportée.

Les

rap-

ports

entre

leschoses

etlesidées

sont

sans

doute

les

mêmes

que

ceux

des

idées

entre

elles

Aristote

aurait

bien

dûs'en

souvenir

quand

ilinsiste

sicomplaisamment

sur

l'objection

dutroisième

homme.

Laseconde

difficulté

duParméuide,

celle

qui

est

relative

àl'existence

d'idées

correspondant

aux

choses

les

plus

misé-

rables

etlesplus

viles,

estrésolue

enpassant

dans

letexte

du

Sophiste

oùPlaton

explique

ladivision

des

genres

d'il

n)

«Dans

lebut

deconnaître

l'esprit

detous

les

arts

notre

méthode

cherche

àvoir

ceux

qui

sont

dela

même

famille

ou

d'une

famille

différente

etelle

les

tient

tous

dans

une

égale

estime

Lorsqu'il

yeu

aqui

seressemblent,

elle

nejuge

pas

les

uns

plus

ridicules

que

les

autres,

eten

fait

dechasse,

elle

1.Noussuivons,

dans

l'interprétation

dece

passage

difficile,

l'opinion

u'Apelt

(p166,note

12),peudifférente

d'ailleurs

decelle

deBonit/.

Piliom.

–Annéejihilos.1907.

3

l'année

PHILOSOPHIQUE,

1907

neregarde

pas

l'art

dedétruire

leshommes

àla

guerre

comme

plus

noble

quel'art

dedétruire

lespoux,

maiselle

croitqu'il

donne

plus

devariété.

»"

Rappelons

enfin

lapremière

question

poséeparSocrate

au

débutdu

l'arménide,

àlaquelle,

avec

l'approbation

souriante

desesdeux

interlocuteurs,

ilattache

laplus

haute

impor-

tance,

celle

quidomine

enquelque

sorte

tout

ledialogue

et

quePlaton

considère

comme

siessentielle

qu'il

yrevient

encore

dans

lePhilèhe

«Siquelqu'un

commençait

pardis-

tinguer

etséparer

lesidéesabsolues

deschoses

dont

jeviens

deparler,

telles

que

laressemblance

etla

dissemblance,

l'unité

etlapluralité,

lereposetlemouvement

ettoutes

les

autres

idéespareilles,

etqu'ensuite

ildémontrât

qu'elles

peu-

vent

être

mêlées

lesunes

avec

lesautres

etséparées

lesunes

desautres,

jeserais

frappé

d'étonnement,

Zénon

Ceque

j'admirerais

encore

davantage,

ceserait

s1quelqu'un

pouvait

memontrer

que

cette

difficulté,

setrouvant

impliquée

sous

toutes

lesformes

dans

lesidées

elles-mêmes,

existe

pour

les

choses

purement

intelligibles

comme

vous

avez

moutréqu'elle

existe

pour

leschoses

visibles.

»C'est

laquestion

même

qui

estrésolue

dans

leSophiste

par

toute

ladiscussion

relative

aunon-être,

etdont

Platon

présente

triomphalement

la

solution

dans

letexte

que

nous

veuons

deciter.

Telle

est,dans

sesgrandes

lignes,

lathéorie

delapartici-

pation

quisedégage

duParménide

etdu

Sophiste

elle

pré-

sente

sans

doute

encore

bien

desdifficultés.

Ilestregretta-

blequePlaton

nel'ait

pastraitée

avec

plus

dedéveloppement

dans

sesdialogues,

etnous

serionscurieuxde

savoircomment

ilcomplétait

cesbrèves

indications

dans

1enseignement,

qu'au

témoignage

d'Aristote

ildonnait

enparticulier

àses

disciples.

Telsqu'ils

sont,lesdeux

dialogues

nous

permet-

tent

denous

faire

une

idée

dela

partie

laplus

haute

du

platonisme.

Touslesproblèmes

relatifs

àl'être

seréduisent

à

unseul,quiest

lerapport

desidées

entre

elleset

surtout

desidéeslesplus

hautes,

celles

auxquelles

participe

tout

ce

quiexiste,

endehors

desquelles

rien

nepeut

exister

niêtre

conçu.Lescinq

genres

duSophiste,

nous

avonseu

l'occasion

dele

remarquer,

sont

distincts

lesunsdes

autres,

irréductibles

entre

eux,

quoiqu'il

yaitentre

eux

rapports

nécessaires

etquel'un

appelle

l'autre;

lelien

quilesunit

estun

lien

synthétique

ilsne

sont

pas

déduits

d'un

principe

unique

LA

TIIEORIE

PLATOMCIENNE

DE

LA

PARTICIPATION

eommedes

conséquences

implicitement

conçuesdans

unmême

principe

par

unraisonnement

denature

syllogistique

fondé

surle

principe

d'iudentité.

C'est

plutôt

contre

les

applications

abusives

dece

principe

qu'est

dirigée

toute

lapolémique

plato-

niçienne

c'est

enréalité

l'idée

derelation

oude

relativité

que

Platon

introduit

dans

les

plus

hautes

spéculations

etqu'il

substitue

àl'absolu

tet

que

l'avait

conçu

l'éléatisme.

Quels

que

soient

les

emprunts

qu'Aristote

eufondant

lalogique

a

pufaire

àsou

maître,

c'est

d'un

esprit

tout

autre

que

s'inspire

laméthode

platonicienne

elle

diflère

profondément

dela

logique,

telle

surtout

qu'on

l'aconçueet

défînieaprès

Aristoste;

leseul

nom

qui

luiconvienne

est

celui-là

même

qu'elle

s'est

donnée

lenom

dedialectique.

Ilne

faut

pas

que

les

nom-

breuses

objections

tant

defois

dirigées

par

Aristote

etd'autres

philosophes

contre

laméthode

platonicienne

nous

enfasse

méconnaître

l'originalité

etla

hardiesse. VICTOR

Rrochard,

deInshlutut