place de l’imagerie dans les syndromes parkinsoniensla lettre du neurologue • vol. xviii - no 1...

7
12 | La Lettre du Neurologue • Vol. XVIII - n o 1 - janvier 2014 MISE AU POINT Place de l’imagerie dans les syndromes parkinsoniens Interest of imaging techniques in parkinsonian syndromes S. Thobois*, T. Danaila*, C. Scheiber**, E. Broussolle* * Université de Lyon, faculté de mé- decine Lyon-Sud – Charles-Mérieux ; CNRS, UMR-5229, Centre de neuro- science cognitive, Bron ; Hospices civils de Lyon, hôpital neurologique Pierre-Wertheimer, Centre expert Parkinson, service de neurologie C, Lyon. ** Service de médecine nucléaire, hôpital neurologique, Lyon. L es techniques d’imagerie cérébrale connaissent des progrès constants, et représentent à la fois un outil indispensable au clinicien dans sa pratique quotidienne mais aussi un instrument fondamental en recherche physiopathologique. Les apports de l’imagerie cérébrale, qu’il s’agisse d’imagerie morphologique (IRM) ou fonction- nelle (tomographie à émission de positons [TEP], tomographie par émission monophotonique [Single Photon Emission Computed Tomography – SPECT] ou IRM fonctionnelle [IRMf]), sont particulièrement importants dans le cadre des syndromes parkin- soniens. Nous aborderons dans cet article la place actuelle et future de ces outils dans la pratique quoti- dienne, puis leur apport en recherche. Techniques L’IRM cérébrale est l’examen de choix pour l’ima- gerie morphologique, mais d’autres techniques sont en développement telles que l’échographie de la substance noire. L’IRM est utile en routine mais également en recherche, notamment par le biais de l’IRM fonctionnelle ou des analyses volumétriques. L’imagerie fonctionnelle par SPECT permet de mesurer en routine la dénervation dopaminergique (SPECT au 123 I-ioflupane ou DaTSCAN), mais aussi la perfusion cérébrale (Tc-99m-HMPAO) ou l’inner- vation sympathique cardiaque postganglionnaire par scintigraphie myocardique (MIBG). L’intérêt majeur de la TEP est la possibilité de marquer par des isotopes différents n’importe quelle molécule. La TEP est donc essentiellement un outil de recherche permettant d’étudier notamment le métabolisme cérébral (fluorodésoxyglucose [FDG]) ou le système dopaminergique présynaptique ( 18 F-Dopa – activité de la dopadécarboxylase –, 11 C-PE2I – transporteur de la dopamine –, 11 C-tétrabénazine – vésicule mono-aminergique –) et postsynaptique ( 11 C-raclo- pride – récepteurs dopaminergiques D2 –, 18 F-fally- pride). La TEP permet également d’étudier d’autres systèmes de neurotransmission, tels que le système sérotoninergique ( 18 F-MPPF – récepteurs 5HT1A –, 11 C-DASB – transporteur de la sérotonine). Les dépôts de substance amyloïde peuvent aussi être détectés et quantifiés grâce à la TEP ( 11 C-PIB). Enfin, l’utili- sation d’H 2 15 O permet de mesurer les variations de perfusion cérébrale dépendant de tâches réalisées ou de l’application de thérapeutiques pharmacologiques ou chirurgicales. Utilité de l’imagerie cérébrale en pratique quotidienne Affirmer l’atteinte dopaminergique Devant un tremblement atypique (tremblement unilatéral d’attitude), il est parfois difficile d’affirmer ou d’éliminer un syndrome parkinsonien dégénératif débutant. Il y a une tendance à surdiagnostiquer, sur des bases purement cliniques, la maladie de Parkinson (1). Le taux d’erreurs diagnostiques est d’environ 20 %, et ce d’autant plus que l’on se situe tôt dans l’évolution clinique. En ce qui concerne le tremblement essentiel, le taux d’erreurs diagnos- tiques est aussi élevé (2) . Le DaTSCAN, dont l’une des indications d’autorisation de mise sur le marché (AMM) est le diagnostic différentiel entre tremblement atypique et syndrome parkinsonien, peut s’avérer utile, en mettant éventuellement

Upload: others

Post on 07-Feb-2021

1 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

  • 12 | La Lettre du Neurologue • Vol. XVIII - no 1 - janvier 2014

    MISE AU POINT

    Place de l’imagerie dans les syndromes parkinsoniensInterest of imaging techniques in parkinsonian syndromes

    S. Thobois*, T. Danaila*, C. Scheiber**, E. Broussolle*

    * Université de Lyon, faculté de mé-decine Lyon-Sud – Charles-Mérieux ; CNRS, UMR-5229, Centre de neuro-science cognitive, Bron ; Hospices civils de Lyon, hôpital neurologique Pierre-Wertheimer, Centre expert Parkinson, service de neurologie C, Lyon.

    ** Service de médecine nucléaire, hôpital neurologique, Lyon.

    Les techniques d’imagerie cérébrale connaissent des progrès constants, et représentent à la fois un outil indispensable au clinicien dans sa pratique quotidienne mais aussi un instrument fondamental en recherche physiopathologique. Les apports de l’imagerie cérébrale, qu’il s’agisse d’imagerie morphologique (IRM) ou fonction-nelle (tomographie à émission de positons [TEP], tomographie par émission monophotonique [Single Photon Emission Computed Tomography – SPECT] ou IRM fonctionnelle [IRMf]), sont particulièrement importants dans le cadre des syndromes parkin-soniens. Nous aborderons dans cet article la place actuelle et future de ces outils dans la pratique quoti-dienne, puis leur apport en recherche.

    Techniques

    L’IRM cérébrale est l’examen de choix pour l’ima-gerie morphologique, mais d’autres techniques sont en développement telles que l’échographie de la substance noire. L’IRM est utile en routine mais également en recherche, notamment par le biais de l’IRM fonctionnelle ou des analyses volumétriques.L’imagerie fonctionnelle par SPECT permet de mesurer en routine la dénervation dopaminergique (SPECT au 123 I-iofl upane ou DaTSCAN), mais aussi la perfusion cérébrale (Tc-99m-HMPAO) ou l’inner-vation sympathique cardiaque postganglionnaire par scintigraphie myocardique (MIBG). L’intérêt majeur de la TEP est la possibilité de marquer par des isotopes différents n’importe quelle molécule. La TEP est donc essentiellement un outil de recherche permettant d’étudier notamment le métabolisme cérébral (fl uorodésoxyglucose [FDG]) ou le système

    dopaminergique présynaptique (18F-Dopa – activité de la dopadécarboxylase –, 11C-PE2I – transporteur de la dopamine –, 11C-tétrabénazine – vésicule mono-aminergique –) et postsynaptique (11C-raclo-pride – récepteurs dopaminergiques D2 –, 18F-fally-pride). La TEP permet également d’étudier d’autres systèmes de neurotransmission, tels que le système sérotoninergique (18F-MPPF – récepteurs 5HT1A –, 11C-DASB – transporteur de la sérotonine). Les dépôts de substance amyloïde peuvent aussi être détectés et quantifi és grâce à la TEP (11C-PIB). Enfi n, l’utili-sation d’H215O permet de mesurer les variations de perfusion cérébrale dépendant de tâches réalisées ou de l’application de thérapeutiques pharmacologiques ou chirurgicales.

    Utilité de l’imagerie cérébrale en pratique quotidienne

    Affi rmer l’atteinte dopaminergique

    Devant un tremblement atypique (tremblement unilatéral d’attitude), il est parfois diffi cile d’affi rmer ou d’éliminer un syndrome parkinsonien dégénératif débutant. Il y a une tendance à surdiagnostiquer, sur des bases purement cliniques, la maladie de Parkinson (1). Le taux d’erreurs diagnostiques est d’environ 20 %, et ce d’autant plus que l’on se situe tôt dans l’évolution clinique. En ce qui concerne le tremblement essentiel, le taux d’erreurs diagnos-tiques est aussi élevé (2). Le DaTSCAN, dont l’une des indications d’autorisation de mise sur le marché (AMM) est le diagnostic différentiel entre tremblement atypique et syndrome parkinsonien, peut s’avérer utile, en mettant éventuellement

  • Figure 1. Examen DaTSCAN.

    A. Tremblement essentiel

    B. Syndrome parkinsonien dégénératif

    3,53,02,5

    2,01,5

    0,5

    1,0

    0,00 10 20 30 40 50 Âge60 70 80 90 100

    Normal

    Pathologique

    Inde

    x de p

    oten

    tiel d

    e liai

    son

    Analyse DAT semi-quantitative MN-GHE v 2010

    Striatum droitStriatum gauche

    Striatum droitStriatum gauche

    3,53,02,5

    2,01,5

    0,5

    1,0

    0,00 10 20 30 40 50 Âge60 70 80 90 100

    Inde

    x de p

    oten

    tiel d

    e liai

    son

    Analyse DAT semi-quantitative MN-GHE v 2010

    La Lettre du Neurologue • Vol. XVIII - no 1 - janvier 2014 | 13

    Points forts » L’imagerie du transporteur de la dopamine (DaTSCAN) permet de mettre en évidence la dénervation

    dopaminergique nigrostriatale, mais ne permet pas de distinguer les syndromes parkinsoniens dégéné-ratifs entre eux.

    » Les autres examens d’imagerie fonctionnelle (scintigraphie au MIBG, mesure des débits sanguins céré-braux) apportent une aide limitée en pratique quotidienne.

    » La mesure du métabolisme cérébral au FDG apparaît comme un examen utile au diagnostic différentiel maladie de Parkinson/syndrome parkinsonien "plus", mais elle n’est pas encore disponible en routine.

    » L’IRM cérébrale est l’examen de choix pour distinguer les syndromes parkinsoniens “plus” de la maladie de Parkinson.

    » La place de l’imagerie ne se conçoit qu’en étroite relation avec une démarche clinique soigneuse.

    Mots-clésMaladie de ParkinsonSyndrome parkinsonien “plus”IRMDaTSCAN

    Highlights » Imaging techniques represent

    an invaluable tool in routine clinical practice for the neurolo-gist. This is particularly true for parkinsonian syndromes, which are often difficult to differen-tiate from idiopathic Parkinson’s disease (PD) especially at disease onset. SPECT imaging of dopa-mine transporter (DaTSCAN) assesses the dopaminergic degeneration but cannot distin-guish PD from atypical parkinso-nian syndromes.

    » Analysis of brain metabolism by PET-FDG appears much more useful for that purpose. Other func-tional imaging techniques such as myocardial MIBG SPECT, analysis of brain blood fl ow or measure of dopaminergic receptors density are of much smaller interest for a differential diagnosis between different types of parkinsonian syndromes. On the contrary, brain MRI is the exam of choice for such a differential diagnosis.

    » Imaging techniques are in constant evolution and will, in the future, become much more precise and helpful for the neurologist notably by showing structural abnormalities in PD or by the use of new radiotracers. However, it should be kept in mind that these techniques can only be interpreted in associa-tion with a good clinical analysis. This could be summarized by the following sentence: if you do not know what you are looking for, then imaging will not help you.

    KeywordsParkinson’s disease

    Atypical parkinsonian syndromes

    MRI

    DaTSCAN

    en évidence la dénervation dopaminergique de la voie nigrostriée. En l’absence d’atteinte dopami-nergique, l’examen sera normal (par exemple, dans le tremblement essentiel). La spécifi cité est excel-lente (98 %) : sur une série de 749 DaTSCAN, on dénombrait seulement 5 faux-positifs et 2 faux-négatifs (3). La plupart des études montrent qu’en cas de DaTSCAN normal les patients n’évoluent pas vers un syndrome parkinsonien (4). Cependant, il existe des faux-négatifs et seule l’évolution clinique sur le long terme permet d’être certain de l’absence d’évolution vers un syndrome parkinsonien (5). La sensibilité est également excellente, mais plus variable (95 à 78 % selon les séries) [6]. Toutefois, un travail récent a montré que la sensibilité et la spécifi cité de l’approche clinique étaient proches de celles du DaTSCAN, ce qui remet en cause la place exacte de cet examen, qui induit tout de même une faible – mais non nulle – irradiation (7). Il faut bien sûr mettre cela en balance avec l’intérêt d’éviter des traitements inutiles et non dénués d’effets indési-rables (4). Un travail récent a montré un changement des attitudes thérapeutiques et une plus grande

    assurance dans le diagnostic à 12 semaines et à 1 an chez les patients présentant un syndrome parkinsonien douteux et ayant bénéficié d’un DaTSCAN, versus ceux n’en ayant pas eu (8). Sur le plan économique, le DaTSCAN, en redressant certains diagnostics, permettrait des économies de santé (9). Il faut néanmoins noter qu’aucune corré-lation anatomopathologique, clinique et d’imagerie n’existe, ce qui ne permet pas de déterminer avec certitude la valeur diagnostique du DaTSCAN.L’analyse des examens DaTSCAN était initialement réalisée sans quantification, par simple analyse visuelle. Actuellement, la majorité des services de médecine nucléaire dispose d’analyses semi-quantitatives beaucoup plus précises et fonction de l’âge du sujet (figure 1). Cela permet de tenir compte notamment de la dénervation physiolo-gique liée à l’âge, qui est environ 10 fois moins rapide que celle observée dans la maladie de Parkinson, où la diminution de fixation striatale du traceur est inversement proportionnelle à la sévérité des signes moteurs et à la durée d’évo-lution de la maladie (10).

  • Figure 2. Principaux résultats du DaTSCAN en pratique quotidienne.

    Anormal

    Tremblement parkinsonienTremblement de Holmes

    Maladie de ParkinsonSyndrome parkinsonien “plus”

    Dystonie dopa-sensibleParkinson postneuroleptiqueParkinson psychogène

    Démence à corps de Lewy Maladie d’Alzheimer

    Dém

    ence

    Park

    inso

    nTr

    embl

    emen

    t

    Parkinson vasculaireRésultats inconstants

    NormalDaTSCAN

    14 | La Lettre du Neurologue • Vol. XVIII - no 1 - janvier 2014

    Place de l’imagerie dans les syndromes parkinsoniens MISE AU POINT

    En dehors du tremblement atypique, le DaTSCAN sera normal dans un syndrome parkinsonien lié aux neuroleptiques, ou dans un syndrome parkin-sonien psychogène (11, 12). Dans les syndromes parkinsoniens liés à des lésions vasculaires multiples (en dehors du cas de syndrome parkinsonien lié à un infarctus de la substance noire), le DaTSCAN est en principe normal, bien que cela ne soit pas constant (13). Devant un syndrome parkinsonien juvénile ou à début très précoce, le diagnostic différentiel peut aussi être diffi cile entre dystonie dopa-sensible et maladie de Parkinson. Là encore, le DaTSCAN montre une captation striatale normale du traceur dans la dystonie dopa-sensible (14).La deuxième indication entrant dans le cadre de l’AMM du DaTSCAN concerne le diagnostic diffé-rentiel entre maladie d’Alzheimer et démence à corps de Lewy : en effet, cette dernière comporte une atteinte dopaminergique (15). Enfi n, on citera le cas des SWEDD (Scans Without Evidence Of Dopaminergic Defi ciency), qui correspondraient à des patients dont la présentation clinique a fait évoquer un syndrome parkinsonien mais qui présentent probablement un tremblement dystonique ou d’autres pathologies, telles qu’une prémutation de l’X fragile. Un résumé des indications et des résultats est proposé dans la fi gure 2.

    Certaines interactions médicamenteuses sont à prendre en considération mais, en règle générale, la plupart des traitements prescrits n’interfèrent pas avec la fi xation du DaTSCAN. Les substances les plus problématiques sont celles qui bloquent le transporteur de la dopamine, telles que le méthyl-phénidate, les amphétamines, ou la cocaïne. Ces substances réduisent considérablement la captation du traceur et peuvent conduire à des faux-positifs (6). En revanche, les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine et autres antidépresseurs n’ont pas d’impact signifi catif (en routine) sur la captation du traceur. Il en est de même des traite-ments dopaminergiques, qui n’infl uencent pas le résultat de l’examen et peuvent donc être poursuivis.Le DaTSCAN a donc un intérêt dans notre pratique et permet d’affi rmer ou d’éliminer avec peu d’erreurs une dégénérescence dopaminergique. Dans le futur, sa place dans la détection au stade prémoteur de la maladie de Parkinson sera à déterminer, mais certains travaux montrent déjà que les sujets avec hyposmie ayant un DaTSCAN pathologique ont un risque beaucoup plus élevé de développer une maladie de Parkinson (16). Il en est de même des sujets présentant des troubles du comportement en sommeil paradoxal. En revanche, cet examen ne permet en aucun cas d’établir le diagnostic différentiel

  • La Lettre du Neurologue • Vol. XVIII - no 1 - janvier 2014 | 15

    MISE AU POINT

    entre maladie de Parkinson et autres syndromes parkinsoniens dégénératifs, ni, en cas de normalité de celui-ci, de distinguer les situations cliniques à examen normal (sujet sain, tremblement essentiel, trouble psychogène et syndrome parkinsonien liés à la prise de neuroleptiques, etc.). L’approche clinique doit donc rester reine : l’imagerie vient en aide au clinicien mais ne remplace pas son expertise.

    Distinguer les différents syndromes parkinsoniens dégénératifs

    Il s’agit d’une question centrale et souvent diffi cile en pratique neurologique. Cette question est d’autant plus complexe que l’on se situe en début d’évolution, période où les signes sont moins tranchés et où le taux d’erreurs diagnostiques, y compris entre des mains expertes, reste élevé.

    ◆ Place de l’imagerie fonctionnelleLe DaTSCAN ne permet pas de distinguer les diffé-rents syndromes parkinsoniens dégénératifs, même si l’atteinte dopaminergique est plus globale et symétrique dans les syndromes parkinsoniens “plus” (AMS, PSP, DCB) [17]. L’étude du système dopaminer-gique postsynaptique (récepteurs dopaminergiques D2) par SPECT iodobenzamide (IBZM) ou par d’autres traceurs en TEP montre en revanche une diminution de la densité de ceux-ci dans les syndromes parkin-soniens “plus” (17). Toutefois, ce type d’examen comporte plusieurs limites. En effet, l’administration chronique de traitements dopaminergiques entraîne une down-regulation des récepteurs dopaminer-giques, y compris dans la maladie de Parkinson. Beaucoup plus intéressante, mais non disponible

    en routine, est l’étude du métabolisme cérébral en TEP-FDG. Dans la maladie de Parkinson, on note un hypermétabolisme putaminal et un hypométabo-lisme occipital. Dans l’atrophie multisystématisée, on observe un hypométabolisme putaminal, pontique et cérébelleux, tandis que l’hypométabolisme est frontal dans la paralysie supra nucléaire progressive, et frontopariétal asymétrique dans la dégénérescence corticobasale (18). Un récent travail a montré la nette supériorité du PET-FDG sur le SPECT IBZM (18) dans le diagnostic différentiel des syndromes parkinsoniens tandis que les corrélations entre données d’imagerie et données anatomopathologiques sont excellentes avec la TEP-FDG.La scintigraphie myocardique au MIBG permet d’ana-lyser l’innervation sympathique postganglionnaire et apparaît comme un outil pouvant aider au diagnostic différentiel entre maladie de Parkinson et syndrome parkinsonien “plus”. En effet, la captation du MIBG est préservée chez le sujet normal et chez le patient présentant une atrophie multisystématisée, tandis que cette fi xation est réduite dans la maladie de Parkinson.Dans le futur, les marqueurs de la plaque amyloïde pourront s’avérer utiles pour distinguer démence à corps de Lewy, démence parkinsonienne et maladie d’Alzheimer (19), même si certains résultats sont discordants.Quelles que soient les techniques d’imagerie fonctionnelle, il faut toutefois se souvenir que d’importants chevauchements existent entre maladie de Parkinson et syndromes parkinsoniens atypiques, et que seule une approche combinée clinique + imagerie permet d’aboutir au diagnostic (20). Les indications et les principaux résultats des examens en imagerie fonctionnelle sont résumés dans le tableau.

    Tableau. Principales anomalies observées en imagerie fonctionnelle dans les syndromes parkinsoniens.

    Atrophie multisystématisée

    (AMS)

    Paralysie supranucléaire

    progressive (PSP)

    Dégénérescence corticobasale

    (DCB)

    Maladie de Parkinson

    (MP)

    TEP-FDG Hypométabolisme putaminal, pontique et cérébelleux

    Hypométabolisme frontal

    Hypométabolisme frontopariétal périrolandique asymétrique

    Hypermétabolisme putaminalHypométabolisme occipital

    SPECT DaTSCAN

    SPECT IBZM Normal ou

    SPECT MIBG Normal Normal Normal

  • B. Diagnostics diff érentiels : syndromes parkinsoniens acquis

    Hydrocéphalie chronique de l’adulte Maladie de Wilson Syndrome lacunaire

    IRM T2 FLAIR axiale Hypersignaux des ganglions de la base et du mésencéphale

    Aspect “en tête de panda géant” (fl èche)

    IRM T2 axiale

    Syndrome multilacunaire

    IRM T2 FLAIR axiale

    A. Diagnostics diff érentiels en IRM dans les syndromes parkinsoniens

    Atrophie multisystématisée Paralysie supranucléaire progressive Dégénérescence corticobasale

    Margination du putamenAMSp

    IRM T2 axiale

    Atrophie pontique AMSc

    IRM T2 axiale

    Atrophie mésencéphalique

    IRM T2 axiale

    Atrophie frontopariétale

    IRM T1 axiale

    Figure 3. Principales anomalies IRM observées dans les syndromes parkinsoniens.

    16 | La Lettre du Neurologue • Vol. XVIII - no 1 - janvier 2014

    Place de l’imagerie dans les syndromes parkinsoniens MISE AU POINT

  • Références bibliographiques>>>

    La Lettre du Neurologue • Vol. XVIII - no 1 - janvier 2014 | 17

    MISE AU POINT

    ◆ Place de l’imagerie morphologiqueDans la maladie de ParkinsonL’IRM cérébrale occupe une place de choix pour le diagnostic différentiel entre maladie de Parkinson et syndromes parkinsoniens “plus”. Dans la maladie de Parkinson, l’IRM cérébrale conventionnelle à 1,5 T est sans particularité et n’a donc aucun intérêt lorsque la clinique est typique. Les évolu-tions des techniques d’IRM (IRM à très haut champ ou techniques volumétriques) permettent déjà, mais pas en routine, de visualiser des anomalies morphologiques de la substance noire et des zones d’atrophie corticale d’autant plus étendues que le patient présente un déclin cognitif (21). Les séquences en écho de gradient et la mesure de l’index R2* apparaissent comme un bon marqueur de l’accumulation de fer au niveau de la substance noire qui participe au processus dégénératif (22). L’échographie de la substance noire, actuellement développée uniquement en recherche, permet quant à elle de visualiser une hyperéchogénicité pathologique de cette région dans la maladie de Parkinson (23). On retrouve cela également dans la PSP. Cette hyper-échogénicité est inversement corrélée à la baisse de fi xation du DaTSCAN. Un travail prospectif sur 3 ans portant sur 1 500 sujets sains a par ailleurs montré qu’une hyperéchogé-nicité de la substance noire multiplie par 17 le risque de développer une maladie de Parkinson. Cet outil pourrait donc servir de marqueur présymptoma-tique de la maladie de Parkinson (24). Toutefois, l’utilisation de l’échographie de la substance noire est limitée par la nécessité d’avoir une fenêtre trans-crânienne accessible. Par ailleurs, cet examen est opérateur-dépendant.

    Autres syndromes parkinsoniensL’IRM cérébrale a en revanche toute sa place devant un syndrome parkinsonien juvénile ou à début précoce, pour lequel peut se poser la question de la maladie de Wilson. Dans ce cas, des hyper signaux T2 des ganglions de la base et du mésencéphale sont observés, avec l’aspect “en tête de panda” du mésencéphale. De même, devant un syndrome parkinsonien atypique faisant discuter une PSP, une atrophie multisystéma-tisée ou une dégénérescence corticobasale, l’IRM est un examen extrêmement utile.Dans la PSP, on cherchera principalement une atrophie mésencéphalique, mieux visualisée sur les séquences sagittales T1. On note une réduction progressive du diamètre antéropostérieur du mésencéphale, avec un aplatissement progressif du toit du mésencéphale, qui prendra ensuite un aspect

    concave en haut, donnant l’image du colibri. Un index (Magnetic Resonance Parkinsonism Index) peut être calculé, qui quantifi e cette atrophie : diamètre du pont/diamètre du mésencéphale × diamètre du pédoncule cérébelleux moyen/diamètre du pédoncule cérébelleux supérieur (25). Lorsque cet index est inférieur à 13,55, il est normal ; lorsqu’il est supérieur à 13,55, il y a un risque d’évolution vers une PSP. Cet index a surtout une bonne valeur discriminative entre la maladie de Parkinson et les formes typiques de PSP (syndrome de Richardson), alors qu’il est moins discriminant dans les formes PSP-Parkinson. Dans les atrophies multisystématisées, on retrouve sur les séquences T2 et T2* notamment une atrophie du pont et du cervelet dans les AMSc. L’aspect en croix du pont (hot cross bun sign) est lié à un hypersignal T2 des fi bres transversales du pont, de la partie médiane des pédoncules cérébelleux et du cervelet, et à un hyposignal T2 des faisceaux corticospinaux et des pédoncules cérébelleux supérieurs (26). Dans les formes AMSp, on observe une atteinte putaminale avec un hyposignal T2* du putamen anormalement précoce (< 60 ans) et un liseré hyperT2/hypoT1 des bords externes du putamen (26). Il est à noter que l’hypersignal T2 peut être observé chez 38 % des sujets normaux, mais il est réellement patholo-gique lorsqu’il borde l’ensemble du putamen ou sa partie postérieure et que s’y associe une atrophie putaminale (27). De manière générale, l’interpré-tation des IRM dans les syndromes parkinsoniens “plus” est fi able dans 73 % des cas de PSP et dans 76 % des cas d’AMS (28). À l’avenir, le coeffi cient de diffusion ADC, élevé au niveau du pédoncule cérébelleux moyen dans les AMSp et normal dans la PSP et la maladie de Parkinson, pourra aider au diagnostic (29). Enfi n, dans la DCB, on recherchera une atrophie corticale asymétrique périrolandique associée à une atrophie ipsilatérale du putamen.L’IRM permet par ailleurs de mettre en évidence les anomalies caractéristiques de certains syndromes parkinsoniens secondaires, tels que ceux liés à une hydrocéphalie ou d’origine vasculaire. Les princi-pales anomalies sont résumées dans la figure 3.

    Conclusion

    Les techniques d’imagerie cérébrale représentent une aide considérable et en plein développement pour le clinicien. Il ne faut cependant jamais oublier la clinique et les limites de ces outils pour en tirer le meilleur. ■

    S. Thobois déclare ne pas avoir de liens d’intérêts.

  • 18 | La Lettre du Neurologue • Vol. XVIII - no 1 - janvier 2014

    Place de l’imagerie dans les syndromes parkinsoniens MISE AU POINT

    1. Marshall VL, Reininger CB, Marquardt M et al. Parkin-son’s disease is overdiagnosed clinically at baseline in diagnostically uncertain cases: a 3-year European multi-center study with repeat [123I]FP-CIT SPECT. Mov Disord 2009;24(4):500-8.2. Schrag A, Münchau A, Bhatia KP et al. Essential tremor: an overdiagnosed condition? J Neurol 2000;247(12):955-9.3. Bajaj N, Hauser RA, Grachev ID. Clinical utility of dopa-mine transporter single photon emission CT (DaT-SPECT) with (123I) iofl upane in diagnosis of parkinsonian syndromes. J Neurol Neurosurg Psychiatry 2013;84(11):1288-95.4. Catafau AM, Tolosa E; DaTSCAN Clinically Uncertain Parkinsonian Syndromes Study Group. Impact of dopamine transporter SPECT using 123I-Iofl upane on diagnosis and management of patients with clinically uncertain Parkinso-nian syndromes. Mov Disord 2004;19(10):1175-82.5. Perlmutter JS, Eidelberg D. To scan or not to scan: DaT is the question. Neurology 2012;78(10):688-9.6. Kägi G, Bhatia KP, Tolosa E. The role of DAT-SPECT in movement disorders. J Neurol Neurosurg Psychiatry 2010;81(1):5-12.7. De la Fuente-Fernández R. Role of DaTSCAN and clinical diagnosis in Parkinson disease. Neurology 2012;78(10):696-701.8. Kupsch AR, Bajaj N, Weiland F et al. Impact of DaTSCAN SPECT imaging on clinical management, diagnosis, confi -dence of diagnosis, quality of life, health resource use and safety in patients with clinically uncertain parkinsonian syndromes: a prospective 1-year follow-up of an open-label controlled study. J Neurol Neurosurg Psychiatry 2012;83(6):620-8.9. Dodel RC, Höffken H, Möller JC et al. Dopamine trans-porter imaging and SPECT in diagnostic work-up of Parkin-son’s disease: a decision-analytic approach. Mov Disord 2003;18(Suppl.7):S52-62.10. Benamer HT, Patterson J, Wyper DJ et al. Correlation of Parkinson’s disease severity and duration with 123I-FP-

    CIT SPECT striatal uptake. Mov Disord 2000;15(4):692-8.11. Lorberboym M, Treves TA, Melamed E et al. [123I]-FP/CIT SPECT imaging for distinguishing drug-induced parkinsonism from Parkinson’s disease. Mov Disord 2006;21(4):510-4.12. Benaderette S, Zanotti-Fregonara P, Apartis E et al. Psychogenic parkinsonism: a combination of clinical, electrophysiological, and [(123)I]-FP-CIT SPECT scan explorations improves diagnostic accuracy. Mov Disord 2006;21(3):310-7.13. Gerschlager W, Bencsits G, Pirker W et al. [123I]beta-CIT SPECT distinguishes vascular parkinsonism from Parkinson’s disease. Mov Disord 2002;17(3):518-23.14. Naumann M, Pirker W, Reiners K et al. [123I]beta-CIT single-photon emission tomography in DOPA-responsive dystonia. Mov Disord 1997;12(3):448-51.15. Donnemiller E, Heilmann J, Wenning GK et al. Brain perfusion scintigraphy with 99mTc-HMPAO or 99mTc-ECD and 123I-beta-CIT single-photon emission tomography in dementia of the Alzheimer-type and diffuse Lewy body disease. Eur J Nucl Med 1997;24(3):320-5.16. Berendse HW, Ponsen MM. Diagnosing premotor Parkin-son’s disease using a two-step approach combining olfactory testing and DAT SPECT imaging. Parkinsonism Relat Disord 2009;15(Suppl.3):S26-30.17. Plotkin M, Amthauer H, Klaffke S et al. Combined 123I-FP-CIT and 123I-IBZM SPECT for the diagnosis of parkinsonian syndromes: study on 72 patients. J Neural Transm 2005;112(5):677-92.18. Hellwig S, Amtage F, Kreft A et al. [¹8F]FDG-PET is supe-rior to [123I]IBZM-SPECT for the differential diagnosis of parkinsonism. Neurology 2012;79(13):1314-22.19. Maetzler W, Reimold M, Liepelt I et al. [11C]PIB binding in Parkinson’s disease dementia. Neuroimage 2008;39(3):1027-33.20. Südmeyer M, Antke C, Zizek T et al. Diagnostic accu-racy of combined FP-CIT, IBZM, and MIBG scintigraphy in the differential diagnosis of degenerative parkinsonism:

    a multidimensional statistical approach. J Nucl Med 2011;52(5):733-40.21. Cho ZH, Oh SH, Kim JM et al. Direct visualization of Parkinson’s disease by in vivo human brain imaging using 7.0 T magnetic resonance imaging. Mov Disord 2011;26(4):713-8.22. Martin WR, Wieler M, Gee M. Midbrain iron content in early Parkinson disease: a potential biomarker of disease status. Neurology 2008;70(16 Pt 2):1411-7.23. Becker G, Seufert J, Bogdahn U et al. Degeneration of substantia nigra in chronic Parkinson’s disease visualized by transcranial color-coded real-time sonography. Neurology 1995;45(1):182-4.24. Berg D, Seppi K, Behnke S et al. Enlarged substantia nigra hyperechogenicity and risk for Parkinson disease: a 37-month 3-center study of 1847 older persons. Arch Neurol 2011;68(7):932-7.25. Quattrone A, Nicoletti G, Messina D et al. MR imaging index for differentiation of progressive supranuclear palsy from Parkinson disease and the Parkinson variant of multiple system atrophy. Radiology 2008;246(1):214-21.26. Savoiardo M, Grisoli M, Girotti F et al. MRI in sporadic olivopontocerebellar atrophy and striatonigral degenera-tion. Neurology 1997;48(3):790-2.27. Tha KK, Terae S, Tsukahara A et al. Hyperintense putaminal rim at 1.5 T: prevalence in normal subjects and distinguishing features from multiple system atrophy. BMC Neurol 2012;12:39.28. Massey LA, Micallef C, Paviour DC et al. Conventional magnetic resonance imaging in confi rmed progressive supra-nuclear palsy and multiple system atrophy. Mov Disord 2012;27(14):1754-62.29. Nicoletti G, Lodi R, Condino F et al. Apparent diffu-sion coeffi cient measurements of the middle cerebellar peduncle differentiate the Parkinson variant of MSA from Parkinson’s disease and progressive supranuclear palsy. Brain 2006;129(Pt 10):2679-87.

    Références bibliographiques

    Réunions-congrès

    Avril 2014 ■ Journées de neurologie de langue

    françaiseDu mardi 1er avril au vendredi 4 avril 2014Strasbourg

    Web : www.jnlf.fr/

    ■ American Academy of NeurologyDu samedi 26 avril au samedi 3 mai 2014Philadelphie, États-Unis

    Web : www.aan.com/conferences/2014-annual-meeting/

    Mai 2014 ■ EFNS-ENS

    Du samedi 31 mai au mardi 3 juin 2014Istanbul, Turquie

    Web : www.efns.org/EFNS-ENS-Joint-Congress-of-European-Neurology-Istanbul-2014.877.0.html

    Juin 2014 ■ 19es Journées francophones

    d’électroneuromyographieDu mercredi 4 juin au vendredi 6 juin 2014Saint-Étienne

    ■ 12e Réunion francophone sur la maladie d’AlzheimerDu mercredi 11 juin au vendredi 13 juin 2014Faculté de médecine de Montpellier

    AgendaAgenda