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#5 Série sur la nouvelle évangélisation Père Andreas Schmidt Nous sommes venus l’adorer : Une introduction à la prière à l’école de Benoît XVI SERVICE D’INFORMATION CATHOLIQUE

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#5 Série sur la nouvelle évangélisation #5 Série sur la nouvelle évangélisation

Père Andreas Schmidt

« Avant toute activité, avant que le monde ne puissechanger, il faut adorer. Seule l’adoration nous rendvraiment libres… »

Nous sommes venus l’adorer : Une introduction à la prière à l’école de Benoît XVI

S E RV I C E D ’ I N F O R M AT I O N C AT H O L I Q U E S E RV I C E D ’ I N F O R M AT I O N C AT H O L I Q U E

Le pape Benoît XVI a enseigné que la prière est bien plus quece que nous pensons souvent. Elle nous conduit toujours plusprofondément dans la communion avec le Dieu qui est lasource de notre vie. Elle nous ouvre à notre prochain.Ensemble, la prière liturgique et personnelle forme un uniqueacte d’adoration aimante dans laquelle nous découvronspourquoi et pour qui nous sommes faits. S’inspirant desaudiences du mercredi du pape émérite sur la prière et de sonexemple remarquable, ce livret invite le lecteur à devenir unétudiant à l’ « école » d’un maître de prière contemporain.

Catholic Information Service ®Conseil suprême des Chevaliers de Colomb

PO Box 1971 203 752 4267

New Haven, CT 06521 203 752 4018 (fax)

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— Pape Benoît XVI

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RéDACTRICE EN CHEF :

Michelle K. Borras, Ph.D.

Directrice du Catholic

Information Service

éDITEURS :

Alton Pelowski et

Andrew Matt

© Copyright 2013, Chevaliers de Colomb.

Tous droits réservés.

Textes de Benoît XVI © copyright 2013,

Librairie éditrice du Vatican, Cité du

Vatican. Toutes les autres œuvres citées

sont la propriété de leurs auteurs respectifs.

Les citations des écritures sont issues de la

nouvelle traduction liturgique de la Bible de

l’Association épiscopale liturgique pour les

pays francophones (AELF).

Série sur la nouvelle évangélisation

1 Qu’est-ce que la nouvelle évangélisation ?

1è R E PARTIE « CAR DIEU A TANT AIMé LE MONDE »2 « Je crois en toi » : La question de Dieu dans le monde moderne3 Les mystères de la vie de Jésus4 Un Dieu qui est trois fois Amour5 « Nous sommes venus l’adorer » : Introduction à la prière à l’école

de Benoît XVI

2è M E PARTIE « APPELéS à AIMER… »6 Appelés à aimer : La théologie de l’amour humain, de Jean-Paul II7 à l’image de l’Amour : Le mariage et la famille8 Suivre l’Amour pauvre, chaste et obéissant : La vie consacrée

3è M E PARTIE … DANS L’égLISE, éPOUSE DE L’AgNEAU

9 « Qu’il me soit fait selon ta parole » : Marie, l’origine de l’église10 Avec le cœur de l’époux : Le sacerdoce ministériel11 La transfiguration du monde : Les sacrements12 Lumière et silence : Un journal intime eucharistique

4è M E PARTIE « AIMER EN ACTE ET EN VéRITé »13 Libres en vue de quoi ?14 La justice : De la dignité du travail15 La justice : L’évangile de la vie

5è M E PARTIE « IL NOUS A AIMéS JUSQU’AU BOUT »16 La dignité de la personne souffrante17 « Regardez ! J’étais mort et me voilà vivant… » : La mort et

la vie éternelle

ANNEXES : OUTILS POUR LA NOUVELLE éVANgéLISATION

A La beauté de la sainteté : L’art sacré et la nouvelle évangélisationB La technologie et la nouvelle évangélisation :

Critères de discernement

NIHIL OBSTAT

Susan M. Timoney, S.T.D.

Censor Deputatus

IMPRIMATUR

Donald Cardinal Wuerl

Archevêque de Washington

Archidiocèse de Washington

IMAgE DE LA COUVERTURE

Les trois mages offrant en cadeau l’or, l’encens et la myrrhe à l’enfant Jésus.

Chapelle de l’Université du Sacré-Cœur, Fairfield, Connecticut. La mosaïque a

été réalisée par le père Marko Ivan Rupnik, SJ et les artistes du Centre Aletti

en 2008. Image reproduite avec l’aimable autorisation du Centre Aletti.

9 août 2013

Le nihil obstat et l’imprimatur sont des

déclarations officielles attestant qu’un

livre ou un livret ne contient pas d’erreurs

doctrinales ou morales. Cela n’implique

pas que les personnes qui ont accordé le

nihil obstat et l’imprimatur sont d’accord avec

le contenu, les opinions ou les affirmations

qui y sont exprimés.

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Nous sommes venus l’adorer : Une introduction à la prièreà l’école de Benoît XVI

Père Andreas Schmidt

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Table des matières

1 Nous sommes venus l’adorer : Une introduction à la prière à l’école de Benoît XVI

27 Annexe : La prière, pape Benoît XVI

38 Sources40 L’auteur

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Marie, Celle qui porte Dieu, avec l’enfant Jésus.

Leurs bras sont élevés, en prière

Chapelle Rest home,

Črni Vrh, Slovénie

Avec l’aimable autorisation du Centre Aletti.

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« Nous sommes venus l’adorer » :Une introduction à la prièreà l’école de Benoît XVI

P. Andreas Schmidt

La prière est VIE

Qu’est-ce la vie chrétienne exactement ? Dieu, qui est en lui-même l’amour, la vie et la lumière infinis, veut nous donner savie ! Il veut que nous prenions part aux richesses de sa proprevie, dans la communion du Père, du Fils et du Saint Esprit. Telleest la vérité fondamentale du christianisme. C’est pour cela quele premier paragraphe du Catéchisme de l’Église catholique ditqu’en son Fils, Jésus, Dieu le Père appelle les hommes et lesfemmes « à devenir, dans l’Esprit Saint, ses enfants d’adoptionet donc les héritiers de sa vie bienheureuse ».1

La vie chrétienne consiste en ce bonheur : savoir que noussommes infiniment aimés par Dieu notre Père et aimer vrai-ment avec Dieu le Fils, dans la puissance de l’Esprit-Saint.

C’est la « bonne nouvelle » (Évangile), la signification de notrevie et la « plénitude de vie » dont parle Jésus. Bien souvent, notreproblème n’est pas que nous ne le savons pas. Nous l’avons tel-lement entendu dire à l’Église ou au cours de catéchisme ! Mais

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cette «  bonne nouvelle  » détermine-t-elle réellement notre attitude à l’égard de la vie à tout instant ? Vivons-nous danscette certitude intime que nous sommes infiniment aimés ? Lefruit de cette certitude est une joie indestructible, telle que saintPaul écrit dans sa lettre aux Thessaloniciens : « Soyez toujoursdans la joie » (1 Thessaloniciens 5, 16).

Si nous ne reconnaissons pas la « bonne nouvelle », c’est peut-être que nous ne vivons pas ce que Paul nous invite à faire ausecond verset de cette lettre : «  Priez sans relâche » (1 Thessa-loniciens 5, 17). Nous ne prions pas, ou nous ne prions pas bienou nous ne prions pas assez – et par conséquent, nous ne vivonspas pleinement notre identité chrétienne. Car, comme nous ledit le Catéchisme, la vie de prière consiste à « être habituelle-ment en présence du Dieu trois fois saint et en communionavec lui ».2 C’est le sens de toute prière : que nous recevionsl’amour de Dieu et en vivions non seulement de temps entemps, mais à tout instant de notre vie.

La prière est donc bien plus que ce que nous pourrions penserau départ. Il ne s’agit pas de lancer quelques mots en directiondu ciel de temps en temps. C’est une communication avec Dieu,qui nous conduit toujours plus profondément dans une com-munion éternelle avec lui. Pendant son pontificat, le papeBenoît XVI n’a cessé de souligner que, dans la vie de prière, onne trouve pas simplement Dieu. On se trouve soi-même ! « Enapprenant comment parler avec Lui, nous apprenons à êtrehomme, à être nous-mêmes. ».3 En effet, nous sommes faitspour la communion avec Dieu.

Si nous vivons cette communion, nous percevons que nousne vivons pas uniquement pleinement notre humanité. Danscette ferme association avec le Dieu vivant, nous pouvons aussireconnaître encore plus clairement – et très concrètement – laforme que notre vie devrait prendre. En d’autres termes, nous

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reconnaissons notre vocation. « C’est dans le silence que noustrouvons Dieu », a dit le pape Benoît aux jeunes qu’il a rencon-trés lors de son voyage en Grande-Bretagne, en 2010. C’est« dans le silence que nous trouvons Dieu et c’est dans le silenceque nous découvrons notre véritable moi. Et en découvrantnotre véritable moi, nous découvrons la vocation spécifique àlaquelle Dieu nous appelle pour l’édification de son Église etpour la rédemption de notre monde. ».4

Pour qu’il n’y ait pas de malentendu : en parlant ici de « priertoujours » et de « silence », nous ne nous adressons pas seule-ment à des moines et à des moniales qui vivent une vie deconsécration totale à la prière dans leurs monastères. Ce n’estpas non plus simplement pour le pape émérite Benoît qui, parobéissance à un appel particulier de Dieu, a décidé de passer lesdernières années de sa vie à servir l’Église par la prière. Pauladresse sa lettre à des chrétiens très ordinaires qui vivent dansle monde. Il sait très bien que les chrétiens ont beaucoup d’au-tres choses à faire. Et pourtant, il dit : « C’est votre vocation.Priez sans cesse ! » Comment est-ce possible de vivre notre viequotidienne dans la prière ou, comme nous l’entendonssouvent dire aujourd’hui, de vivre dans la contemplation aucœur de l’action ? C’est précisément cet « art de la prière » quesaint Jean-Paul II a invité les chrétiens à adopter au début dunouveau millénaire. 5

Benoît XVI aussi a cherché à décrire, dans les circonstancesles plus variées, ce que peut représenter un tel « art » de nosjours. Finalement, il nous a montré cet art par sa vie. Le papeque Jésus a appelé à « gravir la montagne » (cf. Luc 9, 28) pourl’adorer dans une vie cachée de contemplation, a fait ce qu’ilavait dit aux autres de faire. Dans le silence, il a découvert sa« vocation particulière » si remarquable : pendant les dernièresannées de sa vie, le pape émérite soutiendra l’Église et le monde

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par sa prière. En renonçant au ministère pétrinien afin d’êtreprière au cœur de l’Église, Benoît XVI est devenu un grandmaître de prière pour notre époque.

Même avant sa décision capitale, le pape Benoît avait com-mencé une « école de prière » lors des audiences générales dumercredi. En mai 2011, au début de cette série de catéchèses, ilavait affirmé : « Nous savons bien, en effet, que la prière ne doitpas être considérée comme allant de soi: il faut apprendre àprier, comme en acquérant toujours à nouveau cet art. »6 Dansce livret, nous serons des étudiants à l’« école » du pape Benoît,lui permettant de nous introduire à l’« art de la prière ».

Du temps pour Dieu

Le Catéchisme va droit au but : « on ne peut pas prier “en touttemps” si l’on ne prie pas à certains moments ».7 Pour que nosvies soient de plus en plus pénétrées de la vie et de l’amour deDieu, nous devons trouver des moments où nous ne faisonsrien d’autre que de nous ouvrir à lui.

Seules les choses qui sont importantes pour nous, et pour les-quelles nous prenons du temps, influencent réellement notrevie : cela fait partie de notre nature humaine. Seules les amitiésoù nous partageons des sujets personnels et passons beaucoupde temps ensemble deviennent des relations profondes, pourla vie et qui nous portent. Cela est vrai aussi de la prière. SainteThérèse d’Avila dit que ce n’est « qu’un commerce intime d’ami-tié où l’on s’entretient souvent seul à seul avec ce Dieu dont onse sait aimé ».8 Benoît XVI aussi nous a dit que « la vie de prièreconsiste donc à être de manière habituelle en présence de Dieuet à en avoir conscience, à vivre en relation avec Dieu commenous vivons les relations habituelles de notre vie, celles avec les

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membres les plus chers de notre famille, avec nos vrais amis ».9

C’est souvent ici que commence le problème. Il nous est dif-ficile, concrètement, de réserver du temps pour la prière. Dansla société d’aujourd’hui, nous sommes de plus en plus souspression pour être productifs. En même temps, nous avonsdavantage d’occasions de nous distraire pendant nos rarestemps libres. Ces circonstances ont un effet négatif sur la prière,que nous écartons. Le pape Benoît était très conscient de cettedifficulté. « Le silence intérieur et extérieur est nécessaire pourque cette parole puisse être entendue », disait-il. « Et c’est unpoint particulièrement difficile pour nous à notre époque. Eneffet, notre époque ne favorise pas le recueillement et l’on peutmême avoir parfois l’impression qu’il existe une peur de sedétacher, même pour un instant, du fleuve de paroles etd’images qui marquent et remplissent les journées ».10

Par ces paroles, le pape émérite décrivait avec une précisionétonnante la vie de bien des personnes, en particulier desjeunes, aujourd’hui. La seule pensée de ne pas être « connecté »ou « joignable sur son portable » pendant un certain tempsangoisse beaucoup de personnes qui craignent de manquerquelque chose et de ne pas « être là ». Mais il est justementnécessaire de prendre un peu de recul ; le défi du « silence inté-rieur et extérieur » est crucial pour entrer en contact avec Dieu.Le pape Benoît nous a donc invités à ne pas oublier le plusimportant, c’est-à-dire à prendre Marie pour modèle :

A notre époque, nous sommes absorbés par de nombreuses activitéset occupations, préoccupations et problèmes; on tend souvent àremplir les espaces de la journée, sans avoir un moment pour s’ar-rêter et réfléchir et nourrir la vie spirituelle, le contact avec Dieu.Marie nous enseigne qu’il est nécessaire de trouver dans nosjournées, avec toutes nos activités, des moments pour nous recueil-lir en silence et méditer sur ce que le Seigneur veut nous enseigner,

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sur la façon dont il est présent et agit dans le monde et dans notrevie: être capables de s’arrêter un moment et de méditer.11

Benoît XVI ne cache pas le fait que cela demande de la disci-pline. Cela requiert la ferme résolution de garder du temps pourla prière tous les jours, de prendre du recul par rapport à toutafin d’écouter Dieu et de passer du temps avec lui : « la vraieprière, exige une discipline ; elle requiert de créer quotidienne-ment des moments de silence. Souvent, cela signifie attendreque le Seigneur nous parle. Même au milieu des multiples acti-vités et des préoccupations de notre existence quotidienne,nous avons besoin de créer un espace de silence, parce que c’estdans le silence que nous trouvons Dieu ».12

Soyons honnêtes : nous trouvons du temps pour ce qui estimportant pour nous  ! C’est pourquoi, toute vie chrétiennesérieuse commence par prendre du temps chaque jour pourprier, pour prendre soin de la relation la plus importante denotre vie. Il est essentiel de cultiver une réelle régularité dansla prière. C’est facile, le jour où nous nous sentons motivés, deprier longtemps, puis de mettre Dieu dans le placard, pour ainsidire, parce que d’autres choses retiennent notre intérêt. Maisce n’est pas une manière de traiter une personne qui est impor-tante pour nous, et certainement pas Dieu. Ainsi nous avonsbesoin, comme l’a décrit le pape Benoît, d’une réelle persévé-rance dans la prière. Cette persévérance fait alors grandir notrejoie de prier : « Chers amis, la constance de donner du temps àDieu est un élément fondamental pour la croissance spirituelle;ce sera le Seigneur lui-même qui nous donnera le goût de sesmystères, de ses paroles, de sa présence et de son action, desentir comme cela est beau lorsque Dieu parle avec nous; celanous fera comprendre de façon plus profonde ce qu’il attend denous. »13

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Se mettre en présence de Dieu

Une fois que nous avons saisi la nécessité vitale de dédier dutemps concret à la prière et que nous avons résolu de menerune vie de prière, une nouvelle difficulté apparaît : Commentdois-je prier précisément  ? Où puis-je trouver Dieu  ?Comment entrer en contact avec lui ? Souvent, nous faisonsl’erreur de commencer simplement à parler avec le vagueespoir que quelqu’un « là-haut » pourra nous entendre. Etnous oublions le premier pas dans toute prière : prendre con-science, dans la foi, que Dieu est présent, qu’il est déjà là et qu’ilnous attend. C’est seulement par ce pas, que le Catéchismeappelle «  recueillement »14 que la prière peut devenir uneréelle rencontre avec Dieu. Sinon, notre prière consistesouvent à tourner en rond sur nous-mêmes en broyant dunoir. Le pape Benoît a nommé concrètement les lieux où nouspouvons trouver Dieu présent : « la prière personnelle, dansle silence de notre cœur et devant le Saint Sacrement ainsique la prière liturgique en Église ».15 Regardons ces lieux deplus près.

Rencontrer Dieu en nous

Le premier lieu de la présence de Dieu, mentionné par le papeémérite, est notre propre cœur. Jésus essaie de bien faire com-prendre cette vérité à ses disciples : « Si quelqu’un m’aime, ilgardera ma parole ; mon Père l’aimera, nous viendrons verslui et, chez lui, nous nous ferons une demeure » (Jean 14, 23).Saint Paul fait l’expérience de la réalisation de cette promesseet dit que nous devenons le « temple de l’Esprit Saint » (1

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Corinthiens 6, 19) : le Dieu trinitaire demeure en nous. L’artde la prière consiste à découvrir cette présence de Dieu ennous, à la recevoir dans la foi et à entrer en communion aveclui.

La présence réelle du Dieu trinitaire dans son cœur fut ladécouverte décisive de sainte Élisabeth de la Trinité, cette jeunecarmélite française morte en 1906. Elle priait ainsi : « Que je neVous y [mon âme] laisse jamais seul, mais que je sois là, touteentière, toute éveillée en ma foi, toute adorante, toute livrée àvotre action créatrice ».16

Là est le problème : Dieu est présent, même en nous, maistrop souvent nous le laissons seul parce que nous ne sommespas conscients de sa présence. C’est pour cela que nous avonsbesoin de consacrer du temps tous les jours à la prière, pourmieux comprendre que Dieu est toujours là. Le pape Benoît aappelé les jeunes du Royaume Uni et nous tous à cela : « Je vousinvite à chercher chaque jour dans vos cœurs la source du véri-table amour. Jésus est toujours là, attendant silencieusementque nous demeurions avec lui et que nous entendions sa voix.Dans l’intimité de vos cœurs, il vous appelle à prendre du tempsavec lui dans la prière ».17 La prière personnelle n’est rien d’autreque cette rencontre de ‘personne-à-personne’, ce cœur-à-cœuravec Jésus, et en lui, avec le Dieu trinitaire tout entier, présenten nous.

Une rencontre avec un ami

Que faut-il dire dans cette rencontre ? Exactement commedans toute relation vraie et profonde, nous partageons ce quenous avons réellement dans notre cœur. Tout ce qui metouche et que je partagerais avec mon meilleur ami : grati-

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tude et amour, requêtes et questions, plaintes, joie et louange.Et, comme dans toute amitié - c’est important ! - toute ren-contre réelle est à double-sens. Le pape Benoît l’a ditexplicitement : la prière implique d’écouter la voix de Jésus.

Quand une seule personne parle (dans la prière, c’est surtoutnous), il n’y a pas de conversation. Aussi devons-nous, nousaussi, suivre les instructions données par le prêtre Éli au jeuneSamuel dans le premier livre de Samuel. Nous devons rediresans cesse au Seigneur : « Parle, Seigneur, ton serviteur écoute »(1 Samuel 3, 9). Et non comme nous aimerions beaucoup le direparfois : « Écoute, Seigneur, ton serviteur parle ! ».

Mais comment entendre la voix de Dieu ? Évidemment, pasaussi directement que nous entendons la voix d’une autre per-sonne. Et pourtant Dieu peut nous parler de nombreusesfaçons. Premièrement, il parle par sa parole dans les Écritures.Le pape Benoît a décrit très concrètement comment la parolede Dieu peut nous guider dans la prière. Nous pouvons« ruminer » l’Écriture sainte, a-t-il indiqué :

En prenant, par exemple, un bref passage de l’Ecriture Sainte, enparticulier les Evangiles, les Actes des Apôtres, les Lettres desapôtres, ou encore une page d’un auteur de spiritualité qui nousrapproche des réalités de Dieu, et les rend plus présentes de nosjours, en se faisant éventuellement conseiller par un confesseur oupar un directeur spirituel, lire et réfléchir sur ce que l’on a lu, en s’yarrêtant, en nous efforçant de le comprendre, de comprendre ce quecela nous dit, ce que cela dit aujourd’hui, d’ouvrir notre âme à ce quele Seigneur veut nous dire et nous enseigner.18

La parole de Dieu n’est pas une parole du passé. Elle est« vivante… énergique » (Hébreux 4,12), et elle peut donc direquelque chose d’important pour ma vie ici et maintenant.Mais Dieu a aussi d’autres possibilités pour nous parler. LeCatéchisme nomme d’autres sources pour la prière : « le grand

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livre de la création et celui de l’histoire, la page de “l’Au-jourd’hui” de Dieu ».19 Cela signifie, par exemple, que je peuxcontempler la beauté de la création, qui me parle de la gran-deur et de la bonté du Créateur. Ou je peux réfléchir avec Dieusur ce dont j’ai fait l’expérience et considérer ce que Dieu avoulu me dire à travers tel ou tel événement, ou à travers unerencontre avec telle ou telle personne. Ainsi, Dieu nous offresouvent des lumières concrètes sur des situations particu-lières dans notre vie.

Une lumière pour notre vie

Dans la prière, Dieu nous aide à trouver le droit chemin. Ilnous réconforte dans les moments difficiles et nous donne laforce pour notre tâche. Souvent, après un temps de prière,nous voyons à nouveau clairement et nous retournons forti-fiés dans notre vie de tous les jours. « Et nous apprenons deJésus, nous dit Benoît XVI, que la prière constante nous aideà interpréter notre vie, à effectuer nos choix, à reconnaître età accueillir notre vocation, à découvrir les talents que Dieunous a donnés, à accomplir quotidiennement sa volonté,unique voie pour réaliser notre existence ».20 Un peu plus tard,dans sa catéchèse sur la prière, il affirmait :

En élevant le regard au Ciel de Dieu, dans le rapport constant avecle Christ, en ouvrant à Lui notre cœur et notre esprit dans la prièrepersonnelle et communautaire, nous apprenons à voir les chosesde manière nouvelle et à en saisir le sens le plus vrai ; la prière estcomme une fenêtre ouverte qui nous permet de garder le regardtourné vers Dieu, non seulement pour nous rappeler le but verslequel nous sommes dirigés, mais aussi pour laisser la volonté deDieu illuminer notre chemin terrestre et nous aider à le vivre avecintensité et engagement.21

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La prière nous aide donc à vivre de manière juste l’ici etmaintenant, à reconnaître à temps les sentiers erronés et à leséviter, et à utiliser notre temps pour les bonnes choses.

Voilà pourquoi il est important de « prier à travers » notre vie.Cela signifie que nous avons besoin d’apporter tout ce que nousfaisons chaque jour dans la prière, pour demander à Dieu sinous sommes sur le bon chemin, comment agir, et le prier denous donner sa force et sa bénédiction. Et si nous ne voyons pasclairement quelle décision prendre vis-à-vis d’une questionparticulière, nous avons besoin de lui présenter cette questionet de lui demander sa lumière. Dieu répond ! Probablement pasimmédiatement avec une « voix venue du ciel », mais il nousfait sentir la direction à prendre. Sainte Thérèse de Lisieux afait cette expérience. Dans son autobiographie, elle décritcomment la prière et la lecture de l’Écriture Sainte l’ont aidée àsentir la bonne décision : « Il suffit que j’ouvre les saints Évan-giles et je respire aussitôt le parfum de Jésus, et je sais alors surquel chemin courir ».22

La prière nous aide donc à faire ce qui est juste. Elle nous aideà ne pas perdre notre temps mais à l’utiliser pour qu’il porte dufruit. En fait, c’est seulement par la prière que nos actionsrestent enracinées en Dieu et évitent de se transformer en uneforme d’activisme vide et stérile. Lors du dernier Angelus avantqu’il ne renonce au ministère papal, le pape Benoît a soulignéune fois encore le « primat de la prière, sans laquelle tout l’en-gagement de l’apostolat et de la charité se réduit à del’activisme ».23 Et dans son message final de Carême, il écrivait :« l’existence chrétienne consiste en une ascension continue dumont de la rencontre avec Dieu pour ensuite redescendre, enportant l’amour et la force qui en dérivent, de manière à servirnos frères et sœurs avec le même amour que Dieu. ».24

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Ainsi, la conversation avec Dieu nous donne lumière et forcepour notre vie concrète de tous les jours. Elle nous permet decomprendre ce que Dieu veut de nous et comment nouspouvons le servir. En même temps, elle approfondit notre rela-tion avec Dieu. Lorsque la prière est une conversation vivanteavec Dieu, où la personne écoute sa voix et y répond, alors unetelle communication mène plus loin dans une communio, i.e.dans une communion profonde et intérieure avec le Dieu quiest Père, Fils et Saint-Esprit parfaitement unis dans l’amour.Ainsi la prière en paroles et en pensées conduit souvent natu-rellement à une autre forme de prière que nous allonsmaintenant aborder.

Adoration et prière contemplative

Dans une amitié humaine profonde, nous pouvons faire cetteexpérience  : au début, nous voulons plus qu’autre choseapprendre à connaître l’autre personne, de sorte que nousavons besoin de parler beaucoup avec elle. Une fois que nousla connaissons bien, nous allons bien sûr parler de choses oud’autres avec elle, mais souvent il n’est plus nécessaire debeaucoup parler. Nous nous réjouissons et nous aspirons àêtre simplement en présence de l’autre, proche de lui.

Quelque chose de semblable se produit dans la prière. Aprèsavoir réfléchi à la parole de Dieu et à notre conversation aveclui, nous n’avons plus besoin de penser ou de parler davantage.Au contraire, ce que nous voulons vraiment est de rester sim-plement avec lui, dans sa lumière, dans son amour.

La tradition spirituelle appelle cette forme de prière la«  contemplation  ». Littéralement, cela signifie «  fixer sonregard », « regarder ». « Je l’avise et il m’avise », disait saint Jean-

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Marie Vianney.25 De même que regarder quelqu’un dans lesyeux pendant longtemps signifie une rencontre très person-nelle, la prière contemplative est une rencontre personnelleprofonde, muette avec Dieu. Cela consiste simplement à être età rester dans l’amour personnel de Dieu qui est présent et nousdonne son amour.

Cette sorte de prière est souvent liée à une forme particulièrede présence de Jésus : l’Eucharistie, dans laquelle il est présentsous la forme du pain. Dans l’adoration eucharistique, nouscontemplons ce grand don de son amour. Et nous savons par lafoi qu’il nous regarde avec le même amour que lorsqu’il s’estadressé à ses disciples en disant : « Ceci est mon corps, donnépour vous » (Luc 22, 19). L’adoration eucharistique consiste doncessentiellement à « reconnaître et croire en l’amour que Dieu apour nous » (cf. 1 Jean 4, 16), nous laissant aimer par Dieu et luirendant amour pour amour avec gratitude.

Dans sa lettre encyclique sur l’Eucharistie, Ecclesia de Eucha-ristia, le pape Jean-Paul II a décrit très personnellementcomment l’adoration eucharistique était pour lui un repos surle cœur de Jésus, exactement comme l’apôtre Jean qui pouvaitreposer sur le côté de Jésus. « Il est bon de s’entretenir avec Luiet, penchés sur sa poitrine comme le disciple bien-aimé (cf. Jn13, 25), d’être touchés par l’amour infini de son cœur… Bien desfois, chers Frères et Sœurs, j’ai fait cette expérience et j’en aireçu force, consolation et soutien! ».26

Comme il l’a souvent fait, le pape Benoît a continué de déve-lopper l’enseignement de Jean-Paul II. Dans son homélie, à laJournée mondiale de la jeunesse à Cologne, en Allemagne, en2005, il a expliqué les deux dimensions essentielles de l’adora-tion eucharistique avec l’aide des termes grecs et latins pour« adoration ». Proskynesis signifie littéralement « tomber à terre »devant Dieu, en le vénérant et en le reconnaissant dans sa

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grandeur comme Dieu. Adoratio, d’autre part, signifie « contactbouche à bouche, baiser, accolade et donc en définitiveamour ».27 Ainsi l’adoration eucharistique nous mène à unerencontre directe avec Dieu. Adorer Jésus présent dans l’Eucha-ristie, c’est le vénérer et s’incliner profondément devant notregrand Dieu. L’adoration est une sorte de prolongation de laréception de l’Eucharistie dans la sainte communion, quimanifeste la plus profonde communion d’amour qui soit pos-sible sur cette terre. Pour cette raison, Jean-Paul II commeBenoît XVI n’ont cessé d’inviter les fidèles à cette forme la plusprofonde de prière personnelle.

L’adoration eucharistique nous montre aussi quelque chosed’autre : même quand nous prions en privé, notre prière n’estjamais isolée. La prière chrétienne authentique est toujoursecclésiale, intégrée dans la prière commune de l’Église. Regar-dons maintenant ce lieu de la présence de Dieu et de notreprière, que le pape émérite mentionne si souvent.

Rencontrer Dieu dans la prière liturgique de l’Église

La prière liturgique de l’Église inclut ce que l’on appelle la« liturgie des heures », dans laquelle les différents momentsde la journée sont sanctifiés, les sacrements et particulière-ment la célébration de l’Eucharistie. Pourquoi doncavons-nous besoin d’une telle prière liturgique ? Parfois, cetteforme de prière peut nous sembler raide, formelle, insuf -fisamment vivante et spontanée. Pourtant, nous pouvonsfaire l’expérience de la grande force qui réside dans la prièreen communauté, et pas seulement seul dans notre chambre.

C’est la première raison pour laquelle la prière liturgique estessentielle pour l’Église : ce sont précisément sa sobriété et sa

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structure établie qui permettent à des personnes très diffé-rentes dans des conditions de vie très diverses de prierensemble. Et dans la prière, elles deviennent une unité. Enmême temps, la foi de chaque individu est fortifiée par sonappartenance au Corps de l’Église tandis que la communion del’Église est vivifiée et fortifiée par chacun de ses membresfidèles.

C’est ici que nous trouvons la deuxième réponse à la ques-tion : « Pourquoi la prière liturgique ? ». Nous faisons souventl’expérience de ne pas savoir quels mots utiliser pour prier Dieu.Si nous en restions livrés à nous-mêmes, nous ne verrionsjamais au-delà de nos propres perspectives limitées. La liturgienous ouvre à un horizon spirituel plus profond et plus large. Lepape Benoît décrit la liturgie comme un « espace précieux », une« source précieuse pour grandir dans la prière, une source d’eauvive… un domaine privilégié dans lequel Dieu parle à chacunde nous, ici et maintenant, et attend notre réponse. ».28

Une comparaison peut nous aider à comprendre pourquoinous avons besoin de la liturgie. Personne n’apprend à parlertout seul. Au contraire, notre mère et notre père communi-quent les premiers avec nous ; puis nous entrons en contactavec d’autres membres de la famille et avec nos semblables, lesêtres humains. C’est seulement de cette façon que se développenotre capacité à penser, à comprendre et à nous exprimer.Quelque chose de similaire se produit dans la liturgie.

Ceci est vrai tout d’abord dans la prière des psaumes qui sont,après tout, la parole même de Dieu. En particulier, les psaumesfaçonnent la liturgie des heures de l’Église. Mais ils apparais-sent aussi dans chaque célébration de l’Eucharistie en tant quenotre réponse priante à la parole de Dieu entendue dans lalecture. C’est par-dessus tout dans les psaumes, nous dit le papeBenoît, que nous apprenons à prier comme des petits enfants

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qui apprennent à parler avec Dieu :

Ce que l’enfant veut exprimer est son propre vécu, mais le moyend’expression appartient à d’autres; et lui peu à peu s’en approprie;les mots reçus des parents deviennent ses mots et à travers ces motsil apprend aussi une manière de penser et de sentir, il accède à toutun monde de concepts, et il grandit à l’intérieur de celui-ci, il entreen relation avec la réalité, avec les hommes et avec Dieu. La languede ses parents est enfin devenue sa langue, il parle avec les motsreçus des autres qui sont désormais devenus ses mots. Ainsi en est-il avec la prière des Psaumes. Ils nous sont donnés pour que nousapprenions à nous adresser à Dieu, à communiquer avec Lui, à luiparler de nous avec ses mots, à trouver un langage pour la rencontreavec Dieu. Et à travers ces mots, il sera possible aussi de connaîtreet d’accueillir les critères de son action, de s’approcher du mystèrede ses pensées et de ses voies (cf. Is 55, 8-9), afin de grandir toujoursdavantage dans la foi et dans l’amour. Comme nos mots ne sont passeulement des mots, mais qu’ils nous enseignent un monde réel etconceptuel, de même ces prières aussi nous enseignent le cœur deDieu, si bien que non seulement nous pouvons parler de Dieu, maisnous pouvons apprendre qui est Dieu et, en apprenant commentparler avec Lui, nous apprenons à être homme, à être nous-mêmes.29

Ce qui est vrai des psaumes peut aussi être dit de toutes lesautres formes de prière liturgique de l’Église qui s’est enrichieau cours des siècles : « en participant à la liturgie, nous faisonsnôtre la langue de notre mère l’Église, nous apprenons à parleren elle et pour elle ».30 En priant avec l’Église, nous sommesélevés à une nouvelle compréhension, dans sa véritable etpleine relation avec le Dieu vivant. Benoît XVI a expliqué quececi ne se passe pas tout d’un coup. Nous devons grandir dansla liturgie et dans son langage. « Naturellement, … cela a lieude manière progressive, peu à peu. Je dois me plonger progres-sivement dans les paroles de l’Église, avec ma prière, avec ma

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vie, avec ma souffrance, avec ma joie, avec ma pensée. C’est unchemin qui nous transforme. ».31

C’est pour cette raison que nous ne devons pas nous scanda-liser quand, pendant un moment, les prières de la liturgie nenous parlent pas beaucoup, ou quand elles semblent sèches oudifficiles à comprendre. Nous recevons simplement ce qui nousparle et nous poursuivons sur ce chemin. Nous verrons que cechemin nous mène vers des découvertes toujours plus pro-fondes. La liturgie de l’Église a été testée pendant des siècles.Elle ne consiste nullement en des prières superficielles uséespar le temps. À travers leur profondeur et leur densité, cesprières nous permettent de nous immerger toujours plus dansla plénitude de la vie trinitaire de Dieu. Nous avons dit que laliturgie nous indique le chemin, parce qu’elle nous fortifie entant que prière communautaire, et parce qu’elle enseigne etélargit le langage de la prière. Mais la raison la plus profondepour laquelle le sommet de la prière liturgique de l’Église, lacélébration de l’Eucharistie, est aussi la « source et le sommet »de toute l’activité de l’Église32 réside dans le fait qu’elle nouspermet de devenir un avec le Christ.

En union avec le Christ, prier le Père

Au début de notre réflexion, nous avons souligné que priersignifie vivre en communion avec Dieu. Il n’existe qu’unchemin vers cette communion avec le Dieu vivant : Jésus-Christ (cf. Jean 14, 16). En, par et avec Jésus et par l’action del’Esprit-Saint, nous devenons fils et filles de notre Père descieux. Ainsi, nous avons part à la vie et à l’amour du Dieutrinitaire.

« Par lui, avec lui et en lui », entendons-nous dans la doxolo-

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gie, les paroles de louange qui concluent la prière eucharistique.Cela nous montre que l’Eucharistie a un effet sacramentel surce que nous continuons généralement dans la prière (et en par-ticulier dans l’adoration eucharistique) : elle nous fait vivre encommunion avec le Dieu trinitaire. Nous nous unissons à Jésuset, dans l’Esprit-Saint, nous prions le Père avec lui.

Benoît XVI a expliqué que Jésus « s’est identifié avec moi enprenant notre corps et l’âme humaine. Et il nous invite à entrerdans son identité, en faisant de nous un seul corps, un seulesprit avec Lui, car du plus haut de la Croix il a apporté non denouvelles lois, des tables de pierre, mais il a apporté lui-même,son corps et son sang, comme nouvelle alliance. Ainsi, il fait denous ses consanguins, un seul corps avec Lui, identifiés àLui ».33

C’est une autre des raisons pour lesquelles l’Eucharistie estla source et le sommet de la vie de l’Église. Dans la célébrationde l’Eucharistie, nous entrons dans un contact unique et directavec le mystère du Christ. Tout devient présent : son humanitéet sa divinité, son sacrifice sur la croix et sa résurrection.Quand nous recevons l’Eucharistie, il vient lui-même à nouset nous devenons un avec lui. C’est pourquoi l’Eucharistie estune forme absolument unique de prière qui ne peut être rem-placée par aucune autre.

Le pape Benoît a affirmé que «  nous ne célébrons et nevivons bien la liturgie que si nous restons dans une attitude deprière … en nous unissant au mystère du Christ et à son dia-logue de Fils avec le Père ».34

Dans l’Évangile de Jean, Jésus dit explicitement : « Celui quimange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi, jedemeure en lui » (Jean 6, 56). Ceci est vrai non seulement pourchacun de nous personnellement mais aussi pour nous en tantque communauté. Jean-Paul II a intitulé sa lettre encyclique

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sur l’Eucharistie Ecclesia de Eucharistia (L’Église vient de l’Eucha-ristie). Cela signifie que l’Église existe par l’Eucharistie. Lorsquechaque personne individuellement se joint à Jésus dans l’Eu-charistie, nous devenons aussi un avec les autres. Nousformons la communion de l’Église. Comme l’écrit saint Paul,« Puisqu’il y a un seul pain, la multitude que nous sommes estun seul corps, car nous avons tous part à un seul pain » (1Corinthiens 10, 17).

Plus encore : dans la célébration de l’Eucharistie, les fidèlesprésents ne deviennent pas seulement un en et par Jésus.L’Eucharistie lie ensemble l’Église de tous les temps et departout. Elle lie même ensemble la terre et le ciel. Le « Gloria »et le « Sanctus » que nous prions pendant la messe l’expri-ment très clairement. « Gloire à Dieu au plus haut des cieux »,a chanté la foule céleste à la naissance du Sauveur (Luc, 2, 14).« Saint, saint, saint… toute la terre est remplie de sa gloire »,ont proclamé les anges dans la vision de Dieu qu’a reçue leprophète Isaïe (Isaïe 6, 3). Dans les prières de la messe, danslesquelles nous reprenons les mêmes paroles, l’Église enprière s’unit à la louange des anges dans les cieux. La liturgieterrestre est toujours notre participation à la louange éter-nelle des cieux. Nous disons de l’Eucharistie que c’est le « gagede la vie à venir »35 parce que c’est, dès maintenant, une anti-cipation de la vie du ciel.

Dans l’Eucharistie, nous recevons tout notre « être dans leChrist », une union personnelle avec lui, la communion del’Église et la vie du ciel. C’est ainsi que nous avons tout ce dontnous avons besoin pour notre vie chrétienne. En un sens, cettevie est la continuité de ce que nous avons reçu dans l’Eucha-ristie. Notre vie découle du sacrement. C’est pourquoi, à la finde la célébration de l’Eucharistie, nous entendons les mots« Allez, vous êtes envoyés » (en latin, « Ite, missa est »).

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Nous sommes, en quelque sorte, équipés de tout ce dontnous avons besoin pour vivre notre vie quotidienne en unionprofonde avec Dieu. Ainsi, dans notre prière personnelle, enunion avec Jésus que nous avons reçu dans l’Eucharistie, nouspouvons prier le Père. Selon le pape Benoît, c’est cela précisé-ment qui distingue la prière chrétienne : « En effet, ce n’est quedans le Christ que nous pouvons dialoguer avec Dieu le Pèrecomme des fils, autrement cela n’est pas possible, mais encommunion avec le Fils nous pouvons nous aussi dire, commeIl l’a dit : « Abbà » … En m’identifiant à Lui, en étant un avecLui, je redécouvre mon identité personnelle, celle de véritablefils qui regarde Dieu comme un Père plein d’amour. ».36

Dans l’Eucharistie, j’entre ainsi dans l’unité la plus profondeavec Jésus et, en même temps, je trouve mon identité la plusprofonde : vivre en enfant de Dieu. L’Eucharistie fortifie ma viepartagée avec Dieu. Ce faisant, elle rend ma prière encore plusconfiante, intense et constante. Même dans ma vie de tous lesjours, je me tournerai vers Dieu avec la confiance d’un enfantbeaucoup plus spontanément. Mon attitude envers la viechange. Elle est de plus en plus façonnée par une confiancefondamentale, par un sentiment de sécurité même lorsque jene suis pas en train de prier explicitement et consciemment.

Finalement, je me retrouve de plus en plus attiré par l’exhor-tation de saint Paul à «  prier sans cesse  ». Plus ma vie estfortement déterminée par cette attitude d’« enfant de Dieu »,plus toute ma vie devient prière. En même temps, cette prièrem’aide, dans la vie quotidienne, à désirer et à vivre l’Eucharistiecomme une rencontre personnelle avec Dieu.

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Le combat de la prière

Dans la liturgie de l’Église, nous avons un trésor de mots etd’expériences de prière d’une grande richesse et qui nousaide à grandir dans la prière. Le sacrement de l’Eucharistie,par dessus tout, fortifie et renouvelle constamment notreunité avec Jésus. Nous avons besoin de ce soutien parce quebeaucoup de difficultés peuvent se présenter et ce, pas seule-ment au début de notre vie de prière.

Même lorsque nous avons déjà grandi dans une communionprofonde avec Dieu, la prière peut devenir un combat. Nouspeinons à dégager le temps nécessaire, à embrasser une disci-pline de régularité, à trouver la motivation et la concentrationnécessaire, ou la bonne manière et les mots pour prier. Nousne devons pas nous en étonner puisque ce qui a vraiment dela valeur dans notre vie n’est jamais acquis facilement. Il fautlutter pour l’obtenir ! Ceci est d’autant plus vrai de la prière quinous donne le plus grand bien qui soit, la vie avec Dieu.

Le Catéchisme nous enseigne que « les grands priants [et leChrist]… nous l’apprennent  : la prière est un combat… Le“ combat spirituel “ de la vie nouvelle du chrétien est insépa-rable du combat de la prière. »37 Il est important pour nous desavoir cela quand nous commençons à emprunter le cheminde la prière. Il faut que ce soit clair pour nous : ce chemin n’estpas toujours un long fleuve tranquille. C’est seulement si noussommes prêts à nous battre et si nous décidons de n’autoriseraucun obstacle à nous retenir en arrière que ces temps decombat ne nous détourneront pas de notre chemin de prière.Ils nous conduiront au contraire dans une communion plusprofonde avec Dieu.

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Benoît XVI a expliqué cela en prenant dans l’Ancien Testa-ment l’exemple de Jacob, qui lutte contre Dieu toute la nuit (cf.Genèse 32, 23-33). Le pape émérite a commencé par se référerau Catéchisme qui nous dit que « la tradition spirituelle del’Église a retenu de ce récit le symbole de la prière commecombat de la foi et victoire de la persévérance ».38 Puis, a-t-ilpoursuivi, « Le texte biblique nous parle de la longue nuit de larecherche de Dieu, de la lutte pour en connaître le nom et envoir le visage ; c’est la nuit de la prière qui avec ténacité et per-sévérance demande à Dieu la bénédiction».39

Oui, la prière est toujours un combat avec Dieu, lorsque je necomprends pas ses voies, lorsque je me bats pour accepter desévénements particuliers dans ma vie, lorsque je ne sens plus saprésence, lorsque des doutes menacent ma foi et des tentationsessaient de m’éloigner d’une vie avec Dieu, lorsque je souffred’un mal commis par d’autres, ou lorsque je souffre de mapropre faiblesse et de ma propre faute et que je suis tenté dedésespérer. Je dois alors me battre avec Dieu, souvent long-temps. Si je reste fidèle, même dans la nuit, alors, comme Jacob,je peux faire l’expérience de voir le visage de Dieu d’unemanière nouvelle et de sentir sa bénédiction sur ma vie. Le papeBenoît a affirmé : « Chers frères et sœurs, toute notre vie estcomme cette longue nuit de lutte et de prière, qu’il faut passerdans le désir et dans la demande d’une bénédiction de Dieu quine peut pas être arrachée ou gagnée en comptant sur nosforces, mais qui doit être reçue avec humilité de Lui, commedon gratuit qui permet, enfin, de reconnaître le visage du Seigneur ».40

Dans ce combat pour la prière, nous ne sommes jamais seuls.Nous sommes toujours soutenus par la communion de l’Égliseen prière, par les anges et surtout par Jésus lui-même quimarche avec nous sur le chemin de la prière. Un regard sur

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Jésus en croix peut nous donner confiance et espérance : « Jésus,qui au moment extrême de la mort se remet totalement entreles mains de Dieu le Père, nous communique la certitude que,pour autant que les épreuves soient dures, les problèmes diffi-ciles, la souffrance lourde, nous ne tomberons jamais en-dehorsdes mains de Dieu, ces mains qui nous ont créés, qui nous sou-tiennent et qui nous accompagnent sur le chemin del’existence, car elles sont guidées par un amour infini etfidèle ».41

Un regard sur Jésus nous montre aussi que si nous acceptonsce chemin dans l’obscurité et que nous y marchons dans laconfiance en Dieu, nous pouvons porter beaucoup de fruit nonseulement pour nous-mêmes mais aussi pour les autres. Jésusa pris sur lui l’obscurité de l’abandon de Dieu, et l’a portée pournous. Son chemin de croix intérieur et extérieur est devenunotre rédemption. Lorsque nous traversons des momentsd’obscurité et de difficultés dans la prière et que nous lesportons avec Jésus et pour les autres, nous coopérons à larédemption. C’est ce qu’affirme le Catéchisme : la prière « estune communion d’amour porteuse de Vie pour la multitude,dans la mesure où elle est consentement à demeurer dans lanuit de la foi. »42

Néanmoins, la prière ne porte pas de bons fruits pour lesautres uniquement dans les moments d’obscurité. La prière entant que telle est source de vie, non seulement pour celui quiprie mais pour tous. En d’autres termes, la prière revêt unepuissance missionnaire.

La prière est toujours une mission

Dans la personne qui prie, la présence de Dieu demeure detelle sorte que les autres peuvent le percevoir. Nous voyons

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souvent cela chez des contemplatifs cloitrés mais c’est vrai ausside personnes spirituelles qui vivent dans le monde. Avantmême qu’elles n’ouvrent la bouche, leur regard brille d’unelumière et d’une joie qui viennent de la présence de Dieu enelles. Cela fascine, attire, réveillant aussitôt un désir chez lesautres, « Je veux moi aussi m’approcher davantage de Dieu ». Leprophète Zacharie a prophétisé quelque chose de semblablelorsqu’il a dit : « Ainsi parle le Seigneur de l’univers : En cesjours-là, dix hommes de toute langue et de toute nation saisi-ront un Juif par son vêtement et lui diront : « Nous voulons alleravec vous, car nous avons appris que Dieu est avec vous  »(Zacharie 8, 23).

Jésus est l’ « Emmanuel » (Matthieu 1, 23), ou «  Dieu avecnous ». Celui qui prie, celui qui vit dans une union constanteavec Jésus, devient une sorte d’aimant qui attire les autres àDieu. Et ceci avant qu’il ne fasse ou ne dise quelque chose ! Si jesuis uni à Jésus et me rapproche de Dieu, j’entraîne avec moitous ceux qui sont dans mon cœur et à qui je suis lié. Ceci estvrai avant même que je ne prie explicitement pour telle ou tellepersonne, simplement en raison de ce qu’est la prière.

C’est là que réside le pouvoir des cloitres et des monastèrescontemplatifs. Bien que les moines et moniales contemplatifsvivent une vie de prière cachée aux yeux du monde, ils sesentent profondément missionnaires parce qu’ils se présententà Dieu de la part de toute l’humanité. Leur prière doit apporterle monde entier à Dieu. Cela est vrai aussi de ma prière person-nelle, si je prie dans et avec la communion qu’est l’Église. Unetelle prière est déjà missionnaire en soi ; elle possède un pouvoirmissionnaire fort et effectif.

Dans ses catéchèses du mercredi, le pape Benoît a indiquécette dimension décisive de la prière : « Dans l’amitié profondeavec Jésus et en vivant en Lui et avec Lui la relation filiale avec

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le Père, à travers notre prière fidèle et constante, nous pouvonsouvrir des fenêtres vers le Ciel de Dieu. C’est même en parcou-rant la voie de la prière … que nous pouvons aider les autres àla parcourir ».43

Avec Jésus sur le chemin de la prière

Nous avons considéré les nombreuses dimensions de laprière. En conclusion, regardons une fois encore ce qu’est dansson essence la prière chrétienne  : elle est communion avecJésus. Sur ce point, la prière chrétienne se distingue clairementde la prière des autres religions. Pour les chrétiens, la prière neconsiste pas seulement à parler à un dieu qui est sur son trône« là-haut » dans le ciel. En Jésus, Dieu lui-même est venu jusqu’ànous. La vie chrétienne consiste à devenir un avec Jésus et, dansl’Esprit Saint, à apprendre comment parler au Père avec lui.

Ainsi, la prière est à la fois parler avec Dieu et vivre et aimeren Dieu. Comme l’a écrit le pape Benoît, «  La prière doitconduire à une connaissance et à une union dans l’amour tou-jours plus profondes avec le Seigneur, pour pouvoir penser, agiret aimer comme Lui, en Lui et pour Lui. Exercer cela, apprendreles sentiments de Jésus, représente la voie de la vie chré-tienne ».44

Une unité aussi profonde avec Jésus pourrait encore paraîtretrès loin de nous. Cela pourrait sembler comme un but auquelnous aspirons mais avec l’impression que nous en sommesencore au début. Et c’est peut-être vrai. Mais c’est justement ceà quoi le pape Benoît nous encourage : se mettre en route surce chemin de prière avec joie et confiance. En le parcourant,nous remarquerons que ce chemin s’ouvre devant nous et nousconduit plus loin : « pour la prière chrétienne aussi, il est vraique c’est en cheminant que s’ouvrent des chemins. ».45

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Détail de la liturgie céleste, le Christ glorifié étant le grand prêtre. Adamet Ève adorent au premier plan, tandis que deux disciples portent lessymboles de la liturgie de la Parole et de la liturgie de l’Eucharistie.

Mur de La Parousie, Chapelle Redemptoris Mater, Cité du Vatican. Avec l’aimable autorisation du Centre Aletti.

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Annexes : Sur la prière,du pape Benoît XVIPourquoi nous avons besoin de prier

Cependant, cette force, la grâce de l’Esprit, n’est pas quelquechose que nous pouvons mériter ou acquérir, mais nouspouvons seulement la recevoir comme un don. L’amour deDieu peut répandre sa puissance uniquement quand nous luipermettons de nous transformer intérieurement. Nous devonslui permettre de traverser dans la dure carapace de notre indif-férence, de notre lassitude spirituelle, de notre conformismeaveugle à l’esprit de notre temps. Alors seulement nouspouvons lui permettre d’enflammer notre imagination et defaçonner nos désirs les plus profonds. Voilà pourquoi la prièreest si importante : la prière quotidienne, la prière personnelle,dans le silence de notre cœur et devant le Saint Sacrementainsi que la prière liturgique en Église. Elle est réceptivité purede la grâce de Dieu, amour en acte, communion avec l’Espritqui demeure en nous et nous conduit, à travers Jésus, dansl’Église, à notre Père céleste. Par la puissance de son Esprit,Jésus est toujours présent en nous, attendant tranquillementque nous nous mettions en silence à côté de Lui pour écoutersa voix, demeurer dans son amour et recevoir la « force quivient d’en-haut », force qui nous rend capables d’être sel etlumière pour notre monde.

Homélie de la messe à l’occasion de la XXIIIème Journée mondiale de la jeunesse, Sydney, Australie, 20 juillet 2008

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Je demande à chacun de vous, tout d’abord, de scruter le fondde son cœur. Pensez à tout l’amour que votre cœur est fait pourrecevoir, et à tout l’amour qu’il est appelé à donner. Au fond,nous sommes créés pour l’amour. C’est ce que la Bible veutexprimer quand elle affirme que nous sommes créés à l’imageet à la ressemblance de Dieu : nous sommes créés pour connaî-tre le Dieu d’amour, le Dieu qui est Père, Fils et Saint-Esprit, etpour trouver notre plein épanouissement dans cet amour divinqui ne connaît ni commencement ni fin…

Chaque jour nous devons choisir l’amour, et pour cela nousavons besoin d’être aidés, une aide qui vient du Christ, de laprière et de la sagesse trouvée dans sa parole, et de la grâce qu’ilnous accorde dans les sacrements de son Eglise…

Je vous invite à chercher chaque jour dans vos cœurs la sourcedu véritable amour. Jésus est toujours là, attendant silencieu-sement que nous demeurions avec lui et que nous entendionssa voix. Dans l’intimité de vos cœurs, il vous appelle à prendredu temps avec lui dans la prière. Mais ce genre de prière, la vraieprière, exige une discipline ; elle requiert de créer quotidienne-ment des moments de silence. Souvent, cela signifie attendreque le Seigneur nous parle. Même au milieu des multiples acti-vités et des préoccupations de notre existence quotidienne,nous avons besoin de créer un espace de silence, parce que c’estdans le silence que nous trouvons Dieu et c’est dans le silenceque nous découvrons notre véritable moi. Et en découvrantnotre véritable moi, nous découvrons la vocation spécifique àlaquelle Dieu nous appelle pour l’édification de son Église etpour la rédemption de notre monde…

Salutations du pape aux jeunes à la messe dans la cathédrale du Très pré-cieux sang de Notre Seigneur Jésus-Christ, Westminster, Royaume Uni, 18septembre 2010

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« Nous sommes venus l’adorer ». Avant toute activité et toutetransformation du monde, il doit y avoir l’adoration. Elle seulenous rend véritablement libres; elle seule nous donne les cri-tères pour notre action.

Discours du pape à la Curie romaine à l’occasion de la présentation des vœuxde Noël, 22 décembre 2005

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Le don particulier de l’adoration eucharistique

La célébration de l’Eucharistie et la communauté qui enémane seront d’autant plus pleines que nous nous seronsmieux préparés pour Lui dans la prière silencieuse devant laprésence eucharistique du Seigneur… Une telle adoration esttoujours davantage qu’une conversation générale avec Dieu. Onpourrait à juste titre soulever l’objection selon laquelle je peuxprier dans les bois, dans la nature. Nous le pouvons, certaine-ment. Mais si c’est tout ce qu’il y a, l’initiative de la prière reposeentièrement sur nous. La question de savoir si Dieu peut et varépondre demeure ouverte.

L’eucharistie signifie : Dieu a répondu. Ainsi, dans l’espace del’adoration eucharistique, la prière atteint un niveau tout à faitnouveau. C’est seulement là qu’elle devient réciproque. C’estseulement là qu’elle devient vraiment décisive. En effet, ellen’est pas seulement réciproque, mais universelle : quand nousprions en présence de l’Eucharistie, nous ne sommes jamaisseuls. L’Église tout entière, qui célèbre l’Eucharistie, prie avecnous. Nous prions dans un lieu où nous sommes élevés, carnous prions dans le lieu de la mort et de la résurrection du Sei-gneur. Nous prions là où la réelle demande de toutes nosrequêtes a été entendue : la demande que la mort soit vaincue,la demande d’un amour plus fort que la mort. Dans cette prière,

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nous ne sommes plus devant un Dieu que nous nous sommesimaginés. Nous nous tenons, au contraire, devant le Dieu quis’est vraiment donné à nous, qui est devenu communion pournous et nous a ainsi sauvés de nos limites, pour la communion– le Dieu qui nous conduit à la résurrection. Nous devons denouveau rechercher cette sorte de prière.

Joseph Ratzinger, Homélie dans la cathédrale Notre Dame, Münich, Allemagne, 1978.

***« En entrant dans la maison, ils virent l’enfant avec Marie samère; et, tombant à genoux, ils se prosternèrent devant lui »(Matthieu 2, 11). Chers amis, il ne s’agit pas d’une histoire loin-taine, survenue il y a très longtemps. Il s’agit d’une présence.Ici, dans la sainte hostie, Il est devant nous et au milieu de nous.Comme en ce temps-là, il se voile mystérieusement dans unsilence sacré et, comme en ce temps-là, se dévoile précisémentle vrai visage de Dieu. Il s’est fait pour nous le grain de blé tombéen terre, qui meurt et qui porte du fruit jusqu’à la fin du monde(cf. Jeann 12, 24). Il est présent comme en ce temps-là à Beth-léem. Il nous invite au pèlerinage intérieur qui s’appelleadoration. Mettons-nous maintenant en route pour ce pèleri-nage et demandons-lui de nous guider. Amen.

Veillée avec les jeunes, à l’occasion de la XXème Journée mondiale de lajeunesse, Cologne, Allemagne, 20 août 2005.

« Nous sommes venus l’adorer » :

Homélie à la messe de la XXème Journée mondiale de lajeunesse, Cologne, 2005.

Chers jeunes!Devant la sainte Hostie, dans laquelle Jésus s’est fait pour

nous pain qui soutient et nourrit notre vie de l’intérieur (cf. Jean

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6, 35), nous avons commencé hier soir le cheminement inté-rieur de l’adoration. Dans l’Eucharistie, l’adoration doit devenirunion. Dans la Célébration eucharistique, nous nous trouvonsen cette « heure » de Jésus dont parle l’Evangile de Jean. Grâce àl’Eucharistie son « heure » devient notre heure, sa présence aumilieu de nous. Avec ses disciples, Il a célébré la cène pascaled’Israël, le mémorial de l’action libératrice de Dieu qui avaitconduit Israël de l’esclavage à la liberté. Jésus suit les rites d’Is-raël. Il récite sur le pain la prière de louange et de bénédiction.Mais ensuite, se produit quelque chose de nouveau. Il ne remer-cie pas Dieu seulement pour ses grandes œuvres du passé; il leremercie pour sa propre exaltation, qui se réalisera par la Croixet la Résurrection, et il s’adresse aussi aux disciples avec desmots qui contiennent la totalité de la Loi et des Prophètes :« Ceci est mon Corps donné pour vous en sacrifice. Ce calice estla Nouvelle Alliance en mon Sang ». Il distribue alors le pain etle calice, et en même temps il leur confie la mission de redireet de refaire toujours de nouveau en sa mémoire ce qu’il est entrain de dire et de faire en ce moment.

Qu’est ce qui est en train de se passer? Comment Jésus peut-il donner son Corps et son Sang? Faisant du pain son Corps etdu vin son Sang, il anticipe sa mort, il l’accepte au plus profondde lui-même et il la transforme en un acte d’amour. Ce qui del’extérieur est une violence brutale - la crucifixion -, devient del’intérieur l’acte d’un amour qui se donne totalement. Telle estla transformation substantielle qui s’est réalisée au Cénacle etqui visait à faire naître un processus de transformations, dontle terme ultime est la transformation du monde jusqu’à ce queDieu soit tout en tous (cf. 1 Corinthiens 15, 28). Depuis toujours,tous les hommes, d’une manière ou d’une autre, attendentdans leur cœur un changement, une transformation dumonde. Maintenant se réalise l’acte central de transformation

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qui est seul en mesure de renouveler vraiment le monde : laviolence se transforme en amour et donc la mort en vie.Puisque cet acte change la mort en amour, la mort comme telleest déjà dépassée au plus profond d’elle-même, la résurrectionest déjà présente en elle. La mort est, pour ainsi dire, intime-ment blessée, de telle sorte qu’elle ne peut avoir le dernier mot.Pour reprendre une image qui nous est familière, il s’agit d’unefission nucléaire portée au plus intime de l’être - la victoire del’amour sur la haine, la victoire de l’amour sur la mort. Seulel’explosion intime du bien qui vainc le mal peut alors engendrerla chaîne des transformations qui, peu à peu, changeront lemonde. Tous les autres changements demeurent superficielset ne sauvent pas. C’est pourquoi nous parlons de rédemption :ce qui du plus profond était nécessaire se réalise, et nouspouvons entrer dans ce dynamisme. Jésus peut distribuer sonCorps, parce qu’il se donne réellement lui-même.

Cette première transformation fondamentale de la violenceen amour, de la mort en vie, entraîne à sa suite les autres trans-formations. Le pain et le vin deviennent son corps et son sang.Cependant, la transformation ne doit pas s’arrêter là, c’estplutôt à ce point qu’elle doit commencer pleinement. Le corpset le sang du Christ nous sont donnés  afin  que, nous-mêmes,nous soyons transformés à notre tour. Nous-mêmes, nousdevons devenir corps du Christ, consanguins avec Lui. Tousmangent l’unique pain, mais cela signifie qu’entre nous nousdevenions un. L’adoration, avons-nous dit, devient ainsi union.Dieu n’est plus seulement en face de nous, comme le ToutAutre. Il est au-dedans de nous, et nous sommes en Lui. Sadynamique nous pénètre et, à partir de nous, elle veut se pro-pager aux autres et s’étendre au monde entier, pour que sonamour devienne réellement la mesure dominante du monde.Je trouve une très belle allusion à ce nouveau pas que la dernière

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Cène nous pousse à faire dans les différents sens que le mot« adoration” » a en grec et en latin. Le mot grec est proskynesis. Ilsignifie le geste de la soumission, la reconnaissance de Dieucomme notre vraie mesure, dont nous acceptons de suivre larègle. Il signifie que liberté ne veut pas dire jouir de la vie, secroire absolument autonomes, mais s’orienter selon la mesurede la vérité et du bien, pour devenir de cette façon, nous aussi,vrais et bons. Cette attitude est nécessaire, même si, dans unpremier temps, notre soif de liberté résiste à une telle perspec-tive. Il ne sera possible de la faire totalement nôtre que dans lesecond pas que la dernière cène nous entrouvre. Le mot latinpour adoration est ad-oratio - contact bouche à bouche, baiser,accolade et donc en définitive amour. La soumission devientunion, parce que celui auquel nous nous soumettons estAmour. Ainsi la soumission prend un sens, parce qu’elle nenous impose pas des choses étrangères, mais nous libère àpartir du plus profond de notre être.

Revenons encore à la dernière cène. La nouveauté qui s’y estproduite, résidait dans la nouvelle profondeur que prenait l’an-cienne prière de bénédiction d’Israël, qui devient alors la parolede la transformation et nous donne à nous de participer àl’heure du Christ. Jésus ne nous a pas donné la mission derépéter la Cène pascale, qui, du reste, en tant qu’anniversaire,ne peut pas se répéter à volonté. Il nous a donné la missiond’entrer dans son “heure”. Nous y entrons grâce à la parole quivient du pouvoir sacré de la consécration - une transformationqui se réalise par la prière de louange, qui nous met en conti-nuité avec Israël et avec toute l’histoire du salut, et qui en mêmetemps nous donne la nouveauté vers laquelle cette prièretendait par sa nature la plus profonde. Cette prière - appeléepar l’Église « prière eucharistique » - constitue l’Eucharistie. Elleest parole de pouvoir, qui transforme les dons de la terre de

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façon tout à fait nouvelle en don de soi de Dieu et qui nousengage dans ce processus de transformation. C’est pourquoinous appelons cet événement Eucharistie, traduction du mothébraïque beracha - remerciement, louange, bénédiction, etainsi transformation à partir du Seigneur : présence de son« heure ». L’heure de Jésus est l’heure où l’amour est vainqueur.En d’autres termes  : c’est Dieu qui a vaincu, parce qu’Il estl’Amour. L’heure de Jésus veut devenir notre heure et elle ledeviendra, si nous-mêmes, par la célébration de l’Eucharistie,nous nous laissons entraîner dans ce processus de transforma-tions que le Seigneur a en vue. L’Eucharistie doit devenir lecentre de notre vie. Ce n’est ni positivisme ni soif de pouvoir, sil’Église nous dit que l’Eucharistie fait partie du dimanche. Aumatin de Pâques, les femmes en premier, puis les disciples,eurent la grâce de voir le Seigneur. Depuis lors, ils surent quedésormais le premier jour de la semaine, le dimanche, seraitson jour à Lui, le jour du Christ. Le jour du commencement dela création devenait le jour du renouvellement de la création.Création et rédemption vont ensemble. C’est pour cela que ledimanche est si important. Il est beau qu’aujourd’hui, dans denombreuses cultures, le dimanche soit un jour libre ou, qu’avecle samedi, il constitue même ce qu’on appelle le « week-end »libre. Ce temps libre, toutefois, demeure vide si Dieu n’y est pasprésent. Chers amis, quelquefois, dans un premier temps, ilpeut s’avérer plutôt mal commode de devoir prévoir aussi lamesse dans le programme du dimanche. Mais si vous en prenezl’engagement, vous constaterez aussi que c’est précisément cequi donne un juste centre au temps libre. Ne vous laissez pasdissuader de participer à l’Eucharistie dominicale et aidez aussiles autres à la découvrir. Parce que la joie dont nous avonsbesoin se dégage d’elle, nous devons assurément apprendre àen comprendre toujours plus la profondeur, nous devons

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apprendre à l’aimer. Engageons-nous en ce sens - cela en vautla peine! Découvrons la profonde richesse de la liturgie del’Église et sa vraie grandeur : nous ne faisons pas la fête pournous, mais c’est au contraire le Dieu vivant lui-même quiprépare une fête pour nous. En aimant l’Eucharistie, vous redé-couvrirez aussi le sacrement de la Réconciliation, dans lequella bonté miséricordieuse de Dieu permet toujours un nouveaucommencement à notre vie.

Qui a découvert le Christ se doit de conduire les autres versLui. On ne peut garder pour soi une grande joie. Il faut la trans-mettre. Dans de vastes parties du monde, il existe aujourd’huiun étrange oubli de Dieu. Il semble que rien ne change mêmes’il n’est pas là. Mais, en même temps, il existe aussi un senti-ment de frustration, d’insatisfaction de tout et de tous. On nepeut alors que s’exclamer : Il n’est pas possible que ce soit cela,la vie ! Non, vraiment. Et alors conjointement à l’oubli de Dieu,il existe comme un « boom » du religieux. Je ne veux pas dis-créditer tout ce qu’il y a dans cette tendance. Il peut y avoir aussila joie sincère de la découverte. Mais dans ce contexte, la reli-gion devient presque un produit de consommation. On choisitce qui plaît, et certains savent aussi en tirer un profit. Mais lareligion recherchée comme une  sorte de « bricolage », en fin decompte ne nous aide pas. Elle est commode, mais dans lesmoments de crise, elle nous abandonne à nous-mêmes. Aidezles hommes à découvrir la véritable étoile qui nous indique laroute : Jésus Christ! Nous aussi, nous cherchons à le connaîtretoujours mieux pour pouvoir conduire les autres vers lui demanière convaincante. C’est pourquoi il est si importantd’aimer la Sainte Écriture et, par conséquent, de connaître lafoi de l’Église qui nous ouvre le sens de l’Ecriture. C’est l’EspritSaint qui guide l’Eglise dans sa foi en croissance, et c’est Lui quil’a faite et qui la fait pénétrer toujours plus dans les profondeurs

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de la vérité (cf. Jean 16, 13). Le Pape Jean-Paul II nous a donnéune œuvre merveilleuse, dans laquelle la foi des siècles estexpliquée de façon synthétique  : le Catéchisme de l’Églisecatholique. Moi-même, récemment, j’ai pu présenter l’Abrégéde ce Catéchisme, qui a également été élaboré à la demande duPape défunt. Ce sont deux livres fondamentaux que je voudraisvous recommander à tous.

Évidemment, les livres à eux seuls ne suffisent pas. Formezdes communautés fondées sur la foi ! Au cours des dernièresdécennies sont nés des mouvements et des communautés danslesquelles la force de l’Évangile se fait sentir avec vigueur. Cher-chez la communion dans la foi en étant ensemble descompagnons de route qui continuent de suivre le chemin dugrand pèlerinage que les mages d’Orient nous ont indiqué lespremiers  ! La spontanéité des nouvelles communautés estimportante, mais il est aussi important de conserver la com-munion avec le Pape et avec les Évêques. Ce sont eux quigarantissent qu’on ne recherche pas des sentiers privés, maisau contraire qu’on vit dans la grande famille de Dieu que le Sei-gneur a fondée avec les douze apôtres.

Encore une fois je dois revenir à l’Eucharistie. « Puisqu’il y aun seul pain, la multitude que nous sommes est un seul corps »dit saint Paul (1 Corinthiens 10, 17). En cela il entend dire  :Puisque nous recevons le même Seigneur et que Lui nousaccueille et nous attire en lui, nous sommes une seule choseaussi entre nous. Cela doit se manifester dans la vie. Cela doitse voir dans notre capacité à pardonner. Cela doit se manifesterdans notre sensibilité aux besoins de l’autre. Cela doit se mani-fester dans notre disponibilité à partager. Cela doit semanifester dans notre engagement envers le prochain, celuiqui est proche comme celui qui est extérieurement loin, maisqui nous regarde toujours de près. Il existe aujourd’hui des

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formes de bénévolat, des modèles de service mutuel, dont notresociété a précisément un besoin urgent. Nous ne devons pas,par exemple, abandonner les personnes âgées à leur solitude,nous ne devons pas passer à côté de ceux qui souffrent. Si nouspensons et si nous vivons dans la communion avec le Christ,alors nos yeux s’ouvriront. Alors nous ne nous contenteronsplus de vivoter, préoccupés seulement de nous-mêmes, maisnous verrons où et comment nous sommes nécessaires. Envivant et en agissant ainsi, nous nous apercevrons bien vite qu’ilest beaucoup plus beau d’être utiles et d’être à la disposition desautres que de se préoccuper seulement des facilités qui noussont offertes. Je sais que vous, en tant que jeunes, vous aspirezaux grandes choses, que vous voulez vous engager pour unmonde meilleur. Montrez-le aux hommes, montrez-le aumonde, qui attend justement ce témoignage des disciples deJésus Christ et qui, surtout par votre amour, pourra découvrirl’étoile que nous suivons en tant que croyants.

Allons de l’avant avec le Christ et vivons notre vie en vraisadorateurs de Dieu ! Amen !

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Sources

1 Catéchisme de l’Église catholique (CEC), 1.2 CEC, 2565.3 Benoît XVI, Audience générale, 22 juin 2011.4 Id., Salutations du pape aux jeunes, Messe dans la Cathédrale du

Très Précieux Sang de Notre Seigneur Jésus-Christ - Westminster,18 septembre 2010.

5 Jean-Paul II, Novo Millenio Ineunte, 32.6 Benoît XVI, Audience générale, 4 mai 2011.7 CEC, 2697.8 Thérèse d’Avila, Livre de la vie, cité in CEC, 2709.9 Benoît XVI, Audience générale, 3 octobre 2012.

10 Id., Audience générale, 7 mars 2012.11 Id., Audience générale, 17 août 2011.12 Id., Salutations du pape aux jeunes, Westminster, Royaume Uni, 18

septembre 2010.13 Id., Audience générale, 17 août 2011.14 Cf. CEC, 2711.15 Benoît XVI, Homélie de la messe à l’occasion de la XXIIIème

Journée mondiale de la jeunesse, Sydney, Australie, 20 juillet 2008.16 Cité in CEC, 260.17 Benoît XVI, Salutations du pape aux jeunes, Westminster,

Royaume Uni, 18 septembre 2010.18 Id., Audience générale, 17 août 2011.19 CEC, 2705.20 Benoît XVI, Audience générale, 7 mars 2012.21 Id., Audience générale, 12 septembre 2012.22 Sainte Thérèse de Lisieux, Histoire d’une âme, chapitre 9.23 Benoît VI, Angelus, 24 février 2013.24 Id., Message pour le carême 2013.25 Cité in CEC, 2715.

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26 Jean-Paul II, Lettre encyclique Ecclesia de Eucharistia [Surl’Eucharistie dans son rapport à l’Église], 25.

27 Benoît XVI, Homélie à la messe à l’occasion de la XXème Journéemondiale de la jeunesse, Cologne, 21 août 2005.

28 Id., Audience générale, 26 septembre 2012.29 Id., Audience générale, 22 juin 2011.30 Id., Audience générale, 3 octobre 2012.31 Ibid.32 Cf. Concile Vatican II, Constitution dogmatique sur l’Église, Lumen

Gentium, 11.33 Benoît XVI, Audience générale, 1er juin 2011.34 Id., Audience générale, 26 septembre 2012.35 Cf. CEC, 1402.36 Benoît XVI, Audience générale, 3 octobre 2012.37 CEC, 2725.38 CEC, 2573.39 Benoît XVI, Audience générale, 25 mai 2011.40 Ibid.41 Id. Audience générale, 15 février 2012.42 CEC, 2719.43 Benoît XVI, Audience générale, 30 novembre 2011.44 Id., Audience générale, 27 juin 2012.45 Id., Audience générale, 30 novembre 2011.

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L’auteur

Le p. Andreas Schmidt (1974) est né à Würzburg, en Allemagne. Il fait

partie de la Communauté de l’Emmanuel depuis 1996 et a été

ordonné prêtre en 2002 à Münich (Allemagne). Après avoir rempli

deux services pastoraux, il a obtenu son doctorat à Vienne, en

Autriche, avec une thèse intitulée Jésus, l’ami. De 2008 à 2011, il a été

directeur de l’Emmanuel School of Mission, un programme de formation

préparant les jeunes à l’évangélisation, à Altötting (Allemagne). Le p.

Schmidt est actuellement chapelain au grand séminaire de l’archi -

diocèse de Münich et Freising en Allemagne.

Le « Service d’information catholique »

Depuis sa fondation, l’Ordre des Chevaliers de Colomb est impliqué

dans l’évangélisation. En 1948, les Chevaliers ont lancé le Catholic

Information Service (CIS) pour fournir des publications catholiques au

grand public ainsi qu’aux paroisses, écoles, maisons de retraite,

établissements militaires, prisons, assemblées législatives, au corps

médical et aux personnes individuelles qui en font la demande. Depuis

plus de 60 ans, le CIS a publié et distribué des millions de livrets et des

milliers de personnes ont suivi sa formation catéchétique.

« Catholic Information Service » est une marque déposée des Chevaliers de Colomb.

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RéDACTRICE EN CHEF :

Michelle K. Borras, Ph.D.

Directrice du Catholic

Information Service

éDITEURS :

Alton Pelowski et

Andrew Matt

© Copyright 2013, Chevaliers de Colomb.

Tous droits réservés.

Textes de Benoît XVI © copyright 2013,

Librairie éditrice du Vatican, Cité du

Vatican. Toutes les autres œuvres citées

sont la propriété de leurs auteurs respectifs.

Les citations des écritures sont issues de la

nouvelle traduction liturgique de la Bible de

l’Association épiscopale liturgique pour les

pays francophones (AELF).

Série sur la nouvelle évangélisation

1 Qu’est-ce que la nouvelle évangélisation ?

1è R E PARTIE « CAR DIEU A TANT AIMé LE MONDE »2 « Je crois en toi » : La question de Dieu dans le monde moderne3 Les mystères de la vie de Jésus4 Un Dieu qui est trois fois Amour5 « Nous sommes venus l’adorer » : Introduction à la prière à l’école

de Benoît XVI

2è M E PARTIE « APPELéS à AIMER… »6 Appelés à aimer : La théologie de l’amour humain, de Jean-Paul II7 à l’image de l’Amour : Le mariage et la famille8 Suivre l’Amour pauvre, chaste et obéissant : La vie consacrée

3è M E PARTIE … DANS L’égLISE, éPOUSE DE L’AgNEAU

9 « Qu’il me soit fait selon ta parole » : Marie, l’origine de l’église10 Avec le cœur de l’époux : Le sacerdoce ministériel11 La transfiguration du monde : Les sacrements12 Lumière et silence : Un journal intime eucharistique

4è M E PARTIE « AIMER EN ACTE ET EN VéRITé »13 Libres en vue de quoi ?14 La justice : De la dignité du travail15 La justice : L’évangile de la vie

5è M E PARTIE « IL NOUS A AIMéS JUSQU’AU BOUT »16 La dignité de la personne souffrante17 « Regardez ! J’étais mort et me voilà vivant… » : La mort et

la vie éternelle

ANNEXES : OUTILS POUR LA NOUVELLE éVANgéLISATION

A La beauté de la sainteté : L’art sacré et la nouvelle évangélisationB La technologie et la nouvelle évangélisation :

Critères de discernement

NIHIL OBSTAT

Susan M. Timoney, S.T.D.

Censor Deputatus

IMPRIMATUR

Donald Cardinal Wuerl

Archevêque de Washington

Archidiocèse de Washington

IMAgE DE LA COUVERTURE

Les trois mages offrant en cadeau l’or, l’encens et la myrrhe à l’enfant Jésus.

Chapelle de l’Université du Sacré-Cœur, Fairfield, Connecticut. La mosaïque a

été réalisée par le père Marko Ivan Rupnik, SJ et les artistes du Centre Aletti

en 2008. Image reproduite avec l’aimable autorisation du Centre Aletti.

9 août 2013

Le nihil obstat et l’imprimatur sont des

déclarations officielles attestant qu’un

livre ou un livret ne contient pas d’erreurs

doctrinales ou morales. Cela n’implique

pas que les personnes qui ont accordé le

nihil obstat et l’imprimatur sont d’accord avec

le contenu, les opinions ou les affirmations

qui y sont exprimés.

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#5 Série sur la nouvelle évangélisation #5 Série sur la nouvelle évangélisation

Père Andreas Schmidt

« Avant toute activité, avant que le monde ne puissechanger, il faut adorer. Seule l’adoration nous rendvraiment libres… »

Nous sommes venus l’adorer : Une introduction à la prière à l’école de Benoît XVI

S E RV I C E D ’ I N F O R M AT I O N C AT H O L I Q U E S E RV I C E D ’ I N F O R M AT I O N C AT H O L I Q U E

Le pape Benoît XVI a enseigné que la prière est bien plus quece que nous pensons souvent. Elle nous conduit toujours plusprofondément dans la communion avec le Dieu qui est lasource de notre vie. Elle nous ouvre à notre prochain.Ensemble, la prière liturgique et personnelle forme un uniqueacte d’adoration aimante dans laquelle nous découvronspourquoi et pour qui nous sommes faits. S’inspirant desaudiences du mercredi du pape émérite sur la prière et de sonexemple remarquable, ce livret invite le lecteur à devenir unétudiant à l’ « école » d’un maître de prière contemporain.

Catholic Information Service ®Conseil suprême des Chevaliers de Colomb

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— Pape Benoît XVI