l'impact de l'ambush marketing sur l'evènementiel sportif
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L’AMBUSH MARKETING DANS LE SPORT
"""""""Mémoire de Recherche rédigé par Quentin DEREIMS et Mathieu PERRILLAT
sous la direction de Jean-Philippe DANGLADE
Juillet 2013
""" Page 3 INTRODUCTION
Page 4 A - Le Sponsoring sportif
Page 6 B - L’Ambush Marketing
Page 7 C - Méthodologie de recherche
" Page 8 I - REVUE CRITIQUE DE LITTERATURE
Page 9 A - Origine et définition de l’Ambush Marketing
Page 12 B - Causes, techniques et principes de fonctionnement
Page 20 C - Méthodes de lutte face à l’Ambush Marketing
" Page 33 ANNONCE DE LA PROBLEMATIQUE " Page 34 II - ETUDE DE CAS : NIKE
Page 35 A - L’Ambush Marketing par Nike : 30 ans d’histoires
Page 42 B - Coupe du Monde 2010 : Etude complète du dispositif
Page 61 C - Jeux Olympique 2012 : Etude de la stratégie digitale
" Page 68 III - IMPACT DE L’AMBUSH MARKETING
Page 69 A - Interviews d’acteurs du monde sportif
Page 73 B - Analyse des résultats
Page 84 C - Impact de l’Ambush Marketing dans le sport
" Page 87 CONCLUSION
Page 89 ANNEXES & BIBLIOGRAPHIE
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SOMMAIRE
""Quel est le point commun entre la Reine d’Angleterre, David Beckham et Paul McCartney ? Outre le
fait qu’ils soient tous anglais, ils ont tous les trois participé, à leur façon, aux derniers Jeux
Olympiques de Londres en 2012. Preuve que les plus grands rendez-vous sportifs de la planète vont
bien au-delà du sport et sont de véritables fêtes populaires, regroupant athlètes, personnalités
politiques ou encore artistes de tous genres. Claude Sobry a défini en 2003 la notion de « Sport
Spectacle » qui illustre cette tendance des organisateurs d’événements à transformer de
simples compétitions sportives en shows télévisés planétaires.
Ces spectacles attirent même les moins sportifs d’entre nous, procurant ainsi la sensation de vivre et
de partager quelque chose d’unique, de sensationnel, avec le monde entier. En France comme à
l’étranger, de tels évènements génèrent des audiences très importantes. Ainsi, en 2012, cinq des
dix meilleures audiences de la télévision française, concernaient des matches de l’UEFA Euro 2012,
et ce, même lorsque l’équipe de France n’était pas sur le terrain.
Depuis près de deux siècles, avec une nette accélération ces dernières années en raison de
l’omniprésence médiatique, de nombreuses entreprises essaient d’utiliser l’attractivité et la
popularité de ces compétitions pour se rendre visibles aux yeux d’un maximum de personnes.
C’est de cette idée qu’est né le sponsoring sportif.
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"
INTRODUCTION
"""Le sponsoring sportif peut se définir comme « l’ensemble des moyens utilisés par une entreprise
(financiers, techniques et/ou matériels), pour soutenir un événement sportif », en échange d’une
visibilité sur l’événement, « à hauteur de sa contribution ».
On considère souvent les objectifs suivants pour l’entreprise « Sponsor » :- Le gain de notoriété et d’image sur le long terme.- La stimulation des ventes à court terme (points de ventes sur l’événement, produits dérivés, jeux
concours, etc.).- La motivation du personnel (accès privilégiés, rencontres avec les sportifs, loges, repas, etc.).- L’élargissement de la clientèle (invitations VIP, réseaux de partenaires, repas d’affaires, etc.).
Ce nouveau type de contrat a vu le jour en 1861 en Angleterre lorsque l’entreprise de restauration «
Spiers and Pond » signa avec l ‘équipe Britannique de cricket. Il est arrivé en France quelques
années plus tard, en 1887, avec l’association du magazine « Vélocipède » à une course automobile.
Depuis il s’est développé partout dans le monde, jusqu’à devenir omniprésent sur les évènements
sportifs, quels qu’ils soient. Au fil du temps, les sommes d’argent ainsi que les engagements
respectifs entre organisateurs et sponsors sont devenus de plus en plus importants : en Mars 2012,
une étude, publiée par le quotidien Les Echos, chiffrait les recettes du Sport Business en 2010
à 121 milliards de dollars dont 35 milliards pour le sponsoring. Ce qui en fait le deuxième plus
gros revenu après la billetterie (39 milliards). Les prévisions pour 2015 annoncent des recettes de
145 milliards, dont 45 milliards pour le sponsoring à égalité avec la billetterie (le reste étant les
produits dérivés et les droits TV). Il s’agit donc du segment qui croit le plus actuellement.
Ces chiffres témoignent d’une relation gagnant/gagnant entre les entreprises et les évènements
sportifs. Les premiers investissant de plus en plus dans ce que l’on peut considérer aujourd’hui
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A - LE SPONSORING SPORTIF
comme un média à part entière, et les seconds, organisant des évènements de plus en plus
populaires et impactants.
Cependant, la relation Entreprise – Organisateurs d’événement n’est pas si simple et idéale que cela.
En effet, de plus en plus d’entreprises essaient de tirer profit de la popularité des événements
sportifs sans « jouer le jeu » du sponsoring. Ce phénomène est communément appelé «
l’Ambush Marketing » et peut mettre à mal l’équilibre du marché sportif.
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"""L’Ambush Marketing a été défini par Meenaghan en 1994 comme étant « la pratique par laquelle
une autre compagnie, souvent un concurrent, s’introduit dans l’attention du public autour de
l’événement afin de détourner son attention du sponsor officiel, pour la tourner vers eux. »
Les définitions sont nombreuses (souvent subjectives) et les pratiques, très variées. Ce qui est
important à retenir avant de rentrer dans le détail c’est qu’il s’agit d’entreprises souhaitant
communiquer via un événement, sans payer les droits de sponsoring pour diverses raisons.
Les conséquences du développement de cette pratique sont nombreuses, un exemple est très
parlant : lors des derniers Jeux Olympiques, Londres 2012, Adidas avait investi à hauteur de 40
millions de Livres pour s’associer à l’événement. Face à cette situation et pour contrer son principal
concurrent, Nike, a adopté une stratégie d’Ambush Marketing.
Une étude menée sur le sol britannique par un cabinet anglais Lightspeed Research, a analysé la
notoriété des différents sponsors auprès du grand publique avant le lancement des Jeux. Il en est
ressorti que, pour 15% des personnes interrogées Nike était l’équipementier officiel contre 14%
pour Adidas.
Face à ce résultat, il semble légitime de se demander si l’Ambush Marketing ne remettrait pas
en cause les bénéfices du sponsoring pour les entreprises partenaires.
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B - L’AMBUSH MARKETING
"""Nous allons dans un premier temps étudier l’Ambush Marketing de manière théorique. Au
travers des nombreuses études existantes sur le sujet, nous allons tenter de définir les principales
causes et pratiques liées à ce phénomène, tout en essayant de rester le plus neutre possible. Car de
nombreuses études dénoncent cette pratique Marketing, ce n’est pas notre souhait. Cette partie
nous amènera à définir clairement notre problématique et notre axe de recherche : l’impact de
l’Ambush Marketing sur l’évènementiel sportif aujourd’hui, en nous focalisant sur les
évènements internationaux.
Pour étayer notre analyse, nous étudierons la politique d’Ambush Marketing de Nike. Le géant
américain est considéré par de nombreux experts comme un spécialiste du genre. Nous analyserons
les objectifs, les pratiques et les résultats de cette stratégie qui permet au leader des
équipementiers sportifs de conserver sa position depuis des années sans n’avoir jamais sponsorisé
une Coupe du Monde de Football ou une édition des Jeux Olympiques.
Ensuite, nous allons interviewer des acteurs majeurs de l’évènementiel sportif afin d’obtenir
des informations de la part des détenteurs de droits, des spécialistes du Marketing Sportif, des
Ambushers et des marques victime d’Ambush. Grâce aux données recueillies et aux connaissances
accumulées dans la rédaction de nos deux premières parties nous dresserons un bilan de la
relation actuelle entre Ambush Marketing et Sponsoring Sportif pour répondre à notre
problématique.
Enfin, en conclusion de cette recherche, nous essaierons de projeter les résultats de notre étude
sur l’Ambush Marketing dans le sport à court, moyen et long terme.
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C - METHODOLOGIE DE RECHERCHE
""En préambule, notons les termes que vous allez rencontrer dans la lecture de cette étude, qui
méritent un éclaircissement :
L’ « Ambush Marketing » peut être désigné par différents termes ayant tous le même sens :« Marketing en embuscade », « pseudo- parrainage », « pseudo-sponsorship », « marketing
insidieux », « Marketing sauvage », ou encore « Marketing parasite ». On trouve dans ces
appellations différentes connotations plus ou moins négatives, et par conséquent nous nous
limiterons aux plus neutres d’entre elles.
Le terme « Ambusher » s’utilise au même titre que « Marketeur insidieux », « Marketeur parasite »
ou encore « Marketeur en embuscade ».
Les termes de sponsors et de parrains seront utilisés pour définir la même entité.
Certaines abréviations pourront également être rencontrées :
- CIO : Comité International Olympique.
- FIFA : Fédération Internationale de Football Association.
- NHL: National Hockey League.
- UEFA: Union of European Football Association.
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I - REVUE CRITIQUE DE LITTERATURE
"""Le terme Ambush Marketing a été utilisé pour la première fois en 1984 par Jerry Welsh lorsque
celui-ci travaillait chez American Express durant les Jeux Olympiques de Los Angeles. Pour rappel,
ces Jeux Olympiques, furent les premiers financés exclusivement par le secteur privé évitant alors
aux contribuables de devoir mettre la main à la poche. Pour se faire, le Los Angeles Olympic
Organizing Committee instaura une exclusivité de parrainage qui limitait le nombre de sponsors
autorisés afin d’offrir d’avantage de visibilité aux partenaires. Les entreprises ayant perçu
l’opportunité que cette exclusivité leur offrait, ont investi des sommes beaucoup plus importantes.
Ce fut un réel succès, puisqu’avec 35 sponsors, le CIO enregistra des gains à hauteur de 157M$
contre 20M$ en 1976 à Montréal avec plus de 600 sponsors.
Logo des Jeux de Los Angeles 1984
Cependant, la limitation du nombre de partenaires et le montant des droits de sponsoring ont
poussé certaines entreprises à avoir recours à d’autres méthodes afin de garder un lien avec
l’événement : l’Ambush Marketing.
Jerry Welsh le définit comme étant l’association non autorisée d’une entreprise ou une
organisation à un événement (sportif) en grâce à des moyens Marketing faisant croire à une
association officielle. A ce stade, Jerry Welsh ne dénonce pas cette pratique, qu’il considère
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A - ORIGINE ET DEFINITION DE L’AMBUSH MARKETING
comme étant une possibilité que les entreprises doivent envisager dans le cadre d’une campagne
de publicité. Elle permet même selon lui une concurrence saine.
Par la suite, les évolutions ont fait que l’Ambush Marketing a revêtu une connotation négative, il
a été très critiqué par les détenteurs de droits, voyant là une menace pour la pérennité de
leurs évènements. Certaines définitions engagées contre l’Ambush sont donc apparues. A titre
d’exemple, Micheal Payne, anciennement directeur marketing du CIO a, dans un article publié en
1998, considérés les Ambushers comme des « voleurs s’accaparant intentionnellement quelque
chose qui ne leur appartient pas ». Le CIO parlera en 2008 de « marketing pirate » dans son manuel
pour les villes candidates à l’organisation.
En 2007, face à la multitude d’articles dénonçant la pratique de l’Ambush Marketing, Jerry Welsh a
publié un article : « Ambush Marketing: What It Is; What It Isn’t » dans lequel il rappelle que le
terme qu’il a lui-même inventé, n’évoque pas une pratique non éthique ou immorale comme on a
tendance à la décrire, mais simplement une stratégie marketing pour une entreprise visant à
concurrencer une autre entreprise, partenaire d’un événement, dont la campagne de
communication est « mal pensée et mal conçue ».
Ainsi, les définitions de l’Ambush Marketing sont souvent subjectives et dépendent de l’implication
de l’auteur dans l’organisation d’évènements sportifs.
Dans les définitions neutres souvent prises en référence, on retrouve celle de T. Meenaghan (1994)
évoquée en introduction de notre recherche : « La pratique par laquelle une autre compagnie,
souvent un concurrent, s’introduit dans l’attention du public autour de l’événement afin de
détourner son attention du sponsor officiel, pour la tourner vers eux. »
Marc Mazodier, actuellement professeur à l’université de Nottingham Ningbo en Chine, et ayant fait
de nombreuses recherches sur l’Ambush Marketing, rajoute, dans une étude intitulée « Un cadre
d’analyse de l’efficacité du pseudo-parrainage », une notion importante à cette définition. Il met en
avant l’idée selon laquelle il faut que le lien entre l’événement et l’entreprise soit
volontairement créé et non pas issu d’une incompréhension du public comme c’est parfois le
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cas. Il doit s’agir d’une « campagne planifiée » pour faire douter le spectateur comme l’évoquent
également Sandler et Shani dans leur étude « Olympic Sponsorship VS Ambush Marketing : who
gets the gold ? ».
Ce dernier point est important car il montre que l’Ambush Marketing nécessite des investissements
importants et une réelle planification. Par ailleurs, cette définition met en lumière le fait que la
volonté des Ambushers n’est pas seulement de gagner en visibilité mais également de faire «
douter » le public sur l’identité du sponsor afin d’empêcher son ou ses concurrents de tirer
profit de leur sponsoring.
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"""Les causes qui poussent une entreprise à avoir recours à la pratique de l’Ambush Marketing
peuvent être diverses et variées. Nous allons évoquer les plus communes d’entre-elles :
" [CAUSES] - L’augmentation des prix :
Une des premières causes à avoir été mise en avant par Jerry Welsh dès 1984 est l’augmentation
des coûts du sponsoring. Comme nous avons pu le voir, les prix ont fortement augmenté avec
l’apparition de la politique d’exclusivité des sponsors des plus grands événements sportifs.
Depuis, les coûts de sponsoring ont littéralement explosé, atteignant des niveaux jugés « indécents
» par le grand public. A titre d’exemple, en 2012, les partenaires du CIO ont dépensé plus de 2
Milliards de Livres pour s’associer aux Jeux Olympiques de Londres. Seules quelques entreprises
sont en mesure de payer de tels montants, les autres doivent trouver des solutions alternatives.
[CAUSES] - Les contrats d’exclusivité :
Mis en place en 1984, ces contrats empêchent deux entreprises du même secteur d’être sponsor du
même événement. Il limite également le nombre de sponsors, comme expliqué précédemment,
pour accroitre la visibilité de ceux-ci.Par réaction, les entreprises ne pouvant pas s’associer à l’événement adoptent alors d’autres
solutions comme l’Ambush Marketing. C’est une des raisons principales de la guerre entre Coca-
Cola (détenteur de droits) et Pepsi (Ambusher).
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B - CAUSES, TECHNIQUES ET PRINCIPES DE FONCTIONNEMENT
[CAUSES] - La liberté de créativité :
Les contrats de sponsoring sont souvent vendus avec un package précis n’accordant que très peu
de liberté au parrain pour développer ses propres communications. C’est la raison pour laquelle
certaines entreprises choisissent l’Ambush Marketing afin de garder leur liberté, c’est le cas
notamment de Nike.
[CAUSES] - Eviter les scandales :
Ces dernières années, de nombreux scandales sont venus ternir l’image de certains sports (dopage,
drogues, sexe...). Un cas récent et très marquant, concerne le cycliste Lance Armstrong qui a vu
l’ensemble de ses sponsors l’abandonner suite à la confirmation de ses tricheries successives lors de
ses victoires sur le Tour de France : certains ont évoqué une perte d’une valeur de 30 millions de
dollars pour les sponsors suite au scandale. «La hantise d'un sponsor, c'est le dopage de l'athlète
sous contrat, car cela peut ruiner tous ses efforts de communication, voire même lui porter
préjudice en termes d'image», affirmait Didier Poulmaire, avocat en droit du sport, lors d’une
interview accordée au Figaro en Octobre 2012.
[CAUSES] - La multiplication des entités impliquées dans les évènements :
Marc Mazodier met en avant le fait que l’Ambush Marketing est aussi la conséquence du nombre
grandissant d’entités (équipes, sportifs, fédérations, médias, collectivités,...) s’entremêlant lors des
évènements sportifs majeurs. Chacune possédant ses propres partenaires et souhaitant bénéficier
des retombés médiatiques. Il est plus facile pour ces marques d’intégrer l’événement sans être pour
autant sponsor de celui-ci. On se souvient de Niklas Bentner durant l’euro 2012, exhibant un
caleçon « Paddy Power » après voir marqué face au Portugal. Paddy Power n’était pas sponsor de
l’événement et ne possède d’ailleurs pas de ligne de sous vêtement. Cette opération d’Ambush
montre qu’il est difficile d’empêcher les sportifs de communiquer sur leurs sponsors personnels. Ce
regroupement de partenaires à différents niveaux est donc un réel défi de gestion pour les
organisateurs s’ils veulent protéger les sponsors officiels.
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Ces raisons prouvent que la relation gagnant-gagnant entre un sponsor et un événement peut
être mis à mal par la férocité de la concurrence et l’adoption de méthodes de communication
alternatives comme l’Ambush Marketing. On distingue communément cinq techniques
d’Ambush différentes que nous allons présenter et illustrer par un exemple :
" [TECHNIQUES] - Présence aux alentours de l’événement :
Un exemple bien connu en France fut la campagne mise en place par K-SWISS et son agence de
communication Tribeca, en juin 2008 durant Roland Garros : pour l’occasion, la marque avait
élaboré une maquette taille réelle d’une voiture écrasée par une balle de tennis d’un mètre
cinquante de diamètre aux couleurs de K-SWISS. La voiture était stationnée devant l’entrée de
Roland Garros, avec de l’autre côté de la route, un camion affichant en gros un joueur venant de
frapper une balle, donnant l’impression que celle-ci était celle écrasant la voiture. La marque déjà
présente dans le monde tennistique avait donc clairement tenté de s’associer avec l’événement.
D’autant plus que furent également distribués gratuitement à chaque personne devant l’entrée, des
goodies aux couleurs de la marque, pouvant être utilisés comme éventails durant la journée. Cette
action, qu’on appelle « publicité intrusive », est une autre forme d’Ambush très pratiquées
également. K-SWISS était donc ce jour-là présent à l’extérieur et à l’intérieur de l’événement.
La campagne d’Ambush menée par K-Swiss
A voir ici : http://www.dailymotion.com/video/x5ss8z_k-swiss-a-roland- garros_creation#.UctsJfZ5wx8
""
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[TECHNIQUES] - Organisation d’un « contre événement » durant la manifestation :
Kodak était le sponsor officiel des Jeux Olympiques d’Atlanta en 1996. Mais son principal
concurrent, Fuji, a sponsorisé une exposition photo à New York qui portait le nom « Images of
Excellence » et célébrait les 100 ans de l’athlétisme. Les photos invitaient les visiteurs à parcourir les
Etats Unis, de villes en villes au travers de clichés d’athlétisme, pour terminer la visite à Atlanta. La
marque était alors parvenue à s’associer indirectement aux JO via cette opération sans pourtant
pouvoir bénéficier d’une réelle proximité avec l’événement.
[TECHNIQUES] - Association avec une autre entité présente sur l’événement :
Il s’agit bien souvent d’une équipe ou d’un athlète. Un exemple récent a soulevé la question de la
limite entre l’Ambush et la simple activation de partenariats. Li-Ning, le leader Chinois des
équipementiers sportifs, a signé fin 2012 un contrat avec Dwyane Wade puis par la suite avec le
Miami Heat. Ce partenariat a permis à la marque chinoise de gagner en visibilité et d’aménager des
points de vente dans la salle du Heat. Li-Ning mis ainsi un pied dans la NBA dont l’équipementier
officiel est depuis des années Adidas qui possède des contrats d’exclusivité sur tous les produits
textiles. S’agit-il donc d’une simple activation de partenariat ou bien d’un cas d’Ambush Marketing ?
Quoi qu’il en soit, cela illustre bien comment une marque peut venir intégrer un événement par
l’intermédiaire d’une autre entité présente.
Dwayne Wade et Li-Ning
A voir ici : http://www.youtube.com/watch?v=J9ScYfjT6X4
" 15
[TECHNIQUES] - Plan de communication suggérant un lien avec l’événement :
En France, la marque Oasis a sorti au printemps 2013 une nouvelle campagne d’affichage
publicitaire spécifique à chaque région. Ces affiches mettaient en scène les fruits Oasis dans
différentes situations et s’amusaient à faire ressortir les clichés régionaux. A l’occasion de la fin du
championnat de France de Ligue 1, deux affiches firent particulièrement parler d’elles. La première
présentait une poire habillée en tenue de footballeur avec une queue de cheval et un slogan « Ici,
c’est Poiris », en référence au Paris Saint Germain et à sa star Zlatan Ibrahimovic. La deuxième
présentait la fraise dans un stade avec le slogan « fiers d’être Mûrseillais », clin d’œil évident à
l’Olympique de Marseille. Cette campagne au timing parfait est un exemple d’Ambush Marketing
simple et efficace.
Visuels de la campagne d’Oasis
[TECHNIQUES] - Association avec un média qui couvre l’événement :
Les Jeux Olympiques de Los Angeles ont marqué le début d’une guerre Marketing entre Kodak et
Fuji, les deux leaders mondiaux de la photographie. Fuji était le partenaire officiel de ces
olympiades mais ses droits n’incluaient pas ceux de retransmission qui étaient détenus par la chaine
américaine ABC. Kodak sauta alors sur l’occasion pour s’associer à ABC et Ambusher Fuji par la
même occasion. Fuji tenta ensuite d’attaquer Kodak en justice mais sans succès. Lors des Jeux de
Séoul en 1988, les rôles s’inversèrent, Kodak devint le sponsor officiel du CIO donc Fuji décida de se
venger en s’associant à l’équipe de natation américaine et Ambusher à son tour son concurrent.
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Au-delà de ces cinq principales formes d’Ambush, une multitude d’autres stratégies sont
mises en places ponctuellement par différents types d’Ambushers, souvent simultanément pour
décupler l’efficacité de la campagne. Parmi elles, l’évocation d’un sponsor officiel dans le message
publicitaire est très répandue.
Une campagne particulière faisant appel à ce type d’Ambush Marketing eut un grand succès. Il
s’agit de celle mise en place par American Express en 1994 durant les Jeux Olympiques de
Lillehammer alors que Visa était sponsor officiel de l’événement. American express avait lancé une
publicité avec comme message principal: « If you are travelling to Lillehammer, you’ll need a
passport, but you don’t need a visa ». L’originalité et l’engagement de ce message ont marqué les
esprits à tel point que 54% des personnes répondant à un sondage, pensaient qu’American Express
était le sponsor officiel contre 72% pour Visa. En prenant en compte le fait que Visa a dépensé 40
millions de dollars pour ce partenariat, on réalise qu’American Express a parfaitement réussi à
Ambusher son concurrent Visa pour gagner en visibilité à moindre coût.
Malgré les divergences de pratiques, l’Ambush Marketing est toujours fondé sur une
hypothèse; celle selon laquelle il existe un flou dans l’esprit du spectateur ou du
consommateur lorsqu’on l’interroge sur l’identité des sponsors d’un événement.
Comme l’explique Marc Mazodier, ce flou avait déjà été mis en avant par différentes études sur la
publicité (R.J Harris en 1977 ou encore Jacoby et Hoyer en 1982). Celles ci montraient notamment
qu’une proportion importante de personnes ne comprenait pas bien la publicité et qu’il existait
donc une possibilité de mauvaise interprétation du message transmis. L’Ambusher, en s’associant
volontairement à un événement, accentue le flou existant et rend l’identification du réel
sponsor encore plus difficile pour le spectateur « lambda ».
La question que l’on peut alors se poser est de savoir quels sont les effets de l’Ambush
Marketing pour la marque embusquée dans l’esprit du spectateur. Cette dernière, au-delà de
flouter l’identification du sponsor, parvient-elle à bénéficier des mêmes retombés que celui-ci ?
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Nous avons vu en introduction que le sponsoring avait différents objectifs, comme le gain de
notoriété, l’augmentation des ventes, l’élargissement de la clientèle ou encore la motivation du
personnel. S’il semble clair que l’Ambusher ne peut bénéficier de ce dernier, qu’en est-il des autres ?
Marc Mazodier, dans son étude, part du principe que l’Ambusher, en feignant d’être le partenaire
de l’événement, utilise les mêmes mécanismes que le sponsor, touchant ainsi le spectateur de
la même manière. Pour cela il étudie ces mécanismes, afin d’évaluer leur compatibilité avec
l’Ambusher :
" [PRINCIPES] - Le transfert :
Ce principe est mis en avant en 1996 par Ganassali et Didellon, il explique comment fonctionne le
sponsoring. Il implique que, via l’association entre le partenaire et l’événement, un transfert
d’information s’effectue entre, l’événement, le spectateur, et ce qui entoure l’événement (à savoir les
sponsors ou Ambushers). Le spectateur va ensuite transmettre l’information qu’il reçoit de
l’événement vers le sponsor.
Les valeurs associées à l’événement, sont transférées dans l’esprit du spectateur, qui lui- même va
les associer par la suite au sponsor. Dans ce cas, il s’agit d’un transfert cognitif. C’est ainsi que le
sponsor bénéficie des valeurs associées à l’événement sportif. L’Ambusher, en feignant d’être
sponsor, afin de paraitre lié à l’événement dans l’esprit du consommateur, peut bénéficier de ce
même transfert si le spectateur est trompé.
Le transfert peut aussi être affectif. En effet, le spectateur peut être sensible aux apports du
sponsoring pour l’évènementiel sportif, et dans ce cas il peut développer une réaction affective
envers le parrain. Là encore, l’Ambusher peut bénéficier de cette réaction si le spectateur se trouve
trompé par la marque embusquée. En revanche si le spectateur découvre que la marque
embusquée le trompe, l’inverse se produira.
" 18
[PRINCIPES] - L’entitativité :
Dans le cas où l’événement possède de nombreux partenaires, le mécanisme du transfert est
beaucoup plus compliqué. Pour le comprendre, la notion d’entitativité a été mise en avant par
Carillat en 2005 et reprise par Marc Mazodier. L’entitativité se produit lorsqu’un groupe est perçu
comme une unité. Dans le cas d’un événement sportif avec de nombreux partenaires, le spectateur
va percevoir les sponsors selon une idée commune liée à son ressenti vis à vis de l’événement.
L’ensemble des partenaires bénéficiera donc de la même considération, et l’Ambusher pourra
d’autant plus tirer profit de l’événement. Ceci explique pourquoi la multiplication des partenaires
autour des événements a permis l’essor du marketing en embuscade, comme nous l’avons expliqué
précédemment.
[PRINCIPES] - Les modèles de persuasion implicites :
Marc Mazodier évoque enfin deux théories : celle de la « mésattribution » et celle des réseaux
associatifs. La première, développée par Zajonc en 1980, indique que l’exposition répétée à un «
stimulus » peut améliorer la vision que le spectateur a de ce même stimulus. La seconde, évoquée
par Keller en 1987, avance l’idée que le sujet, victime d’une exposition à des messages très courts,
sera susceptible de mal identifier la source du stimulus. La réaction affective développée par le
message pourra donc être associée à la mauvaise source. Dans le cas de l’Ambush marketing, il peut
donc associer sa réaction à l’Ambusher, et non pas au partenaire. L’Ambusher, en liant ces deux
modèles, peut donc multiplier les messages publicitaires autour de l’événement, venant perturber
la vision du spectateur.
"Toutes ces théories qui illustrent le fonctionnement du sponsoring, nous montrent clairement
que tout individu peut associer les informations qu’il reçoit lors d’un événement à l’Ambusher
plutôt qu’au sponsor officiel. Si l’Ambusher parvient à s’associer correctement à l’événement,
et si la campagne du sponsor officiel n’est pas clairement établie, les possibilités pour
l’Ambusher de tirer profit des retombées d’un événement, sont nombreuses. 19
"""Les organisateurs et leurs sponsors tentent de lutter contre les Ambushers afin de pérenniser
leurs relations et accroitre l’efficacité respective de leurs partenariats. Ainsi, intéressons-nous
désormais aux méthodes existantes pour contrer l’Ambush Marketing.
Parmi celles-ci, nous distinguerons les réponses « Juridiques » des réponses que l’on nommera
« Marketing », impliquant différents procédés n’ayant pas recours aux méthodes légales.
Tout d’abord, notons que les recherches passées ont souligné l’indispensable alliance et mise en
commun des moyens entre le sponsor et l’organisateur de l’événement pour lutter
efficacement face aux Ambushers que ce soit avec des moyens légaux ou Marketing. Ensuite,
précisons que la majorité des pratiques d’Ambush Marketing ne sont pas illégales, d’où la
difficulté d’avoir recours à la justice pour les victimes. Le fait pour une entreprise, non partenaire
d’un événement, d’acheter du temps de diffusion sur une chaine télé peu de temps avant un
évènement n’a rien d’illégal.
Enfin, cette étude étant un mémoire de Recherche en Marketing, cette section légale n’a pas
vocation à être exhaustive mais vise simplement à présenter quelques explications qui nous
permettront par la suite de mieux appréhender le sujet.
"
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C - METHODES DE LUTTE FACE A L’AMBUSH MARKETING
Parmi les méthodes juridiques, nous évoquerons le régime de la propriété intellectuelle, incluant
notamment le droit des marques, les droits d’auteur et le droit à l’image, puis nous aborderons
rapidement le régime de la concurrence déloyale pour enfin discuter du droit des contrats.
" [REGIME DE LA PROPRIETE INTELLECTUELLE] - Le droit des marques :
Il s’agit de la première protection qui vient à l’esprit quand on évoque des pratiques d’ambush
marketing. Le régime de la propriété intellectuelle regroupe les droits accordés aux créations
intellectuelles, que celles-ci soient artistiques ou industrielles.
Dans notre cas nous nous intéresserons aux créations industrielles et en particulier celles en lien
avec notre sujet, au droit des marques et au droit relatif aux copyrights en général sur les dessins,
logos, indications géographiques.
Le droit des marques, principal concerné ici, implique que l’organisateur de l’événement, ait
préalablement enregistré l’ensemble des signes distinctifs relatifs à l’événement (logos, sigles,
noms,...) comme « marques », afin que ceux-ci puissent être protégés. Cet enregistrement confèrera
à son « titulaire un droit de propriété » sur « les titres et services qu’il a désignés ». C’est de cette
façon que les organisateurs d’évènements sportifs majeurs peuvent se protéger notamment de la
contrefaçon.
Dans une étude de 2003 présentée en Inde par Sudipta Bhattacharjee de l’université nationale des
sciences Juridiques de Calcutta, celle-ci évoque le régime de la propriété intellectuelle face à
l’Ambush Marketing. Dans son raisonnement, elle distingue deux « classes » d’Ambush : la première
regroupant les pratiques dites « pirates » venant directement enfreindre les droits de propriété
comme par exemple le droit des marques ; la seconde, réunit l’ensemble des activités plus subtiles
que nous étudions en majorité dans ce mémoire, venant créer des liens avec les évènements sans
être officiellement sponsor proclamé de l’événement. Elle explique que selon elle, le régime de la
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propriété intellectuelle permet de punir l’Ambush Marketing de la première classe, grâce à une série
de règles ou de lois venant protéger les droits intellectuels.
Parmi ces règles, nous retrouvons notamment :
- l’interdiction de s’associer avec un événement sans License.
- l’interdiction d’utiliser des photographies, illustrations, films, ou autres logos protégés sans
autorisation.- l’interdiction d’utiliser des mots, symboles ou encore pictogrammes, prêtant à confusion avec
l’événement sans autorisation.- l’interdiction de produire et vendre des produits dérivés de contrefaçon.
- l’interdiction de vendre ou d’échantillonner des produits au sein de l’événement sans
autorisation.- l’interdiction d’utiliser des images ou apparitions d’athlètes avec un but commercial pendant
l’événement sans autorisation.
Ces règles protègent les sponsors et les évènements, cependant celles-ci n’étant pas
parfaitement adaptées au sponsoring, les Ambushers parviennent assez facilement à les
contourner, comme le montre l’ensemble des exemples déjà évoqués auparavant dans notre
étude. Un exemple en particulier, évoqué par Sudipta Bhattachariee, illustre bien la difficulté que
peut avoir la loi à trancher face à des cas d’Ambush : En 1990, au Canada, Coca est sponsor officiel
de la Ligue Nationale de Hockey (NHL) depuis le Printemps 1989, pour un montant de 2,6 millions
de dollars. Le contrat signé n’incluant pas la possibilité pour Coca de communiquer, via des
publicités à l’antenne, durant les matchs de Hockey. Ce droit avait été accordé à Molson Breweries,
un brasseur Canadien. Molson octroya lui-même à Pepsi-Cola, ce droit de communication à
l’antenne. C’est ainsi que Pepsi mis en place une annonce nommée « The Diet Pepsi four million
dollar pro-hockey playoff pool » en prenant garde de ne pas enfreindre les restrictions liées à
l’accord entre la NHL et Coca. La NHL attaqua Pespi en justice avec pour motif que leur publicité
laissait sous-entendre un accord entre la NHL et eux même. Sans entrer dans les détails du procès,
22
celui-ci ne put aboutir pour la NHL, le tribunal stipulant qu’il n’y avait aucune violation du contrat
avec Coca.
Cet exemple, choisi parmi d’autres, illustre l’incapacité du tribunal à trancher dans cette affaire, avec
les moyens légaux dont il dispose. On retiendra trois raisons, expliquant l’inefficacité du droit
des marques dans le cas de l’ambush marketing :
Tout d’abord, pour qu’une marque puisse être enregistrée, celle-ci doit avoir un réel caractère
distinctif, ce qui pose souvent problème. A titre d’exemple, les images d’un ballon ou d’un joueur
de football ne sont pas suffisamment distinctives pour être considérées comme « marques », et
peuvent donc être librement utilisées par les Ambushers. De la même manière, avaient été
vivement débattus les termes comme «World Cup 2006», « Germany 2006 », « WM 2006 », « World
Cup Germany » ou encore « World Cup 2006 Germany » jugés pas suffisamment distinctifs lorsque
l’Allemagne était pays organisateur de la coupe du monde cette même année. Cet aspect du droit
des marques a été la source de nombreux autres désaccords par le passé, dont on retrouve
beaucoup d’exemples en ligne aujourd’hui.
La seconde raison est que l’enregistrement des marques est une procédure très lente qui peut
prendre plusieurs années, impliquant donc que les organisateurs fassent la demande très tôt.
A titre d’exemple, la FIFA avait déposé la marque « WM 2006 » (en amont de la coupe du monde
2006 en Allemagne), en Juin 2001, Elle lui fut accordée seulement en 2003.
Logo de la coupe du monde 2006 en Allemagne
23
Enfin, les prérogatives que confère le droit des marques au bénéficiaire ne suffisent pas à «
couvrir » l’ensemble des pratiques de l’Ambush Marketing.
[REGIME DE LA PROPRIETE INTELLECTUELLE] - Le droit à l’image et le droit d’auteurs :
Deux autres droits issus du régime de la propriété intellectuelle auxquels on peut avoir recours dans
le cas d’une affaire d’Ambush marketing sont les droits d’auteur et le droit à l’image.
Ce dernier concerne le droit d’utilisation de l’image des sportifs. Droit que les évènements
souhaitent garder pour eux. La jurisprudence, ayant établie que ce droit n’appartenait qu’au sportif,
toute utilisation de l’image d’un athlète doit être validée par celui-ci, laissant alors l’opportunité
pour une marque non partenaire de l’événement d’utiliser celle-ci.
Kim Clijsters a été au cœur d’un cas d’Ambush Marketing en 2001, des images d’elle prises à Roland
Garros, ayant été utilisées sans son accord. Le cas fut réglé à l’amiable.
L’autre droit, le droit d’auteur ne concerne ici que les créations artistiques originales, encadrant dans
le cas du sport professionnel, les édifices architecturaux tels que les stades, ou encore les logos et
autres « éléments figuratifs ». Le logo des Jeux Olympiques par exemple fut protégé du droit
d’auteur jusqu’à la mort de son créateur en 1937. Désormais, un nouveau logo est recréé à chaque
édition, permettant de le protéger.
L’exemple de ces trois droits issus du régime de la propriété intellectuelle, montre bien que celui-ci
permet en parti de lutter face à des cas d’Ambush, réduisant les pratiques en les encadrant.
Cependant il reste mal adapté comme l’illustre les exemples ci-dessus.
" [LE REGIME DU DROIT DE LA CONCURRENCE DELOYALE] - La concurrence parasitaire:
Ce régime est assez large et nous n’évoquerons que l’exemple de la concurrence parasitaire.
L’Ambush Marketing, en tant que « parasite » lors des évènements sportifs, peut être traité grâce à
la théorie du parasitisme. La concurrence parasitaire, comme nous la nommerons, permet de traiter
24
les cas d’entreprises qui tentent, sans effort ni investissement quelconque, de tirer profit des
investissements et efforts d’un tiers. Cette définition semble donc bien être adaptée aux cas
d’Ambush Marketing.
Voici un exemple de la mise en pratique de la concurrence parasitaire. En France, en 1996, une
entreprise lança le slogan : « La Côte d’Azur, l’autre pays de la tulipe ». Elle fut attaquée enjustice
par l’Office néerlandais des produits laitiers, détenteur d’un marque « La Hollande, l’autre pays du
fromage », ce dernier reprochant à la société concernée l’utilisation d’un slogan trop proche de
celui de leur marque, et pouvant par conséquent « parasiter » celle-ci, et bien que les entreprises ne
soient pas concurrentes. La Cour de Cassation, fit droit à la réclamation de l’Office néerlandais, et
condamna la société pour agissements parasitaires.
Cet exemple montre que dans certains cas, ce régime peut protéger les victimes face à l’Ambush.
Cependant, le régime de la concurrence déloyale, et donc la concurrence parasitaire, a plusieurs
limites.
Au niveau de la concurrence parasitaire tout d’abord, en Belgique, plusieurs conditions sont
requises pour que celle-ci puisse être attaquée :
- Il faut que le produit ou service copié ait une valeur économique.
- Il faut que le service ou produit copié soit le fruit d’un travail créatif et d’investissements
financiers et temporels.
- Il faut que le copieur tire profit des efforts du copié.
- Il faut que le copieur ne fournisse aucun effort de créativité.
Ces quatre conditions ne sont que très rarement réunies dans le cas de l’Ambush Marketing.
L’Ambusher ne tire pas nécessairement profit des efforts du sponsor, mais tente de tirer profit de
l’événement et des bénéfices qui peuvent être liés à son association avec celui-ci. Ensuite,
l’Ambusher ne copie pas le sponsor, mais créé la plupart du temps une campagne d’Ambush
originale et différente de celle du sponsor.
25
Par ailleurs, concernant le régime de la concurrence déloyale, il est important de mettre en avant le
fait que ce régime n’est pas uniforme dans tous les pays. Il permet principalement de traiter des cas
locaux, lorsque l’Ambush marketing est majoritairement global. Ensuite, le caractère déloyal d’une
campagne d’Ambush est issu de la seule « appréciation » du juge et n’est donc pas une « science
exacte ». Ceci laisse donc sous-entendre que tout cas sera difficile à juger et que les Ambushers
peuvent tenter de trouver des alternatives.
" [LE REGIME DU DROIT DES CONTRATS] - Clauses spécifiques :
En amont de chaque événement sportif, de nombreux contrats sont signés, entre l’organisateur de
l’événement, et différents cocontractants. Au sein de ses contrats, de nombreuses clauses peuvent
être rajoutées, notamment des clauses permettant de lutter face à l’Ambush Marketing. Les contrats
sont principalement des contrats visant la cession des droits de l’événement, initialement en
possession de l’organisateur, au profit de différents partenaires.
A titre d’exemple, la FIFA est au départ détentrice des droits de la coupe du monde de football, tout
comme le CIO est détenteur des droits des Jeux Olympiques. Dans l’organisation, la FIFA tout
comme le CIO (au travers de sous entités) vont donc céder leurs droits à des partenaires. C’est le
principe du sponsoring.
Peuvent être alors « cocontractants » : médias, partenaires commerciaux, spectateurs, participants,
ou encore la ville / le pays d’accueil de l’événement. Au travers des clauses incluses dans le contrat :
- Le CIO peut donc imposer à la ville hôte de mettre en place un plan anti Ambush marketing
très rigoureux.- Les athlètes ou fédérations, peuvent se voir demander de ne pas communiquer au travers de
partenaires commerciaux concurrents de ceux liés à l’événement, sous peine de perdre leur
accréditation (dans le cas des Jeux Olympiques).- Les spectateurs peuvent se voir interdire de vendre ou distribuer des objets publicitaires,
26
autres que ceux des partenaires.- Les médias se voient imposer un certain nombre de règles concernant la rediffusion de
l’événement. - Enfin, les partenaires commerciaux, vont conclure des clauses visant à mettre en place des
plans de lutte communs face aux Ambushers.
Comme on peut le voir, le droit des contrats consiste essentiellement en une arme préventive
face à l’Ambush, définissant des règles, et mettant en place des restrictions. Il permet à
l’organisateur d’avoir un contrôle sur l’ensemble de la publicité liée à son événement, et les
sanctions, en cas de non-respect des clauses, pouvant être assez lourdes (jusqu’au retrait du
statut de ville hôte), c’est un outil efficace pour les organisateurs. Cependant, le droit des
contrats possède lui aussi ses limites. La question de l’exploitation des droits d’image de
l’événement pose problème. En effet, si en France, les organisateurs sont propriétaires des droits
d’exploitations des évènements, ce n’est pas le cas dans tous les pays. Dès lors, il n’est pas possible
de protéger cette exploitation grâce au droit des contrats. Par ailleurs, le droit des contrats n’engage
pas l’Ambusher. Puisque, par définition il n’est pas signataire. Il agit comme un tiers utilisant
l’événement pour communiquer sans en avoir le droit. A aucun moment il ne peut se voir imposer
les restrictions ou obligations découlant des clauses des contrats. Il peut donc toujours tenter de
trouver une faille.
En conclusion, le droit des contrats, là encore n’est pas suffisant pour lutter efficacement face
à l’Ambush. Il permet néanmoins de réduire sa pratique, et de canaliser certaines formes
d’Ambush.
Parmi les trois régimes évoqués précédemment, nous avons parlé plusieurs fois du problème du
manque d’homogénéisation entre les pays. Les régimes juridiques concernés étant nationaux, ils ne
suffisent pas pour combattre un phénomène qui se veut international.
Suite à ce constat de faiblesse, les organisateurs ont souvent eu recours à des mesures légales
ponctuelles pour protéger un événement en particulier : depuis les Jeux Olympiques de Sydney en
27
2000, chaque édition a mis en place une législation spécifique pour protéger l’événement. Ces
législations, concernant directement l’Ambush Marketing, elles apparaissent donc plus adaptées.
Voici plusieurs exemples :
"" [MESURES LEGISLATIVES PONCTUELLES] - Jeux Olympiques de Sydney 2000 :
Deux lois furent adoptées pour cette édition. La première concernait les signes relatifs aux Jeux
Olympiques, venant compléter le droit des marques. Furent donc protéger certains termes tels que
« jeux de Sydney », ou encore « jeux du millenium ». Elle lutta également contre les références
indirectes à l’événement. La deuxième loi s’attaqua à la publicité faite dans l’évènement mais aussi
aux alentours de l’événement.
[MESURES LEGISLATIVES PONCTUELLES] - Jeux Olympiques d’Athènes 2004 :
Les lois mises en place, furent proches de celles de Sydney, concernant la publicité aux abords de
l’événement. Elles furent cependant plus répressives, prévoyantt des peines allant jusqu’à
l’emprisonnement.
[MESURES LEGISLATIVES PONCTUELLES] - Jeux Olympiques de Londres 2012 :
Sans entrer trop dans les détails, Londres, mis en place une loi protégeant l’organisation générale
des Jeux Paralympiques et Olympiques. Elle fut donc nettement plus large que lors des éditions
précédentes. Elle s’attaqua donc non seulement à la publicité aux alentours du parc olympique,
mais également à toute publicité ayant un lien potentiel, même indirect avec l’événement. Les
spectateurs, se sont vu interdire bon nombre de vêtements ou tout autre produit arborant des
marques concurrentes. De nombreuses critiques furent même publiées, condamnant des méthodes
trop strictes.
[MESURES LEGISLATIVES PONCTUELLES] - Jeux Olympiques de Rio 2016 :
28
Il n’est jamais trop tôt pour bien faire. Ainsi le Brésil a adopté une loi dès l’attribution des Jeux
0lympiques à Rio en 2009 visant à protéger l’ensemble des symboles spécifiques, et les éventuelles
évocations de l’événement par des entités non partenaires. Des mesures identiques ont été prises
en amont de l’organisation de la coupe du Monde de football 2014.
" [MESURES LEGISLATIVES PONCTUELLES] - Les limites de ces dispositifs :
Ces législations mises en place ponctuellement présentent donc l’avantage d’être parfaitement
adaptées pour la lutte face à l’Ambush autour d’un événement concerné. Cependant, des limites
demeurent.
Parmi celles-ci on retrouve les difficultés d’interprétation de ces lois, qui viennent doubler les lois
déjà en place telles que la loi des marques. La multitude de clauses et de lois rend le cadre législatif
très opaque. En cas de non-respect du droit de propriété intellectuelle, il est difficile de savoir
quelle sanction appliquer, celle de la loi ponctuelle, souvent plus stricte, ou celle du régime déjà en
place.
Une autre critique de ces mesures porte sur le caractère trop strict. Pour l’organisation des derniers
Jeux Olympiques de 2012 à Londres, le Parlement Anglais signa en 2006 un Olympics Game Act,
conférant au CIO d’importants pouvoirs afin de protéger ses marques, ses droits d’auteurs, et
l’exclusivité de ses sponsors. Ainsi furent déployés, 280 agents pour contrôler le commerce autour
des 28 sites. Dans la ville, une « escouade » d’agents de protection des marques surveilla les
commerces et habitats, avec le pouvoir de saisir, et de sanctionner par des amendes.
Nombreux furent les commerces qui se trouvèrent dans l’obligation de changer de nom. Ce fut le
cas notamment de l’Olympic Bar ou Le London Olympus Hotel. Un boulanger se vit même contraint
de changer une vitrine faite pour l’occasion avec des pains en forme du logo Olympique. Les
médias se virent interdire l’autorisation d’utiliser librement les logos et noms tels que « Olympiques
», et enfin les spectateurs furent obligés de manger la nourriture des partenaires, de s’habiller,
29
comme nous l’avons déjà évoqué, sans arborer de marques concurrentes aux sponsors. La liste de
restriction étant très longue, les exemples furent nombreux.
Face à toutes ses restrictions, de nombreuses protestations s’élevèrent, et l’on vit apparaitre des
slogans sur des affiches arborant le logo des Jeux, « The law forbids the use of the Olympic logo
without official permission, SO GO AHEAD, ARREST ME! »
Affiches contre les mesures anti-Ambush de Londres.
Le caractère intrinsèque de ces législations, qui n’ont qu’une portée limitée dans le temps et
l’espace, montre toute la difficulté pour lutter contre un phénomène, qui se veut international.
Après étude de quelques mesures légales permettant de lutter contre l’Ambush, on peut voir
que les marques en embuscade, parviennent toujours à trouver les moyens de contourner la
Loi confrontée à la double difficulté d’être parfaitement adaptée sans pour autant être trop
drastique.
"
30
Pour les organisateurs, la lutte face à l’Ambush marketing est un enjeu tel, que les moyens mis
en place n’ont pas ou peu de limites, si ce n’est des limites financières. Aux armes légales, dont
nous en avons évoqué quelques exemples, s’ajoutent les « armes » de lutte non légales. On les
nomme non légales, car elles ne sont pas issues de l’arsenal législatif bien que concernant les
mêmes parties visées par les méthodes précédentes.
Nous séparerons ces méthodes selon deux catégories. La première, regroupant les stratégies
marketing préventives, rendant difficile la tâche des Ambushers. La deuxième comprenant les
armes permettant de sensibiliser les spectateurs à l’Ambush dans le but de décrédibiliser les
Ambushers.
[METHODES MARKETING] - Stratégies préventives :
Nous l’avons évoqué auparavant. Pour éviter qu’une marque puisse mettre en place une politique
d’Ambush, il est nécessaire de réduire au maximum les opportunités. Cette théorie fut celle de Jerry
Welsh, affirmant que l’Ambush était simplement le résultat d’une campagne de sponsoring mal
menée par un sponsor.
Pour réduire ces brèches, il est nécessaire qu’organisateurs et sponsors travaillent ensembles.
L’organisateur doit assurer l’exclusivité au sponsor, et ce dernier doit s’assurer d’inscrire sa
campagne de sponsoring dans sa campagne de communication globale, regroupant ses
investissements financiers et « intellectuels » pour optimiser son sponsoring. Il convient de
communiquer sur son statut de sponsor officiel, mais également mettre tout en œuvre pour être au
maximum visible durant l’événement. Aux Jeux Olympiques de 1996 à Atlanta, Coca acheta les
droits à hauteur de 40 millions de dollars, et investit en parallèle jusqu’à 200 millions dans sa
communication, allant jusqu’à bâtir un parc d’attraction au nom de la marque pour l’événement.
Une autre méthode qu’utilise Coca, est l’achat de droits ou d’espaces publicitaires, sur tous
supports, engageant des sommes considérables, sans nécessairement activer ces droits ou
supports, mais seulement dans le but d’empêcher Pepsi, son concurrent majeur, de pouvoir
communiquer. Cependant, cette pratique de « dominant » est également considérée comme une
31
des raisons du développement de l’Ambush. Les grands groupes, achetant l’ensemble des droits (les
activant ou pas), les autres marques décident de communiquer autrement.
[METHODES MARKETING] - Sensibilisation :
L’autre catégorie de mesures de lutte face à l’Ambush qu’on retrouve aujourd’hui, consiste
principalement à sensibiliser le spectateur face à ce phénomène. Ces mesures sont issues de
résultats d’études menée par le CIO, montrant que le public est largement contre la pratique
de l’Ambush marketing une fois au courant de celle-ci, et connaissant l’importance du
sponsoring pour la pérennité des grands évènements sportifs.
En se basant sur ce principe les organisateurs tentent de multiplier les campagnes d’informations
sur ce qu’est l’Ambush, et en quoi il peut mettre en danger l’évènementiel sportif. Cela peut se faire
au travers de conférences, comme l’UEFA l’a fait par exemple en 2006 à Genève, par le biais de
rubriques d’information sur les sites internet, ou grâce à des brochures. Enfin, cela peut également
être l’objet de publicités venant informer le public. On les appelle publicités correctives. Elles visent
à mettre en lumière les erreurs de croyances du spectateur. Cependant, là encore, ces méthodes
sont à nuancer, car d’autres études ont montré que les spectateurs n’étaient pas nécessairement liés
à l’intérêt que l’on a pour l’événement, mais simplement à notre degré d’engagement, sous
entendant donc que la plupart du public ne serait pas nécessairement opposés aux Ambushers,
mais plutôt indifférents.
Toutes ces méthodes de luttes se sont développées petit à petit en réponse aux premières
campagnes d’Ambush Marketing de 1984, jusqu’à parvenir aujourd’hui à un niveau jamais
atteint.
"
32
""Les études que nous avons analysées nous ont permis de mieux définir l’Ambush Marketing, d’en
appréhender son fonctionnement, d’identifier ses principaux acteurs et de mesurer combien il est
difficile de lutter face à ces pratiques.
Cependant, la question concernant l’impact de ce phénomène sur le monde du sport n’a pas,
selon nous, été vraiment abordée : lorsqu’une marque réussi à communiquer autour d’un
évènement, sans payer de droits d’accès, est-il vraiment raisonnable et profitable pour le
parrain officiel de payer ces droits ? La pérennité des évènements sportifs internationaux est-
elle menacée si le phénomène d’Ambush Marketing persiste ?
Toutes ces questions sont aujourd’hui sans réelles réponses. C’est pourquoi l’objet de notre
étude sera de répondre à la problématique suivante : « Quel est l’impact de l’Ambush Marketing
sur le monde du sport ? »
Pour se faire, nous allons utiliser une approche exclusivement qualitative qui consistera dans
un premier temps à réaliser une étude de cas précise de la stratégie de Nike, avant d’interviewer les
principaux acteurs concernés, à savoir les professionnels du secteur.
Nous n’utiliserons délibérément pas de méthodes quantitatives que nous ne jugeons pas
nécessaires (ce type d’études grand public ayant déjà été réalisées plusieurs fois par des organismes
de renoms) ni pertinentes (la perception de l’Ambush Marketing par le grand public n’a pas
d’impact direct sur la pérennité des évènements sportifs car la présence d’Ambushers, même si elle
peut impacter les sponsors officiels, ne fait pas fuir les spectateurs).
"
33
"
ANNONCE DE LA PROBLEMATIQUE
""Toujours citée en exemple, la firme américaine adopte avec un certain succès et depuis
plusieurs décennies ce mode de communication particulier.
Afin de comprendre comment le leader mondial des équipementiers sportif se renouvelle et réussit
à tirer profit des plus grands événements sportifs de la planète sans être sponsor officiel de ceux-ci,
nous allons tout d’abord dresser un rapide historique des principaux cas d’Ambush Marketing de
la marque durant les années 80 pour étudier ensuite en profondeur sa stratégie durant la
dernière Coupe du Monde de Football 2010 et lors des Jeux Olympiques de Londres 2012 en
listant les points clés des dispositifs d’Ambush Marketing que la marque a mis en place.
"
34
"
II - ETUDE DE CAS : NIKE
"""Nike Inc. est officiellement fondé en 1976 aux Etats-Unis. À l’origine axée sur l’athlétisme, très vite la
marque décide de s’ouvrir et de produire des équipements pour les sports les plus populaires de la
planète.
Phil Knight, son créateur, comprend rapidement l’importance de la publicité pour positionner sa
marque, la faire connaitre et vendre ses produits dans le monde entier. Pour se faire, et se donner
les moyens de ses ambitions, à savoir devenir la marque n°1 des équipementiers sportifs dans le
monde, quoi de mieux que de s’appuyer sur l’événement de sport ultime : les Jeux
Olympiques ? Mais pas à n’importe quel prix. Le prix et la liberté de créativité sont des éléments
clés qui vont pousser Nike à adopter dès le début des années 80 une stratégie de marketing
en embuscade. Peu importe que des sponsors officiels existent, il suffit de faire mieux qu’eux
et se positionner différemment.
" [JO 1984] - Un premier test réussit :
L’histoire commence en 1984 à Los Angeles. Nike et son fameux logo, le swoosh (virgule), fête
seulement ses 6 ans d’existence mais affiche déjà une croissance plus que prometteuse. Cet
événement planétaire à domicile pour la firme Américaine est une occasion rêvée de prendre la
parole face au monde entier et vanter les mérites de ses produits, tous sports confondus.
L’idée de Nike pour cette première Olympiade c’est tout simplement de foncer, d’occuper
l’espace comme aucune marque ne l’a fait auparavant, sponsor officiel ou non. D’ailleurs,
comme on l’a vu dans la première partie, ces olympiades sont les premières à utiliser le concept de
sponsor exclusif.
35
A - L’AMBUSH MARKETING PAR NIKE : 30 ANS D’HISTOIRES
Qu’à cela ne tienne, Nike est à domicile et compte bien le faire savoir au monde entier. La
campagne publicitaire lancée à l’occasion des Jeux Olympiques s’appelle « I love L.A », littéralement
« J’aime Los Angeles ». Cette déclaration d’amour à la ville hôte se matérialise par une publicité TV
d’une minute montrant une pléiade de sportifs équipés avec les derniers produits Nike sur une
bande son d’un célèbre chanteur de l’époque : Randy Newman. Le Clip se termine par un gros logo
Nike et donne rendez-vous pour l’été. Ce clip est accompagné d’énormes affiches dans toute la ville
de la côte Ouest des Etats-Unis.
Carl Lewis dans le clip « I love L.A » A voir ici : http://www.youtube.com/watch?v=po6S8cizOXY
Cette campagne d’un nouveau genre, ambitieuse et locale est une véritable première et
rencontre un succès extraordinaire aux USA, d’autant plus que Carl Lewis, un des acteurs
principaux de cette publicité, remporta 4 médailles d’Or durant les épreuves d’Athlétisme de cette
olympiade. Coup de chance ou génie marketing de l’époque ? La question est ouverte mais les
études qui suivirent la compétition ont montré que la majorité des consommateurs
américains pensaient alors que Nike était le sponsor officiel de l’événement plutôt que
Converse, sponsor officiel. Le CIO à l’époque, satisfait de boucler les Jeux les plus rentables de
l’histoire, ne vit pas d’un si mauvais œil la campagne de Nike qui eu surtout le mérite de
promouvoir son événement.
""
36
[JO 1992] - Nike vs Reebok, la guerre des logos :
Pour la première fois de l’histoire des Jeux Olympiques, en 1992 à Barcelone, les basketteurs de la
célèbre NBA sont autorisés à prendre part au tournoi. A cette occasion, l’équipe américaine compte
bien montrer au monde entier sa supériorité sur le Basket mondial. Composé des meilleurs joueurs
de l’époque, l’équipe est surnommée la « Dream Team » par les journalistes du monde entier. Cette
équipe de rêve balaya un à un les adversaires qu’elle eut à affronter pour ce qui restera comme une
démonstration de puissance et de supériorité. Considérée comme la meilleure équipe de tous les
temps par les observateurs, les sponsors vont chercher fort logiquement à récupérer les
innombrables retombées positives en termes d’image.
Nike sponsorise la plupart des athlètes de l’équipe dont Michael Jordan, étoile s’il en est parmi
les stars de cette équipe. Cependant, c’est Reebok le sponsor officiel des Jeux Olympiques et
équipementier de la Dream-Team. Pour Phil Knight et son équipe Marketing, il est hors de
question que le logo Reebok soit associé à l’image de sa star. Ainsi, lors de la remise des
médailles, afin qu’aucune association ne puisse être faite entre la marque Reebok et Michael
Jordan, Nike confectionne des drapeaux américains qu’elle donnera directement à ses joueurs
sous contrats pour qu’ils recouvrent le logo Reebok de la Team USA. Michael Jordan est un
ambassadeur de choix pour promouvoir la marque dans le monde entier, il fallait donc trouver un
moyen légal pour l’empêcher de monter sur le podium avec le logo Reebok sur le torse face à des
millions de téléspectateurs.
Mais Nike ne s’arrête pas là, afin d’asseoir sa relation avec la Dream-Team et de se montrer aux yeux
du grand public comme l’équipementier numéro 1 de la Team USA, la firme américaine organise
une conférence de presse avec tous ses athlètes sous contrats. Cette conférence de presse, de
par la présence de prestigieux journalistes conviés et les thèmes abordés a des allures de
conférence de presse officielle. À un détail près bien entendu, cette fois-ci, chacun des joueurs et
membres du staff arborent fièrement les derniers produits de la collection Basketball de Nike.
37
Michael Jordan lors de la remise des médailles.
[JO 1996] - Tout est permis :
Lors des Jeux Olympiques de 1996 à Atlanta, Nike compte réitérer son exploit de 1984, à savoir,
apparaitre aux yeux des spectateurs et téléspectateurs du monde entier comme la marque numéro
1 de sport au monde et accessoirement, le sponsor des jeux olympiques. Le meilleur moyen d’y
arriver c’est de frapper fort, très fort. En 1996, l’équipe Marketing de Nike utilise les 50 millions
de dollars qu’un sponsor officiel devait débourser pour concevoir une campagne très
agressive, qui est toujours considérée par beaucoup d’observateurs du sport business comme
le plus gros cas d’Ambush Marketing de l’histoire.
Juste avant les Jeux Olympiques et pour toute la durée de l’évènement, Nike crée le « Nike
village », comme son nom l’indique, ce lieu n’est autre qu’un deuxième village olympique, situé à
quelques mètres du vrai village du CIO. Un énorme magasin Nike y est intégré et très rapidement
ce lieu fait parler de lui, à tel point que tous les touristes l’intègrent à leur visite olympique. En
parallèle, Nike utilise Atlanta comme son terrain de jeu. La virgule, symbole de la marque, est
partout dans la ville, les athlètes principaux dont Carl Lewis en tête sont placardés dans toute la
ville sur des panneaux publicitaires et billboard en tous genres. Nike se permet également de
détourner les slogans des Jeux Olympiques dans une série de print publicitaire : « We don’t sell
dreams, we sell shoes » ou encore « Faster, Higher, Stronger, Badder ». Un encart de 8 pages est
acheté dans le magasine le plus lu de l’époque (Sports Illustrated) pour donner le ton : « If you can’t
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stand the heat, get out of Atlanta », « If you’re not here to win, you’re a tourist ». Ces différents
slogans résonnent tellement forts qu’ils seront repris par la presse et tournés en dérision. Enfin,
Nike ne se contente pas d’occuper le terrain en dehors des enceintes olympiques, la stratégie
est claire : il faut être présent partout, y compris dans les stades. Ainsi, la marque distribue des
bannières et drapeaux aux supporters à proximité des principaux sites olympiques. Mais la
meilleure manière d’intégrer l’arène olympique, c’est bien d’équiper les principaux acteurs, à savoir
les athlètes. En 1996, Nike est l’équipementier de l’équipe d’athlétisme américaine et utilise cette
vitrine pour faire ce que la marque sait faire de mieux : surprendre. Elle crée ainsi pour l’occasion
une paire de chaussure en Or pour plusieurs de ses athlètes dont Michael Johnson, roi du 200 et du
400m. Il remporta deux médailles d’or et réalisa le record du monde sur 200m avec ses chaussures
aux pieds. Aux Etats-Unis, tout le monde se souvient des chaussures en or de Michael Johnson,
pas grand monde se rappelle que le partenaire officiel de l’époque n’était autre que Reebok.
Michael Johnson et ses « Golden Shoes ».
Le ton très agressif de cette campagne ne fait évidemment pas sourire tout le monde, CIO en tête.
Michael Payne, directeur Marketing de l’époque, convoque ainsi les hauts dirigeants de Nike pour
avoir une explication à l’amiable avec eux. La réunion, comme prévu est très tendue, la violence
verbale a même failli laisser place à la violence physique entre John Krimsky du CIO et Howard
Slusher de Nike. Le CIO menace d’interdire à Nike l’accès aux enceintes sportives, d’annuler les
accréditations officielles de la marque et même d’inciter les athlètes olympiques à critiquer
publiquement ses actions de communication jugées contraires à l’esprit olympique. Cet
avertissement amène Phil Knight à reculer et ordonner de calmer le jeu aux abords des sites 39
olympiques notamment. Mais le mal est fait pour le CIO et ses partenaires, une étude menée sur
les téléspectateurs ayant suivi les jeux olympiques de 1996 à la télévision montre que pour
22% d’entre eux Nike était le sponsor officiel contre seulement 16% en faveur de Reebok.
Face à cette situation, quelques mois après Atlanta 1996, le CIO prend pour la première fois de
l’histoire l’initiative de lancer une campagne de marque. Cette campagne est un véritable tacle
infligé a Nike et son slogan élitiste «If you’re not here to win, you’re a tourist ». La publicité du
CIO met en scène un haltérophile bulgare Yoto Yotov qui ne remporta « que » la médaille d’argent
mais émut le monde entier par la spontanéité et la grandeur de sa joie. Au-dessus de ces images,
une voix OFF explique : « Someone once said: “If you don’t win the silver, you lose the gold.”
Obviously they never won the silver. ». Mais cette campagne n’aura pas permis au CIO de rétablir la
vérité sur son sponsor officiel et aura même selon certain généré un nouveau buzz olympique pour
la marque américaine.
""
40
Ces trois exemples reflètent la volonté de Nike d’utiliser les événements planétaires pour
promouvoir sa vision du sport et ses produits. Nous n’avons utilisé qu’une infime partie des
nombreuses tentatives d’Ambush effectuées par la marque au cours des 30 voire 40 dernières
années, mais ces quelques exemples sont pleins d’enseignements et nous montrent bien les motifs
de cette stratégie. Comme vu dans la première partie concernant les causes du marketing en
embuscade, on peut clairement dire que Nike souhaite économiser les coups d’un sponsoring
officiel pour avoir une liberté de créativité totale et encore plus de poids, ajoutons à cela
qu’elle sait utiliser comme personne ses athlètes et leurs libertés d’expression pour amplifier
et crédibiliser son message.
Ces cas pratiques nous ont permis de dégager 4 piliers fondamentaux ou ressources sur lesquels
repose la stratégie d’Ambush Marketing de Nike:
- Les athlètes et fédérations sous contrat.
- Les produits.
- La publicité.
- La couverture géographique de la marque.
Et c’est l’articulation de ces piliers qui fait le succès ou non d’une campagne d’Ambush Marketing.
Le dernier exemple que nous avons utilisé, les Jeux Olympiques d’Atlanta, nous montre les limites
que peut avoir une stratégie trop agressive. Nike a joué avec le feu et a failli s’attirer les foudres du
CIO, des athlètes et probablement des spectateurs du monde entier. En effet, si un ton
provocateur et agressif est adéquat pour surprendre et occuper l’espace durant un temps, il
ne peut être fait pour durer. Ainsi, durant ses dernières années Nike a du se recycler et changer
son image pour passer du statut de marque agressive, perturbatrice au statut de marque monde
utilisant les évènements planétaires comme la Coupe du Monde de football 2010 ou les Jeux
Olympiques 2012 afin de véhiculer un message positif et différent.
"
41
"""En 2010, pour la première fois de l’histoire, la coupe du monde de football se disputait sur le
continent Africain, en Afrique du Sud. Des centaines de millions de fans ont suivi cet événement
dans le monde entier. C’était l’événement sportif de l’année pour une multitude d’acteurs, allant des
supporters aux joueurs, et en passant bien évidemment par les marques et les équipementiers en
particuliers. En effet, pour Adidas, Nike et Puma, c’était l’occasion rêvée de s’installer
durablement sur le continent africain et d’asseoir sa légitimité sur le sport le plus populaire
de la planète.
Mais la FIFA veillait au grain, comme vu précédemment, Adidas est son sponsor officiel. Le géant
allemand a déboursé 351 millions de dollars pour s’octroyer le statut de fournisseur officiel pour les
Coupes du Monde 2010 et 2014. Dans la guerre des équipementiers, Adidas partait donc
légitimement avec une longueur d’avance. Cependant, Nike a réussi à prendre le dessus sur son
concurrent en adoptant une stratégie d’Ambush Marketing spectaculaire, agressive et
innovante.
Saluée comme un nouveau coup de maitre en termes d’ambush marketing, la stratégie de Nike en
2010 était multicanal, connectée, globale et planifiée bien en amont de l’événement.
Analysons comment le géant américain a réussi à devancer ses principaux concurrent en listant
dans un premier temps les ressources dont il dispose, puis en analysant comment ces ressources
ont été orchestrées et utilisées pour répondre à l’objectif de cette stratégie avant d’analyser les
résultats obtenus.
""
42
B - COUPE DU MONDE 2010 : ETUDE COMPLETE DU DISPOSITIF
L’objectif de Nike en 2010 était clair : renverser la hiérarchie établie chez les équipementiers
sportifs du monde du football et devenir le n°1. Sans surprise, sa stratégie a été d’utiliser les
techniques d’Ambush Marketing et la coupe du monde 2010 comme support. Analysons
quelles étaient les ressources dont disposait Nike à l’orée de cet événement.
" [RESSOURCES] - Athlètes et Fédération :
Les athlètes et fédérations sont le nerf de la guerre pour les plus grands équipementiers de la
planète. Chacun d’eux possède un département appelé « Sports Marketing », qui a pour mission de
faire signer les meilleurs footballeurs et équipes de la planète pour faire rayonner les produits de la
marque. Cette technique d’ « endorsment marketing » est aussi appelée marketing des célébrités.
Nous avons vu précédemment que Nike utilise cette stratégie de manière très efficace.
En 2010 Nike comptaient 10 sélections sous contrats (dont l’Equipe d’Angleterre chez Umbro,
marque qui appartenait à Nike) et ses principaux concurrents : Adidas et Puma, respectivement 12
et 7. Pas d’avantage compétitif pour la marque en termes numéraires, plutôt un léger avantage
même à son ennemi de toujours.
En ce qui concerne les athlètes, c’est sensiblement la même chose, Nike et Adidas se partageant les
plus grandes stars de la planète football, Puma et les autres se partagent ce qu’il reste. A noter tout
de même qu’en 2010 Nike possédait 12 joueurs sous contrat au sein de l’équipe Espagnole
championne du monde (F. Torres, C. Fabregas, G. Pique, A. Iniesta, S. Busquets, Pedro, S. Ramos, C.
Puyol, Albiol, J. Mata, J. Navas, V. Valdes) en plus de grands noms dans chacune des sélections
majeures : Didier Drogba pour la Côte d’Ivoire, Wayne Rooney pour l’Angleterre, Franck Ribéry pour
la France, Cristiano Ronaldo pour le Portugal, Wesley Sneijder pour les Pays Bas …
Ainsi, sans avoir dépensé un seul dollar de sponsoring officiel, Nike arriva en Afrique du Sud avec
une force de frappe aussi importante que celle d’Adidas via ses athlètes et fédérations sous contrats.
Cette notion d’association entre l’Ambusher et une autre entité, que l’on a définie dans notre
43
première partie, est une clé dans le dispositif de la marque américaine. Les joueurs et équipes
nationales sont la vitrine d’un équipementier, encore faut-il habiller cette vitrine de la plus belle des
manières, ce qui nous amène à parler de la deuxième ressource : les produits.
Le Portugal : sélection sponsorisée par Nike / A. Diaby, F. Malouda, J. Toulalan : joueurs sponsorisés par
Nike mais jouant avec un maillot Adidas.
[RESSOURCES] - Produits :
Nike, Puma et Adidas sont des équipementiers, ils conçoivent et fabriquent des produits pour
répondre aux besoins des athlètes. Bill Bowerman, co-fondateur de Nike, considère que « If you
have a body, you are an athlete », ainsi, les produits ne sont pas uniquement destinés à une élite
mais doivent être accessible à tous, une coupe du monde est donc un moment clé pour
promouvoir et sortir de nouveaux produits destinés au grand public. Nike le sait, c’est pourquoi en
2010 la marque américaine a eu une idée simple, inspirée de la chaussure révolutionnaire de
Michael Johnson en 1996. L’idée consiste à décliner tous les modèles de chaussures de football avec
les mêmes couleurs gris métallisés et orange flash, des couleurs qui attirent l’œil, en particulier celui
du supporter ou du téléspectateur. Cette couleur est tellement vive qu’elle est immédiatement
identifiable via une caméra de télévision, quel que soit le niveau de zoom.
44
La collection de chaussures Nike Football pour la Coupe du Monde 2010.
"En plus de sa nouvelle collection de chaussures, Nike a lancé un maillot domicile, un maillot
extérieur et toute une gamme de produits autour des sélections sponsorisées dans les mois qui ont
précédé la compétition. La qualité et le positionnement de ces produits ont été des éléments clés
dans la réussite future de la campagne. Mais avoir des bons produits ne suffit pas, il faut savoir les
mettre en scène. Comme le dit Tinker Hatfield, célèbre designer de la marque : « Without stories,
our products are simply nylon and rubber ».
[RESSOURCES] - Publicité :
Nike a toujours su impressionner et surprendre en termes de publicité, c’est le pilier fondamental de
ses différents succès, la faculté qu’a la marque américaine pour positionner ses produits, ses
athlètes et écrire des histoires autour d’eux est indéniable. En 2010, grâce à l’aide de ses agences,
Wieden & Kennedy en tête, Nike a lancé une campagne qui eut un succès extraordinaire autour
d’un message simple : « Write the future ».
« Écris le futur » en français, se matérialise tout d’abord par un film court de 3 minutes, réalisé par le
célèbre réalisateur mexicain Alejandro González Iñárritu, qui nous montre le devenir des joueurs
après la Coupe du Monde de football. Franck Ribery, Didier Drogba, Andres Iniesta ou encore Fabio
Cannavaro sont les acteurs principaux du clip qui nous plonge dans la fête du mondial 2010, et
nous invite à imaginer ce qui se passera si tel ou tel joueur conduit son pays à la victoire finale, en
prenant soin bien sûr à ne jamais faire directement référence a l’Afrique du Sud ou encore à la FIFA.
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Captures d’écran du film « Write The Future ».
A voir ici : http://www.youtube.com/watch?v=DBrA6LNx0cE
D’autres icones comme Roger Federer, Kobe Bryant ou même Homer Simpson font partie du
casting afin de nous prouver, si besoin était, que la Coupe du Monde de football est un évènement
planétaire qui va au-delà du seul football.
L’économie des frais de partenariat officiel ont permis à Nike de décliner ce film en spot TV, en print
et surtout en digital sur les réseaux sociaux. Plus qu’une déclinaison, Nike souhaitait amplifier son
message en activant ses communautés de fans sur Facebook et Twitter. En profitant de l’avènement
des réseaux sociaux en 2010, l’objectif était de prendre le contrôle des conversations et profiter de
l’aspect viral de son film pour toucher le plus grand nombre de personnes possible. L’idée n’était
pas seulement créative, elle était aussi participative puisque les fans étaient invités à partager leurs
messages d’encouragement afin de permettre aux joueurs d’ « Ecrire le Futur ». « Write the future »
était donc plus qu’un message ou qu’une simple vidéo de 3 minutes, c’était un vrai programme,
que nous détaillerons plus tard et qui a été délivré grâce à la couverture géographique et la
puissance de frappe de la firme américaine.
[RESSOURCES] - Couverture Géographique :
A ce stade de notre analyse, Nike possède un support solide et crédible (Athlètes et Fédérations)
pour véhiculer un message participatif et incitatif (Write The Future) afin de mettre en scène et
vendre ses produits autour de la Coupe du Monde 2010. La question qui reste en suspens est la
suivante : comment amplifier ce message à l’échelle mondiale ? La réponse est simple : utiliser la
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couverture géographique de la marque pour relayer et adapter au niveau local cette initiative
globale.
La couverture géographique de Nike va de pair avec sa position de numéro 1 des équipementiers
sportifs. La firme américaine est présente sur les 6 continents via d’innombrables points de ventes
et des bureaux Marketing locaux en charge de faire correspondre les campagnes publicitaires et les
lancements produits mondiaux aux caractéristiques de leurs marchés.
Ainsi, en 2010, chaque région géographique avait pour mission de localiser la campagne « Write
The Future » et d’organiser différentes opérations marketing en fonction de l’implication de la
région concernée dans la Coupe du Monde et de ses résultats. Par exemple : au Canada, le football
n’est pas le sport numéro 1 et l’équipe nationale n’était pas qualifiée pour la Coupe du Monde, Nike
s’est contenté simplement de relayer le message global. Au contraire, en Espagne, au Brésil, en
Australie ou au encore aux Pays-Bas, la marque a développé des plans locaux en fonction des
caractéristiques de chaque sélection et de ses joueurs, en fonction de sa cible et de ses
consommateurs, et enfin en fonction de l’actualité. L’objectif était le même dans chaque pays :
utiliser l’actualité Coupe du Monde 2010 pour interagir avec le plus grand nombre de
supporters possibles et asseoir la légitimité tant locale que globale de la marque Nike
Football.
Un message global, des adaptations locales : Corée du Sud, Brésil, USA.
L’opportunisme est un des secrets pour mener avec succès une stratégie d’Ambush Marketing. En
effet, une Coupe du Monde de football est une compétition aléatoire dont le résultat final n’est pas
connu avant le coup de sifflet final. Il existe donc une multitude de scenarios possibles et il faut
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avancer dans l’inconnu pour y faire face. Cet inconnu est toutefois synonyme d’opportunités
lorsqu’une une marque y est préparée. Avec ses 4 ressources clés que nous venons d’analyser, Nike
l’était parfaitement et c’est l’une des raisons principales de son succès en 2010.
"
48
Intéressons-nous désormais au déroulement de cette campagne et au déploiement
stratégique de ses ressources pour atteindre son objectif :
[STRATEGIE] - Gagner avant le début de la compétition :
On a coutume de dire qu’en Marketing comme en boxe, celui qui frappe le premier prend une
longueur d’avance, c’est d’autant plus vrai s’il frappe fort ! Ainsi, l’objectif de Nike au début de
l’année 2010 était clair, gagner avant la Coupe du Monde. Tout faire pour écraser ses concurrents et
monopoliser l’attention, avant même le début de la compétition. Analysons de manière
chronologique les différents lancements et initiatives de la marque avant le 11 juin 2010, date du
lancement officiel de la compétition.
Une Coupe du Monde se prépare plusieurs mois voire plusieurs années auparavant pour une
sélection. C’est exactement la même chose pour une marque. Adidas, Nike, Puma, Umbro et tous les
équipementiers présents en Afrique du Sud ont pensés et élaborés leurs stratégies produits,
commerciales et marketing bien en amont de la compétition.
Le coup d’envoi pour Nike est donné le 25 Février 2010 avec le lancement de son nouveau site Nike
Football +, qui a été conçu spécifiquement pour servir de plateforme de marque pour les prochains
mois et notamment les futurs lancements produits à venir. En effet, une semaine plus tard, dès le 3
mars 2010, la marque américaine révèle les maillots extérieurs des sélections qu’elle sponsorise avec
en tête de gondole la nouvelle tunique du Brésil et du Portugal. Le deuxième lancement produit à
venir a lieu au mois d’Avril, c’est une nouvelle chaussure, le modèle phare de Nike : la Mercurial
Superfly 2 qui est lancé le 1er Avril. Ces quelques lancements produits associés à cette nouvelle
plateforme donnent un aperçu des futures activations à venir.
Le mois de Mai sonne le coup d’envoi de la nouvelle campagne de Nike, car à un peu plus d’un
mois de la Coupe du Monde, il est temps de passer à la vitesse supérieure. Ainsi dès les premiers
jours du mois de Mai, Nike va révéler les maillots domicile de ses sélections. Puis le 8 mai 2010, elle
lance une campagne autour du FC Barcelone, demi-finaliste de la Ligue des Champions et grand
favori pour la victoire finale. Cette campagne s’intitule « Write The Future » et est en fait un teaser
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des prochaines semaines. Le dispositif s’articule autour d’une vidéo qui mélange dans le même
vestiaire l’équipe première de Barcelone avec une équipe de jeunes, partageant tous le désir d’écrire
le futur et l’histoire du club. La campagne s’accompagne de quelques print, utilisant plusieurs
joueurs de Barcelone dont un certain Lionel Messi, joueur sous contrat avec Adidas. La guerre des
marques a déjà démarré en coulisse ... malheureusement, Barcelone sera éliminé de la compétition
par l’Inter de Milan et cette campagne en restera là.
Visuel de la campagne « Write the Future » autour du FC Barcelona.Vidéo à voir ici : http://www.youtube.com/watch?v=opPGB6SLOmg
Dès le milieu du mois de Mai, Nike Football change de visage et affiche clairement son slogan «
Write The Future », tous les points de ventes de la planète sont habillés aux couleurs et au slogan
de la campagne sans toutefois révéler d’image du film à venir. Les pages Facebook et Twitter de la
marque changent leurs social-skin également et plusieurs vidéos teaser mettant en scène Rooney
ou Cristiano Ronaldo sont diffusés au compte-goutte entre le 15 et 20 mai 2010. Chaque vidéo
donne rendez-vous le 20 mai. Date à laquelle la page Facebook de Nike Football doit révéler en
exclusivité le film. Les fans ont mordu à l’hameçon et ils sont plusieurs centaines de milliers à
cliquer sur « Je Participe » pour visionner le clip en avant-première. Ainsi, le 20 mai 2010, Nike a
diffusé sur sa page Facebook ce film tant attendu et le succès fut au rendez-vous en termes de
vues, de « J’aime » et de commentaires positifs. Deux jours plus tard, afin de s’assurer que la planète
football soit exposée à son message, Nike a acheté 3 minutes d’espaces publicitaires à la mi- temps
de la Finale de la Ligue des Champions pour diffuser son film. Les retombées sont encore une fois à
la hauteur de l’investissement et le buzz a pris comme convenu. Ce coup publicitaire est un
nouveau pied de nez à Adidas, sponsor officiel de l’UEFA Champions League.
50
Dès le matin de cette finale, Nike ne se cache plus et a littéralement pris d’assaut les principaux
medias d’actualités sportives dans le monde entier, en les habillant de bannières flash, bandeaux
publicitaires et autre habillage évènementiel. En effet, au lendemain de cette finale de la Ligue des
Champions, tous les fans de football se tournent maintenant avec impatience vers la Coupe du
Monde et « Write The Future » est le premier contenu qui répond à leurs besoins. Après le 22 mai et
jusqu’à la fin de la Coupe du Monde au mois de Juillet, Nike va petit à petit raccourcir le format de
sa publicité TV de 180, à 60 puis 30 secondes pour s’assurer que le message est passé.
Capture d’Ecran du site l’Equipe le jour de la Finale de la Ligue des Champions.
Si le lancement était principalement digital dans un premier temps, l’amplification print, presse
papier et évènementielle ne s’est pas faite attendre très longtemps. Dans le monde entier, Nike
prend possession d’énormes espaces publicitaires. Un des exemples les plus frappants est une
reproduction du Mont Rushmore dans Londres avec les visages de joueurs de l’Equipe nationale
d’Angleterre (Rooney, Walcott, Ferdinand et Milner).
Ribery en 30x27m chez lui à Boulogne sur Mer / Les joueurs anglais à Londres.
Au fur et à mesure que la compétition approche, toutes les fonctions marketing de Nike prennent
le relai. Les équipes digital du monde entier déclinent et créent des contenus originaux autour des
athlètes et équipes sponsorisées (Ex : « The Insider » version portugaise des Yeux dans les Bleus).
51
Les sites Nikestore.com de chaque pays sont aux couleurs de la campagne et la gamme de produit
Coupe du Monde s’agrandit encore avec la sortie de produits Nike Sportswear pour permettre aux
fans d’affiner leurs styles sur comme en dehors du terrain. Encore une fois les stars de la marque
comme Cristiano Ronaldo ou Patrice Evra sont les ambassadeurs parfaits. L’avant Coupe du Monde
est également le moment que choisit Nike pour lancer une initiative sociale autour de la lutte
contre le SIDA, un des fléaux majeurs en Afrique du Sud, pays hôte de la compétition. Cette
initiative s’appelle « Lace Up Save Lives », elle a été menée en partenariat avec RED, et le principe
était simple: la marque a commercialisé une série de lacets de couleur rouge pour chaussures de
football et 100% des bénéfices réalisés ont été reversés pour lutter contre la maladie. Pour
promouvoir l’initiative, Nike sort une nouvelle fois les gros moyens et n’hésite pas à associer l’image
de ses stars, Didier Drogba en tête pour légitimer son action et défendre la cause.
C. Ronaldo et P. Evra pour Nike Sportswear / D. Drogba et Bono (U2) pour Lace Up Save Lives.
Nike lance en parallèle une initiative communautaire appelée « The Chance », visant à offrir une
seconde chance à des milliers de joueurs qui n’ont pas pu devenir professionnels pour de multiples
raisons. De par ces nombreuses activations, la marque monopolise l’actualité football en cette
fin du mois de Mai, début du mois de Juin 2010. Pour enfoncer le clou, Nike va utiliser la
puissance de son réseau d’agence RP pour s’inviter sur les plateaux TV d’avant Coupe du Monde de
plusieurs chaines d’information généralistes ou sportives. Des packs introduisant les produits phares
de la marque sont ainsi envoyés à de nombreux journalistes pour imager leurs présentations et
surfer sur le buzz positif généré par le coloris très particulier des chaussures après qu’elles aient été
officiellement dévoilées sur le terrain de la finale de la ... Ligue des Champions. La boucle est
bouclée en quelque sorte !
52
Présentation des Produits Nike sur le plateau d’iTélé (chaine du groupe Canal+).
A ces nombreuses actions, Adidas répond le 8 juin en lançant sa campagne pour la Coupe du
Monde : le film « The Quest » qui utilise comme ambassadeur Zinedine Zidane. La publicité à
l’univers graphique proche de celle de Nike est plutôt mal accueillie par les fans qui la juge trop
ennuyeuse et de qualité bien inférieure à celle de son concurrent principal. Puma lance également
un film intitulé « Journey Of Football » qui est très bien réalisé et rend hommage au football
africain mais n’est malheureusement que très peu soutenu en termes d’activation. Le film dépassa à
peine les 500 000 vues sur Youtube, quand Nike était autour de 20 millions.
La première manche semble donc avoir été remporté par Nike qui respecte l’adage : « It’s
good to be first. It’s better to be good. It’s best to be both. »
[STRATEGIE] - Occuper le terrain durant la compétition :
Un autre adage bien connu du monde du football dit d’une Coupe du Monde qu’elle se gagne sur
et en dehors du terrain. Pour une marque, c’est la même chose, il ne suffit pas d’être présent sur
le terrain via de la panneautique ou des produits, il faut également surprendre le spectateur
en dehors du terrain et lui permettre de vivre des expériences de fans hors du commun.
Partant de ce constat, Nike a lancé à l’aube de la Coupe du Monde sa principale activation qui
perdura tout au long de la compétition sur les réseaux sociaux. Comme rapidement introduit
auparavant, cette activation invite les fans à partager leurs messages d’encouragement envers les
joueurs vedettes de la marque, les meilleures contributions seront récompensées mais pas de
n’importe quelle manière. En effet, ils seront tous simplement affichés sur le plus grand immeuble
de Johannesburg, la capitale sud-africaine. La mécanique est donc on ne peut plus simple : Le fan 53
se connecte sur la page Facebook ou Twitter de Nike Football, envoie un message/tweet associé à
un des joueurs sponsorisés par Nike, si son tweet/message est sélectionné ... il s’affiche sur un
immeuble interactif en Afrique du sud. Le tout bien évidemment synchronisé et adapté pour
mobile. Ce dispositif est même localisé en Chine sur le réseau social QQ, Facebook et Twitter n’étant
pas accessible, preuve encore une fois de la faculté qu’a Nike de localiser ses campagnes. Cette
première mondiale en termes d’élévation de contenus de fan est rendu possible via l’utilisation
stratégique des réseaux sociaux. Cette activation mêle parfaitement Social Media et Ambient
Marketing, le tout s’accordant parfaitement avec le slogan de campagne « Write The Future ».
Dispositif Nike Football à Johannesburg.Vidéo à voir ici : http://www.youtube.com/watch?v=pzBUIsX_gZk
En plus de la campagne sociale et TV, des actions de Guerrilla Marketing sont menées en Afrique du
Sud. Nike a conçu une sculpture géante avec plus de 3000 ballons suspendus dans le vide,
représentant un joueur de football aux couleurs de l’équipe nationale d’Afrique du Sud dans un des
principaux centre commerciaux de Johannesburg, le Carlton Shopping Centre. Ce dispositif
ressemble d’ailleurs beaucoup à une activation de Coca-Cola.
Sculpture Nike vs Coca-Cola. 54
Grace à ces différentes activations online et offline Nike a pu s’accaparer une grande partie des
conversations autour de la Coupe du Monde 2010. Cependant, malgré la couleur flashy des
chaussures portées par les athlètes Nike, Adidas refait une partie de son retard via son partenariat
officiel avec la FIFA en étant de plus en plus visible sur le terrain, d’autant plus que ces équipes sous
contrats sont plus performantes que celles de Nike. La guerre des marques se rééquilibre en
quelques sortes grâce à la loi du terrain, c’est le jeu. Pas en franche réussite dans la compétition,
avec des éliminations simultanées de la plupart des ambassadeurs du message « Write The Future »,
Nike perd la finale contre Adidas avec la victoire de l’équipe espagnole. Qu’à cela ne tienne, la firme
américaine va utiliser son avantage compétitif, à savoir posséder la majorité des joueurs
espagnols sous contrat dont un certain Andres Iniesta pour célébrer la victoire finale à
l’extérieur.
[STRATEGIE] - Célébrer les vainqueurs à la fin de la compétition :
Mi-juillet 2010, l’Espagne s’apprête à affronter la finale de la Coupe du Monde contre les Pays-Bas.
Les espagnoles sont les grands favoris de cette finale et Nike malgré son partenariat historique avec
la KNVB (Fédération Hollandaise de Football) va miser beaucoup sur la Roja pour célébrer le titre à
l’extérieur, qui plus est une sélection Adidas.
La stratégie de Nike pour vaincre en Espagne a reposé sur trois principes :
- Utilisation des joueurs (Nike).
- Occupation du terrain (sur tous les supports possible).
- Réactivité (agir dans l’instant).
Ainsi, quelques jours avant la finale, Nike a révélé un visuel créé pour supporter ce plan avec les
joueurs clés sous contrats Nike (S. Ramos, G. Pique, A. Iniesta, Pedro, C. Puyol), dévoilant un slogan
simple, ambitieux et évocateur : « C’est notre heure, ce sera notre ère ». Ce visuel était en accord
parfait avec les trois principes de la stratégie de Nike : il mettait en avant 5 joueurs titulaires parmi
les meilleurs joueurs espagnoles de la compétition pour légitimer le message, l’aspect occupation
du terrain correspondait au fait que Nike a donné une ampleur phénoménal a ce visuel en le
55
déclinant en digital, en print, en RP, dans ces points de vente ... Enfin, il a été posté quelques jours
avant la finale au meilleur moment possible pour être repris et surtout partagé par les fans
espagnols.
"
Visuel pré-final de la Coupe du Monde en Espagne.
Afin d’élever ce message en Espagne et de l’associer à son image de leader mondial des
équipementiers sportifs, Nike a fait appel à ses stars espagnoles sous contrat et qui ont déjà écrits
l’histoire de leurs sports respectifs dans le passé : Paul Gasol (Basketball) et Rafael Nadal (Tennis).
Ainsi, Nike les a mis en scène pour qu’ils s’adressent, via print interposés, aux joueurs de football
espagnols en leur indiquant que désormais, c’est à eux d’écrire le futur en remportant une première
Coupe du Monde historique pour le pays.
Visuels de Paul Gasol et Rafael Nadal.
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Avec ce dispositif très simple et en utilisant encore une fois ses sportifs, Nike a réussi à surfer sur
l’incroyable année 2010 du sport espagnol pour accroitre encore plus son buzz. De plus, Paul Gasol
et Rafael Nadal étant de vrais fans de foot, ils ont aidé la marque à faire passer le message via leurs
réseaux sociaux, des interviews dans la presse. Nike a donc créé de toute pièce une conversation
entre ses athlètes autour d’un moment historique dans laquelle se sont mêlés les fans et qui a
largement était reprise par la presse.
Le buzz a pris en Espagne mais la compétition se joue au niveau mondial donc il faut occuper
l’espace et être visible partout pour espérer triompher. Ainsi, comme à son habitude, le jour de la
Finale, Nike pris le contrôle des principaux sites d’actualité sportive dans les pays fans de foot pour
promouvoir une dernière fois son dispositif « Write The Future ».
Capture d’écran du site lequipe.fr le jour de la finale.
En ce qui concerne la presse et les réseaux sociaux, Nike lance un visuel dans la lignée de tous ses
précédents mettant en scène Andres Iniesta et Wesley Sneijder, indiquant que s’ils partagent le
même rêve, ils ne partageront pas la victoire, seul l’un d’eux triomphera.
Visuel Finale de la Coupe du Monde.
57
11 juillet 2010, l’Espagne est sacrée championne du monde en s’imposant 1-0 après prolongation
sur un but d’Andres Iniesta. Nike lance un visuel et une vidéo dans la foulée de ce match, après
deux mois de « Write The Future », on peut lire que « The Future has been written ».
Visuel pour célébrer la victoire finale.
Vidéo à voir ici : http://www.youtube.com/watch?v=eUW8wYA49tI
Quelques jours seulement après la victoire, la Coupe du Monde n’est pas terminée pour Nike, c’est
le moment d’accueillir en héros ses footballeurs de retour au pays. Le dispositif est simple mais très
efficace, Nike va tout d’abord lancer un maillot pour célébrer la victoire. Dès le mardi 13 juillet 2010,
soit seulement 2 jours après la victoire finale, un nouveau produit est disponible dans les magasins
Nike de Madrid et Barcelone, un T-shirt blanc avec sur le devant : une étoile symbolisant la victoire
finale, le texte champion du monde et le logo Nike. A l’arrière : le numéro 10 rappelant l’année
2010, le slogan « Es nuestro anno, sera nuestra era » et en couleur dorée « Escribe El Futuro ».
Aucun lien direct avec la Coupe du Monde de la Football Fifa n’est visible sur ce produit, donc Nike
ne sera pas attaqué par Adidas. Ces T- shirts ont été écoulés en trois jours. Nike a encore frappé
avant Adidas, la marque allemande n’ayant pu produire son T-shirt que 5 jours après la finale, le 16
juillet.
Pour conclure en beauté et enfoncer encore le clou, Nike organisa le 14 juillet un évènement RP
spécial avec Andres Iniesta et ... la coupe du monde. Le héros de tout un pays, après avoir inscrit le
but victorieux en finale, est habillé en Nike, porte le T-shirt « Campeones del Mundo » et arbore
fièrement sa Coupe du Monde. Cette interview attira énormément de journalistes et fut repris par
tous les medias espagnols le lendemain.
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A. Iniesta lors de l’évènement RP / Article du quotidien « Sport » tiré a plus de 100 000 ex.
" [RESULTATS] - Efficacité du dispositif :
A la fin du mois de juillet, c’était l’heure de faire le bilan pour Nike et d’analyser l’efficacité de son
dispositif visé à déstabiliser son concurrent de toujours : Adidas. En ce qui concerne le comparatif
des deux campagnes, Nike est ressorti grand vainqueur avec plus de 20 millions de vues pour son
film « Write The Future » et plusieurs centaines de milliers de nouveaux fans sur Facebook et
followers sur Twitter. Nike ayant démarré très fort et très tôt sa campagne, entre le 7 mai 2010 et le
6 juin 2010, une étude du cabinet Nielsen qui analysait le buzz généré par les marques (en étudiant
l’apparition des marques dans les blogs, sites internet et réseaux sociaux) a indiqué que Nike
gênerait 30,2% du buzz contre 14,4% pour Adidas. Par la suite, grâce à sa visibilité terrain, Adidas
réussit à faire son retard pour inverser la tendance en sa faveur, ainsi entre le 11 et le 25 juin, Adidas
gênerait 25,1% du buzz contre 19,4% pour Nike. Cette deuxième place n’est pas à interpréter
comme une défaite pour Nike mais plutôt comme une victoire. En effet, Nike est deuxième de ce
classement devant Coca-Cola et tous les autres sponsors officiels de la Coupe du Monde,
preuve de l’efficacité de son dispositif et de l’Ambush Marketing en général pour générer du
buzz.
Notons tout de même que beaucoup d’experts estiment qu’il est très difficile de mesurer l’impact
exact de ces compétitions sur le chiffre d’affaires de ces marques. Ainsi, pour eux, ces évènements
59
planétaires sont autant question de branding et de crédibilité, que de business pur. C’est dans
cette optique la que la FIFA ou l’UEFA adoptent des mesures de plus en plus restrictives envers les
marques cherchant à s’associer à l’image de leurs évènements. D’une manière générale ces
organismes internationaux sont devenus très forts pour contrôler le terrain (les alentours des
stades et les compétitions) mais semblent déstabilisés par la montée des activations « online ».
Comme nous l’avons vu dans cette étude de cas, les supports digitaux représentent le futur de
l’Ambush Marketing, le niveau de contrôle y est bien plus compliqué et les possibilités très
nombreuses.
"
60
"""Aux questions « Comment tirer bénéfice de la présence de votre cible à une manifestation sans que
vous y soyez invité ? » ou « Comment optimiser le coût de votre participation à un évènement
médiatisé et réputé sans subir les coûts d’un contrat de partenariat ? », les spécialistes de l’Ambush
Marketing vous répondront : utiliser le web !
Un des objectifs d’une campagne de marketing en embuscade c’est de se placer là où les sponsors
d’un événement ne sont pas ou peu, en toute légalité. Les réseaux sociaux et internet sont l’endroit
parfait pour se faire. En 2012, lors des Jeux Olympiques de Londres, Nike a utilisé le potentiel
viral et communautaire de ses plateformes pour détourner la conversation olympique.
On ne change pas une stratégie qui gagne : La stratégie d’Ambush Marketing de Nike repose sur les
mêmes principes qu’il s’agisse d’une Coupe du Monde de Football ou des Jeux Olympiques, c’est
pourquoi nous n’allons pas rentrer dans le même niveau de détail que précédemment afin de ne
pas dupliquer notre étude. En effet, lors des Jeux Olympiques de Londres, la marque américaine
s’est appuyée sur :
Les athlètes et fédérations sous contrat. La dream-team de basket et l’équipe d’athlétisme des USA
par exemple :
Kobe Bryant, Lebron James, Kevin Durant (Basket) et Allyson Felix (Athlétisme).
61
C - JEUX OLYMPIQUES 2012 : ETUDE DE LA STRATEGIE DIGITALE
Des produits spéciaux. Une gamme de chaussure d’athlétisme a été spécialement créé autour de la
couleur jaune flash pour les Jeux Olympiques afin d’attirer l’œil des spectateurs et téléspectateurs :
Collection de Chaussures d’Athlétisme VOLT pour les Jeux Olympiques.
Une campagne de publicité ambitieuse et véhiculant des valeurs positives. La campagne pour les
Jeux Olympiques 2012 s’appelait « Find Your Greatness », elle s’articula autour de l’idée que la
gloire, l’excellence n’est pas réservée aux quelques champions qui ont disputé les Jeux Olympiques
à Londres mais appartient a tout le monde et tout le monde peut l’atteindre à force de
détermination, de travail et de courage. Le film de la campagne mettait en scène des athlètes
amateurs du monde entier dans des villes qui portent tous le nom de London mais pas situées en
Angleterre. Encore une fois un pied de nez au CIO et à ses partenaires qui n’ont pas pu interdire
l’utilisation du nom London dans les campagnes de marque. Seuls les termes London 2012, London
Olympics ... étaient interdits. Nike utilisa cette faille et s’y engouffra pour réaliser le premier clip de
son histoire qu’avec des athlètes amateurs. Ainsi, le film de la campagne et le manifesto ci-dessous
correspondent parfaitement à l’esprit olympique, sans jamais le citer :
Manifesto de la campagne / Capture d’écran du film « Find Your Greatness »
Vidéo à voir ici : https://www.youtube.com/watch?v=_hEzW1WRFTg
62
Enfin, la marque s’appuie encore une fois sur son imposante couverture géographique pour
localiser et adapter son message en fonction de chaque pays du monde :
Adaptation chinoise de la campagne « Find Your Greatness ».
Comme vu dans la première partie de notre mémoire, Nike joue avec le caractère distinctif des
marques, en effet London n’est pas une marque et peut être utilisé. Sauf que lorsque Nike parle de
Londres, personne n’est dupe et tout le monde sait à quoi la marque fait référence. Très bonne idée
donc de la marque américaine qui réussit à faire parler d’elle en utilisant également le terme
« Greatness », plus fort et plus simple que les divers slogans olympiques du CIO.
Rien de nouveau donc de la part de Nike en ce qui concerne le fond de sa stratégie, cependant
sur la forme, quelque chose est à noter : les réseaux sociaux et l’innovation digitale sont les
clés de ce dispositif.
"
63
Les réseaux sociaux et le digital comme terrain de jeu et d’expression : Facebook, Twitter et
Instagram comptaient à eux 3 près de deux milliards d’utilisateurs au début des Jeux
Olympiques 2012, c’était en quelque sorte « The Place to Be » pour les marques.
L’enjeu pour Nike était encore une fois de frapper plus tôt que ces concurrents et plus fort pour
prendre l’avantage bien avant le début de la compétition. Et comme on est jamais trop prudent,
c’est dès le mois de Janvier que Nike lança sur Twitter un dispositif du nom de « Make It Count »
pour alimenter les discussions olympiques jusqu’au lancement de « Find Your Greatness ». Cette
campagne suggérait l’idée que nous « devons tous passer à la vitesse supérieure et faire en sorte
que nos actes aient un vrai impact en 2012 ». Pour promouvoir l’opération, la marque va mettre en
scènes ses meilleures athlètes britanniques : Mark Cavendish (Cycliste), Luol Deng (Basketball), Mo
Farah (Athlétisme), Paula Racliffe (Athlétisme) ... pour témoigner de leur engagement et partager
leurs objectifs pour cette année Olympiques à Londres. Un hashtag #makeitcount, invite le public à
réagir et partager leurs objectifs personnels sur Twitter. Nike utilisa non seulement l’image de ses
athlètes mais également leurs comptes Twitter, preuve des relations privilégiées existant entre la
marque et ses ambassadeurs.
Visuels de la campagne #MAKEITCOUNT.Vidéo à voir ici : http://www.youtube.com/watch?v=AwzSql0QODU
Ainsi, dès le mois de Janvier, une étude réalisée par BrandWatch et l’agence digitale Jam,
menée entre le 1er décembre et le 7 février 2012 montrait que Nike était la marque
dominante dans les discussions et conversations en ligne liées aux Jeux Olympiques avec
7.7% de part de voix. Adidas, arrivait à un score très faible de 0.49%.
64
Après avoir réussi son premier pari, la marque passa à la vitesse supérieure dès la fin du mois de
Janvier en sortant une série d’innovation produits révolutionnaires. À cette période Nike dévoila au
monde entier son tout nouveau gadget technologique, le Nike+ Fuelband, un bracelet qui mesure
l’activité physique tout au long de la journée et permet à des sportifs d’horizon totalement
différents de comparer leurs niveaux d’activités. La marque va plus loin en accompagnant ce
produit par le lancement des “NikeFuel”, une toute nouvelle unité de mesure de l’activité physique.
Plus une personne bouge et se dépense, plus elle génère de Nike Fuel. Cette innovation très
américaine dans l’esprit invite au dépassement de soi et fut à l’origine de toute une série
d’innovation durant les mois qui ont suivi.
Visuel de présentation du Nike+ Fuelband.
Vidéo à voir ici : http://www.youtube.com/watch?v=8lRfJS4bcyM
Suite à cela, Nike lança une série de paires de chaussures qui peuvent se connecter au téléphone
portable de ses heureux propriétaires et leur indiquer via une application dédiée de précieuses
données sur la qualité de leur entrainement et l’énergie dépensée. Cette énergie, le NikeFuel,
devient donc une vraie donnée d’échange et de comparaison entre sportifs. Les sports concernés
sont le Running, le Basketball et le Training, des sports Olympiques bien entendus.
4 paires de chaussures « connectées ».
65
Via ces produits digitaux, Nike soigne particulièrement son image de marque connectée,
jeune et innovante avant le grand show olympique de l’été. Ce sont ces mêmes produits qui ont
été au cœur de la dernière campagne préolympique intitulée « Game On, World ». Nike invita les
athlètes du monde entier via une série de challenge sur les réseaux sociaux et d’évènements
physiques à montrer leur détermination et à bouger toujours plus pour générer plus de NikeFuel.
L’idée de la campagne était de transformer le monde en un immense terrain de jeu et de jouer avec
les derniers produits Nike. Tout cela dans un esprit de préparation olympique.
En 2012, Nike s’est donc permis le luxe de lancer deux campagnes d’envergure (« Make It Count » et
« Game On, World ») avant de démarrer celle des Jeux Olympiques « Find Your Greatness ». Ces
deux campagnes ont permis à Nike d’occuper le terrain en quelques sortes avant de révéler
son dispositif pour Londres 2012.
Le 25 juillet 2012, deux jours avant le début des Jeux Olympiques et fort de ses prises de paroles
précédentes, Nike inaugura sa campagne « Find Your Greatness » soutenue principalement sur
Twitter, Facebook et Instagram. Là où beaucoup de marques ont vu la loi et les menaces du CIO
comme des contraintes, Nike l’a considéré comme une opportunité pour élever les athlètes du
monde entier ainsi que ses champions. Cette campagne n’est clairement pas une campagne produit
mais une campagne d’inspiration. Nike fait ce qu’il y a de plus simple, à savoir partager des
contenus très simple, sous forme de photos ou de vidéos très courtes toujours accompagné d’un
message inspirant. La qualité de ces contenus esthétiquement très réussi et impactant dans le texte
sont la raison principale du succès de la campagne. Face à des mesures drastiques, il semble donc
que la simplicité soit la clé de la réussite. Ainsi, à l’approche de la cérémonie d’ouverture des Jeux
Olympiques, Nike est apparu en tête des discussions tendances du moment sur Twitter :
66
En plus de ces visuels axés sur l’inspiration, Nike a partagé comme à son habitude des visuels
réactifs après chaque grand moment de ces olympiades. Toujours très réussi esthétiquement et
terriblement efficace, ces contenus ont été très bien accueillis par les fans et largement repris.
Visuel type partagé par Nike après une médaille d’Or d’un de ses athlètes.
"Après analyse de ces nombreux cas, on comprend que l’Ambush Marketing fait partie de
l’ADN de Nike est que son statut de leader des équipementiers sportifs sans être partenaire
officiel des grands évènements, repose en grande partie sur l’efficacité de ces campagnes et
de ce type de Marketing. D’un côté, la marque américaine n’a pas d’autre choix que d’adopter
une telle stratégie, son principal concurrent achetant systématiquement le droit des plus
grandes compétitions internationales. De l’autre, en étant partenaire de la FIFA et de l’UEFA,
Adidas ne défend pas uniquement ses parts de marchés face à Nike mais essaie tout
simplement de conserver son histoire et son prestige dans le sport face à l’agressivité des
campagnes de Nike.
"
67
""Apres avoir analysé en profondeur la stratégie et les succès de Nike, nous souhaitons interviewer
des acteurs du Marketing Sportifs afin de mesurer l’impact réel de l’Ambush Marketing sur la
pérennité des évènements sportifs. L’objectif de cette partie est également de mieux
comprendre les différences qui existent entre un sponsor officiel et un Ambusher pour
répondre de manière précise à notre problématique.
Dans un premier temps, nous justifierons le choix des personnalités retenues et détaillerons la
teneur de ses interviews. Ensuite, nous analyserons les résultats obtenus et les enseignements
principaux de chaque interview avant de les interpréter pour répondre à notre problématique dans
la troisième et dernière partie.
"
68
"
III - IMPACT DE L’AMBUSH MARKETING
"""Afin d’obtenir une représentativité des différents acteurs du monde sportif, nous avons
décidé d’interviewer quatre personnes issues d’univers différents. Voici un rapide descriptif de
chacun de ces acteurs et la teneur de nos interviews :
Tony MEI - Directeur Digital de Nike China : Spécialiste de l’Ambush Marketing
Ancien Senior Marketing Manager chez PepsiCo International en charge du Digital, Tony Mei est un
véritable expert de l’Ambush Marketing. Actuellement en poste chez Nike, nous l’avons interviewé
spécifiquement sur les secrets des stratégies d’Ambush Marketing mises en place par Pepsi et Nike
ces dernières années.
Sébastien KLOTZ - Dir. Marketing Fédération Française de Football : Détenteur de Droit
Ancien Responsable Partenariats du Tour de France chez Amaury Sport Organisation, Sébastien
Klotz est un expert reconnu en commercialisation de droits et en organisation d’évènements
sportifs. Nous l’avons interrogé sur sa perception globale du phénomène d’Ambush Marketing.
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A - INTERVIEW D’ACTEURS DU MONDE SPORTIF
Lionel MALTESE - Professeur associé Kedge Business : Expert du Marketing Sportif
Egalement Maitre de Conférences à l’université d’Aix-Marseille, Responsable R&D/IT des tournois
ATP - WTA de Marseille, Nice et Bruxelles, Lionel Maltese est un des grands spécialistes français des
questions ayant attrait au Marketing Sportif. Nous lui avons demandé quelle était sa perception du
phénomène et les principales différences existant entre un Ambusher et un Sponsor Officiel.
Julien LANFREY - Football Brand Communication Expert chez Adidas : Sponsor Officiel
Egalement responsable des relations presses d’Adidas France, Julien Lanfrey est un spécialiste
football en activation de partenariats officiels avec des organismes internationaux. Nous lui avons
demandé quelle était la stratégie d’Adidas envers les Ambushers et les grands évènements sportifs.
"Nous n’avons utilisé que les parties les plus pertinentes de ces interviews dans notre analyse
(l’intégralité de celles-ci se trouve en annexe de notre mémoire). Notons également que ces
interviews ont toutes pris la forme de discussions, nous n’avons donc pas posé exactement les
mêmes questions à chaque interlocuteur mais avons respecté une structure générale que voici :
"
70
Causes de l’Ambush Marketing :
Cette première partie visait à vérifier les conclusions tirées de notre revue de littérature concernant
les causes de l’Ambush Marketing. Il nous semblait important de déterminer si les marques mettent
en place des stratégies d’Ambush plutôt par choix (ex : garder sa liberté de créativité) ou par
nécessité (ex : unique possibilité de contrer son concurrent direct qui est sponsor officiel).
- Selon vous, quelle est la raison principale pour laquelle une marque décide d’adopter une stratégie
d’Ambush Marketing plutôt qu’un partenariat officiel ? - Les prix des partenariats officiels poussent-ils certaines marques à reconsidérer leurs
investissements et opter pour une stratégie d’Ambush Marketing ? - La liberté de créativité est-elle moins importante en étant partenaire officiel (ex : package sur
mesure sans possibilité d’innover) ou au contraire les opportunités sont plus nombreuses (ex :
utilisation du logo, nom, charte graphique) ?
- Les contrats d’exclusivité empêchent-ils certains sponsors de s’exprimer ? Si oui, l’Ambush
Marketing n’est-il pas légitime (cf. concept de libre concurrence) ?
- La multiplicité des entités et des acteurs pose-t-elle problème aux organisateurs (ex : athlète sous
contrat Puma jouant pour une fédération équipée par Nike lors d’une compétition sponsorisée par
Adidas) ?
"Impact stratégique de l’Ambush Marketing :
Nous nous sommes focalisés dans cette partie sur l’impact stratégique de l’Ambush Marketing. Les
avis de ces experts nous ont permis d’évaluer la viabilité d’une telle stratégie sur le long terme et de
mieux mesurer les risques que représente l’Ambush pour les organisateurs d’évènements sportifs
internationaux
- Une stratégie d’Ambush Marketing est-elle viable sur le long terme ou est-ce plutôt une stratégie
de court-terme ?
71
- L’Ambush Marketing : un monde d’opportunité pour une marque ou une fausse bonne idée ? - Les sponsors des grands événements sont-ils de plus en plus exigeants envers les organisateurs en
termes de ROI ? - L’Ambush Marketing : une vraie alternative pour un sponsor ? Une vraie menace pour les
organisateurs et la pérennité de leurs événements ?
- Quelle est la clé pour réussir une campagne d’Ambush Marketing ? La créativité ? L’ampleur du
dispositif ? La qualité du message ?
"Avis personnels concernant l’Ambush Marketing :
Enfin, nous avons souhaité élargir le spectre de nos questions aux nouvelles technologies et
moyens de communication afin de mieux prévoir les évolutions futures de l’Ambush Marketing.
- Que pensez-vous de la stratégie de Nike ou Pepsi qui Ambushent systématiquement les grands
évènements (cf. Coupe du Monde 2010 et JO 2012) ? - Les réseaux sociaux sont-ils une mine d’or pour les Ambushers ? Comment les organisateurs
peuvent-ils minimiser les risques sur ces plateformes ? - La multiplication des supports de consommations de contenus (mobile, tablettes, pc, tv,
affichages...) est-elle un risque pour les organisateurs ? - Comment voyez-vous évoluer le phénomène dans les années à venir?
"
72
"""Afin d’optimiser au maximum cette phase d’analyse et par souci de clarté et d’efficacité, nous avons
regroupé les enseignements clés de nos interviews selon différents thèmes que nous allons détailler
grâce aux extraits les plus pertinents de nos entretiens.
Ainsi, les enseignements principaux qui ressortent de nos différents rendez-vous sont :
- Les Ambushers souhaitent économiser et/ou lutter face à l’exclusivité. - L’Ambush Marketing est principalement une approche à court terme, uniquement axé sur
la visibilité alors que le parrainage apporte d’autres avantages. - La pérennité des évènements internationaux ne semble pas mise à mal.- Les réseaux sociaux présentent plus d’opportunités que de risques pour l’organisateur. - L’Ambush Marketing est là pour longtemps.
Le contenu complet de ces entretiens étant disponible en annexes de cette étude (Annexe 2)
"
73
B - ANALYSE DES RESULTATS
Les Ambushers souhaitent économiser et/ou lutter face à l’exclusivité.
Selon Sébastien Klotz, les marques utilisent principalement l’Ambush Marketing pour économiser
les frais d’un partenariat officiel : « Cela revient beaucoup moins cher car la marque n’a aucun droit
à payer au détenteur de droit. Et en général, elle choisit uniquement les moments forts pour le faire
... ». Il défend également l’idée selon laquelle les contrats d’exclusivité empêchent certains sponsors
de s’exprimer : « C’est l’objectif de ceux-ci ... ». Il ne légitime pas pour autant l’Ambush Marketing : «
L’exclusivité permet de créer de la valeur et de donner une nouvelle dimension à l’évènement. Les
Ambushers veulent les avantages d’un système (évènements de grande ampleur pour
communiquer) sans les inconvénients (rétribution des organisateurs/athlètes), c’est un peu comme
dans la vraie vie, on ne peut pas tout avoir ... ». Ce discours normal pour un détenteur de droit est
difficilement applicable car il nous apparait logique que les marques n’ayant pas accès au statut de
partenariat officiel tentent leur chance à leur manière en Ambushant.
Tony Mei précise que l’Ambush Marketing peut être subi ou choisi : « Nike a eu l’opportunité d’être
sponsor officiel de gros évènements à plusieurs reprises car la marque peut se payer de tels
partenariats. Alors que Pepsi non [...] car la marque est vraiment divisée en deux entreprises avec
d’un côté les boissons et de l’autre la nourriture [...] et Pepsi ne peut pas mutualiser ses moyens
parce que le CIO sépare les sponsors en fonction de leur secteur d’activité pour faire le plus
d’argent possible (cf. le CIO possède un sponsor boisson et un sponsor nourriture) ».
Julien Lanfrey confirme le fait qu’aujourd’hui seules les très grosses marques peuvent être sponsors
officiels des événements internationaux. Les petites marques n’ont alors pas d’autres choix que
d’Ambusher : « Prenons par exemple une marque comme le Coq Sportif, ou Asics, qui n’ont pas la
puissance financière que peuvent avoir Adidas ou Nike, ces marques ont tout intérêt à tenter de
mettre en place des politiques d’Ambush pour bénéficier du maximum de visibilité possible ».
Ces premiers extraits d’interviews nous montrent que l’Ambush Marketing pour une marque
semble principalement être une stratégie de réaction à moindre coût face à un partenariat
officiel non accessible.
74
L’Ambush Marketing est principalement une approche à court terme et uniquement axé sur la
visibilité.
Selon Julien Lanfrey, toutes les marques souhaiteraient être sponsors, elles ne pratiquent l’Ambush
Marketing que par défaut : « Chaque marque tente de jouer avec ses forces et en limitant ses
faiblesses. Dans l’idéal, toutes les marques souhaitent pouvoir être sponsor officiel et bénéficier des
avantages que cela procure ».
Tony Mei confirme que « Les possibilités sont bien plus grandes en étant sponsor officiel. ». Pour lui
l’Ambush oblige à être créatif mais cela ne suffit pas : « Je pense que l’Ambush oblige en effet à être
créatif, on n’as pas d’autre choix mais pour moi le sponsor officiel est plus libre et a plus de
possibilités donc tout dépend d’eux en quelques sortes. Ils ont les clés entre les mains. S’ils activent
bien c’est dur, sinon c’est facile de s’insérer dans la discussion ».
En effet, selon Sébastien Klotz, la marque qui décide d’Ambusher a moins d’interaction avec le
public qu’un sponsor officiel : « Les interactions entre la marque et le sport concerné sont bien
moins nombreuses lorsqu’on décide d’Ambusher », donc même si cette stratégie peut s’avérer
payante, elle n’est viable qu’à court terme : « L’Ambush oblige à une forte créativité car tu dois
contourner ce qui est offert au partenaire officiel. Cela te force à trouver des moyens alternatifs
souvent plus innovants ou créatifs. Je pense que dans certains cas l’Ambush peut être très bien fait
mais c’est du court terme ». Il ajoute enfin une notion primordiale pour la suite de notre analyse : «
Une partie importante du sponsoring ne peut pas être ROI-sée ». L’Ambush serait donc une réponse
incomplète car un partenariat officiel ne se mesure pas qu’en termes de visibilité.
Lionel Maltèse va plus loin en listant les objectifs d’un parrainage qui sont le gain de visibilité, le
relationnel et le réseau que le parrain créé. Or, il semble impossible d’Ambusher le réseau : « Il est
presque impossible pour une marque, de venir Ambusher le détenteur de droit sur ce terrain
(réseau). [...] Le sponsoring évolue et devient de plus en plus relationnel, et face à cela, l’Ambush ne
peut pas être viable sur le long terme ».
75
Les réponses de Tony Mei confirment l’importance des relations dans les partenariats officiels. Il
indique que Nike ou Pepsi subissent les relations existant entre Adidas ou Coca avec le CIO et la
FIFA. Selon lui : « Il y a deux règles à respecter pour être parrain officiel : un, c’est de verser de
l’argent, l’autre, c’est d’entretenir une relation. Adidas et Coca-Cola, sur ces points-là, ont une
longueur d’avance sur Nike et Pepsi, ils entretiennent des relations depuis très longtemps avec le
CIO».
Un passage de l’interview de Julien Lanfrey résume bien la situation en indiquant que : « L’Ambush
ne peut venir durablement se positionner, il ne fera que tirer profit du buzz d’un événement, mais il
ne me semble pas en mesure d’apporter une réelle valeur ajoutée et une histoire à la marque qui
pratique l’Ambush », il ajoute aussi que : « Le réseau devient une notion de plus en plus important
dans le sponsoring sportif aujourd’hui. Et le réseau, tu ne le créée qu’en étant partenaire ».
Lionel Maltese nous explique en effet que la stratégie d’Adidas ne se limite pas au gain de visibilité
mais intègre l’idée de se créer un écosystème. Ce parrainage s’inscrit dans une stratégie de
communication globale : « Ils vont, grâce à leur partenariat, créer du trafic en boutique, faire
bénéficier d’avantage à l’organisateur pour que celui-ci leur rende la pareil. Ils vont communiquer
via les plateformes de leurs partenaires, etc. Très vite cela peut prendre énormément d’ampleur ».
Tony Mei ne peut que confirmer les limites commerciales de l’Ambush Marketing : « Je pense que
pour vendre plus, être sponsor officiel aide énormément ». Mais selon lui, les temps changent et on
peut dès aujourd’hui Ambusher les relations ! C’est ce qu’est en train de faire Nike qui a signé un
contrat pour habiller les membres du CIO lors des prochains Jeux Olympiques : « Chez Nike on
essaie d’approcher d’une manière différente le CIO pour nouer une relation avec eux dans le cadre
des Jeux Olympiques de Rio. [...] Nike est en train d’essayer de construire une relation plus étroite
avec le CIO et cela doit se faire étape par étape. La première étape ce sera donc d’habiller les
membres du CIO pour que dans 5 ans, ou peut-être 10 voir 20 ans plus tard Nike ait l’opportunité
de décrocher le partenariat officiel au dépend d’Adidas. [...] Je pense sincèrement qu’un jour Nike
deviendra un sponsor officiel pour jouer le jeu de manière complète et ne plus uniquement habiller
76
les athlètes mais sponsoriser l’évènement en entier pour apporter son savoir-faire au CIO en termes
de show et d’image ».
Ces divers avis concordent tous vers l’idée que l’Ambush Marketing n’est pas une solution
viable sur le long terme et que la majorité des marques Ambushent par défaut pour faire des
coups (créer le buzz).
"
77
La pérennité des évènements internationaux ne semble pas mise à mal.
Il est intéressant de noter que, pour Tony Mei, la place de Nike est légitime sur les événements
sportifs internationaux. En effet : « Nike est une marque de sport, les athlètes portent des
combinaisons avec un swoosh [...] donc tu ne dois pas nécessairement créer des choses dingues
pour être visible, tu es légitime, ta place est ici ! ». Il admet que pour Pepsi, le lien est moins logique
: « Par contre, pour Pepsi, c’est une autre histoire [...] la manière de communiquer des marques qui
fabriquent des biens de grande consommation est bien différente des marques de sport. Les biens
de grande consommation doivent penser de manière détournée et bien plus intelligentes parce
qu’elles ont des centaines de produits sur le marché qui ne sont pas en lien direct avec la pratique
sportive ou l’événement ». Ces premiers extraits nous montrent qu’un Ambusher a besoin d’un
événement de grande ampleur et réussit pour communiquer. On peut alors s’interroger s’il ne
jouerait donc pas avec le feu en essayant d’utiliser le pouvoir d’attraction de l’événement
gratuitement. Cette tendance peut-elle inciter les sponsors officiels à revoir leurs investissements et
remettre en cause la pérennité des événements sportifs ?
Selon Sébastien Klotz, l’Ambush n’est pas une alternative pour un sponsor : « Je pense sincèrement
que non ». Ainsi, ce n’est pas une menace vitale pour les détenteurs de droit : « Non ce n’est pas
une menace pour la pérennité d’un évènement sportif [...] Mais cela doit être pris au sérieux tout de
même pour garantir aux partenaires des retombées supérieures aux Ambushers.... Et c’est ce que
nous faisons à la FFF ».
Même discours chez Adidas avec Julien Lanfrey : « L’Ambush est une menace à prendre au sérieux,
et il est pris au sérieux aujourd’hui chez Adidas. Cela étant il semble difficilement envisageable qu’il
vienne remettre en question la pérennité de l’évènementiel sportif, personne n’y gagnerait, pas
même l’Ambusher. »
Selon Lionel Maltèse, la stratégie de Nike ou Pepsi est tout simplement intéressante sur les gros
événements. Ils profitent de l’inondation médiatique pour gagner en visibilité. « C’est sûr qu’il serait
dommage de ne pas en profiter. La notoriété leur est presque assurée, même sans être sponsor. ».
78
Ces deux derniers extraits nous montrent bien que l’Ambusher n’a aucun intérêt à remettre en
cause les fondations du sponsoring sportif, ni d’affaiblir les organisateurs d’événements. Cela
ne semble d’ailleurs pas être le cas en particulier parce que ce phénomène est pris très au
sérieux par ces derniers.
"
79
Les réseaux sociaux présentent plus d’opportunités pour les organisateurs que de risques.
Les organisateurs sont de plus en plus efficaces pour lutter contre les Ambushers selon Sébastien
Klotz : « à la FFF nous sommes déjà en train de monter tout un projet anti Ambush autour de l’Euro
2016 pour protéger les droits de nos partenaires Vs l’Equipe de France. » Même s’il admet que la
liberté de parole sur les réseaux sociaux complique la tâche : « C’est malheureusement quasi
impossible de contrôler les réseaux sociaux pour le moment, les outils technologiques sont en
avance sur les outils législatifs, il faut faire avec. ».
Tony Mei met également en avant le manque de régulation sur les réseaux sociaux, dû en partie à
une prise de parole trop légère du CIO : « Je pense qu’il y a un manque de régulation, en particulier
ici en Chine, tout est permis. Il n’y a pas de règles, on peut faire ce qu’on veut. Mais d’un autre côté,
je trouve le CIO trop discret sur les réseaux sociaux, ils ne prennent pas la parole donc d’autres
acteurs le font à leur place. » Selon lui, les réseaux sociaux sont aujourd’hui le média n°1 pour une
marque de sport : « les gens passent aujourd’hui plus de temps sur les réseaux sociaux que sur tous
les autres médias cumulés, donc si vous les mettez de côté, vous allez droit dans le mur ! »
Pour être performant sur ce nouveau média, Tony Mei estime que les marques doivent changer
leurs méthodes de travail : « La clé pour moi c’est le temps de réaction, c’est indispensable pour
être crédible et dans le coup sur ces plateformes. Je me rappelle de certaines entreprises qui nous
demandaient comment on faisait pour être aussi rapide. Lorsqu’ils étaient encore en train de
rédiger le brief pour leur agence, on avait déjà publié un visuel qui avait des milliers de partages et
de retweet sur Weibo (Twitter Chinois) ». Il nous livre également son analyse du récent succès de la
campagne « Find Your Greatness » de Nike : « La raison principale de notre succès a été d’asseoir
tout le monde dans la même salle pour travailler le plus efficacement possible. Mon impression
c’est que les réseaux sociaux sont primordiaux, les consommateurs se transforment en ambassadeur
de marque, si ils sont d’accord avec ce que l’on dit et que cela les touchent, ils vont naturellement
reprendre notre message et celui-ci aura encore plus de sens dans leur bouche. »
80
Enfin, pour ce spécialiste de l’Ambush Marketing : « Le digital et les réseaux sociaux ne sont pas
uniquement une menace, c’est aussi une opportunité formidable pour créer une communauté et la
fidéliser. Les parrains ont compris cela et tentent d’en tirer profit au maximum. »
Selon Julien Lanfrey, les réseaux sociaux sont surtout une opportunité pour le sponsor d’asseoir son
exclusivité : « Les réseaux sociaux sont surtout une mine d’or pour les sponsors avant de l’être pour
les Ambushers. Ils sont difficilement contrôlable mais permettent aux sponsors d’avoir une
exclusivité supplémentaire. Je m’explique. Adidas utilise les réseaux sociaux pour communiquer de
manière virale. Le but est d’être le premier sur internet. En étant partenaire des évènements, on a
des droits d’exclusivité sur les réseaux sociaux. Par exemple à Londres, seul les quatre principaux
partenaires officiels avaient droit de communiquer en direct les remises de médailles sur les réseaux
sociaux ».
Comme toute innovation majeure, l’apparition des réseaux sociaux a changé la donne et
modifié les habitudes de consommations des fans qui ont désormais pris l’habitude de
donner leur avis, de partager, de « liker », de « tweeter ». Avant d’être un outil formidable
d’Ambush Marketing pour une marque afin de s’insérer dans la discussion, cet outil est une
opportunité extraordinaire pour les organisateurs d’événements d’asseoir la légitimité de
leurs sponsors officiels car cet événement leur appartient.
"
81
L’Ambush Marketing est là pour longtemps.
Tony Mei se considère diffèrent des autres Ambushers : « Je ne pense pas qu’on puisse dire que
Nike soit un Ambusher comme un autre, on essaie simplement de toucher le marché durant une
certaine période et d’une certaine manière ». Pour lui, Nike exprimait simplement sa vision du sport
lors de la campagne « Find Your Greatness » en 2012 : « On ne pensait pas du tout au fait qu’il
fallait absolument Ambusher cet évènement, on pensait juste que c’était un moment exceptionnel
pour promouvoir notre vision du sport et inspirer les consommateurs à notre manière avec notre
langage et nos outils. [...] On utilisait juste le sport comme moyen d’expression pour faire passer
notre message ». Selon lui : « Le succès de cette campagne vient principalement du fait qu’on était
vrai, authentique et surtout à notre place. [...] En fait, on a simplement amené notre point de vue,
en essayant d’inspirer les jeunes, sans vouloir tromper le CIO, on voulait juste apporter notre vision
du sport, pour nous c’est authentique et complètement dans l’esprit ».
L’Ambush Marketing selon Nike, serait donc devenu responsable et réfléchi, nous sommes loin
d’Atlanta 1996. Ce que confirme Sébastien Klotz qui estime que les dérives ne sont pas si
nombreuses car : « Nike et Adidas sont de très grandes marques, elles sont responsables et savent
très bien comment cela se passe donc pas trop de problèmes, chacun reste à sa place et joue le jeu.
» Pour illustrer cela, nous pouvons citer Tony Mei qui avoue que durant les JO 2012 : « Notre équipe
légale nous a clairement dit ce que nous pouvions faire et ce que nous ne pouvions pas faire. Donc
on a respecté les règles du jeu. » Cela nous amène à penser que l’Ambush Marketing n’est pas
amené à disparaitre de sitôt car on peut être un Ambusher efficace et respecter les règles du CIO.
Selon Tony Mei toujours, il ne faut pas forcément être un Ambusher pour innover : « Je pense que
si un jour Nike devient sponsor officiel, cela ne changera pas grand-chose et on continuera
d’innover parce que c’est dans nos valeurs. » Il faut penser « consommateur » : « Pour moi la clé est
assez simple, c’est le consommateur. Que l’on soit un officiel ou un Ambusher, l’objectif c’est de
positionner sa marque afin de vendre des produits tôt ou tard. Donc il faut analyser les
consommateurs et identifier quels sont leurs besoins, leurs demandes. » Inspiré, il livre même un
conseil aux Ambushers : « le conseil que je peux donner aux Ambushers c’est de ne pas devenir 82
dingue de leurs produits et de ne pas se laisser tenter par la publicité trop simple et basique : il faut
inspirer les consommateurs plutôt que leur vendre un produit. [...] Pour moi, c’est simple, il faut
placer le consommateur au centre du dispositif, tout par d’eux et c’est en répondant à leurs besoins
qu’on peut gagner la bataille. »
Lorsqu’il s’agit de prévoir les évolutions futures de l’Ambush Marketing, Sébastien Klotz ne préfère
pas se prononcer car : « C’est une question à laquelle tous les détenteurs de droits aimeraient
pouvoir répondre pour pouvoir des maintenant commencer à y travailler ... Malheureusement
personne n’a la réponse. » Tony Mei a bien voulu se prêter au jeu et nous livre sa vision du futur : «
en comparaison à il y a 5 ans, les stratégies d’Ambush marketing n’ont pas vraiment changé, les
objectifs sont les mêmes. Par contre les moyens eux ont énormément changé, en particulier le
moyen de véhiculer ses idées et l’utilisation des médias pour le faire. Donc il faut faire très attention
aux nouveaux médias, aux nouveaux supports qui vont éclore dans les prochaines années pour
essayer d’accroitre l’efficacité de nos futurs dispositifs. En gros, le fond restera le même, la forme va
beaucoup changer par contre. Je pense aussi que pour gagner dans le futur, l’enjeu va être de
connecter de manière personnelle avec les consommateurs et de leur offrir un service, apporter une
vraie valeur ajoutée. »
Enfin, pour conclure cette analyse, il semble que l’Ambush Marketing ne soit plus une stratégie
réservée à quelques marques. Comme nous le montre Julien Lanfrey, Nike et Adidas s’échangent le
rôle d’Ambusher : « lors de l’arrivée de Beckham au PSG, Adidas s’est empressé d’organiser une
conférence de presse aux couleurs d’Adidas, étant sponsor du joueur, venant ainsi devancer et «
Ambusher » pour le coup Nike sponsor du club qui n’a pu qu’organiser une deuxième conférence
par la suite. »
Ceci confirme l’idée avancée auparavant que l’enchevêtrement des niveaux de partenariats
dans le sport rend l’Ambush plus facile. Grâce à un partenariat avec un joueur, on peut
Ambusher le sponsor du club du joueur. C’est ce que fait Adidas avec Beckham au PSG ou ce
que fait Nike avec Cristiano Ronaldo au Real Madrid. Le jeu du chat et de la souris ne semble
pas prêt de s’arrêter ! 83
"""Véritable sujet d’actualité, la relation entre Ambushers et sponsors officiels intéresse de nombreux
journalistes, bloggeurs, marketeurs ou même simples passionnés de sport. Tous se posent la même
question : pourquoi payer quelque chose que l’on peut avoir gratuitement ? Notre étude nous a
révélé que répondre à cette question est en fait bien plus complexe qu’il n’y paraît. Grâce aux
connaissances accumulées en rédigeant ce mémoire de recherche, nous pouvons maintenant
apporter une réponse en mesurant l’impact réel de l’Ambush Marketing sur le monde du sport
aujourd’hui.
Pour se faire, nous allons détailler par ordre d’importance les enseignements clés de notre
recherche :
1/ L’Ambush Marketing n’est pas une menace pour la pérennité des événements sportifs car
les marques Ambushent à défaut de ne pouvoir sponsoriser. Un Ambusher ne peut pas
concurrencer un partenaire officiel sur le long terme, le réseau ou la réputation qu’apporte un
parrainage étant inaccessibles. Les organisateurs d’événement sont également de plus en plus
efficaces pour lutter contre ce phénomène. Ainsi, même si une marque comme Nike arrive à
inverser la tendance dans certains cas, cela reste une exception et c’est dans le but de pouvoir
accéder aux droits. Selon nous, les partenaires officiels jouissent d’exclusivités qui leurs confèrent un
avantage stratégique face à leurs concurrents, ils sont en positions de force et cela fait des envieux.
2/ L’Ambush Marketing joue un rôle clé dans les relations et négociations entre partenaires
officiels et détenteurs de droit. Nous le considérons comme un garde-fou qui régule le prix de
l’exclusivité tout en élargissant le spectre de celle-ci. En effet, une marque comme Adidas
négocie le montant du parrainage officiel des Jeux Olympiques en fonction du risque d’Ambush,
réévaluant ce prix à la baisse. Ainsi, si le CIO souhaite obtenir plus d’argent, il doit garantir plus
84
C - IMPACT ACTUEL DE L’AMBUSH MARKETING
d’exclusivité et de sécurité à Adidas. Aussi, selon nous, cela permet en partie de mieux valoriser les
contrats de sponsoring car comme le dit Jerry C. Welsh dans « Ambush Marketing : What it is ; what
it isn’t », l’Ambush Marketing est le résultat naturel d’une compétition saine. Les droits du sponsor
officiel sont limités à ce qu’il achète, il doit élargir la dimension de son partenariat en payant plus s’il
souhaite se prémunir du risque de voir une autre marque communiquer autour d’un événement
qu’il sponsorise. En définitive, la lutte Ambusher – Partenaire Officiel a de positif, qu’elle peut
apporter une régulation sur un marché où les prix ont tendances à être déconnectés.
3/ L’Ambush Marketing est une source de revenue non négligeable pour des acteurs clés du
monde sportif: athlètes, fédérations, équipes sportives et médias. Les athlètes, fédérations ou
équipes sportives profitent de la rivalité entre Ambushers et Sponsors Officiels pour faire monter les
enchères. Les médias sont les autres grands gagnants, car sans achats médias, les messages des
Ambushers n’ont qu’un impact limité. Ainsi, ces derniers n’hésitent pas à sortir le chéquier et à
dépenser l’argent précédemment économisé en n’étant pas partenaire officiel pour communiquer.
4/ La créativité inhérente à l’Ambush Marketing génère des contenus originaux et créé du
buzz autour de l’événement. L’Ambusher doit être créatif et innover pour tirer profit de
l’événement, cela oblige le sponsor officiel à agir ou réagir pour défendre son statut. Jerry C. Welsh
explique qu’une fois les droits acquis, le vrai jeu du sponsoring commence. Ainsi, l’Ambusher
impose en quelque sorte au sponsor officiel de jouer le jeu, il stimule la créativité pour le plus
grand bonheur des fans et des médias qui bénéficient de contenus supplémentaires à visionner et
diffuser. Le nombre de vues générées par les publicités des Ambushers ou parrains officiels lors
d’une Coupe du Monde de Football ou d’une édition des Jeux Olympiques témoigne de l’intérêt
que les fans portent à ce type de contenu. Selon nous, tout cela génère du buzz, enrichit l’actualité
et alimente les discussions autour de l’événement sportif. Encore une fois, l’organisateur de
l’événement est le principal bénéficiaire de ce phénomène.
5/ L’Ambush Marketing contraint certains organisateurs à mettre en place des plans anti-
Ambush de plus en plus agressifs qui soulèvent de nombreuses réactions négatives. Comme
nous avons pu le voir dans notre première partie, le CIO ou la FIFA n’hésitent pas à aller très loin 85
pour interdire l’utilisation des signes distinctifs de leurs événements sans autorisation ou le port de
certains produits par les fans mettant en avant des marques concurrentes à leurs partenaires.
L’image de ces institutions est écornée par les nombreuses réactions populaires qui jugent ces plans
liberticides et allants à l’encontre des valeurs du sport.
86
""Notre étude a confirmé l’importance de l’Ambush Marketing dans le monde du sport. Même si
ce phénomène est souvent critiqué par les puristes du Marketing sportif, nous avons tenté de
démontrer que contrairement à la majorité des études sur le sujet, le Marketing en Embuscade
n’avait pas que des aspects négatifs et pouvait même profiter, d’une manière générale, à cet
écosystème qu’est l’évènementiel sportif.
Cependant, cet état de fait n’est pas forcément amené à perdurer. Les évolutions futures du
phénomène sont difficiles à prévoir. Il nous semble évident cependant, que dans les années à venir,
face aux exclusivités toujours plus importantes mises en places par les organisateurs, les Ambushers
continueront à tenter d’obtenir leur part du gâteau en utilisant de nouveaux moyens.
Ainsi, nous pensons que, à l’instar de Nike, les Marques vont chercher de plus en plus à Ambusher
les Sponsors Officiels, non seulement pour améliorer leur propre visibilité, mais également dans les
relations que ceux-ci entretiennent avec les détenteurs de droits. L’objectif ultime de cette stratégie
sera toutefois de parvenir à signer des partenariats officiels. Nous pensons donc que la
compétition pour obtenir les droits sera de plus en plus féroce, et cela devrait naturellement
bénéficier, en premier lieu, aux organisateurs d’événements mais également aux athlètes et
fédérations. Cela pourrait prendre la forme de sponsoring de candidatures (cf. Mizuno et la
candidature Japonaise pour les Jeux Olympiques de 2020), ou de contrats personnels avec des
influenceurs du monde sportif... Tout cela est très difficile à prévoir mais nous ne doutons pas de la
capacité des marques à redoubler de créativité pour faire les yeux doux aux organisateurs.
Par ailleurs, l’essor des nouvelles technologies et des réseaux sociaux va bouleverser l’ordre établi et
les manières de communiquer des marques. Ainsi, qu’on soit Ambusher ou Sponsor Officiel,
l’innovation et la créativité seront incontestablement des éléments clés pour tirer le meilleur parti
87
"
CONCLUSION
de ces outils. Nous pensons que parmi les acteurs actuels, et notamment les médias traditionnels
du monde sportif, certains devraient faire les frais de ces nouveaux moyens de communication.
Ces derniers devraient voir leurs retombées économiques baisser significativement, au vu de
l’efficacité et de la réactivité des réseaux sociaux aujourd’hui. L’Ambush devrait donc, dans un
futur proche, profiter à un nombre d’acteurs moins important. A la lecture et l’analyse de nos
interviews, nous pensons que la multiplicité des acteurs du monde sportif, ainsi que des niveaux
possibles d’Ambush toujours plus nombreux, feront perdurer le phénomène et le conduiront même
à se développer sur la toile, là où les moyens de lutte sont encore très en retard.
L’Ambush Marketing devrait se banaliser pour finalement s’intégrer totalement dans le
paysage du sponsoring sportif dans quelques années. Cette transformation a déjà lieu à
l’heure actuelle avec des marques historiquement Ambushées devenant Ambusher et vice-
versa.
Notre étude touche à sa fin, l’analyse de l’impact de l’Ambush Marketing sur l’événementiel sportif
mérite toutefois que l’on différencie les événements sportifs internationaux des événements sportifs
locaux, de moindre ampleur. Nous avons focalisé notre recherche sur les événements
internationaux et sur de très grosses marques au budget de sponsoring important. Il serait
également intéressant de mesurer l’impact de l’Ambush Marketing au niveau national voir
local. Quel intérêt les marques trouvent-elles à Ambusher sur des évènements où les retombés
médiatiques sont moins importantes ? Est-ce plus facilement contrôlable ? Face à des acteurs moins
puissants que le CIO ou que la FIFA, les Ambushers sont-ils plus dangereux ? Ces questions restent
aujourd’hui sans réponse et mériteraient qu’on s’y intéresse.
"
88
""
Etudes réalisées par la société NIELSEN :
Mesure du Buzz généré autour de la Coupe du Monde 2010 entre le 7 Mai et le 6 Juin 2010.
Mesure du Buzz généré autour de la Coupe du Monde 2010 entre le 7 Mai et le 6 Juin 2010.
89
"
ANNEXES
Interview d’un spécialiste de l’Ambush :
Tony MEI : Directeur Digital de Nike China.
Interview effectuée le 20 juin 2013 en face à face.
Pourquoi Nike et Pepsi décident d’adopter une stratégie d’Ambush Marketing plutôt qu’un
partenariat officiel ?
Je pense que Nike et Pepsi ont deux histoires différentes, je vais rapidement vous expliquer les
grandes lignes de celles-ci. Nike a eu l’opportunité d’être sponsor officiel de gros évènements à
plusieurs reprises car la marque peut se payer de tels partenariats. Alors que Pepsi non, le business
de Coca est bien plus gros que celui de Pepsi. Parce que Pepsi a un business model différent de
coca avec d’un côté les boissons et de l’autre ce qu’on peut appeler les snacks. Coca est donc
uniquement concentré sur la boisson. Ainsi, Pepsi a un gros désavantage face à Coca, car la marque
est vraiment divisée en deux entreprises différentes et ne peut pas mutualiser ses moyens parce
que le CIO sépare les sponsors en fonction de leur secteur d’activité pour faire le plus d’argent
possible. En gros il y a un sponsor pour la nourriture et un pour la boisson, donc Pepsi est un peu
bloqué par cette situation. Aussi, Coca a une très belle et longue histoire avec le CIO, ils
entretiennent des relations exceptionnelles, vraiment. Et il y a deux règles à respecter pour être
parrain officiel : un c’est de verser de l’argent, l’autre c’est d’entretenir une relation. Adidas et Coca-
Cola sur ces points la ont une longueur d’avance sur Nike et Pepsi, ils entretiennent des relations
depuis très longtemps avec le CIO. Mais si Pepsi a lâché l’affaire en quelque sorte, c’est intéressant
de voir que chez Nike on essaie d’approcher d’une manière différente le CIO pour nouer une
relation avec eux dans le cadre des Jeux Olympiques de Rio.
En effet, Nike a acheté les droits pour habiller les membres du CIO lors des prochains Jeux
Olympiques de Rio. Les membres du CIO seront donc habillés par Nike mais le sponsor
principal de la compétition restera Adidas. Est-ce que c’est un moyen de pointer le bout de
son nez pour envisager un partenariat officiel dans les prochaines années ?
90
Exactement, Nike est en train d’essayer de construire une relation plus étroite avec le CIO et cela
doit se faire étape par étape. La première étape ce sera donc d’habiller les membres du CIO pour
que 5 ans, ou peut-être 10 voire 20 ans plus tard Nike ait l’opportunité de décrocher le partenariat
officiel au dépend d’Adidas. C’est le seul moyen de renverser la vapeur, on ne peut pas forcer le CIO
à choisir Nike plutôt qu’Adidas uniquement en alignant un chèque avec plus de zéros dessus. Parce
qu’il y a une vraie relation entre Adidas et le CIO, surement beaucoup de personnes ont travaillés
chez Adidas travaillent au CIO en ce moment par exemple. Donc les choses doivent se faire petit à
petit. Et comme vous le savez dans le sport de haut niveau, c’est comme en Chine, le réseau et les
relations sont très importantes. La relation gouverne, ce n’est pas juste une question d’argent. Mais
je pense sincèrement qu’un jour Nike deviendra un sponsor officiel pour jouer le jeu de manière
complète et ne plus uniquement habiller les athlètes mais sponsoriser l’évènement en entier pour
apporter son savoir-faire au CIO en termes de show et d’image.
Si Nike décroche un partenariat officiel de ce type, est-ce un moyen long-terme pour écraser
Adidas et les déstabiliser en les transformant en Ambusher ?
Oui totalement ! Mais pour revenir aux premières questions, je ne pense pas qu’on puisse dire que
Nike soit un Ambusher comme un autre, on essaie simplement de toucher le marché durant une
certaine période et d’une certaine manière. Vous avez pu apprécier la campagne « Greatness » pour
les JO de Londres et avez vu comment elle a pris forme de l’intérieur, notre équipe légale nous a
clairement dit ce que nous pouvions faire et ce que nous ne pouvions pas faire. Donc on respecté
les règles du jeu. On n’avait pas le choix donc on a fait très attention à cela et ça nous a permis de
réfléchir de manière plus créative et différente pour trouver un de mener campagne durant ce
moment clé. On ne pensait pas du tout au fait qu’il fallait absolument Ambushé cet évènement, on
pensait juste que c’était un moment exceptionnel pour promouvoir notre vision du sport et inspirer
les consommateurs à notre manière avec leurs langages et leurs outils. Ainsi, c’était plus facile pour
eux de nous comprendre et d’interagir avec nous. C’est pour cela que le film «Greatness» est
uniquement focalisé sur les athlètes amateurs du monde entier, on a cherché à élever le message et
inspirer les jeunes. Et nous, en Chine, on a trouvé un moyen de le faire en utilisant des visuels très
91
simple, sans montrer aucun athlète olympique, aucun moment de la compétition, on utilisait juste
le sport comme moyen d’expression pour faire passer notre message. Par exemple, lorsqu’on
photographie une balle de tennis ou un terrain de badminton, c’est très simple pour les gens de
faire le lien avec la compétition, ils connectent automatiquement avec l’évènement. Ensuite on
créait des slogans très simples et très courts en fonction de ce qui venait de se passer à Londres
pour faire passer notre message et notre vision du sport. Pour moi, le succès de cette campagne
vient principalement du fait qu’on était vrais, authentiques et surtout à notre place.
Est-ce plus facile d’innover lorsqu’on est un Ambusher ?
Non pas forcément, je pense que si un jour Nike devient sponsor officiel, cela ne changera pas
grand-chose et on continuera d’innover parce que c’est dans nos valeurs. Qu’on soit Ambusher ou
pas, cela ne changera rien. Si j’avais un conseil à donner à Adidas c’est justement d’innover et de ne
pas se contenter de son partenariat officiel, afficher un logo et ne rien faire autour n’est pas une
bonne stratégie. Je vois leurs partenariats comme quelque chose de très commercial ou il y a très
peu de place pour innover. Ce n’est pas le bon moyen d’être sponsor selon moi, il faut être plus
ambitieux que cela.
Et à propos de la créativité, l’Ambush est-il stimulant ?
Je pense que l’Ambush oblige en effet à être créatif, on n’as pas d’autre choix mais pour moi le
sponsor officiel est plus libre et a plus de possibilités donc tout dépend d’eux en quelques sortes. Ils
ont les clés entre les mains. S’ils activent bien c’est dur, sinon c’est facile de s’insérer dans la
discussion. Les possibilités sont bien plus grandes en étant sponsor officiel, tout dépend donc de la
volonté qu’a une entreprise à être créative. Je constate que bien souvent les partenaires officiels
sont faignants et se contentent de la présence de leurs logos un peu partout pour communiquer et
se justifier de ne pas innover, ce n’est pas très responsables ni ambitieux de leur part.
Pensez-vous que les différents succès de Nike en termes d’Ambush viennent du fait que Nike
est une marque de Sport ? Ainsi cela semble cohérent pour les gens que Nike communique
durant les Jeux Olympiques ou une Coupe du Monde ... En revanche, est-ce plus compliqué
92
pour Pepsi de créer un lien direct avec les consommateurs pour les mêmes raisons ? Pepsi
n’étant pas une marque de sport ...
Laissez-moi vous expliquer comment fonctionne l’Ambush Marketing de Pepsi en comparaison à
celui de Nike. Nike est une marque de sport, les athlètes portent des combinaisons avec un swoosh
bien visible donc tu ne dois pas nécessairement créer des choses dingues pour être visible, tu es
légitime, ta place est ici ! Par contre, pour Pepsi, c’est une autre histoire ... Pour apparaitre aux yeux
des supporters comme un sponsor officiel en lieu et place de Coca-Cola tu dois penser de manière
complètement différente. Il y a plusieurs années quand je travaillais chez Pepsi durant les Jeux
Olympiques 2008 de Pékin, on a essayé de lancer un mouvement appelé « Two sum up », c’était un
geste très basique de deux pouces levés vers le haut, un peu comme le bouton « like » de facebook
mais de face et avec deux mains. C’était pour témoigner notre soutien à l’équipe nationale de
Chine. En gros: « one sum up » c’est bien, « two sum up » : c’est super bien. Ça ne parait pas dingue
comme ça mais l’objectif c’était de rendre ce geste populaire au sein des supporters et des
consommateurs. Donc on a mis ce geste sur toutes les cannettes vendues à cette période car ce
sont des points de contacts privilégiés avec les consommateurs, il y a des millions de cannettes sur
le marché. C’était une publicité gratuite, on a tourné une publicité TV qui faisait écho à ce message.
A cette époque il n’y avait pas vraiment de réseaux sociaux en Chine, c’était juste internet avec les
logiciels de messageries instantanées comme Windows Live Messenger donc on a aussi créé des
émoticônes en lien avec la campagne et le geste « Two sum up ». L’objectif de tout cela c’était
d’intégrer ce geste dans la culture et dans l’esprit des consommateurs, pour le rendre cool afin
qu’une fois que les consommateurs le voient, ils fassent le lien avec les JO et considèrent Pepsi
comme le sponsor officiel. Donc ça c’est la manière de communiquer des marques qui fabriquent
des biens de grande consommation, qui est bien différente des marques de sport. Les biens de
grande consommation doivent penser de manière détournée et bien plus intelligentes parce
qu’elles ont des centaines de produits sur le marché qui ne sont pas en lien direct avec la pratique
sportive ou l’événement. Pepsi utilise aussi les célébrités, il y a quelques années Messi, Drogba,
Roberto Carlos Ronaldinho, Beckham ... étaient tous des ambassadeurs de la marque qui faisait un
gros focus sur le football. Les deux plateformes clés étaient le football et la musique pour nous. 93
Est-ce vraiment efficace de mener une politique d’endossement pour Pepsi ?
Laissez-moi vous donner un exemple, il y a quelques années Coca-Cola était systématiquement en
train d’adapter les publicités globales au marché chinois. C’était très joli mais pas ciblé pour le
marché. De l’autre côté Pepsi a utilisé 9 super stars asiatiques pour communiquer ici en Chine et
localiser ses campagnes, toutes les plus grosses stars ont été signées, une campagne TV a été
lancée. L’objectif de cette stratégie était de créer le buzz, Pepsi a toujours été fort pour créer le buzz
et utilisé les célébrités qui à cette période ont fait une publicité exceptionnelle à la marque en
buvant des cannettes durant leurs émissions, leurs concert, en plaçant le produit dans des
magazines ... les jeunes sont ainsi devenus dingues de Pepsi puisque pour eux c’était la boisson de
leurs idoles. Pepsi apparu comme la marque des jeunes et de la nouvelle génération, la marque
avait de l’ « attitude » sur le marché chinois, comparé aux Ours polaires de Coca-Cola. En gros le
Coca c’était pour les vieux et le Pepsi c’était pour les jeunes. 3 ans après avoir démarré cette
stratégie, Pepsi a pris le leadership du marché avec un indice de 1,2. En gros quand Pepsi vendait
12 canettes, Coca en vendait 10. C’est la première fois que cela arriva sur le marché mondial, Pepsi
était devant Coca-Cola.
Est-ce toujours le cas en Chine ?
Non plus maintenant, Coca-Cola a compris son erreur et a signé ces dernières années de
nombreuses célébrités, sans hésiter à voler des stars à Pepsi. Depuis peu, ils ont même étendus
cette stratégie au sport en signant LeBron James et Kobe Bryant avec Sprite. Donc clairement Coca-
Cola a copié la stratégie de Pepsi pour reprendre le leadership. Maintenant, la balle est dans le
camp de Pepsi, à eux d’innover à nouveau car ce sont les challengers et c’est le seul moyen de
lutter.
Pour vous quelles sont les clés d’une campagne d’Ambush Marketing réussie ? La créativité ?
La capacité à diffuser massivement un message ? …
Pour moi la clé est assez simple, c’est le consommateur. Que l’on soit un officiel ou un Ambusher,
l’objectif c’est de positionner sa marque afin de vendre des produits tôt ou tard. Donc il faut
94
analyser les consommateurs et identifier quels sont leurs besoins, leurs demandes. Par exemple,
pour une marque de sport en Chine, le problème des consommateurs chinois c’est qu’ils sont trop
faignantas, ils ne bougent pas assez et ne font pas assez de sport. Donc le challenge c’est :
comment peut-on inspirer les consommateurs pour changer leurs habitudes et éveiller en eux le
besoin de faire du sport ? C’est la bonne manière d’approcher cette situation. La tonalité et le
message qu’on a décidé de véhiculer l’été dernier était un message qui parlait vraiment aux
consommateurs car c’était des athlètes amateurs, des gens auxquels ils pouvaient s’identifier, se
reconnaitre, se comparer. On leur a fait réaliser que la « Grandeur » (Greatness) n’était pas si loin
d’eux, que ce n’était pas juste des spectateurs en face d’une publicité mais que c’était un
mouvement global qu’ils pouvaient rejoindre s’ils sortaient et commençaient à se bouger.
Plutôt que de vendre un produit, l’objectif c’est d’inspirer les consommateurs ?
Oui exactement, le conseil que je peux donner aux Ambushers c’est de ne pas devenir dingue de
leurs produits et de ne pas se laisser tenter par la publicité trop simple et basique. Lorsqu’on essaie
d’Ambusher, on doit rendre les gens dingues de sa marque, leur laver le cerveau en quelques sortes
pour que ce soit plus simple au final d’être identifié et de vendre ses produits. Que vous soyez un
Ambusher ou un officiel, vous devez penser aux consommateurs avant tout, vous avez beau avoir
votre logo partout, si vous ne vous intéressez pas à ce que pense les consommateurs, vous serez le
perdant au final. A l’inverse, si vous listez les points de tensions avec les consommateurs, identifiez
les bons leviers à utiliser pour communiquer ... que vous soyez un officiel ou non, vous pouvez
toucher les consommateurs en respectant les règles. Donc pour moi, c’est simple, il faut placer le
consommateur au centre du dispositif, tout par d’eux et c’est en répondant à leurs besoins qu’on
peut gagner la bataille.
Pensez-vous que les réseaux sociaux soient dangereux pour des organismes comme la FIFA ou
le CIO ? Doivent-ils lutter contre eux ?
Basé sur mon expérience de l’an passé avec la campagne « Greatness », on a vu de nombreuses
entreprises ou marques adopter des stratégies irresponsables sur les réseaux sociaux, beaucoup de
95
non officiels ont utilisés leurs athlètes sans vraiment respecter les règles mais personne ne leur a
interdit, donc je pense qu’il y a un manque de régulation, en particulier ici en Chine, tout est
permis. Il n’y a pas de règles, on peut faire ce qu’on veut. Mais d’un autre côté, je trouve le CIO trop
discret sur les réseaux sociaux, ils ne prennent pas la parole donc d’autres acteurs le font à leur
place.
Plutôt que d’essayer de se battre contre ses entreprises sur les réseaux sociaux via des
moyens légaux, pensez-vous qu’une approche plus intelligente pour le CIO et ses partenaires
serait d’utiliser les innombrables ressources et atouts qu’ils ont à disposition pour être plus
fort que les autres ?
Oui, les gens passent aujourd’hui plus de temps sur les réseaux sociaux que sur tous les autres
médias cumulés, donc si vous les mettez de côté, vous allez droit dans le mur ! Donc le CIO et les
sponsors officiels doivent être beaucoup plus attentifs à ce phénomène et le prendre dans le bon
sens. Encore une fois, je vais prendre en exemple notre manière d’exécuter notre campagne l’année
dernière. Durant les JO on a regroupé toutes nos agences et toutes nos forces dans un même lieu
physique, ainsi on a créé un endroit où nous avons mis des gens de chez Nike, de nos agences
digitales et créatives pour regarder les Jeux Olympiques ensemble et être en mesure de réagir à
l’instant T. C’est la clé pour moi, le temps de réaction est indispensable pour être crédible et dans le
coup sur ces plateformes. Je me rappelle de certaines entreprises qui nous demandaient comment
on faisait pour être aussi rapide. Lorsqu’ils étaient encore en train de rédiger le brief pour leur
agence, on avait déjà publié un visuel qui avait des milliers de partages et de retweet sur Weibo
(Twitter Chinois). Normalement c’est un long processus de validation, de retours de brief, de
discussion ... mais pour nous ce n’était juste pas du tout la bonne formule pour réussir sur les
réseaux sociaux. Si tu rates une occasion, même de quelques minutes, tu ne la récupères jamais
donc il faut être rapide et agir dans l’instant pour impressionner les consommateurs également. La
raison principale de notre succès a été d’asseoir tout le monde dans la même salle pour travailler le
plus efficacement possible. Mon impression c’est que les réseaux sociaux sont primordiaux, les
consommateurs se transforment en ambassadeur de marque, si ils sont d’accord avec ce que l’on dit
96
et que cela les touchent, ils vont naturellement reprendre notre message et celui-ci aura encore
plus de sens dans leur bouche. On a atteint l’an dernier des records avec plus de centaines de
milliers de retweet pour de simple postes accompagnés de photos ... En fait, on a simplement
amené notre point de vue, en essayant d’inspirer les jeunes, sans vouloir tromper le CIO, on voulait
juste apporter notre vision du sport, pour nous c’est authentique et complètement dans l’esprit.
Comment voyez-vous l’Ambush Marketing évoluer lors des prochaines années ?
Je pense que les marques sont très intelligentes, vraiment. Elles sont au courant de ce qui marche
car elles observent ce qu’il se passe autour d’elles, ainsi je suis prêt à parier que beaucoup de
marque vont essayer de copier ce qui a marché et l’enjeu pour vraiment tirer son épingle du jeu va
être d’innover pour surprendre le consommateur une nouvelle fois. Je ne peux pas prédire ce qu’il
va se passer, mais je peux utiliser mon expérience pour essayer de le faire ... Si je reviens 5 ans en
arrière, aujourd’hui c’est le futur, pas vrai ? Donc en comparaison à il y a 5 ans, les stratégies
d’Ambush marketing n’ont pas vraiment changé, les objectifs sont les mêmes. Par contre les moyens
eux ont énormément changé, en particulier le moyen de véhiculer ses idées et l’utilisation des
médias pour le faire. Donc il faut faire très attention aux nouveaux médias, aux nouveaux supports
qui vont éclore dans les prochaines années pour essayer d’accroitre l’efficacité de nos futurs
dispositifs. En gros, le fond restera le même, la forme va beaucoup changer par contre. Je pense
aussi que pour gagner dans le futur, l’enjeu va être de connecter de manière personnelle avec les
consommateurs et de leur offrir un service, apporter une vraie valeur ajoutée.
Dernière question : l’Ambush Marketing et le business font-ils bons ménage ?
Je pense que pour vendre plus, être sponsor officiel aide énormément. Par contre, il faut bien
choisir son support, bien concevoir ses produits et bien positionner ses produits. Avoir un logo sur
des produits ne suffit pas.
"
97
Interview d’un détenteur de droit :
Sébastien KLOTZ : Directeur Marketing de la Fédération Française de Football.
Interview effectuée le 21 juin 2013 par Téléphone.
Selon vous, quelle est la raison principale pour laquelle une marque décide d’adopter une
stratégie d’Ambush Marketing plutôt qu’un partenariat officiel ?
Cela revient beaucoup moins cher car la marque n’aucun droit à payer au détenteur de droit. Et en
général, elle choisit uniquement les moments forts pour le faire (Euro, Coupe du Monde) et ne fait
rien le reste du temps .... Donc pour moi la raison principale c’est l’économie d’argent.
Les prix des partenariats officiels poussent-ils certaines marques à reconsidérer leurs
investissements et opter pour une stratégie d’Ambush Marketing ?
Oui car elles sont toutes en réduction des couts actuellement mais pour moi cette stratégie ne sert
pas à grand-chose car les interactions entre la marque et le sport concernées sont bien moins
nombreuses lorsqu’on décide d’ambusher .... Et c’est ce qu’une marque recherche normalement
lorsqu’elle décide d’utiliser le sport comme support de communication, donc penser de la sorte est
contre-productif selon moi !
La liberté de créativité est-elle moins importante en étant partenaire officiel (ex : package sur
mesure sans possibilité d’innover) ou au contraire les opportunités sont plus nombreuses (ex :
utilisation du logo, nom, charte graphique...) ?
L’Ambush oblige à une forte créativité car tu dois contourner ce qui est offert au partenaire officiel.
Cela te force à trouver des moyens alternatifs souvent plus innovants ou créatifs. Je pense que dans
certains cas l’Ambush peut être très bien fait mais c’est du court terme. Une stratégie à long terme
ne peut passer que par un partenariat Officiel car les opportunités offertes sont plus nombreuses et
le lien est beaucoup plus direct entre le consommateur et le parrain.
Les contrats d’exclusivité empêchent-ils certains sponsors de s’exprimer ?
98
Oui et c’est l’objectif de ceux-ci ...
L’Ambush Marketing n’est-il donc pas légitime (cf. concept de libre concurrence) ?
Non car cette exclusivité permet de créer de la valeur et de donner une nouvelle dimension à
l’évènement. Les Ambushers veulent les avantages d’un système (évènements de grande ampleur
pour communiquer) sans les inconvénients (rétribution des organisateurs/athlètes), c’est un peu
comme dans la vraie vie, on ne peut pas tout avoir ...
La multiplicité des entités et des acteurs pose-t-elle problème aux organisateurs (ex : athlète
sous contrat Adidas jouant pour une fédération sponsorisée par Nike) ? Comment la FFF gère
cela ?
On pourrait penser que oui mais non car les contrats sont clairs et chacun sait ce qu’il a droit de
faire ou non. Nike et Adidas sont de très grandes marques, elles sont responsables et savent très
bien comment cela se passe donc pas trop de problèmes, chacun reste à sa place et joue le jeu.
L’Ambush Marketing : un monde d’opportunité pour une marque ou une fausse bonne idée ?
Cela peut être payant de temps en temps mais il ne faut pas oublier le risque encouru par ces
marques car les organisateurs sont de plus en plus efficaces pour lutter contre ce phénomène. Par
exemple, à la FFF nous sommes déjà en train de monter tout un projet anti Ambush autour de
l’Euro 2016 pour protéger les droits de nos partenaires Vs l’Equipe de France.
Les sponsors des grands événements sont-ils de plus en plus exigeants envers les
organisateurs en termes de ROI ?
Oh que oui ! Pour nos partenaires, tout doit être calculé et expliqué ... cependant, il faut leur faire
comprendre qu’une partie importante du sponsoring ne peut pas être « ROI sée ».
L’Ambush Marketing : une vraie alternative pour un sponsor ?
99
Je pense sincèrement que non, cela restera toujours une roue de secours ou un moyen un peu tiré
par les cheveux de communiquer.
L’Ambush Marketing : une vraie menace pour les organisateurs et la pérennité de leurs
événements ?
Non ce n’est pas une menace pour la pérennité d’un évènement sportif si son modèle de
partenariat est efficace et bien pensé. Mais cela doit être pris au sérieux tout de même pour
garantir aux partenaires des retombées supérieurs aux Ambushers ..... Et c’est ce que nous faisons à
la FFF en ce moment même.
Les réseaux sociaux sont une mine d’or pour les Ambushers : comment les organisateurs
peuvent-ils minimiser les risques sur ces plateformes ?
C’est malheureusement quasi impossible pour le moment, les outils technologiques sont en avance
sur les outils législatifs, il faut faire avec. La multiplication des supports de consommations de
contenus (mobile, tablettes, pc, tv, affichages...) est-elle un risque pour les organisateurs ?Oui bien entendu car les possibilités d’Ambush sont encore plus nombreuses.
Comment voyez-vous évoluer le phénomène dans les années à venir?
C’est une question à laquelle tous les détenteurs de droits aimeraient pouvoir répondre pour
pouvoir des maintenant commencer à y travailler ... Malheureusement personne n’a la réponse
donc on se rappelle dans 5 ans et je vous le dirai !
"
100
Interview d’un spécialiste du Marketing Sportif :
Lionel MALTESE : Professeur associé Kedge Business School (Sport Event Management)
Interview effectuée le 24 juin 2013 par téléphone.
Une stratégie d’Ambush Marketing est-elle viable sur le long terme ou est-ce plutôt une
stratégie de court-terme ?
Selon moi, il faut considérer trois objectifs au parrainage. Le premier étant la recherche de visibilité,
le second va être le relationnel, et le troisième va être la réputation. Concernant la recherche de
visibilité, une stratégie d’Ambush est viable, c’est une bonne opportunité de faire parler de soit, et
de profiter du buzz que va créer un événement. C’est en plus, assez facilement mesurable.
Cependant concernant le relationnel, et le réseau que permet le parrainage sur le long terme, cela
limite sérieusement la viabilité de la stratégie d’Ambush. Il est presque impossible pour une
marque, de venir ambusher le détenteur de droit sur ce terrain. Enfin concernant la réputation, elle
est à double tranchant. Dans le cas où tout se passe bien, c’est là encore assez difficile pour
l’Ambusher de venir s’attribuer la réputation d’une équipe ou d’un événement, mais c’est possible
en cas d’Ambush bien fait. Dans le cas contraire, où la réputation ne va pas être bénéfique à la
marque partenaire, comme c’est le cas dans le football assez souvent, l’Ambusher s’en lave les
mains. Il prend ce qui l’intéresse et ne se mouille pas. Je pense donc que c’est bénéfique dans
certaines situations, quand le parrain officiel est en situation de faiblesse ou pour gagner en
visibilité, mais selon moi, le parrainage va bien au delà, selon moi, le sponsoring évolue et devient
de plus en plus relationnel, et face à cela, l’Ambush ne peut pas être viable sur le long terme.
L’Ambush Marketing : un monde d’opportunité pour une marque ou une fausse bonne idée?
Pour moi, c’est une fausse bonne idée. Il ne permet pas de développer une image de marque sur le
long terme, et est de plus en plus contrôlé. Et surtout il est limité dans le sens où l’Ambusher est
seul, il ne fait aucun relationnel avec l’événement.
101
Les sponsors des grands événements sont-ils de plus en plus exigeants envers les
organisateurs en termes de ROI ?
C’est sûr, les sponsors demandent de plus en plus d’exclusivité et d’avantage. Ils demandent de
mettre en place des contrôles très poussés pour éviter l’Ambush. Nous, en tant qu’organisateur, on
doit rembourser 20% en cas d’Ambush. C’est pourquoi on est très vigilant.
L’Ambush Marketing : une vraie alternative pour un sponsor ?
Je ne pense pas. Au risque de me répéter, le relationnel que propose le parrainage est bien plus
important aujourd’hui.
Que pensez-vous de la stratégie de Nike ou Pepsi qui « Ambushent » systématiquement les
grands évènements (cf. Coupe du Monde 2010 et JO 2012) ?
Lors de ces gros évènements, ils ont tout à gagner en termes de visibilité. Le pays est inondé par les
médias du monde. C’est sûr qu’il serait dommage de ne pas en profiter. La notoriété leur est
presque assurée, même sans être sponsor. Cependant, si on prend Adidas comme exemple, ils ne
vont pas chercher uniquement la notoriété. Ils se créent un ««éco système ». Leur partenariat va
leur permettre de mettre en place une réelle stratégie autour de leur parrainage, comme ils le font
avec « All In ». Ils se créent un univers jouant la carte du relationnel à fond. Ils vont grâce à leur
partenariat, créé du trafic en boutique, faire bénéficier d’avantage à l’organisateur pour que celui-ci
leur rende la pareil. Ils vont communiquer via les plateformes de leur partenaires, etc etc..., très vite
cela peut prendre énormément d’ampleur. Nike joue avec ses armes face à cela.
Les réseaux sociaux sont une mine d’or pour les Ambushers : comment les organisateurs
peuvent-ils minimiser les risques sur ces plateformes ?
Le digital et les réseaux sociaux ne sont pas uniquement une menace, c’est aussi une opportunité
formidable pour créer une communauté et la fidéliser. Les parrains l’ont compris et tentent d’en tirer
profit au maximum. Ces nouveaux moyens de communication sur le web sont de plus en plus
102
contrôlables. Si cela est bien fait, je pense que cela bénéficiera d’avantage aux partenaires qu’aux
Ambushers.
Comment voyez-vous évoluer le phénomène dans les années à venir?
Pour moi le marketing sportif, et le sponsoring évoluent et la recherche de visibilité n’est plus
qu’une partie de leurs apports. L’Ambush ne joue que sur cette partie, mais il ne peut être
durablement intéressant pour une marque. Celle-ci s’isole en agissant ainsi, et elle ne pourra s’en
sortir. Pour Nike, cela passe, car ils sont très puissants, mais pour d’autres c’est délicat.
""
103
Interview d’un sponsor officiel :
Julien LANFREY : PR Manager et Football Brand Communication Expert chez Adidas.
Interview effectuée le 24 Juin 2013 en face à face.
Selon vous, quelle est la raison principale pour laquelle une marque décide d’adopter une
stratégie d’Ambush Marketing plutôt qu’un partenariat officiel ?
Chaque marque tente de jouer avec ses forces et en limitant ses faiblesses. Dans l’idéal, toutes les
marques souhaitent pouvoir être sponsor officiel et bénéficier des avantages que cela procure. Les
marques qui ne peuvent pas l’être, parce qu’elles n’en ont pas les moyens ou parce que les contrats
d’exclusivité les en empêchent, tentent donc de communiquer comme elles peuvent et de
bénéficier le plus possible des opportunités que proposent les gros évènements en terme
médiatique. Cela se traduit donc par de l’Ambush Marketing le plus souvent.
Les prix des partenariats officiels poussent-ils certaines marques à reconsidérer leurs
investissements et opter pour une stratégie d’Ambush Marketing ?
Aujourd’hui, les prix des partenariats sont très restrictifs, et seuls les leaders et le challenger
principale sur un marché, peuvent bien souvent se permettre d’envisager les places de partenaires
officiels. Prenons par exemple une marque comme le Coq Sportif, ou Asics, qui n’ont pas la
puissance financière que peuvent avoir Adidas ou Nike, ses marques ont tout intérêt à tenter de
mettre en place des politiques d’Ambush pour bénéficier du maximum de visibilité possible. Pour
une marque comme Nike, c’est différents car ce n’est pas une question de moyen mais de pure
stratégie et d’image de marque.
La liberté de créativité est-elle moins importante en étant partenaire officiel (ex : package sur
mesure sans possibilité d’innover) ou au contraire les opportunités sont plus nombreuses (ex :
utilisation du logo, nom, charte graphique...) ?
104
Oui, complétement. C’est un problème auquel est confronté Adidas par moment. On est obligé de
tenir des deadlines imposées par le CIO, un certain état d’esprit dans nos campagnes publicitaires,
une certaine pureté, et des chartes graphiques bien établies. Dans ce sens l’Ambush peut devenir
sexy car permet de laisser jouer sa créativité, ce que fait Nike. Cependant, je nuancerai cela en
disant que selon moi, pour qu’une campagne d’Ambush soit menée avec succès, il faut que celle-ci
colle aux codes de l’événement, et ces codes sont ceux imposés aux sponsors officiels. En s’en
écartant trop, on a le risque que les gens ne fassent pas bien le lien. Seul Nike peut se permettre
aujourd’hui des campagnes plus originales qui fonctionnent car Nike bénéficie de sa légitimité sur
le sport et ses événements. Ce n’est pas nécessairement le cas de Puma par exemple.
Les contrats d’exclusivité empêchent-ils certains sponsors de s’exprimer ? Si oui, l’Ambush
Marketing n’est-il pas légitime (cf. concept de libre concurrence) ?
Les contrats d’exclusivité sont là pour protéger l’événement et permettre à l’organisateur et le
sponsor d’optimiser au maximum leur partenariat. Sans ces contrats, les plus gros sponsors n’ont
plus d’intérêt à dépenser de gros montants. S’il empêche donc des sponsors de s’exprimer, c’est
simplement dans le but de valoriser le plus justement les montants dépensés par chacun, mais il est
vrai que cela peut rendre les choses difficiles pour les plus petites entreprises. Dans ce cas, pour
elles, l’Ambush peut être légitimement évalué comme une alternative.
La multiplicité des entités et des acteurs pose-t-elle problème aux organisateurs (ex : athlète
sous contrat Adidas jouant pour une fédération sponsorisée par Nike) ?
Le fait d’être partenaire d’un Athlète peut être très bénéfique pour une marque non sponsor d’un
événement. Nike utilise beaucoup cette méthode. Ils l’ont fait à Londres en mettant en place une
collection de chaussures fluos pour leurs athlètes, attirant l’œil au point d’en oublier le survêtement
Adidas. Cependant les évènements s’efforcent de mettre en place des restrictions à ce niveau. En
dehors des évènements c’est plus difficile. Par exemple, lors de l’arrivée de Beckham au PSG, Adidas
s’est empressé d’organiser une conférence de presse aux couleurs d’Adidas, étant sponsor du joueur,
venant ainsi devancer et « Ambusher » pour le coup Nike sponsor du club qui n’a pu qu’organiser
105
une deuxième conférence par la suite. Dans ce cas, aucune règle ne vient établir de priorité. Lors de
l’événement ce n’est pas pareil. Le sponsor du joueur est très limité.
Une stratégie d’Ambush Marketing est-elle viable sur le long terme ou est-ce plutôt une
stratégie de court-terme ?
Encore une fois, j’insiste que chaque marque doit avoir sa stratégie de communication et que celle-
ci s’établie sur le long terme, dans le but de valoriser au mieux les Athlètes, et les produits. Pour
Adidas par exemple, la stratégie générale de la marque est « All Bleus », jouant la carte de la
marque portant les vraies valeurs du sport, étant partenaire des sports qui gagnent et qui
véhiculent de bonnes valeurs. (Handball, Rugby, Basket, etc etc...). Dans le foot, ils s’assurent des
partenariats ballons des grandes compétitions et championnats pour véhiculer uniquement l’esprit
sportif. Enfin, ils assurent leur visibilité en ayant dans tous les clubs des joueurs à leurs couleurs (8
joueurs Adidas au PSG). Face à cela, l’Ambush ne peut venir durablement se positionner, il ne fera
que tirer profit du buzz d’un événement, mais il ne me semble pas possible d’apporter une réelle
valeur ajoutée et une histoire à ta marque en pratiquant l’Ambush. Un autre point réside dans la
création d’un réseau de partenaire lorsque tu es sponsor. Adidas regroupe l’ensemble de ses
athlètes, clubs, fédérations, et les rallient à sa stratégie de communication. Adidas peut utiliser la
puissance des réseaux sociaux de ses Athlètes pour communiquer son un événement ou pour une
campagne. L’Ambusher n’a pas accès à ses avantages. Le réseau devient une notion de plus en plus
importante dans le sponsoring sportif aujourd’hui. Et le réseau, tu ne le créée qu’en étant
partenaire.
L’Ambush Marketing : un monde d’opportunité pour une marque ou une fausse bonne idée?
Tout dépend du positionnement de ta marque. Pour Nike, cela se tient, car cela correspond à
l’image de la marque. Pour Adidas cependant, une campagne d’Ambush n’aurait pas de légitimité,
et ne véhiculerait pas les valeurs qu’Adidas tente de véhiculer.
Les sponsors des grands événements sont-ils de plus en plus exigeants envers les
organisateurs en termes de ROI ?
106
Oui, complètement, on demande de plus en plus d’exclusivité et d’avantages. Les montants sont
minutieusement calculés pour être adapté au partenariat.
L’Ambush Marketing : une vraie alternative pour un sponsor ?
L’Ambush est une partie intégrante du sport professionnel aujourd’hui. C’est une alternative
momentanée si on n’a pas les droits, mais cela ne peut pas être viable sur le long terme.
Que pensez-vous des études grand public qui placent Nike devant Adidas lorsqu’on demande
aux supporters quel est le sponsor officiel de la compétition ?
J’ai vu de nombreux sondages, montrant diverses choses. Certains en effet positionnant Nike
comme sponsor, d’autre par contre, avec 90% de réponses confirmant le statut officiel d’Adidas. J’ai
été sur les derniers Jeux Olympiques, j’ai vu comment était le village, où était positionné Nike pour
gagner en visibilité, et il était réellement difficile pour eux d’avoir une place proche de l’événement.
Pour moi, Nike a tout à gagner en faisant ça, puisqu’ils n’ont pas les droits, mais cela n’équivaut pas
au statut de sponsor officiel en termes d’avantage et de visibilité.
L’Ambush Marketing : une vraie menace pour les organisateurs et la pérennité de leurs
événements ?
C’est une menace à prendre en compte oui. Elle est d’ailleurs quotidiennement étudiée. Les
organisateurs travaillent à lutter contre, et les sponsors également. Cependant je pense que seule
une organisation fidèle et fiable n’est envisageable pour les organisateurs, et pour le sport. Tout le
monde le sait, et personne n’aurait à gagner une remise en question du sponsoring, pas même
l’Ambusher qui perdrait son terrain de jeu.
Quelle est la clé pour réussir une campagne d’Ambush Marketing ? La créativité ? L’ampleur
du dispositif ? La qualité du message ?
107
La créativité est en effet la clé pour qu’une campagne d’Ambush fonctionne. Cela étant, comme je
l’ai dit auparavant, il est important de garder en tête l’importance de coller à l’image de la
compétition.
Que pensez-vous de la stratégie de Nike ou Pepsi qui « Ambushent » systématiquement les
grands évènements (cf. Coupe du Monde 2010 et JO 2012) ?
Pepsi, je connais peu. La stratégie de Nike, quant à elle, correspond à leur image de marque. C’est
une marque Marketing, qui sponsorise des Athlètes faisant beaucoup de bruit comme Ronaldo. Ils
véhiculent la notion de performance individuelle, et ils ont un Marketing très agressif. Dans ce sens,
ils sont légitimes en faisant de l’Ambush. Adidas ne pourrait pas se permettre de tels pratiques
véhiculant les valeurs du collectif, du dépassement de soit, de l’émotion du sport français, et des
valeurs du sport.
Les réseaux sociaux sont une mine d’or pour les Ambushers : comment les organisateurs
peuvent-ils minimiser les risques sur ces plateformes ?
Les réseaux sociaux sont surtout une mine d’or pour les sponsors avant de l’être pour les
Ambushers. Ils sont difficilement contrôlables mais permettent aux sponsors d’avoir une exclusivité
supplémentaire. Je m’explique. Adidas utilise les réseaux sociaux pour communiquer de manière
virale. Le but est d’être le premier sur internet. En étant partenaire des évènements, on a des droits
d’exclusivité sur les réseaux sociaux. Par exemple à Londres, seul les quatre principaux partenaires
officiels avaient droit de communiquer en direct les remises de médailles sur les réseaux sociaux.
Aujourd’hui, Adidas, pour le lancement du nouveau logo de l’Euro 2016, Adidas a communiqué sur
la toile un visuel présentant le logo avec le slogan « All in for Euro 2016 » et la phrase « Adidas,
partenaire officiel de l’euro 2016, est impatient de vivre à vos côtés les émotions du football».
Adidas a pu être le premier à le faire grâce à son statut de sponsor officiel de l’événement et
renforce ainsi son positionnement de partenaire officiel. Il est plus difficile pour l’Ambusher
d’obtenir certains contenus, permettant au sponsor de défendre sa place sur le web. La
108
communication sauvage apparaît incontrôlée et donc dangereuse pour le sponsor, mais elle l’est
beaucoup moins qu’on ne le croit.
109
""I - REVUE CRITIQUE DE LITTERATURE
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110
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#ixzz2W5bgC9WV- « Coupe Du Monde Et Chaussures Nike Fluos, Le Coup Publicitaire Du Siècle »
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publicitaire-du-siecle- « Nike Write The Futur »
http://www.blogoergosum.com/16046-nike-write-the-future- « The World Cup Brand Winner Adidas Or Nike ? »
http://blogs.hbr.org/hbsfaculty/2010/07/the-world-cup-winner-adidas-or.html- « I Love L.A. » Nike (1984) http://www.youtube.com/watch?v=po6S8cizOXY - « With Nike’s « Ambush Marketing », Olympic Committee Proves It Lost the Spirit Of the Games »
http://www.huffingtonpost.com/ryan-holiday/with-response-to-nikes-am_b_1708299.html- « Did Nike’s Olympic Ambush Marketing Work? Um, Yeah. »
113
http://theruniverse.com/2012/08/nikes-olympic-ambush-marketing-2/- « Nike / Ambush Sur le Mondial 2010 »
http://www.ambush-marketing.com/2010/07/nike-ambush-sur-le-mondial-2010/- « Meet The Man Behind Nike’s Neon Shoe Ambush »
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nike-goes-for-gold/- « How Nike Pulled Brilliant Ambush Marketing Olympics »
http://www.thedrum.com/news/2012/08/22/how-nike-pulled-brilliant-ambush-marketing-olympics
- « Nike, Marque La Plus Associée Aux JO 2012 »
http://www.sportstrategies.com/actualites/sponsoring/238668-nike-marque-la-plus-associee-aux-
jo-2012 - « Nike Commits A Professional Foul On Adidas »
http://www.smh.com.au/business/media-and-marketing/nike-commits-a-professional-foul-on-
adidas-20100620-ypd9.html#ixzz2WerW2hwv - « Euro 2012 : Soccer Stakes Rise As Nike Presses On Adidas’ Turf »
http://www.thisdaylive.com/articles/euro-2012-soccer-stakes-rise-as-nike-presses-on-adidas-turf/117649
114