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SOMMAIRE EDITO P.2 Par Gilles MARCOIN EN DIRECT DE 3AF P.3 Space Propulsion 2014 Missile Defence 2014 Appel à Communications IES 2014 Le CEAS Conventions de partenariat et accords de coopération entre la 3AF et ses membres collectifs DOSSIER P.8 Les souffleries de l’ONERA TECHNOLOGIES P.17 Atelier REACH Aérodynamique et automobiles CULTURE P.18 Louis Damblanc, père des fusées à étages MISSION ROSETTA P.20 AGENDA P.23 La revue de la société savante de l’aéronautique et de l’espace NUMÉRO 8 - MARS 2014 www.3af.fr LETTRE 3AF P.8 LES SOUFFLERIES DU CENTRE ONERA DE MEUDON DU SUBSONIQUE À L’HYPERSONIQUE

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SOMMAIRE

EDITO P.2Par Gilles M A RCOIN

EN DIRECT DE 3AF P.3• Space Propulsion 2014• Missile Defence 2014• Appel à Communications

IES 2014• Le CEAS• Conventions de partenariat

et accords de coopération entre la 3AF et ses membres collectifs

DOSSIER P.8• Les souffleries de l’ONERA

TECHNOLOGIES P.17• Atelier R EACH • Aérodynamique et

automobiles

CULTURE P.18• Louis Damblanc, père des

fusées à étages

MISSION ROSETTA P.20

AGENDA P.23

La revue de la société savante de l’aéronautique et de l’espace

NUMÉRO 8 - MARS 2014www.3af.fr

LETTRE 3AF

P.8 LES SOUFFLERIES DU CENTRE ONERA DE MEUDON DU SUBSONIQUE À L’HYPERSONIQUE

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Chères lectrices, chers lecteurs,

Quelques mots tout d’abord sur le site et sur la Lettre 3AF.

Nous souhaitons garantir un flux d’articles de qualité publiables sur le site 3AF et dans la Lettre bimestrielle sur des sujets variés et intéressant l’ensemble de nos membres. Nous sommes donc à la recherche d’auteurs et d’articles et lançons dans ce but un appel à nos Commissions Techniques, nos Groupes Régionaux, nos partenaires des Collèges 2 et 3, nos membres individuels. A la demande de notre Président Michel Scheller nous avons constitué un « Comité Rédactionnel », que je préside en tant que nouveau « Rédacteur en Chef » de la Lettre 3AF, composé de membres éminents (voir ci-contre), et qui est chargé de collecter les articles, de les valider et d’assurer une planification d’ensemble des publications.

Comme vous pouvez le constater en lisant cette Lettre 3AF, ces articles sont de nature différente.

Articles « généraux » qui concernent la vie de notre association, comme celui consacré aux nombreux accords entre 3AF et ses partenaires, par Jacques Sauvaget, et celui concernant la cérémonie de remise de la médaille d’or du CEAS à Louis Gallois récemment à Paris rédigé par Pierre Bescond,

Articles de nature technique comme celui sur REACH par Jean-Marc Besson, celui sur les souffleries de Meudon par Bruno Chanetz, celui sur l’aérodynamique des automobiles, par Patrick Gilliéron,

Articles de nature historique ou culturelle comme celui sur Louis Damblanc, père des fusées à étage, par Jean-Jacques Serra.

Mais nous sommes également ouverts à des articles dits de libre opinion pourvu qu’ils s’inscrivent dans les missions de 3AF.Notre démarche est de faire paraître ces articles sur le site et de les rassembler tous les deux mois dans la Lettre 3AF sous le format d’un message électronique qui comporte des liens renvoyant à ces articles. Vous constaterez que certains d’entre eux

sont réservés aux membres : on ne peut y accéder qu’en se connectant au site avec son mot de passe. Une version imprimée est envoyée aux membres ne disposant pas d’internet, aux partenaires de 3AF ainsi qu’aux Groupes Régionaux. La même Lettre est envoyée aux membres sous format pdf, ce qui leur permettra de les archiver. Notez que nous archivons également ces Lettres sous format pdf sur le site.

L’aérodynamique est à l’honneur actuelle-ment à 3AF, dans la Lettre, mais aussi par la tenue à l’Ecole Centrale de Lille du 24 au 26 mars 2014 du colloque annuel d’aérodyna-mique appliquée organisé par la Commission Technique Aérodynamique présidée par Jean Delery, dont la 49ème édition s’intitule «  Aerodynamics and environment ». Il est organisé en partenariat avec la RAeS et l’AIAA.

Je tiens à souligner que la plupart des grands colloques 3AF de 2014 se concentrent au premier semestre. Nous avons eu la cinquième édition du colloque international sur l’optronique de Défense et de Sécurité qui s’est tenue à Paris du 26 au 28 janvier, le colloque ERTS (Embedded Real Time Software and Systems) organisé par le Groupe Régional Midi-Pyrénées en partenariat avec la SEE qui s’est déroulé à Toulouse du 2 au 5 février. Le colloque « Greener Aviation » en partenariat avec CLEANSKY se déroule à Bruxelles du 12 au 14 mars. Puis vient le colloque AERO2014 cité plus haut. La 4è édition du colloque « Space Propulsion » 2014 se déroulera à Cologne du 19 au 22 mai. La 10iéme conférence internationale sur la Défense antimissile, MD 2014, aura lieu à Mayence (Allemagne) du 17 au 20 juin.

3AF a organisé un atelier consacré à la régle-mentation REACH le 18 septembre 2013 sous le titre : « Le règlement Européen REACH, contraintes et opportunités d’innovation pour l’industrie aéronautique et spatiale ». Cet atelier a été particulièrement apprécié par ses participants et il est envisagé d’organiser des ateliers du même type dans les Groupes Régionaux. Un rapport a été rédigé, l’article de Jean-Marc Besson dans la présente Lettre 3AF vous en donne un aperçu synthétique.

Éditeur

Association Aéronautique et

Astronautique de France - 3AF

6, rue Galilée, 75116 Paris

Tél. : 01 56 64 12 30

Fax : 01 56 64 12 31

Directeur de la Publication

Michel Scheller

Rédacteur en chef

Gilles Marcoin

Comité de rédaction

Pierre-Guy Amand, Bruno

Chanetz, Pierre Bescond, Jean

Délery, Pierre Froment, Paul

Kuentzman, Jacques Sauvaget,

Jean Tensi, Anne Venables et

Sophie Videment.

Rédaction

Tél. : 01 56 64 12 30

[email protected]

Conception

Ici la Lune

Impression

Impression Design

Dépôt légal : 1er trimestre

2014

ISSN 1767-0675

Droit de reproduction, textes

et illustrations réservés pour

tous pays.

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PAR GILLES MARCOINÉDITO

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SPACE PROPULSION 2014Après le succès de sa troisième édition à Bordeaux, en France en mai 2012, 3AF, l’ESA, le CNES et le DLR sont heureux d’annoncer une quatrième édition composée d’une nouvelle série de conférences internationales sur les aspects techniques et programmatiques relatifs à l’élaboration et l’application de technologies de propulsion spatiale.

Du lundi 19 mai au jeudi 22 mai 2014 à Cologne (Allemagne)

MISSILE DEFENCE 2014 The 10th edition of the 3AF International Conference on Missile Defence will provide a timely opportunity for discussion in an open forum and will address Missile Defence on an international level. The conference offers a mix of technical and non-technical, contributed and invited papers, and descriptions of the many existing BMD programmes, including VIPs’ talks and specific plenary sessions.

The 10th 3AF International Conference on Missile Defence is planned from 17 to 20 June 2014 in Mainz, Germany, and will bring new information and debate on this continuing challenge for Europe and European Industry.

Du mardi 17 juin au vendredi 20 juin 2014 à Mayence (Allemagne)

APPEL À COMMUNICATIONS IES 2014Le 12ème Forum Européen IES 2014 se tiendra à Troyes, du 24 au 26 septembre 2014, sous le Haut patronage de Claude Revel, Déléguée interministérielle à l’Intelligence Economique.Les principaux thèmes seront :• L’Intelligence Economique dans la société, les entreprises

et les organisations• Les stratégies des acteurs dans un monde en mutation

RETOUR DES PROPOSITIONS AVANT LE 16 AVRIL 2014

A qui s’adresse ce Forum?Professionnels, chefs d’entreprise, experts, institutionnels, universitaires de tout secteur d’activité concernés par les domaines suivants:• Veille/ Intelligence Economique / Analyse• Innovation/ Prospective/ Propriété Intellectuelle• Stratégie/ Marketing / Business Development• Communication / Lobbying• Sûreté / sécurité

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EDITO

EN DIRECT DE 3AF

Je forme le vœu que tous ces évènements soient de véritables succès, une des conditions importantes pour cela étant le soutien de nos membres collectifs impliqués dans ces évènements. Des synthèses vous seront proposées sur le site et dans les prochaines Lettres.

Rosetta fera l’objet d’une série d’articles tout au long de la mission. Dans ce numéro, Jean Jamet nous explique la

genèse du programme. N’hésitez pas à nous faire part de vos critiques ou de vos encouragements. Je vous souhaite bonne lecture.

GILLES MARCOIN.Secrétaire Général 3AF

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EN DIRECT DE 3AFQue pouvez-vous proposer?• Une conférence « traditionnelle » de 25 minutes suivie de

5 min de discussions ; les communications individuelles seront regroupées en sessions thématiques.

• Une intervention lors d’un atelier ou d’une table ronde d’une heure.

SOPHIE VIDEMENTDirectrice de la Communication Institutionnelle et des Relations Presse 3AF

LE CEASC’est dès le milieu des années 80 que les principales sociétés savantes européennes de l’aéronautique et du spatial, qui coopéraient souvent de façon bilatérale, estimèrent que le moment était venu de s’associer plus largement car dans leur domaine clairement international l’industrie et les programmes gommaient de plus en plus les frontières.Elles décidèrent donc au Salon de Farnborough de 1992 de créer une confédération, qui prit le nom de CEAS (Confede-ration of European Aerospace Societies) et dont la consti-tution fut signée officiellement l’année suivante au Salon du Bourget. La 3AF était particulièrement motrice dans cette initiative menée pour elle par Jean-Michel Contant qui bénéficiait aussi du soutien appuyé de sa société, l’Aérospatiale.

Une dizaine d’années plus tard les sociétés membres fondatrices, pour renforcer ces liens, décidèrent qu’un statut légal s’imposait : le CEAS devint en 2003 le Council of European Aerospace Societies, une association de droit belge dont les statuts sont déposés à Bruxelles. Cela donnait par ailleurs une plus grande souplesse qui lui permettrait d’élargir ses adhésions et ses ressources.

Fort aujourd’hui d’une quinzaine de sociétés membres, il est dirigé par un Board of Trustees (son CA) et son activité est coordonnée par un Directeur Général. Il est structuré en une branche aéronautique et une branche espace, qui comprennent des Comités Techniques composés de membres individuels. On estime le total des membres individuels des sociétés membres à 35000. Ils sont de facto membres du CEAS.

Les sociétés membres ont le statut :

• de « Trustee Member » avec 1 ou 2 représentants (Trustees) selon la dimension de la société savante concernée (Les 2 Trustees de la 3AF sont aujourd’hui Pierre Bescond et Jacques Sauvaget qui vient de remplacer François Gayet),

• d’ « Associate Member » (Société savante Observateur, ne cotisant pas et n’ayant pas le droit de vote mais ayant vocation à devenir à court terme « Trustee Member »), ou

• de « Corporate Member » (Organisation ou Institution européenne, payant une cotisation négociée mais n’ayant pas le droit de vote, ou par dérogation ne payant pas une cotisation mais apportant un service particulier : c’est le cas par exemple d’Euroavia qui ouvre l’accès à son réseau d’étudiants).

Bien entendu pour apporter un service éminent à ses membres il est essentiel que le CEAS ne leur fasse en aucun cas concurrence et qu’au contraire il les aide à aller plus loin dans leurs efforts de promotion de l’aéronautique et de l’espace. Il a donc considéré que les maîtres-mots soutenant son action seraient « complémentarité » (ne surtout pas faire ce que ses membres font déjà très bien et valoriser par tous les moyens possibles leurs compétences et leurs activités) et « subsidiarité » (mener pour elles au niveau européen ce que chaque société séparément est en peine de faire, en particulier auprès de la Commission Européenne). Dans cet esprit, et à l’issue d’une séance de travail en septembre 2011 destinée à élaborer sa feuille de route, il a organisé son effort autour des 4 axes stratégiques suivants :

• Relations avec les instances européennes pertinentes : mieux se faire connaître et valoriser ses sociétés membres auprès d’elles. A titre d’exemple il est impliqué dans un contrat de la CE avec 5 autres associations européennes de recherche aéronautique et spatiale, ECAero, destiné en particuler à mieux coordonner l’ensemble des conférences

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EN DIRECT DE 3AFet publications européennes sur le sujet, et pour lequel la CE considère bien qu’il est le vrai porteur des valeurs de l’industrie.

• Etudiants et Jeunes Professionnels : attirer les meilleurs vers les métiers de l’aéronautique et du spatial et promouvoir les standards reconnus de formation. Sa présence au sein du réseau d’Euroavia cité plus haut et dans plusieurs ateliers de la CE sont deux exemples des véhicules qu’il utilise.

• Dissémination du savoir via conférences, publica-tions et comités techniques. Ses Comités Techniques sont en fait essentiellement des Comités de Programme de conférences où se retrouvent les experts européens des domaines d’excellence concernés, ces conférences étant soit promues et organisées par une ou plusieurs sociétés nationales, soit organisées en alternance avec l’AIAA. Il publie un journal aéronautique et un journal espace ainsi qu’un Bulletin trimestriel dont l’éditeur en chef est Jean-Pierre Sanfourche de la 3AF.

• Coopération Internationale structurée et organisée : ne pas multiplier les accords mais leur donner un contenu concret, pratique, et qui permette des actions réelles. Sur par exemple les conférences avec l’AIAA, mentionnées ci-dessus, il se place en correspondant et coordonna-teur pour amener progressivement cette dernière à véritablement coopérer au niveau européen : harmo-nisation des règles et procédures, réelle délégation à la

partie européenne quand celle-ci accueille et organise la conférence, voire signature de l’accord par le CEAS lui-même.

Le CEAS attribue aussi des récompenses, la plus presti-gieuse étant la Médaille d’or : la “CEAS gold medal” 2013 a été attribuée à Louis Gallois et lui a été remise en janvier dernier à Paris par le Président David Marshall au cours d’une réception offerte par la 3AF en la présence de son Président Michel Scheller.

J’incite tous nos membres à faire mieux connaissance avec le CEAS en visitant régulièrement son site http://www.ceas.org/. Le CEAS dispose d’un potentiel de valorisation important de nos métiers et de nos sociétés membres au niveau européen et même mondial, pourvu qu’on en soit conscient et qu’on le soutienne dans sa démarche. La 3AF, moteur de sa création, l’a bien compris et en a fait un des éléments de son rayonnement à l’international dans son Plan Stratégique. Toute suggestion permettant d’améliorer encore cette dynamique nouvelle sera la bienvenue. N’hésitez pas à en faire part à Jacques Sauvaget ou à moi-même.

PIERRE BESCONDMembre émérite 3AF, Chargé des Relations InternationalesCEAS Past President, VP for Publications and External Relations

Lors de ses états généraux que la 3AF a tenus le 17 novembre 2009, ses membres collectifs ont clairement exprimé leur volonté « d’asseoir la pérennité de la 3AF sur des fonda-mentaux stables et solides», et leur « attachement à la voir continuer à remplir le rôle qu’elle joue dans le paysage aéronautique et spatial français et européen ».Cette volonté et cet attachement ont été notamment concrétisés par l’établissement de documents de partenariat entre la 3AF et nombre de ses membres collectifs ou partenaires.

A ce jour, le bilan des documents de partenariat est le suivant :• 3 membres de droit : CNES, DGA, DGAC.• 17 membres du collège « activités industrielles » : AIRBUS

OPERATIONS, AIRBUS DEFENCE & SPACE, ARMÉE de l’AIR, BNAE, DASSAULT AVIATION, EADS/CTO-IW, EUROCOPTER (AIRBUS HELICOPTERS), GIFAS, HERAKLES, MBDA, ROCKWELL COLLINS France, SAFRAN-SNECMA, SODERN, SOPEMEA, THALES (incluant THALES ALENIA SPACE), TRESCAL.

• 16 membres du collège « recherche ou formation » : CCI France, Centrale Lyon, Cité de l’Espace, ENAC, ENSEEIHT, EPF, ESTACA, EUROSAE, Fondation EADS, IMA, IPSA, INSA Rouen, ISAE, ISAE-ENSMA, ONERA, PPRIME.

• 7 partenaires (pôle de compétitivité, cluster, divers) : AEROTEAM, BAAS, EMC2, IAS, MAIRIE du 15ème, NAE, PEGASE.

Les trois derniers documents de partenariat signés l’ont été avec THALES le 11 octobre 2013, DASSAULT AVIATION le 8 janvier 2014 et CCI France le 4 mars 2014. Ils ont fait l’objet de communiqués publiés sur le site de la 3AF.

Dans son préambule chaque convention stipule en particulier que le membre collectif souhaite asseoir l’action de la 3AF sur des bases stables et solides, et est attaché à voir croître son rôle dans le paysage aéronautique et spatial français et européen. Sont ensuite précisés la nature et le contenu des relations entre le membre collectif et la 3AF en matière de :• Commissions techniques et colloques: les commissions

CONVENTIONS DE PARTENARIAT ET ACCORDS DE COOPÉRATION ENTRE LA 3AF ET SES MEMBRES COLLECTIFS

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EN DIRECT DE 3AFtechniques intéressant le membre collectif sont spécifiées, ainsi que son souhait de participer à l’expression et la planification des besoins à satisfaire par les commissions techniques ou au travers de colloques ;

• Groupes régionaux: les établissements du membre collectif concernés par la convention sont précisés, ainsi que la volonté de désigner dans chacun d’entre eux le correspondant du président du groupe régional de la 3AF ;

• Cotisations: la nature, voire le montant de la cotisation annuelle (niveau adhérent, bienfaiteur ou donateur), est mentionnée, ainsi que l’objectif d’évoquer la politique du membre collectif en matière de paiement des cotisations individuelles;

• Gouvernance: la concertation en matière de nominations de collaborateurs du membre collectif à des postes de gouvernance 3AF est prévue;

• Suivi du partenariat: un rendez-vous périodique est prévu afin de faire le bilan de la convention.

Bien entendu, ce contenu est adapté pour les membres collectifs ayant des activités de formation et pour les partenaires « pôles de compétitivité » et clusters.Le document de partenariat avec SAFRAN a été signé en octobre 2012.

Membre collectif historique de la 3AF, SAFRAN a mis en œuvre avec détermination cet accord tout au long de l’année 2013. Le résultat est extrêmement encourageant puisque le nombre de collaborateurs SAFRAN membres individuels de la 3AF a été multiplié par trois en moins d‘une année.Benoît Guyon, Directeur du Management des Capacités Technologiques au sein de la Direction R&T du groupe SAFRAN, et correspondant de la 3AF pour cet accord, nous a accordé une interview (page 7) pour faire un point sur cet accord un peu plus d’un an après son entrée en vigueur.

L’accord signé avec le groupe THALES (THALES ALENIA SPACE inclus) a été suivi le 29 novembre par une manifes-tation rassemblant, outre des membres de 3AF dont son président Michel Scheller, des collaborateurs de THALES du siège, dont Jean-Bernard Paul, VP Advanced Studies, et des établissements de Cannes, Toulouse, Pessac et Le Haillan. Ces derniers, avec à leur côté des représentants des groupes régionaux de 3AF concernés, étaient en visio-conférence et les premiers présents à l’université THALES de Jouy-en Josas.

A cette occasion, Jean-Bernard PAUL a exprimé les attentes de THALES vis-à-vis de 3AF :• Constituer une plate-forme d’échange et de dialogue pour

la communauté aérospatiale scientifique et technique;• Disposer d’une « vitrine » scientifique et technique du

secteur aéronautique et spatial Français;

Au plan national :• Pour attirer les talents dans la filière;• Pour témoigner vis-à-vis des pouvoirs publics et de la

société civile de l’excellence de notre industrie;Au plan international :• Pour affirmer la compétence de nos ingénieurs;• Pour promouvoir la compétitivité de l’industrie française;• Pour soutenir par cette image nos exportations et nos

coopérations;Par ailleurs, Jean-Bernard Paul a indiqué les apports de THALES à 3AF :• Participation au Haut Conseil Scientifique;• Collège d’experts constitué par 3AF;

• Candidatures proposées par Thales;• A harmoniser avec le collège Thales;• Qualité d’expert 3AF reconnue par Thales;

• Participation au comité de pilotage des commissions techniques;• Participation au comité de pilotage;• Candidats pour les commissions techniques;

Planification annuelle :• Colloques;• Manifestations scientifiques et techniques (comprenant

entre autres des débats organisés au profit des décideurs des membres collectifs);

• Indiquer ceux que THALES est prêt à soutenir financière-ment, et à quel niveau;

Enfin, s’agissant des actions 3AF envers les jeunes et des groupes régionaux de 3AF, Jean-Bernard Paul a soutenu 3AF en indiquant qu’il fallait attirer les (jeunes) talents vers la filière aéronautique et spatiale, et les y conserver ; à cette fin, il a invité 3AF à :• Multiplier les rencontres entre jeunes et professionnels

expérimentés;• Utiliser pour cela notamment les relations bilatérales

nouées avec les sociétés savantes des autres pays;

Il a mentionné que THALES désignera un point de contact dans ses principaux établissements, qui sera le correspon-dant du groupe régional 3AF concerné. De même, pour le développement de l’intérêt des jeunes actifs à engager leur carrière dans la filière aéronautique et spatiale, ou à la poursuivre pour ceux y travaillant déjà, THALES désignera un point de contact pour relayer et soutenir les actions de 3AF. Enfin, toujours dans le même esprit, Eric Trappier, président directeur général de DASSAULT AVIATION, a dit à Michel Scheller, le 8 janvier dernier, combien il comptait sur 3AF pour contribuer à attirer les jeunes ingénieurs vers l’Aéronautique et l’Espace dont la France a grandement besoin.

JACQUES SAUVAGETDélégué Général en Charge du Rayonnement de 3AF

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INTERVIEW DE BENOÎT GUYON, À PROPOS DE LA MISE EN OEUVRE DE LA CONVENTION SAFRAN

Benoît Guyon est Directeur du Management des Capacités Technologiques, Safran Aerospace Defence Security.

En octobre 2012, Safran signait avec 3AF une convention de partenariat dans laquelle, notamment, Safran s’engageait à renforcer la participation de ses colla-borateurs à la vie de la 3AF. Comment cet engagement a-t-il été mis en œuvre ? Quels en sont les résultats aujourd’hui ?Pourquoi avoir élaboré cette convention entre Safran et 3AF?

Safran est membre collectif de 3AF depuis des décennies. L’idée première de cette convention est pour le groupe Safran d’aider 3AF à atteindre une taille critique pour être au niveau de ses homologues étrangères et tenir ainsi le rang de la France. Grace à cette taille critique elle sera plus efficace, par conséquent plus enrichissante pour le groupe. Safran apprécie les commissions techniques comme lieux d’échanges et de mutualisation des connaissances, de productions intellectuelles et d’élaboration de manifesta-tions scientifiques et techniques. Au sein des commissions techniques, nos ingénieurs membres de l’association tissent de véritables réseaux, se « benchmarkent » en permanence , mutualisent leurs connaissances, se confrontent à d’autres experts…

Par ailleurs, cette taille critique est également importante pour que 3AF soit force de proposition et renforce ainsi son influence auprès des décideurs politiques et représente ses membres, au besoin, auprès d’organismes français, européens ou internationaux.

Comment avez-vous procédé pour augmenter le nombre de membres ?

Il était important pour Safran que ses collaborateurs soient des membres actifs et s’impliquent dans la vie de 3AF.

Nous avons tout d’abord monté un groupe de travail animé par Bernard Guillot, actif à la 3AF puisqu’il est président de la commission Information pour l’Entreprise depuis 1996, et dressé un état des lieux. Nous avons constaté que trois sociétés du Groupe participaient réellement à la vie associative de 3AF avec environ 80 collaborateurs.

Compte tenu de la diversité des établissements Safran sur le territoire, il a été décidé de faire appel à des relais locaux dans chaque région ou établissement, pour aider à impulser le déploiement de la convention dans les différents établis-sements. Il est évident que les Présidents de Commissions Techniques ou les membres déjà actifs dans les Commissions étaient des relais naturels pour identifier les collabora-teurs potentiellement intéressées dans toutes les sociétés du Groupe. Nous avons ainsi identifié plus d’une dizaine de

relais sur les différents établissements.Logo humain réalisé par 3000 nouveaux cadres Safran

Au sein du groupe de travail, nous avons construit un support de communication commun (Qu’est-ce que la 3AF ? Pourquoi Safran soutient la 3AF ? Intérêt du collaborateur de Safran d’être membre actif dans la 3AF…) Chacun l’a utilisé dans son périmètre pour informer des ingénieurs potentiellement intéressés.

Ainsi, par le biais des relais locaux, spontanément, plus d’une soixantaine de jeunes d’ingénieurs ayant connu 3AF au cours de leurs études ont souhaité adhérer. D’autres collaborateurs en découvrant les Commissions Techniques ont souhaité adhérer pour participer à leurs travaux.

EN DIRECT DE 3AF

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EN DIRECT DE 3AF

DOSSIER

C’est ainsi qu’en quelques semaines, nous avons atteint 300 membres répartis sur les 19 sociétés du Groupe qui peu à peu vont avoir un rôle actif au sein de l’association. Safran prend en charge les cotisations de ses membres dont elle établit la liste.

Quelles sont les principales motivations des ingénieurs de Safran à adhérer à 3AF ?

La principale motivation pour nos ingénieurs est de « sortir de leur bureau », d’élargir leur réseau. C’est l’occasion pour eux de rencontrer des homologues de leurs domaines ou de domaines similaires et de s’enrichir professionnellement et personnellement.

Pour les jeunes ingénieurs, l’idée est de s’intégrer plus vite dans leur métier, d’apprendre, de se perfectionner.Nous avons chez Safran le souci de faire se mêler les générations : de jeunes « geeks » et des séniors , afin de faire profiter aux uns et aux autres en bonne intelligence les nouvelles technologies de communication des uns et

l’expertise des autres. Le groupe de travail que nous avons mis en place à l’occasion de cette convention a veillé à ce mélange des générations.

Et l’avenir ?

Je suis confiant sur la réussite de ce partenariat et depuis cette première mise en œuvre, de nouveaux ingénieurs me demandent spontanément d’adhérer à 3AF. De toute façon, nous n’allons pas nous arrêter là ; nous pensons aller bien au-delà des 300 membres actuels et augmenter significative-ment ce nombre.

Safran et 3AF s’engagent à assurer le suivi de cette convention de partenariat lors d’une rencontre semestrielle qui comprend notamment les présidents des Commissions Techniques collaborateurs de Safran.

Par SOPHIE VIDEMENTDirectrice de la Communication Institutionnelle et des Relations Presse 3AF

LES SOUFFLERIES DU CENTRE ONERA DE MEUDON DU SUBSONIQUE À L’HYPERSONIQUEVoler plus haut, plus vite, préserver la vie des pilotes d’essais et des passagers, autant de défis relevés par l’homme depuis l’aube du XXème siècle, quand les pionniers de l’aviation s’attachèrent à faire décoller des engins plus lourds que l’air et à les maintenir en sustentation. Contemporaines des premiers exploits aériens, les souffleries aérodynamiques en recréant artificiellement les conditions rencontrées lors d’un vol ont puissamment concouru aux progrès de l’aéro-nautique.Le centre de Chalais-Meudon est riche d’une histoire déjà plus que centenaire en ce qui concerne l’aviation. Elle commence avec les exploits du capitaine Ferber au début du XXème siècle. Elle se poursuit avec la construction de la Grande soufflerie entre 1929 et 1935 sous l’égide du ministère de l’Air. Enfin l’affectation en 1946 du site de Chalais-Meudon à l’Office National d’Etudes et de Recherches Aérospatiales (Onera) consacre le centre à la recherche pour l’aéronautique et plus tard pour le spatial avec l’installation de nouvelles souffleries permettant d’atteindre des vitesses jusqu’à 5 400 km/h.

Programme Mars Sample Return, destiné à la conception d’une capsule en vue d’une mission de retour d’échantillons martiens.

NAISSANCE DES SOUFFLERIES ET MOYEN ALTERNATIF PROPOSÉ PAR FERBER À MEUDON

Inventées à la fin du XIXème siècle, les souffleries ont pris leur essor au début du XXème siècle. Le procédé repose sur

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DOSSIERun principe déjà énoncé par Newton : les forces qui s’exercent sur un corps plongé dans un fluide sont les mêmes, que le corps se déplace à travers le fluide au repos avec une certaine vitesse, ou que le fluide se déplace par rapport au corps immobile avec la même vitesse relative.

La « soufflerie » aérodynamique porte un nom impropre, puisqu’elle est toujours désignée par le moyen de mise en mouvement de l’air des premières installations - au moyen d’un ventilateur qui soufflait de l’air en amont d’un tunnel – alors que très rapidement on a préféré disposer le ventilateur en aval de la veine d’essai, d’où un mode de fonctionnement par aspiration. Le nom initial de « soufflerie » est resté en Français.

Les souffleries ont contribué à réduire le nombre d’accidents, sauvegardant ainsi la vie des pilotes et préservant le matériel. Elles ont aussi permis de passer du flair des constructeurs à l’art de l’ingénieur.Ce moyen d’investigation expérimental, très commode, s’est rapidement imposé au détriment des moyens alternatifs reposant sur le déplacement direct de l’objet dans l’air. Ce fut notamment le cas de la tyrolienne, qui profite des effets de la gravité, pour mettre en mouvement l’avion le long d’un câble tendu entre des pylônes. Ce moyen, expérimenté en 1904 par le capitaine Ferber à Chalais-Meudon, profitait de la déclivité du vallon de Meudon pour lancer horizontalement, après une descente, l’avion suspendu à un chariot glissant le long du câble tendu. Gustave Eiffel avait aussi envisagé un tel dispositif – qu’il avait appelé aérodrome – à partir du premier étage de sa tour, avant d’entreprendre la réalisation d’une soufflerie.

LES SOUFFLERIES DE GUSTAVE EIFFEL AU CHAMPS-DE-MARS ET À AUTEUIL

Vue de coupe de la soufflerie Eiffel

La première évolution des souffleries consiste dans le passage du soufflage à l’aspiration ; ainsi le sillage du ventilateur, placé en aval de la veine d’essai, ne perturbe plus la maquette. Une seconde évolution consiste dans l’introduction du collecteur - pièce convergente disposée en amont de la section d’essai - qui permet d’augmenter la vitesse dans cette section en vertu de la loi de conservation du débit - masse V x  S = Constante en écoulement incompressible.

Gustave Eiffel est à l’origine d’une seconde évolution dans l’art des souffleries. Il intercale une pièce divergente – le diffuseur – entre la veine d’essai et le ventilateur situé en aval. C’est une innovation majeure, puisqu’elle permet de diminuer drastiquement la puissance nécessaire à l’installa-tion. L’efficacité de ce dispositif découle de la loi de Bernoulli, qui stipule que pression et vitesse varient en sens inverse. De fait le diffuseur, en diminuant la vitesse, a pour effet de comprimer l’air.

La différence de pression de part et d’autre du ventilateur est alors très inférieure à celle qui règne lorsque le ventilateur est situé directement en aval de la section d’essai. Eiffel résume ainsi la situation : « Le diffuseur économise donc en somme les deux tiers de la puissance. L’avantage de ce système de récupération est manifeste ».

La soufflerie de type Eiffel, née en 1912 à Auteuil, bénéficie de l’invention du diffuseur. Elle provient du transfert de la première soufflerie de Gustave Eiffel, installée au Champs-de-Mars aux pieds de la Tour Eiffel en 1909. La soufflerie du Champs-de-Mars atteignait une vitesse de 18 m/s dans une section d’essai circulaire de 1,5 m de diamètre. Elle était mue par un ventilateur actionné par un moteur de puissance 50 chevaux. Avec ce même moteur transféré du Champs-de-Mars à Auteuil, la nouvelle soufflerie, dotée d’un diffuseur, atteint 32 m/s dans une section de 2 mètres de diamètre, soit un gain en débit de 200 %.

LA GRANDE SOUFFLERIE S1CH DE CHALAIS-MEUDON

C’est Antonin Lapresle, collaborateur, puis successeur d’Eiffel à la soufflerie d’Auteuil, qui construit de 1929 à 1935, à la demande du Ministère de l’Air, la grande soufflerie de Chalais-Meudon. De type Eiffel bien sûr, elle est munie d’un convergent de rapport de réduction 3,5, passant d’une embouchure de surface 350 m2 à une section de veine d’essai de surface 100 m2, permettant ainsi d’atteindre une vitesse maximale de 180 km/h. Son diffuseur, constitué d’un tube tronconique géant de section elliptique d’axe vertical 10 m et d’axe horizontal 18 m, est réalisé en voile de béton armé mince d’une épaisseur de 7 cm pour 38 mètres de longueur. En aval du diffuseur, la chambre d’aspiration, dotée de six ventilateurs de 1000 ch chacun permet l’extraction de l’air. Devenue obsolète, l’installation est désaffectée en 1977. Classée Monument historique en 2000, elle reste l’emblème du centre de Meudon.

Durant vingt ans de 1950 à 1970, cette installation a été utilisée intensivement. Deux équipes assuraient son fonctionnement de 6 h le matin à 22 heures le soir. Elle a permis de tester au cours de nombreux programmes nationaux l’aérodynamique des avions, mais aussi des automobiles et des bâtiments.

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DOSSIER

La Grande Soufflerie S1Ch de Chalais-Meudon

LA SOUFFLERIE TRANSSONIQUE S3CH

En 1945, la France décide de rapatrier d’Autriche – comme prise de guerre - une soufflerie sonique capable d’atteindre 1 200 km/h dans une veine d’essai de 8 mètres de diamètre [2]. Le site de Modane en Savoie est retenu pour héberger cette gigantesque installation d’une puissance de 88 MW. Cependant il apparut rapidement indispensable au conseil scientifique de l’Onera de faire des vérifications avant de terminer la construction de la soufflerie de Modane-Avrieux. Aussi une soufflerie à échelle réduite S3Ch (1/8) fut-elle réalisée en urgence sur le site de Chalais-Meudon en utilisant des moteurs JUMO de récupération et en commandant les ventilateurs à la société allemande Dingler. Il importait en effet que cette soufflerie pilote fût opérationnelle le plus vite possible afin d’en tirer tous les enseignements applicables à la future soufflerie de Modane. Les fabrications démarrèrent sans qu’aucun contrat n’eût été passé. Ainsi que le résume Marcel Pierre, l’acteur principal du rapatriement en France de la soufflerie allemande : « Il s’agit en quelque sorte d’une prime à la Grande Soufflerie ».

Cette soufflerie S3Ch de Chalais-Meudon fonctionne à partir de juin 1948 fournissant des renseignements très utiles pour la mise au point de la soufflerie de Modane-Avrieux. Elle permet d’atteindre un nombre de Mach de 1 (soit la vitesse du son) et comme le souligne l’ingénieur général de l’armement, Paul Dumanois « avec sa veine de 1m de diamètre, ce n’est pas seulement une maquette, mais une soufflerie de recherche particulièrement précieuse ». Au sein du Département d’Aérodynamique Fondamentale et Expérimentale (DAFE) de l’Onera, la soufflerie S3Ch fournit encore aujourd’hui des résultats de grande qualité pour la recherche et l’industrie aéronautique.Cette installation fut rénovée en 1986 [4]. Il lui fut substitué une veine sensiblement carrée de section 0,76 m sur 0,80 m pour une longueur de 2,2 m, munie de parois rigides pleines ou perforées et surtout de parois déformables auto-adaptables.

Ces dernières permettent la simulation d’une atmosphère illimitée autour d’un profil d’aile, les parois horizontales haute et basse de la veine d’essai reproduisant alors le contour des lignes de courant d’un écoulement uniforme à l’infini. L’air est mis en mouvement au moyen d’un groupe moto-ventilateur à deux étages de 3,5 MW de puissance. Un échangeur de chaleur, situé dans le collecteur, évite que l’air ne s’échauffe en cours d’essais pouvant durer de 2 à 3 heures. Les capacités de cette soufflerie en font un moyen d’essai privilégié pour les études d’avions civils ou militaires, de missiles ainsi que des lanceurs spatiaux dans leur phase ascensionnelle transsonique. Elle est utilisée de manière récurrente pour les essais d’interaction nacelle-voilure et de maintien de la laminarité sur les profils d’aile au profit du développement des avions de la gamme Airbus. Les autres clients réguliers sont Dassault Aviation, MBDA, le groupe Safran, le Cnes, ainsi que la Délégation Générale de l’Armement (DGA) pour des projets amont.

LA SOUFFLERIE SUPERSONIQUE S5CH

La course à la vitesse a rendu nécessaire la réalisation d’ins-tallations encore plus performantes en termes de vitesse et la création de souffleries supersonique (au-delà de la vitesse du son). Les écoulements supersoniques [3] obéissent à des lois fondamentalement différentes de celles qui régissent les écoulements subsoniques. La relation d’Hugoniot, qui permet de discriminer ces deux états, exprime en l’absence de frottement la relation entre la vitesse V du fluide et la section A du tube de courant contenant ce fluide :

où M est le nombre de Mach. Ainsi en subsonique (M<1), A et V varient en sens inverse, la vitesse croissant dans des sections convergentes, alors qu’en régime supersonique (M>1), au contraire, la vitesse croît dans des sections divergentes.

Le Deltaviex paré pour l’essai subsonique dans la soufflerie S1Ch de l’ONERA à Chalais-Meudon.

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DOSSIER

Il s’ensuit aussi que l’état sonique (M = 1) ne peut être obtenu que pour dA = 0, c’est-à-dire dans une section minimale ou col. En conséquence la réalisation d’une soufflerie super-sonique requiert la mise en place d’une tuyère constituée d’un convergent, qui augmente la vitesse de l’écoulement jusqu’à l’obtention du nombre de Mach unitaire au col, suivi d’un divergent à l’intérieur duquel la vitesse de l’écoulement continue à augmenter pour passer en supersonique.

La soufflerie S5Ch a été construite selon ce principe. Elle entre en service en 1952 et dès 1953 on dépasse la vitesse du son (Mach 1) dans cette installation. Elle permet aujourd’hui l’obtention d’écoulements jusqu’à plus de trois fois la vitesse du son (Mach 3,2). Malgré sa veine d’essai modeste de 0,3 m sur 0,3 m, son fonctionnement requiert une puissance de 1,4 MW. En 1959, l’Onera se voit attribuer un contrat de recherches pour concevoir une « Super Caravelle », bientôt appelée Concorde, capable de transporter 100 passagers à Mach 2,2 [1]. Ce seront les heures de gloire de la soufflerie avec la mise au point des entrées d’air. Depuis la soufflerie a servi à de nombreux essais militaires ou civils.

LA SOUFFLERIE HYPERSONIQUE R3CH

L’obtention d’écoulements au-delà de Mach 4 exige un chauffage préalable de l’air avant sa détente dans la tuyère sous peine de le liquéfier. Les écoulements à partir de Mach 4 ou Mach 5 sont souvent qualifiés d’écoulements hyperso-

niques. Ils concernent principalement le domaine des fusées ou des véhicules spatiaux. Outre un réchauffage de l’air en amont de la tuyère, les souffleries hypersoniques nécessitent une puissance accrue pour amorcer le col de la tuyère.

Il faut en effet établir une différence de pression entre l’amont et l’aval suffisante pour créer les conditions favorables à cet amorçage, soit une forte compression en amont ou une intense dépression en aval, ou la combinaison des deux effets. De fait ce type de soufflerie, compte tenu des puissances mises en jeu, est le plus souvent « à rafale », c’est-à-dire qu’au contraire des souffleries continues, capables de souffler des heures durant, elles opèrent pendant une rafale, dont la brève durée - quelques secondes à quelques minutes

Veine d’essais de la soufflerie S3Ch de Meudon en 2005. ©Onera ONERA-4812

En 1985, l’Europe veut s’équiper d’un avion spatial, Hermès, capable de ramener sur terre astronautes et matériel. Meudon est chargé d’étudier la manoeuvrabilité et la protection thermique du planeur. Visualisation à Mach 10.

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DOSSIER

- est déterminée par la capacité des réservoirs amont d’air comprimé ou celle des réservoirs aval de vide.

La soufflerie R3Ch du centre de Meudon, construite en 1965, fonctionne suivant le principe suivant avec d’amont en aval :• des réservoirs d’air comprimé à 250 bar• un réchauffeur à effet Joule montant jusqu’à 1100 K• une tuyère Mach 10 permettant l’obtention de vitesse

jusqu’à 5 400 km/h• un caisson d’essai• un diffuseur• une sphère à vide de capacité 500 m3 pour aspirer l’air

éjecté du diffuseurCette soufflerie permet des rafales longues d’une durée de 12 secondes. Elle a été mise à contribution pour les programmes Ariane et également lors du projet de navette spatiale européenne Hermès à la fin des années 80. Plus récemment elle a été utilisée pour des essais dans le cadre du programme Mars Sample Return, destiné à la conception d’une capsule en vue d’une mission de retour d’échantillons martiens.

LES SOUFFLERIES DE RECHERCHE FONDAMEN-TALES

En outre, le DAFE dispose d’un ensemble de souffleries de taille plus modeste mais très précieuses pour l’étude des phénomènes fondamentaux :

• la soufflerie S19, atteignant une vitesse de 180 km/h dans une section de 0,3 x 0,15 m2, où sont menés des essais de contrôle des écoulements décollés dans des diffuseurs, sur des marches ou à l’intérieur de cavités ;

• la soufflerie S2L, atteignant une vitesse de 250 km/h dans une veine d’essai de section 1 m2 et de longueur 1,76 m, actuellement utilisée pour des essais d’aérodynamique externe et de contrôle des décollements ;

• les souffleries S8Ch, constituées de deux circuits indépen-dants, permettant de produire des écoulements transso-

niques et supersoniques de Mach 0,5 à Mach 2 dans des sections d’essais de 0,12 x 0,10 m2. Dans ces souffleries, furent entrepris dès 1956 des essais sur des profils trans-soniques et des arrière-corps de missiles et de lanceurs. Dans les années 1970 elles permirent des développements métrologiques (mesure de vitesse au moyen de la véloci-métrie laser à frange), et elles continuent de fournir des résultats de premier ordre dans le domaine du contrôle des écoulements décollés avec choc et des jets et sillage de culots en écoulements compressibles.

PERSPECTIVES : VERS LA SOUFFLERIE NUMÉRIQUE ?

Dans les années 1980, l’avènement des ordinateurs de grosse capacité de calcul et le développement conjoint des méthodes numériques laissaient augurer la disparition à moyen terme des souffleries, certains experts se laissant aller à des prédictions de dates (15 ans ou 20 ans) qui se sont révélées aussi fausses que celles établies dans les années 1970 en ce qui concerne la disparition du pétrole à l’horizon 2000. C’est pourquoi il est sage de ne pas indiquer d’échéance pour l’abandon des essais aérodynamiques au sol, mais il est bien certain que tous les efforts réalisés dans le domaine numérique s’inscrivent dans la perspective de renoncer un jour à la soufflerie. Toutefois les nombreux projets de constructions de souffleries dans les pays émergents, et notamment en Inde, montrent qu’en dépit de l’important développement du numérique, le recours à l’expérience est dans le domaine de l’aérodynamique toujours d’actualité.

[1 ] Bazin M., Carpentier J., Chanetz B., Coët M.-C., Dang-Tran K., Délery J., Landré N. et Marec J.-P.De l’aérostation à l’aérospatiale, Le centre de Recherche de l’Onera à Meudon - Editeur, Onera, 2007[2] Chanetz B., Coët M.-C. et Tensi J.La Grande soufflerie de Modane - PEGASE, la revue du Musée de l’Air, n° 137, juin 2010[3] Chanetz B., Délery J. Et Veuillot J.-P.Aérodynamique, pp 271-277 + encart XVI-XVII - Encyclopaedia Universalis, 2008[ 4 ] Coët M.-C. et Chanetz B.Napoléon, un empereur dans le vent - AeroFrance, la revue de l’Aéroclub de France, n°120, 2ème trimestre 2012[5] Coët M.-C., Chanetz B. et Peter M..Gustave Eiffel, pionnier de l’aérodynamique - Centraliens, la revue de l’association des anciens élèves de l’Ecole Centrale, n°617, avril 2012

BRUNO CHANETZMembre Sénior 3AF, Maître de Recherche à l’Onera, Professeur Associé à l’Université Paris-Ouest

Veine d’essai de la soufflerie S8Ch avec bosse sur paroi inférieure pour étude des phénomènes d’interaction choc/couche limite.

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TECHNOLOGIESATELIER REACHLe règlement 1907/2006 REACH souvent désigné tout simplement par REACH[1], est entré en vigueur au sein de l’Union Européenne le premier juin 2007 . Il résulte de la volonté du Parlement Européen de mieux réglementer l’utilisation des substances chimiques au sein de l’Union Européenne. Son but est défini à l’article 1 : «assurer un niveau élevé de protection de la santé humaine et de l’environnement, y compris la promotion de méthodes alternatives pour l’éva-luation des dangers liés aux substances, ainsi que la libre circulation des substances dans le marché intérieur tout en améliorant la compétitivité et l’innovation».

A la différence des «Directives» qui sont prises par la Commission Européenne et qui doivent être ensuite transposées dans les différents droits nationaux, les règlements (dont REACH) s’appliquent tels quels directement dans tous les états membres sans transposition nationale.

REACH contient 141 articles répartis en 15 titres; le titre X (articles 75 à 111) instaure la mise en place d’une agence dédiée à la gestion des informations associées à ces substances: l’Agence Européenne des Produits Chimiques[2], basée à Helsinki, qui agit sous l’autorité de la Commission Européenne.

Le champ d’application de REACH porte sur trois types de produits :• Les «substances»: ce sont des éléments chimiques (d’une

manière générale des molécules) qui sont identifiées par leur numéro CAS[3] ou EINECS[4].

• Les «mélanges» qui sont fabriqués à partir de plusieurs substances.

• Les «articles» : ce sont des objets auxquels «sont donnés, au cours du processus de fabrication, une forme, une surface ou un dessin particulier plus déterminant pour leur fonction que leur composition chimique».

Une des principales innovations apportées par REACH consiste à renverser la charge de la preuve de l’innocuité des substances chimiques: c’est désormais aux industriels fabriquant ces substances (ou les important sur le marché

européen) de démontrer leur innocuité pour l’homme et l’environnement par les caractérisations des dangers.Pour cela REACH a instauré trois processus :• L’Enregistrement : il s’agit de décrire les propriétés

physicochimiques des substances et leurs caractères toxicologiques (relatifs à la santé humaine) et écotoxico-logiques (relatifs au milieu naturel). Selon la dangerosité des substances, le dossier d’enregistrement est plus moins détaillé. Pour les substances classées comme dangereuses (selon les critères du règlement CLP[5]) il est nécessaire de procéder à une évaluation de la sécurité chimique liée à l’usage de la substance; d’une manière générale cette évaluation doit comparer les seuils de danger aux niveaux d’exposition des consommateurs et/ou des travailleurs et proposer des mesures de réduction de risques garantissant la sécurité d’utilisation. Ces informations sont décrites dans le Rapport de Sécurité Chimique (qui fait partie du dossier d’enregistrement) et également résumées dans la Fiche de Données de Sécurité dans un nouveau format dit «étendu»[6]. Ce processus est à la charge des sociétés qui procèdent à la «mise sur le marché européen» de la substance; il s’agit donc des fabricants européens et des importateurs. Le calendrier des enregistrements a identifié trois échéances: le premier décembre 2008 pour les substances classées comme CMR[7] ou celles fabriquées à plus de 1000 tonnes par an, le premier juin 2013 pour les substances fabriquées à plus de 100 tonnes par an et le premier juin 2018 pour toutes les substances fabriquées à plus de une tonne par an.

• L’Evaluation : c’est un processus à la charge de l’ECHA; il consiste à évaluer la complétude et la pertinence des dossiers d’enregistrement déposés par les fabricants ou les importateurs. L’ECHA peut demander aux industriels de mettre à niveau des dossiers d’enregistrement qui ne lui sembleraient pas correctement établis.

• L’Autorisation : dans ce processus il s’agit d’octroyer (ou de refuser) l’autorisation d’utiliser des substances qui, à terme, doivent disparaître du marché européen (substances identifiées à l’Annexe XIV du règlement ; le dispositif de sélection de ces substances est décrit ci-après). Sur la base de «dossiers de demande d’autorisation» déposés par des industriels, l’ECHA émet un avis qui est transmis à la Commission Européenne, celle-ci statue sur ces demandes d’autorisation. La première demande d’autorisation a été déposée en 2013 par Rolls-Royce pour utiliser le DEHP[8] dans des opérations industrielles pour moteurs aéronau-tiques.

L’Annexe XIV : c’est la liste des substances qui, à terme, doivent disparaître progressivement du marché européen. Les substances font l’objet d’un premier classement sur la base des données toxicologiques et écotoxicologiques ; les

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substances considérées comme «très préoccupantes» (dites SVHC[9]) sont celles qui présentent un caractère CMR ou qui sont «persistantes, bioaccumulables ou toxiques[10]» ou «très persistantes ou très bioaccumulables»[11], ou encore celles présentant un même caractère de dangerosité, telles que par exemple les perturbateurs endocriniens. Ces substances sont identifiées dans la «liste candidate à l’introduction dans l’Annexe XIV» (communément appelée Liste Candidate).

Par la suite une deuxième sélection est établie en conjuguant trois critères: le caractère toxicologique, le volume de production annuel en Europe et le caractère dispersif de la substance évaluée. Les substances ainsi sélectionnées sont proposées à la Commission Européenne pour décider de leur introduction dans une liste dite liste de l’Annexe XIV. Ce sont les substances de cette Annexe XIV qui doivent faire l’objet de demandes d’autorisation. Pour chacune des substances inscrites à l’Annexe XIV il est défini une «latest application date» (date limite de dépose d’une demande d’autorisation) et une «sunset date» (date à partir de laquelle l’utilisation de la substance sera interdite sauf obtention d’une autorisation). Les mises à jour de la Liste Candidate et de l’Annexe XIV sont faites annuellement; ce qui oblige les industriels à une veille réglementaire continue. Parmi les obligations réglemen-taires, on retiendra que les fabricants d’articles contenant plus de 0.1% en masse d’une substance SVHC doivent déclarer la présence de cette substance à leurs clients directs.

LES IMPACTS DANS LE SECTEUR AÉRONAUTIQUE ET SPATIAL

Jusqu’en 2012 REACH a principalement impacté le secteur de la chimie: à ce jour plus de 12000 substances ont été enregistrées et plus de 47000 dossiers d’enregistrement ont été déposés. Désormais les secteurs manufacturiers, et en particulier le secteur aéronautique et spatial, sont directement impactés, notamment par l’inscription de certains phtalates puis des chromes hexavalents à l’Annexe XIV. Pour l’industrie aéronautique et spatiale, c’est toute l’activité des traitements de surface des alliages d’aluminium qui est mise sous une très forte contrainte pour que les substitutions soient faites avant les «sunset dates» [12]; à défaut de substitution à ces échéances, les industriels concernés devront préparer des demandes d’autorisation.

Pour les chromes hexavalents ces dossiers sont particu-lièrement complexes à monter car deux scénarios sont à décrire : i°) le scénario pour lequel l’usage de la substance est autorisé et pour lequel il doit être démontré que le bénéfice socio-économique est plus important que les conséquences sanitaires et ii°) le scénario de rupture décrivant les impacts socio-économiques si l’usage de la substance n’est plus autorisé. On comprend aisément que les enjeux du premier scénario peuvent être très lourds de conséquences. Parmi les

autres conséquences directes de REACH, on notera également que les utilisateurs de substances doivent s’assurer que leurs opérations industrielles sont faites en conformité avec les scénarios d’exposition décrits dans les e-FDS; toute autre utilisation non prévue par le fabricant de la substance doit faire l’objet d’une évaluation de la sécurité chimique, cette évaluation devant faire l’objet d’un dossier à déposer à l’ECHA.

CONCLUSION

En conclusion il est intéressant de revenir au premier considérant de REACH qui stipule en introduction que «le présent règlement devrait assurer un niveau élevé de protection de la santé humaine et de l’environnement ainsi que la libre circulation des substances, telles quelles ou contenues dans des mélanges ou des articles, tout en améliorant la compétitivité et l’innovation. Le présent règlement devrait aussi promouvoir le développement de méthodes alternatives pour l’évaluation des dangers liés aux substances».

Le citoyen ne peut donc que se louer de la décision du Parlement Européen ayant instauré REACH puisqu’à terme les substances les plus dangereuses vont progressivement disparaître du marché européen.L’industrie devra, quant à elle, s’adapter :

• Gestion des phases de substitution de produits dangereux par de nouveaux produits, ce qui peut s’avérer complexe, et onéreux;

• Amélioration de la «traçabilité» des substances dangereuses par une communication renforcée au sein de la supply-chain;

• Développement de nouveaux produits ou process, ce qui peut constituer une opportunité à saisir notamment pour les PME innovantes.

Dans tous les cas REACH doit aussi être considéré comme une opportunité pour l’industrie européenne.3AF a organisé le 18 septembre 2013 un atelier intitulé : « Le règlement Européen REACH, contraintes et opportuni-tés d’innovation pour l’industrie aéronautique et spatiale ». Cet atelier a été apprécié par les participants et 3AF envisage d’organiser des évènements du même type dans des Groupes Régionaux. Un dossier en cours de préparation rendra compte des présentations et des débats de cet atelier et sera disponible sur le site 3af.fr.

[1] pour Registration, Evaluation, Authorisation and restriction of CHemicals[2] dénommée aussi ECHA (European Chemicals Agency)[3] numéro d’enregistrement unique auprès de la banque de données du Chemical Abstracts Service (CAS), une division de l’American Chemical Society (ACS).

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[4] numéro d’enregistrement répertorié dans l’Inventaire Européen des Substances chimiques Commerciales Existantes (EINECS).[5] CLP pour Classification Labelling and Packaging : règlement européen N° 1272/2008[6] e-FDS en français – e-SDS en anglais – ce format prévoit que les scénarios d’utilisation ayant fait l’objet de l’évaluation de la sécurité chimique soient annexés à la e-FDS[7] Cancérigènes, Mutagènes ou toxiques pour la Reproduction (selon le règlement CLP)

[8] DEHP : diethyl hexyl phtalate[9] acronyme de REACH pour «Substance of Very High Concern»[10] substances dites PBT[11] substances dites vPvB[12] sunset date pour les DEHP: 21/02/2015, pour le trioxyde de chrome et les premiers chromates: 21/09/2017

JEAN-MARC BESSONPrésident de la Commission Energétique

AÉRODYNAMIQUE ET AUTOMOBILELa nécessité de s’intéresser à l’aérody-namique des automobiles est abordée à partir d’un rappel de ses effets sur l’énergie dissipée et les émissions de gaz à effet de serre. Des solutions nouvelles destinées à réduire ces émissions et par suite à augmenter l’autonomie des véhicules sont recherchées et obtenues. Ces solutions s’appuient sur une meilleure compréhension des processus d’apparition et d’entretien des structures décollées qui constituent le sillage.

Soufflerie S4, mise à disposition en 1976, Institut Aérotechnique de Saint-Cyr-l’Ecole (IAT), Conservatoire National des Arts et Métiers.

Un véhicule automobile est un corps de faible allongement qui se déplace à proximité du sol dans un écoulement qui devient très rapidement turbulent. En régime de croisière, la couche limite décolle localement et les décollements influencent l’ensemble du véhicule. Ces décollements apparaissent dès l’avant du véhicule et sont principalement localisés au niveau des entrées d’air, du

soubassement, des passages de roues, du pied de pare-brise, des montants latéraux de pare-brise, de la lunette arrière et du culot.

L’apparition, le développement, le transport et l’entretien de ces structures décollées contribuent à accroître la traînée aérodynamique et nécessitent une augmentation de l’énergie à fournir par le moteur pour maintenir une vitesse constante. L’objectif consiste alors à réduire le nombre des décollements, l’amplitude et la fréquence des battements, à diminuer le développement transversal des structures décollées, des structures tourbillonnaires longitudinales et enfin à reporter les décollements le plus en aval possible vers le culot. Concernant le partage des efforts de pression et de frottement, la traînée aérodynamique d’une automobile est principalement générée par les efforts de pression ; les efforts de pression et de frottement représentent ainsi respectivement 85 et 15% de l’effort global.

Les essais aérodynamiques pour l’auto-mobile se sont très longtemps réduits aux seules estimations de la traînée aérodynamique obtenues à partir de la méthode dite de décélération. À partir de 1973, date de la première crise pétrolière, le secteur automobile prend véritablement conscience de la nécessité de travailler l’aérodyna-mique pour réduire les consomma-tions. L’aérodynamique pour l’auto-mobile n’est cependant véritablement prise en compte qu’à partir de 1976,

date à laquelle est mise à disposition la première soufflerie aérodynamique pour automobiles à échelle 1.

Sa construction s’effectue sous l’impulsion de Maurice Ménard, directeur de l’Institut Aérotechnique de Saint-Cyr-l’école (IAT) et professeur au Conservatoire National des Arts et Métiers (CNAM). Cette soufflerie, désignée S4, dispose d’une veine d’essais de 10 m de longueur dont la largeur et la hauteur sont respective-ment égales à 5 et 3 m (voir figure 1). Elle permet d’effectuer des essais et des mesures du torseur aérodynamique pour des vitesses de vent qui varient de 0 à 140 km/h. Dès 1976, les constructeurs automobiles français, Citroën, Peugeot, Renault et Talbot utilisent cette soufflerie pour effectuer de premiers constats, développer leur expertise et, entre 1976 et 1985, la valeur moyenne du coefficient de traînée aérodynamique (Cx) des véhicules diminue de 0,45 à 0,30. Durant cette période et avec l’aide financière de l’Agence Française pour la Maîtrise de l’Énergie (AFME aujourd’hui devenue ADEME[1]), des démonstrateurs aérodynamiques sont développés pour, d’une part, soutenir l’activité de recherche et, d’autre part, proposer des véhicules à faible consom-mation. Au sein de Renault, ces travaux permettent de proposer dès 1980 le démonstrateur EVE (Éléments pour Voiture Économe[2]) élaboré sur la base du véhicule R18 et dont le coefficient de traînée est égal à 0,239. Plus tard en

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TECHNOLOGIES1987, est proposé le prototype VESTA II (Véhicule Économe de Systèmes & Technologies Avancés) qui représente l’aboutissement des recherches effectuées par Renault durant cette période pour développer la connais-sance et mettre au point un démonstra-teur à très faible coefficient de traînée aérodynamique (Cx=0,186).

Champ des vitesses moyennées relevées par PIV dans le plan de symétrie longi-tudinal de la maquette. Lunette arrière inclinée à 35°, sans contrôle.

Champ des vitesses moyennées relevées par PIV dans le plan de symétrie longitu-dinal. Lunette arrière inclinée à 35° avec contrôle, réduction de 20% du coefficient de traînée aérodynamique Cx.

À partir de 1985, les coefficients de traînée aérodynamique des véhicules automobiles proposés à la vente n’évoluent plus et restent voisins de 0,30 avec des valeurs moyennes légèrement supérieures pour certains constructeurs. Cette tendance résulte de la volonté d’affirmer un Design fort et/ou une identité de marque souvent incompatibles avec le respect des préco-nisations aérodynamiques. Cela peut également résulter de la volonté de réduire les prix de revient des véhicules,

ce qui peut induire la suppression ou la non-utilisation volontaire de carénages ou d’éléments d’étanchéité de face avant et/ou de soubassement. Compte tenu de la réduction des réserves énergétiques et de l’impact climatique des émissions de gaz à effet de serre issues de la combustion des énergies fossiles, les aérodynami-ciens recherchent alors des solutions innovantes pour réduire la traînée à partir de solutions passive(s) et/ou active(s) de contrôle des décollements.

Prototype VESTA II (Véhicule Économe de Systèmes & Technologies Avancées), 1987. Cx=0.186.

Les enjeux sont importants. Pour la France et en supposant le parc automobile constitué de 30 millions de véhicules, 15 millions de véhicules essence et 15 millions de véhicules Diesel consommant respectivement 5,6 et 4,8 l de carburant sur 100 kilomètres à la vitesse stabilisée de 130 km.h-1 et parcourant respectivement 5000 et 7500 kilomètres sur autoroute, les émissions annuelles de CO2 (gaz à effet de serre) dépassent les 24500 kilotonnes [1]. Réduire de 20% la traînée aérodyna-mique permettrait alors de diminuer de près de 4800 kilotonnes ces émissions pour le seul parc automobile français. En Chine et en 2030, le parc automobile pourrait compter près de 270 millions de véhicules, soit trente fois plus qu’en 2002. L’Europe de l’Est et l’Afrique suivent le même processus dans des proportions plus ou moins équivalentes et à plus ou moins long terme. Dans ce contexte, les émissions de gaz à effet de serre auront augmenté de près de 57% en 2030 avec des répercussions fortes sur l’environnement et le climat, [2]. Ces valeurs confirment l’importance

d’une meilleure maîtrise du contrôle des écoulements aérodynamiques pour les déplacements automobiles interur-bains [3].

Des travaux sont alors engagés pour améliorer la compréhension des phénomènes physiques qui apparaissent autour des corps de faible allongement et identifier des solutions de contrôle en rupture qui permettent de conserver les niveaux actuels de confort, d’habitabi-lité et de sécurité.

L’amélioration de la compréhension des phénomènes physiques nécessite de travailler sur des géométries simplifiées capables de reproduire la complexité des écoulements et des décollements rencontrés en aérody-namique automobile. Il apparaît ainsi particulièrement important de mieux comprendre les mécanismes physiques instationnaires à l’origine des décollements, les mécanismes liés aux processus de battement, à la dynamique tourbillonnaire de sillage et aux interactions entre structures tourbillonnaires. Les premiers travaux d’analyse et de compréhension des phénomènes physiques pour l’aérody-namique automobile s’effectuent en soufflerie dès le début des années 80. À partir de 1995, la capacité des codes de calculs à reproduire les phénomènes physiques est analysée à partir de géométries simplifiées à complexité croissante. Les résultats révèlent l’intérêt de la simulation numérique. Le calcul ne permet cependant pas à lui seul d’expliquer la complexité des processus de formation des décolle-ments, de transport des structures décollées et de génération de la traînée aérodynamique. Ce travail s’effectue en couplant les travaux analytiques aux résultats issus du calcul et des expéri-mentations effectuées en soufflerie ou en canal hydraulique [1].

Les résultats sont utilisés pour imaginer des solutions en rupture destinées à rendre aérodynamiques des géométries à coefficient de traînée

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TECHNOLOGIES

aérodynamique médiocre (supérieur à 0,32), offrir plus de créativité au Design (recherche de nouveaux clients par le Design), à réduire les contraintes de conception (aérodynamique & archi-tecture) et/ou à augmenter l’autonomie des véhicules à moteurs thermique, hybride ou électrique. L’objectif n’est ainsi pas de faire un véhicule aérody-namique (objectif déjà atteint en 1987 avec VESTA II, Cx=0,186, SCx=0,304 m2) à partir de règles métiers mais de rendre aérodynamiques les véhicules actuels en respectant le Design et en conservant les critères existants d’habi-tabilité, de confort et de sécurité.

Des solutions peuvent s’obtenir à partir d’orifices de soufflage et/ou d’aspiration continus et/ou alternés (jets pulsés ou synthétiques) distribués sur la surface du véhicule en des endroits appropriés [3-4]. À ce niveau, l’objectif consiste à modifier la structure globale de l’écou-lement, et en particulier la distribution de pression, à partir d’un minimum d’énergie introduite dans ce même écoulement. Concernant le contrôle par jets alternés, des réductions de traînée proches de 8 [3] et 20% [4] sont respecti-vement relevées à partir de jets synthé-tiques et de jets pulsés distribués sur des géométries simplifiées à lunette arrière inclinées à 25 et 35 degrés (voir figures

3 et 4). Aucun de ces systèmes n’est cependant aujourd’hui implanté sur véhicule compte tenu des puissances, des volumes et des masses encore nécessaires à leur fonctionnement. Pour toutes les solutions de contrôle actif, l’efficacité énergétique définie à partir du rapport entre le gain de puissance aérodynamique et la puissance à mettre en œuvre progresse avec le développe-ment de la recherche et la mise au point d’actionneurs de plus en plus adaptés et efficients.

L’industrie des transports et en particulier automobile s’est ainsi fortement impliquée depuis plus de 15 ans au sein des différentes instances de recherche traitant d’aérodynamique. Une nouvelle soufflerie désignée S2A pour Soufflerie Aérodynamique et Aéroacoustique et un Centre National de Recherche Technologique (CNRT) ont été créés en 2002 à l’initiative des constructeurs automobiles (PSA, Renault) et du CNAM. Le secteur automobile est de plus fortement impliqué dans le Groupement de Recherche (GdR) sur le Contrôle des Décollements[4] auquel participent les acteurs industriels (Airbus, Dassault, ONERA…) et universitaires de la communauté scientifique.

RÉFÉRENCES[1] Gilliéron P. et Kourta A.; Aérodyna-mique automobile pour l’environnement, le Design et la sécurité, 2ème édition, Préfaces de Patrick Chassaing et Carlos Tavarès, ISBN 978.2.36493.091.9, 2013.[2] World Energy Outlook 2007; Executive Summary, China and India Insights, International Energy Agency IEA, ISBN : 978-92-64-02730-5.[3] Kourta A. and Leclerc C.; Characte-rization of synthetic jet actuation with application to Ahmed body wake, Sensors and Actuators A: Physical, A 192, pp 13-26, 2013.[4] Gilliéron P. and Kourta A.; Aerodynamic drag control by pulsed jets on simplified car geometry, Exp. in Fluids, volume 54, pp 14-57, January 2013.GLOSSAIREPIV, Particle Image Velocimetry pour Vélocimétrie par Images de Particules, technique de mesure d’un champ de vitesses basée sur la génération d’un plan laser et l’utilisation d’une ou deux caméra(s) vidéo.

PATRICK GILLIÉRONChercheur indépendant, RDMFA Commissions «aérodynamique» et «aviation légère et machines dérivées»

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CULTURELOUIS DAMBLANC, PÈRE DES FUSÉES À ÉTAGES Louis Damblanc est l’un des rares lauréats français du prix internatio-nal d’astronautique créé par Robert Esnault-Pelterie et André Hirsch en 1928. Malgré cela, ses travaux dans le domaine des fusées restent mal connus, même si on sait vaguement qu’ils portaient sur les fusées à plusieurs étages.

Damblanc présentant une de ses fusées à manchons taraudés

Damblanc a rédigé deux mémoires sur «Les fusées autopropulsives à explosifs» qui ont été édités par l’Office national des recherches scientifiques et indus-trielles et des inventions, un précurseur du CNRS. La première étude, portant le sous-titre «Essais au point fixe - Application des résultats expérimentaux à l’étude du mouvement», est parue en avril 1935 et lui a valu le prix d’astronautique deux mois plus tard. La seconde, consacrée aux «Recherches sur les vitesses de propagation de la chaleur développée au cours de la combustion de la poudre», est passée plus inaperçue en janvier 1938. Quant à la troisième partie, qui aurait dû regrouper les résultats de ses essais en vol, elle n’a jamais été publiée car la seconde guerre mondiale est venue interrompre ces travaux.

Lorsqu’il commence à travailler sur les fusées en 1929, Damblanc est déjà un personnage reconnu dans le monde de

l’aéronautique. Né à Lectoure (Gers) en 1889, et diplômé de l’Institut Electro-technique de Grenoble (IEG) en 1910, il avait été mobilisé à la Direction des inventions pendant la première guerre mondiale puis avait fondé un Bureau d’études aéronautiques après l’armistice.

Avec Louis Lacoin, Damblanc met au point un hélicoptère de conception originale, avec deux rotors montés sur des ailes, désigné «Alérion». Malgré un échec du prototype en septembre 1920, Damblanc est invité par la Royal Aeronautical Society de Londres pour faire une présentation intitulée «The problem of the helicopter» le 18 novembre 1920. Les moyens de son bureau d’études ne lui permettant pas d’assurer la construction d’un engin complet, il réoriente ses travaux vers des recherches de base. Il commence par étudier la poussée produite par des surfaces tournantes en rotation lorsqu’elles tombent en chute libre. Il envisage des hélicoptères-parachutes composés d’une nacelle équipée de surfaces tournantes libres servant à freiner la vitesse de descente. Les premières expériences ont lieu à Villa-coublay dès décembre 1920 à l’aide d’une automobile laboratoire. En 1923, sur l’aérodrome de Saint Cyr, il commence une série d’essais d’hélicoptères parachutes largués depuis un ballon captif vers 300 m d’altitude. Ensuite, à partir de 1930, il utilise pour ses essais le chariot aérodynamique à propulsion électrique de l’Institut Aérotechnique (IAT) de Saint-Cyr.

Avec Louis Mutti, il conçoit un moteur rotatif à compression variable capable de conserver un bon rendement même aux altitudes élevées. Une version de 165 ch de ce moteur sera expérimentée sur le SPAD 32 en vue de battre le record d’altitude de l’époque. Testé pour la première fois en mai 1920, ce moteur présentait des défauts d’équilibrage qui ne seront réglés que plus tard. Ces travaux seront consacrés par une note intitulée « Sur un dispositif applicable

aux moteurs d’avion pour réduire les pertes de puissance en altitude » que Paul Painlevé présente à l’Académie des Sciences le 14 avril 1925.

Chargement d’une fusée dans le banc d’essai à l’IAT de Saint Cyr

L’activité de Damblanc dans le domaine de l’aéronautique ne s’est pas limitée aux réalisations techniques, c’était également un homme de presse, auteur de nombreux articles, mais aussi directeur de plusieurs journaux : fondateur de l’hebdoma-daire «L’aviation française» en 1926 et repreneur du mensuel «La vie aérienne et sportive» en 1929, il a fait fusionner ces deux magazines sous le titre de «La vie aérienne». Il a été également animateur d’une émission intitulée «Le quart d’heure de l’aviation française» sur Radio-Vitus en 1931.

A partir de 1929 et jusqu’au début de la seconde guerre mondiale, Louis Damblanc se consacre donc à l’étude des fusées. Il faut noter qu’il avait déjà abordé le sujet des «torpilles aériennes» dans un article paru dans la revue Flight en 1921. Damblanc envisagera toutes sortes d’applications pour les fusées, parmi lesquelles on peut citer les fusées postales, fusées à signaux, lance-amarre pour navires en difficulté, mais aussi fusées pour sondages atmos-phériques ou stratosphériques. Dans une première étape, Damblanc choisit de procéder à des études fondamen-tales sur le fonctionnement des fusées à poudre. Il développe pour cela un banc d’essais statiques qui sera installé sur le terrain de l’IAT de Saint Cyr.

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Ce banc d’essais permet de déterminer la poussée d’une fusée par mesure de l’écrasement d’un ressort préalable-ment taré. Les évolutions de la poussée en fonction du temps sont mesurées au moyen d’un bras transmettant les déplacements du ressort à une aiguille qui inscrit ces variations sur un tambour entraîné par une horloge. De plus, un repère mobile prend, lors de l’écra-sement maximum, une position qu’il conserve par la suite. Les déplacements du ressort sont également enregistrés à l’aide d’une caméra. Pour repérer les temps sur le film, un pendule battant les secondes et visible à grande distance est associé au montage. Grâce au film, il est aussi possible d’avoir des informations sur les phénomènes accompagnant la combustion, notamment l’allure des flammes et l’intensité sonore du jet incandescent. Ce dispositif qui permettait d’opérer en plein air, avec des charges importantes, en se tenant à distances des fusées, fera l’objet du brevet N°802.422 déposé en 1936.

Les expériences commencent en mars 1932, et sont menées avec quatre types de fusées chargées en poudre noire, provenant de trois fournisseurs :

1) Fusée lance-amarre capable de traîner un filin de 35 kg jusqu’à 400 mètres de distance pour établir une liaison entre un navire naufragé et la côte. Il s’agit d’une fusée à deux étages de combustion qui ne sont pas conçus pour se séparer en vol (voir encart en fin de texte). Ces fusées sont stabilisées à l’aide d’une baguette latérale de 3 m de long.

2 et 3) Fusées paragrêle Ruggieri dont la cartouche est en carton épais, également stabilisées à l’aide d’une baguette latérale.

4) Fusée paragrêle de l’Ecole Centrale de Pyrotechnie (ECP) de Bourges dont la cartouche est fait d’un tube en carton renforcé à l’intérieur d’une enveloppe en acier de 1,5 mm d’épaisseur. Le chargement est constitué par 4 blocs

de poudre comprimée (1 plein et 3 percés d’un canal central) introduits dans la cartouche après paraffinage. La baguette stabilisatrice est vissée dans l’axe du cartouche, l’éjection des gaz se faisant par trois évents à l’arrière.

Fusée Damblanc au décollage

Les résultats des expériences de Damblanc sont publiés en avril 1935 dans la revue «Recherches et Inventions» éditée par l’Office National des recherches scientifiques et indus-trielles et des inventions.

A partir des résultats de ces essais au banc, Damblanc établit des lois semi-empiriques sur le comportement des fusées, en particulier leurs perfor-mances en altitude zénithale. En conclusion de son travail, il souligne trois aspects à étudier plus avant :

• Amélioration des poudres en termes « d’effort de réaction » et de « temps total de combustion » .

• Utilisation d’enveloppes métalliques « très résistantes sous un faible poids » .

• Multiplication des étages de combustion, comme sur la fusée n°1 «  de façon à prolonger très sensi-blement la durée de la combustion totale ».

Le 19 juin 1935, le Comité d’astronau-tique de la Société astronomique de France lui décerne le Prix d’astronau-

tique, le premier à récompenser un travail expérimental. Il s’agit en effet, selon Theodore Von Karman du Jet Propulsion Laboratory, de la première étude expérimentale sur la balistique intérieure des moteurs à poudre.

Dans la suite de ses travaux, Damblanc ne développera pas le premier point de sa conclusion. La fabrication des poudres était un monopole d’état et les travaux sur leur adaptation à la propulsion étaient classifiés. Le laboratoire de balistique intérieure du Service Technique des Fabrications d’Armement étudiait secrètement depuis 1933 la mise au point de roquettes de 80 mm pour avion, chargées en poudre double base. Un tir très réussi a été effectué à Bourges le 6 juin 1940. kDamblanc se cantonnera donc à l’utilisation de la poudre noire, fournie d’ailleurs par l’ECP de Bourges. Par contre, il développera les aspects 2 et 3 de sa conclusion, en utilisant des enveloppes en alliage léger et en favorisant les fusées multi-étages.

Il faut remarquer que, dans son mémoire d’avril 1935, il est question de fusées à plusieurs charges de poudre et non d’étages séparables (voir encart en fin de texte). Cependant, l’idée d’une cartouche de projectile qui « aille en se raccourcissant au fur et à mesure de la combustion de la charge propulsive » est contenue dans le brevet N°803.021 déposé le 7 mars 1936 en France mais dès le 9 mars 1935 en Belgique.

La séparation des étages y est assurée par l’emploi d’alliages fusibles à base d’étain, de plomb et de bismuth pour réaliser des jonctions qui fondent lorsque le flux de chaleur les atteint. Damblanc est ainsi amené entrepre

JEAN-JACQUES SERRACommission Histoire

CULTURE

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MISSION ROSETTALA MISSION ROSETTALa sonde spatiale Rosetta a pour mission de recueillir des données sur la composition du noyau d’une comète et de son comportement lorsqu’elle s’approche du soleil. L’objectif recherché est de comprendre le rôle joué par les comètes dans la formation du système solaire.

La Commission Stratégie et affaires internationales de la 3AF a pris l’initiative d’auditer lors de sa séance du 19 février 2014 un des principaux investigateurs scientifiques de la mission, Yves Langevin, directeur du laboratoire de recherche spatiale sélectionné par le CNES, l’ Institut d’Astrophysique Spatiale.

Selon Y. Langevin, l’élément fondateur du programme de l’Agence spatiale européenne (ESA) remonte à 1981, date de la sélection de la sonde Giotto destinée à l’étude de la comète de Halley. Ce fut la première mission européenne à quitter l’environnement terrestre. L’ESA a ensuite élaboré en 1984 un programme pluriannuel pour les sciences spatiales comprenant les programmes scientifiques Soho, XMM, First Herschel et une mission de retour sur Terre d’un échantillon primitif dite CNSR (pour Comet Nucleus Sample Return).

S’agissant du programme alors intitulé Rosetta, envisagé à l’origine en coopération avec les Etats-Unis, l’ESA a décidé qu’il serait purement européen (septembre 1993) du fait de la

défaillance de la NASA quant à sa contribution au programme CNSR/Rosetta…

La mission avait été prévue initialement pour un lancement en 2003 avec une fusée Ariane 5C pour une durée de voyage de 10 ans pour atteindre la comète Wirtanen. La difficulté rencontrée a été due au fait du tir avorté d’Ariane 157. L’ESA rechercha alors une solution de rechange pour le lancement. Un tir avec une fusée Proton via Vénus fut envisagé mais finalement abandonné- la raison avancée était que la sonde ne pouvait s’approcher de 0,7AU du soleil pour des raisons thermiques (1AU équivaut à environ 50 millions de km). La mission de ce fait prit un an de retard et le lancement eut lieu le 2 mars 2004 avec une AR5 G pour un voyage de 10,5 ans. La comète Wirtanen fut abandonnée comme objectif et au profit de la comète Tchourioumov-Guérassimenko.

Pour atteindre la comète, la sonde fait appel à quatre reprises à l’assistance gravitationnelle de la Terre et de Mars pour être à même d’obtenir une trajectoire parallèle à celle de la comète et avec une vitesse identique. A souligner que lors de son voyage vers la comète, la sonde a croisé deux astéroïdes, l’un en 2008, Steins, et l’autre le 10 juillet 2010, Lutetia. A la fin de cette trajectoire il était prévu une période d’hibernation de Rosetta de 31 mois afin de ne pas consommer la moindre énergie, et ce, à une distance supérieure à 4,5 AU !

Vue d’artiste de la sonde Rosetta et de son module d’atterrissage Philae sur la comète 67P/Tchourioumov-Guérassimenko.

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MISSION ROSETTA

Vue d’ensemble des instruments embarqués sur la sonde Rosetta.

Vue d’ensemble des instruments à bord du module Philae de la mission Rosetta.

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Ces aléas ont conduit à un retard de 3,5 ans de la mission, la durée de la trajectoire est passée de 8 ans pour la comète Wirtanen à 10,5 ans pour Tchourioumov-Guérassimenko.

Techniquement parlant, Rosetta est une sonde de trois tonnes. Elle orbitera en 2014 autour de la comète avec une période de plusieurs mois. Elle dispose d’un atterrisseur « Philaé » de 100 kg destiné à se poser sur le noyau de la comète dont les dimensions sont environ 4 km par 1 km. Du fait du renoncement par la NASA, il n’a plus été possible d’utiliser pour l’alimentation en énergie les RTG (Radio Thermal Generator), équipement non disponible en Europe. L’ESA a eu recours à deux panneaux solaires (64 m²) orientables à plus ou moins 180 degrés. La sonde elle-même est équipée de 24 moteurs et elle est stabilisée selon les 3 axes, le contrôle de son attitude étant réalisé par deux viseurs d’étoiles permettant de corriger sa trajectoire. Compte tenu de la distance plus ou moins importante de la sonde par rapport au soleil au cours de son orbite, il s’avère nécessaire soit de réchauffer l’intérieur de la sonde pour maintenir l’instrumentation à une température satisfai-sante, soit de le refroidir à l ‘approche du soleil, à l’aide de radiateurs. La sonde dispose de 11 instruments scientifiques, pesant 165 kg, dont un spectro-imageur chargé de déterminer la constitution du noyau qui doit aussi permettre de poser l’atterrisseur dans les meilleures conditions possibles.

L’atterrisseur est équipé de dix instruments pesant 21 kg et dont la consommation totale est de 6 W. Il comprend un système de forage qui permet de percer sur 30 cm le sol et d’ancrer l’atterrisseur au sol.

L’ensemble des données recueillies sera transmis au sol par le système de télécommunications de la sonde. Elle est munie d’une antenne parabolique grand gain de 2,2 mètres de diamètre qui renvoie les informations vers la Terre (station de New Norcia, Australie).

Les prochaines étapes de la mission en 2014, dont la Lettre de 3AF rendra compte en temps voulu par des contributions du CNES, sont les suivantes :• Avril-mai : manœuvres de rendez-vous, à une vitesse de

l’ordre de 1300 m/s,• Juin-juillet : phase d’approche,• Juillet-octobre : imagerie complète du noyau,• Début novembre : atterrissage de Philaé, et analyse

d’échantillons prélevés en surface.

Une mission passionnante à suivre…

JEAN JAMETCommission Stratégie et Affaires Internationales

MISSION ROSETTA

Équipe de contrôle de la Mission Rosetta

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24 MARS49TH INTERNATIONAL SYMPOSIUM OF APPLIED AERODYNAMICSEcole Centrale de LilleDu lundi 24 mars au mercredi 26 mars 2014Plus d’informations sur www.3af-aerodynamics2014.com

17 JUINMISSILE DEFENCE 2014Mainz, AllemagneDu mardi 17 juin au vendredi 20 juin 2014Plus d’informations sur www.missile-defence.com

19 MAISPACE PROPULSION 2014

Cologne, AllemagneDu lundi 19 mai au jeudi 22 mai 2014

Plus d’informations sur www.propulsion2014.com

AGENDA

Erratum : Nous vous prions de nous excuser pour l’interversion des lieux des deux colloques 3AF de mars mentionnés dans l’agenda de la Lettre de Janvier, Greener Aviation s’est tenu à Bruxelles et Aero 2014 à Lille.

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