les glucides et les lipides du clitellum et de l'albumen du cocon

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HAL Id: hal-00899772 https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-00899772 Submitted on 1 Jan 1995 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entific research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés. Les glucides et les lipides du clitellum et de l’albumen du cocon chez Eisenia fetida Sav (annélide oligochète) L Rouabah-Sadaoui, R Marcel To cite this version: L Rouabah-Sadaoui, R Marcel. Les glucides et les lipides du clitellum et de l’albumen du cocon chez Eisenia fetida Sav (annélide oligochète). Reproduction Nutrition Development, EDP Sciences, 1995, 35 (5), pp.537-548. <hal-00899772>

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Page 1: Les glucides et les lipides du clitellum et de l'albumen du cocon

HAL Id: hal-00899772https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-00899772

Submitted on 1 Jan 1995

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L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, estdestinée au dépôt et à la diffusion de documentsscientifiques de niveau recherche, publiés ou non,émanant des établissements d’enseignement et derecherche français ou étrangers, des laboratoirespublics ou privés.

Les glucides et les lipides du clitellum et de l’albumendu cocon chez Eisenia fetida Sav (annélide oligochète)

L Rouabah-Sadaoui, R Marcel

To cite this version:L Rouabah-Sadaoui, R Marcel. Les glucides et les lipides du clitellum et de l’albumen du cocon chezEisenia fetida Sav (annélide oligochète). Reproduction Nutrition Development, EDP Sciences, 1995,35 (5), pp.537-548. <hal-00899772>

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Article original

Les glucides et les lipides du clitellumet de l’albumen du cocon chez Eisenia fetida Sav

(annélide oligochète)

L Rouabah-Sadaoui R Marcel

Laboratoire d’écophysiologie d’invertébrés du sol, université des sciences et technologies de Lille,59655 Villeneuve-dAscq cedex, France

(Reçu le 25 janvier 1995 ; accepté le 7 juillet 1995)

Résumé &horbar; L’analyse des constituants glucidiques et lipidiques de l’épithélium clitellaire et de l’albu-men des cocons est abordée à l’aide de techniques biochimiques chez Eisenia fetida. La teneur en glu-cides augmente considérablement (environ x 5) au cours de la différenciation clitellaire. Les oses et lesosides représentent 50% du poids sec des cocons fraîchement pondus. On note un enrichissement encertains hexoses lors de la puberté. Le glucose prédomine chez les vers immatures, le mannosedans les clitellums mûrs. L’approche de l’éclosion s’accompagne d’une baisse générale de la teneurde tous les glucides. La teneur en lipides totaux du clitellum augmente au cours de la maturation : celledes lipides neutres, les plus abondants, varie peu ; en revanche, celle des phospholipides, beaucoupplus rares, est en notable augmentation. Le taux des acides gras du clitellum présente un maximumà la puberté ; le cocon accumule une grande quantité d’acides gras. Les acides palmitique, stéarique,oléique et vaccénique sont prépondérants.

glucide 1 lipide 1 Eisenia 1 ver de terre

Summary &horbar; Glucids and lipids of clitellum and cocoon’s albumen in Eisenia fetida Sav (Annel-ida Oligochaeta). Biochemical methods were used to analyze the glucidic and lipidic components ofthe clitellar epithelium and the cocoon’s albumen in Eisenia fetida. In the clitellum, the sugar concen-tration increased dramatically (about 5-fold) during differentiation. The assays showed increases in sev-eral monosaccharides during puberty. In addition, glucose was prominent in immature clitella, whereasmannose was the main sugar in the mature ones. About 50% of the dry weight of recently depositedcocoons was carbohydrates. The sugar concentration decreased in the albumen as hatching approached.The amount of total lipids in the clitellum increased during maturation. The levels of neutral lipids,however varied very little. Phospholipids began at low levels at the beginning of differentiation, and

* Nouvelle adresse : Institut des sciences biologiques, université de Constantine, Constantine,Aig6rie** Correspondance et tires à part

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increased dramatically thereafter. The amount of fatty acids in the clitellar epithelium reached a max-imum during the submature stage. Large amounts of fatty acids were stored in the cocoon. Palmitic,stearic, oleic and vaccenic acids were preponderant in both the clitellum and cocoon.

glucid / lipid / Eisenia / earthworm

INTRODUCTION

Le cocon des lombriciens, sécrété par leclitellum, renferme des oeufs oligolécithes(Dawydoff, 1959) dont le cytoplasme necontient qu’une petite quantité de produitslipidiques utilisés pendant la segmentationde l’embryon (Lechenault, 1968). Les élé-ments nutritifs de l’albumen du cocon sont

consommés à partir du stade gastrula(Devriès, 1973). Trois catégories cellulairessont impliquées dans la formation ducocon : les «cellules à mucus», les «cel-lules à gros granules», et les «cellules àfins granules» qui sont responsables de lasécrétion de l’albumen (Grove et Cowley,1928).

La nature des différents éléments cellu-laires du clitellum a été étudiée par desméthodes histochimiques (Defretin etDemailly, 1953). L’analyse chimique a étéabordée par des méthodes biochimiquesappliquées à l’animal entier (Durchon etLafon, 1951 ; De Jorge et al, 1965 ; DeJorge et Sawaya, 1967) ou au clitellum uni-quement (Rouabah-Sadaoui, 1984).

Dans une note précédente (Rouabah-Sadaoui et Marcel, 1995), nous avons misen évidence, dans les clitellums et dans l’al-bumen des cocons, une glycolipoprotéine,assimilable à une vitellogénine, ainsi que 2glycoprotéines. À côté des protéines, lesglucides et les lipides jouent donc un rôleimportant dans la constitution des réservesdestinées au développement de l’embryon.Nous nous sommes proposés d’étudier lacomposition glucidique et lipidique des cli-tellums et de l’albumen des cocons, pourfaire suite à l’analyse des protéines.

MATÉRIEL ET MÉTHODES

Les Eisenia, élevés au laboratoire, ont été récol-tés à 3 stades de maturation sexuelle :

- immatures, ne présentant aucune différenciationclitellaire apparente ;- submatures, dont la région où se développerale clitellum montre une coloration plus claire carac-téristique ;- mûrs, présentant un clitellum turgescent.

Les clitellums, réséqués sous anesthésie auchloréthone à 0,2%, ont été broyés dans l’eaudistillée avec un homogénéiseur Dounce. Aprèscentrifugation à 2 900 g, pendant 10 min, le sur-nageant a été lyophilisé.

Les clitellums et les cocons lyophilisés ont étépesés au préalable, pour en déterminer les poidssecs, sur une balance fermée, en atmosphèreanhydre, en présence de potasse.

Les cocons pondus par des vers sexuellementactifs ont été récoltés tous les jours, puis mis enincubation à 24°C. Ces cocons ont été ouverts àdifférents moments : 1, 5, 10, 15 et 20 j après laponte et leur contenu (albumen et embryons)séparé de l’enveloppe, puis lyophilisé.

Les oses neutres totaux sont dosés sur les

lyophilisats (surnageant de l’homogénat des cli-tellums et contenu des cocons) par la méthode àl’orcinol sulfurique de Tillmans et Philippi modifiéepar Rimigton, d’après Montreuil et Spik (1963).Les oses et hexosamines sont identifiés et dosés

par chromatographie en phase gazeuse des tri-fluoroacétylés selon la technique de Zanetta etai (1972). La fraction à étudier, additionnée demésoinositol (témoin interne), est lyophilisée puisméthanolysée (méthanol + HCI à 0,5 N : 1 mL

par mg de produit) à 80°C pendant 24 h. Les pro-téines sont éliminées par centrifugation tandisque les lipides sont dissous dans l’heptane. Latrifluoroacétylation (dichlorométhane 100 pUanhy-dride trifluoroacétique 100 wL) est réalisée à150°C au bain de sable. La chromatographie estexécutée sur colonne de verre (0,3 x 300 cm)

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OV 210 ; gaz vecteur : azote à 15 mUmin ; tem-pérature programmée de 100°C à 200°C à rai-son de 2°C/min ; température de l’injecteur et dudétecteur 220°C.

Les lipides totaux sont extraits des différentséchantillons par le mélange chloroforme : métha-nol (2 : 1 VN), suivant la méthode de Folch et ai(1957). Les substances non lipidiques sont éli-minées par addition d’une solution aqueuse à 9%de Na CI, à raison de 1 volume pour 5 volumesd’extrait lipidique. Après agitation, le déphasages’opère dans une ampoule à décanter, pendantune nuit, à +4°C. Les lipides totaux, purifiés, res-tent en solution dans la phase chloroformiquesupérieure. Dans cette dernière, les phospholi-pides sont séparés des lipides neutres par pré-cipitation acétonique et centrifugation. Le surna-geant acétonique est séché sous courant d’azote,puis lyophilisé. Les lipides neutres sont alorssaponifiés par la soude 4N, à 100°C, pendant4 h. Les acides gras sont dissous dans du chlo-

! roforme et lyophilisés avant d’être estérifiés (80°C,4 h) par du méthanol chlorhydrique. Aprèsséchage sous courant d’azote, le résidu est reprispar de l’heptane et les méthylesters d’acides grassont analysés par chromatographie en phasegazeuse (Girdel série 300) sur colonne capillairede silicone OV 101 (85 m x 0,35 mm ID) ; pres-sion du gaz vecteur (hélium) : 0,4 bar ; tempé-rature programmée de 100°C à 200°C à raison de2°C par min ; température de l’injecteur et dudétecteur : 240°C. L’identification des acides grasest confirmée par couplage chromatographie enphase gazeuse - spectrométrie de masse (GLC -MS) à l’aide d’un appareil Riber-Mag R 10-10 ;potentiel d’ionisation 70 eV ; gamme de masses :70-250 en 400 ms.

Le traitement statistique des résultats est effec-tué à l’aide du test t de Student.

RÉSULTATS

Les glucides

Dosages des oses totauxpar colorimétrie à l’orcinol

Les résultats des dosages, exprimés enpourcentage du poids sec, sont consignésdans le tableau 1. La teneur en glucides,

faible dans le clitellum immature (4,5%) aug-mente considérablement au cours de la dif-férenciation clitellaire (21 % dans le clitellumturgescent). Une décroissance des taux deglucides totaux dans les cocons (albumen +embryons) est observée au cours de l’em-bryogenèse (tableau 11) : de 25-30%, pen-dant les 10 premiers jours, à 15%, dans lescocons proches de l’éclosion. Toutes cesdifférences sont statistiquement significa-tives (Ps 0,01). ).

Identification et dosage des oses neutrespar chromatographie en phase gazeuse

Les résultats précédents, acquis sur les glu-cides totaux, nous ont incités à rechercherleur composition dans le clitellum et dansles cocons. Nous avons pu ainsi identifier

(fig 1 ) et doser les oses neutres suivants :galactose (Gal), glucose (Glc), mannose(Man), fucose (Fuc), xylose (Xyl). Les hexo-samines, glucosamine (GIcNac) et galacto-samine (GaINac), ont été identifiés et dosés.Les acides glucuronique et sialique n’ontpas été décelés.

Les résultats des dosages sont exprimés,dans le tableau III, sous 2 formes : en pour-centage par rapport au poids sec et en pour-centage par rapport aux glucides totaux. Cetableau montre que les teneurs de tous les

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glucides augmentent lors de la maturationdu clitellum, en particulier le galactose, lemannose et les hexosamines. En revanche,le fucose et le xylose demeurent à desconcentrations relativement faibles. L’ex-

pression du pourcentage de ces glucidespar rapport aux glucides totaux permet demettre en évidence la prédominance du glu-cose chez les vers immatures et celle du

mannose dans les clitellums mûrs. Lesrésultats du tableau III exprimant les teneursdes glucides totaux d’un lot de cocons demoins de 10 j (dernière colonne) confirmentdonc les résultats des dosages à l’orcinol(tableau 1). Les cocons contiennent aumoins 2 fois plus de glucides que le clitellummûr. Clitellum et albumen possèdent lesmêmes oses. Le taux du mannose demeure

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très abondant (28,1%) ainsi que celui dugalactose (20,4%) tandis que celui du glu-cose devient minoritaire (5,8%). Les diffé-rences observées sont constamment signi-ficatives pour P < 0,01.

L’évolution des oses neutres durant l’in-

cubation des cocons (tableau IV) montreque le glucose, presque inexistant dans lescocons frais pondus, devient relativementabondant à l’approche de l’éclosion

(12,6%). Le mannose prédomine pendanttoute l’embryogenèse (30% environ). Legalactose est, lui aussi, bien représenté àtous les stades du développement (21 à25%). Dans l’ensemble, l’approche de l’éclo-sion s’accompagne d’une baisse généralede la teneur en glucides, à l’exception du10e jour où apparaît un enrichissementmomentané. Juste avant l’éclosion, les glu-cides ne représentent plus que 14% environdu poids sec, ce qui confirme les résultatsobtenus par la méthode de dosage à l’or-cinol.

Les lipides

Pour des raisons matérielles, nous n’avons

pas pu étudier l’évolution des teneurs en

lipides au cours du développement. Aussi,nous ne donnerons ici que des résultats

préliminaires partiels. Les teneurs des dif-férentes catégories de lipides et des acidesgras seront exprimées en pourcentage parrapport au poids sec. Les pourcentagesrelatifs seront ensuite calculés.

Composition en lipides des clitellums

Les lipides totaux, les lipides neutres et lesphospholipides ont été dosés dans les cli-tellums aux 3 stades de maturation définis

précédemment. Les résultats, reportés dansle tableau V, montrent que les quantités delipides sont, dans l’ensemble, relativementfaibles. Néanmoins, on peut noter une

légère augmentation de ces lipides, au cours

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de la maturation, les taux passant de 8 à10% du poids sec (différences significativespour p <_ 0,01 entre ces valeurs extrêmes).Cet accroissement n’intéresse, semble-t-il,que les phospholipides, tandis que les quan-tités de lipides neutres restent à peu prèsstationnaires, entre les 2 tiers et 4 cin-quièmes des lipides totaux. Malgré un tri-

plement de leur teneur, les phospholipidesdemeurent donc en très faible quantité.Quant aux glycolipides et résidus divers, ilsprésentent une diminution importante aumoment de la maturation par rapport austade immature. Les valeurs demeurent tou-tefois faibles, de même que celles des phos-pholipides.

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Analyse des acides grasdans les clitellums et dans les cocons

Après saponification des lipides neutres, lesacides gras ont été dosés dans les clitel-lums immatures, submatures et mûrs ainsi

que dans l’albumen d’un lot de cocons âgésde 5 à 10 j. Sur le tableau VI sont reportéesles teneurs totales en acides gras expriméesen pourcentage de la matière sèche et enpourcentage des lipides neutres. La légèreaugmentation des quantités totales d’acidesgras au cours de la phase submature parrapport aux stades immatures ou mûrs n’estpas statistiquement significative, à cause dela valeur élevée des écarts types. Enrevanche, la différence est significative entreles taux d’acides gras des cocons et ceuxdes clitellums (10,6 vs 3,5 à 5,4%). Cecipourrait traduire une mise en réserve relati-vement importante de substances lipidiquesdans l’albumen des cocons.

La composition en acides gras des lipidesneutres des clitellums et de l’albumen de

cocons est reportée dans le tableau VII,d’une part, en précisant les stades d’évolu-tion des clitellums, et d’autre part, en sépa-rant les acides gras saturés des insaturés.

Les résultats sont exprimés en pourcentagede matière sèche et en pourcentage desacides gras totaux (chiffres en italique). Les

acides gras à chaîne très courte (moins de14 C), volatils, n’ont pu être décelés par laméthode utilisée. Un exemple de chroma-togramme relatif aux clitellums mûrs estdonné sur la figure 2.

À tous les stades de maturation des cli-tellums et dans l’albumen des cocons, on

note l’existence simultanée d’acides grassaturés et d’acides gras insaturés. Le rap-port ils (insaturés par rapport aux saturés)présente des valeurs dont la variation estintéressante : 0,64 chez les immatures vsenviron 1 pour les autres stades et chez les

cocons, ce qui semble indiquer une modifi-cation importante de la constitution deslipides au moment de la maturation du cli-tellum, à la puberté.

Sur 16 acides gras détectés, une dou-zaine sont en quantité notable, les 4 plusimportants étant l’acide palmitique (16:0) etl’acide stéarique (18:0) parmi les saturés,l’acide oléique (18: 1) et l’acide vaccénique(18:1) parmi les insaturés. On retrouve engénéral les mêmes acides gras à tous lesstades du clitellum et dans l’albumen des

cocons, mais dans des proportions variantd’une manière parfois importante. Le rap-port 18:1 oléique / 18:1 vaccénique pré-sente une variation importante au momentde la maturation : sa valeur (2,2) est divi-sée par 2. Ceci confirme la modification de

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la composition des lipides au moment oùse développe le clitellum. En ce quiconcerne l’albumen des cocons, on peutremarquer, en plus d’une quantité d’acidesgras très nettement supérieure (10,6% dupoids sec), une répartition des acides grasassez différente : l’acide palmitoléique (16:1)y est plus abondant, tandis que les acides

palmitique (16:0) et stéarique (18:0) y sontnettement moins bien représentés. Enfin,on peut noter, dans tous les échantillons,la présence de l’acide margarique (17:0) enquantité non négligeable (de 5 à 10%). Ainsi,Eisenia est l’un des rares animaux à pos-séder des acides gras à nombre impair decarbones.

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DISCUSSION ET CONCLUSION

L’analyse qualitative des glucides montreque l’on retrouve toujours les mêmes mono-saccharides quels que soient les stades dela clitellogenèse ou du développement desembryons. Ces mêmes glucides, ainsi quela galactosamine et la glucosamine, ontd’ailleurs été détectés dans les ovocytes del’annélide polychète Perinereis cultrifera(Porchet, 1974). Le rhamnose, présent dansles ovocytes de cette espèce, est, enrevanche, absent de l’albumen du cocond’Eisenia. L’acide sialique n’a été détecténi chez E fetida ni dans les ovocytes de Pcultrifera. Sur le plan quantitatif, l’ovocytede Nereis est beaucoup moins riche en glu-cides (:5 23%) que le cocon d’Eisenia quien compte environ 2 fois plus. L’évolutionde la teneur glucidique dans le cocon à l’ap-proche de l’éclosion est en relation avec ledéveloppement embryonnaire. L’augmen-tation relative observée au 10e jour corres-pond au moment du maximum d’absorptionde l’albumen dans l’archentéron, au coursduquel des actions enzymatiques permet-tent sa liquéfaction. Mais les oses étant lesréserves énergétiques de l’embryon, il est

normal d’en observer une diminution de lateneur pendant toute l’ontogenèse. Tousles glucides sont concemés par cette baisse,à l’exception du glucose dont le taux aug-mente légèrement.

Depuis les travaux de Grove et Cowley(1928), on admet que l’albumen est sécrétépar les «cellules à fines granulations» duclitellum. Nos analyses ont montré la forteteneur en glucides de l’albumen (40 à 50%du poids sec). On doit donc pouvoir lesdéceler au niveau du site de synthèse. Or,malgré une étude histochimique poussée,Defretin et Demailly (1953) n’ont pas pumettre en évidence de polysaccharides dansce type de cellules. Toutefois Herlant-Mee-wis (1958-1959) observe que les «cellulesde la couche profonde!· se colorent forte-ment à l’APS chez Eisenia. Morris (1983)décèle dans les cellules à fins granules d’Efetida des composés glycoprotéiques.Richards (1977) obtient chez le dulcicoleLumbricillus rivalis une réaction faiblement

positive à l’APS, au niveau des «cellulesglobulaires», lieu d’élaboration du contenudu cocon chez cette espèce. Malécha etVinckier (1983) détectent une réaction for-tement positive à l’APS dans la sécrétionconstituant les réserves du cocon (cellulesde type 4) de la sangsue Piscicola. Nosdosages biochimiques ont été effectués sur rla totalité du clitellum, sans pouvoir sépa-rer les différents types cellulaires. Ils mon-trent un accroissement global des glucidesdans cet organe au cours de la puberté,mais ils ne permettent pas de préciser lessites de synthèse. Il est vraisemblable,d’ailleurs, que toutes les cellules de cet épi-thélium effectuent des synthèses de glu-

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cides libres ou liés dans des glycoconju-gués.

Bien qu’impliqué dans la synthèse dessubstances de réserve, le clitellum d’Eiseniacontient assez peu de lipides (8 à 10% dupoids sec). Les valeurs obtenues sont tou-tefois comparables à celles trouvées parHansen et Czochanska (1975) (de 8,5 à11% suivant les saisons) chez Lumbricusrubellus et Allolobophora caliginosa desprairies de Nouvelle-Zélande. En revanche,ces valeurs sont nettement supérieures àcelles citées par Whitten et Goodnight(1966) pour Lumbricus terrestris et Eiseniarosea (respectivement 6,05 et 4,5). Unchiffre encore plus bas est obtenu parMcLaughlin (1971) chez E fetida mûr :2,25% du poids sec. À l’inverse, Durchonet Lafon (1951) avaient obtenu 17,3% delipides chez L terrestris. Il paraît donc y avoird’assez notables écarts, dans une mêmeespèce ou dans les espèces voisines, sui-vant les auteurs. Mais ces recherches de

lipides ont porté sur la totalité du corps desanimaux, incluant aussi bien les tissus etorganes que le matériel ingéré et les micro-organismes du tube digestif. En revanche,nos analyses se sont portées spécifique-ment sur le clitellum, isolé du reste du corps,à l’exception d’une relativement mincecouche musculaire. Par ailleurs, les tech-niques de dosage, quelque peu différentes,sont peut-être en cause, mais aussi, sansdoute, l’état métabolique ou l’état génitaldes vers, non précisé le plus souvent parles différents auteurs. Chez les polychèteserrantes, Durchon et Lafon (1951) obser-vent des quantités de lipides variant, sui-vant les espèces, de 9 à 15,5% et, chez lessédentaires, de 6,7 à 14,6%. De son côté,Karnovsky (1969) rapporte des valeurs dumême ordre pour quelques espèces. Plusrécemment, Fontaine (1982) dose chez Pcultrifera les lipides totaux du liquide ccelo-mique, des ccelomocytes et des ovocytesen fonction de l’âge des vers. Il trouve queles lipides constituent 12,5 à 26,5% du poids

sec. Les polychètes semblent donc légère-ment plus riches en lipides que les lombri-ciens. Les oligochètes limicoles Tubifex tubi-fex et Limnodrilus hoffmeisferi (Whitten etGoodnight, 1966) auraient des teneurs enlipides de l’ordre de 17 à 25%, donc nette-ment supérieures à celle des terricoles. Leslipides neutres représentent, chez E fetida,de 66 à 81 % des lipides totaux, tandis queles phospholipides ne correspondent qu’à10 à 27%. Ces résultats s’accordent avecceux de McLaughlin (1971 ) qui obtient 11 %de phospholipides sur la même espèce, ouceux de Cerbulis et Taylor (1969) qui indi-quent 25% de phospholipides chez le lom-bric. En revanche, ils ne concordent pasavec ceux de Hansen et Czochanska (1975)qui mesurent 50 à 63% de phospholipideschez les lombriciens L rubellus et A caligi-nosa, taux qui semble considérable. Dansnos résultats, malgré la faiblesse desteneurs observées, il faut souligner l’aug-mentation importante des phospholipideslors de la maturation du clitellum. Une partde ces phospholipides entre, peut-être, dansla constitution de lipoprotéines de réserve,comme chez les insectes (Chino et al, 1969)ou chez les crustacés (Lee et Puppione,1978).

Les acides gras présentent une largerépartition, comme chez toutes les anné-lides étudiées. Sur le plan qualitatif, lesacides gras présents dans les clitellums etdans les cocons appartiennent à différentesvoies métaboliques. Ce sont les mêmesacides qui ont été mis en évidence dansl’ovocyte de P cultrifera (Fontaine, 1982).Bien que les lipides des animaux ne contien-nent pratiquement que des acides gras ànombre pair d’atomes de carbone, ceuxd’Eisenia possèdent de l’acide margarique(17:0) en quantité non négligeable (entre 5et 10%) et des traces d’acide tricosanoïque(23:0). Ces acides gras se retrouvent aussidans les analyses de Hansen et Czo-chanska (1975). De leur côté, Stefanovic etDjurdjic (1977), remarquant une abondance

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d’acides gras à nombre impair de carbones,estiment que les vers de terre dévient desautres animaux par rapport au spectre habi-tuel des acides gras. L’acide margarique,ainsi que les autres acides à nombre impairde carbones, sont absents chez P cultrifera(Fontaine, 1982). Les acides gras les plusabondants sont, dans l’ordre, l’acide palmi-tique et l’acide stéarique, pour les saturés,l’acide oléique et l’acide vaccénique, pourles insaturés. On retrouve ces acides, avecdes teneurs légèrement différentes, dansles études de Hansen et Czochanska

(1975). Les variations du rapport des acidesgras insaturés aux acides gras saturés sontintéressantes (tableau VII). Ce rapport aug-mente d’une manière caractéristique lorsde la maturation, passant de 0,64 à 1,10,augmentation corrélative d’un allongementdes chaînes carbonées. Le calcul de cemême rapport ils effectué à partir deschiffres fournis par Hansen et Czochanska

montre, en revanche, des variations sai-sonnières peu interprétables : de 0,67 à1,59 au printemps à 2 ans d’intervalle, maxi-mum en hiver (2,0), valeur intermédiaire àl’automne. Toutefois, les valeurs obtenuessont du même ordre de grandeur que lesnôtres.

Les glucides sont donc le composantmajoritaire de l’albumen des cocons (tableau

VIII), ce qui explique la richesse énergé-tique des réserves de l’embryon. Ces glu-cides sont, au moins en partie, associésaux protéines B et C et à la lipoprotéine A(Rouabah-Sadaoui et Marcel, 1995). Il seranécessaire maintenant d’étudier en détailles variations des taux des glucides et lipidespendant le développement embryonnairepour les comparer à celles des protéines,avant d’envisager le contrôle neurohormo-nal de la production des glycoprotéines et enparticulier de la synthèse de la «vitellogé-nine» mise en évidence précédemment(Rouabah-Sadaoui et Marcel, 1995).

RÉFÉRENCES

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Page 13: Les glucides et les lipides du clitellum et de l'albumen du cocon

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