la politique russe en extrême-orient : quelle alternative à la chine ?

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  • 8/9/2019 La politique russe en Extrme-Orient : quelle alternative la Chine ?

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    La politique russe enExtrme-Orient :

    quelle alternative la Chine ?

    Stephen Blank

    Aot 2010

    Centre Russie/NEI

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    L'Ifri est, en France, le principal centre indpendant de recherche,

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    S. Blank /LExtrme-Orient russe etlAsie

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    Russie.Nei.Visions

    Russie.Nei.Visions est une collection numrique consacre laRussie et aux nouveaux tats indpendants (Bilorussie, Ukraine,Moldavie, Armnie, Gorgie, Azerbadjan, Kazakhstan, Ouzbkistan,Turkmnistan, Tadjikistan et Kirghizstan). Rdigs par des expertsreconnus, ces articles policy oriented abordent aussi bien lesquestions stratgiques et politiques quconomiques.

    Cette collection respecte les normes de qualit de l'Ifri(valuation par des pairs et suivi ditorial).

    Si vous souhaitez tre inform des parutions par courrierlectronique, envoyez-nous un email ladresse suivante :[email protected]

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    R. Craig Nation, Redmarrage des relations russo-amricaines :premiers rsultats, Russie.Nei.Visions, n 52, juin 2010 ;

    Julien Nocetti, Le Kremlin La Mecque : le plerinage saoudiende la diplomatie russe, Russie.Nei.Visions, n 52, juin 2010 ;

    Richard Sakwa, La Russie et la Turquie : repenser l'Europe pourdpasser le statut d"'outsiders" , Russie.Nei.Visions, n 51,mai 2010.

    Retrouvez la bibliothque de la collection Russie.Nei.Visionsen lignevia Pearltrees.

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    Auteur

    Stephen Blank enseigne la scurit nationale russe lInstitutdtudes stratgiques du Collge de guerre de larme amricaine(US Army War College), en Pennsylvanie, depuis 1989. Il a obtenuun M. A. et un Ph. D en histoire russe lUniversit de Chicago. Il apubli plus de 600 monographies et articles consacrs la politiquetrangre et de dfense de lURSS et de la Russie, des tats -Unis,des pays asiatiques et de lEurope. Il est intervenu plusieurs

    reprises devant le Congrs sur la Russie, la Chine et lAsie centraleet livre rgulirement ses commentaires sur les questions de politiquetrangre aux mdias amricains et trangers. Stephen Blank apubli ou dirig une quinzaine douvrages portant sur la politiquetrangre, nergtique et militaire de la Russie, ainsi que sur lesquestions de scurit internationale en Eurasie. Parmi sespublications : Russia and Arms Control : Are there Opportunities forthe Obama Administration ?, Carlisle Barracks (PA), Strategic StudiesInstitute, US Army War College, 2009 ; Russo-Chinese EnergyRelations : Politics in Command, Londres, Global Markets Briefing,2006 ; et Natural Allies ? Regional Security in Asia and Prospects forIndo-American Strategic Cooperation, Carlisle Barracks (PA),

    Strategic Studies Institute, US Army War College, 2005.

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    Sommaire

    RSUM............................................................................................. 4INTRODUCTION ................................................................................... 5LE JAPON COMME CONTREPOIDS LA CHINE ....................................... 7

    Questions nergtiques .......................................................................... 7Questions territoriales........................................................................... 11

    AUTRE OPTION : LA PNINSULE CORENNE ........................................ 13Questions nergtiques ........................................................................ 13Questions territoriales........................................................................... 14

    CONCLUSION.................................................................................... 19

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    Rsum

    Certains auteurs russes, dont Dmitri Trenin, ont qualifi ledveloppement de lExtrme-Orient russe (EOR) de tchecivilisationnelle . Dans le mme temps, le gouvernement russe areconnu que dvelopper cette rgion revtait un caractreindispensable si la Russie aspirait devenir une grande puissanceindpendante en Asie. Cependant, un examen attentif des relationsde la Russie avec les principales puissances du Nord-Est de lAsie

    la Chine, le Japon et la Core du Sud indique que la Russie achou atteindre ce but et que la premire raison de cet checrside dans son systme politico-conomique. tant donn lampleurdes enjeux, cet chec a des consquences majeures, notamment ladpendance excessive de la Russie vis--vis de la Chine pour laider dvelopper lEOR. Cette monte de linfluence chinoise sestmanifeste en 2009-2010, quand Pkin a renflou les producteursrusses de ptrole, obtenant en change que la Chine devienne leurunique acheteur de ptrole en Asie de lEst. La Russie a galementd rattacher ses projets de dveloppement de lEOR au plan dedveloppement rgional prvu par les autorits chinoises pour lapartie nord-est de leur pays. Ainsi, lchec de la Russie se

    rapprocher suffisamment de Tokyo et de Soul ne lui a pas donndautre choix que de laisser Pkin dcider de la nature du rle quellejouera en Asie du Nord-Est.

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    Introduction

    La Russie se considre comme une puissance asiatique et souhaiteque la Sibrie et lExtrme-Orient Russe (EOR) participent desorganisations de scurit en Asie comme la Coopration conomiquepour lAsie-Pacifique (APEC)1. Pour y parvenir, elle propose auxtats asiatiques un accs ses abondantes rservesdhydrocarbures, ses ressources scientifiques et technologiques,ainsi qu son potentiel industriel et intellectuel2. Sil semble douteux

    que la Russie soit rellement comptitive aux niveaux scientifique ettechnologique, lnergie est depuis longtemps un atout prcieux deMoscou en Asie. Cest grce cet avantage que le pouvoir russeentend rebtir grande chelle la Sibrie et lEOR, et faire en sorteque la Russie soit reconnue comme une grande puissanceasiatique3. Cest pourquoi un dveloppement russi de lEORapparat comme une condition pralable ncessaire la mise enplace dune politique asiatique viable.

    Cependant, ce succs rgional dpend lui-mme delexistence dinvestissements trangers importants et quilibrs enprovenance des voisins asiatiques de lEOR : le Japon, la Core du

    Sud et, surtout, la Chine. Pourtant, mme si le volume de seschanges commerciaux avec chacun de ces trois pays est enhausse, la Russie na gure valoris ces investissements aux yeuxdes compagnies trangres. Par consquent, elle sest retrouve, en2009, force de conclure avec la Chine des accords qui risquent defaire dpendre sa stratgie de dveloppement condition pralableau succs rgional du bon vouloir de Pkin. Par ces accords avecla Russie sur lnergie et lEOR, la Chine a commenc consoliderun nouvel ordre asiatique dont elle sera la premire bnficiaire,particulirement en qui concerne lnergie4. En 2010, quelque

    Traduit de langlais par Boris Samkov.1 D. Medvedev, APEC : Toward a Stable, Safe, and Prosperous Community ,13 novembre 2009,.2Ibid.3 S. Lavrov The Rise of Asia and the Eastern Vector of Russias Fo reign Policy ,Russia in Global Affairs, vol. 4, n 3, juillet-septembre 2006, p. 70, 77 ; S. Lavrov,discours la Chulalongkorn University (Thalande), Moscou, ministre des Affairestrangres de la Fdration de Russie, 24 juillet 2009, Open Source Center, ForeignBroadcast Information Service, Central Eurasia (FBIS SOV), 24 juillet 2009 ;S. Luzyanin, A Greater East For a Former Superpower , Nezavisimaya Gazeta,22 avril 2005, FBIS SOV, 22 avril 2005.4 S. Blank, Russias New Gas Deal with China : Background and Implications ,Northeast Asia Energy Forum, vol. VI, n 4, hiver 2009, p. 16-29; Idem., Chinas

    http://eng.kremlin.ru/speeches/2009/11/13/0005_type104017_222698.shtmlhttp://eng.kremlin.ru/speeches/2009/11/13/0005_type104017_222698.shtmlhttp://eng.kremlin.ru/speeches/2009/11/13/0005_type104017_222698.shtml
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    200 projets devaient tre raliss grce une participation conjointede la Chine et de la Russie dans lEOR. La Chine a prt Rosneft etTransneft 25 milliards de dollars un taux dintrt de 6 % afin deleur permettre de terminer la construction du pipeline reliant Tachet Skovorodino, do un pipeline chinois acheminera le ptrole jusquDaqing. Enfin, les ngociations sino-russes sur la construction dungazoduc sont en cours.

    Le prsent article analyse les efforts, finalement infructueux,de la Russie visant se rapprocher du Japon et de la Core du Sud.Cest cause de cet chec quen 2009 la Russie a d se tournerdavantage vers la Chine. Moscou dpend plus que jamais de Pkinpour les investissements dont elle a besoin afin de devenir unepuissance asiatique. En dautres mots, la Chine est devenue legarant des ambitions russes en Asie5. Lincapacit de la Russie dvelopper lEOR de faon autonome via des investissementstrangers quilibrs sape ses tentatives pour devenir une puissance

    asiatique indpendante de premier plan6. Pour chapper ladomination chinoise, la Russie doit mettre en uvre une cooprationconsquente dans le domaine des investissements avec le Japon etla Core du Sud.

    Russian Far East , Jamestown China Brief, vol. IX, n 16, 5 aot 2009; Idem., At aDead End : Russian Policy and the Russian Far East , Demokratizatsiya, vol. XVII,n2, printemps 2009, p. 122-144.5 G. Christoffersen, Russias Breakthrough into the Asia-Pacific : Chinas Role ,International Relations of the Asia-Pacific, vol. X, n 1, 2010, p. 61-92.6StrategiNacionalnoj Bezopasnosti Rossii do 2020[Stratgie de scurit nationalede la Fdration de Russie jusquen 2020], 12 mai 2009, .

    http://www.scrf.gov.ru/http://www.scrf.gov.ru/http://www.scrf.gov.ru/http://www.scrf.gov.ru/
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    Le Japon comme contrepoids laChine

    Lhistoire rcente de la Russie justifie le scepticisme desinvestisseurs, leurs doutes sur la sret de leurs investissements etle rapatriement des bnfices. Mme si des discussions au niveauministriel ont rcemment eu lieu avec des hauts reprsentants japonais, de mme que des appels mutuels renforcer la

    coopration dans le domaine de lnergie et dans dautres secteurs,aucun nouvel accord spcifique na t sign avec le Japon. Pendantce temps, les investissements chinois sont politiquement cibls(politically targeted) et font lobjet dune suspicion considrable7. Lesexperts russes continuent dexpliquer la rticence des Japonais investir en Sibrie par le problme des les Kouriles, alors que laraison rside sans doute tout autant dans le climat dinvestissementpeu hospitalier qui prvaut en Russie8. Quoi quil en soit, malgrquelques succs, limplication du Japon en Russie demeure limite.Limpasse politique sur la question des les et sur le renforcement ducommerce et des investissements ne laisse la Russie aucune autreoption que de compter sur la Chine pour sa stratgie de

    dveloppement rgional.

    Questions nergtiques

    Le succs rcent le plus marquant de la Russie dans ses accordspasss avec les autres pays dAsie est louverture dune usine deliqufaction de gaz naturel prs du champ Sakhaline-2. Cet accordpermet de fournir Osaka Gas au moins 200 000 tonnes de gaznaturel liqufi (GNL) par an dici 2030. Cela devrait stimuler la

    coopration russo-japonaise puisque le gaz parviendra galement

    7 Tokyo, Kyodo World Service, en anglais, 21 octobre 2008, FBIS SOV, 21 octobre2008; Moscou, ITAR-TASS, en anglais, 21 octobre 2008, FBIS SOV, 21 octobre2008.8 M.N. Katz, Exploiting Rivalries for Fun and Profit : An Assessment of PutinsForeign Policy Approach , Problems of Post-Communism, vol. LII, n 3, mai-juin2005, p. 25-31; S. Blank, Russo-Chinese Energy Relations : Politics in Command,Londres, Global Markets Briefing, 2006 ; S. Ito, Sino-Russian Energy Partnership:The Dilemmas of Cooperation and Mutual Distrust , in G. Austin and M-A Schellekens-Gaiffe (sous la dir.), Energy and Conflict Prevention, New York:Institute for East-West Studies, 2007, p. 64.

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    Tokyo Electric Power et sept autres socits gazires de Tokyo.Sakhalin Energy a aussi sign des contrats avec des compagniessud-corennes et amricaines9. Selon certaines prvisions, le Japonpourrait mme contribuer hauteur de 7 milliards de dollars lachvement de loloduc East Siberia Pacific Ocean(ESPO), mmesi le cot de ce projet ne cesse daugmenter10. Ces prvisionssemblent infondes, car il est peu probable que le Japon consente detels investissements avant que la question des les Kouriles ne soitrgle ou que les comportements conomiques en Russie nesamliorent.

    Le ministre russe des Affaires trangres rapporte galementque les deux parties se sont entendues sur le renforcement de lacoopration bilatrale dans le domaine de lnergie et envisagent lapossibilit de crer des usines de liqufaction de gaz et des usinesde traitement du gaz dans le Territoire maritime (Primorskij Kraj enrusse), ainsi que le dveloppement de bassins houillers en Iakoutie et

    dans la rgion de Touva11. Dbut 2009, le premier ministre japonaisTaro Aso a exprim lespoir que ces projets suscitent dautres effortsde coopration visant dvelopper le secteur nergtique et dautresindustries dans lEOR et amliorer les relations politiquesbilatrales, notamment en recherchant des moyens novateurs etmme non orthodoxes de rgler le dsaccord autour des lesKouriles12. Le gaz de Sakhaline fournira la base matrielle brute lusine de liqufaction de gaz. Ce gaz sera achemin via le pipelineSakhaline-Khabarovsk-Vladivostok dont la construction devaitdmarrer en 2009 et se terminer en 2011. Ces projets sinscriventdans le complexe nergtique dExtrme-Orient actuellementdvelopp, auquel appartient galement lESPO. La construction detankers devant acheminer le GNL vers la Russie, de voies de cheminde fer et de ports relve galement de ce plan global13. Cependant, ladestination future de ce gaz demeure incertaine lheure actuelle. Ilpourrait bien finir par tre employ des fins domestiques et non pasexport. Le vice-prsident de Gazprom, Alexandre Medvedev, agalement fait part de son espoir de voir la coopration avec le Japondpasser le seul dossier du GNL et englober la fabrication deproduits chimiques base de gaz14.

    Cependant, il faut se montrer prudent face aux informationsfaisant tat dinvestissements japonais en Russie en gnral et dansdes projets nergtiques en particulier ; en 2006, Moscou a forc les

    compagnies japonaises impliques dans Sakhaline-2, Mitsui et

    9 , 4 mars 2009 ; Moscou, ITAR-TASS, en anglais, 4 mars 2009,FBIS SOV, 4 mars2009.10Moscou, ITAR-TASS, en anglais, 5 fvrier 2009, FBIS SOV, 5 fvrier 2009.11 Russian MFA Information and Press Department Commentary in Relation toMedia Questions about the Outcomes of the Russian-Japanese Summit Meeting inYuzhno-Sakhalinsk , , 21 fvrier 2009.12 V. Golovnin, Entretien avec le premier ministre du Japon, Taro Aso , Moscou,Kommersant, en russe, 18 fvrier 2009, FBIS SOV, 18 fvrier 2009.13 Moscou, ITAR-TASS, en anglais, 25 fvrier 2009.14Daily Yomiuri Online, Tokyo, en anglais, FBIS SOV, 16 fvrier 2009.

    http://www.mid.ru/http://www.mid.ru/
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    Mitsubishi, vendre leur participation majoritaire la Russie. Au vude lhistoire rcente, il faut aussi se mfier des promessesdachvement des grands projets dinfrastructures temps et au prixinitialement prvu. tant donn les propositions et les plans de laChine, qui souhaite la construction dau moins une douzaine dautresterminaux de GNL, il est galement possible que certains, en Russie,esprent vendre la Chine le gaz de Sakhaline-2 ou dautres futurslieux de production de GNL, prsent que la Russie matrise latechnologie15. Enfin, le prsident Medvedev affirme que lachvementde ce projet renforce significativement la position de la Russie en tantque fournisseur mondial de gaz.

    La perspective dun grand pas en avant dans le domaine duGNL nat de lexprience de la coopration avec le Japon surSakhaline-2 et pourrait progresser en cas darrive dun nouveaugouvernement au Japon. Les officiels russes estimaient que legouvernement dirig par le premier ministre Yukio Hatoyama

    cherchait faire passer la relation bilatrale un niveau stratgiquequalitativement nouveau16. La chute du gouvernement Hatoyama en2010 a remis en question le dveloppement futur des relations russo- japonaises. Aujourdhui, on ignore la position que le nouveaugouvernement, dirig par le premier ministre Naoto Kan, va prendrevis--vis de la Russie.

    La stratgie nergtique russe jusquen 2030 prvoit unecroissance de 12 % de linvestissement tranger dans le secteur descarburants et de lnergie en Russie, la part du GNL passant 14-15 % de la production totale. La Russie souhaite galement fairepasser la part de ses exportations vers lAsie-Pacifique 26-27 %.

    Gazprom a aussi relanc les ngociations avec Mitsui et Mitsubishisur les nouveaux projets de GNL, probablement Sakhaline-317. Mitsuiet dautres compagnies comme Marubeni-Itochu Steel sintressentaux projets nergtiques en EOR. Ainsi, Marubeni-Itochu discuteactuellement avec Gazprom de projets de construction dun rseaude transport de gaz reliant Sakhaline, Khabarovsk et Vladivostok cequi sinscrit dans le cadre du plan de Gazprom pour la Grande Asiede lEst un projet qui, indniablement, contrerait la prsencechinoise en EOR18.

    Pour que de tels projets se matrialisent, la Russie doit,premirement, retrouver de la crdibilit en matire daccueil des

    15 Pipeline & Gas Journals 2008 International Pipeline Construction Report ,Pipeline & Gas Journal, aot 2008, p. 20.16 Moscou, ITAR-TASS, en anglais, 29 octobre 2009, FBIS SOV, 29 octobre 2009.17 Moscou, ITAR-TASS, en anglais, 26 octobre 2009, FBIS SOV, 26 octobre 2009;Moscou, Interfax, en anglais, 22 octobre 2009, FBIS SOV, 22 octobre 2009 ; Tokyo,Nikkei Telecom, en anglais, 17 octobre 2009, FBIS SOV, 17 octobre 2009.18 Moscou, ITAR-TASS, en anglais, 14 aot 2009, FBIS SOV, 14 aot 2009 ;Moscou, ITAR-TASS, en anglais, 16 septembre 2009, FBIS SOV, 16 septembre2009.

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    investissements trangers dans le secteur nergtique19.Deuximement, elle doit procder un rapprochement politique avecle Japon et rsoudre la question des les Kouriles. Dans le cascontraire, les investissements massifs japonais dont Moscou parledepuis les annes 1970 ne se concrtiseront jamais. ce sujet,Tokyo lie expressment ses investissements la rsolution duproblme des Kouriles20. Par le pass, les deux parties ont commisde nombreux faux pas et employ des tactiques dobstruction. Celane semble pas devoir changer. Moscou continue de ne pas donnersuite aux exigences du Japon, ce qui fait dire certains observateursque ses appels un rapprochement avec Tokyo sont dicts par lavolont dquilibrer ses relations avec la Chine, et non par le dsirrel de sassocier plus troitement au Japon. Comme le remarquelexpert polonais Marcin Kaczmarski, la Russie ne considre pas leJapon comme un tat suffisamment important pour lui faire desconcessions majeures. Pour la Russie, le Japon est avant tout un

    pays client des tats-Unis et dont la marge de manuvre est rduiteen raison de cette alliance. Le vritable objectif de la Russie, quandelle fait mine de se rapprocher du Japon, est donc de rquilibrer lasituation en Asie face la Chine21.

    Pour quune restructuration majeure des relations en Asie duNord-Est se produise, la relation russo-japonaise doit tre revigore.Cela permettra la Russie de rduire le nombre dexercices et depatrouilles de la flotte du Pacifique et de ses bombardiersstratgiques, surtout des bombardiers TU-95, proximit du Japon.Ces patrouilles ont veill des craintes concernant le retour de lapuissance militaire russe. Le comportement menaant de Moscou asurpris larme japonaise et a incit les experts des questions descurit au Japon appeler une surveillance accrue de la Russie22.

    En fvrier 2009, Moscou a fait part de son fort espoir de serapprocher politiquement du Japon afin de rsoudre la question des les Kouriles et de convaincre le Japon de financer plusieurs futursprojets nergtiques en Asie. Quant au Japon, il dclare dsormaisque la Russie est devenue un partenaire constructif dans la rgionAsie-Pacifique 23. Medvedev a soulign que Gazprom serait pour leJapon un fournisseur de long terme fiable. Cest important pourTokyo dans la mesure o le projet Sakhaline-2 devrait gnrer

    19 M. Bradshaw, The Changing Political Economy of Foreign Investment in theRussian Oil and Gas Industry , Northeast Asia Energy Focus, vol. VI, n 3, automne2009, p. 10-17.20 Moscou, Interfax, en anglais, 28 dcembre 2009, FBIS SOV, 28 dcembre 2009.21 M. Kaczmarski, An Asian Alternative? Russias Chances of Making Asia anAlternative to Relations with the West, Centre for Eastern Studies, Varsovie,, 2008, p. 41.22The Defence of Japan 2008, cit dans C. Taylor, Russias Military Posture,Londres, House of Commons Library International Affairs and Defence Section,2009. p. 52 ; J. Ryall, Japanese Alarm at Rise in Russian Military Activity ,, 5 septembre 2008.23 S. Bierman et L. Pronina, Russia, Japan Should Boost Trade Ties , Bloomberg,18 fvrier 2009 ; Moscou,Interfax, en anglais, 18 fvrier 2009, FBIS SOV, 18 fvrier2009.

    http://www.osw.waw.pl/http://www.osw.waw.pl/http://www.osw.waw.pl/http://www.telegraph.co.uk/http://www.telegraph.co.uk/http://www.telegraph.co.uk/http://www.osw.waw.pl/
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    7,2 % des importations de GNL du pays24. En 2007, la Russie aentrin un Programme Gazier de lEst qui prvoit de dpenser28 milliards de dollars pour relier les champs gaziers de Krasnoarsk,Irkoutsk, Iakoutsk et Sakhaline en un Systme unifidapprovisionnement gazier qui pourrait tre employ, avec lesstructures du GNL, pour vendre du gaz au Japon, la Core du Sudet mme aux tats-Unis25. Il nen reste pas moins que des effortsgigantesques doivent encore tre accomplis pour revitaliser lacoopration politique, car les deux parties possdent des factionsintrieures influentes qui se montrent inflexibles sur le dossier desles Kouriles. Moscou refuse ne serait-ce que dvoquer la possibilitque ces les puissent ne pas appartenir la Russie une attitude qui,ds le dpart, limite tout progrs sur ce dossier26.

    Questions territoriales

    La Russie a mis en garde le Japon contre la remise lordre du jourde la question des Kouriles, ce qui affecterait les relations bilatrales y compris les accords nergtiques27. Le Japon se montre toutaussi intransigeant, affirmant que les quatre les doivent lui trerendues avant tout accord conomique majeur28. Cet enttement desdeux parties compromet toute ventualit de cooprationconomique substantielle29.

    Pourtant, ds son arrive au pouvoir en aot 2009, le

    gouvernement Hatoyama a immdiatement annonc quil avaitsrieusement lintention de progresser sur cette question. La Russiea salu cette dclaration30. Lors de leur rencontre en septembre 2009 New York, lAssemble gnrale des Nations unies, Hatoyama etMedvedev se sont entendus sur la tenue de runions rgulires deleurs ministres des Affaires trangres. Ces runions permettrontdaborder les questions territoriales et les autres dossiers bilatraux,et de promouvoir la coopration conomique et technologique, ycompris propos du dveloppement des ressources de la Sibrie

    24Kyodo World ServiceTokyo, en anglais, 6 fvrier 2009, FBIS SOV, 6 fvrier 2009 ; Russia Unveils its First LNG Plant in Sakhalin-2 , RIA Novosti, 8 fvrier 2009,.25Yonhap, Soul, en anglais, 18 fvrier 2009, FBIS SOV, 18 fvrier 2009.26 ITAR-TASS, Moscou, en anglais, 6 mars 2009, FBIS SOV, 6 mars 2009.27 Interfax-AVN Online, Moscou, en anglais, 6 mars 2009, FBIS SOV, 6 mars 2009.28 A. Tannai, Aso dit Poutine que la dclaration de 1956 ne rsoudra jamais ledsaccord sur le territoires du Nord , Tokyo, Ashai Shiumbun Online, en japonais,22 mai 2009, FBIS SOV, 22 mai 2009.29Daily Yomiuri Online, Tokyo, en anglais, 16 fvrier 2009, FBIS SOV,16 fvrier 2009.30 ITAR-TASS, Moscou, en anglais, 29 octobre 2009. FBIS SOV, 29 octobre 2009 ;voir galement le discours de Hatoyama du 26 octobre 2009 la Dite japonaise,Tokyo, Kyodo World Service, en anglais, 26 octobre 2009, FBIS SOV,26 octobre 2009.

    http://en.rian.ru/Russia/20090218/120196973.htmlhttp://en.rian.ru/Russia/20090218/120196973.htmlhttp://en.rian.ru/Russia/20090218/120196973.htmlhttp://en.rian.ru/Russia/20090218/120196973.html
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    orientale. Hatoyama a ritr son espoir de rsoudre la questionterritoriale du vivant de la gnration actuelle31. Il voulait mmeobtenir des progrs significatifs pour le dbut de lanne 201032 et aaussi ouvertement envisag une stratgie gagnant-gagnant pour lesdeux parties propos du dveloppement de la Sibrie, quibnficierait certainement la Russie vis--vis de la Chine33.

    Cependant, la Russie parat hsiter. Le porte-parole duministre des Affaires trangres, Andre Nesterenko, a salulinitiative de Hatoyama, mais a ajout que, sil tait vrai que les deuxparties souhaitaient rsoudre ce problme aussi vite que possible, ilest trs compliqu de dfinir les termes concrets . Il a galementdclar que les deux parties devaient dvelopper des points de vuecommuns sur la meilleure manire de sortir de limpasse34. De mme,Medvedev a appel Hatoyama viter les positions extrmes ,cest--dire demander la restitution de la totalit des les 35.

    Le gouvernement japonais sest rvl tout aussi inflexible vis--vis de la Russie. Seiji Maehara, le ministre charg dOkinawa etdes Territoires du Nord (dnomination employe au Japon pourdsigner les les disputes) a dclar le 17 octobre 2009 queloccupation de ces les par la Russie tait illgale et que le Japondevrait continuer de le rappeler et dexiger que les quatre les luisoient restitues36. Ces positions fermement enracines ont conduit limpasse au dbut 2010.

    Les discussions menes entre les ministres des Affairestrangres en dcembre 2009 nont pas rgl la situation, bien que laRussie ait parl de solutions non conventionnelles . Le ministre japonais des Affaires trangres, Katsuya Okada, a exprim lamfiance japonaise lgard de la Russie, affirmant que leurpartenariat tait fictif aussi longtemps quaucun accord territorialnaurait t sign37. Par consquent, la Russie aura du mal sappuyer sur loption japonaise en tant qualternative sadpendance grandissante vis--vis de la Chine.

    31 Kyodo World Service, Tokyo, en anglais, 23 septembre 2009, FBIS SOV,23 septembre 2009.32 Interfax, Moscou, en anglais, 17 septembre 2009, FBIS SOV, 17 septembre 2009.33 Ashai Shimbun Online, Tokyo, en anglais, 25 septembre 2009, FBIS SOV,25 septembre 2009.34 Moscou, ITAR-TASS, en anglais, 17 septembre 2009, FBIS SOV, 17 septembre2009.35 Interfax, Moscou, en russe, 15 septembre 2009.36 Kyodo World Service, Tokyo, en anglais, 17 octobre 2009, FBIS SOV,17 octobre 2009 ; Tokyo, Kyodo World Service, en anglais, 19 octobre 2009,FBIS SOV, 19 octobre 2009 ; Tokyo, Kyodo World Service, en anglais,20 octobre 2009, FBIS SOV, 20 octobre 2009.37 Interfax-AVN Online, Moscou, 25 dcembre 2009, FBIS SOV, 25 dcembre 2009.

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    Autre option : la pninsulecorenne

    Questions nergtiques

    Lanne 2009 a t difficile pour la politique corenne de la Russie.

    Moscou a dabord cherch renforcer son rle dans les pourparlers six sur la prolifration nuclaire nord-corenne (avec les deuxCores, les tats-Unis, la Chine et le Japon) et se positionnercomme un partenaire fiable pour les deux Cores. Elle a aussiplusieurs fois fait part de son intrt pour une sorte de concert desgrandes puissances en Asie38. Moscou souhaite devenirfournisseur dnergie des deux Cores, ce qui lui garantirait un rleimportant dans le rglement du conflit et unirait les deux Cores avecla Russie dans une association conomico-politique durable. Quandlaccord six a pris forme en fvrier 2007, ITAR-Tass a rapport lecommentaire dun expert, selon lequel la Russie pourrait crer lesconditions ncessaires la mise en uvre d une srie de grands

    projets multilatraux auxquels participeraient la Core du Nord et laRussie , notamment dans le domaine du transit ptrolier et gazier,des transferts dlectricit et du projet dit TKR-TSR (connexion dunevoie de chemin de fer transcorenne avec le chemin de fertranssibrien, lment central de la politique de transports de laRussie pour lAsie)39. Dans cette optique, ces projets nebnficieraient pas seulement Moscou et Pyongyang, mais aussi Soul40.

    La Rpublique de Core et la Russie souhaitent toutes deuxconstruire un gazoduc traversant les deux Cores, complt par unparc industriel ptrochimique et une usine de liqufaction de gaz. La

    construction devrait dmarrer en 2010 et tre termine en 2015. Legazoduc acheminera 7,5 millions de tonnes de gaz (mesur en GNL)par an pendant trente ans, soit 20 % des importations annuelles degaz de la Rpublique de Core41. Le cot estim de ce gazoduc degaz naturel (GGN) est gigantesque. Sil aboutissait, il sagirait dun

    38 B. Lo, Axis of Convenience : Moscow, Beijing, and the New Geopolitics,Washington DC, Brookings Institution Press, 2008, p. 123-125.39 Moscou, ITAR-TASS, en russe, 13 fvrier 2007, FBIS SOV, 13 fvrier 2007.40Ibid.41 J-N. Ko, Review of Korea-Russia Summit Talks and Future Prospects , Koreaand World Affairs, vol. XXXII, n 4, hiver 2008, p. 442.

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    provocations et des tests de missiles de Pyongyang. La Russie, quisest rgulirement prononce contre toute action militaire, a laissentendre que les sanctions pourraient tre leves si la Rpubliquepopulaire revenait la table des ngociations, a propos dimpliquerlAIEA (Agence internationale de lnergie atomique)et sest dit prte fournir la Core du Nord une assistance conomique46.Cependant, ce sont Washington et Pkin, et non pas Moscou, quidcideront de lissue des ngociations, ce qui illustre la faiblecapacit de la Russie peser sur le cours des choses.

    Lchec des ngociations a galement pour effet de vider detoute substance lide, prsente par Moscou, de crer unmcanisme de scurit multilatrale pour lAsie du Nord-Est dans lecadre des accords de 2007. En labsencedun tel mcanisme, il seraplus difficile pour la Russie dtre un acteur indpendant et comptitifen Asie du Nord-Est. Pourtant, Moscou continue dlaborer diversesformules de rsolution des conflits rgionaux, car elle parat prsent

    sinquiter de la future quation scuritaire. Le vice-ministre desAffaires trangres Alexe Borodavkine, qui reprsente Moscou dansles pourparlers six, a annonc que les discussions de la Russieavec les cinq autres parties lont mene formuler une premireversion de Principes directeurs pour la paix et la scurit en Asie duNord-Est . Borodavkine a admis que les conflits en cours en Coreet en Afghanistan avaient empir en 2009. Par consquent, nouspartons de lhypothse que lun des pr-requis et des lments lesplus importants du processus de dnuclarisation est la formationdinstitutions communes de scurit rgionale, qui seraient basessur le principe de la scurit gale de toutes les parties 47. De telsappels soulignent la faible influence de Moscou sur ces questions.

    Borodavkine a encore plus clairement rvl les craintes de laRussie concernant la Core en dclarant que laggravation desconflits asiatiques, combine la crise conomique mondiale, avaitcr une situation o la paix et la scurit dans la rgion constituentune tche prioritaire, car nous croyons que ni la dissuasion nuclaireni la dissuasion militaire ne sauraient garantir la scurit dans cettesous-rgion et dans le monde entier 48. Moscou a dailleurs dployses nouveaux SAM S-400 en EOR, de peur que la Core du Nord nelance davantage de missiles qui pourraient dvier de leur trajectoire

    46 J. Kee Baek, Medvedevs Russia, a Revisionist Power or an Architect of a NewWorld Order ? The Evolution of Ideational Factors and Its Cases , Korean Journalof Defense Analysis, vol. XXI, n4, dcembre 2009, p. 477-481 ; Moscou, Interfax-AVN Online, en anglais, 17 dcembre 2009, FBIS SOV, 17 dcembre 2009 ;CEP20091223950097, Pkin, Xinhua, en anglais, 23 dcembre 0837 GMT 2009,FBIS SOV, 23 dcembre 2009 ; Interfax, Moscou, en anglais, 11 dcembre 2009,FBIS SOV, 11 dcembre 2009 ; Moscou, ITAR-TASS, en russe, 23 dcembre 2009,FBIS SOV, 23 dcembre 2009.47 ITAR-TASS, Moscou, en anglais, 18 dcembre 2009, FBIS SOV, 18 dcembre2009.48 CEP20091223950184, ITAR-TASS, Moscou, en anglais. 23 dcembre 2009, 1325GMT, FBIS SOV, 23 dcembre 2009.

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    ou, pire, provoquer un conflit majeur en Asie du Nord-Est49. DaprsBorodavkine, ce danger signifie que la Russie doit participer plusactivement lvolution de la rgion. Cest pourquoi Moscou semontre plus prsente, spcialement dans le domaine de lintgrationconomique50.

    Enfin, la suspension des pourparlers six rduit la capacitde Moscou concurrencer les tats-Unis, la Chine et la Core duSud pour ce qui concerne laccs conomique la Core du Nord et, donc, linfluence sur ce pays. Tous ces tats, malgr lescirconvolutions autour des pourparlers six, investissent ettransfrent des sommes considrables en Core du Nord, esprantouvertement que cela augmentera leur influence sur Pyongyang lavenir51.

    Mme si la Russie ne cache pas sa volont de fournir delnergie aux deux Cores, elle a d accepter que le Japon, la Chine

    et/ou la Core du Sud se joignent elle pour approvisionner la Coredu Nord en nergie nuclaire52. De mme, divers moments, laCore du Sud a propos et fourni de lnergie la Core du Nord. Ildemeure incertain si ces anciennes offres dnergie impliquaient quela Core du Nord achemine vers la Core du Sud du gaz provenantde Russie ou dailleurs53. La possibilit existe que la Chine et/oulAmrique suivent cet exemple et fournissent davantage dnergie la Core du Nord54. En attendant, la Chine reste le premierfournisseur de la RPCN. Ces mouvements illustrent la rivalitconstante qui existe entre les parties, toutes dsireuses de devenir leprincipal fournisseur dnergie et le premier partenaire commercial dela Core du Nord, alors mme que les modalits dune telle

    coopration sont encore en cours dlaboration. Naturellement, lavolont politique de la Russie de trouver en Asie un autre partenaireque la Chine et dassurer la prminence russe dans un ventuelrglement du conflit coren joue un grand rle dans lattitude deMoscou. Ainsi, si le projet de Moscou consistant fournir de lnergieaux deux Cores se concrtise, le gazoduc coren sera connect ausystme de fourniture de gaz de lEst gr par la Russie. Cela nesignifie pas seulement que la Core sera avantage dans laconcurrence future autour des ressources nergtiques de la Sibrieorientale, mais aussi que les compagnies corennes auront la hautemain sur les projets de dveloppement en EOR et en Sibrie55.

    49 Russia Deploys S-400 Air Defense Systems in Far East , RIA Novosti, 26 aot2009, .50 CEP20091223950194, ITAR-TASS, Moscou, en anglais, 1339 GMT,23 dcembre 2009, FBIS SOV, 23 dcembre 2009.51Lauteur du prsent article consacrera bientt un article spar cette question. 52Interfax, Moscou, en anglais, 10 avril 2007, FBIS SOV, 10 avril 2007.53Yonhap, Soul, en anglais, 31 mars 2003, FBIS SOV, 31mars 2003 ; A. Ward, Deal for Gas Pipeline Could Solve Korean Nuclear Crisis , Financial Times,31 mars 2003 ; et, plus rcemment, Hankoyreh, Internet Version, Soul, en anglais,17 avril 2007, FBIS SOV, 17 avril 2007.54Yonhap, Soul, en anglais, 15 avril 2007, FBIS SOV, 15 avril 2007.55 J-N. Ko, op. cit. [41], p. 442.

    http://en.rian.ru/mlitary_news/20090826/155930246.htmlhttp://en.rian.ru/mlitary_news/20090826/155930246.htmlhttp://en.rian.ru/mlitary_news/20090826/155930246.htmlhttp://en.rian.ru/mlitary_news/20090826/155930246.html
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    Lide est sduisante, mais les compagnies nergtiquesrusses ne disposent pas des moyens ncessaires pour la raliser.Par consquent, il est difficile de savoir qui va supporter le cot dugazoduc et des infrastructures. Puisque financer le pipeline offre aupayeur un avantage dans la rivalit autour de linfluence sur la Coredu Nord, personne ne voudra jouer les bienfaiteurs de la Russie. Enconsquence, cette vision ambitieuse long terme peut continuer derester au stade de projet pendant encore plusieurs annes, ce quiconduirait lchec du principal objectif conomico-politique de laRussie en Core. La Russie a admis depuis longtemps quune autrepartie devrait laider financirement pour quelle puisse fournir delnergie la Core du Nord56. De plus, Pyongyang a bloqu cetteinitiative, ainsi que toutes les autres, par son insistance tester sesmissiles nuclaires en avril 2009. Aujourdhui, ni Soul ni Moscou nepeuvent atteindre ces objectifs, et on ne voit pas qui serait prt financer les ambitions de la Russie.

    Sakhaline-2 revt galement une grande importance pour laCore du Sud : elle en recevra du GNL qui sera bien moins cher etplus fiable que le gaz du Moyen-Orient. Deuximement, quand le gazde Sakhaline-2 sajoutera aux autres projets de gazoducs dontdiscutent les Russes et les Sud-Corens, la quantit totale desimportations de la Core du Sud pourrait devenir considrable, ce quiserait trs positif pour Soul comme pour Moscou57. La Core duSud, se basant sur des accords signs avec la Russie en 2008,aimerait beaucoup quun pipeline relie la Sibrie son territoire.Samsung cherche cooprer avec Gazprom autour des projets dugant gazier russe dans la pninsule de Yamal et le champChtokman (dans le nord de la Russie), et la Russie a proposdutiliser des technologies de Samsung pour les projets en question,mme si la plupart des spcialistes estiment que ces gisements sontdestins lEurope58. Soul souhaite aussi importer du ptrole vialESPO59. Cest pourquoi Gazprom et Kogas (la compagnie de gaznationale de la Core du Sud) continuent des discussions bases surles accords de 200860. Hyundai aspire participer la constructiondes infrastructures nergtiques reliant lEOR la Core du Sud et asign un protocole dentente avec la compagnie prive russeIndustrial Investors, pour participer avec elle au dveloppementnergtique, la construction dinfrastructures, lacheminement de

    56S.S. Kim, The Two Koreas and the Great Powers, Cambridge, CambridgeUniversity Press, 2006, p. 149.57Yonhap, Soul, en anglais, 18 fvrier 2009, FBIS SOV, 18 fvrier 2009.58 Interfax, Moscou, en anglais, 19 fvrier 2009, FBIS SOV, 19 fvrier 2009 ; Interfax,Moscou, en anglais, 20 fvrier 2009, FBIS SOV, 20 fvrier 2009 ; Interfax, Moscou,en anglais, 11 septembre 2008, FBIS SOV, 22 septembre 2008 ; S. Blank, RecentTrends in Russian-South Korean Economic Relations Northeast Asia EnergyFocus, vol. V, n 4, hiver 2008, p. 12-16.59 South Korea Eyes Grater Pipeline Opportunities with Russia , Pipeline & GasJournal, dcembre 2008, p. 18.60 Moscou, en anglais, 17 novembre 2008, FBIS SOV, 17 novembre 2008.

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    lnergie et aux projets de logistique61. Mais videmment, mme unsuccs majeur obtenu avec la Core du Sud (ce qui est loin dtrecertain, comme on la vu) ne suffirait pas surmonter la dpendancerusse envers la Chine et son incapacit sentendre avec le Japon.

    Son incapacit jouer un rle majeur dans lvolutionconomique et politique de la Core diminue nettement les ambitionsrgionales de la Russie en Asie. Certains observateurs estiment quesi la Russie ne peut pas jouer un rle majeur en Asie du Nord-Est,ses propositions de mise en place dun ordre rgional multilatralvont galement tre oublies62.

    61 Kim-Yoon-mi, Hyundai To Tap Energy, Shipping Business in Russia , Soul,The Korea Herald Internet Version, en anglais, 11 novembre 2008, FBIS SOV,11 novembre 2008.62 K. Choi, Six-Party Talks and Multilateral Security Cooperation , The 15th IFANS-IMEMO Conference on the Current Situation in Northeast Asia and Russian-KoreanRelations, Soul, Institute of Foreign Relations and National Security, 2005, p. 12.

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    Conclusion

    Lincapacit de Moscou mettre en uvre une cooprationconomique efficace avec le Japon ou faire significativementprogresser ses intrts sur le dossier nord-coren ne lui laisse pasdautre option que de miser sur la Chine, de loin son premierpartenaire asiatique63. Le fait que la Russie doive si souventcoordonner ses actions avec la Chine sur la Core, sur lEOR etmme sur lAsie centraledmontre quelle nest plus en mesure de

    jouer le rle dune grande puissance. Cela confirme notre argumentcentral : en chouant tirer le meilleur de ses atouts en Asie, Moscoua ouvert la voie un nouvel ordre scuritaire en Asie (y compris enEOR), dirig par la Chine. La Russie a des ambitions optimistes ence qui concerne le dveloppement dun systme nergtique unifien Extrme-Orient comprenant le ptrole, le gaz, llectricit etlnergie nuclaire ; mais elle sait que ces projets ne peuvent porterleurs fruits que via une coopration substantielle avec les tatsvoisins64. Or, elle ne parvient pas gnrer une telle coopration un degr suffisant pour contrebalancer linfluence de la Chine. Parconsquent, elle doit se tourner vers celle-ci, qui est en train dedevenir la puissance dominante en EOR. Cet chec politique est

    leffet direct de plusieurs dcisions prises dans le pass qui entraventla capacit de la Russie dvelopper lEOR et lintgrer lAsie duNord-Est.

    En mai 2009, le prsident Medvedev a admis que sansinvestissements chinois dans des grands projets en EOR, Moscou nepourrait pas mener bien ses plans de dveloppement. Medvedev areconnu avec franchise que le dveloppement conomique de lEORne dpend pas des relations de la Russie avec lEurope mais, plutt,du dveloppement de ses liens avec ses principaux partenaires de largion Asie-Pacifique. Par consquent, la stratgie dedveloppement rgional de lEOR doit tre coordonne avec la

    stratgie rgionale de la Chine, laquelle souhaite moderniser sesvieilles installations industrielles de la province du Heilongjiang65.

    63 B. Lo, op. cit. [38], passim ; A. Tsygankov, What Is China to Us ? Westernizers andSinophiles in Russian Foreign Policy, Russie.Nei.Visions, n45, dcembre 2009.64 A.N. Gulkov, Basic Concepts of Cooperation in North-East Asia in the Oil andGas Sector for the Period 2010-2030 , Northeast Asia Energy Focus, vol. VII, n 1,printemps 2010, p. 10-15; V. Kulagin, The East as the New Priority of the RussianEnergy Policy , Northeast Asia Energy Focus, vol. VII, n1, printemps 2010, p. 36-43.65 Russian President Urges Coordination With China on Regional Development ,Peoples Daily Online, 21 mai 2009 ; Medvedev : Russia Should Interest China InInvesting in Far East , Peoples Daily Online, 21 mai 2009 ; Excerpts From

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    Depuis lannonce de Medvedev, plusieurs vnements ont confirmque le projet du gouvernement russe pour lEOR est insuffisant pourassurer le dveloppement de la rgion. Par consquent, cettedernire dpend de plus en plus troitement de la stratgie chinoisede dveloppement rgional. Le bilan des deux dernires dcenniesest clair.

    La rapidit de la croissance conomique chinoise et le dfiquelle reprsente pour la Russie se reflte dans les chiffressuivants : daprs la Banque mondiale, alors que les conomiesrusse et chinoise taient approximativement de tailles comparablesen 1993, en 2008 celle de la Chine tait environ trois fois plusimportante que celle de la Russie. De plus, mme depuis 1998,anne o la Russie a dmarr une rapide remonte conomique, laChine a toujours connu une croissance suprieure. La criseconomique actuelle ne fait quapprofondir le foss qui sparedsormais les deux pays : lconomie chinoise continue de crotre

    tandis que celle de la Russie chancelle. Enfin, la qualit de lacroissance chinoise a t suprieure : elle a permis de crer denouvelles capacits de production, tandis que le rtablissement de laRussie a largement repos sur la rutilisation de capacits datant delre sovitique et dont le fonctionnement avait ralenti pendant la criseconomique des annes 199066.

    La monte de la puissance chinoise en Asie du Nord-Est ades consquences srieuses sur la Russie, et pas uniquement cause de laugmentation de linfluence chinoise en EOR. La Russiena pas seulement chou dvelopper lEOR ; ses politiquescorenne et japonaise se sont galement soldes par un chec,

    puisquelle na pas pu empcher la Core du Nord de se doter delarme nuclaire. Une Core du Nord nuclarise fait planer undanger sur lAsie du Sud-Est, fige la rgion en blocs opposs et forcela Russie remilitariser ses positions l o elle ne peut pasrellement se le permettre. Mme si Moscou a conscience de sadpendance lgard du maintien de lquilibre sino-amricain, ellesait que si ce cas de figure tait dfinitivement entrin, elle perdraittoute libert de manuvre et devrait se rapprocher de lune des deuxparties qui serait la Chine. Elle deviendrait alors le junior partner de la Chine, mme si Moscou a essay, sans succs, deconcurrencer Pkin en matire dinfluence sur Pyongyang. La plusgrande capacit de la Chine influencer la Core du Nord par des

    moyens militaires bloque les projets russes de dveloppement delEOR; de plus, elle dissuade le Japon et la Core du Sud dinvestiren Russie puisque celle-ci est dsormais moins capable de lessoutenir dans leurs dilemmes scuritaires. Il sagit dun cerclevicieux : le fait que ces pays ninvestissent pas en Russie accrot

    Transcript of Meeting With Students From Pacific National University, Khabarovsk ,, 21 mai 2009.66 T. Graham, The Sources of Russias Insecurity , Survival, vol. LII, n 1, 2010,p. 63.

    http://www.kremlin.ru/http://www.kremlin.ru/http://www.kremlin.ru/
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    encore la dpendance de celle-ci envers la Chine pour dvelopperlEOR67.

    la lumire de la crise nuclaire nord-corenne, lchec de laRussie mettre en uvre une politique de dveloppement efficace

    impliquant la Core du Sud et le Japon en EOR rvle la primaut delinfluence chinoise sur Pyongyang et lEOR. Le blocage de lanormalisation russo-japonaises et la sensibilit de la questioncorenne bnficient la Chine et rduisent la capacit de la Russiedinfluencer le cours des venements en Asie. Ds lors, ledveloppement de lEOR devient non seulement la pr-condition laffirmation relle de la puissance russe en Asie, mais aussi unecondition pralable essentielle pour laffirmation dun quilibre despuissances en Asie du Nord-Est. Sans cela, non seulement la Russiesera prive de ses moyens de saffirmer rellement sur la scneinternationale mais, en plus, cet quilibre des puissances deviendrapresque impossible atteindre. Mme si le Japon et la Core du Sud

    travaillaient de concert restaurer cet quilibre, ils nen auraient pasles moyens.

    67 G. Rozman, Russian Repositioning in Northeast Asia : Putins Impact andCurrent Prospects , Paper Presented to the Conference on Contemporary Issues InInternational Security, Russian, European, and American Views, Washington DC, 25-26 janvier 2010.