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Université de Provence UFR « Psychologie, Sciences de l’éducation » Département de psychologie développementale et différentielle Centre de formation des Conseillers d’Orientation-Psychologues Promotion 2005-2007 LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ? Travail d’Etude et de Recherche présenté par Marie Clainchard Anne Deligny Fanny Thibault Sous la direction de Lionel Dany 29 avenue Robert Schuman 13621 Aix-en-Provence Cedex

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Université de Provence

UFR « Psychologie, Sciences de l’éducation » Département de psychologie développementale et différentielle

Centre de formation des Conseillers d’Orientation-Psychologues

Promotion 2005-2007

LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

Travail d’Etude et de Recherche présenté par Marie Clainchard Anne Deligny Fanny Thibault Sous la direction de Lionel Dany

29 avenue Robert Schuman

13621 Aix-en-Provence Cedex

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Table des matières

Introduction ........................................................................................................... 1

1 Revue de la littérature..................................................................................... 2

1.1 L’évaluation ................................................................................................................ 2 1.1.1 L’évaluation : son histoire, ses concepts ............................................................ 2 1.1.2 L’évaluation et le jugement social ..................................................................... 5 1.1.3 L’évaluation des élèves dans le système éducatif .............................................. 7 1.1.4 L’évaluation et ses biais ..................................................................................... 8

1.2 Une norme des inégalités scolaires ........................................................................... 12 1.2.1 De l’idéologie du don au handicap socioculturel ............................................. 13 1.2.2 La culture de l’échec ........................................................................................ 14 1.2.3 Réussite scolaire et reproduction sociale ......................................................... 14 1.2.4 Réussite scolaire et intelligence ....................................................................... 15

1.3 L’inférence causale en matière d’événements psychologiques................................. 18 1.4 La norme d’internalité et les pratiques évaluatives ................................................... 20

2 Problématique et hypothèses ........................................................................ 22

2.1 Problématique............................................................................................................ 22 2.2 Hypothèses ................................................................................................................ 23

3 Méthode........................................................................................................ 24

3.1 Participants ................................................................................................................ 24 3.2 Construction du questionnaire................................................................................... 25 3.3 Procédure de passation .............................................................................................. 28 3.4 Description de la population ..................................................................................... 30

4 Résultats ....................................................................................................... 31

4.1 Explications des résultats d’une classe...................................................................... 31 4.1.1 Condition « Normale »..................................................................................... 31 4.1.2 Condition « Réussite » ..................................................................................... 32 4.1.3 Condition « Echec » ......................................................................................... 33 4.1.4 Comparaison des différentes conditions .......................................................... 35 4.1.5 Comparaison entre les différentes conditions selon le sexe des répondants .... 38 4.1.6 Comparaison entre les différentes conditions selon le degré d’internalité des répondants ........................................................................................................................ 42

4.2 Composantes de la réussite ....................................................................................... 47 4.2.1 Les différentes dimensions de la réussite ......................................................... 47 4.2.2 Etudes des variables sur les dimensions........................................................... 48

4.3 Résumé ...................................................................................................................... 50 5 Discussion............................................................Erreur ! Signet non défini.

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5.1 Une différenciation entre les matières tenant au caractère social de celles-ci Erreur ! Signet non défini.

5.2 Valorisation du rôle de l’élève .........................................Erreur ! Signet non défini. 5.3 Les filles et les garçons accordent des poids différents aux éléments explicatifs de la

réussite..............................................................................Erreur ! Signet non défini. 5.4 Des attitudes vis-à-vis de la réussite qui refléteraient une norme ? .... Erreur ! Signet

non défini. Conclusion..................................................................Erreur ! Signet non défini.

Références bibliographiques ......................................Erreur ! Signet non défini.

Annexes ......................................................................Erreur ! Signet non défini.

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

- 1 - 1

Introduction

Récemment, un livre au titre évocateur « La constante macabre », écrit par un

enseignant chercheur A. Antibi (2003), dénonçait le fait qu’un tiers d’élèves se retrouve en

échec dans toute situation d’évaluation scolaire. Il incriminait le système éducatif, et en

premier lieu les enseignants. Partant de ce constat, nous nous sommes questionnées sur le

regard que les élèves pouvaient porter sur l’évaluation à l’école. Que pensent-ils des inégalités

scolaires et comment se les expliquent-ils ? Cette question nous a paru importante,

considérant la place qu’occupe l’évaluation dans le système éducatif français. Nous savons

combien les notes pèsent sur les décisions d’orientation pour un passage en seconde générale

et technologique ou en seconde professionnelle par exemple, combien elles sont objets de

débat, et donc essentielles aux décisions prises en conseil de classe. Aussi, en tant que

conseillères d’orientation-psychologues en devenir, prochainement amenées à composer avec

les notes, dans notre travail de conseil auprès des élèves, d’accompagnement dans leurs

projets, nous sommes particulièrement sensibles à la façon dont les premiers concernés-les

élèves- perçoivent la situation.

En premier lieu, une revue de littérature présente les différents aspects que recouvre

l’évaluation, s’interroge sur les inégalités scolaires, puis à travers le concept de norme

d’internalité pose la question du sentiment de responsabilité de l’élève. Dans une partie

méthodologie, nous décrirons ensuite les outils utilisés pour répondre à nos questionnements.

Enfin, après avoir présenté nos principaux résultats, nous les discuterons dans une dernière

partie, qui ouvrira notre travail de recherche sur d’autres perspectives.

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

1 Revue de la littérature

1.1 L’évaluation

En juillet 2005, un rapport du ministère de l’Education Nationale fait un constat sévère

sur la situation de l’évaluation dans notre système éducatif : notes et examens sont une

obsession de l’école en France, sans que l’on puisse savoir réellement si les élèves ont acquis

des connaissances. En décembre 2005, ce sont les Cahiers Pédagogiques, qui posent à leur

tour un regard critique sur l’évaluation des élèves : où l’on parle de « culture de l’évaluation »

et de l’évaluation comme outil de l’exercice du pouvoir. La réflexion se poursuit en février

2006 dans le Monde de l’Education, portant le débat auprès des enseignants, autour de la

question suivante : « que valent les notes ? ».

Qu’est-ce qui fait qu’actuellement l’évaluation et la notation génèrent autant

d’interrogations ? Les nombreux débats reflètent-ils l’importance que notre société moderne

accorde à l’évaluation ? Parlent-ils des attentes de la société par rapport à l’évaluation ? Ainsi,

en fonction de ses besoins du moment et à venir, la société peut désirer que soient formées

une élite ou une main d’œuvre peu qualifiée par exemple. Aussi, la société attendrait une

certaine réussite chez certains, et une réussite moindre chez d’autres…

Pour commencer, tentons de comprendre ce que recouvre le concept d’évaluation.

1.1.1 L’évaluation : son histoire, ses concepts

Une conception ancienne (de 1890), mais toujours prégnante, assimile l’évaluation à la

notation. Cette conception a peu évolué jusqu’au début des années 1970. Entre 1970 et 1985,

l’ouverture du secondaire à de nouveaux publics entraîne une plus grande hétérogénéité des

classes. Les instructions ministérielles d’alors incitent à prendre en compte les connaissances,

les savoir-faire, les attitudes et les démarches. A partir de 1985, on ne parle plus de contrôle

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

mais d’évaluation. Les textes posent le principe d’une construction progressive des savoir-

faire, à partir de là l’évaluation va donc être utilisée comme un élément moteur et régulateur

des apprentissages. Dans la loi d’orientation sur l’éducation du 10 juillet 1989, l’évaluation

est associée à la procédure de conseil, d’aide et de suivi, on dépasse les notions

d’encouragement/réprobation.

Ainsi, l’usage du mot évaluation à l’école est récent, on peut distinguer deux périodes :

l’avant et l’après évaluation. Avant les années 1970, ce que l’on ne nommait pas encore

évaluation aboutissait à une notation et à un classement des élèves. Les mots utilisés étaient :

appréciation, contrôle, sanction, récompense. Après les années 1970, s’instaure peu à peu un

autre modèle qui va coexister avec le précédent, dans lequel on fait davantage place à de

nouvelles approches, et ceci au moment où on commence à utiliser le terme d’évaluation. Les

critères de jugement sont mieux explicités, les instruments d’évaluation plus adaptés à ce

qu’on veut évaluer, la rigueur méthodologique est plus grande.

En France, les études sur le système traditionnel de notation des élèves (notamment

pour les examens) sont appelées docimologie (de dokimè = épreuve) sur la proposition de H.

Piéron (1963). Elles se développent en 1956 à la demande du Conseil supérieur de la

recherche scientifique et du progrès technique et sont conduites par H. Piéron et M. Reuchlin.

La docimologie est perçue comme l’étude de la notation, c’est en réalité l’étude systématique

des examens. Elle a montré le caractère peu fiable de la notation en apportant les preuves de

différences selon les professeurs pour une même correction. Elle a démontré que les élèves

n’apprennent pas pour apprendre mais pour réussir un test.

J.C. Parisot explicite l’apparition de la docimologie dans un contexte de recherche

visant à rendre les examens plus fiables. En effet, alors que le système de l’Ancien Régime

liait naissance et fonction, Napoléon en 1808 permet de délivrer des grades universitaires par

examens, et de recruter les fonctionnaires par concours. Depuis lors, la préoccupation est de

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garantir la justice. « Si la docimologie ne met pas en cause les examens ni les concours et

qu’en cherchant à les améliorer, en quelque sorte, elle les consolide, c’est aussi parce que le

régime des examens et des concours (pourtant assez sélectif) mesurant ou organisant l’échec

d’une grande partie de la population scolaire a été cohérent jusqu’à une époque récente avec

les exigences du fonctionnement économique et les lois de la stratification sociale. » « Dans

une France des années 1950, personne ne parlait de l’exigence de mener 80% d’une classe

démographique à la fin d’un second cycle, court ou long ! » (Parisot cité par Bonniol & Vial,

2000, p69). Si l’on situe l’avènement de la docimologie dans les représentations de la

scientificité en cours à l’époque, on se rend compte que les caractéristiques de ces dernières

constituent le paradigme d’un modèle naturaliste :

o croyance en un déterminisme strict s’exprimant dans une causalité linéaire ;

o croyance positiviste et scientiste où la mise en évidence des lois universelles est

considérée comme un gage de maîtrise et de toute puissance pour l’homme ;

o croyance en un déterminisme biogénétique ou organique qui explique les différences

interindividuelles et les légitime ;

o fascination des techniques de quantification, du langage mathématique et des

statistiques en particulier.

La référence à la courbe de Gauss semble en découler, naturellement. « Si le modèle

gaussien a été adopté aussi facilement, c’est parce qu’il présente toutes les apparences de

l’évidence : symétrie harmonieuse, calculs simples, cohérence avec ou légitimation des idées

reçues sur la distribution des aptitudes, cohérence encore, avec les impératifs de la sélection

sociale et de choix des « meilleurs », habitudes mentales et socioculturelles… De plus, il se

vérifie expérimentalement sur des variables aléatoires et semble rendre compte d’une sorte de

« loi de la nature ». » (Parisot) A partir de là, la représentation commune selon laquelle il y a

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peu de gens très intelligents, beaucoup de gens dans la moyenne, et peu de gens peu

intelligents, paraît aller de soi. Aussi, on s’attend à ce que des candidats face à une même

épreuve obtiennent en très petit nombre de très mauvaises notes, pour beaucoup des notes

moyennes, et très peu des notes excellentes. De fait, si il est communément admis que des

variables biologiques et psychologiques suivent la courbe de Gauss, pour J.C. Parisot cela est

difficilement transposable à la pédagogie. Il remet ainsi en cause le fait que, pour la

docimologie traditionnelle, une notation juste doit se conformer à la courbe de Gauss. « La

docimologie, en faisant ou laissant croire qu’une bonne évaluation était une bonne

examination et devait se traduire par une bonne notation (conforme à la loi normale réduite), a

contribué à installer de manière occulte et tenace une conception où l’éducabilité est

restreinte, l’efficacité pédagogique faible et où l’idéologie des dons plus ou moins édulcorée

se corrobore et perdure. ».

1.1.2 L’évaluation et le jugement social

Pour M. Barlow (2003), l’évaluation apparaît comme un jugement. Il n’est pas neutre

d’utiliser le nombre pour l’évaluation scolaire. Malgré sa prétention d’objectivité, le nombre

est fortement connoté affectivement. Dans la représentation des parents et des élèves : tout ce

qui n’est pas noté n’a pas de valeur. Un statut exagéré de la note est exigé à la fois par les

élèves, les parents, les enseignants et l’administration. La note apparaît plutôt comme une

sanction que comme un moyen pour l’élève d’appréhender ses carences et ses progrès.

« La notation stimule les élèves, les encourage et distingue les meilleurs. À l’inverse,

elle décourage, dégoûte de la matière dans laquelle les résultats sont mauvais et fait perdre

l’estime de soi. Elle touche bien souvent la personne plus que ses acquis. Autre faiblesse, elle

rend compte d’un état plus qu’elle n’indique un but ou un chemin. La note sert peu les progrès

de l’élève. » (cf., Rapport MEN, 2005, p 45)

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Comme le souligne G. Guingouain (2001) évaluer c’est attribuer une valeur. Cela

suppose un jugement de faits vérifiables (il ou elle a répondu correctement aux questions

posées) et un jugement de valeur (c’est un bon élève ou un enfant intelligent).

Le jugement est historiquement et socialement déterminé, il s’ancre dans des croyances

collectives qui ont toujours de bonnes raisons d’être. D’où le choix d’aborder l’évaluation en

terme de conduites sociales.

Dans ses usages les plus courants, l’évaluation est décrite comme un ensemble de

connaissances et de techniques qui permettent de répondre à toute une série de demandes

sociales d’une société dont la sélection est l’assise, via examens, diplômes… Elle est donc un

rouage essentiel pour assurer la stabilité du système social, elle est présente dans tout acte de

perception, d’orientation, d’affectation ou de promotion. Elle est surtout caractérisée par son

aspect techniciste, dans le but de légitimer le diagnostic posé sur autrui et les décisions qui

engagent son avenir.

Dans notre quotidien, nous nous comportons plus souvent comme des juges du

comportement d’autrui que comme des scientifiques cherchant à éprouver les caractéristiques

complexes du comportement d’autrui. Le professionnel de l’évaluation n’échappe pas à un tel

comportement social. Il juge plus qu’il ne mesure. L’activité évaluative scolaire n’est ainsi

pas foncièrement différente du jugement quotidien qu’on porte sur autrui. Seul l’objet du

jugement change. L’évaluation va ici consister à juger de la valeur d’une personne en

référence à l’utilité des comportements ou des résultats qu’elle nous renvoie. Si l’activité

d’évaluation ne se réduit pas à une simple mesure des habiletés individuelles, la notion de

jugement social semble plus appropriée. Cette idée de jugement social est loin d’être récente,

les psychologues sociaux s’y intéressent depuis plus de 50 ans, depuis la parution de « The

psychology of interpersonal relation » par Heider en 1958. Dans cet ouvrage, l’auteur

développe la notion d’attribution qui implique que l’on met en place des processus qui

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permettent de donner du sens aux événements auxquels nous sommes confrontés. D’autres

psychologues français ont situé les pratiques du jugement dans leur contexte social et

institutionnel. C’est le cas de Beauvois, dès 1976 qui défend l’idée selon laquelle les pratiques

évaluatives sont constitutives de la vie sociale et des structures sociales. (Beauvois J.-L. et

Dubois N. OSP n°3 de 2001).

1.1.3 L’évaluation des élèves dans le système éducatif

M. Barlow (2003) résume ainsi les principales fonctions de l’évaluation :

« […] l’évaluation peut avoir des fonctions très différentes : tester le niveau de connaissances

ou de savoir-faire de l’élève, repérer ses capacités ou ses difficultés, contrôler ses progrès,

noter et classer ses prestations et celles de ses pairs, décerner un diplôme, prévoir la suite de

la formation… ».

Depuis la loi de 1989, la politique du ministère de l’Education Nationale est volontariste

et ambitionne non seulement d’évaluer les connaissances mais l’ensemble des compétences

cognitives, méthodologiques et manipulatoires. De cette évolution, on peut distinguer deux

champs à évaluer et deux méthodologies d’évaluation :

• L’évaluation normative : Elle porte sur les acquis ; elle se présente sous la forme d’un

test dont les résultats obtenus sont confrontés aux normes demandées. Elle s’intéresse

aux traductions de compétences mesurées à l’aide de critères d’évaluation (ex :

évaluations nationales de CE2, 6e et seconde).

• L’évaluation formative : Elle porte sur les apprentissages ; elle a pour fonction

d’accompagner les apprentissages pour les améliorer. Elle s’intéresse aux processus

cognitifs ou outils cognitifs. Aussi, elle s’effectue en cours d’apprentissage et apporte

une information sur les acquis en construction. Elle permet à l’élève de prendre

conscience de ses propres progrès et erreurs. Pour apprendre, il doit essayer,

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s’engager, prendre des risques, ses erreurs ne sont pas considérées comme des fautes,

traitées et analysées, elles sont sources de progrès.

Le rôle des examens dans la pédagogie traditionnelle est de sélectionner des élèves ou

des étudiants. Le but est de classer des individus dans une distribution statistique où les notes

élevées sont exceptionnelles et minoritaires (cf. courbe de Gauss). Les épreuves sont

construites pour aboutir à un tel classement. Or, si la référence à la courbe de Gauss est

recommandée pour un concours de sélection, elle n’est pas adaptée à toute évaluation.

Pour C. Guillon (2004), Inspecteur Information et Orientation, l’évaluation normative

« loin de chercher à différencier finement les élèves ou les candidats, […] entend déterminer

ceux qui s’éloignent et ceux qui s’approchent de la norme exigée ». Les évaluations

sommative et normative sont centrées sur le groupe, tandis que l’évaluation formative, à base

d’autocorrection et d’autoévaluation, se définit par rapport à l’individu.

Le but de l’évaluation normative est de pouvoir situer les élèves d’une classe les uns par

rapport aux autres, plutôt que par rapport à un objectif bien défini de maîtrise des savoirs et

savoir faire. Aussi, la distribution des notes s’apparente à la courbe de Gauss. L’évaluation

normative est largement dénoncée dans la littérature pédagogique. Selon M. Crahay

(1996,1997), ce type d’évaluation est en lien direct avec l’échec scolaire. L’auteur prône le

développement de l’évaluation formative pour y remédier.

1.1.4 L’évaluation et ses biais

La notion de biais renvoie à la notion d’objectivité de la notation qui pour J. Cardinet

(1992) n’existe pas : la notion de note juste n’a pas d’intérêt, car on ne pourra jamais

neutraliser tous les biais possibles. Parler d’effet perturbateur c’est alors chercher à expliquer

l’écart entre la note donnée et la note méritée. (Ex : effet de halo; effet d’ordre et de contraste;

effet de tendance centrale, etc...).

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Certains biais semblent particulièrement intéressants par rapport à notre sujet d’étude :

• L’effet Pygmalion : Il s’agit de l’effet que la prédiction d'un évènement ou la

croyance de sa venue chez un sujet impliqué dans la situation exerce sur la réalisation

de la prédiction. Dans le cadre scolaire, l’évaluation des compétences est une situation

favorable à son développement. La performance du comportement d'un élève prendra

vraisemblablement forme par rapport aux attentes du professeur. Ainsi, si un

professeur considère un élève comme médiocre, il aura tendance à calquer son

comportement envers l'élève sur l'image médiocre qu'il s'en fait. L'élève va alors se

rendre compte qu'on attend peu de lui et réduira ses efforts, ce qui à terme donnera

raison au professeur. Aussi, en pédagogie, effectuer des hypothèses sur le devenir

scolaire d'un élève et les voir effectivement se réaliser, a pris le nom d'effet Pygmalion

ou effet Rosenthal suite aux travaux de Rosenthal et Jacobson (1968). D’autres

travaux, par la suite ont pu contester les conclusions de Rosenthal ; il reste néanmoins

acquis que les attentes de l'éducateur peuvent exercer une influence considérable sur

son comportement envers l'élève, en particulier, la nature et la fréquence des

renforcements varient selon le préjugé favorable ou défavorable du professeur.

• La loi de Posthumus : Selon le nom du chercheur qui l’a mise en évidence en 1947, il

s’agit d’un ajustement des exigences des enseignants afin de retrouver toujours un

effet gaussien dans la distribution des notes. Elle peut être définie ainsi :

o Quelle que soit la distribution des compétences en début d’année, la

distribution des notes épouse à la fin de l’année une forme gaussienne.

o L’enseignant est influencé par sa classe de l’année précédente pour conserver

son intériorisation de la courbe gaussienne.

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

L’effet Posthumus est une conséquence de l’évaluation normative : les enseignants

évaluent les performances des élèves en les comparant les unes aux autres. Ainsi,

pour M. Crahay (1996) : « Le jeu de l’évaluation -en tous cas de l’évaluation

normative- consiste donc à concevoir l’épreuve non pas de telle sorte qu’elle couvre

les aspects essentiels de la matière qui a été enseignée, mais de telle sorte qu’une

faible proportion réussisse la majorité des questions, qu’une proportion plus grande

réussisse un peu plus de la moitié des questions et qu’une faible proportion échoue à

une majorité de questions. »

• La Constante Macabre : cette notion élargit celle de loi de Posthumus. Elle est

présentée en détail dans un ouvrage d’A. Antibi (2003), enseignant de mathématiques

et chercheur en sciences de l’éducation, qui s’appuie sur des témoignages

d’enseignants essentiellement (500). La Constante Macabre renvoie au fait que dans

une situation d’évaluation, on retrouve toujours une proportion d’élèves en échec.

Ainsi, lorsqu’un enseignant prépare un contrôle, il fait en sorte plus ou moins

consciemment que les notes soient étalées (des bonnes, des moyennes, des

mauvaises) ; ainsi, il y a une constante dans la manière d’évaluer les élèves : la

proportion de mauvaises notes. C’est un système d’évaluation qualifié d’injuste par

l’auteur, et dans lequel il s’agit de classer les élèves plutôt que d’évaluer réellement

leurs connaissances. La principale justification apportée à la Constante Macabre est

de la relier à la courbe de Gauss. Il serait en quelque sorte normal, naturel, qu’il y ait

toujours une certaine proportion d’élèves en dessous de 10/20, une autre au-dessus et

une proportion à la moyenne. Selon, A. Antibi, la Constante Macabre existe parce que

la société demande au système éducatif de sélectionner, élèves et enseignants en sont

victimes. Elle se justifierait par la pression de la société sur le système éducatif qui

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oblige à entrer dans les normes. Pour les enseignants, il serait plus sécurisant d’être

dans les normes que d’en sortir : un professeur serait jugé laxiste, trop gentil, voire

incompétent, si toutes ses notes étaient supérieures à 12 par exemple. Néanmoins, la

situation est paradoxale, les enseignants reconnaissent l’existence de la Constante

Macabre (sélection), mais disent que leur rôle est de former, non de sélectionner.

D’après les témoignages recueillis, une répartition de type 1/3, 1/3, 1/3 est vécue

comme naturelle. Pourtant, deux points montrent que la Constante Macabre n’est pas

un phénomène inéluctable :

elle n’existe pas dans toutes les matières, ni dans toutes les filières ; il peut même

exister une “constante anti-macabre” dans certains enseignements moins prisés ou

optionnels (ex : allemand), qui seraient désertés si les notes étaient trop basses.

elle n’existe pas dans tous les pays (par exemple aux Etats-Unis, les élèves sont

davantage encouragés).

A. Antibi pose la question de la fabrication de l’échec scolaire par le système éducatif

lui-même. Il dénonce ce “tiers de mauvaises notes” qui constitue la Constante

Macabre, et qui par voie de conséquence décourage et désespère tous les ans un tiers

au moins de l’effectif scolaire. Ainsi, pour lui, malgré les programmes de lutte contre

l’échec scolaire, celui-ci ne peut disparaître.

Nous avons vu que depuis longtemps évaluation et notation semblent ne faire qu’un et

que la référence à la loi normale semble acquise pour tout un chacun. L’étude des biais de

l’évaluation tendrait à désigner le système éducatif et plus particulièrement l’enseignant-en

position d’évaluateur- comme responsable de leur apparition. A. Antibi va encore plus loin

lorsqu’il parle de la fabrication de l’échec scolaire par le système éducatif. Cette vision n’est-

elle pas un peu simplificatrice ? La question de l’échec scolaire est probablement plus

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

complexe, se référant à de multiples facteurs. En outre, A. Antibi présente le phénomène de la

Constante Macabre comme injuste, mais est-ce que les enseignants et les élèves le trouvent si

injuste que cela ? Que penser du fait que la situation ne change pas malgré les nombreux

travaux sur la notation, ses biais etc…? Peut-être est-elle prise dans un contexte plus large où

ce pourcentage d’élève en échec est considéré comme normal. Cette norme n’aurait-elle pas à

voir avec des représentations fortement ancrées dans la société autour du débat inné/acquis

par exemple ? Après tout, les élèves trouvent-ils si anormal que cela qu’il y ait des inégalités

entre eux dans les notations ?

1.2 Une norme des inégalités scolaires

Les inégalités scolaires peuvent facilement être légitimées, comme nous l’explique J.P.

Terrail (2002) : « Un élève médiocre qui s’acharne à la tâche pourra devenir un élève moyen,

un bon élève qui ne se fatigue pas trop reste un bon élève auquel on reprochera de gâcher ses

possibilités. Plus fondamentalement qu’à des investissements scolaires différents, le

classement des élèves semble ainsi renvoyer, dans l’imaginaire enseignant, à l’existence d’une

inégalité dans la répartition des ressources intellectuelles. » Sur la base d’un tel postulat,

retrouver systématiquement une certaine proportion d’élèves en échec scolaire apparaît

inévitable, une sorte de loi naturelle expliquant cette inégalité. J.P Terrail souligne la

prégnance de cette conception dans le monde enseignant.

Or, nous sommes en droit de nous poser la question : en quoi l’inégalité de réussite

entre les élèves peut être considérée comme naturelle, normale ? Qu’est ce qui permet de

justifier cette position ?

Revue de la littérature - 12 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

1.2.1 De l’idéologie du don au handicap socioculturel

Face au « besoin » d’expliquer « cette inégale répartition de l’intelligence »,

l’explication la plus simple, la plus rassurante et qui en fait un phénomène purement

biologique sur lequel l’être humain ne peut rien renvoie à l’idéologie du don selon Terrail.

Cette position longtemps dominante est remise en cause par trois types d’argumentation à

partir du début des années soixante :

o une argumentation psychologique : « les dons n’existent pas, ils sont le produit de

chaque histoire individuelle ».

o une argumentation biologique : les progrès sur la connaissance du fonctionnement du

cerveau humain ont montré l’importance de l’influence de nos interactions avec

l’environnement.

o une argumentation sociologique : qui établit un lien entre l’origine sociale et la

réussite scolaire; l’interprétation proposée par P. Bourdieu et J.-C. Passeron (Les

Héritiers, 1964) souligne l’influence essentielle de la transmission de la culture

familiale.

Aussi, on observe à partir de la deuxième moitié des années soixante un recul en

apparence de l’invocation des dons au profit de la montée en puissance de la thèse du

handicap socioculturel qui attribue l’échec scolaire au manque ou à l’insuffisance d’héritage

culturel familial. Selon Terrail, cette explication a largement imprégné depuis les

représentations et le discours des enseignants. « Des dons au handicap socioculturel on

observera que le registre ultime de l’explication a changé, mais non sa structure : les

inégalités scolaires sont toujours données comme une traduction directe de l’inégale

distribution des « aptitudes » entre les élèves. »

Revue de la littérature - 13 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

1.2.2 La culture de l’échec

M. Crahay (1996) appelle culture de l’échec le fait qu’un enseignant « préférera » faire

doubler un élève dont il juge le niveau de performance à la limite de ce qui serait exigé plutôt

que de lui permettre de suivre l’enseignement d’un collègue enseignant dans le niveau

supérieur qui pourrait lui reprocher d’être un « mauvais prof » si l’élève échouait.

A travers cette culture de l’échec, on devine les enjeux sociaux de l’évaluation scolaire :

« L’évaluation des élèves est, pour l’enseignant, bien plus qu’une opération de mesure.

L’enjeu est pour lui essentiel : il joue sa crédibilité face à ses élèves et à ses collègues. »

(Crahay, 1996). C’est un véritable dilemme, pour l’enseignant, partagé entre la crainte de

paraître laxiste à ses élèves s’il a trop peu d’exigences (quant au niveau de difficulté de

l’épreuve), et celle de susciter leur découragement, s’il en a trop. Selon, M. Crahay, dans la

représentation sociale dominante, le « bon professeur » est celui considéré comme sévère.

Terrail souligne la difficulté pour les enseignants d’échapper à l’ambivalence du double

rôle attendu d’eux : la formation et la sélection. S’appuyant sur les travaux de Crahay, Terrail

insiste sur le fait que le redoublement est solidaire de la culture de l’échec : « [le

redoublement] confirme le caractère inévitable d’une certaine proportion d’échecs ; et il

attribue leur responsabilité exclusive aux élèves concernés, moins mûrs, plus lents, etc. ».

1.2.3 Réussite scolaire et reproduction sociale

Poursuivant sa réflexion concernant la lutte contre l’échec scolaire, M. Crahay (1996) se

réfère à P. Perrenoud, pour qui l’évaluation contribue à la fonction de reproduction sociale par

la fabrication de l’excellence scolaire. P. Perrenoud part du modèle de la reproduction des

inégalités sociales de Bourdieu et Passeron. Pour ces derniers, le système scolaire contribue

directement à reproduire l’ordre social de la société entière en maintenant et légitimant la

position sociale d’origine. Aussi, en ignorant les inégalités sociales, on s’autorise à considérer

Revue de la littérature - 14 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

comme naturelles les inégalités en matière de réussite scolaire, ainsi les êtres humains seraient

inégalement « dotés » (idéologie du don).

Pour P. Perrenoud, l’école assume une fonction qui est d’instituer des normes

d’excellence et de classer les individus en fonction de ces normes, d’où la création de

hiérarchies. A partir de là découlent les pratiques de l’évaluation normative qui visent à

comparer et classer les élèves. Les enseignants produisent un taux moyen d’échec,

indépendamment du niveau effectif de leurs élèves, en manipulant plus ou moins

consciemment leurs exigences.

« Se croyant tenus de produire une hiérarchisation des élèves, les enseignants sont

inéluctablement amenés à privilégier des questions discriminatives et à créer pour chaque

épreuve une échelle souvent artificielle de valeurs qui, idéalement, débouchera sur une

distribution gaussienne des notes » M. Crahay (1996). Ainsi l’évaluation en elle-même

apparaît souvent peu équitable et peut engendrer des échecs scolaires.

1.2.4 Réussite scolaire et intelligence

Comme on l’a vu précédemment avec l’idéologie du don, pour un certain courant de

pensée, la réussite scolaire dépend de l’intelligence : il y aurait un déterminisme biologique de

l’intelligence, et tous les individus n’auraient pas le même potentiel. Dans ce cadre, la

fonction de l’école est de sélectionner les meilleurs éléments (vision élitiste). Si cette vision

n’a quasiment plus de crédit aujourd’hui dans la communauté scientifique, nous allons voir

qu’elle est largement partagée par les enseignants et les élèves eux mêmes.

Communément, on trouve deux représentations opposées de l’intelligence. Pour l’une,

l’intelligence est une entité stable, fixe, qui n’évolue pas au cours de la vie. Elle relève d’une

école de psychologie ancienne qui a donné naissance aux tests de Q.I. De cette conception

découle l’idéologie du don dénoncée par P. Bourdieu dès 1966. Pour l’autre, l’intelligence est

Revue de la littérature - 15 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

une caractéristique mobile ou évolutive ; l’intelligence est la résultante d’un ensemble de

connaissances et de stratégies cognitives et métacognitives, susceptibles de s’enrichir et

d’évoluer tout au long de la vie. Cette conception s’inscrit dans une psychologie cognitive

contemporaine.

Des études effectuées par G. Mugny et F. Carugati en 1985 (Doise, Mugny 1997) ont

montré que de nombreux enseignants adhèrent à une conception stable de l’intelligence.

Ainsi, ils ont mis en évidence deux aspects fondamentaux dans les croyances populaires à

propos de l’intelligence. Le premier montre que l’expérience vécue des différences

d’intelligence va pousser les individus à avoir une théorie des inégalités naturelles plus

marquée et une certaine idéologie du don. En effet, les individus vivant ces différences (entre

leurs enfants, entre ceux des autres pour les parents, entre leurs élèves pour les enseignants)

vont promouvoir un certain élitisme discriminateur qui leur apparaîtra comme légitime et

naturel alors qu’aucun modèle scientifique ne le valide. Ici simplement, c’est l’effet qui est

transformé en cause. Le deuxième aspect intervenant dans une telle représentation de

l’intelligence est que cette idéologie du don serait d’autant plus développée qu’il est bien

difficile d’expliquer autrement les disparités entre personnes, surtout entre élèves. On cherche

ici à rationaliser, en attribuant des causes à des expériences sociales inexplicables.

En outre, de nombreux travaux dans les années 70 et 80 ont mis en évidence que les

élèves développent une conception stable de l’intelligence, dès le début de l’école primaire.

M. Crahay (1996) résume ainsi les travaux des chercheurs sur la représentation de

l’intelligence chez l’élève : « si l’élève est convaincu de la stabilité de l’intelligence ou se

trouve face à un enseignant partageant cette conception, toute réponse ou toute démarche est,

dans ce contexte, une manifestation d’intelligence ou de non intelligence. Le jugement de

l’enseignant est une confirmation ou une infirmation d’une caractéristique personnelle.

Autrement dit, l’enjeu est considérable : si l’élève réussit, il peut conclure à son intelligence ;

Revue de la littérature - 16 -

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s’il échoue, il doit conclure à une incapacité définitive. A l’opposé, si l’élève conçoit

l’intelligence comme une caractéristique évolutive ou s’il est face à un enseignant qui a cette

conception, l’enjeu de ces démarches est d’une toute autre nature : une erreur n’est pas un

signe d’incompétence intrinsèque à l’individu. ».

« Lorsque l’enseignement est pensé dans le cadre de l’idéologie de l’excellence

dénoncée par P. Perrenoud, la distribution gaussienne des performances des élèves et l’échec

de quelques uns au sein de chaque classe devient normal. L’effet Posthumus ne serait donc

qu’une manifestation d’un état d’esprit plus général. » (Crahay, 1996). Ainsi, des construits

sociaux apparaissent relever de l’ordre naturel des choses et renvoient finalement à une norme

plus générale des inégalités scolaires largement intégrée par les uns et les autres.

« Des deux missions dévolues aux maîtres de l’école unique : former et sélectionner,

[de nombreuses recherches sociologiques] ont montré, à travers l’accumulation

d’investigations internationales diversifiées, l’étendue de l’emprise de la seconde, et combien

les contraintes de la sélection étaient acceptées, intériorisées, légitimées, au point d’être

vécues comme des contraintes naturelles […]. » (Terrail, 2002). Nous voyons ici comment

l’inégalité des élèves face à la réussite paraît normale au plus grand nombre, alors que cette

norme repose notamment sur des représentations de l’intelligence, par exemple, infondées

scientifiquement. Ces représentations sociales ont une première fonction de maîtrise du

monde qui nous entoure, assurer sa cohérence, et aussi une fonction de préservation de

l’identité des individus et groupes porteurs de ces représentations. Là, l’idéologie du don peut

permettre à ceux qui y recourent de les libérer de leur responsabilité à l’égard des enfants,

ainsi que d’êtres cohérents avec les normes et valeurs de la société. L’enseignant, imbriqué

dans le système éducatif, éprouve le besoin de justifier et de rationaliser la pratique

d’évaluation en cours dans ce système. « Toute pratique surtout si elle est récurrente a besoin

d’être légitimée, et d’abord aux propres yeux de son auteur. Puisque évaluer c’est classer le

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

long d’une échelle hiérarchique, si l’on classe les élèves c’est qu’ils peuvent l’être, c’est qu’il

est dans l’ordre des choses que certains soient excellents, d’autres bons, moyens, faibles ou

médiocres. » (Terrail, 2002).

Et du côté des élèves ? Ils sont, tout comme les enseignants, au cœur du système

éducatif, de ses modalités d’évaluation. Ils sont également touchés par les mêmes normes

véhiculées par la société. Aussi, ne vont-ils pas trouver eux aussi normal que les élèves ne

soient pas égaux devant la réussite, et qu’il y ait toujours une proportion d’élèves en échec ?

A ce stade de notre réflexion, il nous semble que le point de vue des théoriciens de

l’attribution, et notamment les travaux sur la norme d’internalité devraient nous permettre

d’éclairer le rapport des élèves à la norme des inégalités scolaires. En effet, dans un contexte

plus large où la norme d’internalité renvoie chacun à son propre niveau de responsabilité

quant à sa réussite ou à son échec, la réussite ne correspondrait-elle pas à quelque chose de

valorisé dans le jugement social ?

1.3 L’inférence causale en matière d’événements psychologiques.

Souvent, dans la vie quotidienne, nous éprouvons le besoin de trouver des

explications à ce qui se passe, à ce qui s’est passé, et même à ce qui pourrait se passer demain.

Deux courants se sont intéressés à cette inférence causale en matière d’événements

psychologiques : les théoriciens de l’attribution et ceux du Locus Of Control (LOC).

Les pionniers du premier courant sont Heider (1958), Jones et Davis (1965) et

Kelley (1967). Leurs recherches ont porté sur la description des processus par lesquels les

individus expliquent et interprètent les conduites et les états émotionnels, qu’il s’agisse des

leurs ou de ceux des autres.

Revue de la littérature - 18 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

Les précurseurs du second courant sont Phares (1968), Rotter (1966), et Lefcourt

(1966) qui ont étudié une variable générale de personnalité. Elle concerne le degré de relation

causale que les individus établissent entre leurs conduites et/ou leurs caractéristiques

personnelles : traits, aptitudes, attitudes et les renforcements positifs et négatifs qu’ils

reçoivent, c’est-à-dire ce qui leur arrive ou doit leur arriver dans la vie.

Bien que distincts à l’origine, les concepts d’attribution et de LOC ont par la suite

été rapprochés, voire confondus. Ainsi, Deschamps J.-C. et Clémence A. (1990) ont assimilé

les deux concepts. A l’opposé, d’autres auteurs tiennent à maintenir la distinction originelle.

Pour eux, le concept d’attribution renvoie à des explications, des jugements portés a

posteriori, alors que le concept de LOC concerne des expectations, des attentes, des croyances

de contrôle formulées a priori. Si la délimitation entre ces différents domaines est difficile, on

peut cependant faire le constat suivant : on retrouve la surestimation du rôle de l’acteur, un

déterminisme personnologique tant chez les théoriciens de l’attribution que chez les

chercheurs étudiant le LOC.

Chez les théoriciens de l’attribution, cette tendance à négliger la causalité

impersonnelle et à attribuer les actes aux dispositions ou intentions des acteurs a été de

nombreuses fois vérifiée, c’est « l’erreur fondamentale » (Ross, 1977 ; Beauvois, 1984).

En matière de LOC, on parle de croyances en un contrôle interne des renforcements

par rapport aux croyances en un contrôle externe. Cela n’a jamais été considéré comme une

erreur, au contraire, elle apparaît bien comme une caractéristique associée à ce qu’il y a de

mieux dans notre culture, une sorte de label que l’on se doit d’acquérir. Lorsqu’il rend compte

de ses conduites ou de ce qui lui arrive, l’individu témoigne d’un ensemble de croyances

appuyées sur ce fondement : le refus de l’individu d’admettre que ses comportements puissent

être contrôlés par des influences externes et que le hasard puisse intervenir dans ce qui lui

arrive. On peut alors parler de surestimation massive du rôle de l’acteur. Seule exception à

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cette règle, un des aspects du biais d’autocomplaisance qui est d’attribuer ses insuccès à des

causes externes.

Pour Beauvois (1984), l’erreur fondamentale et la prédominance des explications

internes font intervenir un même biais d’internalité : la surestimation du poids de l’acteur

comme facteur causal. Cet auteur a en outre émis l’hypothèse selon laquelle ces phénomènes

pouvaient être en fait l’expression d’une norme très générale : la norme d’internalité. Celle-ci

peut être définie comme la valorisation socialement apprise des explications des événements

psychologiques qui accentuent le poids de l’acteur comme facteur causal.

1.4 La norme d’internalité et les pratiques évaluatives

Lorsqu’ on analyse les discours que tiennent les enseignants, formateurs, travailleurs

sociaux, on s’aperçoit qu’ils font plus souvent référence à une idéologie de la responsabilité

individuelle dont les valeurs sont l’autonomie, l’individuation… On veut faire prendre

conscience aux « élèves » qu’il existe un lien entre ce qu’ils font, ce qui leur arrive et ce qu’ils

sont (bons résultats, bon travail, bon élève). Ainsi la valorisation des explications internes par

les enseignants s’expliquerait par leur fonction d’évaluateur. (Beauvois, 1976 ; 1984 et Le

Poultier, 1986). En effet, cette fonction d’évaluateur exige que celui qui évalue croie :

1) que ce que font les gens est le reflet de ce qu’ils sont et doit leur être attribué.

2) que ce qui doit leur arriver dans l’institution est la conséquence de ce qu’ils font, donc

de ce qu’ils sont.

Il semble donc bien que la valorisation des explications internes trouve une

rationalité dans l’exercice des pratiques évaluatives. Le statut d’évaluateur de l’enseignant fait

qu’il est représentant du fonctionnement social et doit respecter la logique et les contraintes de

celui-ci, et privilégier les sujets conformes aux normes du système, c’est-à-dire internes, et

cela quelles que soient ses préférences personnelles. L’évaluateur est, selon Dubois et

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

Revue de la littérature - 21 -

Beauvois (1994) l’agent soumis d’un système social hiérarchisé qui lui demande de

hiérarchiser les sujets qu’il doit évaluer pour participer à la reproduction de ce système social.

Placés dans la situation d’évaluateur, les sujets doivent repérer les gens normatifs, utiles. A la

question pourquoi les sujets perçus comme internes sont survalorisés on peut répondre que

cela semble être le résultat d’un comportement qui obéit à une prescription de rôle dès lors

que ce rôle est accepté.

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

2 Problématique et hypothèses

2.1 Problématique

Nous allons voir à présent ce qu’apportent ces différents éléments théoriques à notre

questionnement sur la façon dont les élèves perçoivent l’évaluation.

Nous avons pris en compte l’évaluation dans sa dimension sociale. En effet,

l’évaluation a une place centrale dans le système éducatif car elle contribue à la sélection des

élèves, toute décision d’orientation étant basée sur les notes. De ce fait, le poids des notes sera

différent selon les matières, certaines considérées comme plus sélectives, conduisant à des

filières plus prestigieuses (ex : les maths), d’autres plus secondaires, non déterminantes pour

l’orientation, ou le choix professionnel (ex : les arts plastiques, la musique).

Nous avons également considéré la part de jugement social dans l’évaluation. En

effet, évaluer c’est juger, c’est attribuer une valeur, et au-delà de la note, c’est porter un

jugement sur la personne. Il s’agit d’un jugement social légitimé par la société qui valorise la

sélection des individus (examens, concours…).

Il nous est apparu que les différents acteurs du système éducatif intègrent une norme

des inégalités scolaires. En effet, enseignants et élèves considèrent comme normal que

certains réussissent et d’autre échouent, l’attribuant notamment à une inégale répartition de

l’intelligence.

Par ailleurs, nous avons pu constater, avec la norme d’internalité, que la vision du

monde communément partagée renvoie au fait que l’individu est seul responsable de ce qui

lui arrive. Ce type d’explication permet en quelque sorte de décharger l’individu du poids de

sa responsabilité et permet plus généralement la cohérence avec les normes et valeurs

dispensées dans la société. Ainsi, cela renvoie plus largement à une vision du monde

communément partagée dans la société actuelle, où le fait que tout le monde ne réussisse pas

Problématique et hypothèses - 22 -

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sur le plan scolaire, ou pour s’insérer dans le monde du travail, ou encore à s’épanouir dans sa

vie personnelle est intégré comme une norme.

A. Antibi dans son ouvrage pose un constat : il pointe les enseignants comme

responsables d’une inégale répartition des notes, considérant l’évaluation « injuste »

puisqu’elle conserve toujours un pourcentage d’échec. Or a priori les élèves devraient avoir

intégré à la fois le rôle social de la notation, qui est de sélectionner, et la norme des inégalités

scolaires. Quel sera leur positionnement par rapport à différents types d’explications (rôles

joués par l’élève, l’école ou l’environnement socio familial) ? En outre, le poids de la norme

d’internalité ne devrait-il pas amener les élèves à valoriser un système explicatif renvoyant à

la responsabilité de l’acteur ?

2.2 Hypothèses

Hypothèse 1 : Nous nous attendons à ce que les jugements portés par les sujets sur

l’évaluation soient différents selon la matière.

Hypothèse 2 : Nous nous attendons à ce que les jugements portés par les sujets sur

l’évaluation soient différents en fonction de la situation proposée (échec, normale, réussite).

Hypothèse 3 : Est ce que les élèves vont reconnaître, comme le propose A. Antibi

dans son ouvrage, que les résultats des évaluations n’est pas le seul fait de l’élève mais répond

à un système plus complexe (rôle du professeur, de l’école en général…) ?

Hypothèse 4 : Nous nous attendons à ce que la manière de se positionner sur les

explications de l’évaluation soit liée à des variables socio démographiques (études,

redoublement, genre…) voire à l’internalité.

Hypothèse 5 : Nous nous attendons à ce qu’il y ait une explication multifactorielle

de la réussite, et que les différentes dimensions soient plus ou moins valorisées selon les

caractéristiques des individus (genre, internalité).

Problématique et hypothèses - 23 -

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Méthode - 24 -

3 Méthode

Nous avons choisi d’appréhender une situation sociale d’évaluation par le biais d’un

questionnaire. Celui-ci porte sur des situations évaluatives renvoyant à des matières

socialement marquées et aux résultats produits par les élèves d’une classe.

3.1 Participants

Nous avons fait passer nos questionnaires auprès de 589 élèves issus de 20 classes

de seconde générale et technologique d’un même lycée.

Le milieu socio-économique d’appartenance n’est pas un facteur contrôlé, mais

l’établissement accueille une population diversifiée dans laquelle tous les milieux socio

économiques sont relativement également représentés (cf. Annexe).

Nous avons choisi de faire passer notre questionnaire à des élèves de seconde pour

plusieurs raisons (vérifiées au cours du pré test, cf. 3.3 Procédure de passation).

• l’enjeu, concernant l’orientation, est moindre qu’en 3ème, ils devraient donc être plus

détachés que des élèves de 3ème par rapport à la problématique de l’évaluation liée à la

sélection, et répondre de façon moins contrôlée.

• les situations présentées se réfèrent à des élèves de 3ème pour les 3 premières questions,

la situation devrait leur paraître proche mais pas trop, ils peuvent déjà avoir du recul et

avoir moins l’impression de parler d’eux que si on évoquait directement leur situation

d’élève de seconde.

• ils sont a priori suffisamment matures pour répondre à l’échelle d’internalité choisie.

Ainsi, on peut penser que les élèves ont répondu aux questions de manière

spontanée, que le sujet du questionnaire les touchent suffisamment pour répondre facilement

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et que la distance entre les questions posées et leur situation personnelle est assez grande pour

limiter les mécanismes de défense.

3.2 Construction du questionnaire

Nous avons choisi d’opérationnaliser notre problématique en faisant passer deux

types de questionnaire à des élèves de seconde générale et technologique. Les deux versions

des questionnaires ne diffèrent que sur le point suivant (Partie 1) : dans un cas on dit que les

notes ont été obtenues à une évaluation de mathématiques (qu’on appelle version Maths) dans

l’autre, on dit que les notes ont été obtenues à une évaluation d’arts plastiques (qu’on appelle

version Arts plastiques), ces matières ayant une valeur sociale différente. Ainsi, ces deux

versions de questionnaire permettent de tester un premier facteur : la discipline sur laquelle

porte l’évaluation : Version 1 : Mathématiques versus Version 2 : Arts plastiques (cf.

Annexe).

Sur la première page du questionnaire figure une brève présentation de notre

recherche, ainsi qu’un exemple de question avec une échelle afin que les sujets puissent se

familiariser avec les modalités de réponses (cf. Annexe).

Le questionnaire est composé de 4 parties :

• PARTIE 1 : dans cette première partie, les sujets doivent répondre à 12 propositions

en fonction d’un scénario. Nous avons proposé dans cette partie, 3 scénarios différents

portant sur une situation d’évaluation en classe de 3ème.

Les scénarios ne varient que par la distribution des notes obtenues à l’évaluation.

o Premier scénario (Question 1): La situation présentée se réfère directement à la

courbe de Gauss. La note la plus basse est 4, la plus haute 18 et la moyenne de la

classe est 10.

Méthode - 25 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

o Deuxième scénario (Question 2): La situation évoque une évaluation où tous les

élèves réussissent. La note la plus basse est 12, la plus haute 20 et la moyenne de

la classe est 15.

o Troisième scénario (Question 3): La situation évoque une évaluation où tous les

élèves échouent. La note la plus basse est 1, la plus haute 8 et la moyenne de la

classe est 5.

Les sujets doivent indiquer leur degré d’accord sur une échelle de Lickert en 6 points

(voir les exemplaires des questionnaires en annexe) concernant 12 propositions

(identiques pour chacun des 3 scénarios).

4 dimensions sont testées au travers des 12 propositions :

o 3 propositions concernent le rôle que les élèves attribuent à la responsabilité de la

matière dans la notation. (voir en annexe, les propositions : c, g et k).

o 3 propositions concernent le rôle que les élèves attribuent à la responsabilité de

l’enseignant dans la notation. (voir en annexe, les propositions : b, e et i).

o 3 propositions concernent le rôle que les élèves attribuent à la responsabilité de

l’élève dans la notation. (voir en annexe, les propositions : a, f et j).

o 3 propositions concernent le rôle que les élèves attribuent à la responsabilité du

hasard dans la notation. (voir en annexe, les propositions : d, h et l).

Les dimensions ont été choisies en prenant exemple dans la littérature sur l’évaluation.

Nous avons créé les propositions et nous nous sommes assurées de leur bonne

compréhension à l’aide d’un pré-test (cf. 3.3 Procédure de passation). Nous nous

sommes attachées à créer des phrases courtes, sans ambiguïté, avec des constructions

grammaticales simples, en n’utilisant qu’à l’occasion des tournures négatives afin de

faciliter la compréhension tout en évitant les biais d’acquiescements.

Méthode - 26 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

L’objectif de ces 3 questions était de voir si les sujets trouvent normale chacune des

situations d’évaluation présentée.

• PARTIE 2 : cette partie correspond à la question 4 (cf. Annexe) formulée ainsi :

« Qu’est-ce qui explique selon vous que certains élèves réussissent mieux que d’autres

à l’école ? ». 9 propositions sont soumises, comme dans les trois premières questions,

les élèves doivent indiquer leur degré d’accord avec les 9 propositions sur une échelle

de Lickert en 6 points (allant de Pas du tout d’accord à Tout à fait d’accord). Les

propositions ont été créées de la même manière et avec les mêmes exigences que dans

la partie 1 du questionnaire.

L’objectif de cette question est d’appréhender la perception qu’ont les sujets des

facteurs de réussite et d’échec. Au travers de ces 9 propositions l’attribution causale de

3 dimensions est testée, la dimension Elève faisant référence à l’intelligence

(propositions a, d et g), la dimension Environnement Socio Familial faisant référence à

l’origine sociale de l’élève (propositions b, e et h) et la dimension Ecole faisant

référence au rôle de l’école (propositions c, f et i). Il y a 3 items par facteur; les

différents types d’explication sont mélangés dans la présentation (cf. Annexe).

• PARTIE 3 : Cette partie est constituée d’une échelle d’internalité : Echelle de Mesure

de l’Internalité pour Etudiant élaborée par Cyril Tarquinio (1991) (L’EMIPE). Cette

échelle a déjà été validée : (Cœfficient alpha de Cronbach de .88). L’EMIPE a fait

l’objet d’une validation interne qui a été établie. Ce questionnaire traduit uniquement

le degré d’adhésion d’un individu à la norme d’internalité.

L’objectif est de connaître le positionnement des sujets sur une échelle d’internalité

afin de pouvoir établir des liens entre les réponses des sujets aux deux premières

parties du questionnaire et leur position sur cette échelle d’internalité.

Méthode - 27 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

• PARTIE 4 : Cette partie est intitulée « Vous, votre parcours scolaire, vos projets ».

Cette partie a pour objectif de recueillir des éléments personnels sur le sujet c’est-à-

dire des données sociodémographiques (age, sexe), la profession et le niveau d’étude

des parents, le nombre de frère et sœurs, la moyenne de l’élève pour l’année en cours,

le parcours scolaire (redoublement et saut de classe), l’enseignement de détermination

de seconde, le bac envisagé, le projet professionnel…

Toutes ces données ont pour objectif de pouvoir constituer des groupes de sujets ayant

des caractéristiques communes afin d’observer des différences quant au réponses, par

exemple, en fonction du parcours scolaire (groupes des redoublants / non redoublants),

en fonction de la moyenne de l’élève (bon élève ou en échec)…

L’élaboration de ce questionnaire a été effectuée dans un souci du respect de

l’anonymat de la personne afin que cet outil soit acceptable au regard de l’éthique.

3.3 Procédure de passation

Avant sa forme définitive, le questionnaire a fait l’objet d’une pré enquête afin de

savoir si toutes les questions n’étaient pas ambiguës ou trop complexes. D’autre part, cette pré

enquête nous a permis de pouvoir estimer le temps moyen nécessaire à un élève de seconde

pour remplir le questionnaire. La pré enquête a été menée au près de 10 lycéens de seconde

(issus de lycées différents) au cours du mois de décembre. Nous avons constaté que les sujets

avaient une bonne compréhension des questions et des modalités de réponses et qu’ils

mettaient entre 20 et 25 minutes pour répondre à la totalité des questions.

Nous avons contacté le Proviseur et le Proviseur Adjoint du Lycée d’Aubagne

courant novembre via un courrier, par l’intermédiaire du directeur du CIO d’Aubagne auquel

Méthode - 28 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

est rattaché le lycée. Après une première prise de contact téléphonique avec le Proviseur

Adjoint courant décembre, puis une seconde avec les Conseillères Principales d’Education,

nous avons pu rencontrer ces dernières lors d’un rendez-vous fixé début janvier. A cette

occasion, nous avons présenté le questionnaire et organisé ensemble les modalités de

passation. Le jour même, un planning a été élaboré, et nous avons proposé de rédiger un

courrier à l’attention des professeurs principaux de seconde (diffusé ensuite par les CPE),

dans la mesure où c’est sur leur temps de cours que nous avons effectué la passation des

questionnaires. (cf. annexes).

La passation des questionnaires s’est étendue de fin janvier à début février, elle a

concerné 20 classes de seconde générale et technologique.

Pour chacune des classes nous avons pris quelques minutes pour nous présenter en

nous appuyant sur le texte écrit en première page. Le questionnaire soumis aux sujets était

sous forme d’un livret de la taille de la moitié d’une page A4. Nous nous sommes présentées

en temps qu’étudiantes en Lettres et Sciences Humaines et non en temps que COP stagiaires

pour éviter tous les biais dus à ce que représente notre fonction. Nous avons expliqué que

nous faisions une recherche sur la façon dont les élèves perçoivent les évaluations scolaires

sans leur dire le champ dans lequel la recherche était menée. Nous avons fait avec les élèves

l’exemple figurant sur la première page et nous leur avons expliqué l’absolue nécessité de

répondre à l’intégralité des questions. Puis nous avons distribué les questionnaires. Les élèves

mettaient entre 20 et 25 minutes à les remplir. Lorsqu’ils avaient terminé nous contrôlions

qu’ils avaient répondu à toutes les questions. Ainsi, notre intervention durait environ 40 à 45

minutes par classe. 291 élèves ont rempli le questionnaire version 1 (Mathématiques) et 298 le

questionnaire version 2 (Arts Plastiques). Nous nous sommes engagées à faire « un retour »

sur notre étude aux classes ayant participé.

Méthode - 29 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

3.4 Description de la population

Le questionnaire a été soumis à des élèves scolarisés en seconde générale et technologique du lycée d’Aubagne (voir tableau 1).

Tableau 1 : Population

Filles Garçons Ensemble Effectifs 328 261 589 Age moyen 15,5 15,6 15,6 Moyenne estimée 11,43 11,02 11,23 Redoublement moyen 59% 49% 54% Nombre d’année d'étude envisagée 3,87 3,76 3,82

Méthode - 30 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

Résultats - 31 -

4 Résultats

4.1 Explications des résultats d’une classe

4.1.1 Condition « Normale »

La comparaison des moyennes (Tableau 2), en condition Normale (N ; note minimum

4, note moyenne 10, note maximum 18) selon la matière, présente des réponses en grande

majorité (9 items sur 12) significativement différentes.

On observe une tendance à une adhésion plus forte pour les trois propositions

concernant l’élève, particulièrement pour l’explication « les résultats obtenus reflètent les

efforts fournis… » et chaque fois significativement plus élevé en Maths qu’en Arts

(mMaths = 4,56, mArts = 4,17, P<.01).

L’adhésion est faible pour toutes les explications concernant le hasard. Cette adhésion

est significativement plus faible en version Maths pour deux propositions : « ce contrôle

n’était pas comme d’habitude » (mMaths = 2,76, mArts = 2,97, P<.05) et « les élèves ont eu de

la chance » (mMaths = 2,12, mArts = 2,42, P<.01).

Les explications « le professeur note largement » et « cette notation est injuste »

obtiennent une adhésion faible, cependant moins faible en Arts qu’en Maths et de manière

significative pour la première. En revanche, l’adhésion à l’explication « le professeur explique

bien » est plus forte et significativement plus élevée en Maths qu’en Arts (mMaths = 3,73,

mArts = 3,43, P<.001).

Pour les explications concernant la matière, l’adhésion est globalement faible et

significativement plus faible en Maths qu’en Arts.

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

Tableau 2 : Comparaison de moyennes (ANOVA) Maths vs Arts en condition Normale

Explications proposées Maths (n = 291) Arts (n = 298)

a) Les élèves de cette classe ont plutôt de bonnes capacités 3,65 3,34***

f) Les élèves ont beaucoup travaillé pour ce devoir 3,49 3,11***

EL

EV

E

j) Les résultats obtenus reflètent les efforts fournis par les élèves 4,56 4,17**

b) Ce professeur note largement 2,93 3,28***

e) Le professeur explique bien 3,73 3,43***

PRO

F

i) Cette notation est injuste 2,43 2,57

c) Dans cette matière, les sujets sont faciles 2,67 3,37***

g) Dans cette matière, tout le monde réussit bien 2,25 2,60***

MA

TIE

RE

k) On a toujours ce genre de notes dans cette matière 3,26 3,28

d) Le hasard en a décidé ainsi 2,11 2,31

h) Ce contrôle n’était pas comme d’habitude 2,76 2,97*

HA

SAR

D

l) Les élèves ont eu de la chance 2,12 2,42** * p<.05 ; ** p<.01 ; *** p<.001

4.1.2 Condition « Réussite »

La comparaison de moyennes (Tableau 3) en condition Réussite (R ; note minimum

12, note moyenne 15, note maximum 20) selon la matière, présente des réponses en majorité

(8 items sur 12) significativement différentes.

On observe une tendance à une adhésion forte avec les trois propositions concernant

les élèves, chaque fois significativement plus forte en Maths qu’en Arts. La moyenne la plus

élevée concerne l’explication « les élèves ont de bonnes capacités » (mMaths = 5,21, mArts =

4,93, P<.001).

L’adhésion est moyenne forte pour les trois propositions concernant la matière, chaque

fois plus forte en Arts qu’en Maths et ce significativement pour l’explication « facilité des

sujets » (mMaths = 3,37, mArts = 3,80, P<.05), et « on a toujours ce genre de notes… »

(mMaths = 2,33, mArts = 2,37, P<.001).

Résultats - 32 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

L’adhésion est forte pour les explications « le professeur explique bien » et « le

professeur note largement ». La première explication obtient une moyenne significativement

plus élevée en Maths qu’en Arts (mMaths = 4,82, mArts = 4,39, P<.001). Pour les deux

versions (Maths et Arts), l’adhésion à la proposition « cette notation est injuste » est faible.

Quelle que soit la version, les explications référant au hasard obtiennent une adhésion

faible.

Tableau 3 : Comparaison de moyennes (ANOVA) en Maths vs Arts en condition Réussite

Explications proposées Maths (n = 291) Arts (n = 298)

a) Les élèves de cette classe ont plutôt de bonnes capacités 5,21 4,93***

f) Les élèves ont beaucoup travaillé pour ce devoir 4,88 4,41***

EL

EV

E

j) Les résultats obtenus reflètent les efforts fournis par les élèves 4,85 4,46**

b) Ce professeur note largement 3,81 3,85

e) Le professeur explique bien 4,82 4,39***

PRO

F

i) Cette notation est injuste 2,09 2,27

c) Dans cette matière, les sujets sont faciles 3,37 3,80*

g) Dans cette matière, tout le monde réussit bien 3,92 4,09

MA

TIE

RE

k) On a toujours ce genre de notes dans cette matière 2,33 3,27***

d) Le hasard en a décidé ainsi 2,19 2,41*

h) Ce contrôle n’était pas comme d’habitude 3,28 3,12

HA

SAR

D

l) Les élèves ont eu de la chance 2,47 2,71* * p<.05 ; ** p<.01 ; *** p<.001

4.1.3 Condition « Echec »

D’après la comparaison de moyennes (Tableau 4) en condition Echec (E ; note

minimum 1, moyenne 5, et maximum 8) selon la matière, nous observons seulement 4

réponses significativement différentes.

Résultats - 33 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

L’adhésion est faible pour la proposition concernant « la capacités des élèves » et « le

travail », et plus forte avec l’explication concernant « les efforts fournis ». Pour les trois

propositions, l’adhésion est toujours plus forte en Maths.

L’adhésion est faible avec les explications « ce professeur note largement » et « le

professeur explique bien ». L’adhésion est moyenne avec « cette notation est injuste ». Pour

les trois explications, l’adhésion est toujours plus forte en Arts qu’en Maths.

L’adhésion est faible pour les trois propositions concernant la matière, mais

significativement plus forte en Arts avec les explications « sujets faciles » (mMaths =1,74,

mArts = 2,40, P<.001) et « dans cette matière tout le monde réussit bien » (mMaths = 1,62,

mArts = 2,16, P<.001). L’adhésion est significativement plus forte en Maths avec l’explication

« on a toujours ce genre de notes dans cette matière » (mMaths = 2,89, mArts = 2,40, P<.01).

L’adhésion est faible pour les trois propositions concernant le hasard, bien que chaque

fois plus forte en Arts qu’en Maths, et significativement pour l’explication « le hasard en a

décidé ainsi » (mMaths= 1,97, mArts = 2,23, P<.01).

Résultats - 34 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

Tableau 4 : Comparaison de moyennes (ANOVA) pour Maths vs Arts en condition Echec

Explications proposées Maths (n = 291) Arts (n = 298)

a) Les élèves de cette classe ont plutôt de bonnes capacités 2,07 1,99

f) Les élèves ont beaucoup travaillé pour ce devoir 2,18 2,07

EL

EV

E

j) Les résultats obtenus reflètent les efforts fournis par les élèves 3,86 3,79

b) Ce professeur note largement 1,72 1,80

e) Le professeur explique bien 2,27 2,38

PRO

F

i) Cette notation est injuste 3,22 3,36

c) Dans cette matière, les sujets sont faciles 1,74 2,40***

g) Dans cette matière, tout le monde réussit bien 1,62 2,16***

MA

TIE

RE

k) On a toujours ce genre de notes dans cette matière 2,89 2,40***

d) Le hasard en a décidé ainsi 1,97 2,23**

h) Ce contrôle n’était pas comme d’habitude 3,21 3,39

HA

SAR

D

l) Les élèves ont eu de la chance 1,49 1,60

* p<.05 ; ** p<.01 ; *** p<.001

4.1.4 Comparaison des différentes conditions

D’après la comparaison des moyennes (tableau 5) entre les conditions N/R et N/E

(Normale/réussite ; Normale/Echec), en version Maths et Arts, nous observons, dans

l’ensemble, des différences significatives : 20 propositions sur 24 en version Maths, 21

propositions sur 24 en version Arts. Ainsi nous pouvons dire que les sujets ont bien pris en

compte les différences entre les différentes situations.

Que ce soit en version Maths ou Arts, les différences entre les moyennes aux

différentes conditions s’observent toujours dans le même sens. Nous observons une tendance

à adhérer toujours plus fortement aux propositions en conditions R, hormis pour deux types

d’explication renvoyant à la notation injuste et au fait qu’on ait toujours ce genre de notes

dans cette matière (en version Maths ou Arts).

Résultats - 35 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

En condition R, les propositions renvoyant aux élèves sont plus valorisées dans la

version Maths. Quelle que soit la version, toutes les explications concernant l’élève

obtiennent toujours la moyenne la plus forte en condition R, la plus faible en condition E, et

entre les deux en condition N. Chaque fois, la différence est significative entre les moyennes

pour les différentes conditions. Pour toutes les propositions et dans les trois conditions, nous

observons des moyennes toujours plus élevées en version Maths.

Pour les propositions concernant le professeur, la moyenne la plus faible est en

condition E, la moyenne la plus forte en condition R pour les explications « le professeur note

largement » et « le professeur explique bien » et ce de manière significative pour la première.

Pour l’explication « On a toujours ce genre de note dans cette matière », on observe la

moyenne la plus faible en condition R et la plus forte en condition E. Les moyennes aux trois

propositions sont majoritairement plus élevées en Arts qu’en Maths pour chaque condition ;

seule l’explication « le professeur explique bien » obtient des moyennes plus élevées en

Maths, et ce en conditions R et E.

Concernant les explications sur la matière, nous observons une adhésion toujours plus

forte en Arts, hormis pour l’explication « on a toujours ce genre de notes… » en condition E.

Concernant les explications sur le hasard, nous observons une adhésion toujours plus

forte en Arts hormis pour l’explication « ce contrôle n’était pas comme d’habitude » en

condition R.

Résultats - 36 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

Tableau 5 : comparaison des moyennes (ANOVA) entre les conditions Normale/Réussite et Normale/Echec pour Maths vs. Arts

Explications proposées Condition Réussite

Condition Normale

Condition Echec

p. R vs. N

p. N vs. E

5,21 3,65 2,07 *** *** a) Les élèves de cette classe ont plutôt de bonnes capacités 4,93 3,34 1,99 *** *

4,88 3,49 2,18 *** *** f) Les élèves ont beaucoup travaillé pour ce devoir 4,41 3,11 2,07 *** ***

4,85 4,56 3,86 *** ***

EL

EV

E

j) Les résultats obtenus reflètent les efforts fournis par les élèves 4,46 4,17 3,79 *** ***

3,81 2,93 1,72 *** *** b) Ce professeur note largement

3,85 3,28 1,80 ns ns

4,82 3,73 2,27 *** *** e) Le professeur explique bien

4,39 3,43 2,38 *** ***

2,09 2,43 3,22 *** ***

PRO

F

i) Cette notation est injuste 2,27 2,57 3,36 *** ***

3,37 2,67 1,74 ns ns c) Dans cette matière, les sujets sont faciles 3,80 3,37 2,40 *** ***

3,92 2,25 1,62 *** *** g) Dans cette matière, tout le monde réussit bien 4,09 2,60 2,16 *** ***

2,33 3,26 2,89 *** ***

MA

TIE

RE

k) On a toujours ce genre de notes dans cette matière 3,27 3,28 2,40 ns ***

2,19 2,11 1,97 ns ns d) Le hasard en a décidé ainsi

2,41 2,31 2,23 *** ***

3,28 2,76 3,21 *** *** h) Ce contrôle n’était pas comme d’habitude 3,12 2,97 3,39 *** ***

2,47 2,12 1,49 *** ***

HA

SAR

D

l) Les élèves ont eu de la chance 2,71 2,42 1,60 *** ***

ns : non significatif, * p<.05 ; ** p<.01 ; *** p<.001 ; : moyenne en Maths : moyennes en Arts

Résultats - 37 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

4.1.5 Comparaison entre les différentes conditions selon le sexe des répondants

• Version Mathématiques

D’après l’analyse des moyennes des garçons et des filles pour la version Maths dans

les trois conditions (R, N, E), nous observons des différences significatives dans la condition

R (5 propositions sur 12), dans la condition N (4 propositions sur 12), un peu moins dans la

condition E (2 propositions sur12).

Quelle que soit l’explication proposée, c’est en condition R qu’une tendance à une

adhésion plus forte est observée. Les filles ont tendance à adhérer plus que les garçons à des

explications renvoyant à la responsabilité de l’élève. On observe une différence significative

entre filles et garçons quand l’explication renvoie « aux efforts fournis par les élèves »

(mgarçons = 4,67 ; mfilles = 4,98 ; p<.05).

En condition E, l’adhésion est assez faible pour des explications renvoyant aux

capacités et au travail des élèves; en revanche pour l’explication qui renvoie aux efforts

fournis par les élèves, l’adhésion est ici, aussi importante, avec une différence significative

(mgarçons = 3,64 ; mfilles = 4,01 ; p<.05).

Les garçons adhèrent plus que les filles à des explications renvoyant au rôle de la

matière.

L’adhésion est beaucoup plus marquée en condition R que dans les deux autres

conditions et significativement plus marquée pour les garçons que pour les filles, lorsque

l’explication renvoie au « sujet facile » (mgarçons = 3,78 ; mfilles = 3,07 ; p<.001) mais aussi

pour l’explication « tout le monde réussit bien dans cette matière » (mgarçons = 4,21 ;

mfilles = 3,70 ; p<.01). Lorsque l’explication renvoie au fait que l’on « a toujours ce genre de

Résultats - 38 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

notes dans cette matière », les garçons adhèrent toujours plus que les filles et de manière

significative en condition N puis R.

Bien que l’adhésion soit faible, les garçons adhèrent plus que les filles au rôle du

hasard, cela est significatif en condition E, lorsque l’explication renvoie précisément au

hasard, et en condition N lorsque « le contrôle n’est pas comme d’habitude »

Les garçons adhèrent plus que les filles et de manière significative pour l’explication

« le professeur note largement » (mgarçons = 4,20 ; mfilles = 3,52 ; p<.001) en condition R et

pour « la notation est injuste » (mgarçons = 2,61 ; mfilles = 2,31 ; p<.05) en condition N. En

revanche, pour la proposition « le professeur explique bien », ce sont les filles qui adhèrent

plus que les garçons en conditions N et R, mais cela n’est pas significatif.

Résultats - 39 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

Tableau 6 : Comparaison des moyennes (ANOVA) des filles et des garçons en Maths pour chaque condition

Condition Réussite Condition Normale Condition Echec

Explications

proposées Garçons

(n = 122)

Filles

(n = 169)

Garçons

(n = 122)

Filles

(n = 169)

Garçons

(n = 122)

Filles

(n = 169)

a) Les élèves de cette classe ont plutôt de bonnes capacités 5,14 5,27 3,56 3,73 2,16 2,01

f) Les élèves ont beaucoup travaillé pour ce devoir 4,85 4,91 3,40 3,56 2,25 2,14

EL

EV

E

j) Les résultats obtenus reflètent les efforts fournis par les élèves 4,67 4,98* 4,48 4,61 3,64 4,01*

b) Ce professeur note largement 4,20 3,52*** 3,04 2,84 1,80 1,65

e) Le professeur explique bien 4,74 4,87 3,64 3,79 2,29 2,26

PRO

F

i) Cette notation est injuste 2,25 1,99 2,61 2,31* 3,29 3,17

c) Dans cette matière, les sujets sont faciles 3,78 3,07*** 2,84 2,54* 1,70 1,75

g) Dans cette matière, tout le monde réussit bien 4,21 3,70** 2,34 2,20 1,70 1,57

MA

TIE

RE

k) On a toujours ce genre de notes dans cette matière 2,52 2,18* 3,47 3,11* 3,03 2,79

d) Le hasard en a décidé ainsi 2,31 2,10 2,10 2,11 2,11 1,85*

h) Ce contrôle n’était pas comme d’habitude 3,37 3,22 2,92 2,66* 3,15 3,25

HA

SAR

D

l) Les élèves ont eu de la chance 2,52 2,43 2,25 2,03 1,53 1,46

* p<.05 ; ** p<.01 ; *** p<.001

• Version Arts

D’après l’analyse des moyennes des garçons et des filles dans les trois conditions,

nous observons plus souvent des différences significatives dans la condition N (5 propositions

sur 12) que dans la condition R (4 propositions sur 12), et que dans la condition E (1

proposition sur12).

Les filles adhèrent plus que les garçons à des explications renvoyant à la responsabilité

de l’élève, quelle que soit la condition.

Résultats - 40 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

Lorsque l’explication renvoie au travail des élèves, ce phénomène est significatif en

condition N (mgarçons = 2,96; mfilles = 3,25 ; p<.05). Lorsque l’explication renvoie aux

« efforts fournis par les élèves », il est significatif dans les trois conditions.

Les garçons ont tendance à adhérer plus que les filles à des explications renvoyant au

rôle de la matière, lorsque l’explication renvoie au « sujet facile » (mgarçons = 3,99 ;

mfilles = 3,63 ; p<.05) en condition R ou au fait qu’on ait « toujours ce genre de notes dans

cette matière » (mgarçons = 3,50; mfilles = 3,09 ; p<.05) en condition N.

Lorsque les explications renvoient au fait que « le professeur note largement » les

garçons adhèrent significativement plus que les filles dans les conditions R, puis N et pour

« la notation est injuste » uniquement en condition R.

En revanche, pour la proposition « le professeur explique bien » en condition N, ce

sont les filles qui adhèrent significativement plus que les garçons à cette explication (mgarçons

= 3,30; mfilles = 3,54 ; p<.05)

Lorsque les explications renvoient au hasard, nous n’observons pas de différences

significatives entre garçons et filles.

Résultats - 41 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

Tableau 7 : Comparaison des moyennes (ANOVA) des filles et des garçons en Arts pour chaque condition

Condition Réussite Condition Normale Condition Echec

Explications

proposées Garçons

(n = 139)

Filles

(n = 159)

Garçons

(n = 139)

Filles

(n = 159)

Garçons

(n = 139)

Filles

(n = 159)

a) Les élèves de cette classe ont plutôt de bonnes capacités 4,85 5,01 3,25 3,42 2,01 1,96

f) Les élèves ont beaucoup travaillé pour ce devoir 4,32 4,50 2,96 3,25* 2,14 2,02

EL

EV

E

j) Les résultats obtenus reflètent les efforts fournis par les élèves 4,27 4,62* 3,99 4,34* 3,60 3,96*

b) Ce professeur note largement 4,01 3,71* 3,43 3,14* 1,80 1,80

e) Le professeur explique bien 4,32 4,46 3,30 3,54* 2,29 2,46

PRO

F

i) Cette notation est injuste 2,42 2,14* 2,70 2,45 3,43 3,29

c) Dans cette matière, les sujets sont faciles 3,99 3,63* 3,40 3,33 2,42 2,38

g) Dans cette matière, tout le monde réussit bien 3,99 4,17 2,60 2,60 2,14 2,18

MA

TIE

RE

k) On a toujours ce genre de notes dans cette matière 3,26 3,27 3,50 3,09* 2,52 2,29

d) Le hasard en a décidé ainsi 2,40 2,42 2,39 2,25 2,17 2,28

h) Ce contrôle n’était pas comme d’habitude 3,09 3,16 3,06 2,89 3,39 3,40

HA

SAR

D

l) Les élèves ont eu de la chance 2,73 2,69 2,50 2,35 1,64 1,57

* p<.05 ; ** p<.01 ; *** p<.001

4.1.6 Comparaison entre les différentes conditions selon le degré d’internalité des répondants

• Version Mathématiques

D’après l’analyse des moyennes en Maths dans chaque condition, selon leur degré

d’internalité, nous observons que c’est dans la condition N qu’il y a le plus souvent un

continuum quant à l’adhésion aux différentes explications proposées (7 sur 12) : plus les

sujets sont internes plus ils adhèrent aux propositions . Pour les propositions « le professeur

explique bien » et « ce contrôle n’était pas comme d’habitude » cette différence est

significative (mintfaibles = 4,66 ; mintmoy = 4,80 ; mintforts = 5,01 p <.05 et mintfaibles = 3,05 ;

mintmoy = 3,22 ; mintforts = 3,58 p <.05). Pour la proposition « la notation est injuste » où le

Résultats - 42 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

continuum est inversé : plus les sujets sont internes moins ils adhèrent à cette proposition,

mais l’adhésion reste globalement faible.

Nous observons 3 continuums dans la condition R et 2 continuums dans la condition

E. D’autre part, nous observons la tendance suivante : une adhésion aux propositions la

plupart du temps plus forte en condition N, un peu moins forte en condition R et encore moins

forte en condition E.

• Version Arts

D’après l’analyse des moyennes en Arts dans chaque condition selon leur degré

d’internalité, nous observons très peu de continuum dans la condition N (4) : 2 dans le sens

plus les élèves sont internes plus ils adhèrent aux explications : « les résultats obtenus

reflètent les efforts fournis par les élèves » et « le professeur note largement » ; et 2 dans le

sens inverse, moins les élèves sont internes et plus ils adhèrent : « dans cette matière les sujets

sont faciles » et « on a toujours ce genre de notes dans cette matière ».

Dans la condition R, nous observons 9 continuums. 4 ont des moyennes

significativement différentes dans le sens plus les élèves sont internes et plus ils adhèrent aux

explications : « les élèves ont plutôt de bonnes capacités » (mintfaibles = 4,72 ;

mintmoy = 4,90 ), « les élèves ont beaucoup travaillé pour ce devoir » (mintforts = 5,16,

p<.01), « les résultats obtenus reflètent les efforts fournis » (mintfaibles = 4,22 ;

mintmoy = 4,35 ; mintforts = 4,65, p<.05), et « le professeur explique bien »(mintfaibles = 4,22 ;

mintmoy = 4,38; mintforts = 4,57, p<.05).

Dans la condition E, nous observons 10 continuums dont 4 ont des moyennes

significativement différentes. Une dans le sens plus les élèves sont internes et plus ils adhèrent

aux explications « les résultats obtenus reflètent les efforts fournis », les trois autres dans le

Résultats - 43 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

sens plus les élèves sont internes et moins ils adhèrent aux propositions : « les élèves ont

plutôt de bonnes capacités » (mintfaibles = 2,23 ; mintmoy = 1,95 ; mintforts = 1,73,p<.001),

« les élèves ont beaucoup travaillé » (mintfaibles = 2,23 ; mintmoy = 2,10 ; mintforts = 1,18,

p<.05), « les élèves ont eu de la chance » (mintfaibles = 1,75 ; mintmoy = 1,65 ;

mintforts = 1,38, p<.001).

En condition réussite, les sujets les plus internes sont aussi ceux qui adhèrent le plus

avec les bonnes capacités, le travail et les efforts fournis. En condition échec on observe à

l’inverse que plus les sujets sont internes et moins ils adhèrent aux bonnes capacités et au

travail, alors que le continuum est dans le même sens qu’en réussite pour les efforts fournis.

Nous observons les tendances suivantes : plus de continuums dans la condition R dans

le sens plus les sujets sont internes plus ils adhèrent aux propositions (6), plus de continuums

inverses dans la condition E (8). Nous constatons que l’adhésion aux explications est plutôt la

plus forte en condition R et la moins forte en condition E. C’est pour les explications

concernant la responsabilité de l’élève en condition réussite et en condition échec que l’on

observe le plus de différences significatives.

Résultats - 44 -

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Résultats - 45 -

Tableau 8 : Comparaison des moyennes pour les 3 conditions (Réussite, Normale, Echec) associées à la matière « Math » selon le degré d’internalité

Condition Réussite Condition Normale Condition Echec

Explications proposées Internes faibles N=96

Internes moyens

N=98

Internes forts N=93

Internes faibles N=96

Internes moyens

N=98

Internes forts N=93

Internes faibles N=96

Internes moyens

N=98

Internes forts N=93

a) Les élèves de cette classe ont plutôt de bonnes capacités

3,68 3,74 3,54 5,16 5,22 5,26 2,01 2,16 2,05

f) Les élèves ont beaucoup travaillé pour ce devoir

3,36 3,63 3,49 4,75 4,90 5,01 2,28 2,28 2,01

EL

EV

E

j) Les résultats obtenus reflètent les efforts fournis par les élèves

4,53 4,33 4,85* 4,81 4,79 4,92 3,73 3,74 4,12

b) Ce professeur note largement 2,66 3,16 2,98* 3,67 3,91 3,86 1,70 1,82 1,65

e) Le professeur explique bien 3,77 3,72 3,71 4,66 4,80 5,01* 2,21 2,33 2,28

PRO

F

i) Cette notation est injuste 2,60 2,40 2,32 2,17 2,09 2,03 3,02 3,28 3,32

c) Dans cette matière, les sujets sont faciles

2,47 2,78 2,78 3,24 3,41 3,47 1,78 1,77 1,65

g) Dans cette matière, tout le monde réussit bien

2,18 2,29 2,32 3,84 4,04 3,83 1 ,66 1,60 1,61

MA

TIE

RE

k) On a toujours ce genre de notes dans cette matière

3,35 3,43 3,02 2,27 2,47 2,24 3,01 2,90 2,82

d) Le hasard en a décidé ainsi 2,00 2,18 2,14 2,09 2,16 2,33 1,98 1,86 2,05

h) Ce contrôle n’était pas comme d’habitude

2,74 2,83 2,75 3,05 3,22 3,58* 3,15 3,04 3,42

HA

SAR

D

l) Les élèves ont eu de la chance 2,13 2,07 2,17 2,48 2,24 2,70 1,52 1,42 1,54

* p<.05 ; ** p<.01 ; *** p<.001

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

Tableau 9 : Comparaison des moyennes pour les 3 conditions (Réussite, Normale, Echec) associées à la matière « Arts » selon le degré d’internalité

Condition Réussite Condition Normale Condition Echec

Explications proposées Internes faibles N=96

Internes moyens

N=98

Internes forts N=93

Internes faibles N=96

Internes moyens

N=98

Internes forts N=93

Internes faibles N=96

Internes moyens

N=98

Internes forts N=93

a) Les élèves de cette classe ont plutôt de bonnes capacités

4,72 4,90 5,16** 3,36 3,23 3,38 2,23 1,95 1,73***

f) Les élèves ont beaucoup travaillé pour ce devoir

4,22 4,35 4,65* 3,21 2,97 3,18 2,23 2,10 1,88*

EL

EV

E

j) Les résultats obtenus reflètent les efforts fournis par les élèves

4,26 4,34 4,70* 3,88 4,26 4,34 3,52 3,80 4,04*

b) Ce professeur note largement 3,88 3,63 4,02 3,28 3,29 3,30 1,90 1,79 1,71

e) Le professeur explique bien 4,22 4,38 4,57* 3,47 3,35 3,44 2,53 2,34 2,27

PRO

F.

i) Cette notation est injuste 2,27 2,31 2,20 2,64 2,77 2,33* 3,25 3,36 3,48

c) Dans cette matière, les sujets sont faciles

3,62 3,77 4,03 3,41 3,38 3,30 2,49 2,29 2,34

g) Dans cette matière, tout le monde réussit bien

3,95 4,16 4,17 2,63 2,86 2,35* 2,29 2,12 1,98

MA

TIE

RE

k) On a toujours ce genre de notes dans cette matière

3,36 3,25 3,16 3,43 3,27 3,14 2,53 2,42 2,24

d) Le hasard en a décidé ainsi 2,47 2,30 2,49 2,30 2 ,20 2 ,43 2,26 2,07 2,35

h) Ce contrôle n’était pas comme d’habitude

3,16 3,15 3,10 2,88 3,12 2,92 3,37 3,24 3,56

HA

SAR

D

l) Les élèves ont eu de la chance 2,72 2,66 2,73 2,48 2,40 2,42 1,75 1,65 1,38**

* p<.05 ; ** p<.01 ; *** p<.001

Résultats - 46 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

Résultats - 47 -

4.2 Composantes de la réussite

Nous n’avons constaté aucun effet de la version du questionnaire sur les réponses aux

questions concernant les explications de la réussite (ni sur le degré d’internalité).

4.2.1 Les différentes dimensions de la réussite

Une analyse en composante principale (Tableau 10) a été effectuée sur les 9 attitudes.

Cette analyse a permis de dégager trois facteurs qui rendent compte de 50,12 % de la variance

observée. Sur le premier facteur, 22,86 % de variance expliquée saturent des éléments qui

renvoient à l’environnement socio familial. Sur le second facteur, 14,85 % de la variance

expliquée saturent des éléments qui renvoient à l’élève et sur le troisième facteur, 12,41 % de

la variance expliquée saturent des attitudes qui renvoient à l’école.

L’ACP confirme les dimensions explicatives de la réussite (l’environnement socio

familial, l’élève et l’école), choisies lors de la construction du questionnaire. En effet, étaient

testés l’attribution causale de l’élève, au travers de données intrinsèque : l’intelligence,

l’attribution causale de l’origine sociale et l’attribution causale dans la réussite à une

évaluation du rôle de l’école.

Certaines attitudes font l’objet d’une adhésion plus marquée : « C’est le travail qui

explique la réussite » et « certains élèves ont plus de capacités » (m = 4,91 et m = 5,00).

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

Tableau 10 : Matrice des composantes de la réussite Composante

Explications proposées Environnement socio familial

Elève Ecole Moyenne

e. Quand on a des parents qui ont bien réussi dans leurs études, on a plus de chance de réussir à l'école.

.723 .151 -.056 3,40

h. Quand on vit dans les beaux quartiers, on réussit mieux. .718 .015 .245 2,48

Env

iron

nem

ent s

ocio

fa

mili

al

b. C'est plus facile quand on a des parents qui ne sont pas au chômage. .699 .038 .102 3,12

a. C'est grâce à l'intelligence que l'on réussit dans les études. .018 .860 .050 3,17

g. Pour être bon élève, il faut être intelligent. .055 .735 .310 2,75

Elè

ve

d. Certains élèves ont plus de capacités. .215 .541 -.367 4,91

f. Les professeurs sont responsables de la réussite de leurs élèves. -.107 .097 .688 3,73

i. C'est uniquement le travail des élèves qui explique leur réussite. -.174 -.074 -.516 5,00

Eco

le

c. C'est le rôle de l'école de faire en sorte que certains réussissent et

d'autres échouent. .210 -.040 .434 2,28

% de variance expliquée après rotation 22,86 14,85 12,41

4.2.2 Etudes des variables sur les dimensions

Les analyses univariées, effectuées sur les scores moyens factoriels des trois facteurs

issus de l’ACP, montrent que quel que soit le facteur explicatif de la réussite, les garçons

adhèrent toujours plus que les filles. Nous observons une différence significative entre les

Résultats - 48 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

filles et les garçons pour les dimensions Environnement socio familial (mgarçons = 0,16,

mfilles = -0,13, P<.01) et Ecole (mgarçons = 0,14, mfilles = -0,11, P<.01).

Tableau 11: Comparaison des moyennes pour les dimensions explicatives de la réussite selon le sexe

Dimension Garçon (N=261)

Fille (N=328)

Environnement socio familial 0,16 -0,13**

Elève 0,05 -0,04

Ecole 0,14 -0,11**

* p<.05 ; ** p<.01 ; *** p<.001

Les analyses univariées, effectuées sur les scores moyens factoriels des trois facteurs

issus de l’ACP, montrent qu’il existe un continuum dans l’adhésion aux dimensions

explicatives de la réussite, plus les sujets ont un score d’internalité faible moins ils adhèrent

aux explications de la réussite proposées dans le questionnaire. Et on observe une différence

significative pour la dimension Ecole entre les trois groupes constitués respectivement d’un

tiers de la population en fonction des scores d’internalité obtenus.

Tableau 12: Comparaison des moyennes pour les dimensions explicatives de la réussite selon le score d'internalité

Dimension Interne Faible

(N= 197) Interne Moyen

(N= 188) Interne Fort

(N= 189)

Environnement socio familial -0,10 -0,02 0,10

Elève -0,12 0,04 0,06

Ecole 0,12 0,07 -0,22**

* p<.05 ; ** p<.01 ; *** p<.001

Enfin, en ce qui concerne l’échelle d’internalité, nous n’observons pas de différences

significatives entre les garçons et les filles.

Résultats - 49 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

Les données sociométriques telles que le niveau d’étude envisagée, le bac visé,

l’enseignement de détermination, le redoublement et la moyenne estimée au premier

trimestre, ne jouent pas sur l’explication de la réussite. Ainsi, le parcours scolaire ne semble

pas jouer sur la façon qu’ont les élèves d’expliquer la réussite.

4.3 Résumé

• En ce qui concerne les différences entre les versions Maths vs. Arts, lorsque les

élèves adhérent à certaines propositions cette adhésion est plus forte en Math

qu’en Arts.

• Les composantes évoquées pour expliquer la notation sont le rôle de l’élève et

les explications du professeur. On peut noter que les seules explications pour

lesquelles les élèves adhèrent plus en Arts qu’en Maths sont celles où le

pouvoir du professeur (largesse et injustice) est en jeu. L’adhésion est faible

pour toutes les explications concernant le hasard et la matière.

• Que ce soit en version Maths ou Arts, les différences entre les moyennes aux

différentes conditions s’observent toujours dans le même sens. Quelle que soit

la version, toutes les explications concernant l’élève obtiennent toujours la

moyenne la plus forte en condition R, la plus faible en condition E, et entre les

deux en condition N.

• Certaines propositions font l’objet d’une adhésion plus marquée : « C’est le

travail qui explique la réussite » et « certains élèves ont plus de capacités ».

• En ce qui concerne les différences entre les sexes, les filles adhèrent plus que

les garçons à des explications renvoyant à la responsabilité de l’élève,

inversement, les garçons adhèrent plus que les filles à des explications

renvoyant au rôle de la matière. Bien que l’adhésion soit faible, globalement

Résultats - 50 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

Résultats - 51 -

les garçons adhèrent plus que les filles au rôle du hasard. Enfin, en ce qui concerne l’échelle

d’internalité, nous n’observons pas de différences significatives entre les garçons et les filles.

Quel que soit le sexe, plus les sujets ont un score d’internalité faible moins ils adhèrent aux

explications de la réussite proposées dans le questionnaire. Dans la condition R, plus les sujets

sont internes plus ils adhèrent aux propositions. Pour la condition E, la relation est inversée :

plus ils sont internes, moins ils adhèrent.

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

5 Discussion

5.1 Une différenciation entre les matières tenant au caractère social de

celles-ci

Les mathématiques ou les arts plastiques ont des valeurs sociales différentes et n’ont

pas les mêmes enjeux psychosociaux. L'enseignement des mathématiques est

traditionnellement associé à l'excellence scolaire et joue un rôle déterminant dans l'évaluation

et l'orientation des élèves. Dès le primaire, les disciplines nobles, celles du « haut du

bulletin », le français et surtout les mathématiques, jouent un rôle déterminant dans le

classement et la sélection des élèves. La voie royale est le bac S et son corollaire est la

dévalorisation des autres matières notamment la technologie, les arts plastiques et les matières

littéraires. Ces différences vont se traduire par des positionnements différents dans les deux

versions du questionnaire.

Une réussite de tous en maths n’est ainsi pas perçue comme normale par les sujets car

elle s’oppose à la valeur sociale de sélection attribuée aux mathématiques. Un professeur

n’attribuant que des bonnes notes, surtout dans cette matière ne peut être pris au sérieux, il

perdrait toute crédibilité face aux élèves, à leurs parents ou à ses collègues.

Lorsqu’une situation où tous les élèves réussissent est présentée en mathématiques

cela est, davantage qu’en arts, attribué par les sujets à une plus grande capacité des élèves et à

un plus grand travail de leur part. Ce résultat peut s’expliquer par le fait que l’enseignement

des mathématiques, fondé sur la mémorisation de données et l'assimilation de procédures

abstraites est perçu par tous comme nécessitant travail et intelligence.

On considère que l’évaluateur en mathématiques est précis et juste car un résultat ne

peut être que correct ou incorrect. En effet, nous observons que la réussite des élèves est plus

Discussion - 52 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

souvent perçue comme résultant d’une bonne explication du professeur lorsqu’on est en

mathématiques.

Cela est aussi manifeste dans le fait que quelle que soit la condition, le hasard est

toujours plus rejeté en maths qu’en arts.

Au contraire, les arts plastiques ne seraient pas le reflet de l’intelligence mais plutôt le

reflet d’un « don » qui n’est valorisé ni par la société ni par l’école. Une bonne note en arts

plastiques serait subjective, reflétant plus le « goût » du correcteur qu’une maîtrise technique

manifeste. Ainsi quelle que soit la condition, les sujets sont toujours perçus comme plus

faciles en arts, et le professeur comme notant toujours plus largement dans cette matière.

5.2 Valorisation du rôle de l’élève

Les élèves interrogés, quelle que soit la matière et la condition (normale, réussite,

échec) vont toujours avoir tendance à valoriser le rôle de l’élève comme élément explicatif

dans les résultats. Contrairement à ce que l’on pouvait penser, l’élève ne met pas en évidence

le caractère injuste des évaluations. L’injustice créée par une constante proportion de

mauvaises notes (dont parle A. Antibi), n’est pas mise en avant par les élèves, quelles que

soient les conditions de l’évaluation.

Cette tendance à rendre l’acteur ou l’individu responsable de ce qui lui arrive est aussi

appelée « erreur fondamentale ». Elle semble se retrouver à travers nos résultats où nous

pouvons voir que les sujets ne reconnaissent pas le hasard comme explication proposée et ce

dans les différents scénarios du questionnaire.

Cette « erreur fondamentale » a fait l’objet d’interprétations assez diverses. Une de ces

interprétations est la motivation à contrôler l’environnement, les gens cherchant ainsi à

éliminer le hasard des causes possibles des événements (Lerner, 1980). Les individus sont

alors amenés à croire ou à faire l’hypothèse que nous vivons dans un monde juste dans lequel

Discussion - 53 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

les gens obtiennent le plus souvent ce qu’ils méritent. Lerner appelle ce biais ou ce filtre « la

croyance en la justice du monde ». Cette croyance en un monde juste se traduit par une sorte

de certitude non critiquée qu’en fin de compte si le destin d’un individu est ce qu’il est, il faut

bien que celui-ci ait fait quelque chose pour que cela soit ainsi. Cette pensée ordinaire est

fortement marquée par la « logique du mérite ». L’individu trouve des rationalisations, des

justifications sociales pour légitimer cette croyance qui renvoie au niveau de l’idéologie. Cette

pensée de justice peut fonctionner par le fait que l’individu va juger que la responsabilité

d’une situation défavorable est liée à des personnes plutôt que d’avoir à remettre en cause des

facteurs externes. Tout cela renvoie à une certaine logique d’ordre : c’est finalement une

manière de légitimer l’ordre social et ses valeurs dominantes. Pour Lerner, le besoin

fondamental de justice conduirait à des pratiques discriminatoires afin de satisfaire d’une juste

manière ses propres besoins et ceux de ses proches.

D’autres chercheurs réfèrent cette « erreur » aux modèles culturels dominants dans les

cultures occidentales. Cette norme très générale des sociétés libérales, la norme d’internalité,

pousse les gens les mieux insérés dans les sociétés libérales à attribuer de la valeur aux

explications qui accentuent le poids causal des acteurs.

Que ce soit croyance en la justice du monde ou norme d’internalité, on voit bien que

cela renvoie à une certaine logique basée sur les valeurs prônées par les sociétés libérales, à

savoir la liberté, la responsabilité et l’autonomie de l’acteur. L’être humain traiterait les

données sociales par le biais d’un non-dit : « il n’arrive aux gens que ce qu’ils méritent ».

L’école, lieu social privilégié transmet aussi ces normes et ces valeurs. Le système

scolaire français a connu une démocratisation quantitative incontestable grâce à

l’élargissement de l’accès aux biens scolaires réservés jusque-là aux seuls « héritiers » et à

quelques « boursiers ». En ouvrant à tous l’accès aux études par le biais d’une formation

commune jusqu’à seize ans, les diverses réformes scolaires ont établi les conditions

Discussion - 54 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

structurelles de l’égalité méritocratique des chances. Pourtant le résultat est décevant. Dès les

années 60, les travaux de sociologues comme C. Baudelot, R. Establet, R. Boudon, P.

Bourdieu et J. C. Passeron (cités par F. Dubet (2004)) s’accordent sur le fait que les élèves les

mieux dotés en capitaux culturels et sociaux réussissent mieux, font des études plus longues,

plus prestigieuses et plus rentables que les autres. L’Ecole n’est pas parvenue à neutraliser les

effets des inégalités culturelles et sociales sur les inégalités scolaires.

Cependant, cela a entraîné un profond changement dans l’explication de la réussite

scolaire par l’acteur. Auparavant, une personne occupant un emploi peu qualifié, peu

prestigieux, mal rémunéré, pouvait l’expliquer par : « je n’ai pas eu l’opportunité de mesurer

mon mérite et ma valeur dans une compétition scolaire juste », sous entendu « je n’ai alors

aucune raison de me sentir moins digne que les autres ». Dans un tel contexte, l’injustice

sociale était si manifeste qu’elle préservait paradoxalement l’individu du risque de perte

d’estime de soi. Dans un système méritocratique fondé sur l’égalité des chances de telles

consolations n’existent plus. Au départ des épreuves scolaires, tous les élèves sont considérés

comme égaux et tous ont le droit d’espérer obtenir les meilleurs résultats et d’atteindre les

positions les plus élevées. Les élèves sont au cœur d’une contradiction fondamentale : ils sont

considérés comme tous égaux tout en étant engagés dans une série d’épreuves dont la finalité

est de les rendre inégaux. Si les acteurs expliquaient leurs inégalités de performance par des

causes externes comme leur naissance ou une injustice dans les pratiques d’évaluation, le

principe d’égalité présidant à la compétition scolaire serait invalidé et la méritocratie aussi.

Nous pouvons alors comprendre cette tendance qui consiste à faire comme si les

résultats scolaires des élèves étaient la conséquence directe de leur travail, en fait de tout ce

qui les engage librement dans leur travail scolaire. « Si on veut on peut » : l’élève qui échoue

est responsable de son propre échec, et, en même temps son égalité fondamentale est

préservée puisque tout se passe comme si il avait décidé librement de ses performances

Discussion - 55 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

scolaires en travaillant plus ou moins. Cette explication est nécessaire car elle permet aux

individus de se sentir libres et égaux en dépit des inégalités scolaires et sociales. Ce système

atteint ses limites lorsque cela ne fonctionne plus et que l’élève travaille et échoue. Il ne peut

alors s’expliquer cette situation sans finir par admettre qu’il est moins doué, moins efficace. Il

ne peut trouver d’explication crédible à son échec en dehors de lui-même puisqu’il a toujours

été traité de manière égale et objective en apparence. Les élèves en difficulté ne peuvent alors

s’en prendre qu’à eux-mêmes, s’attribuer la cause de leur échec.

Au lieu de les rendre responsables de cet état de fait, nous pouvons nous interroger sur

la difficulté pour les enseignants d’être ces agents de sélection sociale à travers les jugements

scolaires. Car la société demande au système éducatif de sélectionner, et les enseignants n’ont

pas d’autres solutions que d’entrer dans les normes : si le niveau global des élèves

s’améliorait, il faudrait alors que le seuil d’excellence s’élève lui aussi et que le taux des

vaincus reste le même, la construction du mérite supposant que la plupart n’y parviennent pas

pleinement.

5.3 Les filles et les garçons accordent des poids différents aux éléments

explicatifs de la réussite

Nos résultats font apparaître trois dimensions différentes qui peuvent être en mesure

d’expliquer les facteurs de réussite : l’élève, l’école et l’environnement socio familial. Les

résultats obtenus à l’échelle d’internalité ne montrent pas de différence entre filles et garçons.

Nous pouvons penser que l’adhésion plus ou moins marquée à ces dimensions est régulée

davantage par le genre que par l’internalité. Nous nous sommes aperçues que les garçons

mettent plus en valeur le contexte (environnement familial, école) comme explication de la

réussite scolaire. Les filles, elles, adhèrent plus à des explications renvoyant à la

responsabilité de l’élève.

Discussion - 56 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

De la part des filles, cela peut être une manière de dire qu’elles ont leur destin plus en

main, ce qui irait avec le fait qu’elles visent des études plus longues comme nous l’avons

observé. La poursuite d’études générales longues présente un niveau de risque limité et un

niveau de coût relativement faible compte tenu de la difficulté de trouver un emploi

notamment pour les femmes, si elles se présentaient moins formées sur le marché du travail.

Un autre élément en ce sens réside dans le type de section et de métier auxquels elles accèdent

majoritairement (secteur tertiaire exigeant en diplômes) M. Duru Bellat (1990).

Nous pouvons au-delà de ces constats émettre l’hypothèse que les filles, plus

stigmatisées par la norme l’intègrent mieux que les garçons. Ainsi si filles et garçons se

distinguent, c’est qu’ils n’ont pas le même rapport à la norme : les garçons intègrent

davantage l’aspect multifactoriel. C’est bien ce qui est au cœur de l’ouvrage de Pierre

Bourdieu « La domination masculine », qui s’interroge sur le fait que la domination d'une

personne sur une autre, d'un sexe sur un autre, d'une classe sur une autre soit acceptée par les

dominés, qui n'y trouvent pourtant que souffrance, humiliation ou pauvreté.

Outre le pouvoir politique ou économique, le dominant a celui de créer et de diffuser

la culture : aussi va-t-il produire des idées dont une large part est destinée à légitimer

idéologiquement sa domination, et que les dominés légitiment, finissant ainsi par interpréter le

monde, et les rapports de domination, selon «des modes de pensée qui sont eux-mêmes le

produit de la domination». Si les filles doivent être en accord avec ce qui leur arrive, se sentir

responsables de leur destin, c’est pour que puisse se perpétuer la domination symbolique et

ainsi une certaine stabilité sociale. L’exemple de la notion de « vocation » évoquée par P.

Bourdieu (1998) illustre bien cet état de fait. En effet, la vocation chez les femmes

exprimerait cette rencontre entre « attentes objectives » qui sont inscrites dans les positions

offertes aux femmes dans la société (encore fortement sexuées), et les dispositions dites

féminines inculquées par la famille et tout l’ordre social. Ainsi, alors que les femmes sont

Discussion - 57 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

victimes de la domination symbolique, cette « vocation » fera qu’elles seront en accord et

même très heureuses d’effectuer les tâches subalternes par exemple, ou des tâches demandant

soumission, gentillesse, docilité, dévouement, dispositions typiquement féminines. Pour M.

Duru Bellat (1990), les termes qu’utilisent les enseignants quand il s’agit d’évaluer les

comportements de leurs élèves sont révélateurs : filles dociles, sérieuses, chez elles sont

valorisés conformisme et passivité, quitte à le leur reprocher. Si elles réussissent, c’est

vraiment grâce à leur travail. Les garçons, eux, sont toujours supposés gâcher par leur

conduite un potentiel dont on ne se doute pas, ils sont décrits comme plus créatifs, originaux,

indépendants.

Aussi devons nous tenir compte du fait que les individus appartiennent à différents

groupes ou catégories sociales qui ont une importance pour eux et qui définissent d’une

certaine manière ce qu’ils sont amenés à être, la façon dont ils peuvent se comporter et la

lecture des situations dans lesquelles ils se trouvent. Plus qu’en fonction d’une différenciation

personnelle, c’est bien en fonction d’une différenciation sociale, c’est-à-dire l’appartenance à

certaines catégories sociales que les attributions sont faites.

5.4 Des attitudes vis-à-vis de la réussite qui refléteraient une norme ?

Plusieurs éléments peuvent nous laisser penser que le positionnement des sujets

pourrait traduire le poids d’une norme plus générale. Les sujets ne sont pas influencés par leur

trajectoire scolaire, c’est-à-dire le fait qu’ils aient redoublé ou non, qu’ils aient une bonne ou

une mauvaise moyenne, on peut penser qu’il y a donc chez les sujets une homogénéisation de

la façon de percevoir la réussite. Ainsi la norme pèserait plus que leur propre parcours.

D’autre part, il n’y a pas eu d’effet sur les réponses des sujets sur la partie relative à

l’explication de la réussite selon la version de questionnaire qu’ont eu les sujets

Discussion - 58 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

précédemment (Maths vs Arts). L’absence d’effet de contexte viendrait ici renforcer l’idée

d’une vision assez normative de la réussite.

De plus, quand on parle de réussite, tous les systèmes explicatifs sont valorisés, alors

qu’ils le sont moins dans les autres conditions. Les élèves adhèrent à plus d’explications

différentes en réussite, même si la responsabilité de l’élève est mise en avant. Cela pourrait

renvoyer aussi à cette idée de norme, comme si les élèves reconnaissaient des responsabilités

partagées.

Dans la mesure où nous avons observé que l’adhésion plus ou moins importante à la

norme d’internalité ne joue pas sur la façon de percevoir la réussite, nous pensons que c’est un

facteur sociologique qui interviendrait, plus qu’un facteur lié à des caractéristiques

personnelles. Les sujets, en s’attribuant la responsabilité de leur réussite et de leur échec

trouvent des justifications allant dans le sens de la norme.

Aujourd’hui, même si les inégalités sociales sont reconnues au cœur des inégalités

scolaires, il est intéressant de voir que les élèves, les principaux intéressés, ont tendance à

plutôt s’attribuer à eux-mêmes la responsabilité de leur destin scolaire. Les élèves feraient

comme si les inégalités sociales n’existaient pas, comme si réussir ou échouer ne dépendait

que d’eux (travail, effort, don). Dans ce contexte, qu’il y ait des inégalités scolaires leur

paraîtraient naturel voire légitime.

Contrairement à ce qu’avançait A. Antibi, les élèves ne semblent pas vivre la situation

comme injuste. Ils sont implicitement d’accord et cela participe à ce fonctionnement. Alors

pourquoi cela changerait-il ? Cette « norme des inégalités scolaires » ne participerait-elle pas

au fond à une utilité sociale qui permettrait de perpétuer l’idéal méritocratique ?

Discussion - 59 -

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LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

Lorsque nous avons construit notre questionnaire, nous nous attendions à voir les

sujets réagir sur la situation d’échec. Or ce que nous avons observé c’est qu’ils adhèrent plus

aux explications dans un contexte de réussite que d’échec. Un des éléments de réponse

pourrait être que la réussite est extrêmement valorisée dans notre société, et qu’elle constitue

un enjeu social important. Il serait intéressant d’explorer ce qui sous tend cet enjeu, cela

pourrait fournir d’autres perspectives d’études.

Discussion - 60 -

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Conclusion

Cette étude nous a permis d’approcher la perception des élèves concernant l’évaluation

et plus généralement les justifications qu’ils donnent lorsqu’ils doivent expliquer différentes

situations d’évaluation. Les élèves attribuent plus de responsabilité à eux-mêmes (capacités et

travail fourni) dans leurs performances scolaires qu’à des éléments de contexte

(environnement socio familial) ou encore à la mécanique sélective de l’école. Parmi les

missions du COP au sein des établissements scolaires, l’une d’elles est d’aider l’élève et son

professeur à s’accorder sur une orientation et le conseil de classe est un des moments cruciaux

de la concertation. Très souvent, le COP est en position de médiateur entre les élèves et les

professeurs, entre l’ambition des uns et les pronostics des autres. Il apparaît alors primordial

de comprendre comment les uns et les autres perçoivent le système de notation puisque bien

souvent les notes sont l’outil « objectif » pour trancher dans un sens ou dans l’autre. Cette

recherche nous a permis d’approfondir nos connaissances sur les élèves et l’évaluation,

connaissances indispensables sur l’institution et ses mécanismes qui s’avèrent essentielles

pour garder le recul nécessaire à nos missions.

Finalement quel est l’apport de ce type de recherche pour une approche psychologique

en orientation ? Notre recherche souligne que la façon dont les élèves perçoivent la réussite

est notamment liée au fait qu’ils ont intégré les normes d’un système éducatif « inégalitaire » ;

elle est également influencée par leur construction de genre. Ces aspects sont à prendre en

compte dans notre travail d’accompagnement auprès des élèves. Mettre en question les

jugements normatifs portés sur leur devenir, mettre en travail les différentes représentations

selon leur sexe, n’est-ce pas favoriser la réflexion sur soi qui aidera les élèves à cheminer dans

la construction d’un projet d’étude et d’un projet professionnel ?

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touche de la valeur de l'école ? , Juillet 2005, N°2005-079 Inspection générale de

l’éducation nationale : Bardi, A.M. ; Inspection générale de l’administration de l’éducation

nationale et de la recherche : Bouzaher, M.; Dyckmans, A.; Houchot, A.; Leblanc, M.;

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Annexes

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Marie CLAINCHARD, Anne DELIGNY, Fanny THIBAULT Conseillères d’orientation psychologues stagiaires Université de Provence, UFR Psychologie, Sciences de l’éducation, Centre de Formation des conseillers d’orientation psychologues 29 av R.Schuman, 13621 Aix-en-Provence cedex 1

Aix-en-Provence, le 22 novembre 2005

A l’attention de M.BONIFAY, proviseur, et de M.FRAPPA, proviseur adjoint, lycée d’enseignement général et technologique JOLIOT-CURIE, Aubagne

Objet : demande d’intervention auprès des classes de seconde Messieurs,

Nous sommes actuellement en première année de formation de conseillère d’orientation psychologue. Dans ce cadre, nous menons un travail d’étude et de recherche portant sur l’évaluation, et plus particulièrement sur la perception qu’en ont les élèves. Nous nous demandons notamment s’ils se jugent responsables, acteurs de leurs réussites et de leurs échecs. Pour mener à bien notre étude, nous souhaitons faire passer notre questionnaire (en cours d’élaboration) à un nombre conséquent d’élèves de seconde. L’une d’entre nous, ayant effectué un remplacement en tant que COP dans votre établissement, l’année dernière, celui-ci nous semble tout à fait correspondre aux critères de nombre et de profil d’élèves que nous nous sommes fixés.

Aussi, nous nous tenons à votre disposition afin d’expliciter notre projet et d’envisager avec vous les modalités d’une possible collaboration.

Dans l’attente, Veuillez agréer, Messieurs, l’assurance de notre considération

distinguée. Marie CLAINCHARD Anne DELIGNY Fanny THIBAULT

UFR de Psychologie, CEFOCOP Cio d’Aubagne C.ROUYER, Directrice des études C.DAVER Directeur

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Marie CLAINCHARD, Anne DELIGNY, Fanny THIBAULT Conseillères d’orientation-psychologues stagiaires Université de Provence, UFR Psychologie, Sciences de l’éducation, Centre de Formation des conseillers d’orientation psychologues 29 av R.Schuman, 13621 Aix-en-Provence cedex 1

Aix-en-Provence, le 10 janvier 2006

A l’attention des professeurs principaux des classes de seconde Objet : passation de questionnaires Mesdames, Messieurs,

Nous sommes actuellement en première année de formation de conseillère d’orientation-psychologue. Dans ce cadre, nous menons un travail d’étude et de recherche portant sur l’évaluation, et plus particulièrement sur la perception qu’en ont les élèves. Nous nous demandons notamment s’ils se jugent responsables, acteurs de leurs réussites et de leurs échecs. Pour mener à bien notre étude, nous viendrons proposer notre questionnaire à toutes les secondes du lycée Joliot-Curie entre fin janvier et début février. Nous prendrons ainsi un peu de votre temps et de celui des élèves, nous espérons vous déranger le moins possible dans votre organisation et votre programme. Nous vous remercions par avance pour votre coopération à notre étude. Nous vous demandons simplement, lorsque vous informerez vos élèves de notre venue, de nous présenter en tant qu’étudiantes de lettres et sciences humaines, et non pas Cop stagiaires, ceci afin de contrôler un biais éventuel par rapport au thème de l’évaluation. Nous vous tiendrons au courant des résultats de notre travail, par un écrit succinct que nous comptons finaliser et vous transmettre d’ici la fin de l’année. Nous sommes à votre disposition pour toute question si nécessaire.

Dans l’attente de notre prochaine rencontre, nous vous adressons nos

salutations confraternelles. Marie CLAINCHARD Anne DELIGNY Fanny THIBAULT

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PLANNING : Questionnaire sur l’évaluation.

Mardi 31 janv

Merc 01 fév.

Jeudi 02 fév. Vend. 03 fév. Merc. 08 fév.

8h – 9h

201 Mme Lacroix s.B102

206 Mme Gainet s. A002

220 Mme Donot-Henrot s.C103

217 M. Stenger s. de SVT

9h – 10h 204 Mme Boillot

s.B008

213 Mme Epplin

s. A002

212 Mme Fuster s. de Phys.

208 Mme Pradel

s.B202

214 M. Saint-

Jours s.C106

10h -11h

219 M. Dewilde

s.P003

203 Mme

Hallier s. de SVT

218 Mme

Fourneron s. P007

215 Mme Sartori

s. C110

209 Mme Di Meglio

s. de SVT

11h – 12h

205 M. Chrétien

s.C105

202 Mme

Martini s. B007

216 Mme Boulet s. de Phys.

/210 Mme Etienne

s.C102

207 Mme Maneglia

s. B111

12h – 13h

211 Mme Camau

s.A108

Université de Provence UFR « Psychologie, Sciences de l’éducation »

Département de psychologie développementale et différentielle

Centre de formation des Conseillers d’Orientation-Psychologues Promotion 2005-2007

LA PERCEPTION DE L’EVALUATION PAR LES ELEVES Comment expliquent-ils la réussite scolaire ?

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Auteurs : Marie Clainchard, Anne Deligny, Fanny Thibault Mots clés : Evaluation, Jugement social, Inégalités scolaires, Norme d’internalité, Système explicatif de la réussite. PROBLEMATIQUE ET THEORIE : L’histoire de l’évaluation montre que celle-ci est depuis longtemps assimilée à la notation qui aboutit à un classement des élèves. Selon les travaux de la docimologie, une notation juste doit suivre la forme gaussienne. Cet aspect de l’évaluation est intégré par les divers acteurs du système éducatif, au cœur duquel l’évaluation apparaît comme un jugement social : évaluer c’est attribuer une valeur. Ainsi, une norme des inégalités scolaires peut émerger dans le monde enseignant. Certains accusent le système éducatif, en tant que futures conseillères d’orientation-psychologues, nous nous sommes questionnées sur la manière dont les élèves perçoivent l’évaluation, sur leur système explicatif de la réussite. Au regard des travaux sur la norme d’internalité, les élèves vont-ils reconnaître une part de responsabilité dans leurs échecs comme dans leurs réussites ? METHODE : Nous avons réalisé cette étude exploratoire auprès de 589 élèves de seconde générale et technologique. Nous leur avons proposé un questionnaire présentant différents scénarios de situations évaluatives, diverses propositions d’explication de la réussite, et une échelle d’internalité. Deux versions de questionnaires différaient selon la matière (Maths vs Arts), les sujets passaient l’une ou l’autre. RESULTATS ET DISCUSSION : Nous avons observé un effet de la matière et avons pu vérifier combien les élèves ont intégré le caractère social propre à chaque matière, et notamment le rôle sélectif des mathématiques. Nous avons observé que le rôle de l’élève et l’explication du professeur sont préférentiellement mis en avant pour expliquer une notation. Les sujets valorisent d’autant plus des explications concernant le rôle de l’élève face à une distribution de notes où tout le monde réussit. Sur le principe de la croyance en un monde juste, les élèves en arriveraient à trouver légitime ce qui leur arrive (échec comme réussite). Enfin, les explications de la réussite se différencient selon le sexe : les filles privilégient la responsabilité de l’élève et les garçons des éléments de contexte. Comment interpréter cette différence ?