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Mathieu GUIDÈRE Introduction à la traductologie TRADUCTO Penser la traduction : hier, aujourd’hui, demain 3 e édition

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Mathieu GUIDÈRE

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Introduction à la traductologie

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Penser la traduction : hier, aujourd’hui, demain

3e édition

Introduction à la traductologiePenser la traduction : hier, aujourd’hui, demain

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TRADUCTO

Collection destinée aux étudiants en traduction du 1er degré supérieur aux niveaux plus élevés ainsi qu’aux professionnels, Traducto offre des manuels ciblés, avec un appareil pédagogique développé («Faites le point», «Pour aller plus loin», «Testez vos connaissances»…), conçus par des auteurs renommés.

Déjà parus :

• BALLARD Michel, Histoire de la traduction. Repères historiques et culturels

• BOCQUET Claude, La traduction juridique. Fondement et méthode

• GUIDÈRE Mathieu, Introduction à la traductologie. Penser la traduction : hier, aujourd’hui, demain (3e éd.)

• GUIDÈRE Mathieu, La communication multilingue. Traduction commerciale et institutionnelle

• LAVAUR Jean-Marc, ERBAN Adriana, La traduction audiovisuelle. Approche interdisciplinaire du sous-titrage

• RAUS Rachele, La terminologie multilingue. La traduction des termes de l’égalité H/F dans le discours international

• WECKSTEEN Corinne, MARIAULE Michaël, LEFEBVRE-SCODELLER Cindy, La traduction anglais-français. Manuel de traductologie pratique

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Mathieu GUIDÈRE

Introduction à la traductologie

TRADUCTO

Penser la traduction : hier, aujourd’hui, demain

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Couverture et maquette intérieure : cerise.beMise en page : Nord Compo

© De Boeck Supérieur s.a., 2016 3e édition Fond Jean Pâques, 4 – 1348 Louvain-la-Neuve Tous droits réservés pour tous pays.Il est interdit, sauf accord préalable et écrit de l’éditeur, de reproduire (notamment par photocopie) partiellement ou totalement le présent ouvrage, de le stocker dans une banque de données ou de le communiquer au public, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit.

Imprimé en Belgique

Dépôt légalBibliothèque nationale, Paris : janvier 2016 ISSN 2030-8914Bibliothèque royale de Belgique, Bruxelles : 2016/13647/005 ISBN : 978-2-8073-0008-8

Pour toute information sur notre fonds et les nouveautés dans votre domaine de spécialisation, consultez notre site web : www.deboecksuperieur.com

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AVANT-PROPOS

e présent ouvrage offre une présentation synthétique du vaste, mais peu connu,domaine de la traductologie. Il propose un exposé des activités de traduction sansaucune prétention à l’exhaustivité. Les principaux acquis des études traductologiquesont été pris en considération, mais l’originalité de l’ouvrage tient au fait qu’il met en

évidence la diversité des approches théoriques et des pratiques professionnelles dans le domainede la traduction et de l’interprétation.

L’autonomie de la traductologie est affirmée tout au long de l’ouvrage, malgré l’orientation inter-disciplinaire qui sous-tend l’ensemble des chapitres. En se focalisant sur les problématiques pro-prement traductologiques, l’ouvrage permet de délimiter un champ d’étude propre et des ouver-tures nécessaires et utiles.

Cette introduction à la traductologie s’adresse à tous ceux qui ont recours à la traduction, que cesoit dans le cadre universitaire ou professionnel. Par sa conception pratique, elle se veut un outilde référence pour les futurs traducteurs, interprètes, adaptateurs, localisateurs, professeurs delangues étrangères ou formateurs aux métiers de la traduction.

L’organisation de l’ouvrage vise avant tout à en faciliter la consultation. Les chapitres sont jalon-nés d’aperçus généraux et d’encadrés synthétiques. Les idées développées sont illustrées pardes exemples et des citations pour aider à la compréhension et à la mémorisation. Les termestechniques de la traductologie sont systématiquement définis et référencés. Un index final permetde s’y retrouver aisément.

Chaque chapitre est couronné par un résumé des idées principales et par une série de questionsqui reprennent les points abordés. Ces questions permettent également de mettre en évidenceles aspects les plus importants du chapitre. La rubrique des lectures conseillées est conçueautant comme un rappel des principaux acquis que comme une mise en perspective des idéesdéveloppées. L’ensemble vise à initier le lecteur à la richesse de la traductologie.

À travers ce volume, nous espérons contribuer à la diffusion d’une culture traductologique insuf-fisamment connue. Nous voulons également mettre à la disposition des étudiants francophones,sur les cinq continents, les acquis des études les plus marquantes et les plus récentes concernantla traduction et l’étude des langues et cultures étrangères.

La dimension didactique et pédagogique tient une place particulière dans notre esprit parce quenous aimerions que cet ouvrage devienne un outil de travail pour les étudiants et une source d’ins-piration pour les enseignants en langues et en traduction.

Mathieu GuidèreProfesseur des Universités

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INTRODUCTIONL’âge de la traduction

vec la société de l’information mondialisée, nous sommes entrés de plain-pied dansl’âge de la traduction généralisée. Aujourd’hui, son importance dans le mouvementglobal n’est plus à démontrer : on traduit de plus en plus de documents et cela se faitde plus en plus vite, vers des langues sans cesse plus nombreuses. Cette tendance

est accentuée par les progrès technologiques dans les secteurs de l’information et de la commu-nication.

Le renouveau d’intérêt pour la traduction bénéficie aussi bien aux leaders économiques qu’auxacteurs de la société civile. La traduction joue un rôle clé dans d’innombrables domaines de la viesociale et contribue au respect de la diversité linguistique et culturelle à l’échelle nationale et inter-nationale. Le Prix Nobel Isaac Bashevis Singer estime que la traduction demeurera « l’essencemême de la civilisation ». Dans de nombreuses régions du monde, elle est une donnée essentiellede l’évolution politique, économique et sociologique. Ainsi, pour le Vieux continent, Umberto Ecoestime que « la langue de l’Europe, c’est la traduction ».

Cette prise de conscience de l’importance de la traduction explique le renouveau d’intérêt pourses aspects pratiques et théoriques. Beaucoup soulignent à quel point l’histoire de la traductionen Europe se confond avec l’histoire de l’Occident : « Des concepts différents de la traduction ontprévalu à des époques différentes. (…) la fonction et le rôle du traducteur ont radicalementchangé. L’explication de tels changements relève de l’histoire culturelle (…) Quant aux positionsà l’égard de la traduction et des conceptions traductionnelles qui ont prévalu, elles appartiennentà l’époque qui les a produites et aux facteurs socioéconomiques qui ont dessiné et déterminé leurépoque » (Bassnett 1980 : 74).

D’autres insistent sur la diversité des missions assignées à la traduction selon les époques et lescommanditaires : « On a traduit pour découvrir une culture, pour s’approprier un savoir. On a tra-duit pour répandre ou défendre des idées religieuses, pour imposer ou combattre des doctrinesphilosophiques ou des systèmes politiques. On a traduit pour créer ou parfaire une langue natio-nale. On a traduit pour révéler une œuvre, par admiration pour un auteur. On a traduit même fic-tivement, faisant passer pour traductions des œuvres originales. On a traduit pour faire progresserles sciences et les techniques. On a traduit pour mille et une raisons. La traduction était tout à lafois arme et outil. Elle remplissait une mission » (Newmark 1982 : 4).

Les exemples historiques qui illustrent chacun de ces aspects ne manquent pas, car « la traduc-tion est de tous les temps. Orale d’abord, écrite ensuite, elle a toujours existé. Elle fait partie inté-grante de la vie intellectuelle de tout peuple civilisé » (Newmark 1982 : 366).

De nos jours, la traduction est intimement liée au mouvement global de la mondialisation. Elle està la fois le vecteur et le produit de ce mouvement. Outre le caractère multilingue des institutionset des organisations internationales, la diversité linguistique et culturelle de notre monde est sou-tenue par des politiques linguistiques et des programmes de traduction ambitieux. Car la commu-nauté internationale est plus que jamais consciente des enjeux civilisationnels liés à la traduction.On le sait désormais : qui sème le vent récolte la tempête, qui diffuse la traduction cueille la paix.

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CHAPITRE 1Situation de la traductologie : délimitation du champ

La discipline qui se donne la traduction pourobjet d’étude est apparue dans la secondemoitié du XXe siècle, mais elle a reçu plusieursappellations éphémères (science de la traduc-tion, translatologie, etc.) avant de devenir la« Traductologie » en français et « TranslationStudies » en anglais.

Son champ d’étude a été rigoureusementdéfini, pour la première fois, par JamesHolmes (1972) dans un article intitulé « TheName and Nature of Translation Studies ».Dans cet article, Holmes distingue deux gran-des branches : la « traductologie théorique » etla « traductologie appliquée ». La première(théorique) a pour objet la description desphénomènes de traduction, la définition desprincipes explicatifs et la théorisation des pra-tiques traductionnelles ; la deuxième (appli-quée) vise la mise en œuvre des principes etdes théories pour la formation des traduc-teurs, le développement d’outils d’aide à latraduction ou encore la critique des traduc-tions.

Pour Holmes, ces deux branches entretien-nent une relation dialectique et ne doivent, enaucun cas, être perçues de façon exclusive niunidirectionnelle. En effet, la traductologiethéorique nourrit les applications pratiques, etla traductologie appliquée permet d’enrichir laréflexion théorique. Elles sont mises sur lemême plan, et c’est pourquoi il convientd’accorder à chacune une égale attention. Cefaisant, Holmes ne définit pas d’objet d’étudeunique à la traductologie : il envisage aussibien l’étude du produit (le texte traduit) quecelle du processus (le déroulement de la tra-duction). Selon lui, l’étude traductologiquepeut être « générale », c’est-à-dire embrasserla totalité de la discipline, ou bien « restreinte »

à certains domaines, types de textes, problè-mes spécifiques ou époques historiques.L’essentiel est que le centre d’intérêt soit la« traduction » et non pas, par exemple, la« langue », le « langage », la « psychologie »,la « sociologie » ou encore la « technologie »,même si ces aspects peuvent être importantsdans le produit ou le processus de traduction.Tout est question de focalisation et de pointde vue.

Car la traductologie a dû lutter pour trouver saplace parmi les autres disciplines qui se dis-putaient son objet d’étude. Ainsi, la traductiona été envisagée tour à tour comme une bran-che de la linguistique contrastive, de la linguis-tique appliquée, de la linguistique textuelle, dela psycholinguistique, ou encore comme uneforme de communication multilingue ou biende communication interculturelle ; sansoublier les approches littéraires, philosophi-ques ou anthropologiques auxquelles elle a pudonner lieu au fil du temps.

Bref, la traduction a été abordée suivant demultiples angles, mais aucune perspectived’étude n’a épuisé son objet ni ses problé-matiques, c’est pourquoi elle a évolué versune discipline autonome d’essence interdisci-plinaire. La traductologie forme aujourd’hui unchamp de recherche étendu et ouvert, maisayant des questions propres et des conceptsadaptés à son objet protéi forme. Lesemprunts conceptuels et méthodologiquesfaits aux autres disciplines ne doivent pas êtreenvisagés dans la contradiction mais dans lacomplémentarité, parce que chaque appro-che éclaire, au fond, un aspect particulier de latraduction.

Ainsi, la traductologie nécessite une inter-rogation sur ses fondements et sur les condi-

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tions de sa validité. Cette approche épistémo-logique est une réflexion critique concernantla démarche intellectuelle et les méthodes detous ceux qui s’intéressent à l’activité de tra-duction.

Les questions sont de deux sortes : dansquelle mesure la traductologie peut-elle êtreune discipline autonome ? Que peut être etque doit être une discipline de la traduction ?Il est difficile de répondre à ces questionsparce qu’il y a peu d’ouvrages qui abordentdirectement la réflexion épistémologique.

Considérer la traductologie comme une disci-pline, c’est déterminer les caractéristiquescommunes qu’elle partage avec les autres

disciplines mais aussi les spécificités qui ladistinguent des disciplines apparentées. Or,entre les publications théoriques concernantles problèmes de traduction et les études decas empiriques, on constate que l’appellation« traductologie » recouvre des conceptions etdes pratiques très diversifiées, et que cettediversité n’est pas sans incidence sur l’identi-fication de l’objet d’étude ni sur les méthodesde travail.

Il est utile, par conséquent, d’aborder la tra-ductologie d’abord au sein d’une épistémolo-gie générale, car cela permet de la situerparmi les autres disciplines, avant d’envisagerune épistémologie qui lui est spécifique.

La traductologie est traditionnellement clas-sée parmi les sciences humaines et elle estsouvent considérée comme une science dulangage. Il existe pourtant des études quirecherchent des principes généraux applica-bles à tous les types de textes, voire des« théorèmes pour la traduction » (Ladmiral1994). Certaines études empruntent mêmeleurs postulats et leurs méthodes à la neurolo-gie, et veulent rattacher la traduction auxsciences naturelles en centrant la recherchesur le sujet humain.

De fait, l’interdisciplinarité de la traductologiea été maintes fois affirmée et démontrée (Gile2005 : 258). Aussi, la situer parmi les scienceshumaines ou bien parmi les sciences naturel-les est un choix qui implique des conséquen-ces aussi bien au niveau des objectifs pour-suivis que des méthodes employées. En tantque « science de l’homme », la traductologiedoit prendre en considération des facteursextérieurs qui ne relèvent pas proprement del’objet concret et limité de la traduction, entant que produit (le texte). Elle doit toujourstenir compte du contexte, c’est-à-dire desphénomènes historiques, sociaux, psycholo-giques et politiques qui déterminent l’activitéde traduction. De ce point de vue, il existe unesocio-traductologie et une psycho-traducto-logie sous-jacentes à toute étude sur la tra-duction.

Mais certaines études traductologiques pro-cèdent également par formalisation et modéli-sation des données, en utilisant des formulesd’équivalence et parfois des modèles statisti-ques pour leur traitement. La traduction auto-matique n’a-t-elle pas été, dans les années1950, à l’origine du traitement automatique dulangage (TAL) ? Tous les logiciels de traduc-tion assistée par ordinateur ne sont-ils pas lapreuve de la « scientificité » de la traduction ?Aucun autre domaine des sciences du lan-gage n’est aussi avancé dans l’automatisationque la traduction. Il suffit de parcourir la listedes outils informatiques disponibles sur lemarché pour se convaincre de la volonté deschercheurs d’introduire la rigueur des mathé-matiques et de la logique dans la disciplinetraductologique.

Il y aurait ainsi une traductologie interne qui nes’intéresserait qu’au processus de la traduc-tion et une traductologie externe qui s’intéres-serait à la traduction en tant que produit desfacteurs politiques, historiques, sociologiquesou autres. Mais dans les deux cas, il s’agitd’une traductologie ouverte aux influences etaux acquis des sciences humaines et socia-les. Ce sont là les lignes de force et de démar-cation de la discipline.

1. ÉPISTÉMOLOGIE GÉNÉRALE

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Une discipline aux directions multiples

La traductologie est d’essence interdiscipli-naire parce qu’elle cherche à appréhender laglobalité du phénomène traductionnel. Il n’estpas étonnant qu’elle ait besoin de nombreuxmoyens d’investigation empruntés à d’autresdisciplines pour embrasser la totalité de sonobjet protéiforme et pourtant spécifique.

Sa spécificité réside dans son empirisme :l’homme a de tout temps pratiqué la traduc-tion, mais il ne l’a pas toujours théorisée. Il aégalement traduit dans des proportions sanscommune mesure avec sa réflexion sur la tra-duction. Il s’ensuit que la traductologie estaujourd’hui fondée avant tout sur l’empirisme,c’est-à-dire sur la pratique traductionnelle etsur l’observation des faits de traduction. Elle aacquis son autonomie en s’intéressantd’abord aux phénomènes traductionnels telsqu’on peut les observer à travers des textestraduits, des corpus et des productions attes-tées (Toury 1995). Il faut ici replacer dans leurcontexte historique et didactique les appro-ches prescriptives de la traduction qui visaientà soumettre les traducteurs à telle ou tellenorme ou règle préétablie. Elles sont datées etlargement dépassées.

En tant que discipline empirique et descrip-tive, la traductologie tente d’identifier, à partirde l’observation, des principes et des phéno-mènes récurrents dans l’activité de traduction.L’ensemble organisé des principes et desphénomènes ainsi identifiés forme une théo-rie. La théorie du « sens-texte » de l’École deParis (D. Seleskovitch) en est une illustration.

Comme pour toute discipline empirique, l’éla-boration d’un cadre théorique propre à la tra-ductologie passe par trois étapes : l’observa-tion, l’hypothèse et la vérification.

1) L’observation consiste dans l’examendétaillé des faits de traduction. Elle est enpartie construite et orientée, parce qu’elleest soumise à la perception de l’obser-vateur. Certaines composantes de l’obser-vation traductologique ne sont pasnégligeables : la compétence linguistiquepréalable, le degré de culture du sujet, lescontraintes institutionnelles, etc. Pour ne

pas ajouter à la complexité de cette étape,le principe de base est que l’observateurn’exerce pas son observation sur ses pro-pres traductions afin de séparer méthodo-logiquement le sujet observateur de l’objetobservé.

2) L’hypothèse consiste à proposer un prin-cipe ou une règle explicative à partir de lasomme d’observations réalisées. Elle pro-cède d’un raisonnement par induction quiva du particulier (l’étude de cas) au général(la traduction dans son ensemble). Dupoint de vue logique, l’induction présentecertes quelques difficultés, mais elle est laseule modalité qui permette de passerd’un grand nombre d’observations à unprincipe général. Toujours est-il quel’hypothèse ainsi posée par le traductolo-gue nécessite parfois le recours à l’expéri-mentation pour la vérifier.

3) La vérification permet de confirmerl’hypothèse : si celle-ci n’est pas infirmée,elle peut prétendre au statut de règle ou deloi. Mais la vérification nécessite desallers-retours incessants entre la théorie etla pratique traductionnelle. C’est le proprede la méthode empirico-déductive.

On a pu observer au cours du XXe siècle unexcès d’abstraction et de théorisation qui arendu parfois les traducteurs de terrainméfiants à l’égard de la traductologie. Or,l’élaboration scientifique d’une théorie estconditionnée par le respect de certaines pro-cédures. Pour être utile et admise par les pra-ticiens, l’étude traductologique doit répondreà certains principes :

1) Principe de cohérence : elle ne doit pasprésenter de contradiction interne.

2) Principe d’exhaustivité : elle doit rendrecompte du plus grand nombre de faits detraduction, en proposant le maximumd’exemples pertinents.

3) Principe de simplicité : elle doit utiliser lemoins possible d’axiomes et de concepts.

4) Principe de prédictibilité : elle doit permet-tre de prévoir la validité d’une traductionnouvelle ou d’autres solutions que cellesproposées.

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CHAPITRE 1

Qu’est-ce que la traductologie ?

Le mot « traductotologie » désigne littéralement la science (logos) de la traduction (traducto). Garnier (1985 : 13) attire l’attention sur la question de la dénomination : « les dénominations globales que l’on donne aux études dont l’objet est la traduction sont variables : outre théorie [de la traduction], on rencontre également science de la traduction ou encore traductologie ».

Il est peut-être utile de préciser que « science de la traduction » est l’équivalent communément admis de l’anglais « Translation Studies » qui désigne le vaste domaine des études sur la traduction dans le monde anglo-saxon. Ainsi, Bassnett (1980 : 2) estime, dans le prolongement des propositions d’André Lefevere, que la traductologie (Translation Studies) est l’étude de la production et de la description des traductions.

En réalité, la traductologie est la discipline qui étudie à la fois la théorie et la pratique de la traduction sous toutes ses formes, verbales et non verbales. Si l’on se donne pour objet d’étude les diverses manifestations de la traduction, il convient d’étudier tout autant les aspects proprement traductionnels que ceux non- traductionnels, extra-traductionnels, para-traductionnels et méta-traductionnels : « La définition du statut de la traductologie devrait donc montrer comment cette science nouvelle, après avoir dépassé ce réseau de dépendances, trouvera son autonomie et sa spécificité » (Garnier 1985 : 28).

Aussi, l’objet de la traductologie est bien la traduction dans toutes ses manifestations. Qu’il s’agisse de traduction orale ou écrite, générale ou spécialisée, le traductologue réfléchit sur toutes les formes d’intervention du traducteur. Même si elle a été envisagée jusqu’ici comme une branche de la traductologie, la « théorie de la traduction » se confond en réalité avec la pratique du traducteur.

Ces principes relèvent d’une épistémologiegénérale et sont en grande partie applicablesà la traductologie. Mais la traduction possèdedes particularités qui appellent également uneépistémologie spécifique.

L’étape de vérification des hypothèses évo-quée précédemment revêt un caractère parti-culier en traductologie. En effet, elle ne seconçoit pas nécessairement en termesd’expérimentation (répéter la même expé-rience dans divers contextes), mais elle prendplutôt la forme de l’exemplification (donnerplusieurs exemples pour un même phéno-mène). Il convient de noter, cependant, quel’exemple n’a pas une valeur de preuve ; il a lafonction de test de validité. En d’autres ter-mes, l’exemple choisi ne sert pas à dire com-ment il faut traduire (approche normative)mais à vérifier si la traduction envisagée estvalide ou non (approche descriptive).

L’exemplification paraît donc problématiqueparce qu’elle implique un choix : commentchoisir et construire des exemples ? On saitque les exemples doivent être attestés (tra-ductions publiées, enregistrements profes-sionnels, etc.), mais où trouver ces faits de tra-duction attestés et comment construire les« corpus » d’étude des traductions ? En réa-lité, tout dépend de l’objectif que l’on sedonne pour l’étude.

Autre question problématique : sur quels cri-tères peut-on juger que telle traduction estacceptable ou non ? La question de la critiqueet de l’évaluation de la qualité des traductionsest complexe et elle a donné lieu à de nom-breuses études (House 1997).

En tout état de cause, l’acceptabilité d’unetraduction est fondée à la fois sur le jugementdes sujets traducteurs et sur l’application d’unensemble de principes qui font partie de l’uni-vers de référence de ces sujets et qu’il appar-tient au traductologue d’identifier et dedécrire.

S’il est acquis aujourd’hui que l’étude traduc-tologique est de nature descriptive et non pasprescriptive, cela ne signifie pas que l’activitéde traduction telle qu’elle s’exerce n’est passoumise à des règles et à des normes. Celles-

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ci peuvent être consciemment respectées ouinconsciemment intériorisées, mais elles exis-tent toujours en fonction des contextes et des

finalités de la traduction. D’où l’intérêt d’uneréflexion épistémologique propre à la disci-pline traductologique.

La spécificité et l’autonomie de la traductolo-gie ont été âprement débattues tout au longde la seconde moitié du XXe. Pergnier (1978 :5), par exemple, critique les approchesexistantes : « Ceux qui prétendent fonder unescience de la traduction ne font rien d’autre laplupart du temps que d’étudier la traductiondu point de vue d’une science plus vaste etcomme application de cette science. » Etl’auteur de conclure qu’« aucune science de latraduction n’a, à ce jour, développé desméthodes et un objet spécifique ». Et pourcause, cet objet est, selon lui, « implicitementconsidéré comme donné par une sorte dedéfinition tautologique », de sorte que l’étudede la traduction se situe toujours « au pointd’interférence du champ d’application de plu-sieurs disciplines ».

Pour Pergnier (1978 : 7), même les travaux lesplus importants, comme ceux de Vinay et Dar-belnet, Mounin, Catford, « sont en réalité bienplus des théories de la langue appliquées à lacompréhension des difficultés inhérentes àtout acte de traduction que des prolégomènesà une science de la traduction ».

Steiner (1975 : 74-75) s’est justement inté-ressé à la mise au point de ces « prolégomè-nes ». Son livre After Babel est une contribu-tion majeure à la réflexion sur l’importance etle rôle de la traduction tout au long de l’his-toire. Cette histoire de la traduction est analy-sée en termes de systèmes : monadistes,dualistes, triadiques et, enfin, quadripartites.Dans cette perspective, Steiner se fait le pro-moteur d’une déontologie de la traductionintégrant une rigueur épistémologique quipasse par une révision de la terminologie utili-sée par les traductologues.

L’originalité du parcours herméneutique pro-posé dans son ouvrage se distingue nette-ment de l’ensemble des publications théori-ques sur la traduction : il est clair que Steiner

fait partie de la liste restreinte de ceux qui ontécrit quelque chose de fondamental et denovateur sur la traduction.

Dans le sillage de Steiner, il faut insister sur unpoint méconnu : traduire, c’est déjà faire de latraductologie. Parfois consciemment maisbien souvent inconsciemment. L’activité detraduction suppose, en effet, une consciencetraductologique minimale. Même dans le casd’un apprentissage « sur le tas », l’expériencemontre qu’il existe une réflexion traductologi-que latente qui préside au travail de l’apprentitraducteur. Cette réflexion n’est pas toujoursbien conceptualisée mais elle existe. L’exem-ple des traducteurs compétents qui n’ontjamais suivi le moindre enseignement de tra-duction le montre assez.

Cette spécificité explique la communautéd’intérêt des études traductologiques et dessciences cognitives. Dans les deux cas, l’objetde l’étude (la traduction) et le sujet pour la réa-liser (le traducteur) se confondent. Malgré lamultiplication des outils d’aide à la traduction,le sujet traduisant demeure un artisan dulangage.

Cette situation inédite a des implicationspratiques : pour décrire sa propre activité, letraducteur doit s’appuyer sur le raisonnementlogique, à partir de postulats et de règles.D’où l’importance d’une réflexion épistémolo-gique et méthodologique rigoureuse. C’est lepremier fondement d’une autonomie discipli-naire de la traductologie.

Cela ne signifie nullement que la traductologieest amenée à cesser tout rapport avec lesautres disciplines, afin d’affirmer et de préser-ver son autonomie. La diversité des situationset des pratiques montre la richesse indéniabledes approches interdisciplinaires, mais il estindispensable d’apporter quelques précisionssur ce type d’approche.

2. ÉPISTÉMOLOGIE DE LA DISCIPLINE

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Lorsque les acquis des recherches traducto-logiques sont mis au service d’autres discipli-nes, l’autonomie de la discipline est d’autantplus forte, puisqu’on est dans le domaine de latraductologie appliquée. C’est le cas, parexemple, de l’apport de la traductologie àl’apprentissage des langues, aux politiqueslinguistiques, à la littérature comparée ouencore à l’étude des troubles du langage.

Mais lorsque la traductologie utilise les acquisdes autres disciplines, elle ne doit pas pourautant être assimilée à une branche de cesdisciplines.

Envisager la traduction comme un fait neuro-nal, psychique ou encore comme un phéno-mène sociétal devrait, en toute rigueur, abou-tir à une « neuro-traductologie », « psycho-traductologie », « socio-traductologie », etc.,en particulier si le mouvement des étudesdans ces domaines est soutenu et suffisam-ment conceptualisé pour donner lieu à un véri-table courant traductologique.

On voit ainsi à quel point les approches de latraduction sont variées et les orientations par-fois éloignées. C’est pourquoi, il convient derappeler ce qui fait proprement la spécificitédu fait traductionnel.

L’objet de la traductologie

La traductologie a pour objet la traductionenvisagée en elle-même (processus) et pourelle-même (produit). Par « traduction », il fautdonc comprendre la suite ordonnée d’opéra-tions ayant un tenant (le texte de départ, textesource ou texte à traduire), un aboutissant (letexte d’arrivée, texte cible, texte traduit), et unacteur central (le traducteur, adaptateur,médiateur).

Décrire le produit d’une traduction, c’estdémontrer les éléments qui le composent,mais auxquels il ne se réduit pas. Analyser leprocessus traductionnel revient à mettre enévidence les diverses manières de procéder etd’organiser ces éléments.

Mais la diversité des configurations profes-sionnelles tend à rendre ces opérations pluscomplexes qu’il n’y paraît. La traduction est,

en effet, prise dans un faisceau d’intérêts,d’intentions, de contraintes, d’instructions,d’attentes, de fonctions et de technologies,qui dépassent largement le cadre des ques-tions purement traductologiques.

Pour la cohérence et l’unité de la discipline, ilfaut distinguer quatre éléments d’étude tra-duc to log ique qu i ne sau ra ien t ê t reconfondus : l’objet à traduire (la commande),l’objet traduit (le produit), le sujet traducteur (leproducteur) et l’opération de traduction (leprocessus). Dans l’analyse, on articulera ceséléments de la manière suivante : la traducto-logie est la discipline qui analyse, décrit etthéorise la relation entre ces éléments.

En théorie, plusieurs configurations d’étudesont envisageables, qui recouvrent les diverstypes de relations entre éléments (dans lesdeux sens) :

1) commande <---> produit ; commande <--->producteur ; commande <---> processus.

2) produit <---> producteur ; produit <--->processus.

3) producteur <---> processus.

Compte tenu de ces multiples configurationsbidirectionnelles et évolutives, la démarche dutraductologue consiste d’une part, à recher-cher un ensemble de critères qui fondentl’unité de l’activité de traduction, d’autre partà envisager les multiples produits de la tra-duction dans leur diversité.

L’objet à traduire

L’objet à traduire est communément désignédans la littérature traductologique par « textede départ » ou « texte source » ou encore« texte original ».

Nonobstant les nombreux débats sur la termi-nologie, le texte donné à traduire désignel’objet initial destiné à la traduction, c’est-à-dire la commande et la matière première surlaquelle travaille le traducteur.

Cette commande peut revêtir des formesdiverses et variées : texte écrit, article depresse, roman, publicité, site web, etc. Maiselle est généralement envisagée en termes de

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spécificités linguistiques et stylistiques, rare-ment dans un cadre polysémiotique. Celas’explique essentiellement par le fait que levolume des « textes » demeure prédominantdans la pratique, en comparaison avec lesautres supports de traduction.

L’objet destiné à la traduction subit des traite-ments successifs, suivant des modes d’inter-prétation individuels et parfois collectifs pouraboutir au produit final. Certes, il existe desrègles d’analyse pour comprendre le texte dedépart, mais les règles de conversion pourproduire le texte d’arrivée ne sont pas toujoursnormées ni uniformes ; elles dépendent de lacompétence, de la personnalité et des con-traintes propres à chaque traducteur. Ainsi,l’objet à traduire est conçu comme une cons-truction perceptive unique, qui emploie desrègles pouvant être combinées et itérées diffé-remment selon les individus. Cette idée del’objet comme construction modulée et dyna-mique permet de produire un grand nombrede traductions différentes et néanmoinsacceptables.

L’objet traduit

L’objet traduit, communément désigné dansla littérature traductologique comme « texted’arrivée » ou « texte cible », désigne leproduit fini ou le résultat de l’activité de tra-duction.

Dans bon nombre de travaux, il est envisagécomme une virtualité, un objectif à atteindre,un texte à venir. Mais en réalité, le volume destextes traduits dans la plupart des couples delangues est tel aujourd’hui que la spéculationdevient inutile. Au lieu d’envisager abstraite-ment ce « texte cible », il est plus pertinentscientifiquement et concrètement de se con-centrer sur l’étude des corpus de textes déjàtraduits et publiés pour en déceler les princi-pes et les outils. Il est possible ainsi d’avoiraccès à un volume considérable de donnéeset de matériaux concernant le résultat concretde la traduction.

En théorie, le texte traduit (ou texte d’arrivée)s’oppose au texte à traduire (ou texte dedépart) comme l’actualisation individuelle etpersonnelle (par la traduction) d’un objet

générique et impersonnel (la commande sou-mise à la traduction).

En pratique, le texte traduit est un produit indi-viduel prenant la forme d’un essai de compré-hension et de reformulation entre deux lan-gues qu’il est possible de décrire et decomparer à d’autres essais de traduction. Lanotion d’« essai », au sens fort du mot, estimportante ici parce qu’elle permet d’observerdes variations individuelles dans la traductiondes mêmes textes.

Le sujet traducteur

Le traducteur a été considéré tour à tourcomme un « translateur » chargé de la simpletransposition des mots d’une langue à l’autre,comme un « adaptateur » ayant la responsabi-lité de satisfaire les attentes du public visé,comme un « médiateur » qui se place à mi-che-min entre deux cultures ou deux mondes pourles rapprocher, comme un « communicateur »enfin, chargé de faciliter le dialogue entre indi-vidus ou communautés éloignées.

Dans tous les cas, le traducteur apparaîtcomme un « percepteur » sur deux plans :d’une part, pour traduire la perception dupublic de départ, et d’autre part, pour traduirela perception du public d’arrivée. Ces per-ceptions reflètent la connaissance qu’untraducteur donné possède de ses langues etcultures de travail, car sa traduction estinconsciemment fondée sur ses habitudes lin-guistiques. Nous traduisons avant tout enfonction du lexique et des catégorisations dis-ponibles dans notre langue, et il nous est qua-siment impossible de traduire avec une impar-tialité absolue, parce que nous sommescontraints à certains modes d’interprétation,alors même que nous nous croyons libres detraduire à notre guise.

Mais le traducteur se trouve toujours au cœurdu système : il est tout à la fois « l’interprétant »du texte de départ, le « sélectionneur » du sensà traduire, le « gestionnaire » des modules detraduction, le « décideur » de l’objectif et de lafinalité, le « producteur » de la version traduite,le premier « récepteur » de la traduction, par-fois même son premier « consommateur » etson « diffuseur » auprès du public cible.

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CHAPITRE 1

Le processus de traduction

Les sciences cognitives montrent que le sujethumain (le traducteur) a un rôle central dans leprocessus de traduction mais qu’il ne maîtrisepas totalement ce processus. Le fait d’envi-sager la traduction comme résultat de pro-cessus psychiques et mentaux complexes,

qui nous échappent en partie, conduit à revoirla représentation interprétative des textes etla place du traducteur dans ces processus.L’enjeu est de mettre en relation l’activité detraduction avec des phénomènes détermi-nants tels que la perception, la compréhen-sion ou la mémorisation.

Les recherches consacrées à l’étude des gen-res et des types de textes ont permis de défi-nir plusieurs modes de traduction en fonctionde la nature du texte à traduire. Mais d’autresétudes ont pu montrer que la description del’objet traductionnel reste incomplète, si l’onne prend pas en compte le lien entre l’activitéde traduction et l’activité cérébrale et émo-tionnelle du sujet traduisant.

Les processus mentaux liés à cette activitésont modulaires, comme l’ensemble des pro-cessus cognitifs. « Modulaires » signifie qu’ilssont décomposables en systèmes spécialisés(ou modules), notamment selon l’objet à tra-duire et selon la fonction de la traduction.Chaque type de traduction obéit à des princi-pes spécifiques de représentation et de traite-ment des informations. Dès lors, réfléchir surl’acte de traduire revient à décrire ces« modules » en identifiant leurs caractéristi-ques communes, leurs spécificités individuel-les et leurs interactions dans divers contextes.

Voilà donc les enjeux qui se présentent à latraductologie en ce début de XXIe siècle. En sedonnant pour objet englobant le processus detraduction, elle s’efforce de dégager lestenants et les aboutissants de l’activité decommunication inter-langues, c’est-à-direqu’elle occupe l’espace qui sépare le point dedépart (le texte à traduire) du point d’arrivée (letexte traduit). Elle tente d’identifier et dedécrire l’ensemble des relations, principes,règles et procédés qui caractérisent chaquetraduction individuellement et comparative-ment. Les deux démarches sont complémen-taires même si la première tire la traductologiedu côté des sciences de la nature et laseconde, du côté des sciences humaines.

Qu’est-ce que « traduire » ?

Le verbe traduire est introduit en français au XVIe siècle : « C’est en 1539 que l’humaniste, lexicographe et traducteur Robert Estienne a lancé le vocable « traduire » ; l’année suivante, Étienne Dolet enchaînait sur « traduction » et « traducteur » » (Cary 1963 : 6).

Comme l’explique Larose (1989 : 3), le verbe traduire trouve son origine dans un « très vieux verbe latin irrégulier dont les formes à l’infinitif présent étaient transferre, et au participe passé, translatus ». Le mot interpres, quant à lui, désignait le traducteur en latin courant, comme jadis drogman en italien (drogomanno). Ce dernier mot provient de l’arabe turjumân, issu lui-même de l’assyrien ragamou. Molière l’emploiera plus tard sous la forme truchement.

La difficulté de donner une définition unique de l’acte de traduire tient à la multiplicité de ses formes et de ses domaines d’application. Le mot « traduction » – ainsi que les autres mots de la même famille – renvoient à des réalités distinctes et évolutives, comme par exemple le fait de traduire de l’écrit ou de l’oral, vers une seule ou plusieurs langues, à partir d’un support papier ou électronique, seul ou avec l’aide de la machine, de façon ponctuelle ou régulière, pour le plaisir ou avec un objectif précis, etc. Dans chaque cas, le mot « traduction » désigne une conception particulière et une pratique spécifique : traduction simultanée d’un discours, sous-titrage d’une pièce de théâtre filmée, adaptation d’un site Web ou encore veille multilingue sur un sujet d’actualité.

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Dans ce chapitre, nous avons tenté de situerla traductologie par rapport aux autres disci-plines. Pour cela, il a d’abord fallu mener uneréflexion épistémologique générale poursavoir dans quel type de « science » la clas-ser. Ainsi, si l’on envisage la traduction en tantque produit, elle se situe résolument parmi lessciences humaines à l’instar d’autres sciencesdu langage. Mais si l’on considère le proces-sus, c’est-à-dire le déroulement de l’opérationet l’activité mentale qui l’accompagne, la tra-duction se situe plutôt du côté des sciencesde la nature, à l’image de la neurologie etautres sciences du vivant. Bref, sur le planépistémologique, elle semble être une disci-pline aux directions multiples, sans objet uni-que ni méthode exclusive. Elle est d’essenceinterdisciplinaire.

Mais une réflexion plus poussée concernantsa spécificité épistémologique montre qu’ils’agit avant tout d’une discipline empiriquedans laquelle la pratique l’a toujours emportésur la théorie. Il faut donc penser ses catégo-ries et ses problématiques à partir des objetsconcrets qui se présentent au traducteur,

c’est-à-dire à partir des textes précisémenttraduits et des situations professionnelleseffectives. La délimitation du champ de la tra-ductologie part ainsi de la pratique pour met-tre en perspective ses méthodes et sesacquis.

Il n’est pas question ici de polémiquer sur laprééminence de la théorie sur la pratique, niinversement. Une pratique sans réflexion criti-que n’est que ruine de l’âme, et une théoriedéconnectée de la réalité professionnellen’est qu’une vue de l’esprit.

Il n’est pas question non plus de forcer la mainaux défenseurs de l’indépendance de la tra-ductologie pour les faire rentrer à tout prixdans les cadres d’une quelconque discipline,comme ce fut le cas pendant des décennies,notamment par rapport à la linguistique.L’identité de la traductologie est aujourd’huiaffirmée un peu partout dans le monde pardes chercheurs et des praticiens qui s’enréclament haut et fort ; cela suffit à en attesterl’autonomie et la vigueur.

3. FAITES LE POINT

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CHAPITRE 1

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4. POUR ALLER PLUS LOIN

> Sur l’organisation générale de la traductologie :

Holmes J. (1972), « The Name and Nature of Translation Studies », in Holmes(1988), pp. 80-91.

> Sur la traductologie en général :

Ballard M. (2006), Qu’est-ce que la traductologie ?, Lille : Artois Presses Université.

Bassnet S. (1980/1991), Translation Studies, London and New York : Routledge.

> Sur les différentes approches en traductologie :

Newmark P. (1982), Approaches to Translation, Oxford : Pergamon Press.

> Sur la traductologie descriptive :

Toury G. (1995), Descriptive Translation Studies and Beyond, Amsterdam andPhiladelphia : John Benjamins.

5. TESTEZ VOS CONNAISSANCES

1) Dans quelle mesure peut-on affirmer que la traductologie est une « science » ?

2) Quels sont les fondements de la démarche scientifique en traductologie ?

3) Quels sont les éléments qui forment l’objet spécifique de la traductologie ?

4) Quels sont les rôles que peut jouer le traducteur en théorie et dans la pratique ?

5) Dans quelle mesure peut-on envisager une « socio-traductologie » ?

6) En quoi le traductologue est-il concerné par la neurologie ?

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CHAPITRE 2Aperçu historique de la traduction

L’histoire de la traduction a fait l’objet de nom-breuses études, à la fois à l’échelle de chaquepays et à l’échelle européenne. Même si lamajorité des études ont été publiées enanglais, une large place a été faite à la« tradition » française et à la « tradition » alle-mande de la traduction. Face à la multiplica-tion des études spécifiques et générales,« l’histoire de la traduction » apparaît de plusen plus comme un genre à part entière au seinde la traductologie, avec ses courants et sesméthodes propres.

Sommairement, il est possible de distinguerplusieurs perspectives d’étude historique :

Certains font l’histoire de la traduction en tantque pratique, par opposition à l’histoire de latraduction en tant que réflexion théorique.

D’autres s’appuient sur la vie et l’œuvre destraducteurs pour retracer l’histoire de la tra-duction, par opposition à ceux qui étudient lestraités et les préfaces qui précèdent les tra-ductions pour décrire une certaine évolutionhistorique.

D’autres encore écrivent l’histoire de la tra-duction en la reliant à son contexte sociopoli-tique, par opposition à ceux qui la décriventcomme activité universelle et communémentpratiquée dans toutes les langues et dans tou-tes les cultures.

Ainsi par exemple, La traduction dans lemonde moderne (1956) d’Edmond Cary pré-sente surtout des faits concernant les tra-ducteurs et les traductions tout au long del’histoire. En revanche, After Babel (1975) deGeorges Steiner s’intéresse davantage auxthéories de la traduction à diverses époques.André Lefevere (1977) a proposé une antho-logie des essais allemands sur la traduction,

tandis que Paul Horguelin (1981) s’est limitéau « domaine français » et Santoyo (1987)aux auteurs espagnols qui ont écrit sur latraduction.

Bref, « l’histoire » de la traduction apparaîtaujourd’hui comme une construction intellec-tuelle qui dépend largement de l’interpré-tation personnelle de l’historien. Loin de selimiter à l’énumération des faits et des per-sonnages historiques – tel que le préconisel’historiographie –, les traductologues onttendance à s’approprier à leur manière cer-tains faits et écrits jugés essentiels pour lat raduct ion. D’où la problémat ique de« l’objectivité » dans l’écriture de cette his-toire particulière.

De plus, l’objet même de cette histoire poseproblème. D’abord, parce qu’il existe des for-mes variées qui entrent sous le chapitre de la« traduction » (la littérature traduite, les textesbilingues, l’adaptation, etc.). Ensuite, parceque l’histoire de la théorie est souvent décon-nectée de l’histoire de la pratique et, plusencore, de celle de la profession de traduc-teur. Enfin, parce que certains domainescomme la linguistique, la littérature ou la civili-sation, intègrent la traduction (i.e. les œuvrestraduites) dans le champ de leur histoire pro-pre, privant ainsi les traductologues d’unebonne partie de leur corpus d’étude. Ainsi parexemple, Annie Brisset (1990) a écrit l’histoiredu théâtre traduit au Québec. Si l’on ajoute àcela l’existence d’essais différents – et parfoisconcurrents – concernant l’histoire de la tra-duction (théorie et/ou pratique) dans un mêmepays (par ex. la France ou l’Allemagne), la déli-mitation du champ d’investigation historiquedevient des plus problématiques.

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CHAPITRE 2

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De plus, certaines régions géographiques (tel-les que l’Europe) et certaines époques (tellesque la Renaissance) jouissent d’un intérêt sanscommune mesure avec d’autres régions dumonde et d’autres époques historiques. D’oùl’intérêt d’une étude approfondie des questionsdu « nationalisme » et de « l’ethnocentrisme »dans l’écriture de l’histoire de la traduction. Parexemple, Jean Delisle (1987) a écrit l’histoire dela traduction au Canada, tandis que SherrySimon (1989) a écrit l’histoire de la traductiondans la seule province du Québec.

Enfin, la question de la finalité ou du butrecherché à travers l’écriture de cette histoireont été débattus par les spécialistes. Ainsi,Lambert (1993) estime qu’elle vise à légitimerune discipline naissante (la traductologie),

tandis que d’Hulst (1994) pense qu’elle vise,en définitive, une unification de la discipline.Dans tous les cas, la majorité des auteurss’entend sur son importance et son intérêt.Berman (1984), par exemple, insiste sur l’inté-rêt d’une investigation historiographiqueparce qu’elle lui paraît indispensable d’unpoint de vue épistémologique : « La constitu-tion d’une histoire de la traduction est la pre-mière tâche d’une théorie moderne de la tra-duction. À toute modernité appartient, non unregard passéiste, mais un mouvement derétrospective qui est une saisie de soi » (Ber-man 1984 : 12). Si l’on comptabilise la sommedes articles et des ouvrages publiés depuiscette date sur le sujet, il est clair que son appela été largement entendu.

Le premier mythe est celui de la « Tour deBabel ». On en trouve mention dans la Bible :« Toute la terre avait une seule langue et lesmêmes mots. [...] Allons ! Bâtissons-nous uneville et une tour dont le sommet touche au ciel,et faisons-nous un nom, afin que nous nesoyons pas dispersés sur la face de toute laTerre. L’Éternel descendit pour voir la ville et latour que bâtissaient les fils des hommes. Etl’Éternel dit : voici, ils forment un seul peupleet ont tous une même langue, et c’est là cequ’ils ont entrepris ; maintenant rien ne lesempêcherait de faire tout ce qu’ils auraientprojeté. Allons ! Descendons, et là confon-dons leur langage, afin qu’ils n’entendent plusla langue les uns des autres. Et l’Éternel lesdispersa loin de là sur la surface de la Terre ;et ils cessèrent de bâtir la ville. C’est pourquoion l’appela du nom de Babel, car c’est là quel’Éternel confondit le langage de toute laTerre » (Genèse 11, trad. de L. Segond).

La traduction serait ainsi une réponse à la dis-persion des langues, mais aussi un moyen deretrouver l’unité originelle des humains. Lalégende babylonienne indique en creuxl’importance accordée à la communication par-delà la diversité linguistique. Elle signale égale-ment le lien originel et complexe existant entre

traduction et sacralité, depuis Babel jusqu’au« don des langues » à la Pentecôte, lien sous-jacent à la réflexion traductologique pendantdes siècles. Il l’est d’autant plus qu’un autremythe est venu renforcer celui de Babel.

Le second mythe est celui de la Bible des Sep-tante. On en trouve trace chez Philon le Juif(vers 13 av. J.-C. – 54 ap. J.-C.) qui rapportececi : « Sur l’ordre du pharaon Ptolémée II Phi-ladelphe, 72 savants juifs, d’âge vénérable ettous vertueux, ont traduit en 72 jours le textedu Pentateuque » (cité dans Ballard 1992 : 31).

D’autres auteurs ont précisé les circonstancesd’élaboration de cette « traduction miracu-leuse » (Nida 1964 : 26). Selon la légende, lepharaon aurait sélectionné six savants de cha-cune des douze tribus juives. Il les a ensuiterépartis par binômes et les a isolés les uns desautres. Chaque binôme a traduit intégrale-ment et séparément l’Ancien Testament. Lerésultat fut miraculeux en ce sens que les 36versions produites furent, selon la légende,absolument identiques en tous points.

Cette traduction de l’Ancien Testament engrec, appelée « Version des Septante » a étéâprement discutée. Pour les uns, elle a été

1. LES MYTHES FONDATEURS DE LA TRADUCTOLOGIE

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considérée comme un « don divin », pour lesautres comme une « faute grave ». De là pro-

vient l’une des premières oppositions fortesau niveau des idées traductologiques.

Tous ceux qui s’intéressent à la traductologies’accordent sur un point au moins : l’originede la traduction se perd dans la nuit destemps. Il n’en demeure pas moins que lesconsidérations sur l’histoire de la traduction« ont pour caractéristiques principales d’êtresouvent succinctes, ponctuelles ou éclatéessous forme de références disséminées » (Bal-lard 1992 : 11). Chez bon nombre de traducto-logues, cette préoccupation historique estmême totalement absente ; ils ne s’y intéres-sent que de façon incidente. Leurs travauxsont tournés quasi exclusivement vers lesaspects théoriques et linguistiques de la tra-duction. Pourtant, le regard historique estconsidéré par beaucoup comme une condi-tion préalable à la théorisation, car les grandesproblématiques abordées ont peu évolué aucours des siècles. Les questions centralesposées par les traducteurs et les penseursanciens se retrouvent globalement dans lesthéories contemporaines de la traduction.

Dans son ouvrage intitulé After Babel, Steinerpropose de diviser l’histoire de la réflexion surla traduction en quatre périodes distinctes« dont les lignes de démarcation n’ont cepen-dant rien d’absolu » (Steiner 1975 : 224).

La première période débuterait en l’an 46 av.J.-C. avec « le célèbre précepte de Cicéron dene pas traduire verbum pro verbo » et se termi-nerait vers 1813 avec « le remarquable essai deFriedrich Schleiermacher ». Cette période secaractérise essentiellement par une approcheempirique de la traduction et une insistance surle rôle déterminant du traducteur.

La deuxième période est celle de la théorieherméneutique de la traduction, initiée parSchleiermacher et adoptée par la suite parSchlegel et Humboldt. Il s’agit d’une approcheà dominante philosophique qui s’étend

jusqu’à Valéry Larbaud (Sous l’invocation desaint Jérôme, 1946).

La troisième période débute à la fin des années1940 avec l’essor des recherches sur la traduc-tion automatique (T.A.). Elle met à l’honneurune approche formaliste de la traduction etrecourt massivement à la linguistique structu-rale et aux théories de l’information. Mais sesrésultats décevants vont conduire à l’essouffle-ment de la théorie de la traduction.

La quatrième période prend naissance à la findes années 1960 et se caractérise par unrenouvellement des interrogations hermé-neutiques sur la traduction et l’interprétation.Au cours de cette dernière période, « l’étudede la théorie et de la pratique de la traductions’installe à la charnière de disciplines confir-mées et récentes [...] dans le but d’éclairerl’acte de traduction et les mécanismes de la“vie entre les langues” » (Steiner 1975 : 226).

Malgré son intérêt, la périodisation de Steinera été parfois critiquée et complétée. Certainstraductologues s’interrogent sur l’inégale lon-gueur de ces périodes dont la première couvrequelque dix-huit siècles, alors que la secondes’étend sur un seul, et que les deux dernièresconcernent seulement une trentaine d’annéeschacune.

En réponse à ces critiques, Kelly (1979 : 224)a repris la classification de Steiner et divisé lapériode la plus longue en cinq parties : pré-classique, Moyen Âge, Classique, Renais-sance, Lumières.

D’autres traductologues préfèrent à l’ordrechronologique une présentation thématiquede l’histoire de la traduction.

Dans son anthologie (1992), André Lefevererépertorie les textes historiques fondamentaux

2. TRADUCTOLOGIE ET HISTOIRE DE LA TRADUCTION

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suivant le sujet traité : (1) le rôle de l’idéologiedans la production des traductions ; (2) le pou-voir du mécénat ; (3) les contraintes poétiques ;(4) l’univers du discours ; (5) le développementdu langage et de l’éducation ; (6) les techniquesde traduction. Dans cette classification centréesur la traduction littéraire, l’idée de « contrainte »joue un rôle essentiel.

D’autres traductologues enfin envisagent cettehistoire du point de vue de l’objet. Ainsi, Mes-chonnic (1973 : 322) note une évolution géné-rale en trois temps : « L’historique européen dutraduire est passé de l’unité-mot à l’unité-groupe puis à l’unité-texte. Du littéralisme théo-logique à la paraphrase culturelle puis à l’exac-titude érudite. » Il estime que la traduction estpassée progressivement d’un artisanat théori-que à des positions plus scientifiques, mais ilregrette que les chercheurs français fassent

toujours preuve d’une certaine résistance àl’égard de la traductologie : « Le dédain culturelpour la traduction caractérise encore la Francelittéraire, malgré le renouveau mondial de lathéorie de la traduction. »

Face à la multiplicité des avis et des points devue, il est difficile de suivre un seul traductolo-gue. De plus, après tout ce qui a été dit et écritsur la traduction, il serait absurde de refaire cettehistoire dans le cadre de cet ouvrage. Il suffit deparcourir une bibliographie des principaux écritssur la traduction depuis l’Antiquité jusqu’à nosjours pour se rendre compte qu’une approchehistorique n’a de sens que si elle s’attache àretracer l’évolution des idées traductologiqueset leur traitement à travers les époques.

Il est néanmoins utile de donner quelques repè-res historiques concernant cette évolution.

La première attestation de l’existence d’interprè-tes date des années 2500 av. J.-C. chez les pha-raons de la sixième dynastie en Égypte. Dans laBible, on rapporte également qu’il y avait uninterprète entre Joseph et ses frères à la cour dePharaon (Genèse 42 : 23). Vers 500 av. J.-C., estattestée l’existence d’une classe des interprètesen Égypte (Ballard 2013 : 10).

On constate un phénomène analogue en Méso-potamie où apparaissent, vers les années2300 av. J.-C., de véritables dictionnairesbilingues : « Certains [dictionnaires] donnentl’idéogramme sumérien, sa transcription phoné-tique en akkadien, sa traduction akkadienne.Parfois même, outre cette traduction, figure uneexplication par un synonyme ou une définition »(Mounin 1974 : 54).

Considérant leur langue et leur culture commesupérieures, les Grecs semblent avoir été her-métiques à la traduction et ont donné le nom de« barbare » à ceux qui ne parlaient pas leur lan-gue. Seules exceptions à cet ethnocentrismegrec, les récits rapportés par Platon (-427) et parHérodote (-484) dans leurs ouvrages de philoso-phie ou d’historiographie.

À l’inverse, l’Égypte ptolémaïque (-285/-181)est connue dans l’histoire de la traductionpour deux mythes fondateurs. Le premier estcelui de la « traduction des Septante » faite del’Ancien Testament vers le grec par 72 savantsen 72 jours. Le second est celui de la « pierrede Rosette » : découverte en 1799 par l’arméede Bonaparte, elle a permis à Champollion dedéchiffrer les hiéroglyphes en comparant lestrois versions du même texte qui était inscritdessus.

L’époque romaine (à partir de -250) offre les pre-mières traductions signées de la littérature grec-que, notamment celle de L’Odyssée et deL’Iliade d’Homère en vers latins. Elle offre égale-ment les premières réflexions théoriquesconcernant la traduction. C’est le cas du traitéde Cicéron intitulé Du meilleur genre d’orateur(46 av. J.-C.) : « Je n’ai pas cru nécessaire derendre mot pour mot ; j’ai gardé le ton et lavaleur des expressions dans leur ensemble ».

À partir du IIe siècle ap. J.-C., la diffusion duchristianisme s’accompagne d’une multiplica-tion des traductions de la Bible : en copte, ensyriaque, en arménien, en gotique, etc. La

3. JALONS DANS L’HISTOIRE DE LA TRADUCTION

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figure de saint Jérôme (347-420) domine dèslors l’histoire de la traduction. Il est considérécomme le « patron des traducteurs » et sa tra-duction de la Bible en latin sera utiliséejusqu’au XXe siècle comme texte officiel. Il estle premier promoteur de la « traductionlittérale » pour les saintes Écritures.

Au Proche-Orient, les chrétiens nestoriens tra-duisent vers le syriaque bon nombre de textesgrecs de médecine et de philosophie. C’est àpartir de ces textes que se feront plus tard lesprincipales traductions vers l’arabe. En effet,lorsque l’islam se diffuse à partir du VIIe siècle,la langue arabe s’impose progressivementgrâce au Coran. L’effort de traduction culminesous le calife abbasside Al-Ma’moun (813-833) qui fonde, à Bagdad, un centre de tra-duction au sein de la « Maison de la sagesse »(Bayt al-Hikma). La figure de proue de cettepériode est le traducteur arabe chrétienHunayn Ibn Ishaq (809-873) qui aurait traduitvers l’arabe plus de trente-cinq ouvragesmédicaux (Salama-Carr 1990 : 28).

En Occident musulman, le mouvement de tra-duction de l’arabe vers le latin se développe àpartir du Xe siècle. Tolède, reprise par les chré-tiens en 1085, s’affirme comme centre de tra-duction au XIIe siècle, et le traducteur le plusconnu de cette époque est Gérard de Cré-mone (1114-1187) auquel on attribue 71 tra-ductions de l’arabe vers le latin. Ce type detraductions contribue à la transmission del’héritage culturel et scientifique arabe etannonce la Renaissance européenne.

L’essor de la traduction pendant cette périodebénéficie de l’invention de l’imprimerie et de ladiffusion du livre avec la redécouverte de laculture antique gréco-latine. Des traités

importants tels que celui d’Étienne Dolet(1540) voient le jour. Le verbe « traduire » rem-place en français le verbe « translater » (Hor-guelin 1981 : 44). La traduction profite aux« langues vulgaires » et sert de catalyseur àl’affirmation des identités nationales au seindes futures puissances coloniales.

La querelle entre les Anciens et les Modernesau sujet d’Homère donne naissance aux tra-ductions dites « belles » mais « infidèles », quidominent l’âge classique (XVIIe siècle). La tra-duction des Mille et une nuits (1702) parAntoine Galland reflète les pratiques de sonsiècle : suppression de passages, restructura-tion du texte, adaptation, reformulation, etc.Les contes arabes sont néanmoins traduits etretraduits à travers toute l’Europe à partir de laversion remaniée de Galland.

Le Siècle des Lumières (XVIIIe siècle) met lacréation au cœur de l’activité intellectuelle, maisla traduction continue d’inspirer les écrivains. Lapublication par Montesquieu des Lettres persa-nes (1721), sous forme de pseudo-traduction, etde Zadig (1747) par Voltaire sous forme de conteoriental à caractère philosophique, signe lesdébuts de l’orientalisme.

Paradoxalement, le mouvement de traductiondans le monde oriental ne reprendra qu’à lafaveur de la Nahda (Renaissance arabe) audébut du XIXe siècle, à partir du foyer égyp-tien. Dans l’intervalle, on assiste en Europe àune professionnalisation et à une théorisationaccrues des pratiques. La mise en place destructures spécifiques et de normes de tra-duction vise à assurer la qualité des produc-tions et l’autonomie d’une discipline qui serasans cesse questionnée sur ses fondementset accusée d’imperfection.

Dans l’ensemble, l’histoire de la traduction estfaite de la cœxistence de contraires qui sem-blent s’alimenter réciproquement, chacunedes étapes traductologiques étant marquéepar « une série de critiques et de propositionsde critères, immédiatement désavoués par

une opposition toujours présente » (Brower1959 : 10). Ceci se vérifie tout particulièrementà partir du XVIe siècle, époque à laquelle onconstate un net développement de la réflexionsur la traduction.

4. BRÈVE HISTOIRE DES IDÉES TRADUCTOLOGIQUES

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CHAPITRE 2

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Les premières réflexions sont marquées parl’empirisme, mais elles se structurent autourde quelques oppositions centrales : le tradui-sible versus l’intraduisible, la lettre versusl’esprit, le mot versus l’idée, la fidélité versus latrahison, etc. Ces couples de contraires reflè-tent néanmoins des efforts de conceptualisa-tion latents qu’il est utile de rappeler.

En effet, l’histoire des idées traductologiquesest l’histoire d’une opposition sans cesserenouvelée : « Quel que soit le traité de tra-duction consulté, la même dichotomiereparaît : celle qui existe entre « la lettre » et« l’esprit », « le mot » et « le sens » » (Steiner1975 : 245). Cette tendance générale affectela plupart des écrits, et rares sont les auteursqui font exception à la règle. Bassnett (1980 :39) note que certains débats théoriquesappartiennent à toutes les époques : « La dis-tinction entre la traduction “mot-à-mot” et latraduction “sens pour sens”, instaurée dèsl’époque romaine, continue d’être au centredes débats jusqu’à nos jours. »

L’opposition entre la théorie et la pratique par-court l’histoire de la traduction et continue dediviser, aujourd’hui encore, les formateurs et lesprofessionnels. Cette distinction qui n’a cesséde s’affirmer au cours de l’histoire est indispen-sable pour comprendre bon nombre desdébats et des problématiques qui se posent entraductologie. Elle renvoie à des oppositionsnon moins tranchées entre abstrait et concret,fondamental et appliqué, inutile et utile.

Suivant ces lignes de partage, on rencontre destraducteurs qui récusent l’intérêt même d’unequelconque théorie de la traduction, se récla-mant d’un empirisme radical et perçu commesalutaire. On rencontre également des théori-ciens de la traduction qui expliquent à longueurde traités les errements de certains praticiens,en s’employant à démontrer les mérites d’uneréflexion critique sur la traduction. Chacun ases raisons que la raison ignore parfois, maisles deux approches sont recevables car ellesne sont contradictoires qu’en apparence.

À l’examen approfondi, une seule chose estcertaine : le développement régulier et phéno-ménal des activités de traduction ne trouve pasd’écho à la mesure de son expansion au niveaudes recherches théoriques : « L’extension enlargeur et en profondeur de l’activité de traduc-tion, à laquelle on assiste sur le plan pratique, nes’accompagne pas d’un développement paral-lèle sur le plan théorique » (Steiner 1975 : 82).

Malgré la somme d’essais publiés dans toutesles langues, la pratique de la traductionoccupe, dans l’ensemble, une place bien plusimportante que les considérations théoriques.On traduit beaucoup plus qu’on ne conceptua-lise, confirmant ainsi le décalage déjà ancienentre théorie et pratique. Dans son étude surl’histoire de la traduction en Occident, VanHoof (1991) met en évidence ce décalage eninsistant sur le caractère occasionnel et ponc-tuel des considérations théoriques. C’est pour-quoi, un aperçu historique n’a d’intérêt que s’ils’attache à retracer le développement desidées qui ont marqué la réflexion sur la traduc-tion, telles que le traduisible et l’intraduisible.

La possibilité même de traduire s’est poséed’emblée pour les textes religieux. Les réactionscontradictoires à la traduction de l’Ancien Testa-ment mettent en évidence deux conceptionsradicalement opposées de la traduction. Pourcertains, la traduction permet de transmettre etde perpétuer la Révélation, tandis que pourd’autres elle constitue un acte innommable etblasphématoire. D’un côté, la traduction est per-çue comme une aide aux humains pour accéderau sens des textes sacrés ; de l’autre, elle estconsidérée comme un sacrilège et une atteinteà la parole divine qu’elle ne peut que dégrader.

Dans ses travaux, Nida (1964 : 9) s’est attachéà souligner la place centrale qu’occupent lesécrits bibliques dans l’histoire de la traductionen Occident : « Aucun autre type de traductionne possède une aussi longue histoire, aucunn’implique autant de langues différentes (…)aucun n’englobe des textes aussi divers, ni necouvre des aires culturelles aussi distinctes. »

4.1 Théorie versus Pratique4.2 Traduisible versus Intraduisible

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INDEX DES AUTEURS

AAgost 131Ammann 74Archibald 131Arntz 84, 146

BBaker 64, 83–84, 95–97, 103Ballard 20–21, 26–28, 30–37, 86, 91Barthes 60Bassnett 7, 12, 24, 27, 44, 83, 93Bastin 88Beaugrande 59Bédard 142Béjoint 147Benjamin 36, 56Berman 20, 28, 31–32, 38, 40–41, 52, 87,

91–92, 100–101, 162Blum-Kulka 95Bocquet 119Bouillon 38–39, 140Brisset 19, 88Brower 23Bülher 63

CCalvet 68Cary 16, 19, 26–28, 31, 35, 37Catford 13, 44, 48–49, 59, 82, 84, 93, 107Chan 147Chesterman 76, 103Chuquet 47Cicéron 21, 87Clas 38–39, 140Conely 122Cordonnier 148

Dd’Ablancourt 29, 86, 101d’Hulst 20, 29–30, 34, 37Dacier 86Darbelnet 13, 25–26, 45–47, 58, 81, 87,

89, 107, 117De Bessé 144de Tende 32, 86Delisle 20, 57, 59, 72, 88, 119Dodds 121Dolet 16, 32, 42Durieux 106

EEco 61, 120Esselink 132Etkind 54–57, 93Even-Zohar 77–78

FFedorov 44, 53Fraser 66

GGalisson 148Gambier 88Garnier 12, 44, 81Gaudin 146Gentzler 53, 83Gerver 111Gile 10, 32, 65, 106, 109, 111–112Gläser 104Goethe 35, 91–92Gorlée 61, 76, 85Gouadec 132Greimas 60Grice 64Grin 68Guidère 5, 38, 96, 129, 131, 133, 136Gutt 91

HHarvey 91Hatim 62–64, 90, 122Herbert 39, 110–111Hermans 84Hervey 90–91Hewson 58, 89Hickey 64Higgins 90–91Holmes 9, 96, 121, 139Holz-Mänttäri 73–74Horace 87Horguelin 19, 33House 12, 59, 106Hurtado-Albir 32, 85Hutchins 152, 155

IIlg 111–112Intravaia 45Isham 66

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JJakobson 44, 47, 60, 62–63, 82, 92Johansson 96

KKelly 21, 29–30, 53Kiraly 118Koller 84Kramer 36Krings 66Kussmaul 66

LL’Homme 140Ladmiral 10, 26, 32, 45, 47, 59Lambert 20Lane 66Larbaud 21, 32Larose 16, 31, 44–47, 58–59, 94Lavault 121–122Lebart 145Lederer 32, 39, 46, 50, 71–73, 84, 86,

107, 112Lee-Jahnke 119Lefevere 12, 19, 21, 52, 85Levenston 95Levy 76, 98Lewis 122Loffler-Laurian 152Lörscher 66–67, 93

MMacklovitch 141Malblanc 45Margot 85Martin 58, 89Mason 62–64, 90, 122Meschonnic 22, 32, 35, 53–54, 56, 92–

93, 101, 162Moser-Mercer 111–112Mounin 13, 25–26, 32, 38, 44–45, 47–48,

59, 82

NNeubert 146Newman 84Newmark 7, 59, 74–75, 90, 121–122Nida 20, 24, 35–37, 49, 53, 59, 62, 81, 83,

85, 89, 105, 117Nietzsche 100Niranjana 52, 84Nord 74

OOseki-Dépré 119

PPaillard 47Peirce 60–61

Penrod 52Pergnier 13, 26, 44, 47, 49–50Peters 97Picchi 97Pym 83–84, 101, 132

RReiss 63, 75, 106Ricoeur 25Roberts 63Rosenzweig 100Rozan 39, 111

SSager 96, 144saint Jérôme 21, 31–33, 41Salkie 96Santoyo 19, 88Savory 27Scavé 45Schäffner 106Schleiermacher 21, 27–28, 50, 92, 101Schmied 96Séguinot 66, 89Seleskovitch 11, 32, 39, 46, 50, 71–73,

107, 112–113Shlesinger 95Shreve 146Simon 20Sinclair 149Snell-Hornby 75, 83Somers 155Steiner 13, 19, 21, 24, 32, 45, 50–52, 59,

161

TTaber 105Thoiron 147Tirkkonen-Condit 66, 98Toury 11, 60, 78, 83, 95–96, 102Tymoczko 52

VVan Hoof 24–28, 31, 33–35, 37, 39–40,

85–86, 111Venuti 101Vermeer 74–76, 84, 106, 117Vinay 13, 25–26, 44–47, 58, 81, 87, 89,

107, 117

WWaard 117Wilss 98

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Aadaptateur 5, 14–15, 87–88adaptation culturelle 132adaptation globale 88, 131adaptation intersémiotique 130adaptation locale 88adéquation 59, 63, 75, 102, 106, 122adjonction 85, 88aide à la traduction 9, 13, 39, 41, 109,

123, 139–141, 150, 159amplification 89annexion 53apprenti traducteur 13, 93, 127apprentissage « sur le tas » 13apprentissage coopératif 120apprentissage des langues 14, 117, 126,

148approche cibliste 78, 105approche interdisciplinaire 13approche sourcière 105approche traditionnelle 72, 117autonomisation 57, 79, 121, 162

Bbagage cognitif 71belles infidèles 29–31, 86, 105belles mais infidèles 87, 101Bible des Septante 20, 40bidirectionnel 14, 110, 142biscript 36bitexte 141–142boîte noire 66bonne traduction 51, 105, 122bottom up 65, 97

Ccalque 45, 47, 155capacité de traitement 112–113cibliste 35, 73, 103, 105, 113colonialisme 52combinaison linguistique 97, 112–113,

141, 156communicateur 15, 64, 119, 131, 162communication interculturelle 9, 73–74,

118, 133

comparaison 15, 25, 29–30, 45–46, 49,60, 76–77, 91, 97, 120, 122, 133, 141,146, 149, 159

compétence interdisciplinaire 135compétence traductionnelle 117–119,

132, 136composante stratégique 120compréhension décisoire 82compréhension subjective 82conception traductionnelle 7, 25, 78, 102concordance 49, 142, 149–150concordancier 140, 142–143, 149concordancier bilingue 141condensation 90condition ancillaire 129conscience traductologique 13contrainte externe 130contrainte interne 130convention 63, 102, 148corpus bilingue 96, 142corpus comparable 97, 107, 123corpus de traduction 102–103, 123, 127,

149corpus parallèle 36, 96–97, 107, 123, 143correspondance 47, 58, 72, 84, 87, 94, 96,

142, 147, 149, 154–155correspondance formelle 49, 84créativité 28–29, 66–67, 91, 144, 157

Ddécentrement 53, 57décodage 62, 147défonctionnalisation 54déverbalisation 71–72dictionnaire bilingue 37, 84, 97, 143, 146–

150, 154–155dictionnaire de traduction 147–148dictionnairique 149, 163domestication 100–101doublage 129–130, 137–139drogman 16, 136

Eeffet de saturation 112émotionnel 81enrichissement lexical 143enrichissement syntaxique 143

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enseignement à distance 124équivalence communicative 85équivalence dynamique 35, 83, 85, 105équivalence empirique 85équivalence lexicale 141, 143, 146, 154–

155équivalence multiple 84équivalence notionnelle 146équivalence ontologique 85équivalence partielle 84, 142équivalence pragmatique 84équivalence qualitative 61équivalence référentielle 61équivalence sémantique 85équivalence significationnelle 61équivalence stylistique 85équivalence terminologique 146équivalence textuelle 47, 84–85équivalence traductionnelle 46, 84–85équivalence transactionnelle 84essai-erreur 98éthique positive 162étrangéisation 100–101étude de cas 10–11, 85, 112, 120évaluation globale 106exotisation 52, 100–101expert multilingue 136explicitation facultative 89explicitation obligatoire 89extra-traductionnels 12

Ffacteur temps 109, 115fait comparable 123fait de traduction 11–12, 123fétichisation 88filtre culturel 106

Iimpérialisme 52–53implication 13, 77–78, 99, 109, 119, 128incorporation 51–52industrie de la langue 124, 139–140, 145,

150, 153, 162interférence 13, 96, 112interlangue 156interprétant-traducteur 61interprétation chuchotée 110interprétation de service public 110–111interprétation des signes 92, 110, 115interprète bilingue 67interprète d’affaires 109interprète de conférence 65, 71, 109, 111interprète juridique 109intertextualité 58

introducteur 56

Llangue A 75, 96–97, 109–110, 113, 142langue B 96–97, 110, 113, 142langue C 96, 110langue de spécialité 96, 119, 127langues-cultures 53littérature 78littérature traduite 19, 77–78localisateur 5, 133, 137localisation 131–133, 138–139, 162

Mmédiateur 14–15, 38, 58, 89, 137, 162mémoire de traduction 141–143, 147mémorisation 16, 65, 99, 112méta-traductionnels 12mimèsis 29–30mise à jour 88, 132modèle interprétatif 72, 111modèle structuraliste 43modèle textuel 43modulaire 16, 120module 15–16, 118, 122–123, 141, 144,

154module technolinguistique 141mot-à-mot 31, 33

Nnaturalisation 52, 88, 100–101négociation 62, 83–84, 120neuro-traductologie 14, 115neutralité 54, 111non-traductionnels 12normalisation 95, 144, 146norme constitutive 103norme de réception 103norme initiale 102norme matricielle 102norme opérationnelle 102norme préliminaire 102norme professionnelle 103norme régulatrice 103

Oobjection préjudicielle 25–26, 32, 40offre secondaire 75opération dérivée 98optimisation 76outil linguistique 141outil logiciel 140–141outil traductionnel 141

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Index des notions

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Pparaphrase 22, 26, 28, 35, 58, 60, 86, 95,

144para-traductionnels 12parodistique 91particulariste 44pédagogie de projet 120percepteur 15permanence fonctionnelle 75phraséologie 90poétisation 53politique linguistique 7, 14, 49, 68polysémiotique 15, 130polyvalence 120préférence 33, 70, 90, 102, 130pré-traduction automatique 141–142problème global 66problème local 66, 98procédé oblique 45, 47processus cognitif 16, 57, 66processus d’interprétation 64–66, 111processus de la traduction 10, 87, 91,

123, 140processus de traduction 9, 14, 16, 47–48,

52, 54, 64–67, 71–72, 75–76, 79, 82,89, 96, 118, 123, 126, 130, 133, 140,145, 147, 151, 154, 157

profil d’interprètes 67protocole 66–67psycho-traductologie 10, 14pulsion traductrice 162

Rrapport intertextuel 57recherche documentaire 133–134, 136–

137recréation 32, 34, 56, 88, 90récriture 87réécriture 30ré-encodeur 62ré-énonciation 53règle de cohérence 75règle de fidélité 75résolution des problèmes 65–66, 92, 98,

132, 153restitution 51, 110–111réviseur 89, 106révision 13, 33, 65, 106, 132

Ssavoir linguisturel 123savoir procédural 67, 98savoir-faire 120, 123, 133secte perrotine 86sémiotème 47

sémio-traductologie 61sens émotionnel 81sens linguistique 64, 81sens référentiel 81situation d’exercice 120skopos 74–76, 79–80, 106, 117, 162socio-traductologie 10, 14, 18sourcier 35, 105, 113sous-titrage 16, 129–130, 137–139standardisation 95–97, 146station de travail 39, 130stratégie cibliste 98stratégie de traduction 63, 65–67, 75, 98–

101, 108, 162stratégie globale 66, 77stratégie locale 66stratégie minimax 76stratégie sourcière 98, 100substitution 49, 84, 88suppression 29, 88, 132, 152synchronisation 129–131

TTAPs 66–67technolinguistique 124, 139, 162technologie langagière 124terminologie bilingue 97, 144, 150terminologie multilingue 144terminotique 144–145, 163test 12, 105, 113, 132texte cible 14–15, 63, 74–75, 89–90, 95,

103, 106, 151, 154, 156texte d’arrivée 14–15, 35, 57texte de départ 14–15, 56–57texte original 14, 27–28, 72, 86, 88, 98,

105–106texte pragmatique 57, 74–75, 119–120texte source 14, 27, 35, 51, 61, 63, 72–75,

77, 89–90, 93, 95, 98, 102–103, 105–106, 117, 135, 151, 154, 156

théorèmes 10théorie actionnelle 73–74théorie du sens 82, 111top down 65, 67, 97Tour de Babel 20, 40, 161tradaptateur 88tradaptation 88traductème 94traducteur en ligne 9, 105, 157traducteur-créateur 56traducteur-localisateur 132–133traducteur-médiateur 130traducteur-veilleur 135–136traductibilité 60traducticien 153

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INDEX DES NOTIONS

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traduction à vue 65, 109traduction argumentée 121, 123, 127traduction artistique 57traduction assimilatrice 51traduction audiovisuelle 61, 129–130,

137traduction automatique 10, 21, 38–39,

97, 127, 140–141, 144, 151–159, 163traduction économique 118–120, 129,

137traduction écrite 92traduction ethnocentrique 52traduction fonctionnelle 73traduction hypertextuelle 52traduction instrumentale 119traduction intégrale 26, 49, 136traduction interlinguistique 60traduction interprétative 72traduction intersémiotique 60, 92, 130,

133traduction intralinguistique 60traduction juridique 118–119, 129, 137traduction libre 31, 59, 63, 86–87, 93traduction linguistique 72traduction littérale 30–31, 35, 45, 47, 51,

59, 63, 93, 155traduction manifeste 106traduction médicale 119, 129traduction non-texte 93traduction orale 12, 39, 109, 114, 139traduction partielle 49, 84, 136traduction pragmatique 76traduction publicitaire 131, 137–138traduction scientifique 119traduction scientifique et technique 37traduction secrète 106traduction spécialisée 37, 119–121, 127,

135, 144traduction technique 119traduction téléologique 59traduction totale 49, 84Traduction-Allusion 93Traduction-Approximation 93traduction-blasphème 26traduction-érudition 37

Traduction-Imitation 93Traduction-Information 93Traduction-Interprétation 93traduction-introduction 93Traduction-Recréation 93traduction-révélation 26traduction-traduction 93traduction-vulgarisation 37traductique 39, 123, 127, 139–141, 150,

153, 159, 163traductologie appliquée 9, 14, 121, 139,

141, 146, 150, 153traductologie de l’interprétation 111, 114traductologie externe 10traductologie interne 10traductologie théorique 9traductométrie 59traduttore traditore 85trahison 24, 26, 52, 55, 85, 87transcodage 39, 47, 82transfert interlingual 78translateur 15Translation Studies 9, 12translatum 74–75transmetteur 74transparence 26, 53transposition 15, 45, 47, 60, 90, 92, 137type textuel 64, 75, 77, 106

Uunité d’idée 93unité de sens 46, 93, 141unité fonctionnelle 46unité lexicale 93, 98, 156unité linguistique 83, 93, 143, 145, 148–

149, 156universaliste 44, 156

Vvariance fonctionnelle 75veille institutionnelle 135veille multilingue 16, 133–136, 138, 162veille stratégique 133–135verbum de verbo 31, 33

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TABLE DES MATIÈRES

AVANT-PROPOS ................................................................................................................. 5

INTRODUCTION : L’ÂGE DE LA TRADUCTION ................................................................ 7

CHAPITRE 1SITUATION DE LA TRADUCTOLOGIE : DÉLIMITATION DU CHAMP .............................. 9

1. Épistémologie générale ......................................................................................... 102. Épistémologie de la discipline .............................................................................. 133. Faites le point ........................................................................................................ 174. Pour aller plus loin ................................................................................................. 185. Testez vos connaissances .................................................................................... 18

CHAPITRE 2APERÇU HISTORIQUE DE LA TRADUCTION ................................................................. 19

1. Les mythes fondateurs de la traductologie .......................................................... 202. Traductologie et histoire de la traduction ............................................................. 213. Jalons dans l’histoire de la traduction .................................................................. 224. Brève histoire des idées traductologiques ........................................................... 23

4.1 Théorie versus Pratique ................................................................................ 244.2 Art versus Science ........................................................................................ 254.3 Auteur versus Traducteur ............................................................................. 264.4 Original versus Copie ................................................................................... 274.5 Traduction versus Imitation .......................................................................... 284.6 Sacré versus Profane ................................................................................... 304.7 Fidélité versus Liberté .................................................................................. 314.8 Le mot versus L’idée .................................................................................... 334.9 La lettre versus L’esprit ................................................................................ 344.10 National versus Étranger .............................................................................. 354.11 Vainqueur versus Vaincu .............................................................................. 354.12 Littéraire versus Scientifique ........................................................................ 374.13 Humain versus Automatique ........................................................................ 384.14 Traduction versus Interprétation .................................................................. 39

5. Faites le point ........................................................................................................ 406. Pour aller plus loin ................................................................................................. 417. Testez vos connaissances .................................................................................... 42

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TABLE DES MATIÈRES

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CHAPITRE 3APPROCHES ET MODÈLES DE LA TRADUCTION ......................................................... 43

1. Les approches linguistiques .................................................................................. 431.1 L’approche « stylistique comparée » ............................................................ 451.2 L’approche « linguistique théorique » ........................................................... 471.3 L’approche « linguistique appliquée » .......................................................... 481.4 L’approche sociolinguistique ........................................................................ 49

2. L’approche herméneutique ................................................................................... 503. Les approches idéologiques ................................................................................. 524. L’approche poétologique ...................................................................................... 545. L’approche textuelle .............................................................................................. 576. Les approches sémiotiques .................................................................................. 607. Les approches communicationnelles .................................................................... 628. Les approches cognitives ...................................................................................... 659. Faites le point ........................................................................................................ 6810. Pour aller plus loin ................................................................................................. 6911. Testez vos connaissances ..................................................................................... 69

CHAPITRE 4LES THÉORIES DE LA TRADUCTION .............................................................................. 71

1. La théorie interprétative ......................................................................................... 712. La théorie de l’action ............................................................................................. 733. La théorie du skopos ............................................................................................. 744. La théorie du jeu .................................................................................................... 765. La théorie du polysystème .................................................................................... 776. Faites le point ........................................................................................................ 797. Pour aller plus loin ................................................................................................. 808. Testez vos connaissances ..................................................................................... 80

CHAPITRE 5QUESTIONS ET PROBLÉMATIQUES DE LA TRADUCTOLOGIE .................................... 81

1. Le sens .................................................................................................................. 811.1 Le sens selon Nida ....................................................................................... 811.2 Le sens selon Catford ................................................................................... 82

2. L’équivalence ......................................................................................................... 833. La fidélité ............................................................................................................... 854. Les modes de traduction ....................................................................................... 87

4.1 L’adaptation .................................................................................................. 874.2 L’explicitation ................................................................................................ 894.3 La compensation .......................................................................................... 90

5. Les types de traduction ......................................................................................... 915.1 Chez Goethe ................................................................................................. 915.2 Chez Schleiermacher .................................................................................... 925.3 Chez Jakobson ............................................................................................. 925.4 Chez Meschonnic ......................................................................................... 925.5 Chez Etkind ................................................................................................... 93

6. Les unités de traduction ........................................................................................ 937. Les universaux ....................................................................................................... 958. Les corpus ............................................................................................................. 969. Les choix et les décisions ..................................................................................... 9810. Les stratégies de traduction ................................................................................. 9911. Les normes de traduction ................................................................................... 102

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12. Les types de traduction ....................................................................................... 10313. La qualité et l’évaluation ...................................................................................... 10514. Faites le point ...................................................................................................... 10715. Pour aller plus loin ............................................................................................... 10716. Testez vos connaissances ................................................................................... 108

CHAPITRE 6TRADUCTION ET INTERPRÉTATION ............................................................................. 109

1. Les types de traduction orale .............................................................................. 1092. Les types d’interprétation .................................................................................... 1103. La recherche en interprétation ............................................................................. 1114. Faites le point ....................................................................................................... 1145. Pour aller plus loin ............................................................................................... 1156. Testez vos connaissances ................................................................................... 115

CHAPITRE 7PÉDAGOGIE ET DIDACTIQUE DE LA TRADUCTION .................................................... 117

1. Former des langagiers spécialisés ...................................................................... 1192. Un exercice formateur : la critique des traductions ............................................. 1213. L’intégration des outils technologiques ............................................................... 1224. L’enseignement à distance de la traduction ........................................................ 1245. Faites le point ....................................................................................................... 1266. Pour aller plus loin ............................................................................................... 1277. Testez vos connaissances ................................................................................... 128

CHAPITRE 8LES CHAMPS D’INTERVENTION DU TRADUCTEUR .................................................... 129

1. Traduction et médias ........................................................................................... 1292. Traduction et communication multilingue ........................................................... 1313. Traduction et veille multilingue ............................................................................ 1334. Faites le point ....................................................................................................... 1375. Pour aller plus loin ............................................................................................... 1386. Testez vos connaissances ................................................................................... 138

CHAPITRE 9LES CHAMPS D’APPLICATION DE LA TRADUCTOLOGIE ........................................... 139

1. Traduction, traductique et industries de la langue .............................................. 1391.1 Les mémoires de traduction ....................................................................... 1411.2 Les concordances bilingues ....................................................................... 142

2. Traduction et terminologie ................................................................................... 1432.1 Les terminologies bilingues et multilingues ................................................ 1442.2 Une terminologie pour le traducteur ........................................................... 145

3. Le traducteur et les dictionnaires ........................................................................ 1463.1 Culture et dictionnaire de traduction .......................................................... 1483.2 Le traducteur et les dictionnaires électroniques ......................................... 149

4. Faites le point ....................................................................................................... 1505. Pour aller plus loin ............................................................................................... 1506. Testez vos connaissances ................................................................................... 150

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CHAPITRE 10LA TRADUCTION AUTOMATIQUE ................................................................................. 151

1. Bref rappel de l’histoire de la T.A. ....................................................................... 1512. Choix applicatifs en T.A. ...................................................................................... 1543. Choix théoriques en T.A. ..................................................................................... 1554. Les traducteurs en ligne ...................................................................................... 1575. Faites le point ...................................................................................................... 1586. Pour aller plus loin ............................................................................................... 1597. Testez vos connaissances ................................................................................... 159

CONCLUSION ET MISE EN PERSPECTIVE ................................................................... 161

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE ......................................................................................... 165

INDEX DES AUTEURS ..................................................................................................... 173

INDEX DES NOTIONS ..................................................................................................... 175

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Introduction à la traductologie

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Cet ouvrage présente les tenants et les aboutissants du vaste domaine des études traductologiques. Science de la traduction qui s’est affirmée au cours du vingtième siècle, la traductologie a donné lieu à d’innombrables travaux et à des débats passionnés dans la plupart des langues.

Après un aperçu historique de l’évolution du domaine, l’auteur présente de façon synthétique et raisonnée les différentes approches, modèles et théories de la traduction. Il explique en détail les principales questions et problématiques qui ont agité les spécialistes, avant d’esquisser une didactique de la traduction qui tient compte des évolutions technologiques et des acquis les plus récents des sciences humaines et cognitives. Sa réflexion sur les domaines d’intervention du traducteur et sur les champs d’application de la traductologie montre l’interdisciplinarité fondamentale d’une discipline sollicitée de toutes parts à l’heure de la mondialisation et de l’internet multilingue.

Outil facilitateur et introductif, cet ouvrage est une référence de base indispensable, à intégrer dans la bibliothèque de tout traducteur francophone.

Cette nouvelle édition est enrichie de plusieurs sections sur les développements récents de la traduction en ligne.

Mathieu GUIDÈRE est agrégé et professeur des universités en France (Université de Toulouse 2). Il a été professeur de traductologie à l’Université de Genève et directeur du Département français de traductologie et de traduction à l’École de Genève. Docteur en linguistique de la Sorbonne et titulaire d’un diplôme d’interprète traducteur, il a publié plusieurs ouvrages et articles de référence sur la traduction et la veille multilingue.

Cet ouvrage s’adresse aux étudiants et enseignants du 1er cycle en traduction, ainsi qu’à tous ceux qui s’intéressent à la traduction et à l’interprétation, que ce soit dans le cadre universitaire ou professionnel.

INTTRAISBN 978-2-8073-0008-8www.deboecksuperieur.com

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