inegalites de sante entre le nord de la france et le sud-est de l’angleterre · 2012-10-09 · 3...
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INEGALITES DE SANTE ENTRE LE NORD DE LA FRANCE
ET LE SUD-EST DE L’ANGLETERRE
Premier rapport du projet Interreg
La santé et les comportements de santé dans le Sud-Est de l’Angleterre et le
Nord de la France
Participation et contribution au projet :
2
University of Kent Centre for Health Service Studies
Institut Catholique de Lille - CRESGE
University of Greenwich
Kent County Council
Observatoire Régional de la Santé du Nord-Pas de Calais
Février 2006
3
1.1 Introduction
Ce projet est cofinancé par Interreg IIIA, un programme de l’Union
Européenne financé par le fonds européen pour le développement régional.
Interreg IIIA est focalisé sur le Nord de la France et le Sud-Est de l’Angleterre.
Sont concernés par ce projet côté anglais, le Kent et le Medway, le East
Sussex et Brighton et Hove (KMESBH), et, côté français, le Nord-Pas-de-
Calais (NPDC).
Interreg IIIA a pour but de stimuler la coopération entre des régions séparées
par une frontière. Son objectif est de développer la coopération
transfrontalière entre les régions du Sud-Est de l’Angleterre et le Nord de la
France.
Figure 1
La région INTERREG IIIA
Source: www.interreg3a.com
4
Le but du projet est d’analyser les données relatives à la santé et aux
comportements s’y rapportant, pour les habitants du Sud-Est de l’Angleterre
et du Nord de la France, en insistant plus particulièrement sur les inégalités
de santé et la cohésion sociale. De plus, on comparera la disponibilité et
l’accessibilité des programmes ayant trait à la santé dans chaque pays. Au
cours de la deuxième année du projet, des stratégies pour améliorer la santé
des citoyens de l’Euro-région seront proposées. D’autre part, grâce à des
groupes témoins, on collectera des informations relatives au point de vue des
patients, en tenant compte des aspects sociaux et culturels des deux
régions.
1.2 Description géographique et contexte social des deux régions (voir
Document de travail 1)
Tableau 1
Présentation des populations
Angleterre France
Zone administrative PopulationZoneadministrative
Population
Region (Kent,Medway, East Sussex,Brighton et Hove)
2 319 347Région (Nord-Pas-de-Calais)
3 996 5881
1 Population par région aux derniers recensements (population sans doubles comptes), données INSEE, http://www.insee.fr
5
County ou unitaryauthority (4)
492.324 (EastSussex); 249488(Medway);1 329 718(Kent); 247817 (Brightonet Hove)
Département (2)NordPas de Calais
Nord :2 555 020
Pas-de- Calais :1 441 568
Local Authority : EastSussex (5), Kent,Medway, Brighton etHove (12)
De 85 000(Hastings) à250 000(Medway)
Arrondissement(13)
De 99 249(Montreuil) à 1 181724 (Lille)
Electoral Wards
De 249(NorthDowns,Ashford) à 5666 (BeaverAshford)
Cantons (170)
De 4 919 (LeQuesnoy) à 93 531(Tourcoing), 96 959(Roubaix) et184 647 (Lille)
Le NPDC se situe au Nord de la France et s’étend sur 12.414 km², soit
l’équivalent de 2.3% de la superficie totale de la France2. La population du
NPDC s’élève à 3996 588 (en 1999) habitants (à comparer avec les
60 185 831 habitants en France)3 répartis comme suit : 2 555 020
d’habitants dans le département du Nord, et 1 441 568 dans le Pas-de-
Calais4. La région est divisée en deux départements (Le Nord avec Lille
comme capitale régionale, et le Pas-de-Calais avec Arras pour chef-lieu), 13
arrondissements dont 6 dans le Nord et 7 dans le Pas-de-Calais, 170
cantons (86 dans le Nord et 84 dans le Pas-de-Calais) et 1 546 communes
2 Source INSEE. Nord Pas de Calais. La région en chiffres. Territoire. Le Nord-Pas-de-Calais dans l’Union européenne. http://www.insee.fr/fr/insee_regions/Nord-pas-de-calais3 Population par région aux derniers recensements (population sans doubles comptes), données INSEE, http://www.insee.fr4 Source : Insee. Les données de recensement du 1999. Population sans double compte.http://www.recensement.insee.fr/RP99/rp99/page_accueil.paccueil?nivgeo=D&theme=POP&typeprod=ALL&lang=FR
6
(652 dans le Nord et 894 dans le Pas-de-Calais)5. Le taux de chômage y est
plus élevé qu’au niveau national (13,2% contre 9,5%, en 4ème trimestre
2005)6. Parmi les quatre activités économiques principales (agriculture,
industrie, bâtiment, services), c’est l’industrie qui tient la place la plus
importante, le NPDC étant la troisième région française pour ce qui est du
nombre d’emplois dans l’industrie. Ce territoire représente la troisième
région économique de France (hors l’Ile de France)7, avec un PIB total de
77.26 milliards d’Euros (5.5% du PIB national). Le PIB par habitant est de 90,
contre 113 pour la France (base 100, pour l’Europe des vingt cinq, en 2002,
source INSEE)8 ce qui place le NPDC parmi les régions les plus pauvres de
France.
Le KMESBH se trouve sous l’administration (government office) du Sud-Est.
Cette région compte 2 319 347 habitants, dont 1 329 718 dans le Kent,
249 488 dans le Medway, 492 324 dans le East Sussex et 247 817 dans le
Brighton et Hove9. Les administrations représentantes de l’Etat travaillent
avec les autorités locales du Sud-Est de l’Angleterre pour appliquer les
politiques nationales. Le Sud-Est de l’Angleterre était, en 2004, la région la
plus peuplée du Royaume-Uni avec 8,1 millions d’habitants, suivie par
Londres et ses 7,4 millions d’habitants10. Plus d’un quart (26%) de la
5 Source : Insee6 Source : Insee. Taux de chômage trimestriel par région.http://www.insee.fr/fr/ffc/chifcle_fiche.asp?ref_id=CMRSOS03311&tab_id=4767 Source: Chambre Régionale de Commerce et d’Industrie Nord Pas de Calais. Economie du Nord Pas de Calais. http://www.nordpasdecalais.cci.fr/www/espace_territoires/economie_du_nordpas_de_calais.aspx8 Source : Insee Nord-Pas-de-Calais. La région en faits et chiffres. Le Nord-Pas-de-Calais dans l’Union européenne http://www.insee.fr/fr/insee_regions/Nord-pas-de-calais
9 2001Census ; National Statistics Onlinehttp://www.statistics.gov.uk/census2001/pyramids/pages/00ml.asp10 http://www.statistics.gov.uk/CCI/nugget.asp?ID=1306&Pos=1&ColRank=2&Rank=512
7
population anglaise habitait à Londres ou dans le Sud-Est. Ce, en dépit du
fait que ces deux régions réunies couvrent à peine moins du dixième du
territoire du Royaume-Uni. Le Sud-Est est l’une des régions les plus riches
d’Angleterre. En 2003, l’index de valeur ajoutée par habitant atteint 115 (100
pour le Royaume-Uni). Le Sud-Est et l’Est constituent les deux régions
représentants les taux d’emploi les plus élevés en Royaume-Uni (plus que
78% en 2004)11.
11 Annual Population survey, Office for National Statistics.http://www.statictics.gov.uk/downloads/theme_labour/UALADtables_Sept05.xls
8
Tableau 2
Vue d’ensemble de la santé de la population
Nord-Pas-de-Calais12
France Kent etMedway
Brighton etHove
EastSussex
GrandeBretagne
Taux de natalité par100013
14,15 1360,3 49,7 56,3
Mortalité infantile 4,6 4,2 5,3 5,3
Espérance de vie à lanaissance
H : 72,4F : 80,8
H : 75,8F: 82,9
H: 75,9F: 80,2
H: 72,5F: 81,0
H: 76F: 81
Mortalité à tout âge (par1 000 habitants)
9,2 9,0 H: 9,8F: 10,6
Le ratio de mortalité standardisé du Kent et Medway atteint 97%, et celui du
NPDC 126%.
L’espérance de vie à la naissance dans le NPDC est parmi les moins élevées
de France, que ce soit pour les hommes ou pour les femmes. Un allongement
de l’espérance de viea pu être observé pour les deux sexes depuis 1990,
sans que l’écart entre les sexes ne se modifie. Le taux global de mortalité est
le plus élevé de France, pour les deux sexes. Selon l’observatoire régional de
la santé (ORS), la mortalité des hommes est de 26% plus élevée dans la
région que la moyenne nationale14. Il semblerait que ces résultats aient pour
cause la fréquence des maladies liées à la consommation d’alcool et de
tabac, aux mauvaises habitudes alimentaires et à la grande proportion
12 Toutes les données pour le Nord-Pas-de-Calais et la France viennent dehttp://www.insee.fr/fr/insee_regions/Nord-pas-de-calais/rfc13 En France, nombre de naissances par an par rapport à la population totale d’une région donnée (présenté par 1 000 habitants). En Angleterre, le taux de natalité est le nombre denaissances pour 1000 femmes agées de 15 à 44 ans.
14 ORS Nord pas de Calais, présentation orale pendant l’atelier du projet Interreg du30/01/06
9
d’anciens ouvriers exposés à des facteurs de risques dans les zones
industrielles et dans l’ancien Bassin minier.
La mortalité est variable dans le Sud-Est de l’Angleterre, dans le Kent et
Medway. Sevenoaks a le plus faible taux de mortalité et Dartford le plus
élevé. Sur l’ensemble du territoire couvert par le projet, la région d’Hastings
a l’espérance de vie la plus courte (77,4 ans) et Wealden la plus longue (80,7
ans, hommes et femmes confondus). Les maladies du système circulatoire
sont les principales causes de décès, les cancers venant en deuxième
position, et les maladies du système respiratoire constituant la troisième
cause de décès15.
15 ONS Annual District Deaths Extracts, 1996-2002
10
2.1 Ce que l’ont sait des inégalités (voir Document de travail 2)
Les inégalités en matière de santé se définissent par des variations de l’état
de santé (mesurées par le taux de mortalité) selon les communautés et le lieu
de vie. Les variations de l’état de santé selon le lieu de vie ont été
démontrées aussi bien en France qu’en Angleterre, où le « Black Report » a
montré que les hommes de la classe sociale V avaient 2,5 fois plus de chance
de mourir avant l’âge de la retraite que ceux de la classe sociale I. Glasgow a
l’espérance de vie la plus courte de Grande-Bretagne, soit 76,4 ans (2001-
2003), contre 84,8 ans pour un habitant de Kensington (Londres). Dans le
Sud-Est de l’Angleterre (zone de Government Office South East - GOSE),
l’espérance de vie moyenne à la naissance est de 79,3 ans. Selon
l’Observatoire de santé publique sud-est (South East Public Health
Observatory –SEPHO), impliqué dans le Projet Interreg, l’espérance de vie
s’étend de 77,4 ans à Hastings, 77,6 ans à Medway et Thanet, à 80,2 ans à
Lewes, 80,6 à Sevenoaks et 80,7 à Wealden16.
Il est possible de définir deux types d’inégalités:
o Les inégalités de santé,
Economiques, liées à la position socioprofessionnelle.
Inégalités de comportement, qui elles aussi sont liées à la
position socio-économique
Inégalités de la vie
o Les inégalités relatives à l’offre des soins
16 SEPHO 2004: Life Expectancy at birth; local authorities in the south east
11
Les inégalités de santé sont une question importante pour le gouvernement
anglais depuis la publication du « Black Report » en 1980. La politique
britannique de santé vise à réduire les inégalités de santé. En France, la
littérature relative aux inégalités de santé est peu développée. Cependant, les
deux pays abordent cette question sous le même angle, c’est-à-dire les liens
entre problèmes de santé et défavorisation matérielle et sociale. Le Haut
Comité de la Santé Publique dans son rapport « La santé en France » (janvier
2002)17 a démontré les différences d’espérance de vie à 35 ans, entre les
catégories socioprofessionnelles. La différence d’espérance de vie entre
ouvriers et cadres s’enlève à 6,5 ans pour les hommes et à 3,5 ans pour les
femmes. La probabilité de décéder entre 35 et 65 ans est deux fois plus
élevée pour un homme ouvrier que pour un homme cadre. Ce rapport
s’enlève à 1,6 pour les femmes.
17 La santé en France 2002. Rapport du Haut Comité de la Santé Publique. ISBN : 2-11-005112-4
12
2.2 Points de vue anglais et français
Il est intéressant de constater que la réflexion face aux inégalités de santé se
situe à des niveaux différents des deux côtés de la Manche. L’analyse des
inégalités de santé est importante pour la santé publique en Angleterre
depuis les études de William Farr en 1837. En 1980, lorsque le « Black
Report » fut publié, il constitua un sujet de controverse pour le
gouvernement Thatcher, et les résultats ne furent pas publiés
immédiatement. Cependant, des études ultérieures ont montré que des
inégalités en tous genres, entre groupes sociaux ainsi qu’entre le Nord et le
sud du pays, ont continué de s’accroître.
En France, la question des inégalités de santé n’a reçu, jusque récemment,
que peu d’attention de la part des spécialistes de la santé et des sciences
sociales. Cela explique pourquoi cette question n’a joué qu’un rôle mineur
dans les débats publics sur la santé, bien que des réflexions à ce sujet soient
à l’origine de la loi de 199918 sur la couverture maladie universelle (CMU)
pour les Français les plus pauvres et apparaissent dans l’article premier de la
loi de 2004 sur la santé publique19.
Ce n’est qu’en 2001 que cette question a suscité un travail commun de la
part d’épidémiologistes et d’experts en sciences sociales. Pendant cette
même période, des rapports du Haut Comité de la Santé Publique et de
18 Loi 99-641 du 27 Juillet 1999 portant création d'une couverture maladie universelle19 Loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique
13
l’Académie Nationale de Médecine ont, après études, fait des propositions
publiques à ce sujet.
3.1 D’un point de vue méthodologique, comment établir des
comparaisons ? (voir Document de travail 3)
L’objectif est d’obtenir et de développer les indicateurs essentiels pour
rendre possible des comparaisons à un niveau géographique fin des deux
côtés de la Manche. Durant les six premiers mois, les domaines principaux
concernés furent les suivants:
o La démographie
o Les indicateurs sociaux
o Les indicateurs de mortalité
o Les indicateurs de santé issus des enquêtes locales sur la santé.
3.2 Sources d’informations
Les sources de données utilisées sont les recensements, les registres de
décès et les enquêtes locales.
3.3 Données de recensement
Les données de recensement sont les données de population les plus
précises et elles peuvent être analysées à un niveau très local, ce qui se
relève très utile pour une analyse de la pauvreté, les variations étant
marquées sur une zone géographique restreinte. Le recensement français est
mené tous les neuf ans, le dernier datant de 1999. Au Royaume-Uni il a lieu
14
tous les 10 ans, le dernier datant de 2001. Entre chaque recensement, et
pour les deux pays, des estimations sont établies pour chaque année
intercensitaire. En Angleterre, ces estimations sont disponibles par section
électorale (electoral wards) mais elles perdent de leur fiabilité au fur et à
mesure que le temps d’écoule, depuis le recensement précédent. En France,
il existe des estimations de population aux niveaux national, régional, et
départemental. Il faut, pour les comparaisons, prendre en compte les «
bassins de vie » et les « zones de proximité » utilisés en France par les
Agences Régionales de l’Hospitalisation. Certaines données concernant les
soins et la santé existent à ce niveau.
Il a été décidé d’exploiter le plus largement possible les données au niveau
régional, au niveau de la section électorale (electoral ward) en Angleterre, et
au niveau du canton en France. En moyenne les cantons français sont trois
fois plus grands que les sections électorales anglaises et les différences en
termes de population est encore plus importante (jusqu’à 100 000 habitants
dans un canton). Ces échelles géographiques offrent la possibilité de mettre
en évidence des variations à un niveau local tout en maintenant un niveau
d’analyses statistiquement crédibles (les données ainsi relevées sont
rassemblées au fil des ans).
Cependant, le niveau d’analyse dépend du thème de recherche. Par
conséquent, certains travaux sont menés au niveau des zones de proximité
en France, et du district en Angleterre, notamment lorsqu’il s’agira du volet:
« utilisation des soins ».
15
3.4 Niveau de pauvreté (Deprivation scores)
L’un des objectifs du projet est l’élaboration d’un système de comparaison
des indices de pauvreté dans toute la région. La France et l’Angleterre
utilisent des méthodologies différentes et les indices collectés régulièrement
lors des recensements varient également entre les deux pays.
La méthodologie française est axées sur le travail et le revenu alors qu’en
Angleterre on utilise les indices de défavorisation depuis longtemps, à
commencer par Jarman et Townsend, Carstairs et plus récemment, l’Indice de
Défavorisation Multiple (IDM)20.
L’équipe a tenté d’appliquer l’IDM aux données françaises; cependant il est
difficile de trouver les données nécessaires pour sa construction. L’indice
retenu le plus utile et le plus pertinent est l’Indice de Townsend21.
Plus l’Indice de Townsend est élevé, plus la région connaît des
défavorisations et est désavantagée. Les variables pour le construire sont
disponibles des deux côtés de la Manche, ce qui permet une comparaison
des indices obtenus.
3.5 La classe socio-économique
Dans les deux pays, la définition de la classe sociale est basée sur le travail
et est dans un certain sens comparable. Néanmoins, un travail
20 Office of Deputy Prime Minister. 2000. Indices of Multiple Deprivation 2000 –TheMethodology. http://www.odpm.gov.uk/index.asp?id=112845221 Townsend P, Phillimore P, Beattie A. Inequalities in Health in the Northern Region: aninterim report, Newcastle upon Tyne and Bristol; Northern Regional Health Authority and theUniversity of Bristol:.1986.
16
complémentaire est nécessaire pour fournir une analyse croisée complète
des deux systèmes ; il semble que l’Eurostat travaille ces questions. Au
Royaume-Uni, la situation économique de chacun est définie par individu et
non pas par ménage. Ainsi, si une femme travaille et que son mari s’occupe
de la famille à domicile, il ne cherche pas d’emploi, il est donc classé comme
« Economiquement Inactif». En France, les classes socio-économiques sont
définies par la nomenclature des Professions et Catégories
Socioprofessionnelles (PCS-2003). Elle comporte quatre niveaux
d'agrégation. Au niveau le plus agrégé se trouvent les groupes
socioprofessionnels en 8 postes (voir Tableau 3). La nomenclature décrit 486
postes d'actifs, et 11 postes supplémentaires pour les personnes sans
activité professionnelle22.
Le système de classification utilisé en Angleterre est basé sur la main
d’œuvre en utilisant la Classification Socio-économique des Statistiques
Nationales (NS-SEC).
‘La CSE-SN est une classification basée sur le travail mais elle a des règles
pour couvrir la totalité de la population adulte. Les renseignements exigés
pour créer la NS-SEC sont le métier codé par les groupes d’unité de la
Classification Professionnelle Standard 2000, et les détails du statut de
l’emploi (employeur, indépendant ou employé; soit directeur ; nombre
d’employés sur le lieu de travail). Des renseignements similaires ont déjà été
22 Source: Insee; Professions et Catégories Socioprofessionnelles PCS-2003http://www.insee.fr/fr/nom_def_met/nomenclatures/prof_cat_soc/pages/pcs.htm
17
demandés pour des classifications sociales précédentes : Classe Sociale et
Groupe Socio-économique.’23
Tableau 3
Classification sociale
France24
Agriculteurs exploitantsArtisans, commerçants et chefs d'entrepriseCadres et professions intellectuelles supérieuresProfessions intermédiairesEmployésOuvriersRetraitésAutres personnes sans activité professionnelle
AngleterreMétiers gestionnaires et professionnels supérieursMétiers gestionnaires et professionnels inférieursMétiers intermédiairesPetits employeurs et ouvriers à leur propre compteDirection inférieure et métiers techniquesMétiers de semi-routineMétiers de routineChômeurs de longue durée
3.6 Données sur la mortalité
Les données sont issues des recensements de la population ou d’estimations
de population. Comme décrit précédemment, le recensement français le plus
récent est plus ancien de deux ans par rapport au recensement anglais ; et
23 Socio-economic classification of working-age population, Spring 2002: Regional Trends 3724 Liste des catégories socioprofessionnelles agrégées 2003. Niveau 1 : 8 Postes ;http://www.insee.fr/fr/nom_def_met/nomenclatures/prof_cat_soc/html
18
plus les données sont anciennes, moins les estimations qui les actualisent
sont fiables. De plus, les données anglaises sur la mortalité ont commencé à
être collectées à partir de 1986, alors que les françaises sont recueillies par
l’ORS Nord –Pas-de-Calais au niveau communal depuis 1979.
Pour la comparaison de la mortalité, nous avons utilisé des taux standardisés
permettant d’éliminer le biais lié à des différences de structure par âge des
différents zonages.
Ainsi, pour ce qui est de l’analyse spatiale de la mortalité, il a été convenu de
calculer des SMR à partir des décès cumulés de la période 1996-2002 à
l’échelle du canton pour le côté français et des Electoral Wards pour le côté
anglais. En ce qui concerne l’analyse de l’évolution temporelle de la
mortalité, nous avons calculé des taux comparatifs de mortalité annuels,
standardisés sur la population européenne. Les années disponibles
concernaient la période 1979-2001 pour la France et la période 1993-2004
pour l’Angleterre. Il a été possible de comparer l’évolution de la mortalité au
niveau de la France métropolitaine et de l’Angleterre, et des régions du
Nord –Pas-de-Calais, du Surrey et Sussex, de Brighton et Hove et du Kent et
du Medway sur la période 1993-2001.
La classification CIM-9 a été utilisée en France pour codifier les décès entre
1979 et 1999 et la CIM-10 à partir de 2000 ; en Angleterre la CIM-9 a été
utilisée jusqu’à la fin de l’année 2000 et laCIM-10 depuis le début de
l’année 2001. Il n’est pas évident que la collecte et le traitement des données
sur la mortalité aboutissent aux mêmes intitulés des deux côtés de la
Manche ; par exemple, un décès dû à une pneumonie en France donnera la
19
pneumonie comme cause du décès même s’il y a une cause sous-jacente
telle qu’un accident cérébro-vasculaire; en Angleterre c’est la cause sous-
jacente qui sera gardée. Comme ces données sont utilisées pour des
comparaisons internationales publiées par exemple par l’Organisation
Mondiale de la Santé, il a été convenu de faire progresser le travail tout en
gardant à l’esprit que des différences peuvent être dues à de telles
anomalies.
Par ailleurs, jusqu’en 1997, il existait entre les deux pays une différence de
définition de l’âge au décès. En effet, alors qu’en Angleterre tous les âges
au décès sont calculés en âge révolus, en France, l’âge était calculé en
années révolues jusqu’à l’âge de 9 ans, puis en âge atteint durant l’année à
partir de 10 ans. Depuis 1998, la France calcule l’âge au décès uniquement
en années révolues. Cette différence dans le calcul de l’âge génère jusqu’en
1997 un biais affectant la comparaison des taux de mortalité entre les deux
pays. Pour le corriger, il a été nécessaire d’utilisersur la période 1979-1997
une population standard adaptée à la spécificité française.
3.7 Données d’enquêtes
L’Angleterre et la France ont toutes deux une Enquête Nationale sur la Santé,
qui est réalisée tous les ans en Angleterre (Health Survey for England) et tous
les 10 ans en France (Enquête nationale sur la santé et les soins médicaux, la
dernière réalisée en 2002-2003).
20
En Angleterre, il existe des séries d’enquêtes locales comme l’enquête «
Apple a Day » à Maidstone et Canterbury en 1985, l’enquête « Health Quest
SouthEast » dans le Kent et Medway en 2001 et l’enquête «Health Counts »
(East Sussex, Brighton et Hove en 2003). En France, une extension de
l’Enquête Nationale dans le Nord Pas-de Calais a été réalisée en 1980-1981
et 2002-2003. Il existe aussi des enquêtes spécifiques de type Baromètre
Santé (deux ont été menés récemment : en 2000 une enquête sur tabac, en
2002 sur la nutrition).
Les enquêtes française et anglaise posent des questions similaires
concernant le SF-36, l’obésité, l’activité physique, le logement, la classe
socioprofessionnelle. On pourra donc les utiliser dans la comparaison de la
santé des individus dans les deux régions. Le choix des termes a été
soigneusement examiné pour s’assurer de la comparabilité des items.
3.8 « State of Art », revue de littérature –Comment mesurer les inégalités
de santé ?
Les inégalités de santé sont communément mesurées au niveau de la
population. Il existe des méthodes communes et différentes de mesure des
inégalités pour les deux pays. La méthodologie de mesure de la mortalité
standardisée sur l’âge et le sexe est la même pour les deux pays; les deux
séries des données sont standardisées sur chacune des populations
nationales. Pour ces raisons, le projet a développé une méthodologie
commune en utilisant la mortalité, l’espérance de vie et des indices de
21
défavorisation. Comme expliqué ci-dessus, les informations disponibles sur
la défavorisation ont été explorées des deux côtés et une approche commune
a été convenue en utilisant l’Indice de Défavorisation de Townsend.
L’approche géographique permettra de décrire les variations de la mortalité,
de l’espérance de vie et de l’Indice de Défavorisation de Townsend à l’échelle
des sections électorales et cantons. Des corrélations seront utilisées pour
démontrer qu’il y a bel et bien correspondance des deux côtés de la Manche
concernant les mesures de santé et des inégalités, et on cherchera les
explications en utilisant les données de l’étude et les données qualitatives.
Les données issues des enquêtes ont été traitées en suivant l’approche
économique développée par Van Doorslaer et al. (2003,2004)25,26 afin de
comparer les inégalités de santé totales et en relation avec le revenu à travers
les deux régions.
25 VAN DOORSLAER E, JONES AM (2003) Inequalities in self-reported health: validation of a newapproach of measurement. Journal of Health Economics; 22: 61-8726 VAN DOORSLAER E, KOOLMAN X (2004) Explaining the differences in income-related healthinequalities across European countries. Health Economics; 13: 609-628
22
L’explication des inégalités de santé comporte :
o La relation statistique entre l’état de santé et les caractéristiques
socioéconomiques au niveau individuel (sexe, âge, revenu,
situation socioéconomique, comportements de santé, capital
social…)
o La répartition de ces facteurs prédictifs dans la population
générale.
Une variable contribuera à « expliquer » les inégalités de santé si elle remplit
les deux conditions suivantes :
o Elle doit avoir un impact sur la santé (c’est-à-dire avoir un coefficient
significatif dans l’équation de santé) et,
o Elle doit être inégalement répartie parmi les individus (c’est-à-dire
avoir un indice de concentration supérieur à zéro). L’état de santé peut
être estimé en utilisant le questionnaire SF36.
De nombreuses études montrent que l’estimation subjective de l’état de
santé est un bon indicateur de la mortalité future. Des modèles de type Logit
ordonné peuvent être utilisés pour transformer les réponses qualitatives en
des mesures quantitatives graduées par intervalles.
Les études de population apportent des informations utiles sur le statut
socioéconomique (les données sur le sexe, l’âge, la situation
socioéconomique et le revenu ne sont pas disponibles dans les études
anglaises) et sur les modes de vie en relation à la santé (consommation
23
d’alcool, tabagisme, nutrition et activité). Si elles sont représentatives, on
peut aussi utiliser ces enquêtes pour estimer la répartition des facteurs
prédictifs dans la population générale.
Depuis le lancement du projet, les travaux statistiques ont progressé sur les
points suivants :
o Des enquêtes ont été précisément comparées concernant la
représentativité (procédé d’échantillonnage, classifications par poids)
et les informations disponibles (portée de l’information, définition des
variables et modalités) ;
o Des équations de santé ont été estimées et testées séparément pour
chaque région (Nord/Pas-de-Calais, KMESBH).
o La définition des facteurs explicatifs des inégalités de santé dans les
deux régions est actuellement en cours. La comparaison de la capacité
« explicative » de chaque facteur entre le Nord/Pas-de-Calais et Kent
est prévue.
Les premiers résultats des comparaisons des enquêtes ont mené à un débat
sur l’utilisation du poids, et la modélisation statistique a produit des
conclusions difficiles à interpréter. Des comparaisons directes entre les
résultats des enquêtes mènent à quelques différences intéressantes entre les
deux populations.
4.1 Analyse des indices de défavorisation (en utilisant les approches
française et anglaise) ; présentation de cartes et comparaison détaillée des
deux régions (voir Document de travail 4)
24
Une première approche a utilisé les indices déjà existants des deux côtés de
la Manche ; cependant, les données qui construisent ces indices (en
particulier l’Indice de Défavorisation Multiple qui utilise 36 indicateurs) ne
sont pas disponibles pour chaque pays. Il y a aussi des différences dans la
définition des classes sociales.
Il y a deux possibilités pour analyser et comparer le désavantage social et les
indicateurs de santé. Tout d’abord nous avons recherché les variables qui
fournissaient le maximum d’explications sur la variation de l’état de santé.
Pour cela, nous avons tout d’abord comparé les indicateurs communs aux
deux pays, puis nous avons cherché à déterminer leur relation avec les
indicateurs d’inégalité. Ceci a mené à la comparaison des indices de
Townsend, Carstairs, Jarmen, ainsi que d’autres indices. Une contrainte
majeure a été de trouver les indicateurs appropriés des deux côtés de la
Manche, dont on pouvait être sûr qu’ils aient la même signification réelle. Le
document 4 expose ce travail et la méthode appliquée avec l’Indice de
Townsend.
Ensuite, nous voulons nous assurer que les indicateurs choisis fournissent
une analyse géographique à un niveau fin, et soient solides dans le calcul de
la corrélation entre santé et indicateurs sociaux à travers la zone
géographique.
25
5.1 Perspective locale des inégalités de santé : données collectées et
comparaisons réalisées –mortalité, espérance de vie, etc. (voir Document de
travail 5)
L’agrégation des données de mortalité à travers les deux régions a permis,
pour la première fois, la comparaison directe de la mortalité entre le Nord de
la France et le Sud-Est de l’Angleterre. Elle fournit aussi la possibilité d’une
comparaison directe de la mortalité entre l’Angleterre et la France.
L’analyse de la mortalité s’est faite de deux façons:
o Tendances de mortalité dans le temps en comparant les deux régions
et les statistiques nationales
o Analyse géographique en utilisant les cantons en France et les sections
électorales en Angleterre pour fournir une « échelle » hiérarchique par
Ratio de Mortalité Standard (ce deuxième travail doit être complété).
Figure 2
Mortalité toutes causes confondues (ICD10 A00-Y99, ICD9 001-E999)
26
M e n
500
700
900
1100
1300
1500
1700
1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005
Pe
r1
00
00
0E
uro
pe
an
Sta
nd
ard
po
pu
lati
on
Nord - Pa s-de -C a la is Kent and Medway SHA Surrey and Sussex SHABrighton and Hov e UA England F rance me tropolitan
Women
400
450
500
550
600
650
700
750
800
850
1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005
Per
10
00
00
Eu
rop
ean
Sta
nd
ard
po
pu
lati
on
Nord - Pas-de-Calais Kent and Medway SHA Surrey and Sussex SHABrighton and Hove UA England France metropolitan
La mortalité nationale, toutes causes confondues, chez les hommes est la
même pour la France et l’Angleterre, avec une baisse parallèle des taux
comparatifs de mortalité, qui passent en moyenne de 1000 décès pour 100
000 habitants en 1993 à 814 décès pour 100 000 en 2001. Ce que l’on
remarque particulièrement est que les hommes dans le Nord - Pas-de-Calais
ont une mortalité dans le temps uniformément plus importante que les
hommes dans le Kent et Medway, et dans le Surrey et Sussex. Entre 1993 et
2001 la chute de la mortalité a été de –12,4% (Surrey et Sussex) et de -15,3%
pour le Nord - Pas-de-Calais.
27
La mortalité dans le Nord - Pas-de-Calais qui, en 1979, était supérieure de
29% à celle de la France métropolitaine, s’est très peu réduite au cours des
deux dernières décennies. En effet, en 2001, cette région accusait encore
une surmortalité de 26% par rapport à la moyenne nationale.
Figure 3
Mortalité due aux cancers à tous âges –Hommes (ICD9 140-208 ajusté,
ICD10 C00-C97)
Men
150
200
250
300
350
400
450
1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005
Per
10
00
00
Eu
rop
ean
Sta
nd
ard
po
pu
lati
on
Nord - Pas-de-Calais Kent and Medway SHA Surrey and Sussex SHA
Brighton and Hove UA England France metropolitan
Les femmes françaises ont une espérance de vie plus longue que les femmes
anglaises d’environ 2 années. Cette différence se retrouve au niveau des taux
de mortalité féminins toutes causes confondues qui en France , entre 1993
et 2001, demeurent nettement inférieurs aux taux Anglais (400 décès pour
100 000 contre 550 décès pour 100 000 respectivement en 2001). Les
femmes françaises résidant dans le Nord - Pas-de-Calais ont cependant un
28
excédent de mortalité par rapport au taux national français se situant entre
20% à 23% sur les années 1979-2001. Pour les deux pays, le taux de
mortalité standardisé a baissé de façon similaire pour les femmes entre 1979
et 2001, même si, sur cette période, le taux français est toujours resté
d’environ 30% inférieur au taux anglais. Dans le Kent et Medway et dans
Brighton et Hove, on observe que la mortalité des femmes se situe autour de
la moyenne nationale (+/- 5% par rapport au niveau national anglais). Dans
le Surrey et Sussex la mortalité féminine est 11% en dessous du taux
national.
Le cancer représente 32% des causes de mortalité des hommes en France et
28% en Angleterre (tous âges confondus). Alors que le nombre de maladies
vasculaires a tendance à baisser, les décès dus au cancer deviennent une
cause plus importante. En France, le nombre de décès dus au cancer est resté
stable de 1997 à 2001 alors qu’en Angleterre il a baissé de 6%. Le taux de
mortalité a cependant baissé en France entre 1979 et 2001 de 16,5% ; mais
dans le Nord - Pas-de-Calais cette baisse n’a été que de 7,8%. Par rapport à
la France métropolitaine, le Nord – Pas-de-Calais affiche en 2001 une
surmortalité de 28 %.
Figure 4
Mortalité due aux cancers à tous âges –Femmes (ICD9 140-208 ajusté,
ICD10 C00-C97)
29
Women
100
110
120
130
140
150
160
170
180
190
200
1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005
Pe
r1
00
00
0E
uro
pe
an
Sta
nd
ard
po
pu
lati
on
Nord - Pas-de-Calais Kent and Medway SHA Surrey and Sussex SHABrighton and Hove UA England France metropolitan
Pour la France, en 2001, le taux de mortalité dû aux cancers est de
265,5/100 000 par rapport à 228,5/100 000 en Angleterre. Kent et Medway,
et Brighton et Hove, ont un taux similaire à celui de l’Angleterre, alors que
Surrey et Sussex ont une mortalité inférieure à l’Angleterre de 8 à 9% entre
1993 et 2004.
En termes d’effectifs, il y a plus de similitudes entre la France et l’Angleterre
pour les décès de femmes dus au cancer ; en 2001, 22% de l’ensemble des
décès des femmes en France et 23.5% en Angleterre sont dus au cancer.
Dans les deux pays, le taux de mortalité pour les femmes est moins élevé
que pour les hommes. Cela est particulièrement marqué dans le NPDC où la
mortalité masculine due au cancer est deux fois supérieure à celle des
femmes. Cette différence entre les sexes est moins marquée en Angleterre
ou dans les régions du Sud-Est. Les femmes anglaises étaient plus
30
susceptibles de mourir du cancer que les Françaises de 32% en moyenne
pendant les années 1993-2001. Pendant cette période, les femmes dans le
NPDC ont par rapport à la France, un excédent de mortalité par cancer de
14%. Les femmes dans le Kent et le Medway obtiennent des taux comparatifs
de mortalité par cancer proches de ceux de l’Angleterre tandis que la
mortalité de Surrey et Sussex due au cancer était de 7% inférieure au niveau
anglais.
Les maladies circulatoires (maladies cardiaques, vasculaires et cérébro-
vasculaires) justifient 27% de toute la mortalité des hommes français et de
40% des hommes anglais. Dans les deux pays, il y a une tendance à la baisse
du nombre de décès de maladie circulatoire à long terme. La mortalité dans
le NPDC est inférieure au Sud-Est de l’Angleterre. Cependant, le NPDC a
toujours un excédent stable de mortalité de 28% en moyenne pendant les
années 1979-2001. Kent, Medway, Brighton et Hove ont presque le même
taux de mortalité qu’au niveau anglais, mais Surrey et Sussex ont un taux de
mortalité de maladie circulatoire inférieur de 13% à la moyenne nationale
pendant les années 1993-2001.
Les maladies circulatoires représentent 39.6% de tous les décès féminins en
Angleterre, contre 33.3% en France soit une différence moins importante que
chez les hommes. Les femmes ont vu réduire leur décès pour cause de
maladie circulatoire de 25% entre 1993 et 2001. Par ailleurs, la mortalité
masculine due à cette cause est de 1,6 à 1,8 fois supérieure à celle des
femmes selon le territoire et l’année; cette différence semble augmenter en
31
France et dans le NPDC mais diminuer en Angleterre et dans les régions du
Sud-Est.
6.1 Mesures au niveau local et analyse des comportements liés à la santé
et des inégalités de santé en utilisant les données d’enquête (voir Document
de travail 6)
Les données des études (Enquête santé 2002-2003 - Extension régionale
Nord-Pas-de-Calais, et « Health and Lifestyle surveys » de Kent et East
Sussex, Brighton et Hove) ont été analysées afin de comparer les inégalités
de santé dans les deux régions.
Les deux enquêtes comptent une même question sur l’estimation subjective
de l’état de santé, avec 5 réponses possibles. Il existe des différences
marquées entre les régions dans la répartition des réponses « bonne » et
« très bonne ». Les Français interrogés sont plus susceptibles de dire que
leur santé est « bonne », tandis que l’utilisation de ces deux termes pour les
anglais est limitée. On ne sait pas quelle part de cette variation est due à des
différences de santé réelles et quelle part est due à des différences dans la
façon dont ces termes sont compris. En général, les deux régions rapportent
une santé qui se détériore avec l’âge, avec des petites différences entre les
sexes.
Comportements liés à la santé
32
Figure 5
La taille et le poids sont auto-estimés dans les deux études, et sont donc
sujets à des biais de report similaires. On sait que la taille a tendance à être
surestimée (surtout chez les hommes) et le poids souvent sous-estimé. Ces
deux facteurs suggèrent que les scores BMI, peuvent être sous-estimés.
Dans les deux régions, une grande proportion d’hommes sont en surpoids
une fois passés les 25 ans. Chez les femmes, cela est moins le cas, mais plus
de la moitié d’entre elles âgées entre 45 et 64 ans, étaient tout de même en
surpoids.
La consommation de tabac diminue avec l’âge, pour les hommes come pour
les femmes. Fumer est plus courant chez les hommes, et particulièrement
dans le NPDC, où aucune femme âgée de plus de 75 ans ne prétend fumer
quotidiennement. En comparant les régions, le pourcentage des fumeurs
BMI - IMCMale - masculine (by age)
0%
20%
40%
60%
80%
100%
18-24 25-44 45-64 65-74 75+ 18-24 25-44 45-64 65-74 75+
Underweight -Sous-poids Normal - Normal Overweight - Surpoids
Obese - Obese Grossly Obese - Obesite massive
ESBH and K&M Nord-Pas-de-Calais
33
masculins diminue plus rapidement avec l’âge dans le NPDC, d’environ 40% à
4%. Les chiffres correspondants dans le KMESBH sont passés de 26% à 8%.
Pour les fumeuses, les différences entre les régions sont assez faibles, sauf
pour celles de plus de 65 ans dans le NPDC qui fument moins qu’en KMESBH.
Figure 6
Une découverte importante est que moins de personnes âgées fument dans
le NPDC que dans le KMESBH.
Contrairement aux idées reçues, la majorité des hommes français ne boivent
pas d’alcool quotidiennement, en se basant sur les réponses aux enquêtes.
Cependant, les hommes de 45 ans et plus dans l’enquête du NPDC sont
presque deux fois plus susceptibles de boire quotidiennement par rapport à
leurs homologues du KMESBH (autour de 40% contre environ 20%). Dans les
Smoking - FumerFemale - Feminin (by age)
0%
20%
40%
60%
80%
100%
18-24 25-44 45-64 65-74 75+ 18-24 25-44 45-64 65-74 75+
Smoke daily - Fume tous les jours Smoke occasionally - fume occasionnellement Non-smoker - non
ESBH and K&M Nord-Pas-de-Calais
34
deux régions, les hommes ont plus tendance que les femmes à boire
quotidiennement. Une exception notable est constatée chez les jeunes du
KMESBH, où plus d’individus âgés de moins de 25 ans déclarent boire
quotidiennement (5% d’hommes et 2% de femmes comparé à 3% d’hommes
et 1% de femmes dans le NPDC).
Les deux études s’intéressent à la variété apportée dans l’alimentation,
notamment les fruits et légumes. La comparaison est basée sur le
pourcentage des personnes déclarant manger des fruits et/ou des légumes
au moins 5 jours par semaine.
Dans les deux pays, il y a plus de femmes que d’hommes qui mangent des
fruits et des légumes à cette fréquence. Dans le NPDC, le pourcentage de
consommation de fruits et légumes 5 jours ou plus par semaine, augmente
avec l’âge.
Le nombre de personnes faisant de l’exercice 3 fois ou plus par semaine est
plus important chez les hommes et tend à se réduire avec l’âge.
Bien que les différences soient minimes entre les 2 régions concernant
l’exercice physique, les personnes âgées de plus de 65 ans dans le KMESBH
ayant une activité physique, sont plus nombreuses.
35
En suivant la méthodologie proposée par Van Doorslaer et Jones (2003)27, et
Van Doorslaer et Koolman (2004)28, expliquer les inégalités de santé suppose
d’explorer 1) le rapport statistique entre l'état de santé et les caractéristiques
socio-économiques au niveau individuel (sexe, âge, revenu, classe sociale,
comportement de santé, capital social...) et 2) la répartition de ces facteurs
prédictifs dans la population générale. Dans cette étude, on utilise
l’estimation subjective de l’état de santé comme une variable dépendante.
Pendant les 20 dernières années, l’état de santé des individus a été évalué
subjectivement dans beaucoup d’études. On demande aux individus de
placer leur état de santé sur une échelle catégorique (par exemple : de
« mauvais » à « bon »). Idler et Benyamini (1997)29 ont démontré que
l’estimation subjective de l’état de santé est un indicateur prédictif de la
mortalité.
Pour chaque région, l’équation de santé a été estimée par un modèle
logistique ordonné basé sur la distribution cumulative des réponses aux
catégories, permettant ainsi la transformation de réponses qualitatives en
une mesure quantitative synthétique (échelle d’intervalle). La décomposition
des inégalités de santé dans les trois régions a été effectuée pour les trois
régions (NPDC, ESBH, KM).
27 VAN DOORSLAER E, JONES AM (2003) Inequalities in self-reported health : validation of a newapproach to measurement. Journal of Health Economics ; 22 : 61-8728 VAN DOORSLAER E, KOOLMAN X (2004) Explaining the differences in income-related healthinequalities accross European countries. Health Economics ; 13 : 609-628.29 IDLER EL, BENYAMINI Y (1997) Self rated health and mortality: a review of twenty sevencommunity studies. J Health Soc Behav ; 38(1) : 21-37
36
La contribution des différentes variables aux inégalités de santé diffère dans
les trois régions. La contribution de la structure âge-sexe (contribution
biologique) est de 75% dans le NPDC, 50% dans le ESBH et 33% dans le KM.
La contribution du statut matrimonial apparaît relativement plus importante
dans le NPDC que dans les deux autres régions (9.1% pour le NPDC, 2.1%
pour le ESBH et -0.4% pour le KM). L’impact de la variable proxy du revenu
(propriétaire de son logement) est quasiment nulle dans le NPDC (-0.6%)
alors qu’elle s’élève à 5.2% dans le ESBH et à 6.0% dans le KM. La catégorie
socioprofessionnelle contribue à un niveau de 2.6% dans le NPDC, de 5.7%
dans le ESBH et de 9.4% dans le KM. Enfin, on note les contributions non
négligeables aux inégalités de santé des comportements vis-à-vis de la
santé : 14.1% dans le NPDC, 36.6% dans le ESBH et 52.2% dans le KM.
Ces résultats sont préliminaires. En effet, d’un point de vue statistique,
l’hypothèse d’égalité des pentes nécessaire dans un modèle logistique
ordonné ne peut être retenue dans le ESBH et le KM en particulier. La prise en
compte de ce biais de report observé dans les données nécessite la poursuite
de la modélisation économétrique par des procédures de type modèle
logistique généralisé.
7.1 Prochaines étapes de travail
Les travaux réalisés autour des inégalités de la santé ont beaucoup avancé
depuis 25 ans au Royaume-Uni. En France, jusque récemment, les inégalités
n’étaient abordées que sous l’angle économique, c’est-à-dire du point de
37
vue de l’accès aux soins médicaux, de leur proximité géographique et de la
possibilité de bénéficier de l’assurance maladie.
L’analyse de la littérature sociologique en France autour de la question du
capital culturel et social, mène à la conclusion que la réduction des barrières
relatives à l’utilisation de soins médicaux n’implique pas nécessairement
l’amélioration de l’état de santé de l’individu. Par ailleurs, l’impact quantitatif
d’une meilleure couverture de soins médicaux sur la consommation de soins
par les populations les plus défavorisées ne se traduit pas forcément par une
augmentation semblable dans la qualité de la consommation de soins
médicaux.
La littérature anglaise relative à la santé publique va plus loin dans cette
réflexion, soulignant l’importance du voisinage et des communautés. Le fait
de faire partie d’une association, par exemple, peut effectivement avoir une
incidence sur la santé et le bien-être de la population, notamment grâce à
des soutiens ou encore l’adoption de certains modes de vie.
7.2 Que doit-on faire ?
Le travail réalisé jusqu'ici montre que nous avons l’opportunité, à travers ce
projet, de mieux cerner les approches de la santé et des soins médicaux des
deux côtés de la Manche, par l’examen détaillé des facteurs individuels et
collectifs influençant la santé de la population. Ceci peut être mis en exergue
par l'analyse des indicateurs des inégalités et par l'examen de facteurs
individuels, grâce au travail qualitatif.
38
L’équipe en charge du volet «Utilisation de Soins Médicaux » a travaillé
principalement sur deux questions :
o Que voulons-nous savoir sur l'utilisation des soins médicaux et
sociaux ?
o A quelles données comparables avons-nous accès en France et au
Royaume Uni ?
Ces deux questions se sont révélées délicates et difficiles à concilier.
Côté français, la question clé est :
o Comment la défavorisation affecte-t-elle l'utilisation de soins
médicaux ?
Côté anglais, deux questions sont posées :
o Est-ce que la Inverse Care Law (la loi des soins inversés), qui stipule
que ceux qui vivent dans les circonstances les plus défavorisées ont les
plus mauvais services, se révèle exacte en France et en Angleterre ? et
o Si oui, comment le choix du patient affecte-t-il l'opération de la
Inverse Care Law?
La défavorisation au sein des régions, au niveau des sections électorales,
sera évaluée par l'Indice de Townsend. L’offre de soins dans ces sections
électorales peut être corrélée avec cet indice.
Ceci établira un rapport entre la densité des professionnels de la santé tels
que les médecins généralistes, les infirmières, les thérapeutes, des dentistes
etc., et les populations locales. De la même façon, le nombre de lits
d’hôpitaux et de lits médicaux disponibles peut être relevé.
39
D'autres données concernant la fourniture des ressources de soins de santé
et de soins sociaux seront disponibles dans les deux pays pour donner une
image du service disponible pour les personnes avec des incapacités et les
personnes âgées. Nous devrons être très attentif aux différentes définitions
des services dans les deux régions pour nous assurer de leur comparabilité.
Etablir une corrélation entre Townsend et les taux de mortalité, de morbidité
et d'hospitalisation dans une zone particulière devrait donner une indication
à la fois sur les liens entre défavorisation et résultats sanitaires, et si la
Inverse Care Law opère.
Il peut également être utile de considérer le rapport entre le niveau des
services disponibles et l'utilisation des urgences.
Cependant, tandis qu'il est possible au Royaume-Uni d'identifier les adresses
personnelles de ceux qui consultent un généraliste, cela s’avère difficile en
France. Il est donc délicat de mettre en corrélation cette activité avec des
régions de défavorisation.
40
On peut également utiliser un indicateur proxy. Le traitement pour le diabète
du type 2 peut convenir car cette pathologie peut mener à de sérieuses
complications (maladies circulatoires et autres), et si elle n’est pas traitée
préventivement, on est confronté à une incidence plus élevée des
hospitalisations. La France et l’Angleterre disposent toutes deux de
nombreux travaux sur le traitement du diabète.
La méthodologie décrite ci-dessus devrait fournir des réponses aux deux
questions posées précédemment. La question de savoir si le choix du patient
affecte la Inverse Care Law sera examinée dans la deuxième partie du projet,
après avoir étudié si cette loi se vérifie en réalité et les données et les
analyses pour répondre à cette question semblent très complexes.