histoire des unions monetaires

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ISBN2 13047814 xDptlgal - 1redition: 1996, octobrePresses Universitaires deFrance. 1996108, boulevardSaint-Germain. 75006ParisINTRODUCTIONAvantlafindecesicle, l'Europeauraunemon-naie unique. Elle sera forteet stable. Ainsi l'ont voulusesdirigeantset ses peuples, ensignant puisenrati-fiant le trait sur l'Union europenne. C'est par cettephrasesolennellequecommenceleLivrevert surlesmodalits depassage lamonnaie unique, adopt le31 mai 1995par laCommissioneuropenne. Letonquelque peu inhabituel de cet exorde est la mesure del'enjeuet des incertitudesdel'opration. Eneffet, lachoseparat tellement incroyablequebeaucoupdou-tent de l'application du calendrier prvu et que lamoindredifficultmontairedevient leprtextedesremises en cause des accords les plus formels.Pourtant, il s'agit l d'un vieux rve que l'on caressedepuislaRenaissanceol'onconsidraitlamonnaieunique comme une conditiondu bonheur universel.Enprcisant queL'Unionconomique et montaire(...) viseconsolider lapaixet laprosprit, objectifspremiers de la construction de l'Europe , le Livre vertseplacedansunetraditioninaugure parunpassagedurecueil de 750dictons et adages allemands com-muns publi par Johann Agricola d'Eisleben en1528:Hettenwir alle einen g/awbenGott und den gemeynen nutz vor augenGutten fridenund recht gerichtEyn elle, mass und gewichtEyne muntze und gut ge/dtSo stunde es wo/ in allerwe/tl.Ce dicton, que l'onpeut traduire librement par Sinous avionstousuneseulefoi / Dieuet lebiencom-1. Agricola, Sybenhundertundfnfzig deutsche Sprichworter, Haguenau,nouv.d., 1534, nO 272.3mun devant les yeux/ Une bonne paix et des tribunauxdroits/Uneaune, unemesureet unpoids/Uneseillemonnaieet des espces debonaloi / Alors tout iraitbien de par le monde, fut ensuite repris par le Land-grave de Hesse, Philippe1erle Magnanime, qui luidonna une dimension politique, tandis que NicolasCopernicsoutenaitgalement l'intrtde l'unificationmontaire, dumoinspour la Pologne. La multiplica-tionde ces ides unitaires au sortir duMoyenAgenous parait bien videmment nourrie par desrminis-cencescarolingiennesmaislapuissancedecetterf-rence sera insuffisante face auxexigences des tats-nations et ce n'est qu'au xoce sicle que l'on retrouverauncourant favorable auxunions montaires, animpar des perspectives essentiellement pragmatiques.1. - Lesystme montaire carolingienetsonvolutionau Moyen AgeToutcommepourlaconstructioneuropenneelle-mme la rfrence carolingienne s'impose, d'autantplusqu'il faut effectivement remonterCharlemagnepour trouver cette monnaie unique et assez d'argent ct de la paix et de la justice souhaites par Agricola.Avecles rformes engages par Ppinet poursuiviespar Charlemagne jusqu'en 801, le caractre public et lavaleur d'talondela monnaieavaient trtablis. Cesystmemontairereposait sur lemonopolergaliende la frappe et surtout sur une dfinition prcise assisesur l'argent et rattache un nouveau systme decompte similaire au systme de poids avec le denier,lesouet lalivre. Lescarolingienssesituaient ainsidansla ligne de Diocltien qui avait dj voulu, auIlle sicle, remdier de la mme faon au dsordremontaire endmique de l'Empire romain!.1. E. Fournial, Histoire montaire de l'Occident mdival, Paris,Nathan, 1970, p. 55-65.4Larorganisationmontairetait unedesbasesdela solidit de l'Empire et le denier carolingien fut mmeadopt au-del: l'Europe occidentale connaissait lammemonnaiedelaTamiseauTibre. Mais aveclafodalitiln'en restera plus quele systme de comptequi dissimulait mal la dprciation et le grand dsordrergnant dans les espces relles1Acettepoqueet jusqu'auXIX:sicle, les picesneportaient pas leur valeur nominale mais seulement dessymboles oudes effigies, qui leur donnaient parfoisleurnom(cu, louis, etc.). Lavaleur taitdfiniepardes ordonnancesmontairesqui fixaient lecoursdespices en livres, sous et deniers. Cependant, les espcesavaient aussi unevaleur intrinsqueoucommercialereprsentepar lemtal finqu'ellescontenaient. Lesmutationsmontairespouvaientdoncconcerner cettequantit de mtal en changeant la taille ou nombrede pices frappesdans une unit de poids ou bien, defaonmoinsvisible, entouchant autitreoualoi ,c'est--direlaproportiond'or oud'argent contenudans l'alliage utilis, tant entendu que les picesn'taient jamais en mtal pur pour des raisonstechni-ques. Pour accrotre les disponibilits montaires iltait courant d'abaisser ce titre, jusqu' obtenir despicesnoiresenraisondelafaiblequantitd'argentmise en uvre. C'tait l une limite assez puissante auxmanipulationspour lesouverainqui n'entendait pasperdre laface! Mais ces oprations pouvaient aussitre dictes par les variations de la valeur commerciale1. Ds l'origine, les monnaies mtalliques furentdespoids;conceptqu'elles ont inluctablement perdu pour devenir des monnaies de compteet desmonnaiesderglement enpennanentedprciation. Toutel'his-toiremontairedesvingt-einqsiclesqui nousprcdent sersumeenunedissociationpennanentedelamonnaie-poidset delamonnaiedecompte, dans des affaiblissements ininterrompus de cette dernire, appe-ls aujourd'hui des dvaluations(J.-L. Herrenschmidt, Histoiredelamonnaie, in Ph. Kahn(dir.), Droit et monnaie. tats et espace montaireinternational, Paris, Litec, 1988, p. 22).5du mtal, pour viter de voir certaines pices thsauri-ses ou fondues en cas de survaluation.Les mutations montaires n'ont cependant pas tou-jours respect toutes ces contraintes, soit par mconnais-sance des rgles conomiques, soit plus souvent en rai-son des besoins imprieuxdes trsorsseigneuriauxouroyaux. Les oprations de frappepouvaient laisser unpetit bnfice, lilaprestationdeservicedumon-nayage, mais elles pennettaient surtout les gains de ceque l'on va justement appeler le seigneuriage , c'est--dire ladiffrence entrela valeur nominale et la valeurintrinsque des pices augmente des frais de fabrication.Lesmutationspouvaient s'envisagerdanslesdeuxsens, mais sur le long tenne la tendance a toujours tvers l'augmentation de la valeur des pices exprime enmonnaie de compte, c'est--dire en fait une dvalua-tiondel'unitmontaire, lalivre. Celle-cicorrespon-dait environ490g d'argent sousCharlemagne, ellen'encontient plusque 35gauxvesicleet cepoidsbaissera encore jusqu' 4,5 g au XVIIIe! Cette volutionavantage videmment les dbiteurs qui peuvent se lib-rer en donnant moins de mtal qu'ils n'en avaient reu.Or l'histoire montaire est domine par les dbiteurs etspcialement par les plus puissants d'entre eux, lesprinces et les tats qui ont toujours t de grandsemprunteurs. Lamonnaieest ainsi condamneundclin inluctable, mais avec une ampleur et un rythmevariable selon les paysl.Les marchands, peine librs des entraves de la fo-dalit, souffrent beaucoup de ces diffrences montaires.Ils essayent de s'en prmunir lors des foires en stipulantleurstraitesdansunemonnaiedecomptespcifique.Des villesvonttreamenesreprendre l'exemple decertaines cits grecques comme la clbre Ligue1. A. Prate, LaFranceet samonnaie. EssaisurlesrelationsentrelaBanque de France et les gouvernements, Paris. Julliard, 1987, p. 17.6achenneduIlle sicle avant notre re et en1379 l'Al-liance montaire des villeswendes de la Ligue hansa-tique (Wendischer Mnzbundverein) dfinit un typecommun de thaler tandis que certaines principauts rh-nanes,situes sur les grands courants d'changes, vontfaire de mme partir de 1386. Mais ces unions restrentrelativementlimitesdansuneEuropedchirepar laguerre deCent ans, grande perturbatrice dessystmesmontaires par les besoins de financement et les troublescommerciauxqu'elleinduit, et en1469, ausortirduconflit, le roi d'Angleterre douard IVet le duc de Bour-gogne Charles le Tmraire, runis Bruges, serontimpuissantstabliruneunitdecomptecommune,bien qu'ils aient russi tarifer le cours des pices d'or etd'argent en usage dans leurs pays (Droulers, 1990, 40).Cedsordreallait encore s'amplifier avecles pro-blmes du bimtallisme car les grandes dcouvertes vontamener des modifications importantes dans les disponi-bilits d'or et d'argent et bouleverser le systme carolin-gien tabli de fait sur le mtal blanc uniquement.II. - LamonnaieauxTempsmodernesLeseffetsdesvariationsdes ressourcesmtalliquesvont s'ajouter aux nombreux troubles politiques et reli-gieux duXVIe sicle. Il n'est donc pas tonnant de voirapparatre ds la fin du XVIe sicle des projets de rorga-nisation qui s'appuient implicitement sur le modlecarolingien du denier,c'est--dire d'une unit incarnepar unepiced'unpoids dtermindemtal. Ainsi,en 1582, Reggio d'Emilia, Gasparo Scaruffi prconisa,danssonAlitinonfo, l'emploi d'une pice d'un modleprcis qui pourrait circuler ct des autres monnaies.Cependant, les tats-nations absolutistes qui se cons-tituent cette poque sont trop intresss par les facilitsbudgtaires offertes par les mutations montaires pourque ces beaux projets puissent connatre une amorce deralisation, malgr le renfort ultrieur d'autres auteurs7commelefrreJuanMarquezenEspagne, danssonGobernadorchristianopubli en1612, ou notregrandingnieur franaisVauban. En plus des soucis des tr-sors publics, il faut aussi tenir compte des thories mer-cantilistes ainsi que des aspects politiques symboliquesquitous s'opposent ce que des monnaies non natio-nales puissent circuler librement.La lutte des monarques contre la fodalit avaitnotamment consist rcuprer le droit rgaliendebattremonnaieusurppar les seigneurs. Les souve-rains absolutistes, fiers de leurs effigies reproduites surles pices, veilleront ensuite jalousement ce queriennepuisse nouveauaffaiblir cetteidentitroyaleetnationale reconquise1. Les exigences des unificationsinternes ont ainsi cart toute perspective plus vaste.Bien sr le commerce ptit fortementde cette situa-tion, mmesi lesmarchands russissent parfois seprotgerdesmutationsenreprenant latraditiondesmonnaies de foire ou bien avec de la monnaie debanque2. Ens'inspirant desmonnaiesdefoiremdi-vales certaines villes vont crer des banques qui tabli-ront leurscomptesdansuneunitproprecorrespon-dant un poids invariable de mtal. Le premierexemple est celui de la Banque d'Amsterdam cre parlamunicipalitle 31janvier 1609. Les comptessontlibellsenflorin-bancoet touteslestraitesdeplusde500 florinssur Amsterdam devaient tre obligatoi-rement payes dans cette monnaie de banque: les mar-chands taient ainsi assurs de recevoir la valeurprvue, indpendamment desmutationsdespiceset1. M.-Th. Boyer-Xambeu, G. Deleplace, L. Gillard, Monnaie prive etpouvoir des princes. L'conomie des relations montaires laRenaissance,Paris, CNRS-FNSP, 1986; Monnaie mtallique et monnaie bancaire,Cahiers d'conomie politique, nO18.2. Cf. par exemple les foires de Bisenzone, tenues d'abord Besanonpuisdansdiversesvillesd'Italiedu Nord entre1533et 1763. Les effetssont libells en une unit de compte, le mark, qui correspond une quan-tit fiXe d'or (De Cecco, in The New Palgrave, II, 221-222).8cette innovation rencontra untrs grand succs. Ham-bourgadopta unsystme analogue en 1619avec lemark-bancoet sa banque utilisera cette monnaiejusqu'aulendemaindelacrationdumarken1873!Bien d'autres villes marchandes allaient suivre cesbeaux exemples: Rotterdam, Middelbourg, Nurem-berg, Berlin et enfin Breslau, avec un thaler-banco.Mais ce qui tait possible pour les marchands de cesvilles libres nel'tait pasdansles puissantesmonar-chiesabsolueset leroi deFranceveilleratoujoursinterdire de stipuler des crances ou des dettes enquantit de mtal ou en espces relles et seule la mon-naie de compte lgale pouvait tre utilise. En France,c'est lesouverainlui-mmequi dcideraderenoncerauxmutationsetainsi lastabilisationde1726 appor-tera un calmerelatif aprs le dsastre du Systme deLaw, mais la tourmente rvolutionnaire et les guerresquiclatentdanssonsillageprovoqueront nouveaules pires dsordres montaires dans toute l'Europe.Ceux-ci sont parfois facilits par le fait que l'on avaitdsormaisrecoursde la monnaiefiduciaire, auxbil-letsdebanque quioffrent bien entendu destentationsconsidrables: on n'est plus rigoureusement limit parlesexigencestechniquesetconomiquesd'unestrictecorrespondance mtallique entre les espces et lesvaleurs!Le souverain se trouve alors proccup d'unenouvelleunificationinterne, cellequi visecontrlerl'mission de la monnaie papier grce la constitutionde banques centrales.III. - Les banques centraleset la monnaiefiduciaireSi plusieurs expriences catastrophiques commecelle des assignats montrent assez rapidement qu'il estprfrable que l'mission soit confie un organe ind-pendant de l'tat, il n'est pas tout de suite vident quecette cration de monnaie papier doive tre centralise,9ni qu'elle soit soumise des rgles trs strictes de cou-verture.L'histoire de la pense conomique connat d'ailleursceproposlesdbatsfameuxdudbutdu ~ sicleentre conomistes britanniques, entre les membres de laBanking school et les adeptes de la Currency school. Lespremiers considraient avec John Stuart Mill que le bil-let de banque tait avant tout un instrument de crdit etquelaquantitdebilletsdevait dpendreduvolumegnral des affaires, tandisqueles secondspensaientavec David Ricardo que le billet tait une monnaie dontle souverain devait strictement contrler le volume, parexemple en exigeant une couverture trs importante enmtal. Lesouvenirdesproblmesrencontrsaveclesmissionsdbridesdesannesdeguerre, olecoursforc a t trs favorable la Banque d'Angleterre et aux721 banques provinciales, et lacrainte de l'inflationvont conduireausuccs de ces thoriesrestrictives ousimplement prudentesen1844quandRobert Peel fitvoter unAct modifiant les rglesenvigueur pour laBanque d'Angleterre.Cesproccupations seront aussi, enpartie, l'ori-gined'unecentralisationde l'mission au profitd'unebanqueparticulire, maiscelle-ci neseraacquisequetrsprogressivement dans beaucoupdepays, enliai-son avec des phnomnes politiques qui peuvent laretarder oul'acclrer. Dans les tats fdraux, unemultiplicationdesmetteursseconoit plusaismentquedanslestatsunitaires. PourlesEtats-Unisparexemple, oncomptait environ 1600banquesd'mis-sion avec 7000 billets diffrents au milieu du sicle et laconstitution d'un systme de banque centrale vaprendrejusqu'1913enessayant demnager l'qui-libre dlicat entre lestats et la fdration1. L'unifica-1. R. H. Timberlake, The Originsof Central Bankingin the UnitedStates, Cambridge (Mass.), Harvard Univ. Press, 1978.10tion politique s'accompagne gnralement de cette ten-dancelacentralisation maisil yasouventundca-lagecar lachronologie conomiqueest diffrenteetilfaut parfoisunecrisemajeurepourvaincreles rsis-tances au regroupement. L'exemple de l'Italie est signi-ficatif cet gard ola cration de la Banque d'Italie,par fusionde plusieurs tablissements, a t largementprovoque par la crisefinancirede1893,soit plus devingt ans aprs l'unit politique. Les grandes diff-rences conomiques rgionales peuvent expliquer cedcalage, autant que les rsistances dues aux tradi-tions]. Danscetteperspective, l'exempledelaFranceest galement trs intressant ole monopole de laBanquedeFrancen'est tabli qu'auboutd'undemi-sicle alors mme que nous nous trouvons dans unvieil tat unitaire.En effet, si la Banque de France, cre en 1800,obtient ds 1803unmonopoled'missionpourParisellenes'intressegurelaprovinceoellen'ouvrequequelques comptoirs et parfois seulement pour unedure phmre. Ceci laisse le champ libre des ban-quesdpartementalescres, souventavecdifficult,dans quelques grandes villes par des ngociants quiavaient besoin d'untablissement financier pourleurseffets. La Banque de France se mfiait d'une dispersionde sonencaisse et ne voulait pas intervenir sur desmarchslocauxqu'elleconnaissait mal. Maisensuite,souslamonarchiedeJuillet, ellecommenapars'in-quiter de la concurrence croissante de ces banques quiprofitaient del'expansiondesaffaireset cherchalesliminerenusant del'influencequ'ellepouvait avoirsurlespouvoirspublics. Cetteinfluencefut trsforteen 1848 quand le gouvernement provisoire de la1. V. Sannuci, The establishment of a central bank:Italy inthe nine-teenth century, in M.De Cecco, A. Giovannini (d.), An European centralbank?Perspectivesonmonetary unificationafter tenyearsof the EMS.Cambrige, University Press, 1989, p. 244-289.IlIle Rpublique dut recourir une avance et imposer lecours forc. C'est cette occasion que les neuf banquesdpartementalesexistantesfurent runies laBanquedeFrance (dcrets des 27 avril et 2 mai 1848). Commele cours forcavait renforcle caractremontaire dubillet, une pluralit risquait de perturber la circulationenraisondesdiffrencesd'apprciationsurlasoliditdel'metteur qui pouvaient conduire des diffrencesde coursl.La disparition du cours forcne devait pas remettreen cause ce monopole, mme quand la Banque deSavoie essaya de promouvoir le Banking principle et defaire concurrence la Banquede Franceentre 1863et 18652. Il est vrai que l'intgration croissante desmarchs, grce au dcloisonnement apport par leschemins defer ou par le tlgraphe, poussait la vigi-lance d'autant plus qu'avec le chque, enfin rglementen 1865, commenait poindre la monnaie scripturale.Ainsi sont tablies, au XIxesicle, ces institutionsd'intgration montaires que sont les banques cen-trales. Certainesontdesoriginestrsanciennes, maiscen'est qu' cettepoquequ'ellessont placesclaire-ment au sommet des systmes montaires avec lesmoyens de contrler et de garantir les missions natio-nales (Goodhart, 1988). Cecadre national est d'ail-leursdjdpasspourcertainesdeces banques quipratiquent une coopration sur fondd'influencesrci-proques: ce sont des prts d'or de la Banque de Francequiontplusieursreprisespennisla Banque d'An-1. B. Gille, LaBanqueet lecrdit enFrancede1815 1848. Paris,pUF,1959.2. Le rattachement de laSavoie laFrance en1861avait laiss sub-sisterle privilged'missiondelaBanque deSavoie, mais sansprcisers'il tait restreint au nouveau dpartement.Les frres Preire vont essayerde se servir de cet tablissement pour dvelopper l'mission mais leur ten-tative chouera devant l'oppositIon trs vive de la Banque de France et dequelques membres influents de la Haute banque tels les Rothschild quirussiront convaincre Napolon III.12gleterred'chapperauxrglestrscontraignantesquibridaient son mission. L'Angleterre monomtallisteprofitait ainsi dubimtallismepratiqu enFrance carnotre institut d'missionpouvait secontenter de sesrservesd'argent et prtersonorLondres. Commesonsouci principal tait demaintenirletauxdel'es-compte le plus bas possible,il tait bien oblig de sou-tenir la Banque d'Angleterre qui sans cela aurait relevsestauxetprovoqudeseffetsindsirablesenFrance(DeCecco, 1992, 7 2 ~ 7 5 ) . Lesliens entremarchs et ledveloppement considrable des changes, parfoisencourags par la disparition du protectionnisme, vontrenforcer ces tendances coopratives et conduire for-maliser les intgrations sur le plan international.IV. ---Intgrationconomiqueet intgrationmontaireAprs toutes ces unifications internes aux tats,voire en mme temps, se dessine un courant favorableaux unions intertatiques,aux unions montairesvri-tablesrsultant d'unaccord international. Celles-ci nesont pas restreintes la question montaire et sesituent parfois dans l'volution d'unions douanires oud'unionsconomiques. Lalogiquedelaconstructioneuropenne repose d'ailleurs sur cette thorie destapesmaishistoriquement il n'yaaucunliennces-saire entre ces diverses formes. C'est ainsi que l'Unionlatine a ralis l'intercirculation des pices d'or oud'argent sans qu'il y ait la moindre union conomiqueni mmedouanire. Al'inverse, onvoit leZollvereindboucher en Allemagne sur une intgration montaireet mmepolitique, mais leLuxembourg, qui partici-pait l'union douanire jusqu'en 1918, n'a jamais cd l'attirancedes autres formes d'intgration. Et si laVille libre de Dantzig formait ensuite une union doua-nire avec la Pologne, elle a toujours conserv sa mon-13naie distincte,le mark, car le pragmatisme favorablelasuppressiondesbarrirescommercialesnepouvaittout de mme pas vaincre l'imprieuse exigence deconserver une identit politique travers une monnaieallemande.En dehors deces situations politiquestendues il estvrai quel'opiniontait de toutefaonassezdfavo-rable une intgration montaire trop pousse. Si dessystmes de parits fixespouvaient se concevoir, d'au-tant plusfacilement quel'onsetrouvait encoredansun rgime de monnaie mtallique, il paraissait trsdangereuxd'enveniruneintercirculationtotaledesmonnaies, voire une monnaie unique. Pour desauteurs du :xrxe comme Bamberger ou Schmoller,conclure une convention montaire avec un tatrevient lui faire prendre l'engagement de n'avoirjamais supporter ni une guerre, ni une rvolution, niune crise conomique intrieure, ce qui serait une pro-messeaussi folledelapart del'unquedel'autredescontractants, et par suite doublement folledans le casd'engagementsrciproques (Janssen, 1911, 412et s.).Et auxx.esicleonpenseraaussi quel'indpendancemontaireest indispensable, mmeet surtout danslecasd'uneunionconomique, car ellefournit unther-momtre qui dclera les fautes commises dans la ges-tion des pays membres (Baudhuin, 1954,917-919).C'est ainsi que l'intgration se ralisera surtout danscertainessituationsparticuliresqui brisent cesrsis-tances. Elle existera parfois de fait avant d'tre ventuel-lement formalise et c'est videmment le cas desenclaves. C'est trs souvent la situation de petits pays oudemicro-tatsqui suivent plusoumoinsncessaire-ment la politique conomique et montaire d'un grandvoisin, comme la rpublique de Saint-Marin ou la Citdu Vatican lies l'Italie (Conventions du 31 mars 1939et du 21 avril 1951), ou la principaut de Monaco qui esten relation troite avec la France (Convention de voisi-14nage du10 avril 1912, plusieurs fois modifie depuis etnotamment le 23dcembre1951), ou encore la princi-paut d'Andorre qui dpend de deux coprinces franaiset espagnoll. Les cas d'enclaves peuvent aussi concernermarginalement des grandes puissances ou bien des tatsde force relativement comparable comme la Suisse, l'Al-lemagne et l'Autriche o le trac des frontires est par-fois trs compliqu. On voit ainsi que le village allemandde Bsingen, sur le Rhin, se trouve enclav dans le can-ton suisse de Schaffhouse et utilise le franc suisse au lieudu mark. Al'inverse le markallemand est la monnaied'une valle alpine autrichienne, le Kleinwalsertal,accessible seulement par la Bavire.Ces exemples paraissent n'avoir qu'une valeur anec-dotique, voirefolklorique, maisilsconcernentparfoisdes fluxfinanciers trs importants. LeKleinwalsertalest bienconnupoursonintrt touristique, mais lesAllemands amateurs de sports d'hiver ou d'alpinisme ytrouvent aussiune trs forteconcentration d'tablisse-ments bancaires autrichiens. Ils peuvent ainsi placerdiscrtement leursconomiesenmarkset profiterdusecret bancaire autrichien sans frais ni risque dechange! Onrencontreainsi danscesenclaves, unechellerduitemaisnanmoinssignificative, quantitde manifestations des mcanismes montaires, des cou-rants spculatifs ou des effets pervers de certainesmesures de politique conomique.Nous devons cependant laisser de ct l'tude de cessituationsparticuliresqui n'ont gnralement qu'unetraductioninstitutionnelletrsfaible. SeulslescasduLiechtensteinet duLuxembourgretiendront quelquepeunotreattention, car ilssetrouventlis aux volu-1. La situation montaire de cet tat pyrnen est tout fait originaledanslamesureonous y trouvonstrois monnaies diffrentes. La mon-naie courante est espagnole mais le franc franais est galement reutan-dis qu'il existeuneunitandorrane, lediner. qui n'aqu'uneexistencenumismatique.15tions d'autres unions plus vastes et notamment auxdernierssoubresauts de l'Unionlatine et nous les tu-dierons ce propos. En fait notre approche de la ques-tiondesunionsmontairesseveutavanttoutinstitu-tionnelleetnousngligeronsl'analyse thoriquedelamonnaie uniqueou dela monnaie commune. Lestra-vauxdesconomistessont d'ailleursrelativement tar-difssurcesujetet remontent seulement audbut desannes 1960avecles publicationsdeR. A. Mundell,R. Mac Kinnon ou P. Kenen sur les zones montairesoptimales (Schor, 1995/1; Hamada, Porteous, 1992,77-81). La thorie est ainsi trs largement postrieure l'existence de plusieursunions qui n'avaient t cresqu'aunomdes besoins delapratiqueoubien, maisdans unemoindremesure, decertainsprojets politi-ques. Cetteprimautdel'empirismerendtoutetenta-tivedeclassificationthmatiqueassezvaineet il vautmieux s'appuyer sur l'objectivit quelque peufrustemais bien commode de la chronologie.C'est ainsi quenouspasseronsenrevuesuccessive-ment les unions constitues au :x:or sicle dans lemonde germanique (chap. 1), puis l'Union latine(chap. II) et l'Union scandinave ou nordique(chap. III). Aprs ces grands monuments classiques,lepaysage du xxe sicle est davantage encombr, en pro-portion des grandes difficults apportes par lesguerresetlescrises. De nombreuxprojets et quelquesralisations essayeront destabiliser leschangeset defaciliter les payements internationaux (chap. IV).Maisil n'yaurapasdans cecadredemonnaieunique, nimmecommune, dumoins l'chelondesoprationscourantes, en dehors des rglements entre banquescentrales. Laseuleralisationtangibled'unevritableintgration se situe dans le cadre de la zone franc o lapratique hritede l'poquecolonialevasedoter trslentement d'institutions idoines (chap. V). Toutefoiscette russitese trouveplusou moins menace par un16autreprojet, trsavanc: celui del'Unionmontaireeuropenne. Car ladisparition programme dufranc,au profit d',un cu ou d'un euro, n'est pas qu'une ques-tion de terminologie pour les pays concerns. La cons-truction europenne est la plus exigeante des tentativesd'intgrationetl'Unionmontairey apparatcommelecouronnementdetouteslesautresralisesprala-blement, l'exception de l'Union politique, mais celle-cin'est pastrslointainedans lesproccupations desprotagonistes de cette dernire histoire que nous avons analyser (chap.VI).Nous nous approchonsainsi del'actualitaveclaprsentation de diffrentes institutions qui existentencoreet sedveloppent constamment. Mais il vadesoi que l'objet de cette tude estuneprsentation desorigineshistoriquesdeces tablissementsetsystmes,telsqueleFMI, laBR! ouleSME. Pourl'analysedespratiqueset desperspectivesdecesinstitutions, il nemanque pas de bons ouvrages et tout spcialementdans cette collection!17Chapitre 1LESUNIONSDANSLEMONDEGERMANIQUEL'histoiredel'Allemagne du:xvce sicle est richeenexpriencesmontaires, en proportion dugrand mor-cellement tatique initial. Mais ce n'estpas seulementunerichesse quantitative:l'intrtse situe aussi sur lefond car l'on a abord des questions comme celle de lamonnaiecommuneoubiencelle d'une banquecen-trale, toutestrs actuellespourlaconstructioneuro-penne(Schor, 1995/1, 17-36). Etla concidencetem-porelle entre cette unification conomique et laralisationde l'unit politiqueest galement unl-ment qui doit susciter l'attention1.Le lien avec l'actualit ne concerne pas seulement laquestion europenne mais aussi,de faonplus drama-tique, la question allemande elle-mme. Eneffet, sil'Allemagnejouit de l'antriorit dans l'histoire desunions montaires, elle a galement vcu la dernire endate des intgrations avec le trait d'Union montaire,conomiqueet socialesignle 18mai 1990entrelaRFAet la RDAet dont levolet financier est entrenvigueur ds le 2juillet 1990. Cejour-llemarkde1. C. L. Holtfrerich, TheMonetaryunificationprocessin nineteenthcenturyGennany: relevanceandlessons for Europetoday, inM. DeCecco, A. Giovannini (d.), AnEuropeancentral bank. Perspectivesonmonetary unification after ten years of theEMS, Cambridge, Univ. Press.,1989, p. 216-289; Didmonetaryunificationprecedeor followpolitica1unification of Gennany in the19th century?, European Economie Review,nO 37, 1993, p.518-524.19l'Ouest est devenu monnaie unique de la nouvelleunion et les anciens marks de l'Est sont convertis untaux extrmement favorable qui, dans certains cas cor-respond l'ancien taux officiel de un pour un alors quesurlemarchnoirleMarkOst s'changeait parfoisdix pour unDeutsche Mark.Cette parit a t choisie par le gouvernement contrel'avis desautorits montaires pour desraisons essen-tiellement psychologiques et politiques. Elle a paru fortcritiquableparsesconsquencesinflationnistesetparlapertedecomptitivitqu'elleentranait pour l'in-dustrie est-allemande frappe par cette rvaluation.Cependant elleagalementtprise pour desraisonsconomiques car il s'agissait d'enrayer la fuite despopulationsdel'Est et elleaeudeseffetsbnfiquestant sur les plans conomiques que politiquesl.Certes,on n'a pas retrouv le miracle provoqu par la restau-rationmontairede1948qui astimull'conomiedefaon trs importante, mais ce chocde l't 1990aacclr les restructurations ncessaires et il a incontes-tablementpoussraliser l'unit politique beaucoupplus rapidement queprvu car elle va tre dcide dsle 31 aot et achevele 3octobre 1990. Cetteunionmontairede1990 estainsi plutt uneabsorption, demme que l'unionpolitique correspond en ralit seu-lement unlargissement duterritoiredelaRFA, cequi larendtrs intressante tudier du point de vuedes mcanismes conomiques (Hamada, Porteous,1992, 83-84). Mais du point de vue institutionnell'exempleest assezfruste, djparcequecetteunionn'aaucunedure: c'est uneunioninstantanequi sedissout dans la nouvelle entit. Les tapes ont tbeaucoup plus distinctes et progressives au ~ sicle.1. Ceci permet au chancelier Helmut Kohl de penser qu'aprs avoir suimposer ses compatriotes l'Unionmontaire puis politique avec l'Alle-magne de l'Est. riennel'empchera de fairede mme avec l'Europe (LeMonde. 19 octobre1995).20L'Union montaire a d'abordt conue dans lecadrede laconstructiond'unmarchunifi, commecomplment de cette union douanire conclue en 1834,le Zollverein. qui permit l'Allemagne de rattraper sonretard conomique et d'accder au rang de trs grandepuissance1. Mais la place primordiale de la Prussedanscemouvement apportaunedimensionpolitiquequi suscital'intrt del'autregrandtat dumondegermanique, l'Autriche. Pour participer ces volu-tions, et ventuellement lescontrler, celle-ci conclutuneconventionmontaireen1857aveclestatsduZollverein, mais cetteextensionde l'Unionne fonc-tionna gure avant d'tre abandonne en 1867. Ladfaitedel'Autrichedanslaguerrede1866 contrelaPrusse a laiss le champ libre runification allemande.La cration du Reich en1871s'accompagna trs rapi-dement del'unificationmontaireavecl'adoptiondumark, la mme anne, puis avecla fondationde laReichsbanken1875, cesralisationstant lesconclu-sions logiques desaccordspasss et des pratiquessui-vies depuis les annes1830 voirebeaucoup plus tt.1. ~ Divisions et regroupements1. Une tradition ancienne. ~ C'est en Allemagne queladisparitiondel'Empirecarolingienavaitconduit l'miettement le plus considrable. A la fin duXVIIIe sicle on y trouvait environ 350 tats: un chiffrequi recouvrait des ralits trs diffrentes avec quel-quesgrandsroyaumes, des villeslibres et desseigneu-riesparfoisminuscules. Lemouvement europenvers1. Voir le manuel de Michel Hau. Histoireconomique de ['Allemagne,Paris. Economica, 1994. Nous remercionsnotrecollgue. professeurl'Universit desscienceshumaines de Strasbourg et l'Institutuniversi-taire de France, de son intrt pour le prsent ouvrage.Le projet de celui-ci est naucoursdusminaired.histoiremontaire quenousassuronsensemble l'lEPde Strasbourg. pourle D E ~ Institutions politiques etmontaires et intgration conomique en Europe)), et sa ralisationdoitbeaucoup aux diSCUSSIons que nous avons eues cette occasion.21unregroupement entats-nationsavait djfavorisla constitution de puissances comme la Prusse et l'Au-triche, maisleurs monarquesabsolus contrlaientdesterritoires parfois discontinus et devaienttenir comptede nombreux voisins jaloux de leur souverainet.Celle-ci s'exprimait videmmentsur leplan montairepour des questions deprestigemais aussi et surtoutpour rpondre aux besoins financiers des princes etautres seigneurs dont les domaines taient souventbien insuffisants pour soutenir des dpenses excessives.Les accords passs la fin du Moyen Age entre quel-ques villesdelaHanseou principautsrhnanessontdestentatives remarquablesmais limites et isoles deremdier ces divisions. A partir du XVIe sicle l'Empireessayad'unifierlepieddemonnaie , c'est--direlataille ou quantit d'units frappes dans le poids de rf-rence. Toutefois les rsistances taient vives, notammentdelapart des tats producteurs d'argent qui dfen-daient leurpositionauseind'uneconfdration. Onparvint tout de mme dfinir deux units de rfrenceadoptes respectivement par un certain nombre d'tats:le thaler et le gulden ou guldiner (le florin). Les relationsconomiques et politiques aboutissent ainsi la consti-tutionde zones montaires. Toutefois uneconventionde1753 entre l'Autriche et la Bavire tablit formelle-ment unenouvelleunitcommune galementappelethaler qui correspond prcisment deux florins ou, enpoids, un dixime du marc de Cologne. Ces correspon-dances donnrent un certain succs la nouvelle mon-naie, au-del des tats signataires et nous avons l, pourla fin de l'AncienRgime, unmodlede ralisationd'une monnaie commune qui servira beaucoup auXIX: sicle (Droulers, 1990,40-41).2. Persistance des divisions aUXIXesicle." - Les boule-versements apports par les guerres rvolutionnaires etnapoloniennes ont modifi assez profondment la carte22politique de l'Allemagne et le Congrs de Vienneconsacredenombreuxregroupementsqui avaient toprs jusqu'en1815. Cependant la souverainet restemiette entre 35 principauts et quatre villes libres, mal-gr leur appartenance une confdration germaniqueo l'Autriche exerce une autorit davantage morale querelle, et ceci se traduit bien videmment par le maintiende grandes diffrences entre les poids, mesures et mon-naies des tats, ainsi qu'entre leurs tarifs douaniers. Par-fois cesdiffrencesexistaient l'intrieurd'unmmetat, selon d'anciennes traditions mdivales1.A ces nombreuses units correspondait une quantitconsidrable de pices diffrentes car des monnaiesanciennescontinuaientcirculer, ainsi quebeaucoupde pices trangres, franaises, anglaises, russes,danoises, voire espagnoles. On trouvera mme pen-danttrslongtemps despices polonaises alorsque laPologne avait disparu en tant qu'tat. Certes, lergimede lamonnaiemtalliquefacilitait les chosescarlespicesavaient unevaleurintrinsquequi per-mettait les comparaisons. Mais dans certains cas cettevaleur tait assez loigne du cours officiel car lesprinces prlevaient un seigneuriage important, parexemple en fixant des droits de frappetrs levs.Pourlesmonnaiesdivisionnairesonapprochait duchaos car les systmes de compte taient trs diffrents.Par exemple dans le Mecklenbourg le thaler taitdivis en 40Schillinge tandis que la Prusse connaissaitune division en30 Groschen tout comme la Saxe, maisces Groschen taient eux-mmes diviss en12 Pfennigedanslepremierroyaumeet en10 dansle second!Deplus les pices en circulation avaient souvent un degrd'usure qui les rendait mconnaissables. Quant lamonnaie papier, qui avait t parfois mise en quantit1. B. Schultz. Kleine deutscheGeldgeschichte des19. und 20. Jahrhun-derts, Berlin,Duncker &Humblot, 1976.23pendant lesannes deguerre,elle ne circulait que fortpeu en dehors des tats d'mission.Cettesituation tait videmmenttrsdommageablepourleschangesintrieurs, maisaussi pourlecom-merce international, gn par l'absence d'une unitcommune, et seuls les banquiersparaissaient trouverquelque intrtauxnombreusesoprations dechangencessaires. La pense unitaire allemande, trs puis-sante depuis le dbut du sicle, devait galement s'atta-quercedsordre. Ondiscuteainsids 1820 depro-jets d'unification des poids, mesures et monnaies dansle cadre de la Confdration, mais la faiblesse politiqueduBundgnerales ralisations. Celles-ci seront op-res de faonpragmatique sur le terrain conomique.3. Vers l'Union douanire. - Le mouvement d'unifica-tion doit beaucoup la Prusse, car celle-ci avait d'abordbesoin de raliser une vritable intgration de ses terri-toires. Le royaume de Prusse tait trs morcel, avec desenclaves, et de plus il comprenait une partie importanteen Rhnanie spare du centre par des principauts. LaPrusse rhnane acquise au Congrs de Vienne tait, avecses traditions commerciales et dj industrielles, trs dif-frente del'anciennePrussedes grands propritairesfonciers. Lenouveaurattachement deces territoires,entours de barrires douanires, ne convenait gure auxintrts de la bourgeoisie locale qui tait par ailleurs hos-tile aux conceptions politiques prussiennes. Il convenaitdonc de redonner un dbouch aux~ r o d u i t s rhnans sil'on voulait garantir la cohsion de l'tat.Cette intgration fut ralise en deux temps. De 1816 1823laPrussesupprimasesdouanesintrieuresetincorpora dans son espace conomique les petites prin-cipautsenclaves, tout enfIXant en 1821 des rglesuniformespourlethaler, dfini lataillede 14 dansunmarc deCologne (233,855g d'argent fin). Ensuite,de 1828 1833, lemouvement sepoursuivit pardes24traitsd'associationavec desprincipauts voisines, encommenant par un Zollverbund conclu avec la Hesse-Darmstadt et tendula Hesse-Casselen1831. Ainsilacontinuitentrelesparties orientaleet occidentalede la Prusse tait assure.Ce renforcement de l'tat le plus puissant de laConfdrationinquita d'autres membres et l'onvitapparatre des tentatives d'unions rgionales, principa-lement dansleSud. En1826, le grand-duchde Badeprit l'initiatived'uneconventionmontairedes tatsdu Sud, mais les pourparlers chourent car la Baviresouhaitait y associer certains tats importants ducentre. LaBaviretait enfait trs attache l'ided'une unification montaire et elle souscrivit ainsids 1829 untraitdecommerceaveclaPrusseetd'autres tats qui prvoyait l'ouverture rapide dengociations en vue d'une unification des poids,mesures et monnaies.Celle-ci sera obtenue un peu plust a r d ~ aprs achvement de l'Union douanire.4. LeZollverein. - ~ LaPrusserussit vaincreassez facilementles rsistances des autres tats en rai-son de sa position gographique importante et ducontrledesgrandsfleuvesqui lui offrait desmoyensdepressionsuffisantssurlesconomiestributairesdeces voies de transport. En mars1833 est sign un traitd'UniondouanireentrelaPrusseet 25autrestatsqui forment, partir du 1er janvier 1834, unmarchcommun avec un tarif extrieur unique. Quelquestatsrestent endehors, dontl'Autriche, maisdesral-liementssuccessifs jusqu'en1851feront quelaquasi-totalit de l'Allemagne y participera, l'exception desvilles hansatiques de Hambourg et de Brme.L'article 14 de la Convention reprenait le vieuxthme del'unitde poids, mesures et monnaies: lestats contractants s'obligeaient mettre immdiate-ment cette question en discussion. Mais en sep-25tembre1836 une runion des tats membres montreradesdivergences sur ce point car les tats du Sud crai-gnaient de voir le thaler prussien s'imposer commemonnaie commune. Cette inquitude provoqua dsl'annesuivante, l'initiative dela Bavire, dans latradition des accords rgionaux, la signature de laConvention deMunichdu25aot 1837 ocestatsdfinissaient un florin commun et fixaient les basestechniquesd'unemonnaiecommune, aveclapossibi-lit de contrles rciproques, ce qui tait une limitationremarquable de la souverainet montaire1Les signataires delaConventiondeMunichaffir-maient d'embleleur intentionden'apporter aucuneentrave une unificationgnraleet que leur soucitait,au contraire, de rapprocher leur systme de celuides tats duNord. Ce qui fut effectivement ralisl'anne suivante.II. - LaConventionde Dresde(30juillet 1838)La Prusseavait suividetrsprs lesdiscussionsdeMunich, mais souhaitait maintenir le thaler tout enmettant une nouvelle pice commune tous les tats.Cetteidefut d'abordrejetecommetropdiffrentedeshabitudes, mais on la retrouvera assez rapidementdans les dbats delaconfrencemontaire runie Dresde pour satisfaire aux exigences de l'article14 dutraitduZollverein. Cetteconfrenceaboutit deuxconventions: la premire fIXait les rgles communesauxtatsutilisant lethaleret correspondait ainsi autraitdeMunich, lasecondetait gnraleet tablis-sait l'uniformit du systme montaire.Enralit, laConventiondeDresdereconnaissaitsurtout une dualit persistante entre les zones du thaler1. Pour les textes des conventions, cf. Janssen, 1911.26et duflorin. Sur unebase unique, le marc deColognede 233,855 gd'argent, ondfinit deux tailles diff-rentes: 14 thalers ou 24 florins et demi. Ainsi un thalervalait unflorinet troisquartstandis qu'unflorincor-respondait aux quatre septimes d'un thaler. Cechange fixe tait complt par des rgles prcises sur letitredes mtaux, sur les tolrances, ainsi quesur lesmonnaies divisionnaires de billon, qui devaient trelimites. Uneunionmontairetait ralise, mais cen'tait pas encore l'unit.La Saxe avait suggr le passage un systme dci-malunique, maiscelaparaissait unchangement tropradical des habitudes de calcul. Ondcida tout demmedefavoriser les rapprochementsendfinissantune pice d'un type commun, la monnaie d'association(Vereinsmnze) , valant deux thalers ou 3,5 florins.Cette pice, mise par les tats membres au prorata deleur population, auracourslgalsur toutleterritoirede l'Union. Mais cette nouvelle pice ne sera gure uti-lisecar elle tait bientropgrosse, avecses41mm etenviron37 gl. En revanche,le thaler prussien va circu-ler trs facilement, d'autant plus queplusieurs tatsrejoindront cette zone montaire du Nord. On le verrammelargement utilisdanslestatsduSud, tandisque le florinn'migrera gure,sans doute parce que laconversiondes valeurs selonlargledesquatresep-times n'aboutissait qu' des rsultats malcommodes.Lesystmetait trsinsuffisant, maisil nesera pascompltavant prsdevingt ansendehorsdedeuxaccordsde1845 surlarpressiondu faux-monnayageetsur leretraitdespicesanciennes. La pressionuni-1. On la surnommait Champagnerta/er. parce que sa valeur correspon-dait celle, trs leve, d'une bouteille de Champagne ou bien, selon uneautre version, parce qu'elle tait aussi rare voir dans les campagnes alle-mandes qu'une bouteiIJe de ce vin de luxe. En tout cas l'expressiontmoigne d'une mauvaise rception de la pice dans les milieuxpopulaires.27taire tait pourtant forte, cependant l'chec des rvolu-tions de1848 freina la construction d'une grande Alle-magneoudumoinsdonnaunrleprdominant auxprincipaux tats qu'taient la Prusse et dsormaisl'Autriche. L'intrt nouveauportparcettedernireau Zollverein allait conduire une nouvelle conventionqui remplacera celle de Dresde.III. - Letraitmontaire deVienne(24 janvier1857)Dans les dbats sur l'unit politique, l'Autriche pr-conisait lasolutiond'unegrandeAllemagnesous sadirection tandis que la Prusse prfrait celle d'unepetiteAllemagnedont ellepouvait conserverlatte.En consquence, il convenait dsormais pour l'Au-triched'entrer galement danslesystme conomiqueallemandenadhrant auZollverein, cequelaPrusserussit viter. Cependant untraitdecommercefuttout demmesignen 1853entrelaPrusseet l'Au-tricheet il comprenait uneclausede rapprochementmontaire. L'Autrichesouhaitait l'oprer surlabasede l'talon-or, sans doutepour pouvoir revenir plusfacilement une convertibilit des billets:elle en avaitbeaucoup misetl'or, dontla productionavaitforte-ment augment depuis 1848, paraissait avantageux.Mais laPrussebloquales discussionsjusqu'en1856quand une confrence montaire futrunie Vienne.Il en sortit une nouvelle union en apparence fort peuunificatrice!En effet, authaler de l'Allemagne septen-trionaleet auflorindecelledusuds'ajoutaleflorinautrichien dont la taille tait encore diffrente. Cepen-dant, en dehors de nouvelles rgles restrictives pour lesmonnaies d'appoint, un progrs fut tout de mmeamenparl'introductiond'unerfrencedcimale: lepoids montaire tait dsonnais fix 500 g d'argent fin,dans lequel on taillait 30 thalers, 45 florins autrichiens et2852,5 florins de l'Allemagne mridionale. Deux nouvellespices devaient tre frappes pour faciliter les changesentre ces zones, le simple thaler d'Association (Vereins-taler) et le double thaler selon un type commun o sewel'effigie du souverain variait. Le premier valait 1,5 florinautrichien et1,75 florin des tats du Sud. Ces appella-tions et ces correspondances montrent clairement la pri-maut du thaler dans le nouveau systme, renforce parle faitqu'iln'yaaucunrapportsimple entre les deuxtypes de florins.D'ailleurs, pour assurer une circulationsuffisante, l'article 9 avait donn cours lgal dans l'en-semble del'union touslesanciensthalers la taillede 14 au marc. Et par la suite les tats membres, y com-pris l'Autriche, frapprent essentiellement des thalers enabandonnant de fait le Gulden. Il est vrai que les thalersd'Association avaient un statut privilgi car toutes lesdettesstipules enmonnaiesdestatspouvaient trergles avec cette monnaie commune, mais pas l'inverse.Il est assez surprenant, du point de vue politique, devoir l'Autriche accepter de telles clauses, si loignes desesobjectifsdiplomatiques. Ellepensait pouvoirfairetriompher son florin en ignorant apparemment lepoids conomique atteint par le Nord, sans douteparce qu'elle avait obtenu l'introduction de picesd'or. Pourtant il nes'agissait qued'unemonnaiedecommerce (Vereinshandelsgoldmnzen) sous laformede pices d'une couronne et d'une demi-couronne, sanscours lgal et sans rapport fIXe aux monnaies del'Union. Elles devaient servir au commerce internatio-nal mais ne circulrent que trs peu et en fin de comptel'Autriche ne profita gure de ce trait, qui sera surtoutle miroir de sa dfaite-politique (Theurl, 1992, 161). Enfait, ellen'aeuqu'uneparticipation limitelanou-velle union en raison d'un article fortgnant du traitde Vienne. L'article 22 exigeait que la convertibilit dupapier monnaie soit garantie et que les exceptions ceprincipe disparaissent avant le 1er janvier 1859. Or29l'Autrichepratiquait le coursforcetsesdficitsbud-gtaires, renforcspar lesguerresqu'elle eutmener,rendaient illusoire la ralisation de cette clause.C'est d'ailleurs la dfaite de l'Autriche dans la guerrede 1866, provoque par la Prusse pour exclure son rivalde l'espace politique allemand, qui mit fin cette asso-ciation plutt boiteuse. Par le trait de Berlin du 13 juil-let 1867 l'Autriche quitta cette Union, mais celle-cicontinuafonctionner et passerammeunephasedcisive de l'intgration montaire allemandel. La limi-tation des souverainets montaires des tats et le ren-forcement considrable du poids gographique et poli-tique dela Prusse ont tablilesbases qui permettrontd'arriver l'unit autour d'une nouvelle monnaie.IV. - L'Empire etlemarkLa guerre de1866 eut comme rsultat, sous l'impul-siondeBismarck, ladisparitiondelaConfdrationgermanique de 1815 et son remplacement, pour les tatsaunordduMain, par unenouvelle confdrationquitait dote de pouvoirs trs importants. Les tats mem-bres restaient souverains pour les finances, la justice etl'enseignement, mais tout le reste, dont la monnaie, pas-saitauBund. Celui-civaseproccupertrsvitedelamonnaie papier, fort nglige par les unions prc-dentes. Ce ne sera en fait qu'une tape intermdiaire versl'unit complte, politique et montaire. La victoire dela Prusse dans une nouvelle guerre, celle de 1870 contrela France, va permettre de raliser celle-ci.1. Le contrle de la monnaie fiduciaire. - Les conven-tionsprcdentesn'avaient fixaucunerglepourlesbillets, en dehors du principe de la convertibilit arrt1. Paradoxalement, lesVereinstaler autrichiens vont continuer circu-ler enAllemagnependant fort longtemps: ilsconserveront unpouvoirlibratoire, commetouslesthalers, jusqu'en1907, alorsqu'ilsl'avaientperdu en1893 dans le pays d'mission!30en 1857. Pourtant l'conomiste Friedrich List avait lar-gement soulign l'intrt d'une banque centrale pour leZollverein, mais les intrts fortement divergents destats avaient empch toute ralisation. Dj la Prusseelle-mme avait une attitude assez rserve l'gard desbanques d'mission, non pas par hostilit envers lamonnaie papier mais par crainte d'une concurrencepour sespropres billetsduTrsoroubonsdecaisse,mis notamment l'occasion des guerres. Cette restric-tion apparaissait comme une opportunit favorablepour les tats voisins qui espraient pouvoir faire circu-ler leurs billets sur ce march. La planche billets leurpermettrait alors de retrouver les gains de seigneuriagemis mal par les rgles de la Convention de Dresde: enmettant de petites coupures qui restaient dans la circu-lationcourante, onavait trs peude risquede voirdemander la conversion en mtal prcieux.Dans ces conditions la Prusse dut se rsoudre fon-der sa banque d'mission en 1846. La Banque de Prusseavait un capital priv, mais sa direction tait contrlepar l'tat et sa gestion se trouvait soumise des rglesstrictes de couverture. Ces contraintes lui donnrent ungrand avantage dans la crise de1857 quand beaucoupde petites banques des tats voisins connurent des diffi-cults. Pourtantdanslesannes 1860 lesconomisteslibraux demeurrent largement favorables au Bankingprinciple et la libert d'mission pour les banques pri-ves. MaislesChambresdecommercevont rclamerune centralisation plus nette de l'mission pour mettredel'ordredansunesituation unpeu confuse avec desdizainesdetypesdebilletsdiffrents. On encomptaitenviron140 vers1870, provenant de33banques et denombreux trsors publics.C'est en1870 que la Confdration d'Allemagne duNord intervint sur ce point, en vertu de l'article 4 de saConstitution qui lui donnait comptence pour fIXer lesprincipes de l'mission de papier monnaie et lesrgles31bancaires. Uneloi du27mars 1870rservaauBundl'autorisationdenouvellesbanquesd'missionetuneautre loi du 16juin interdit l'mission de monnaie papierpar les tats. Ces rgles seront ensuite tendues toutel'Allemagne par des lois d'Empire, tandis que les billetsdes trsors publics devaient tre retirs ou convertis enbons de caisse fdraux (Reichskassenscheine). Ces nou-vellesrglesdonnrent unavantageconsidrableauxbanquesenplaceet naturellementlapluspuissanted'entreelles, la Banque de Prusse. Les partisans de lalibert bancaire avaient d s'incliner devant la force del'ide unitaire qui venait paralllement de triompher dela diversit des systmes montaires allemands.2. La cration du mark. - Les annes1860 virent denombreuses discussions sur les questions montairesparmi lesconomistesoulesentrepreneurs. Lesidesde monnaie universelle, largement envogue unpeupartout dans cette dcennie, furent dbattues dans plu-sieurs congrs. Elles postulaient un changementd'unit dans le sensd'unerationalisation etbeaucoupd'auteurspartageaientl'opiniond'Adolf Soetbeerquiavaitproposds 1861dereprendrel'idedelaSaxequi dfendait un systme dcimal dans les annes 1830.Il prconisait d'adopter le mark, valant un tiers de tha-ler et divisen100 Pfennige. Cependant, d'autresopi-nions songeaient plutt se rapprocher du franc, sur-tout aprs1865 et la conclusion de l'Union latine.Mais laguerre de1870 orienta ces discussions dansun sens plus national et le nouvel Empire cr en1871se trouva immdiatement confront l'exigence defaire disparatre une situation complexe provoque parla coexistence de six systmes montaires diffrents sursonterritoire. Deplus il convenait de savoir si l'onallait serattacher l'talon-or, carl'industrialisationdupayset ledveloppement ducommerce internatio-nal avaient favoris le mtal jaune, l'exemple de l'An-32gleterre, tandis que l'norme indemnit de guerreimposelaFrancepouvait fournir laquantitd'orncessaire au changement.L'Empire avait hrit des comptences lgislativesmontaires et bancaires de l'ancienne Confdration duNord et va s'en servir trs rapidement pour tablir unenouvelle monnaie. Laloi du4dcembre 1871 com-menapar prvoir lafrappe demonnaies imprialesd'or, avec pouvoir libratoireconcurremment l'ar-gent. Puis le 9juillet 1873 une autre loi dfinit complte-ment les principes et les rgles du nouveau systme quidevait entrer en vigueur le 1eT janvier 1876. On se proc-cupa en mme temps de la monnaie papier et la loi du14 mars1875 cra une banque centrale, la Reichsbank,par transformation de la Banque de Prusse.Cettetapedcisivedel'unificationsefit sanstropde difficults, car les tats n'taient pas entirementdpossds deleur pouvoir montaire. Ils pouvaientnonseulement continuer apposerleurssymboleseteffigiesdynastiquessurunedesfacesdespices, maisdeplusleursateliersmontairescontinuaient fonc-tionner tout en tant soumis des contraintes trsfortes, notamment quant auxfraisdefrappe. Parail-leurscertainesbanqueslocalespouvaientcontinuermettre des billets bien que de manire restreinte.Enfin,lesanciens thalers d'argent n'taient pas dmo-ntiss et vont servir jusqu'en 1907. On reste ainsidans une dmarche pragmatique qui contraste avecl'approche plus systmatique que l'on connaissait lamme poque dans le cadre latin.33N.OLSZAK - 2Chapitre IIL'UNIONMONTAIRELATINE(1865-1925)CetteUnion aconnuunelongvitremarquableetune influenceconsidrable dans lemondeentier quicontrastent avecles objectifs relativement limits quiont prsid sa fondation. En effet, il ne s'agissait l'ori-ginequededfinir quelquesrglestechniquesd'mis-sion des monnaies mtalliques pour conforter une unionde fait existant en Europe occidentale et pour rsoudrequelquesproblmes entransparla crisedubimtal-lisme. Cesproblmestaientconsidrscommepure-ment conjoncturels, mais ils vont perdurer et s'aggraver,cequi provoquerauneprolongationdes accords ini-tiaux mais aussi des rvisions importantes sur plusieurspoints jusqu' ce que la Premire guerre mondiale metteen vidence desdivergences majeures qui entranerontensuite la rupture formelle de cette Union aprs en avoirparalys le fonctionnement.Elle consiste essentiellement un ensemble de conven-tions destines garantirl'intercirculationdes picesde monnaie entre les pays signataires (Belgique,France, Grce, Italie, Suisse). En soi ce n'est gurervolutionnaire puisqu'il s'agissait d'espces mtalli-ques de mme type,donc de mme valeur intrinsque!Mais le fait qu'untat acceptedans ses caisses despices misespar unautretat, endehors de toutefdration comme en Allemagne, est dj extra-ordinaire parrapport auxaspectspolitiquessymboli-34quesdelamonnaieet ilfaut aussi tenir comptedelapertedes bnficesventuelsduseigneuriagesur unepartiedelacirculation. Lesfreins l'unionn'ont putre levs que parce qu'une communaut montaire defait, fonde sur le franc germinal , existait depuislongtemps entre les pays signataires.1. - Le francgerminalmenacparlebimtallisme1.Une nouvelle unit. - L'Union latine va entrinerl'influenceacquise par lefrancgerminal, ainsi nommparcequesadfinitionrsultedelaloidu7 germinalanXI (28mars 1803). Enfait, cettedfinitionavaitdj t tablie par la loi du 28 thermidor an III(15aot 1795), avecunecontinuitremarquable avecla livre d'AncienRgime,mais le mrite de la rformeest attribu aupremier consul NapolonBonaparte,sans doute parce qu'il russit faire fonctionner ce sys-tme en faisant largement circuler de nouvelles pices son effigie.La loi de germinal commenait par une dispositiongnrale prliminaire qui tablissait clairement unnouvel talon: Cinqgrammes d'argent, autitredeneuf diximesde fin, constituent l'unit montairequiconserve le nom de franc. Or depuis1726, le cours del'cu d'argent, pesant l'quivalent de 29,48 g d'argent 917 millimes, avait t fix irrvocablement six livres,ce qui faisait que la livre correspondait 4,5067 g d'ar-gent fin. Endfinissantle francpar unpoidsde 4,5gd'argent finles rvolutionnaires de la Convention puisNapolon Bonaparte se situaient tout faitdans cettestabilit, car il tait difficile de faire mieux en passant despoids et mesures d'Ancien Rgime au systme dcimal.Comme bien d'autres ralisations consulaires, cefranc germinal fut ensuite export en Europe, au fur et mesure des conqutes: il est bien entendu utilis dans35les dpartements de l'Empire, mais des systmes analo-gues sont galement adopts par les tats vassaux, lagrande satisfaction de Napolon. Avec la chute del'Empirecetteunificationmontaireest compromise,mais enpartieseulement car lefrancvacontinuer treutilisdansbiendesrgions et ensuiteon retrou-veraformellement lesprincipesdegerminaldansplu-sieurs pays qui adoptent de nouvelles rgles mon-tairespeuaprsleur indpendanceou leur unificationpolitique: la Belgique en 1832, la Suisseen 1850etl'Italie en1862.Cependant cespaysimportent aussiundesdfautsdecesystme: lebimtallisme. Mmesi sadfinitionn'esttabliequesur le mtal blanc, le francestrepr-sent en fait aussi bien par des espces d'argent que pardesespcesd'or. Eneffet, aprssadispositiongn-rale , la loi de genninal dfinit les rgles de fabricationdespicesentablissant notammentquelespicesde20Fsontlataille de155 aukilogramme d'or. Maisil est clair quel'orn'est pasuntalon, carlefrancorquel'onpourraitdduirede cette rgle ne corres-pond aucune quantit simple de mtal et ne peutdonc nullement s'insrer dans le systme dcimal: avec3100Fpour1 kg d'or 900 millimes,on apour1 Funpoids de 0,2903225806452 g d'or fin! Cette prsen-tationdelaloi degerminalpermetventuellementdemodifier la taille des pices d'or sans toucher la dfi-nition du franc. Mais ensuite, des dcennies de stabilitvont fairecroireque les modifications taient exclues!Pendant longtemps, tant que le rapport entre les deuxmtauxrestait stableetquel'or circulaitrelativementpeu, ce double rattachement n'apas t gnant. Lebimtallisme tait mmetrsintressant car il permet-tait defournir l'conomiesuffisamment de monnaie.Mais quand le rapport traditionnel est modifi deseffetsperversapparaissent et peuvent conduireunenouvelle famine montaire.362. Lacrisedubimtallisme. - Lesperturbationsseproduisent aprs la dcouverte des mines de Californieen1847 et d'Australie en1851. La production d'or estquadruple, ce quientrane une baisse de la valeur dumtal jaune: lerapport commercials'tablit parfois1 pour 15tandisquelerapport lgal estde1 kgd'orpour 15,5 kg d'argent1.Cette lgre diminution va toutde mme provoquer unespculation intense et un fortdrainagedes picesd'argent. Onverranouveau la vieille loi de Gresham:les bonnes picesd'argent sont exportes pour tre changes un courscommercial plus intressant que le cours lgal, d'autantplus que les banquiers anglais, qui ont besoin de picesd'argent pour leurs affaires en Orient o le mtal blancest trs apprci, viennent se les procurer Paris.Pour la France ce sont 3500 t de pices d'argent quidisparaissent de 1855 1860soit prsde 10% de lamasse montaire2. Bien sr les pices de5 Fsont rem-places par des pices d'or de mme nominal et ce n'estpasencoretropgnant, endehors ducaractremal-commode d'une dimensionrduite3. Mais cela devientrapidement unproblmeaveclesmonnaies division-nairesde2 F, 1 F, 1/2 Fet 1/4 de francquisubissentgalement ledrainageet disparaissent: unepoqueo les salaires journaliers sont de l'ordre de 1 2 F, lespayements courants sont fortement perturbs.FacecettesituationlaSuissevaragir dsle 31janvier 1860enabaissant letitredes monnaies divi-sionnaires 800%0 au lieu de 900. La spculationn'tant plus rentable sur ces pices, elles restent en cir-1. M. Flandreau, L'ordumonde, laFranceet lastabilitdusystmemontaire international, 1848-1873, Paris, L'Harmattan, 1995.2. MichleSaint-Marc, Histoire montairede laFrance, 1800-1980,Paris,PUF, 1983. p. 7-43.3. Aulieud'unegrossepiced'argentde37 mmdediamtrepesant25 g, nous avons une petitepicetrs fine de 16,7mmet 1,6gquel'onpeut comparer notrepiceactuelle de5 centimesquifait 17mmpour 2 g.37culation et l'Italie va suivre cet exemple le24aot 1862maisavecuntitrede835millimes. LaFrance devrait faire de mme, mais elle se trouve gnepar ses propres rgles:si l'on abaisse le titre de la picede1 Fon touche de fait la dfinition du franc germi-nal, cequiestbienvidemmentinsupportablesousleSecond Empire! On hsite, avant de dcider, le24mai 1864, unabaissement 835millimes seule-ment pour les petites coupures de 50 et de 20 centimes.Le franc germinal est sauf, mais les francs continuent disparatre. Et de plus,avec ces titres diffrents, l'hri-tage du Premier Empire, l'unit de fait, est menac. LaBelgique, qui n'avait rien chang, ne peut plus accepterlesmonnaiesdivisionnairesfranaises, suissesouita-liennescarsesproprespicessubiraient unespcula-tion: enchangeant unfranc suissecontre unfrancbelgeon gagne 0,5g d'argent, soit 12,5% debnficebrut!LaFrancenepeut pasnonplusaccepterlespicessuissesouitalienneset setrouveainsi trsconcernepar les propositions faites par la Belgique quidemandelaruniond'uneconfrencemontairepourtransformerl'uniondefait enuniondedroit. Enrai-sondesonpoidspolitiqueet surtout desonrlehis-toriquedanscettequestion, laFrancevaprendrelatte del'opration.II. - Lacrationd'uneunionmontaireLaConfrence montaire qui se runit Paris le20 novembre 1865 a d'abord un programme trs ambi-tieux puisqu'il comprend l'tude d'une circulation uni-forme pour toute l'Europe. Mais ds les premiersjours, onselimitedesdonnestechniquespourlesquatre pays reprsents, ce quipermet d'aboutir assezvite uneconventionle23 dcembre 1865. Celle-cirencontra un trs bon accueil auprs de l'opinion inter-38nationale, ce qui fit reprendre bientt la question d'unemonnaie universelle, mise l'ordre du jour d'une nou-velle confrence convoque en186711. La Convention du 23 dcembre 1865. - La restric-tion desquestions purement techniques peut s'expli-quer parl'impossibilitdersoudrelesproblmesdefond. LaBelgiqueavait bienproposderenonceraubimtallisme et de rduire les pices d'argent au rle demonnaied'appoint. MaislaFrancepouvait difficile-mentadmettre quel'on abaissenonseulement le titredesmonnaiesdivisionnairesmaisgalement celui desgros cus de5 Fcar ce serait toucher radicalement ausystmeduConsulat construit sur unelargecircula-tion des espces d'argent.En fait, les tensions montaires s'taient un peu apai-ses au moment de la confrence et le bimtallisme taitdevenumoinsinsupportable. Onsecontentedoncdeprciser les donnes techniques relatives l'missionpourtablirunelisteprcise descoupuresautorises,avec les dimensions, les titres, les tolrances. Toutes lespices sont ainsi du mme modle et seules les inscrip-tionsouleseffigieschangent selonlespays. Pourlesmonnaiesdivisionnaires, aprsdetrslonguesdiscus-sions, on adopte le titre rduit de 835 millimes au lieudes 800 millimes introduits par la Suisse. On s'loignealors du systme dcimal, mais les pices devraient trede meilleure qualit avec cet alliage un peu plus riche.Par ailleurs, pour viter que les tats ne succombent la1. Une documentation commode sur l'Union latine, avec les textes desconventions, est fourniepar plusieurs vieillesthses de doctorat en droitet notamment:E. Brossault, Histoire de l'Union montaire latine, Rennes,1903; P. Chausserie-Lapre, L'Union montaire latine. Son pass, sasituationactuelle, seschancesd'aveniret saliquidationventuelle, Paris,1911 ; E. Bourquin, Les transformations survenues dans l'Union montairelatineaucoursdelaguerre, Paris, 1924; B. Fourtens, La findel'Unionmontaire latine, Paris, 1930. On peut aussi se rfrer aux nombreux arti-clesconsacrscettequestionparlesgrandsconomistesdel'poquedans le Journal des conomistes, spcialement en 1867, 1868, 1872 et1878.39tentation de chercher les gains du seigneuriage avec cesmonnaiesdivisionnaires, onrestreintleur frappeuntotalde6 Fparhabitant, leur pouvoirlibratoire estlimit et les tats s'engagent les changer sur demandecontre des pices d'or ou des cus de 5 F.La Convention tablit finalement unsystme trssouple et rduit au minimum. Il n'y a aucun organe degestionni de contrleet l'onprvoit seulement deschangesannuels destatistiques. Mme leprincipe delibre circulationet d'unit montaire n'est pas pro-clamtrs clairement: ilrsulteseulement du fait queles tats s'engagent rciproquement accepter leursmonnaiesdans les caissespubliques. Les particuliersne sont pas tenus de recevoir les pices trangres et lesbanques centrales non plus, mais tous peuvent le fairesansrisque puisqu'ilspourronttoujourslestransfrerau Trsor public.Cette union montaire n'est pas encore qualifie offi-ciellement de latine car le systme est trs ouvert etla France espre attirer bien d'autres membres.D'aprs l'article 12, le droit d'accession la Conven-tion est rserv tout autre tat qui en accepterait lesobligationsetqui adopteraitlesystmemontairedel'Union, encequi concernelesespcesd'or et d'ar-gent. Il n'y a mme pas besoin de l'accord des autresmembres, ce qui montre que l'on avait une grandeconfiancedanslapureobjectivittechnique! Onvoitaussi par l que l'on avait surtout une conceptionquelquepeuidaliste dela monnaie. Lesconomistesde l'poqueavaient bienconsacrdenombreuxtra-vauxauchoixdel'talonmontaire, maisil semblequ'aucunmoment l'onnesesoit inquit desds-quilibres pouvant provenir des diffrences conomi-ques entre les partenaires. Pourtant les premiers signa-taires taient loin d'tre dans des situations identiques,maislechoixaffectif dufrancetlaforcenaturelle durattachement mtallique cartaient les inquitudes.40Aprs ratifications, laConventionentreenvigueurle 1eT aot 1866pour unepremireprioderenouve-lable de quinze ans et cette cration provoque unegrande sensationdans le mondeentier. EnGrande-Bretagnele journal TheEconomist saluecette innova-tion en crivant: Si la civilisation pouvait donner uneseulemonnaietousleshommes, ceserait ungrandpas de fait pour les amener penser qu'ils sont dummesang.Onsesitueici audbut d'uncourantd'internationalisme pacifiste qui insistera plus tardgalement sur l'unit de langue et sur la cration d'unelangue commune. La Grce et les tats pontificauxcommencent mme adapter leurs systmes mon-taires pour se rapprocher des types de la Convention etpour hter cette volutionle gouvernement imprialdcidede convoquer unenouvelleconfrencemon-taire l'occasion de l'Exposition universelle de1867.2. La Confrence de 1867. - Cette Confrence se ru-nit Paris en juin et en juillet 1867 avec les dlgus de22 pays. En mme temps se tient une Confrence inter-nationale scientifique pour l'adoption d'un systme uni-formedepoidsetmesures et de monnaies . Les deuxrunionssont prsidesparleprinceNapolonet uncertain nombre de dlgus interviennent dans les deuxinstances. Tout le monde est d'accord sur l'intrtd'adopter une unit montaire commune, d'autant plusque depuis plusieurs annes de nombreux auteursavaient insist sur l'ide de monnaie mondiale, mais lesavisdivergentmalheureusementsur l'unitadopter.Certains projets prconisent une unit simple et lmen-taire, comme1 g d'or, et font bien la distinction entrel'unitmontaireet lesmonnaiesrelles. Ainsi Cour-celle-Seneuil proposed'mettredes picescorrespon-dant strictement la nouvelle unit qui circuleraient enconcurrence avec les monnaies nationales: c'est l l'ided'unemonnaiecommunedontla forcereprendrait41celle du systme carolingien d'quivalence entre le sys-tme de compte et le systme de poids, cependant la plu-part desdlguspensent quecettemesurepurementrationnelle heurterait trop les habitudes et qu'il vaudraitmieux partir de l'existant plutt que de crer une mon-naie entirement nouvelle1 Or le systme de1865 pou-vait facilement intgrer d'autres monnaies car trs peude choses prs 5 F correspondaient un cinquime de lalivre anglaise, un dollar amricainou encore deuxflorins autrichiens. Pour respecter les susceptibilits onpourrait, selon certains, frapper des pices comportantl'indicationdesdeuxvaleurs: enfrancetenmonnaienationale.Mais la Confrence n'adopta aucune rsolution dfi-nitivesur ce point, essentiellement pour deuxraisons.Lapremiren'est autrequelevicedubimtallisme,rejetpar laplupart desparticipants. Lasecondeestplus politiqueet n'a pas tformule trs explicite-ment, mais il est nanmoinspatent quebeaucoupdedlgus se mfiaient de la politique trangre de l'em-pereur NapolonIII. Mmesi le granddesseindurgnevenait tout justedes'acheverlamentablementle 19juinpar l'excutiondel'empereurduMexiqueMaximilien, on n'avaitpas oubli le rle de dfenseurdumonde latinque voulait jouer notre empereur faceau monde saxon et germanique.Cependant les contacts tablis Paris vont tre trsfavorables une extension du systme de1865. Ds le1. Alaconfrence scientifique, Michel Chevalier dfendle systmerationnel en disant que l'onreviendrait ainsi l'esprit du pass enren-dant lamonnaiesavraiesignificationqui est celled'unpoidsexact.comme le prouvent les mots delivre et de marc. Mais le dlgu suisseFeer-Herzogsoulignequel'exprienceamontrquelesunitsmon-taires ne se crent pas artificiellement:le franc a d sa facile adoption sasimilitudeavecl'anciennelivretournois. Surlammoiredelamon-naie et lathoriedelarfrencedumontaristeallemandNussbaum,selon lequeluneunitmontairenepeut tre penseque parrapport une autre unit, soit extrieure, soit antrieure, cf. les remarques deJ. Carbonnier, in Ph. Kahn,op. cit., p. 530-532.4231juillet uneconventionprliminaireest signeavecl'Autriche pour rapprocher les types montaires. L'Es-pagne poursuit une volution vers la rorganisationdcimale de son systme montaire commenceen1864 et c'est cette occasion que fut cre la pesetaen 1868. EnAmriquelatine, des picesanaloguesnotre cu de 5 Fsont frappes en Argentine, au Vene-zuela, au Chili et au Prou. La Roumanie, la Russie etaussi la principaut de Monaco reproduisent l'essentieldes rgles de la Convention de1865. Les tats scandi-naves sont galement trs intresss pour renforcerleurs liens traditionnels.Seulel'Angleterrersisteet rejetteformellement lespropositions franaises d'adhsion au motif que le sys-tmen'tait pas dcimal!C'est pour le moins curieux,mais il est vrai que le Royaume-Uni tudiait alors trssrieusement l'abandon des anciens poids et mesures etque la dfinition or du franc avec treize chiffres aprs lavirgule aurait fait survivre unlment d'irrationalitmanifeste. Deplus, l'Angleterreneconnaissait paslenominalisme de notre article1895 du Code Napolonl,et mmesi l'intgrationdansl'unionmontairen'en-tranait qu'unetrs faiblemodification de la dfinitionde la livre, il aurait fallu modifier toutes les crances etles dettes en proportion. En raction ce projet dfec-tueux, l'conomiste Bagehot va alors prsenter un planconcurrent fond sur un rapprochement avec les tats-Unis, sur une base monomtalliste or.Toutefois, mme si les oppositions sont rares, lesadhsions formelles vont rester peu nombreuses, endehorsdecellesdelaGrceet destatspontificauxen1868. MaislaFrancevasecontenterd'uneunion1. L'obligationqui rsulte d'unprt en argent n'est toujours que delasommenumriquenonceaucontrat. S'il yaeuaugmentationoudiminution d'espces avant l'poque du payement, le dbiteur doit rendrelasomme numrique prte, etne doitrendre quecette somme danslesespces ayant cours au moment du payement.43defait enacceptant simplement les picesconformesauxtypes dans sescaissespubliques- ellesprovien-dront finalement d'une quarantaine de pays diffrentsl.Elle s'est faite moins insistante pour obtenir la ratifica-tionde la Convention de1865 par de nouveauxtatscar la pratique a montr l'existence d'un risque quandunpays imposelecours forcdes billetset suspendleur convertibilit en espces mtalliques.Or depuisle1er mai 1866c'estlecasdel'Italieoaprsplusieursannes de dficits budgtaires dj inquitants il a fallurecourirlaplanchebilletspourfinancerlaguerrecontrel'Autriche. Onvrifiealorsunefoisdepluslaloi deGresham: lamauvaisemonnaie-papier circuleseuledans lapninsuleet chasselabonneenargentvers les autres pays,pour les rglements commerciauxou bien pour des placements. L'Italie encaisse ainsi lesbnfices du seigneuriage et exporte son inflation avecses pices qui grossissent la masse montaire des parte-naires, notamment en France o160/0 des pices blan-ches sont italiennes2.Cette attitude incorrecte entraneunemfianceetvabloquerlesdiscussionsavecl'Au-triche qui pratiquait le cours forc depuis longtemps etaccumulait lesdficitsbudgtaires, cequi avait d'ail-leurs dj empch l'application du trait sign avec leZollverein. Mais cespremires difficults sont vrita-blement mineures en comparaison des problmes chro-niques que connatra notre union aprs1870.III. - Lespremiresadaptations (1874-1878)L'effondrement del'EmpireSedanaffaiblit ind-niablement lapositionduchef defile decesystmefondsurlefrancgerminal, maiscettepriptien'est1. J.-M. Leconte, Lebrviairedesmonnaiesdel'Unionlatine, Paris,CRESSIDA, 1994,386 p.2. M. Flandreau, On the inflationary bias of common currencies. TheLatin Union puzzle,European Economie Review, n 37, 1993, p. 501-506.44rien ct de la vritable crise de l'argent qui vaentraner unisolementtotaldesbimtallistes. Ceux-civonttrecondamnssesupporterdanslecadredeleur union avec la hantise d'une liquidation.1. L'isolement des bimtallistes. - A partir de1870,l'argent connat une chutesensiblepar rapport l'or.Les transfertsspculatifspeuvent reprendre, avecdesbnficesbeaucoupplusimportants, et lespices d'ordisparaissent de la circulation o elles sont remplacespar desmonnaiesd'argentdprcies. Cetteinversiondescoursprovient delaconjonctiondedeuxphno-mnes conomiques. On enregistre une hausse del'offre demtal blancenraisonde ladcouvertedenouvelles mineset de certains perfectionnements tech-niques dans l'affinage. Face cette offre accrue de prsde50% la demandes'effondre, par suite de la satura-tion de l'Inde et de l'Extrme-Orient, o le grand com-merce commence se servir d'effets pour les paye-ments, mais surtout en raison de l'adoption dumonomtallisme-or par plusieurs pays.Ce fut le cas de l'Allemagne partir de 1871 et ce seulchangement d'talon va en principe mettre 6000 t d'ar-gent sur le march, soit l'quivalent de trois ans de pro-duction. Deplus, l'Allemagneralisesesunificationspolitique et montaireavec unenouvelle monnaiequin'est pas du tout dans un rapport simple avec le franc: lapice de 20 marks est la taille de139,5 au kilo d'or 900 millimes tandis que le Napolon de 20 F est lataille de 155, il y a donc 2 790 M ou 3100 F dans un kilo.Ensuite l'on verra ce mouvement gagner la Sude et leDanemark en 1872, puis la Norvge en 1873 et enfin laHollande en 1875 car ces pays avaient intrt adhrerausystmede leurs principauxpartenaires commer-ciaux, l'Angleterre et l'Allemagne. EnScandinavie, onconstitue mme une union montaire, qui est une vri-table copie de la Convention de 1865, mais avec des bases45diffrentes, en continuit avec les systmes antrieurs: lapice de 20 couronnes est la taille de 124 au kilo.Cespriptiesconduisentunisolementdessigna-taires de la Convention de1865 quidevient alors vri-tablement la charte d'une union latine , mais celle-ciest fortementmenace par l'afflux de l'argent dprcidans les htelsdes monnaies. On essaye d'abord de lerestreindre par des complications techniques:on limitelesfrappes quotidienneset celui qui prsentedeslin-gotsdoit alorsattendredeuxtroissemaineset sup-porter des frais financiers dissuasifs. Mais cela ne suffitpaspourlaBelgiquequi estenpremireligne, carlaMonnaie de Bruxelles est la plus proche de Londres,lecentre de la spculation, et permet de gagner du tempssur les transports.2. La limitation de la frappe de l'argent. - Le18 dcembre 1873 la Belgique suspend la libre frappe del'argent et cette dcision grave provoque une confrencemontaire runie Paris ds le mois de janvier suivant.LaSuisseposeclairement laquestiondumonomtal-lisme-or, mais ni la Belgique, encombre par des massesd'argent, ni surtout la France ne peuvent s'y rsoudre. LaFrancepratiquait lecours forc des billetsdepuis laguerre de1870 et esprait revenir rapidement la libreconvertibilit, mais pour cela il fallait que la Banque deFrance puisse utiliser ses rserves d'argent, qu'elle ait lechoix de rembourser les billets en or ou en argent.Cependant lasuspensiondelalibrefrappedel'ar-gent peut intresserlaFrancedanslamesureoellegnera l'Allemagne qui ne pourra plus remplacer boncompte ses rserves d'argent par des monnaies d'or, etde fait, pour viter des pertes, le Reich conserveraencore assez longtemps une importante circulationd'argent, malgr le passage l'talon-or.La Confrence ne dbouche ainsi que sur une conven-tion additionnelle signe le 31 janvier 1874. Celle-ci46limite la frappe des cus pour 1874 un total de 120 mil-lions de francs, soit moins du cinquime de ce qui avaitt frapp l'anne prcdente, et introduit un nouveauprincipe qui sera lourd de consquences: les adhsionsdevront dornavant obtenir l'assentiment des membres.Il s'agissait d'viter l'entre de pays qui auraient trop demtal blancdans leur circulation, maiscettemesureallait de fait rendre trs difficile tout largissement:ainsi, en 1887, on ne trouvera pas l'unanimit pour l'en-tre de la Roumanie, ni pour celle de l'Espagne.En1874 ondcideaussi deseretrouver un anplustardet unrythmeannuel setrouveinstitu. Enjan-vier 1875, ondoit constaterquelabaissedel'argents'tait poursuivie. Il conviendrait d'arrterlafrappe,mais l'Italie ne peut l'accepter car elle voudrait assurerunecouverturemtalliqueauximportantesmissionsde billets tandis que la Grce souhaite tout simplementfrapperenfinsesproprespices, cequ'ellen'avait pasencoreeul'occasiondefairedepuissonadhsion. LaConfrencesecontenteainsi dereprendreleprincipeantrieur d'une limitation120 millions, mais seule lamoiti peut tre frappe la demande des particuliers.Ceci ne rsout videmment rien au fond, aucontrairemme car lapertedudbouchmontaireacclre la chute de l'argent sur le march commercial!On enest1 pour 17 voire 1 pour 20, alors quelecours officiel reste 1 pour 15,5. Quand la Confrencese runit en janvier 1876, certains dlgus font remar-querquelecoursdel'argentn'a jamais t aussi basdepuis la dcouverte de l'Amrique et la Suissedemande avec insistance que l'on adopte l'talon-or.Les incertitudes politiques franaises de cette poqueempchentunedcisionclaire. L'Assemblenationalede 1871 est en train d'achever son travail constitutionnelet dans l'attente de la mise en place des nouveaux pou-voirs, lanature mme durgime reste indcise. Lesdbats vont donc seconcentrer sur quelques aspects tech-47niqueset notamment surleprinciped'unerpressionaccrue dufaux-monnayagequiprenait une dimensionproccupante. En effet, il avait t stimul par la limita-tion de la frappe lgale, mais c'tait une fausse monnaied'un genre nouveau qui circulait, une fausse-vraie enquelque sorte, car le poids et le titre taient tout fait cor-rects mais la frappe se trouvait ralise en dehors des ate-liers officiels la demande des spculateurs qui voulaientcontinuer le trafic entre l'or et l'argent!Ce n'est quedans le courant de l'anne1876 quelaFrance va tre en mesure de prendre des dcisions plusradicales. Elle fermera les frontires aux pices de l'Am-rique latine qui taient pourtant au type de notre cu etsurtout elle va prendre la loi du 5 aot 1876 qui permet-traaugouvernement desuspendrelafabricationdespices d'argent pour les particuliers, ce qui fut fait ds lelendemain. Dans ces conditions, avec une interruptionde l'activit des principaux ateliers montaires, une ru-nion des tats membres n'tait plus ncessaire en 1877.Elle n'aura lieu qu'en septembre 1878, car l'chance delaConventionde 1865approchait: elle pouvait trerenouvele pour quinze ans, condition qu'il n'y ait pasde dnonciation avant le 1er janvier1879. Pour con-vaincre des partenaires inquiets comme la Belgique oula Suisse, la Confrence dcida de suspendre complte-ment la frappe du mtal blanc (Convention du5 novembre 1878).Dans ces conditions, l'Union latine peut poursuivresonexistence. Ellereste bimtallisteenthorie, maisavec la suspension du monnayage de l'argent on a toutde mme un monomtallisme-or dans les faits. Cepen-dant il s'agit d'unmonomtallismebossuselonlepubliciste Henri Cernuschil, avec une protubranceconsidrable d'cus dprcis! D'autres prfrent parler1. Cernuschi s'tait pris d'une vritable passionpources questionsmontaires et publia des dizaines d'articles dans son journal Le Sicle.48de bimtallisme boiteux car l'on discutera parfois dela reprise partielle du monnayage de l'argent pour satis-fairelesbesoinsspcifiquesdecertainstats, commel'Italieet laGrce. Cecatalogued'infirmits montrebien que l'Union n'est pas dans sa meilleure sant. Ellecontinue, mais l'on doute beaucoupde son avenir.D'ailleurs toutes les discussions sont maintenant mono-polises par la question d'une liquidation ventuelle.IV. - Le spectredelaliquidationL'Unionlatineconnat dsormaisunehantise: queva-t-il se passer en cas de dissolution? Commentva-t-onrussirliquiderlespositionsrciproquesenmonnaies d'argent?1. La reprise des pices d'argent. - En 1865, la ques-tionn'avait t rgle que pour les monnaiesdivision-naires dont le nominal tait suprieur la valeurintrinsqueet pouvaient treconsidrescommeunemonnaie fiduciaire. Les gouvernements metteurs decespicesautitrerduits'engageaient lesreprendreet les changer contredes picesd'oroudes cusd'argentpendant undlaidedeuxansaprsla findel'Union. Mais maintenant leproblmeseposepourdesmassestrsimportantesd'cusde5 Fquitaientdevenus de vritables assignats mtalliques, selonuneautreformuledeHenri Cernuschi. LaFrance estproccupe en tout premier lieu car en raison des ds-quilibres commerciaux elle avait dans sa circulation denombreusespices trangresetaimerait bienquesespartenairess'engagent leschanger enorencasdeliquidation. LaSuissequi n'avait frappquetrspeude monnaies nationales et reu beaucoup de picestrangres, notamment grceautourisme, alemmesouci d'obtenirdel'or. Enrevanche, laBelgiquequiavait d frapper des tonnes d'argent son effigie49avant 1873 lademandedelaspculation, nepeutadmettre cette perspective qui serait ruineuse pour elle.Cettesituationprovoqueunevritablecrisequandonconstate que l'Italie pratique unepolitique deplusenplus autonome. Eneffet, depuis quelques anneselle avait pris une orientation nette vers le monomtal-lisme-or et deuxlments techniques perturbaient lacirculation despicesd'argent: d'unepart noustrou-vonsunemissiondebilletspour desnominauxtrsfaibles, d'autre part la couverture des billets doitdepuis1883 tre assure pour les deux tiers en or1 Lespetites coupures en papier de 5 ou de10 L taient vi-demment indispensablesdutempsducoursforcdesbillets, maiselles restent encirculation mmeaprslasuppressiondecedernieren 1881carellessont pluspratiques que les grosses pices (en France, la mmepoque, oncommenceseulement utiliserdesbilletsde 50 F). Quant la modification des rgles de couver-ture, elle va aboutir au fait que les banques d'missionvont refuser les pices d'argent, mme italiennes, dontelles ont dj de trop dans leurs caisses. Tout ceci faitque les pices italiennes vont se retrouver dans lesautres pays de l'Union.Ceci contraste avec la bonne volont franaise.En1882, legouvernement avait mmeobtenuquelaBanque de France accepte formellement de recevoir lescus del'Uniondansses caisses. Mais ceci est insuffi-sant pour la Suisse qui dnonce la Convention leIl janvier 1884. Une nouvelle runionest indispen-sable si l'on veut la survie de l'Union.1. Il faut galement mentionner une mesquinerie: l'Italie refuse derecevoir les monnaiespontificales. LaFrance enabeaucoup encircula-tion et notamment des monnaies divisionnaires. Elle s'tait d'ailleursinquiteautrefois, dutempsdel'appartenancedestatspontificauxl'Union latine. d'une mission un peu laxiste de ces petites pices, mais laMonnaie du pape avait prtendu qu'elles rpondaient auxbesoins parti-culiers des plerins!502. La Convention de 1885. - On se retrouve Paris enjuillet et plusieurs sances sont ncessaires pour aboutir une nouvelle Convention signe le 6 novembre 1885 etcomplte par un acteadditionnelle12 dcembre sui-vant, pour tenir compte des exigences de la Belgique quiavait refus de signer le premier texte. Le trait est beau-coup plus dtaill que la Convention de 1865 pour tenircompte des prtentions des diffrents membres et de cer-tains problmes particuliers. Un arrangement annexe vargler de manire trs prcise les modalits de livraisonet derglement despices, maisl'acteadditionnel du12 dcembre va limiter strictement les remboursementsenordusparlaBelgique, ainsi quepar l'Italie qui arussiprofiter desrticencesbelges: il est prvu quel'essentiel despices devra revenir dans les pays met-teurs par la voie des changes commerciaux.Cet arrangement correspondait unepositionra-listeadopteparlaFrance. Iltait parfaitementillu-soire d'esprer que le remboursement pourrait interve-nirrapidement et compltement. Mais commeil taittout aussi illusoire de penser que les pices reviendrontnaturellement vers le pays d'mission, cause desdsquilibres commerciaux, on pouvait en dduire quel'Unionlatinetait condamnedurerlepluslong-temps possiblepour queles pertesventuellessoientconstates le plus tard possible!Effectivement l'Union, confirmepour cinqans etrenouvelable par tacite reconduction annuelle, neseraplus remiseencauseni amlioreet les seulsdbatsd'une certaine ampleur porteront sur les monnaies divi-sionnaires. Pourtant danslesannes 1890 laquestiond'une monnaie universelle avait de nouveau fait l'objetde nombreuses discussions internationales mais l'Unionne saura pas en profiter pour imposer son modle.Elletait trop divise ou paralyse par les mfiances rcipro-ques pour peser dans ces volutions. Il en aurait peut-tre t diffremment si l'on avait cr l'organe central51permanent rclam par la Suisse en 1885, mais on s'taitcontent d'amliorer la circulation des informations, laFrance tant charge de centraliser et de diffuser les sta-tistiquesqui vont tretrsutilesdanslaquestiondesmonnaies divisionnaires.3. Le problme des monnaies divisionnaires. -L'missiondepetitescoupures mtalliquesvadsor-mais alimenter l'essentiel des discussions ausein del'Union et provoquer encore quelques adaptations desconventions. Cela peut paratre drisoire car en Franceces pices ne reprsentaient en valeur que 4%desmissions de pices de 5F, mais pour les pays quin'avaient frappque trs peu d'cus, comme la Suisse,laGrceet mmel'Italie, laproportionpouvait allerjusqu'aux deuxtiers!La frappede ces monnaies avaittl'originesvrement limiteunmontant totalqui correspondait 6Fparhabitant, maisdestatsmembres vont priodiquement prsenter des demandesde drogations pour diverses raisons.C'est ainsi que l'Italie fait valoir que sa population etsonvolutionavaientt malcalcules, tandisquelaSuisse se plaint d'une pnurie provoque par des drai-nages spculatifs dans des zones frontalires. Cen'taient plus les spculations grande chelle d'autre-fois, mais des particuliersjouaient sur le change entre bil-lets et pices pour faire quelques petits bnfices sur quel-ques kilomtres et cela suffisait pour entraner unepnurie gnante pour le petit commerce. Mais il y avaitsurtout lesdemandes provoquesparlesbesoins descolonies, qui taient en pleine expansion la fin du sicle.Ces demandes entranaient des discussions trs pril-leuses car sur une question de dtail on pouvait dclen-cher une remise en cause de tout le systme. Des dro-gations sont parfois accordes, mais conditiond'utiliser le mtal des cus.On envisage aussi d'utiliserd'autresmtauxquel'argent et lenickelva connatre52un certain succs intressant pour la France et sesmines de Nouvelle-Caldonie. Mais ce nouveaudbouch offert un mtal techniquement trs intres-sant ne va que renforcer la chute de l'argent!A terme, la seule solution correcte serait la nationa-lisation de ces monnaies divisionnaires, avec une limi-tationdeleur circulationaupays metteur qui peutalors grer librement son stock de moyens de payementcourants. Ceci est dcidpour l'Italieds 1893et laSuisse varclamer unegnralisation de cette mesure.Mais la France fait valoir des inconvnients srieuxpour les touristes et en 1908 on se contente d'lever lescontingents: ilsseront ports progressivement, en unedizaine d'annes, des montants correspondant 16 Fpar habitant. Ces dbats quelque peu mesquins contras-tent fortement avec le renouveau de l'intrt pour uneunion tendue au monde entier.4. Une monnaie universelle? - Les discussions ont trouvertes sous l'impulsion des tats-Unis qui connais-saient de vives polmiques sur la question du bimtal-lisme: plusieurs lections prsidentielles s'taient jouesessentiellement sur ces controverses montaires. DepuislafindelaguerredeScession lapratiques'orientaitvers lemonomtallisme-or, mais il yavait unefortersistance des partisans de l'argent. La polmique avaitdes causes internes particulires la construction de cettat fdral et notamment la position des tats del'Ouest producteurs d'argent. Mais un autre argumentfavorable l'argent trouvait un cho en Europe et sur-tout enFrance: son usage montairepennet de luttercontre la dflation qui tait alors trs sensible.Dj en1878, puis en1881, deux confrences furentrunies avec les membres de l'Unionlatine plus lestats-Unis, la Grande-Bretagne, l'Autriche,la Russie,laSude, laHollandeet, pourlasecondeseulement,l'Allemagne. Mais il n'y eut pas d'autre rsultat qu'un53constat de divergence entre mono et bimtallistes, tandisque ces derniers devaient mme reconnatre l'impossibi-lit de s'entendre sur une parit or-argent. Mais la per-sistancedelacriseprovoqua unregaind'intrtpourune union mondiale dans les annes 1890. On vit appa-ratre plusieurs projets privs qui alimentrent les dbatsdes confrences officielles!. Certains comme le FranaisLouis Baillyprconisent de rsoudrela questiondubimtallisme en faisant une monnaie bimtallique, utili-sant unalliagedontonpouvait doserlesproportionsselon les besoins. D'autres prconisent d'agir sur la pro-ductiond'argent dans le cadre d'une union universellebimtalliste: largulationserait obtenuegrce desinterventions tatiques, selon les modles amricains duBland-Allison Act de1878 et duShermanAct de 1890,ou par des achats privs encourags par des adaptationsfiscales et la stimulation des usages industriels.Ce type de projet est en pointe lors de la confrencequi se runit Bruxelles en 1892 lademande desEtats-Unis. Unepropositionprsente parledlguanglais Alfredde Rothschildfaillit l'emporter. L'An-gleterre tait proccupe par le cours de l'argent causedesonrledans sescolonieset prconisait deconstituer une sorte de syndicat intervenant sur le mar-chdes mtaux. Largulationdes courspermettraitalorsd'envisagerlareprisedelalibrefrappedel'ar-~ e n t , maislesystmen'taitviabletermequesi lesEtats producteurs s'engageaient contrler leurextraction. Le manque de confiance dans certainstats, notamment d'Amriquelatine, entranal'checde cette proposition et de la confrence.En 1897 une tentative de nouvelle runion, accueillieavec faveur par la France, choua face l'obstruction1. E. James, De l'adoption d'une monnaie de compte internationaleconsidrecommeunremde['instabilitdeschanges(thsesc. pol. etcon.), Paris, 1922, p. 106-125.54britannique. Mais ce moment les monomtallistes oravaient dj gagn aux tats-Unis, avec les prsidencesdeClevelandetdeMcKinley. En1900, ledollarseraassissur l'or et ce rglement par dfaut de la questiondubimtallismefavorisera alors l'tudedespremiersprojetsvritablement modernesd'missioninternatio-nale de monnaie-papier. On admet l'argument desbimtallistes qui se plaignent d'une insuffisance demoyens de payement, mais on entend y remdierautrement quepar unmoyenarchaquecommel'ar-gent. Deplusdes billetscirculeraient plusfacilementque les espces mtalliques et il n'y aurait plus lesvariations de changes induites par les effets de