ecoquartiers et services innovants : comment
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Master Governing the Large Metropolis 2013, Sciences Po Paris Recherche effectuée dans le cadre du projet Capstone
Rapport rédigé par :
Martin Baierl Heliabel Bomstein
Margot Delafoulhouze Clémentine Proby
Tuteur du projet : Marie-Alexandra Coste
ECOQUARTIERS ET SERVICES INNOVANTS : COMMENT
DEVELOPPER DES PRATIQUES SOCIALES ET ECONOMIQUES DURABLES DANS L’ESPACE URBAIN?
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REMERCIEMENTS Nous tenons à adresser nos sincères remerciements aux personnes qui nous ont apporté leur aide et qui ont contribué à l’élaboration de ce travail. Merci tout particulièrement A Marie-Alexandra Coste pour son aide précieuse, en particulier, pour son expertise, ses exigences ainsi que sa disponibilité. A François Ménard pour nous avoir fourni l’opportunité de réaliser un tel rapport et pour ses conseils avisés. A Jade Grélaud pour ses conseils et son éclairage sur les Régies de Quartier. A Régine Serra pour sa bienveillance et ses encouragements. A Odile Gaultier Voituriez pour son aide précieuse dans nos recherches bibliographiques. A tous ceux qui ont bien voulu participer à cette recherche pour leur disponibilité, leur intérêt et leurs encouragements.
En Ile de France : Zinn Din Boukhenaïssi, Franck Faucheux, Carole Ferrini, Anne Mistral, Claude Moskalenko, Siska Pierard, Vincent Renauld et Patrice Vuidel.
A Nantes : Mathilde Carreau, Marie Chapelin, Frédérique Gouriou, Stéphane Hirschberger, Gildas Macquaire, Marc Richard et Virginie Rigoulot.
A Loos en Gohelle : Pierre Damageux, Marianne Dolo et Thibault Gheysens.
A Roubaix : Pascaline Boyron et Agnès Crucé. A Strasbourg : Virginie Baudet et Anne-Laure Euvrard. A Amsterdam : Siem Goede, Petrina Groesbeek, Corine Marseille et Diego Pos A Culemborg : Marleen Kaptein, Niek Hazendonk, Jan Theunissen et Gerwin Verschuur. A Fribourg : Clemens Back, Annette Brox, Christoph Hammann-Kloss, Hubert Hoffmann, Christina Konietzny, Juliane Schultze avec Luciano et Christiane, Almut Schuster, Philip Späth, Karin Troester, Christel Werb et Geneviève Zuber.
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Résumé
Cette recherche est fondée sur l’étude de projets d’aménagement d’écoquartiers et
des services qui y sont proposés. Les arguments développés dans ce rapport s’appuient
sur un corpus bibliographique important ainsi que sur des observations et des entretiens
réalisés sur le terrain, en France et dans d’autres pays européens. Son objet est d’étudier
les motifs et les fondements sociaux et économiques des services développés dans les
écoquartiers ainsi que d’examiner la façon dont leurs modes de gestion peuvent favoriser
des rapports économiques et sociaux soutenables.
Les études de terrains français et européens1 ont ainsi montré que l’offre de
services dans les écoquartiers en renouvelle en partie l’approche et témoigne d’une
nouvelle appréhension de l’espace urbain. Pour apporter un éclairage à l’analyse et la
comparaison des différents services et modes de gestions observés, les concepts
introduits par les théories de l'économie de la fonctionnalité et de l'économie sociale et
solidaire ont été mobilisé dans ce rapport.
L’offre de services, telle qu’elle est présentée, intègre désormais des dimensions
nouvelles telles que la dématérialisation du principe de croissance, l’économie des
ressources et la territorialisation des activités. Conçus en complémentarité les uns aux
autres, les services tentent d’apporter la réponse la plus adaptée aux besoins et aux
enjeux relatifs à une sphère fonctionnelle donnée (mobilité, énergie, etc.). Ils mettent
également en œuvre une association entre économie de marché classique et économie
de services, cherchant ainsi à maximiser la valeur d’usage des biens. Au-delà d’une vision
purement technique, les écoquartiers contribuent donc à une l’évolution des modes de vie,
dans laquelle l’offre de services vient appuyer et compléter les aménagements
techniques. Cette offre de services renouvelée met en œuvre les principes du
développement durable et des théories alternatives aux modes de vie et de consommation
actuels. Elle cristallise ainsi une nouvelle approche urbaine, plus systémique, et esquisse
les contours d’un nouveau paradigme urbain.
Mais pour que de tels services émergent et contribuent réellement à la mise en
place d’un modèle plus soutenable, il est nécessaire que leur conception et leur gestion
intègrent les enjeux globaux du territoire autant que les besoins et les pratiques des
1 A Nantes, Loos-en-Gohelle, Roubaix et Strasbourg pour la France et à Amsterdam, Culemborg, Fribourg, pour les autres cas européens. Ont été considérés des projets en cours de démarrage ainsi que des expériences disposant d’une plus grande profondeur historique (régies de quartier, en France).!
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usagers. Or, ces aspects divers sont portés par des acteurs différents. Si les pouvoirs
publics nationaux et locaux portent (dans leur discours du moins) les enjeux globaux du
territoire, en termes de développement économique, de préservation de l’environnement
et de justice sociale, les habitants, dans leurs rapports aux services qui leur sont
proposés, sont davantage porteurs des besoins et des pratiques du territoire. Les services
étudiés ne procèdent pas du seul face à face des pouvoirs publics et des habitants. Divers
acteurs privés enrichissent en effet le processus de leur expertise professionnelle. Ils
interviennent tant en phase de conception qu’en phase de construction et de gestion des
quartiers et contribuent ainsi à l’offre de services. Ils contribuent à ancrer l’offre de
services dans une démarche pragmatique sur le plan technique et économique. Dans tous
les cas d’étude, une gouvernance intégrée mobilisant toutes les parties prenantes
apparaît comme un préalable essentiel à la mise en place de ces services, car elle
favorise la convergence des différents intérêts et permet de maximiser les gains collectifs.
En outre, cette démarche collaborative se trouve formalisée via des structures de
mutualisation et de coopération et mobilise un panel d’outils physiques, normatifs,
promotionnels et pédagogiques qui favorisent la mise en place de l’offre de service et à la
gouvernance intégrée.
Si les écoquartiers constituent un environnement propice au développement de tels
services et d’une telle gouvernance, leur insertion dans le tissu urbain et leur contribution
à la ville durable doivent être interrogés. Ce rapport envisage donc la question de la
reproductibilité des services et des leviers qui les soutiennent, tant d’un écoquartier à un
autre, qu’à l’échelle de la ville.
Les cas d’étude montrent que la reproduction par agrandissement d’échelle ne
constitue pas une solution adéquate pour les acteurs, qui insistent sur la nécessité
d’ancrer les services dans le territoire et son contexte socio-culturel. La combinaison des
logiques de proximité et d’intégration territoriale apparaît donc comme particulièrement
pertinente pour traiter les différents enjeux du développement durable. Il semble ainsi que
la reproductibilité soit plutôt envisageable dans une démarche de mise en réseau, selon
les principes de l’holarchie, les services demeurant ancrés dans le quartier, mais faisant
partie d’une organisation plus large permettant la mutualisation et la circulation des
ressources, tant matérielles qu’immatérielles. Cela permettrait de mieux prendre en
compte la nature complexe des systèmes urbains et de dépasser la conception de la ville
soit comme une addition d’entités autonomes soit comme une entité indivisible.
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SOMMAIRE INTRODUCTION! 9!I.! FONDEMENTS THEORIQUES : VERS UNE APPROCHE RENOUVELEE DES LIENS ECONOMIQUES ET SOCIETAUX.! 16!1.! DES THEORIES QUI SUGGERENT DE NOUVEAUX MODES DE PRODUCTION DE LA VILLE! 19!A)! DU MODELE INDUSTRIEL FORDIEN A L’ECONOMIE DE LA FONCTIONNALITE (EF)! 19!B)! L’ESS, UN TERRAIN FERTILE A L’ORIGINE DE SERVICES INNOVANTS! 23!C)! L’HOLARCHIE, UNE PISTE DE REPRODUCTIBILITE ?! 26!2.! LE QUARTIER COMME PREMIERE ECHELLE D’APPLICATION! 27!A)! EMERGENCE DES THEMATIQUES DURABLES A L’ECHELLE DU QUARTIER! 27!B)! LE DEBAT SUR LA QUESTION DES USAGES! 30!II.! QUELS SERVICES A L'ECHELLE DU QUARTIER PEUVENT ETRE LES PILIERS D'UN NOUVEAU PARADIGME URBAIN?! 33!1.! REPENSER L’OFFRE DE SERVICES! 33!2.! DES SERVICES POUR ENCOURAGER DES LIENS SOCIAUX ET ECONOMIQUES SOUTENABLES! 35!A)! SERVICES A LA MOBILITE! 35!B)! GESTION DES RESSOURCES! 44!C)! SERVICES A LA PERSONNE ET A LA COLLECTIVITE! 51!3.! QUELS EQUILIBRES ENTRE TECHNIQUE ET USAGES ?! 64!III.! QUELS LEVIERS POUR SOUTENIR LA PRODUCTION DE CES SERVICES ?! 68!1.! ETABLIR UNE GOUVERNANCE INTEGREE POUR LA GESTION DES SERVICES! 68!A)! EQUILIBRES ENTRE LES DIFFERENTS ACTEURS : POUVOIRS PUBLICS, CITOYENS ET ACTEURS PRIVES! 69!B)! LE CADRE FORMEL DE LA GOUVERNANCE INTEGREE! 81!2.! MOBILISER DES OUTILS VARIES POUR LA MISE EN ŒUVRE DES SERVICES! 92!A)! LES OUTILS PHYSIQUES! 92!B)! LES OUTILS PEDAGOGIQUES! 94!C)! LES OUTILS NORMATIFS! 96!D)! LES OUTILS PROMOTIONNELS! 101!3.! EVALUER LES OBSTACLES ET LES POSSIBILITES POUR LA REPRODUCTION DES SERVICES! 103!CONCLUSION! 107!ANNEXES! 111!ANNEXE 1 – GRILLE D’ANALYSE DES CAS D’ETUDE! 111!ANNEXE 2 – ACTEURS INTERVIEWES! 112!ANNEXE 3 – GRILLE D’ENTRETIEN! 114!ANNEXE 4 – GRILLE D’ANALYSE DES SERVICES (INITIATIVE ET STRUCTURE)! 115!ANNEXE 4 – GRILLE D’ANALYSE DES SERVICES (NATURE, ACTEURS ET EVALUATION)! 118!ANNEXE 5 – MONOGRAPHIES DE TERRAIN! 121!BIBLIOGRAPHIE! 160!
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INDEX DES SIGLES ADEME Agence de l'Environnement et de la Maîtrise de l'Energie ANRU Agence nationale pour la rénovation urbaine ARENE Agence régionale de l’environnement et des nouvelles énergies Ile de
France
BEL Bewonersvereniging EVA-Lanxmeer (association des habitants d’EVA Lanxmeer)
BBC Bâtiment de basse consommation CCI Chambre de commerce et d’industrie CERDD Centre Ressource du Développement Durable CGDD Commissariat général au développement durable CLAG Comité Local d’Actions Gérontologiques (Loos-en-Gohelle) CNLRQ Comité National des Régies de Quartier DD Développement durable DGALN Direction générale de l’Aménagement du Logement et de la Nature EDF Électricité de France EF Économie de la fonctionnalité EI Entreprise d’insertion EITTI Entreprises de travail temporaire d'insertion ESS Economie sociale et solidaire EVA Ecologisch Centrum voor Educatie, Voorlichting en Advies (centre
écologique d’éducation, sensibilisation et conseil); EVA Lanxmeer: écoquartier à Culemborg, Pays-Bas
FNAU Fédération Nationale des Agences d’Urbanisme FNTP Fédération nationale des travaux publics FSI Forum on Social Innovation GIE Groupement d’intérêt économique GES Gaz à effet de serre GENOVA Genova Wohngenossenschaft Vauban eG (coopérative de logement à
Fribourg) GWL Gemeente Waterleidingen (station de traitement d’eaux usées); GWL-
Terrein: écoquartier à Amsterdam, Pays-Bas HQE Haute qualité environnementale HLM Habitation à loyer moderé
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IFOP Institut français d’opinion publique INSEE Institut national de la statistique et des études économiques ISIGAZ Information Sécurité Intérieure Gaz LEED Local Economic and Employment Programme, Programme de l’OCDE MEDDE Ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l'Énergie MEEDDM Ministère de l’Écologie, de l’Energie, du Développement durable et de la Mer MEEDDAT Ministère de l'Ecologie, de l'Energie, du Développement durable et de
l'Aménagement du territoire METL Ministère de l’Égalité du territoire et du Logement NSM Nouveaux services à la mobilité OCDE Organisation de coopération et de développement économiques PECC Programme européen sur le changement climatique PDE Plan déplacement entreprise PIMMS Point Information Médiation Multi Services PLU Plan local d’urbanisme PPP Partenariat Public Privé SA Société Anonyme SAMOA Société d’aménagement de la métropole ouest atlantique SARL Société Anonyme à Responsabilité Limitée SCIC Société coopérative d’intérêt collectif SCOP Société coopérative et participative SEM Société d’économie mixte SEMITAN Société d'économie mixte des transports en commun de l'agglomération
nantaise SERS Société d'aménagement et d'équipement de la Région de Strasbourg SNCF Société nationale des chemins de fer français UE Union Européenne VAG Freiburger Verkehrs AG ZAC Zone d’aménagement concerté
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INTRODUCTION
D’après un sondage réalisé par l’Ifop fin janvier 2013 dans les 420 communes
françaises de plus de 20 000 habitants (Ifop, 2013), l’environnement et le cadre de vie en
milieu urbain sont devenus des préoccupations majeures pour les Français : 31% des
sondés ont répondu à la question ouverte « Comment décririez-vous en quelques mots la
ville idéale? » par des considérations relatives à l’environnement. Cela montre que les
français perçoivent les questions environnementales comme centrales dans
l’appréhension de l’espace urbain. Les pouvoirs publics ont également fait des enjeux de
développement durable l’un des axes centraux de leur action. Aussi, le développement
durable innerve de nombreux domaines politiques et sociétaux et devient une dimension
prégnante de l’appréhension des milieux urbains aussi bien à l’échelle nationale
qu’internationale. Conventions, engagements financiers et programmes d’action
coordonnée à différentes échelles (Programme européen sur le changement climatique
(PECC) depuis 2002, Grenelle de l’Environnement en 2007) cristallisent ainsi la
mobilisation des pouvoirs publics et de leurs partenaires autour des enjeux de
changement climatique, de préservation des ressources naturelles et de lutte contre
l’exclusion. Ces mesures témoignent d’un relatif consensus sur la nécessaire évolution de
l’économie et du système actuel, dont les modes de croissance, sont considérés comme
peu soutenables. Plus particulièrement, la transition écologique des espaces urbains se
positionne comme un enjeu de plus en plus fondamental. Ainsi, les acteurs locaux
semblent les plus pertinents pour mettre en œuvre des politiques territoriales qui seraient
les véritables leviers du développement durable. C’est dans ce contexte que les
écoquartiers ont émergé et se développent, à la fois vitrines de la politique
environnementale de la ville, partie visible des efforts menés en termes de durabilité et
échelles d’expérimentation de nouvelles approches urbaines.
Eléments de définition
Souvent galvaudé, le terme de développement durable ne peut être utilisé sans un
effort de définition préalable. De fait, un large panel de définitions existe et s’est développé
avec la montée en puissance du discours sur la durabilité dans les années 1990. Les
fondements du concept ont été posés par le rapport Brundtland en 1987 : la définition du
développement durable comme « un mode de développement qui répond aux besoins du
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présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs »
est maintenant internationalement reconnue, ainsi que le célèbre schéma situant le
développement durable à l’intersection des trois piliers que sont l’économie,
l’environnement et le social. Ainsi, une action est présentée comme contribuant au
développement durable si elle est la fois rentable économiquement, équitable socialement
et viable d’un point de vue environnemental. Cette définition a par ailleurs servi de modèle
à des définitions plus récentes, à l’échelle européenne2 et nationale. De façon générale, le
nouveau paradigme durable envisage un équilibre entre les volets économiques, sociaux
et environnementaux qui n’affectera pas négativement le développement des générations
futures. Cependant, si les principes fondateurs du développement durable font consensus,
leurs implications et applications font encore l’objet de débats. A juste titre, l’économiste
français René Passet (Charlot-Valdieu et al., 2009) souligne que le développement
durable est un objectif et une démarche bien au-delà de sa seule dimension théorique ;
par conséquent une politique de développement durable doit s’accompagner de mesures
concrètes pour initier une évolution de la croissance vers des activités et des modes de
consommation plus économes en termes de ressources et d’espace. Ce passage des
principes théoriques à des mesures effectives s’opère à travers la mobilisation d’outils et
de dynamiques très variées : si la culture, l’éducation et la participation des acteurs sont
souvent citées comme des catalyseurs permettant la mise en place de politiques
concrètes, d’autres outils tels que des incitations économiques ou légales peuvent aussi
être mobilisés. Ces outils sont utilisés facilement par les pouvoirs publics, en complément
des installations techniques qui prévalent, notamment dans les écoquartiers. Ainsi, la
notion de développement durable ne saurait être restreinte à une définition unique ni à un
ensemble de bonnes pratiques mais doit plutôt être perçue comme une stratégie de
développement qui doit être réfléchie et articulée aux différentes échelles du territoire,
chaque échelle ayant sa propre typologie d’enjeux, d’outils et de méthodes.
Les échelles de la ville et du quartier sont perçues comme étant particulièrement
pertinentes pour décliner la durabilité. Dés le début des années 1990, l’intégration des
objectifs de développement durable en milieu urbain a été précisée, lors de la Conférence
sur l’environnement et le développement à Rio de Janeiro en 1992 qui aboutit à la création
2Article 2 du traité de Maastricht, 1992 : « Le développement durable est un mode de régulation et une stratégie dont le but est d’assurer la continuité à travers le temps d’un développement social et économique dans le respect de l’environnement et sans compromettre les ressources naturelles qui sont essentielles à l’activité humaine. »!
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des Agendas 21. Cette conférence sera relayée par d’autres événements et textes
fondateurs (Conférence européenne des villes durables à Aalborg en 1994 et Charte
associée, Charte de Leipzig sur la ville européenne durable en 2007), par lesquels les
collectivités territoriales ont revendiqué et affirmé leur rôle dans la mise en œuvre des
principes du développement durable. Cependant, si ces documents attestent d’une réelle
volonté d’inscrire le développement durable à l’échelle locale, aucune vision unifiée de la «
ville durable » ne semble émerger. Dans ce rapport, nous retiendrons la définition
proposée par C. Charlot Valdieu et P. Outrequin dans leur ouvrage « Ecoquartier-Mode
d’emploi » (2009)3: « une ville durable est un projet politique, un objectif global qui doit
guider les politiques d’aménagement et de développement urbain, mais aussi l’ensemble
des politiques d’une collectivité. Ce projet doit être solidaire dans l’espace et dans le
temps et intégrer des stratégies d’économie des ressources naturelles et de gestion des
flux, des actions contre l’exclusion et pour l’équité sociale ainsi que l’application du
principe de précaution afin d’éviter des choix irréversibles. ».
L’articulation du quartier avec les problématiques du développement durable a
connu une dynamique parallèle : revendiqué au début des années 1990 comme une
échelle privilégiée d’application des principes de développement durable, le quartier a été
très vite été le théâtre des premières initiatives en la matière, avec la création des
quartiers Vauban à Fribourg, BedZed près de Londres, Bo01 à Malmö ou encore Eva
Lanxmeer à Culemborg. A l’instar de la « ville durable », le terme d’ « écoquartier » a
rapidement été utilisé pour qualifier divers projets, bien qu’aucune définition officielle
n’existe avant les années 2000. Malgré la diversité des approches en Europe et en France,
l’analyse de différents quartiers durables et projets d’écoquartiers nous permet de
construire une définition large de ce terme : les écoquartiers seraient capables de
conjuguer enjeux écologiques, efficience économique, équité sociale et gouvernance
intégrée afin d’instaurer de meilleurs cadres et qualité de vie. En France, le terme a été
banalisé par le Grenelle de l’Environnement, qui en a fait une de ses orientations
majeures en préconisant la mise en place d’au moins un écoquartier par ville de plus de
100 000 habitants d’ici à 2012 et en annonçant la mise en œuvre du Plan Ville durable
dans lequel s’inscrit l’appel à projet EcoQuartier. Par la suite, un label EcoQuartier a été
créé et lancé officiellement en décembre 2012 et une définition officielle est maintenant
véhiculée par le Ministère de l’Ecologie, du Développement Durable et de l’Energie : « Un
3 Définition élaborée en réunissant des éléments de définition présents dans la Charte de Leipzig (2007), les textes de la FNAU et de la démarche EcoCité ainsi que dans les écrits de C. Emilianoff.!
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EcoQuartier a pour objectif de proposer des logements pour tous dans un cadre de vie de
qualité, tout en limitant son empreinte écologique ». Pour ce faire, il doit respecter les
principes du développement durable : mettre en œuvre une gestion responsable des
ressources, participer au dynamisme économique et proposer des logements pour tous
afin de promouvoir la mixité sociale. L’EcoQuartier doit également s’intégrer dans le
territoire qui l’entoure et offrir les outils de concertation nécessaires aux acteurs de
l’aménagement et aux habitants dès la conception du quartier. De plus, la dynamique de
co-construction entre les différents acteurs du projet est présentée comme essentielle.
Les écoquartiers sont maintenant perçus comme la vitrine privilégiée de la politique
environnementale métropolitaine, cristallisant les enjeux du développement durable à
l’échelle du quartier, et les rendant visibles aux citoyens. Cependant, il s’avère que les
objectifs visés par les écoquartiers ne sont pas toujours atteints faute d’ambition
écologique ou d’articulation entre l’environnement physique (infrastructures et
équipements), les services, et les usages. Ainsi les comportements écologiques ne sont
pas toujours assimilés et pérennisés par manque de prise en compte et d’adaptation aux
besoins des usagers. Cette situation est liée à la prégnance de la dimension
environnementale et de l’approche technique par rapport aux autres piliers du
développement durable dans la conception des écoquartiers en Europe et en France. La
dimension sociale, en particulier, semble trop restreinte. Ainsi, on recense principalement
des démarches environnementales (chantiers verts, maîtrise des choix énergétiques et
recours aux énergies renouvelables, techniques alternatives de gestion des eaux
pluviales) avec une prise en compte très technique des notions d’approvisionnement,
d’aménagement, d’accessibilité ou encore d’indépendance énergétique, aux dépends de
l’analyse des usages. Par contraste, les démarches « durables », intégrant les dimensions
économique, sociale et participative n’en sont qu’aux prémisses. Ce phénomène a amené
certains auteurs à distinguer les « écoquartiers » des « quartiers durables », les premiers
étant axés sur une approche purement environnementale. Cependant, par souci de clarté,
les deux termes seront ici utilisés indistinctement pour désigner des modalités communes
de développement urbain : « la reproduction conjointe du capital écologique, social et
économique d’un territoire afin d’améliorer la qualité du cadre de vie des ses habitants et
usagers » (Da Cunha, 2013). Atteindre cet objectif nécessite de mettre en place une
approche globale et systémique et d’initier une véritable dynamique depuis l’expression
des attentes des habitants jusqu’à la gestion quotidienne du quartier. Au delà des aspects
techniques, c’est donc la gestion des quartiers, ainsi que les modalités des services qui
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sont proposés qui doivent être pensés ou repensés afin d’ancrer la démarche durable
dans les usages d’abord, et dans le modèle économique et social à l’échelle urbaine plus
globale ensuite.
Intérêt d’une approche des écoquartiers par les services
Les services présentent un fort potentiel de levier pour générer de nouveaux liens
économiques et sociaux. Ils s’articulent en effet avec les besoins, les attentes et les
valeurs à la fois des usagers et des opérateurs et sont ainsi fondés sur des interactions
sociales fortes entre consommateurs, usagers et prestataires. De ce fait, repositionner ou
renouveler l’offre de services (type de service offert, structure de gestion) peut
potentiellement créer de nouvelles incitations et de nouveaux modes de fonctionnement.
Les services urbains répondent à des besoins quotidiens tels que se déplacer, se loger,
avoir un emploi, etc., dont la satisfaction est nécessaire à l’intégration des individus dans
la société urbaine. Ainsi, l’innovation de services au sein des écoquartiers pourrait être le
vecteur d’innovation sociale et sociétale.
Dans ce rapport, nous considérerons une activité de service comme « caractérisée
essentiellement par la mise à disposition d'une capacité technique ou intellectuelle. A la
différence d'une activité industrielle, elle ne peut pas être décrite par les seules
caractéristiques d'un bien tangible acquis par le client. Compris dans leur sens le plus
large, les services recouvrent un vaste champ d'activités qui va du commerce à
l'administration, en passant par les transports, les activités financières et immobilières, les
activités scientifiques et techniques, les services administratifs et de soutien, l'éducation,
la santé et l'action sociale. C'est le sens généralement donné par les anglo-saxons au
terme “services“. » (INSEE). En France, dans la pratique statistique, ce vaste ensemble
constitue la catégorie « activités tertiaires ». On distingue le tertiaire marchand (transports,
commerce, services aux entreprises, services aux particuliers, activités immobilières et
financières) du tertiaire non-marchand (éducation, santé, action sociale, administration...).
Le terme « secteur des services » est utilisé de façon plus restrictive puisque limité aux
services, aux entreprises et aux particuliers. De façon générale, quatre critères sont
utilisés pour caractériser les activités de service : l’intangibilité, l’hétérogénéité, la
simultanéité et la périssabilité (Wolak et al., 1998).
En outre, nous considérerons l’innovation au sens de Chambon, David et Devevey
(1982) : « Nouveau signifie alors non figé, non bridé, et surtout hors normes. (…) innover
n'est pas faire nouveau, mais faire autrement, proposer une alternative. Et cet autrement
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peut et doit parfois être un enracinement dans des pratiques passées. ». Cette définition
générale nous permet d’asseoir celle d’innovation sociale, proposée par l’OCDE et
adoptée par le Forum for Social Innovation en 2000 : « l’innovation sociale est la
recherche de nouvelles solutions aux défis sociaux dont le but ultime est l’amélioration du
bien être individuel et de la qualité de vie individuels et collectifs. ».
Au-delà des aspects techniques, c’est donc la gestion des quartiers, ainsi que les
modalités des services qui sont proposés qui doivent être pensés ou repensés afin
d’œuvrer à l’articulation des modes de vie individuels ou collectifs avec les objectifs de
développement durable. La réalisation d’un mode de vie plus respectueux de
l’environnement est ainsi amenée à terme à modifier le modèle économique et social à
l’échelle urbaine. Les modalités de gouvernance à l’échelle du quartier peuvent être riches
d’enseignement à l’échelle de la ville. Cependant, le changement d’échelle du quartier à
l’aire métropolitaine induit d’importants enjeux en termes d’adaptation des services.
Le présent rapport se propose d’articuler ces différents thèmes autour de la
problématique suivante : Quels sont les nouveaux services, les structures et mécanismes
de gestion qui permettent d’établir des liens sociaux et économiques plus soutenables4
dans l’espace urbain?
Eléments de méthodologie
Cette étude a été menée en deux phases : nous avons dans un premier temps
exploré un important corpus littéraire traitant des enjeux du développement durable en
milieu urbain, de la question des écoquartiers ainsi que de l’articulation des services avec
la production urbaine. Nous avons également réalisé des entretiens de cadrage avec
différents acteurs spécialisés dans ces domaines. Dans un second temps, nous avons
sélectionné des cas d’études en France et à l’étranger et avons conduit des recherches
plus précises sur ces projets ainsi qu’une série d’entretiens sur le terrain avec les acteurs
en charge du développement des écoquartiers et de la mise en œuvre des services.
Les terrains ont été choisis suivant une liste de critères complémentaires (cf.
Annexe 1) établie afin d’obtenir une vision aussi exhaustive que possible des projets
d’écoquartiers en Europe. Nous en avons finalement sélectionné huit (cf. Monographies),
divers en termes d’ancienneté, d’ancrage géographique (France ou Europe), de structure
sociale et de nature de l’aménagement. Ces projets diffèrent aussi par l’implication des
4 Au sens environnemental, avec des externalités sociales et économiques.!
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différents acteurs (pouvoirs publics, secteurs privés et citoyens) dans la réalisation de
l’écoquartier. En France, nous avons étudiés la ZAC de l’Union (Roubaix), l’île de Nantes
(Nantes), le quartier Danube (Strasbourg) et la ville de Loos-en-Gohelle. Bien que n’étant
pas un quartier ni un projet d’ « écoquartier » à proprement parler, nous avons considéré
Loos-en-Gohelle comme un exemple pertinent du fait de la grande implication des
pouvoirs publics dans les questions de développement durable, ainsi que pour ses
mécanismes de participation citoyenne. Toutefois, sa taille (7000 habitants) et la portée
limitée de ses politiques ne nous permettent de lui conférer une valeur d’exemple pour
l’échelle métropolitaine. A ce titre, ce cas d’étude ne sera pas considéré pour les
problématiques de changement d’échelle et de reproductibilité. En Europe, nous nous
sommes penchés sur les quartiers Vauban et Riesefeld (Fribourg), GWL (Amsterdam) et
Eva Lanxmeer (Culemborg).
Pour chaque terrain, nous avons identifié différents types d’acteurs porteurs (cf.
Annexe 2) et avons élaboré une grille d’entretien commune (cf. Annexe 3). Enfin, nous
avons analysé chaque service selon un ensemble de critères (cf. Annexe 4). Dans un
souci de comparaison et de complémentarité entre les terrains, nous avons sélectionné un
large panel d’acteurs pour chaque cas : institutionnels, professionnels et associatifs. Ainsi,
l’étude de ces différents écoquartiers, créés dans des contextes et selon des temporalités
différentes, nous a permis d’aborder une grande diversité de services et de modes de
gestion et d’identifier ceux qui participent de la création de liens sociaux et économiques
durables dans les territoires urbains. En outre, il est aussi essentiel de considérer les
différences culturelles, en termes d’environnement légal et institutionnel ainsi que de
contexte social, qui permettent de penser le potentiel et les limites de l’adaptabilité des
modèles rencontrés, en particulier dans le contexte français.
Présentation du rapport Dans une première partie, il convient de présenter les fondements théoriques sur
lesquels s’appuie l’analyse menée dans ce rapport. Nous développerons ainsi des
théories alternatives de l’économie et des rapports sociaux qui proposent une redéfinition
de l’espace urbain et de son fonctionnement, telles que l’économie de la fonctionnalité,
l’économie sociale et solidaire ainsi que l’holarchie. Nous verrons également comment le
quartier s’est dégagé comme la première échelle d’application de ces théories. Dans une
deuxième partie, il s’agira de proposer une typologie des différents services étudiés et de
leurs impacts sur les liens économiques et sociaux à l’échelle des écoquartiers. A la
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lumière de ces exemples, la relation entre les techniques et les usages dans l’élaboration
et la mise en place de ces services sera également réinterrogée. Cette étude des services
urbains observés dans les écoquartiers permettra d’esquisser une nouvelle appréhension
de la ville et la potentielle mise en œuvre d’un nouveau paradigme urbain. Enfin, dans une
dernière partie, il conviendra de se pencher sur les différents leviers mobilisés et
mobilisables pour la mise en place de ces services : nous identifierons en premier lieu les
dynamiques nécessaires pour établir une gouvernance réussie du service et analyserons
ensuite les outils à la disposition des acteurs. Pour finir, les opportunités et les obstacles à
la reproductibilité des services, dans d’autres écoquartiers et à l’échelle métropolitaine
seront envisagés.
I. FONDEMENTS THEORIQUES : vers une approche renouvelée des liens économiques et sociétaux.
De la remise en question de l’économie et de la société contemporaines
Les récentes crises environnementale, sociale et économique pointent les limites
de notre modèle sociétal et de production. Le modèle économique de nos sociétés repose
sur un supposé accès illimité à certaines ressources naturelles. Aussi la croissance
résulte-t-elle de la production et de la vente du plus grand nombre possible de biens
produits à partir de ces ressources. Ce modèle économique, issu du modèle fordien
industriel (CERRD, 2011)est caractérisé par une approche de la performance selon trois
axes. La qualité des produits est un premier axe, elle est assurée par la standardisation de
la performance, ainsi que par la mise en place de procédures strictes de gestion et de
contrôle de la qualité. Le second axe réside dans la productivité des facteurs de
production, qui conduit à des économies d’échelle, grâce, notamment, à la mécanisation.
Enfin, la rentabilité, qui rend compte du ratio entre profit et capital investi, constitue le
dernier axe de la performance. Cet axe prend le pendant sur l’axe de qualité, la recherche
de gains financiers devenant la priorité du modèle actuel.
Toutefois, ce modèle économique exerce une forte pression sur l’environnement et
montre ses limites. En effet, les ressources sur lesquelles il repose se raréfient ; il n’est
donc plus considéré comme soutenable. La notion de performance ayant évolué, elle
devient plus complexe car elle intègre de nouveaux aspects difficilement mesurables tels
17
que le jugement de valeur, la prise en compte du temps long ou encore la territorialisation
des activités. De fait, l’héritage du modèle fordien industriel est remis en cause par de
profondes ruptures économiques. Par exemple, le passage d’une économie fondée sur le
secteur industriel à une économie dont 75% de la valeur ajoutée et des emplois
proviennent du secteur tertiaire modifie la notion de ressources. En effet, la confiance
entre les acteurs, les compétences, la traçabilité de l’information sont autant de facteurs
qui prévalent sur l’usage de ressources matérielles et constituent les ferments de la
croissance d’une économie de plus en plus immatérielle. Enfin, la notion même de
performance est bousculée par la prise en compte des externalités dans l’évaluation de la
performance économique. Les externalités sont l’ensemble des effets générés
indirectement ou de manière non intentionnelle par l’activité productive d’une entreprise
sur son environnement écologique, social et économique. Elles peuvent être positives :
c’est le cas des transferts de compétence. Cependant, dans la majeure partie des cas, la
croissance intensive des activités industrielles a provoqué des externalités négatives, tant
sur le plan environnemental (diminution de la biodiversité, émissions de gaz à effet de
serre) que social (exclusion d’une part croissante de la population de l’emploi et des
services).
Alors que le traitement de ces externalités négatives relevait de la responsabilité
des pouvoirs publics, il est désormais partiellement à la charge des entreprises puisque
celles-ci mettent en place des mécanismes d’identification et de maîtrise de leurs impacts.
L’internalisation des externalités négatives par les entreprises implique une remise en
cause fondamentale du modèle économique contemporain, et notamment, le
renouvellement du regard sur la performance. En effet, la majeure partie de ces
externalités n’est identifiable que sur le long terme, ce qui oblige les entreprises à intégrer
le long terme dans l’évaluation de leur performance. De plus, les externalités possèdent
un caractère localisé : elles affectent les acteurs sociaux, économiques et
environnementaux du territoire, impliquant un plus fort ancrage territorial des entreprises.
Des implications pour l’aménagement urbain
Les entreprises, et le modèle économique qu’elles incarnent sont étroitement liés
aux stratégies de développement urbain, et aux choix de prospection. En effet, les
entreprises pèsent particulièrement sur l’aménagement urbain et la production de la ville,
par le biais des services qu’elles offrent et ceux dont elles ont besoin. Il est donc essentiel
de mettre en place de nouveaux dispositifs d’innovation territoriale dans lesquels le rôle de
18
l’entreprise deviendrait explicite quant à sa responsabilité et à sa participation à la
production de la ville durable. Le renouveau du registre de la performance des entreprises
crée ainsi de nouveaux enjeux pour l’aménagement urbain.
Les institutions territoriales ont également développé une conscience aigüe des
mutations nécessaires et cherchent à traduire les principes fondamentaux du
développement durable dans l’aménagement de leur territoire. Cette dynamique implique
la quête d’un mieux vivre ensemble et d’une réduction des inégalités sociales, ainsi que la
prise en compte des enjeux environnementaux, tout en conservant une dynamique
économique prospère. Depuis plusieurs années, de nouveaux modes de développement
urbain tentent d’apporter des réponses à ces enjeux, mais ils restent essentiellement
articulés sur des critères techniques et environnementaux. Ce renouveau de
l’aménagement urbain promeut des formes urbaines denses, ainsi que la mixité sociale et
fonctionnelle, c’est-à-dire un développement urbain fondé sur la proximité et l’accessibilité
aux services. De plus, les modes de transport doux et la multi-modalité sont la priorité des
politiques urbaines de transport. La promotion du lien social, le partage de l’espace public
et le développement de l’éco-citoyenneté font également partie des nouveaux objectifs de
l’aménagement urbain et incitent donc à développer les mécanismes d’implication des
citoyens. Enfin, la réduction et la gestion optimales des fluides et des déchets, de même
qu’un rapport renouvelé aux les ressources et la nature sont encouragés. En d’autres
termes, puisque la gestion des flux liée à l’offre de service doit être repensée, de
nouveaux modes de production de la ville émergent.
Cela implique une nouvelle conception du développement urbain : tous les acteurs
du territoire sont appelés à un certain volontarisme politique et à la coopération. Il s’agit
d’identifier des enjeux communs aux acteurs du territoire et aux acteurs économiques afin
qu’ils s’engagent conjointement dans les stratégies de développement durable pour faire
émerger la ville durable. C’est pourquoi le changement des pratiques des professionnels
de l’aménagement et des collectivités territoriales contient une partie de la réponse aux
crises actuelles.
Pour tenter de répondre aux dysfonctionnements des sociétés et économies
contemporaines, et structurer le renouveau de l’aménagement urbain, certaines théories
ont émergé. Développées ci-dessous, elles guideront l’analyse menée dans ce rapport
dans la mesure où elles trouvent un écho particulier dans les quartiers, et particulièrement
les écoquartiers.
19
1. Des théories qui suggèrent de nouveaux modes de production de la ville
a) Du modèle industriel fordien à l’économie de la fonctionnalité (EF)
De nouveaux modèles de production se sont développés afin de palier les
externalités négatives générées par le modèle industriel fordien, et de s’approcher du
nouveau registre de la performance. Parmi ces modèles figurent le modèle industriel
propre, le modèle de l’écologie industrielle, le modèle de l’économie servicielle et le
modèle de l’économie de la fonctionnalité. Si les trois premiers semblent apporter une
réponse partielle à l’intégration des stratégies de développement durable dans notre
économie, le modèle de l’économie de la fonctionnalité suggère une opportunité
intéressante de repenser l’offre de services dans une perspective durable (CERRD, 2011).
Des réponses partielles aux externalités négatives
Le modèle industriel propre
Le modèle industriel propre suggère une mise en conformité de l’activité productive
avec les nouvelles normes environnementales et les objectifs de réduction des gaz à effet
de serre (GES) énoncés aux niveaux national et supranational. Ce modèle implique donc
un effort d’innovation dans la conception, afin de produire plus « propre » et de développer
des modes de productions et des biens moins polluants et recyclables. Cela incite
également à l’utilisation accrue des énergies renouvelables. Par exemple, la marque de
voiture Renault a produit un nouveau modèle, ZOE, dont le fonctionnement et le cycle de
vie ont été conçus dans une logique d’économie des ressources et de limite des
émissions des GES.
Il existe plusieurs leviers pour tendre vers ce modèle. La connaissance en est le
premier support, dans la mesure où elle conditionne l’innovation technologique. Une
règlementation de la concurrence intégrant les externalités environnementales négatives
et des dispositifs fiscaux incitatifs sont également nécessaires afin de favoriser des
comportements vertueux, qu’ils soient individuels ou collectifs, privés ou publics. Les
consommateurs sont donc appelés à consommer des produits plus respectueux de
l’environnement. Souvent, ceci leur est signalé et fait l’objet d’une stratégie marketing
importante des entreprises auprès des consommateurs. Dans une certaine mesure, ce
20
modèle introduit une responsabilisation du consommateur car celui ci peut désormais
privilégier un bien pour son aspect « écologique ».
Toutefois, le modèle industriel propre ne modifie pas la logique même de
fonctionnement de l’économie, dans la mesure où il repose toujours sur la vente d’un
maximum de produits, même plus propres. De plus, ce modèle n’implique pas de
changement de gouvernance économique ; aussi le primat du bénéfice financier est-il
maintenu. Ce modèle propose bien un changement de trajectoire technologique, prenant
en compte les externalités environnementales, mais il demeure en continuité avec le
modèle fordien et n’intègre pas pleinement toutes les dimensions du développement
durable et de la performance telle qu’elle a été définie plus haut. Ainsi, si le modèle
industriel propre tend vers la maîtrise des externalités environnementales, il maintient une
logique de consommation des ressources et des espaces peu économe.
Le modèle de l’écologie industrielle
Ce modèle correspond à celui de l’économie circulaire. Il propose de concevoir
l’ensemble du cycle de production et du cycle de vie des produits afin que les déchets de
certains acteurs puissent être recyclés et devenir les ressources d’autres acteurs. Ce
modèle innove sur le plan de la gouvernance territoriale puisque qu’il n’est pas
uniquement entrepreneurial, mais il propose également une modification des rapports
entre acteurs sur un territoire donné. Chaque acteur deviendrait à la fois consommateur et
producteur de ressources pour d’autres acteurs de l’économie. Le réseau Biotop, créé en
2011 par le club d’entreprises de la zone industrielle de Périgny (proche de la Rochelle),
regroupe 250 entreprises et 7500 salariés autour d’une démarche d’économie circulaire.
Après avoir établi un diagnostic précis des flux entrants et sortants de la zone, une
mutualisation des déchets a été organisée, après avoir constaté que les déchets des uns
pouvaient devenir les matières premières des autres. L’ensemble des sacs plastiques de
la zone a pu être réutilisé pour la production de tubes PVC neufs par l’entreprise Périplast
et les sacs d’importation de café en toile du torréfacteur Merling sont réutilisés en tant que
toiles horticoles pour toitures végétalisées par l’Atelier du Végétal.
Le modèle de l’écologie industrielle implique la mutualisation de certains
investissements et surtout de certaines ressources. Il incite donc à créer des partenariats
de long terme, au delà des relations purement marchandes.
21
Cependant, le modèle de l’économie circulaire n’implique pas de découplage entre
croissance et flux de matières, ce qui limite sa capacité à répondre pleinement aux enjeux
du développement durable.
Le modèle de l’économie servicielle
Ce modèle propose de ne plus mesurer la valeur ajoutée sur la quantité de
production et de ventes d’un bien, mais plutôt sur la vente d’un service fourni par ce bien.
Il s’agit donc de passer de la vente d’un bien à celle d’une performance d’usage.
L’entreprise serait donc propriétaire d’un stock de biens qui seraient mis en location pour
la vente du service qu’ils rendent. L’entreprise possède donc ses équipements, et
demeure garante de leur durée de vie, de leur maintenance et de leur recyclage. Les
systèmes de vélos en libre service tels que les Vélib’ à Paris ou les Vélhop à Strasbourg
sont un exemple d’économie servicielle.
Ce modèle permet un réel découplage entre flux de matière et croissance,
l’échange marchand relevant désormais de l’accès et de l’obtention de résultats en
matière de performance d’usage et de satisfaction d’un besoin.
Ainsi, il intègre partiellement les trois axes du développement durable en prenant
en compte les externalités en les intégrant aux usages et aux modes de vie. Les clients
deviennent donc coproducteurs de services. Cependant, le modèle de l’économie
servicielle ne prend pas en compte l’ensemble du cycle de vie des produits et surtout
n’incite pas à la mise en place de nouvelles formes de gouvernance territoriale.
L’économie de fonctionnalité
Dans la lignée de ces modèles, en rupture avec les principes du capitalisme
contemporain et le caractère financiarisé et quantitatif de la croissance, l’économie de la
fonctionnalité constitue une alternative qui incite les acteurs à modifier leur rapport au
territoire infranational et à repenser leur conception de la croissance. En cela, l’économie
de la fonctionnalité dénonce une fausse proportionnalité entre croissance et
consommation de ressources et incite à optimiser l’utilisation des biens et des services.
Dans son ouvrage Age of Access (2000), Jeremy Rifkin suggère également que la notion
de propriété est progressivement remplacée par celle d’accès. Ainsi, de nombreuses
entreprises ne vendent plus des biens, mais se regroupent et partagent des ressources
22
collectives afin de créer un vaste réseau d’accès aux services. Rifkin postule la mise en
place d’une nouvelle économie de réseaux, plus que de biens.
Suivant cette logique, l’économie de la fonctionnalité représente un stade ambitieux
de l’économie servicielle puisqu’elle intègre pleinement les composantes
environnementale et sociale du développement durable, ainsi que les externalités
négatives. Ce modèle est fondé sur la conception de solutions qui intègrent les produits et
les services dans une même stratégie, afin de répondre aux besoins et aux attentes des
ménages et des entreprises ; tout en incluant les exigences environnementales et sociales
dans sa démarche. L’économie de la fonctionnalité place la gestion des richesses
existantes au centre de son modèle, que ce soit sous la forme de produits, de
connaissances ou de capital naturel. L’objectif est de créer une valeur d’usage maximisée,
sur une durée la plus longue possible, en consommant le moins de ressources matérielles
et d’énergie.
Michelin a par exemple remplacé la vente de pneus par la vente des kilomètres
parcourus grâce à un pneu en combinant d’autres services sur cette question de
déplacement tels que le conseil sur l’entretien et la maintenance du pneu. Michelin ne
vend plus de pneus mais prend en charge le cycle de vie du produit : ajustement du
gonflage réduisant la consommation, conseil en conduit économe, etc.
L’économie de la fonctionnalité s’organise ainsi autour de sphères fonctionnelles
qui traduisent la notion d’usage et de besoin. Par exemple, pour les ménages, les sphères
en questions peuvent relever de la mobilité, de la santé, du confort thermique. Pour les
entreprises, il s’agit plutôt de la gestion de l’énergie, de la maintenance, de la bonne
circulation de l’information ou de la diminution des flux de matière. Par conséquent,
l’approche fonctionnelle ne peut être adoptée que dans un cadre territorialisé, adapté à un
contexte donné et à des usagers particuliers.
Il s’agit donc d’élargir le périmètre d’un questionnement initial (par exemple : le
moyen de transport), à une sphère intégrant d’autres fonctionnalités et prenant en compte
les axes du développement durable de manière systémique (par exemple : la mobilité et la
multi-modalité). La création de valeur repose alors sur des solutions déconnectées des
flux de matière et une forte territorialisation des solutions offertes.
Pour ce faire, l’économie fonctionnelle repose sur deux leviers principaux. Le
premier consiste en la mobilisation de ressources immatérielles telle que la confiance, la
compétence, la pertinence. Les dynamiques de coopération sont un second levier,
qu’elles interviennent au sein des entreprises ou qu’elles rassemblent plusieurs acteurs
23
différents. De nombreuses solutions peuvent être imaginées pour répondre à des besoins
spécifiques avec des contrats sur mesure intégrant liberté, flexibilité et adaptabilité de la
performance d’usage. De plus, les nouvelles technologies de la communication rendent
l’échange de services aisé, dans la mesure où elles créent de nombreuses plateformes
pour échanger. L’économie de la fonctionnalité implique une logique de recyclage, de
valorisation des objets et de réduction des coûts opérationnels. Elle incite également à
prendre en compte les différentes temporalités d’usage entre les populations.
L’objectif est donc d’identifier les externalités positives qu’une activité peut créer
pour le territoire afin d’assurer la performance et la rentabilité économique du modèle. Des
opérateurs de transport pourraient ainsi être rémunérés pour avoir concouru à éviter des
déplacements et à décongestionner certains espaces urbains. Les pouvoirs publics sont
alors en charge de concevoir un modèle de développement à la fois à l’échelle
microéconomique – celle de l’entreprise -, et également à l’échelle macroéconomique –
celle du territoire.
Ces nouveaux modèles - l’économie de la fonctionnalité en particulier - incitent à
penser de nouveaux services et surtout de nouveaux modes de gouvernance de ces
services. Il s’agit de remplacer la consommation pure de biens par la performance
d’usages, impliquant un fort ancrage territorial, une déconnexion de la croissance et des
flux de matière, et un renouveau des relations entre les acteurs du territoire et de
l’économie. Le modèle de l’économie de la fonctionnalité résonne donc particulièrement
dans notre analyse des services développés au sein des écoquartiers, et d’autant plus
dans les modalités de mise en place de ces services.
b) L’ESS, un terrain fertile à l’origine de services innovants
L'Economie Sociale et Solidaire (ESS) suggère de nouvelles pratiques, conciliant
efficacité économique et utilité sociale. La crise de notre mode de fonctionnement actuel,
alimentée par des délocalisations et licenciements, et marquée par la précarité de l'emploi
et des disparités sociales accrues, favorise le développement de ce modèle alternatif, qui
ancre la performance économique dans l'humain. Cela passe par la restructuration
nécessaire des rapports sociaux via la gestion mutualisée et collective de la structure
économique.
24
Cependant, si elle est innovante dans son mode de fonctionnement, l'ESS ne se
place pas en opposition à l'économie de marché classique, mais plutôt en complément.
Les penseurs de ce modèle, tels que Jean-Louis Laville, reprochent pourtant à l'économie
dite « néoclassique » d'avoir progressivement déconnecté les relations économiques de la
sphère du vivant et du social, qui sont naturellement et intrinsèquement liées (Eme et
Laville, 2004). Ainsi les structures se revendiquant de l'ESS se fondent sur la libre
adhésion des membres qui sont des partenaires associés au projet. La gestion se veut
donc participative et démocratique, une voix correspondant à une personne physique,
contre la dématérialisation et la deshumanisation de l'économie et de la finance.
Considérant sa portée sociale et son objectif de satisfaction d'intérêts collectifs, le moteur
de l'ESS n'est pas la maximisation du profit. Elle fonde ainsi son éthique sur la solidarité et
une activité à la lucrativité limitée. Dans la pratique, l'ESS prend la forme de structures
diverses, telles que des coopératives, mutuelles, des associations ou encore des
fondations. Celles-ci sont gérées collectivement, selon une répartition équitable des
pouvoirs, et favorisent la réinjection de la plus-value résultant de leurs activités dans des
projets relevant de la même logique solidaire et revêtant la même visée sociale.
L'investissement est également privilégié. Cette double utilité économique et sociale est
supportée par des subventions publiques, complétées par des sources de financement
propres (activités complémentaires à l’activité sociale ou financements privés).
Les caractéristiques de gestion solidaire et collective de l'ESS la rendent
particulièrement pertinente dans le cadre d'une action territorialisée, à l'échelle du quartier.
Beaucoup de structures offrant des services de proximité ont ainsi adopté ce modèle
équitable pour mode de gestion. La sphère des services, aussi bien collectifs
qu'individuels (« à la personne »), est particulièrement favorable à son implantation, en ce
qu'elle fonde souvent son action économique sur des rapports sociaux directs, et donc de
solidarité. La confiance est une notion intrinsèque à l’offre de services, en particulier pour
ceux délivrés à domicile, tels que la garde d'enfant ou l'aide aux personnes âgées.
L'économie de services poursuivant son développement face aux nouveaux défis
sociétaux, elle suggère un dévoilement ainsi qu'une réponse à la demande « cachée » de
la population (Eme et Laville, 2004). Ainsi la production de services passe par la création
d'une structure d'expression des besoins, laquelle conduira ensuite à la production de
nouveaux services émergeant directement de ce dialogue. La création de ces « espaces
publics de proximité » (Eme et Laville, 2004) permet une offre subtilement ajustée à la
demande.
25
C’est pourquoi l'ESS évolue aujourd'hui vers une base de plus en plus territorialisée,
en réponse à la forte augmentation de la demande de services impliquant un contact
relationnel de proximité. En effet, le territoire et l'ESS se développent parallèlement et se
soutiennent réciproquement dans une logique de solidarité, qui fonde de nouvelles
stratégies visant à améliorer le vivre ensemble à l'échelle locale (Demoustier, 2006). Le
développement local cherche ainsi à combiner performance économique et
développement social. Ce dernier volet procède entre autre de la création et du maintien
d'une identité territoriale, à laquelle l'ESS contribue également en développant de
nouveaux espaces de solidarité. Le secteur associatif s'est avéré souvent pionnier dans
ce domaine, se faisant relais des nouveaux besoins de proximité par la création de
nouvelles structures répondant aux besoins sociaux d'une population plus large. La
demande d'amélioration du cadre de vie du quartier a ainsi entraîné le développement de
différents services à la collectivité fournis par des structures se revendiquant de l'ESS. La
distinction entre services municipaux et associatifs est ainsi devenue plus floue, quand ils
ne sont pas complètement imbriqués, comme dans le cas de l'action des Régies de
Quartier dans l'espace public. Ces sociétés coopératives permettent ainsi de faire
converger les intérêts des différentes parties prenantes du territoire : municipalité, bailleurs
sociaux, usagers et habitants. L'ESS possède également un rôle très important dans la
création d'emplois à l'échelle locale : les emplois locaux liés on un taux de croissance de 4
à 5% par an (Demoustier, 2006). Selon son principe de solidarité et sa visée sociale, elle
favorise et facilite souvent l'accès au marché du travail des personnes en difficulté ou peu
qualifiées par le biais d'entreprises d'insertion. L'ESS voit aussi son application dans la
création de coopératives qui aident à la création d'entreprise tout en promouvant son
modèle de gouvernance économique collective et équitable.
Actrice de la revitalisation du territoire par sa participation à l'émergence de
nouveaux services et modes de production innovants à la fois économiquement,
socialement, et permettant la prise en compte des problématiques de développement
durable à l'échelle locale, l'ESS constitue l'un des piliers théoriques fondamentaux de
notre recherche. Ses applications seront également des points d'intérêts particuliers à
étudier et articuler à notre investigation sur les nouveaux modes de gestion qui favorisent
l'émergence de nouveaux liens socio-économiques plus durables dans l'espace urbain.
26
c) L’holarchie, une piste de reproductibilité ?
L’Holon (du grec ὅλον, ‘en entier’), terme introduit par l’écrivain hongro-britannique
Arthur Koestler, est une entité, existant de manière autonome, mais faisant également
partie d’un système plus large. L’holarchie, par conséquent, représente un réseau
d’holons (Koestler, 1967).
Partant de ces notions, les systèmes complexes tel que des écosystèmes, mais
aussi des créations humaines telles que la ville, peuvent s’appréhender comme réseaux
d’holons, donc comme holarchie, plutôt que comme une simple addition d’unités (quartiers
dans le cas de la ville) ou un ensemble unitaire. La ville peut être interprétée comme un
organisme social (Schnore 1966) et un écosystème (Berkowitz et al, 2003). De plus,
l’espace urbain fonctionne en réseau et peut être analysée en tant que tel (Neal, 2012).
L’holarchie rassemble les notions d’organisme complexe et de réseau et souligne le fait
que chaque Holon constitue un réseau à part entière, tout en faisant également partie d’un
réseau plus large (DeKay, 2011).
Le système urbain comme Holarchie
Le système urbain étant constitué de plusieurs entités de dimension inférieure,
l’ensemble de la ville ne peut pas fonctionner et encore moins s’améliorer si les plus
petites entités ne sont pas elles mêmes prises en charge et améliorées à leur échelle. Des
tentatives d’imposer un ordre à grande échelle qui ne prendrait pas en compte ces plus
petites entités seraient vouées à l’échec.
L’approche holarchique permet finalement de mieux prendre en compte la nature
complexe des systèmes urbains et de dépasser la vision réductrice d’un dualisme qui
revient à considérer la ville soit comme constituée d’entités autonomes soit comme une
entité indivisible. Chaque échelle fait référence à un niveau de l’organisation urbaine
holarchique, et chaque niveau d’holarchie existe à sa propre échelle. Un quartier est donc
en même temps une entité en soi, interdépendante et interconnecté en réseau avec
d’autres entités a son échelle, c’est-à-dire de quartiers, mais aussi une part d’un tout à
une échelle supérieure, c’est-à-dire de la ville ou de l’agglomération urbaine (DeKay,
2011).
Les modèles économique et de développement urbain se doivent désormais
d’intégrer la notion subjective de bien être (Stiglitz et al., 2009). Ainsi on ne peut prétendre
27
créer des services à vocation universelle, qui fonctionneraient de manière identique sur
des territoires différents. En revanche, l’holarchie pourrait être un modèle de
reproductibilité des services étudiés, axé sur l’identité et les besoins propres des territoires.
Ainsi un service pourrait être développé de façon autonome et adapté à différents
territoires, mais serait partie intégrante d’un plus large réseau d’entités similaires qui
permettrait d’optimiser le partage de connaissances et de solutions à une échelle plus
globale.
2. Le quartier comme première échelle d’application
a) Emergence des thématiques durables à l’échelle du quartier
L’origine de la contestation de l'urbanisme fonctionnaliste
Face à la centralisation du pouvoir de décision ainsi qu'à la standardisation de
l'aménagement urbain, caractéristiques d'un urbanisme rationaliste, divers mouvements
de résistance ont émergé à travers l’Europe dans les années 1970. Leur objectif était la
réappropriation de l'espace urbain par ses habitants. Il s'agissait alors de protester contre
la destruction de quartiers populaires et anciens pour ériger des tours d'habitation et
bureaux, dans une approche moderniste de la ville. De même, l’inadéquation ou l’absence
de certains services dans certains quartiers a produit une forte remise en cause de ce
modèle. Le mouvement a rapidement pris de l'ampleur, rassemblant militants et habitants
dans plusieurs villes européennes, traduisant un rejet plus global des modes
d'aménagement urbain alors en vigueur, inspirés de l'urbanisme fonctionnaliste à l'origine
des grands ensembles. Emergeant après-guerre pour répondre au besoin fondamental de
la population en terme de logement, il est caractérisé par une planification rationnelle et
standardisée, donnant naissance à des espaces très éloignés des usages et ne
ressemblant en rien à des « quartiers » tels que vécus par les habitants. Les critiques
émises à cette époque s'inscrivent notamment dans une perspective marxiste, s'érigeant
contre un urbanisme aliénant qui reproduit les codes de l'exploitation capitaliste, réduisant
le quartier à un espace fragmenté, individualiste, fonctionnel et déshumanisé, dans la
lignée de la politique de décentralisation industrielle menée dans les années 1960. C'est le
philosophe marxiste Henri Lefebvre, qui, le premier et de manière avant-gardiste, perçoit
28
et théorise cette tendance à la « ville métallique » et technocratique, et pense en réaction
le « droit à la ville » qui insiste sur la valeur de la ville comme espace avant tout social. Il
revendique l'accès à une certaine qualité de vie et aux avantages offerts par « l'expérience
urbaine » pensée comme « projet » (1969). Comme le résume Laurence Costes : « il
implique un projet de démocratie et de renforcement de la société civile, il stipule le droit à
l'accès à la centralité urbaine, à la vie urbaine, aux lieux de rencontres, d'échanges, de
rassemblement, au « ludique ». La mise en œuvre de ce droit devait permettre
l'avènement d'une société urbaine qui mérite le nom de « civilisation » au lieu d'en être la
négation » (2010).
Une nouvelle conception du quartier développée par les régies de quartier
En France, le mouvement de mai 68 porte ces revendications et participe à
l'émergence d'espaces collectifs autogérés et communautaires, dans lesquels les squats
d'anciens immeubles ouvriers du 19e arrondissement de Paris s'inscrivent. Ces
appropriations militantes tout comme les divers projets (coopératives, etc.) échappant aux
logiques de marché traditionnelles et rejetant les objectifs de rentabilité financière
témoignent de la revendication d'un rapport alternatif à la ville, qui ébranle peu à peu le
système d'aménagement territorial existant.
Parmi ces expériences, on compte la naissance des Régies de quartier, d'abord
initiée par les habitants d'un quartier populaire de l'Alma Gare à Roubaix au début des
années 1980. La structure-mère a vu le jour comme tentative de solution au conflit
émergeant alors entre habitants et autorités publiques à propos de la réhabilitation
d'espaces dégradés dans le quartier. Il s'agit d'imposer la prise en compte par l'urbanisme
des usages et de l'espace tel que vécu au quotidien par la population, contre l'approche
moderniste techniciste perçue comme une domination politico-administrative (Eme, 2004).
Ces structures, qui empruntent le terme de « régie » à l'univers du théâtre (au sens de
mise en scène technique des acteurs), sont des entreprises de services territorialisées et
autogérées qui agissent à l'échelle du quartier afin d'améliorer la gestion de l'espace
public ainsi que l'insertion professionnelle des habitants, dans un objectif de
développement social de quartiers sensibles (Eme, 2004).
Prenant initialement le parti de défendre l'autonomie pure au sein de la
gouvernance du quartier, elles adoptent aujourd'hui une approche davantage centrée sur
la coproduction de politiques publiques, en partenariat avec les institutions publiques
29
locales et les bailleurs sociaux, tout en mettant en pratique les principes de la démocratie
participative. Dès les années 1990, le Comité National des Régies de Quartier (CNLRQ)
qui coordonne nationalement l'action des différentes associations, se revendique de l'ESS.
L'un des principes clé de la genèse des régies est fondé sur la réappropriation de l'espace
public par les habitants, la production de services par et pour la communauté du quartier
dans son ensemble. Aujourd'hui les régies de quartier travaillent de plus en plus sur des
services de promotion du développement durable dans l'optique d'une mutation des
comportements.
L'émergence de préoccupations écologiques à l'origine des écoquartiers
C'est donc du mouvement de contestation de l'urbanisme rationaliste et techniciste
d'alors qu'émerge une conception nouvelle et alternative de l'aménagement urbain, appelé
bientôt « urbanisme de projet », selon la terminologie de Lefebvre. Dans les années 1990,
l'écologie imprègne peu à peu les projets urbanistiques, alors que les mouvements
alternatifs « verts » se développent en réaction à l'ère consumériste à travers la diffusion
du discours de la décroissance, ou la mise en place de jardins de proximité autogérés. Le
quartier s'avère rapidement être l'échelle la plus pertinente pour initier la transition vers un
mode de vie urbain plus durable. Il s'agit de répondre aux défis globaux par le local. C'est
en effet la politique locale qui a l'impact le plus concret et visible sur la vie quotidienne des
habitants, se faisant une vitrine efficace de la politique environnementale de la ville. Dans
le développement des politiques publiques, l’échelle du quartier est une étape préalable à
la généralisation à l’échelle de la ville. Ainsi, l'Agenda 21 adopté par les chefs d'Etat de
173 pays lors du Sommet de Rio, qui pose un certain nombre d'objectifs et de
recommandations relatifs au développement durable, est destiné à s'appliquer
prioritairement à l'échelle locale. C'est également à cette échelle, relativement réduite, qu'il
est possible de mettre en place des mesures effectives pour promouvoir la participation
citoyenne dans les processus décisionnels d'aménagement urbain. Il est en effet de plus
en plus communément admis que les usagers d'un espace doivent donner leur avis et
partager leur expertise pratique avec les concepteurs et aménageurs.
Les écoquartiers qui naissent bientôt en Europe (B001 à Malmö, BedZed à Londres,
Vauban à Fribourg ou encore GWL-Terrein à Amsterdam) suivent cette logique
d'exemplarité sociale et environnementale. Ils se veulent laboratoires de la ville durable, et
prennent forme dans une logique expérimentale. A l'origine de cette tendance, on trouve
30
la prise de conscience de la nécessité de limiter l'impact de l'urbanisation sur
l'environnement. Il s'agit d'éviter l'étalement urbain, contre la tendance au développement
des banlieues. L'espace disponible à la construction est plus restreint, il faut donc l'utiliser
plus intensivement mais surtout mieux. L'écoquartier se trouve dans la lignée d'une vision
renouvelée du quartier comme véritable lieu de vie et d'interaction sociale, offrant une
certaine qualité d'existence : une « entité socio spatiale, circonscrite mais ouverte,
envisagée comme le point fixe à partir duquel se structurent les mobilités et les multiples
réseaux de sociabilité, du proche au lointain » (Da Cunha, 2013).Il inscrit la démarche
écologique dans un espace urbain repensé. Comme le note Thierry Vilmin, il s'agit de
mettre en pratique des « plans masses économes en surfaces et optimisant l'orientation
des bâtiments en fonction du soleil et du vent, inventer un cycle de l'eau qui limite au
maximum les effluents, une gestion des déchets qui facilite les récupérations et diminue
les coûts de collecte, une insertion de la nature en ville qui favorise la biodiversité, tout en
mettant les espaces récréatifs à portée immédiate des citadins, une production localisée
d'énergie renouvelable, une priorité aux modes doux de déplacement et aux transports
collectifs cantonnant le recours à la voiture et l'envahissement des parkings. » (2009).
L'auteur ajoute que l'écoquartier apparaît comme une réponse « concrète, cohérente et
ambitieuse » correspondant au changement de paradigme proposé par le développement
durable. Les premiers projets français d'écoquartiers émergent seulement dans les
années 2000, mais le concept connait rapidement un réel engouement. Présenté comme
une valeur ajoutée dans la compétition entre villes (à travers la démarche EcoCités par
exemple) et intégré à la politique de développement durable plus globale du
gouvernement, l'écoquartier fait des émules dans les collectivités territoriales. Pour réguler
et donner un cadre de référence à la fois politique et juridique à la construction, le label
national EcoQuartier voit le jour en 2012.
b) Le débat sur la question des usages
Une telle dynamique d’intégration des problématiques durables au sein des
quartiers interroge nécessairement la question de la place et du rôle des différents acteurs
dans la conception et le fonctionnement des quartiers durables. Les théories énoncées
précédemment, ainsi que le développement historique des quartiers suggèrent une
évolution des modes de vie pour les habitants et les usagers, ainsi que des modes de
31
gestion du quartier, pour un large ensemble d’acteurs. La question du rôle des habitants
est particulièrement centrale car l’appropriation par les populations des impératifs du
développement durable implique de questionner les modes de vie c’est à dire les
pratiques, mais également les styles de vie – qui font référence à la notion de
concernement (Faburel et Tribout, 2011). Si les modes de vies sont liés à la
consommation de biens, de services et d’espaces, les styles de vie appellent à un
engagement concret et conscient de la part de la personne, à une intentionnalité de
l’action. Juan Salvador explique, « Si le mode de vie est identité́ de la pratique (...) et
(concerne) une pluralité́ d’individus (dont les motivations pour une même pratique peuvent
être différentes), le style de vie correspond à l’identité́ de l’individu (ou d’un nombre très
restreint d’individus) par la pluralité́ et l’originalité́ combinée de ses (leurs) pratiques »
(1991).
Deux visions s’opposent quant à l’intégration des principes du développement
durable aux modes de vie, entre les partisans d’une implication passive des habitants, et
ceux d’une implication active. Selon la conception passive, les services ne devraient pas
entrainer de modification des styles de vie, mais uniquement des modes de vie. Ainsi, la
mise en place de technologies « douces » permettrait d’obtenir une meilleure performance
écologique sans que les usagers n’en aient nécessairement l’intention, sans modifier leur
style de vie. La technique serait donc uniquement le levier d’une amélioration de la
performance des produits et ainsi de la performance écologique. En revanche, l’approche
active suggère que la mise en œuvre du développement durable nécessite une démarche
consciente des acteurs, et donc une réelle modification de leur style de vie. Il s’agit donc
bien de répondre aux besoins autrement, en créant de nouveaux usages par le biais des
services. Dans cette perspective, l’environnement apparait comme un facteur mobilisateur,
susceptible de provoquer un engagement conscient des usagers qui modifieraient leurs
pratiques en conséquence.
De nombreux écoquartiers sont les témoins de l’approche passive, ils transcrivent
l’objectif de créer un quartier écologique sans avoir recours à une évolution consciente
des pratiques et des usages des résidents et des usagers. Ils permettent donc de produire
des modes de vie plus durables sans que les populations ne s’intéressent particulièrement
à l’environnement ni ne changent leurs pratiques. C’est par exemple le cas de GWL
Terrein, à Amsterdam, où les bâtiments ont été conçus dans le but d’améliorer l’efficacité
énergétique du quartier, sans que les habitants n’aient à modifier leurs pratiques, ni même
à apprendre à utiliser de nouvelles technologies. Ainsi, les pratiques des populations ne
32
révèlent pas forcément de sensibilité environnementale et le caractère écologique du
quartier n’est pas nécessairement un facteur de choix de résidence. Le caractère
écologique d’un quartier, s’il est uniquement véhiculé par le vecteur technique, n’induit pas
forcément d’évolutions tangibles ni conscientes des pratiques et des comportements
quotidiens des populations.
De plus, les innovations techniques écologiques ont pu poser problème dans la
mesure où leur production et leur usage sont désormais déconnectés d’une logique
militante écologique. Vincent Renauld défend l’idée que des problèmes de fonctionnement
sont apparus sur des équipements écologiques dans les espaces publics expérimentaux
car ils étaient utilisés par des usagers « non militants », non sensibilisés à la conscience
écologique (2012). Il ajoute que la rupture entre les dispositifs techniques et les usages
sociaux est récurrente, sinon systématique et crée ainsi un décalage entre les nouveaux
instruments écologiques et les pratiques des habitants. Il postule donc que l’objet
technique doit être « naturalisé » au quotidien, afin d’atténuer la distance entre technique
et usages.
Si l’on suit cette logique, la pédagogie émerge comme un moyen de sensibiliser,
éduquer les usagers et habitants. En effet, peut-on réellement parler de quartier durable si
aucune action n’est menée dans le but de sensibiliser les populations à d’autres pratiques
et inciter les habitants à d’autres styles de vie ? L’implication des habitants est reconnue
pour être porteuse d’un savoir pratique, d’une expérience empirique du quartier,
nécessaire aux projets urbains. Les enjeux du développement durables ne peuvent pas
être appropriés par les habitants et usagers s’ils sont imposés, sans prendre en compte le
contexte socio culturel. Dans certains quartiers, de fortes actions de sensibilisation sont
donc menées, afin d’intégrer les populations dans la réalisation des aménagements et des
objectifs du développement durable. Par exemple, des actions de sensibilisation au tri des
déchets, ou encore à la consommation d’énergie ont pour but de développer une
conscience écologique active.
Cependant, Vincent Renauld développe l’idée d’une subversion des usages pour
répondre au projet social : « Il ne s’agit pas pour la figure de l’habitant d’édifier de
nouveaux environnements mais d’utiliser ceux produits pour lui selon les modes d’emplois
fournis par les experts en savoir-vivre. ». La vie privée serait ainsi placée sous contrôle
exogène pour la mise en œuvre de techniques écologiques. Selon Vincent Renauld, la
fabrique des écoquartiers s’émancipe donc largement des usages sociaux pour se
33
concentrer sur un renouvellement de l’offre technique ; elle s’apparente à une tentative
d’ajuster les comportements sociaux aux exigences des innovations techniques.
Il existe donc un réel débat sur la notion des usages, et il est difficile de déterminer
l’équilibre entre innovation technique, technologie douce et modification des
comportements. Le service a-t-il vocation à encourager une modification des usages, ou
doit-il s’y adapter ? Est-ce la technique qui doit s’adapter aux usages, ou l’inverse ?
L’analyse ci après permettra de développer ce débat, à la lumière des services rencontrés
sur le terrain.
II. QUELS SERVICES A L'ECHELLE DU QUARTIER PEUVENT ETRE LES PILIERS D'UN NOUVEAU PARADIGME URBAIN?
1. Repenser l’offre de services
L’économie de services est aujourd’hui majoritairement inscrite dans la logique
productiviste du modèle fordien industriel, suivant la même définition quantitative de la
performance, et les mêmes objectifs de rentabilité financière. Cependant, la progressive
remise en question de ce modèle, invitant à évoluer de la consommation d’un bien à celle
d’un service voire de l’usage d’un service, permet de repenser la notion même de service
et d’en modifier l’offre. Ainsi, l’intégration de certaines valeurs subjectives au registre de la
performance implique de redéfinir la notion même de service et de bien. Il apparaît que la
valeur est proportionnelle à l’intensité d’usage des biens, qu’elle suggère des stratégies
collectives de gestion, et qu’elle ouvre la voie à de nouveaux types de partenariats.
De plus, les mutations de la société urbaine ont généré de nouveaux besoins et par
conséquent une demande nouvelle de services. Les usages du temps et les pratiques
quotidiennes ont évolué, amenant des changements de modes de vie. D’une part,
l’évolution des modèles familiaux a conduit à une individuation et diversification des
modes de vie. Par conséquent, les individus ont moins recours aux réseaux subsidiaires
et communautaires pour répondre à leurs besoins et problèmes quotidiens, ce qui génère
une forte demande pour de nouveaux services à la personne. D’autre part, la mutation des
34
temps sociaux, impliquée notamment par l’extension du temps libre et l’augmentation de
l’espérance de vie, ont largement fait évoluer les temporalités de la vie urbaine. Il faut
donc penser différemment les pratiques temporelles du territoire, des services et des
équipements. L’urbanisation elle-même a induit des transformations substantielles :
l’étalement urbain a généré des mobilités sur de longues distances ainsi qu’une
multiplication et une individualisation des modes de déplacements, entraînant congestion
et pollution atmosphérique.
Aussi, selon Josée Landrieu (2007), « les villes et les habitants [...] souffrent [...]
d’un déficit de sens, de reconnaissance et d’humanité. ». L’intégration des enjeux du
développement durable à l’économie est alors perçue comme une opportunité de redéfinir
les modalités d’offre de services, notamment dans leur nature et leur gouvernance. Plus
particulièrement, les écoquartiers apparaissent comme des territoires privilégiés pour
concevoir et mettre en œuvre ces services renouvelés, dans la mesure où ils concentrent
un nombre important de services « durables » et qu’ils sont perçus comme des lieux
d’expérimentation de nouvelles approches urbaines. Ainsi, l’offre de service elle-même se
doit d’être soutenable et est repensée à l’échelle du quartier, en lien les aménagements et
les usages avec lesquels elle s’articule.
A terme, un des enjeux de l’offre de services dans les écoquartiers réside dans la
construction d’une communauté inscrite dans le temps long, à laquelle les individus
s’identifient et dans laquelle ils sont reconnus. Cette communauté serait aussi soutenable
sur le long terme du fait de pratiques et usages respectueux de l’environnement. Dans la
mesure où le développement durable implique nécessairement une réflexion dans le long
terme, il est nécessaire de proposer des services qui impliquent les individus dans cette
démarche. Pour ce faire, Josée Landrieu explique que « prendre soin » des individus est
indispensable. Elle introduit donc à la fois la notion de lien social dans la communauté et
de services à la personne.
Ainsi, face aux mutations de la société contemporaine, il apparaît indispensable de
renouveler le cadre de l’action afin de le rendre cohérent avec les nouveaux usages,
besoins et enjeux du développement durable. Il s’agit désormais de s’interroger sur les
besoins réels des populations sur le long terme, d’appréhender les changements de
comportement, les différentes pratiques du temps et de l’espace, ainsi que les différents
modes de vie individuels ou collectifs. On peut ainsi concevoir un urbanisme temporel, qui
mettrait la mobilité et l’accessibilité des services au cœur de son action. Cela va de pair
35
avec la prise en compte des nouveaux besoins et donc la participation de tous les types
d’acteurs : résidents, visiteurs, salariés ; chacun générant des demandes différentes à des
temps différents.
Il s’agirait donc de mettre en œuvre des « politiques temporelles locales » (CERDD,
2011). Les temps urbains doivent désormais concorder avec les temps sociaux et
l’accessibilité spatio-temporelle aux services urbains doit être pensée en fonction des
nouvelles obligations de la vie quotidienne. Ceci permettrait d’appliquer les enjeux du
développement durable à l’offre de service, tout en œuvrant pour optimiser les
déplacements et l’articulation entre le temps social et le temps économique. De plus,
appliquer concrètement le principe d’accessibilité, permettrait de lutter contre les formes
d’exclusion sociale. Pour atteindre de tels objectifs, la participation, la sensibilisation et la
mobilisation des utilisateurs du territoire, quels qu’ils soient, semble nécessaire afin
d’adopter une offre compréhensive et réflexive des services. Dans quelle mesure les
services sont-ils repensés et mis en application dans le cadre des écoquartiers et quelles
sont les modalités de leur mise en œuvre effective ? Quelle appréhension du quartier et
de la ville est véhiculée via cette offre renouvelée de services ? Il s’agira dans cette partie
d’étudier les différents services observés lors des enquêtes de terrains et qui semblent
apporter une réponse pertinente à la nécessaire reconfiguration de l’économie de services
dans différentes sphères fonctionnelles (2). Dans un deuxième temps, il conviendra de se
pencher sur les rapports entre usages et techniques révélés par ces services (3).
2. Des services pour encourager des liens sociaux et économiques soutenables
a) Services à la mobilité
Depuis le début du XXème siècle, la voiture occupe une place centrale dans la
société, et elle est toujours considérée comme essentielle au quotidien d’une grande
partie de la population. Synonyme de liberté et indicateur d’une certaine position sociale,
elle a progressivement dominé tous les autres modes de transport. C’est ainsi que
l’engouement pour l’automobile a conditionné l’aménagement urbain, pour peu à peu
façonner les villes européennes. Ces dernières ont ainsi évolué vers un habitat de plus en
plus dispersé avec le développement des banlieues et l’augmentation de la distance entre
habitat, travail et services (zones commerciales, etc.). D’après une enquête réalisée en
36
2008 par le CGDD (Commissariat général au développement durable),la voiture demeure
le mode de transport dominant en milieu urbain comme en milieu rural. Ainsi, en 2010,
60,7% des trajets domicile-travail/lieu d’étude en France métropolitaine s’effectuaient en
voiture (INSEE). Cependant, l’importance prise par les thèmes associés au
développement durable (diminution de l’émission des gaz à effet de serre et de la pollution,
protection de la biodiversité, etc.), combinée au nouveau rôle joué par les autorités locales,
a généré une remise en question progressive de la place de la voiture dans les modes de
vie, et l’émergence du concept de mobilité durable. Les collectivités territoriales ont ainsi
placé cette dimension au cœur de leur politique de mobilité, repensant peu à peu les
modes de déplacements afin de développer les transports collectifs, les modes doux et la
multimodalité à leur échelle. Défini par l’ARENE comme « l’ensemble des choix et des
pratiques mises en œuvre par tous les acteurs de la mobilité, de l’usager au décideur
public, en accord avec les enjeux et principes du développement durable », le terme de
mobilité durable questionne autant les modes de transport que les modes de vie ainsi que
les modalités de la gouvernance urbaine.
Cette dynamique doit être associée à l’évolution récente de l’espace urbain. En
effet, l’extension spatiale et démographique des villes et ses implications en terme de
pénibilité et temps de trajet a amené à remettre en question les modes de déplacement
traditionnels tels que les transports en commun, et plus encore, la voiture. Ainsi,
« l’extension des territoires urbains, les demandes de déplacements des voyageurs de
plus en plus diffuses dans le temps et l'espace, ainsi que les limites des transports
collectifs conventionnels et la recherche d'alternatives à la voiture individuelle, ont fait
émerger de nouveaux services à la mobilité tels que le transport à la demande,
l'autopartage, le covoiturage ou les vélos en libre service »(ARENE, 2008).Au même titre
que la mobilité durable, les nouveaux services à la mobilité ont pour objectif de mettre à
disposition des usagers de nouveaux modes de transport alternatifs mais aussi de
contribuer aux changements d’usage et en particulier de limiter la dépendance à
l’automobile des ménages et ses conséquences négatives (coûts dans le budget des
ménages, impacts environnementaux et énergétiques, sur la santé, etc.). Ainsi, les
nouvelles réponses au besoin de mobilité ne sont pas pensées comme de seules
infrastructures mais comme des services, qui interrogent aussi bien les modes de vie que
le partage des biens et l’organisation de l’espace public. En d’autres termes, la mobilité
est une des sphères fonctionnelles de l’économie qui regroupe un très grand nombre de
services et le développement durable en est désormais une dimension fondamentale.
37
C’est aussi un domaine où le changement des comportements et des usages apparaît
comme indispensable. A ce titre les écoquartiers sont souvent perçus comme des
espaces privilégiés pour mettre en œuvre des nouveaux services à la mobilité : espaces
vitrines et espaces nouveaux, ils cristallisent cette volonté de créer des territoires non
dépendants de la voiture via la modification de l’espace urbain et des usages de ses
habitants.
Si les objectifs de rationaliser les modes de déplacements et de développer une
offre de mobilité alternative sont de plus en plus présents dans les discours politiques et
les politiques publiques, et en particulier dans les écoquartiers ; les réponses offertes sont
d’une grande variété : certains services visent à appuyer une offre de transport non-
automobile déjà existante en promouvant l’usage des modes alternatifs, et en optimisant
l’utilisation des infrastructures et équipements (transports en commun, vélo, multimodalité)
quand d’autres cherchent à renouveler et diversifier l’offre en développant des modes de
transport souvent partagés dans leur possession (voiture en temps partagé entre
particuliers) ou leurs usages (covoiturage, voitures ou vélos en libre service). A l’échelle
de l’écoquartier, ces deux approches sont souvent mobilisées de façon complémentaire:
tout d’abord, force est de constater qu’une bonne desserte de l’écoquartier par les
transports collectifs (nécessaire au vu de l’objectif de réduction des déplacements en
voiture) est assurée par sa structuration autour d’axes de transports collectifs existants ou
par le développement de nouvelles lignes. La place du vélo est aussi largement
développée au sein du quartier et vers d’autres espaces urbains : des itinéraires cyclables
sont mis en place ainsi que des zones de stationnement sécurisées (parfois intégrées
dans l’offre de logement) et des bornes de vélo en libre service. Enfin, de nouveaux
services sont développés pour les habitants (plans de mobilité scolaire, fiches
pédagogiques sur la mobilité) et les entreprises (conseil en mobilité). Ces démarches
concourent ainsi à limiter la place de la voiture dans l’espace public (stationnement limité,
diminution des places de stationnement, réduction des vitesses autorisées).
D’après Meunier Chabert (2012), le véritable changement dans la mise en place
des nouveaux services à la mobilité n’est pas tant celui d’un type de service que celui de
la multimodalité, où chaque mode de transport est pensé en interaction avec les autres
afin de proposer des déplacements et itinéraires flexibles et rapides. C’est pourquoi le
développement de la multimodalité est intrinsèquement lié aux progrès opérés dans les
technologies de l’information et du numérique. La multimodalité est donc ancrée dans une
conception moderne du déplacement, et assistée par un suivi en direct des flux de
38
transport. En ce sens, nous sommes passés de l’ère du transport, à celle de la mobilité à
proprement parler qui devient un attribut de la personne (Amar, 2011) et qui permet de
repenser l’organisation intrinsèque de la ville. Selon les principes de l’économie de la
fonctionnalité, la mobilité peut donc être appréhendée comme une sphère fonctionnelle
où les différentes offres de transport et services liés à la mobilité sont combinés pour
optimiser les déplacements. Les écoquartiers sont alors appréhendés comme des
espaces denses et mixtes pour réduire les déplacements nécessaires et promouvoir une
mixité fonctionnelle et sociale, à la fois éléments de rupture avec les pratiques antérieures
(espace aménagé en lien avec une offre de déplacement alternatif) et de continuité
permettant de retisser des trames urbaines. Les terrains étudiés pour ce rapport ont
permis de mettre en valeur différents services illustrant les dynamiques soulignées
précédemment et articulant directement les infrastructures avec la question des usages.
i. Les Parkings Silos
Les parkings, souvent figurés dans l’imaginaire urbain comme des espaces clos et
impopulaires, des « non-lieux », où l’on ne fait que passer et consommer sans attribuer
une identité - selon la terminologie de Marc Augé (1992) -, sont pourtant des
infrastructures nécessaires dans les villes et ils participent du confort urbain. Après
l’explosion des propriétaires de voiture, les parkings se sont multipliés dans le tissu urbain,
souvent situés en collier aux alentours du centre ville. Les structures à étages se sont
donc développées pour permettre d’accommoder de plus en plus d’usager automobilistes.
Les nombreux types de parkings ont pour but d’accommoder les différents usagers de la
ville avec par exemple les parkings relais qui permettent aux habitants de banlieue de
laisser leur véhicule pour ensuite emprunter les transports en commun dans la métropole.
Les parkings font aujourd’hui l’objet d’un fort regain d’intérêt (de la part des architectes et
urbanistes en particulier), notamment du fait des nouveaux enjeux induits par la
multimodalité. En effet, dans une optique multimodale, les parkings deviennent des lieux
de passage centraux, puisqu’ils sont spatialement reliés aux autres modes de transports :
ils deviennent alors de potentiels lieux de consommation, non seulement du service de
stationnement, mais également d’autres services à la mobilité. En ce sens, les parkings
constituent un véritable enjeu de la mobilité dans le cadre d’un développement urbain
durable.
39
L’exemple de la ZAC de l’Union
Contexte
La problématique du déplacement et de l’accessibilité est un enjeu central du
développement de la ZAC de l’Union car le quartier accueillera, une fois sa construction
finalisée, 3000 habitants et de 4000 à 5000 salariés. Toutefois, la voie rapide qui dessert
le quartier est déjà saturée et l’Union comporte de nombreux axes nord/sud mais peu
d’axes est/ouest. De plus, si le métro relie le quartier depuis 2000 au système de transport
métropolitain lillois, son utilisation reste limitée.
Les sols de l’ancienne friche industrielle sur laquelle le quartier se développe sont
cependant extrêmement pollués, aussi le choix a-t-il été fait de ne pas creuser afin de ne
pas transporter les résidus dans des sites non pollués. C’est pourquoi la SEM a retenu la
solution des parkings silos.
Objectif
Dès 2006, une étude de déplacement a été menée et préconisait la limitation des
arrivées de voitures par la diminution des possibilités de stationnement. Aussi les
urbanistes ont-ils préconisé le ratio de une place de parking pour 120m2 de bâti dédié au
secteur tertiaire, contre une pour 30m2 normalement. Ceci équivaut à une place de
stationnement pour quatre salariés.
Les aménageurs de la ZAC de l’Union ont donc, dès le départ, affiché la volonté de
limiter fortement la création de places de parking autour des entreprises et également des
logements. L’objectif est de réduire l’espace réservé à la voiture, notamment en terme de
surface au sol, et donc de densifier les zones de parking. Un objectif supplémentaire sous
tend cette logique : la densification du construit qui est reconnue comme un axe essentiel
de la ville durable et implique nécessairement une réduction des espaces de parking, afin
de ne pas trop impacter le foncier par du stationnement. Limiter les espaces de
stationnement implique également de limiter la venue de voitures dans le quartier en
rendant l’usage de la voiture moins pratique.
En complément, les parkings silos doivent également servir de plateformes de
promotion de mobilités alternatives : ils incluront des services liés aux modes de transport
doux. Les parkings silos sont donc appelés à être des centres de service, à la mobilité
mais également à la vie quotidienne.
40
Fonctionnement
Le principe fondamental des parkings silos est la mutualisation des espaces de
parking entre les différents usagers du site : salariés et résidents. La réalisation de tels
objectifs nécessite un changement de logique dans le droit de l’urbanisme. En effet, les
Plans locaux d’urbanisme (PLU) prévoient en général un nombre minimum de places de
parking à construire pour une surface donnée d’occupation commerciale ou résidentielle.
Les aménageurs de la ZAC recherchent plutôt le nombre maximum de places à autoriser.
Les parkings silos de la ZAC mettent également en œuvre le principe de politique
temporelle puisqu’ils sont censés servir aux salariés des entreprises le jour, aux habitants
le soir. C’est pourquoi les promoteurs pourront vendre des droits de stationnement pour
les résidents, qui ne seront pas privatifs afin de mutualiser l’utilisation de l’espace avec les
usagers de jour. Les parkings silos seront donc toujours situés entre des secteurs
d’activité et d’habitat.
Leur rez-de-chaussée sera aménagé d’espaces commerciaux et notamment
d’espaces réservés à d’autres services à la mobilité tels que des relais colis, espaces de
livraison, ateliers de service du vélo. Des espaces d’attente de covoiturage ont également
été imaginés. En marge des services à la mobilité, des services à la vie quotidienne tels
que des pressings, garderie trouvent leur place dans ces espaces. Aussi la gestion des
parkings silos s’apparente à celle d’une conciergerie : il s’agit de garder et entretenir le
lieu, tout en offrant différents services à ses usagers.
Limites
Le modèle des parkings silos présente certaines contraintes. Notamment, l’offre de
services sur le modèle de la conciergerie butte sur les contraintes économiques. Ces
services ne permettent pas de prévoir des recettes suffisantes sur la structure pour
l’exploitant. Ce système peut fonctionner uniquement sur un gros siège d’entreprises,
lorsque de nombreux salariés peuvent utiliser les services proposés et créer un capital
suffisant. Des structures telles que les conciergeries ne peuvent pas forcément payer de
loyer car elles ne sont pas nécessairement bénéficiaires.
Contributions et externalités
Les parkings silos sont donc une infrastructure extrêmement intéressante, tant pour
leur capacité à inciter à une mobilité rationalisée, que parce qu’ils contribuent à créer une
logique de proximité grâce aux services à la vie quotidienne qu’ils offrent (garderie,
41
pressing, etc.). Ainsi, les usagers ont accès à de nombreux services dans un même
espace partagé, ce qui permet de « relocaliser » les usages et de diminuer le nombre de
déplacements nécessaires. Toutefois, dans la mesure où l’installation de parkings silo va
de pair avec une réduction substantielle des espaces de stationnement, il est essentiel
d’intégrer leur construction dans une logique plus vaste relative à la sphère fonctionnelle
de la mobilité. Ainsi, les parkings silos reposent sur des dispositifs d’incitation et de
participation. Il est essentiel que l’offre de transports en commun soit étendue afin d’inciter
les usagers aux modes doux. De même, communiquer auprès des salariés et des
habitants est essentiel pour que la rationalisation des déplacements soit bien appropriée
par eux et facilitée. Par exemple, pour accompagner les entreprises dans la sensibilisation
de leurs salariés à de telles pratiques, l’aménageur a proposé un Plan de déplacement
d’entreprise (PDE), prestation désormais assurée par l’opérateur de transport, Transpôle.
De plus, la SEM Ville renouvelée en charge du développement de la ZAC s’est associée à
l’Institut français des sciences et technologies des transports, de l'aménagement et des
réseaux afin d’élaborer un site internet offrant la synthèse des informations nécessaires
pour se déplacer dans la ville telles que les horaires des commerces, des services, l’offre
du réseau de transports en commun et de services à la mobilité.
En outre, les parkings silo s’inscrivent également dans une logique d’évolutivité et
d’adaptabilité puisque leur conception architecturale a été réalisée de sorte que les
parkings puissent être reconvertis en espaces de bureaux si l’usage de la voiture était
réduit de manière conséquente. De même, les entreprises se sont vues offrir des droits de
stationnement adaptés à l’évolution du quartier. Elles ont d’abord bénéficié de droits de
stationnement augmentés pour les premières années, lorsque l’offre de transports en
commun n’était pas encore assez adaptée à l’offre de stationnement. L’idée est que les
gestionnaires de parking récupèrent peu à peu les emplacements, au fur et à mesure que
l’offre de transports augmentera.
ii. L’autopartage
L’autopartage est une forme organisée de mutualisation de l’usage des voitures. Ce
service a progressivement évolué d’initiatives citoyennes vers des formes plus
professionnalisées. La première initiative d’auto partage a eu lieu en Allemagne, à Berlin
en 1988, et le concept s’est rapidement diffusé dans différentes villes en Allemagne. Un
réseau décentralisé d’associations s’est ainsi constitué et en 2009, cent opérateurs
42
indépendants œuvraient sur le marché national. Ce sont maintenant de plus grandes
entreprises, à l’origine spécialisées dans divers autres domaines (tels que Bolloré dans le
cas d’Autolib à Paris, agissant historiquement dans l’industrie du papier) qui offrent ce
service. On distingue cependant deux type d’autopartage : l’autopartage commercial et
l’autopartage entre particuliers.
L’éclairage apporté par l’exemple d’Albatros, (EVA Lanxmeer)
Contexte
L’entreprise Albatros, dirigée par Jan Theunissen à EVA Lanxmeer, organise et
soutient des initiatives socialement innovantes, en particulier les activités d’autopartage.
L’autopartage a débuté et s’est réellement affirmé il y a une vingtaine d’années, mais s’est
structuré très progressivement. Albatros a ainsi fusionné avec une entreprises spécialisée
dans l’autopartage, Wheels4all, aujourd’hui appelée MyWheels. Au départ organisé de
façon très informelle avec peu de voitures et de clients, l’organisation s’est élargie et a pris
une forme légale. Ayant commencé avec quatre voitures et trente participants, l’entreprise
en compte désormais 150 pour 2000 familles abonnées résidant à Culemborg.
L’autopartage est un service délicat à implanter dans les petites villes et il est assez
difficile d’attirer d’autres groupes de population que ceux qui sont spontanément
intéressés. C’est pourquoi le concept d’autopartage entre particuliers s’est développé.
Objectifs
L’autopartage poursuit des objectifs aussi bien écologiques qu’économiques. En
effet, il représente une alternative pour les personnes qui n’utilisent un véhicule
qu’occasionnellement. En effet, pour cette catégorie de la population, les coûts engendrés
par la possession d’une voiture peuvent dépasser la valeur d’usage. Ainsi, l’autopartage
commercial permet à ces personnes de louer une voiture seulement lorsqu’elles en ont
besoin. Dans le cas de l’autopartage entre particuliers, cela permet aux propriétaires de
voitures qui s’en servent peu de la rentabiliser en la louant lorsqu’ils ne l’utilisent pas.
L’objectif est donc de concilier possession de voiture avec écologie et gain économique.
Ainsi, le but de l’autopartage est de rationaliser l’usage de la voiture, en
promouvant par la même occasion l’utilisation régulière des transports publics et des
modes doux, et donc limiter les émissions de gaz à effet de serre.
43
Fonctionnement
L’autopartage commercial met à disposition des membres des organisations des
voitures neuves dans des stations disséminées en réseau dans le tissu urbain. Dans le
cas de l’autopartage entre particuliers, les voitures sont d’occasion puisqu'appartenant
préalablement à une personne. Elles sont mises à disposition partout où les particuliers
offrent la location de leur véhicule. Les entreprises gestionnaires de structures
d’autopartage ont donc un rôle d'intermédiaire entre les usagers, en les rassemblant via
des plateformes multimédia et leur permettant de réserver les véhicules pour une durée
définie, en fonction de l’endroit où ils pourront les récupérer. Il est ainsi nécessaire que les
autorités locales collaborent pour fournir des espaces pour les stations d’autopartage.
Les tarifs sont calculés sur une base horaire et kilométrique. Souvent, les
organismes qui offrent ce service demandent des coûts d’adhésion qui permettent de
couvrir les frais d’entretien, d’assurance et d’exploitation des véhicules. L’autopartage est
donc également une forme de mutualisation à la fois des biens, des espaces et des coûts
lié à la mobilité.
Dans le cas de MyWheels, les citoyens ont un rôle important dans l’organisation.
Chaque voiture est à la charge d’un responsable, qui prend en charge le nettoyage et
l’entretien de la voiture, ainsi que la promotion du service, en échange de bons de gratuité
pour un certain nombre de kilomètres.
Limites
Certaines organisations n’ont pas perpétué leur effort de marketing dans la
communauté, alors que la croissance et l’expansion d’un tel service dépend beaucoup de
sa promotion efficace auprès de différents types d’usagers. De plus, les collectivités
territoriales sont souvent plus intéressées par le développement des transports en
commun et des nouvelles technologies telles que les voitures électriques, que par le
soutien à de telles organisations qui apparaissent comme des solutions partielles à la
question de la mobilité durable. Cependant, les voitures électriques constituent un coût
financier conséquent et présentent des problèmes de fonctionnement (batterie à
autonomie limitée, etc.) qui en font une solution moins rentable pour un entrepreneur mais
aussi moins facile d'accès pour les usagers.
Enfin, si l’autopartage entre particuliers est une solution très intéressante, elle est
fondée sur la notion de confiance, ce qui rend son développement compliqué.
44
Contributions et externalités
L’autopartage s’inscrit fortement dans la logique de l’économie de la fonctionnalité
puisque l’objet de la transaction n'est plus la voiture mais le service qu'elle rend.
L’autopartage poursuit également une logique de mutualisation et de rationalisation de la
mobilité. Elle contribue également à la promotion de la multimodalité en incitant à un
usage restreint de la voiture, dans les cas où celle ci est réellement nécessaire (transport
de charges importantes par exemple).
L’autopartage poursuit aussi la logique des politiques temporelles locales dans la
mesure où ce service répond à une diversité de besoins à des temporalités différentes.
De plus, au vu des objectifs environnementaux poursuivis, les véhicules choisis
dans le cas de l’autopartage commercial consomment souvent moins de carburant que la
plupart des véhicules particuliers. Ils sont donc écologiquement plus performants. Ce
système permet également de limiter le nombre de véhicules en circulation, puisqu'en
moyenne, chaque voiture d’autopartage permet de remplacer entre 4 et 8 véhicules privés.
En ce sens, il a également l’avantage non négligeable de limiter la pression sur les
espaces de stationnement, souvent problématique dans les villes européennes.
b) Gestion des ressources
Les services de gestion des ressources regroupent les services ayant vocation à
gérer la production, la consommation et l’usage d’énergie de matières premières et la
revalorisation de déchets. Le développement durable et par extension les écoquartiers,
qui doivent limiter leur empreinte écologique, imposent ainsi une certaine performance
énergétique en termes de gestion des ressources. L’optimisation de l’usage de certains
services essentiels (chauffage, approvisionnement en eau et énergie, etc.) devient donc
une préoccupation croissante, tant pour les usagers que pour les opérateurs de service.
Par conséquent, des services dont le but est de réduire les coûts environnementaux,
économiques et sociaux liés à la consommation d’énergie et de matières premières se
développent.
D’après les chiffres du Services d’Observation et de Statistiques (SOeS) du
Commissariat général au développement durable (CGDC) au sein du Ministère de
l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie (MEDDE), les bâtiments résidentiels
et tertiaires sont à l’origine de 44 % de la consommation d’énergie en France. Le
45
chauffage représente, avec deux tiers, la part la plus importante, suivi de l’électricité
spécifique, avec 20%, et l’eau chaude et la cuisson avec 14% (SOeS, s.d.). Compte tenu
de ces chiffres, il paraît évident que les services qui ont trait à ces question se concentrent
surtout sur la consommation et l’efficacité énergétique des bâtiments. Toutefois, l’impératif
environnemental en soi ne mène pas à la création d’un nouveau service. En effet, le
service proposé doit également être viable économiquement ou être porté par une
structure capable de le financer.
De nouveaux services de gestion des ressources ont émergés autour de différents
axes. Parmi les plus répandus figurent la production et distribution d’énergies
renouvelables et locales, dont la production d’électricité à partir d’énergie solaire,
thermique ou de biomasse, ainsi que les réseaux de chaleur en cogénération et à partir
d’énergies renouvelables. Une deuxième dimension de ces services est la performance
énergétique et l’efficacité environnementale, réalisées à travers l’éco-construction et la
reconversion énergétique du construit existant. Le traitement des matières premières, dont
notamment le traitement des eaux usées et les services de recyclage des déchets, ainsi
que la médiation et le conseil environnemental, complètent ce triptyque.
Pour les individus bénéficiaires de ces services, l’objectif est avant tout de faire des
économies en réduisant les dépenses liées à la consommation d’énergie et de ressources.
En ce qui concerne la collectivité, l’objectif de ces services est plutôt macroéconomique et
environnemental. Du côté des fournisseurs, l’objectif est de privilégier la rénovation
énergétique à la construction. En effet, un tel service représente pour eux des rendements
potentiellement plus élevés et s’inscrit dans une logique de performance
environnementale, conjuguant exigences en termes de durabilité et plus-value
économique. Il s’agit de stimuler la croissance tout en réduisant la consommation de
ressources et donc l’empreinte écologique de telles activités. Dans les deux cas, l’objectif
est réalisé par une augmentation de l’efficacité des ressources et de l’efficacité
énergétique des matériaux, des produits et des processus utilisés.
Les services évoqués relèvent tous de la sphère fonctionnelle de la gestion des
ressources. Cependant, ils peuvent s’appliquer à différentes échelles, ainsi la question de
l'échelle choisie se pose. Certains services sont principalement mis en œuvre à l’échelle
de la ville ou du quartier, comme les réseaux de chauffage, le traitement des eaux usées
ou encore la collection de déchets ; tandis que d’autres sont proposés à l’échelle du
bâtiment, dans le cas de la rénovation énergétique, ou encore à l’échelle de l’individu, en
ce qui concerne la médiation et le conseil énergétique.
46
La volonté de minimiser l’impact environnemental tout en offrant un cadre de vie de
qualité fait des écoquartiers un lieu privilégié de développement de services innovants
autour de la gestion d’énergies et de ressources. Deux services ont été retenus : le
conseil énergétique et la reconversion du bâti existant. Ils ont tous deux été mis en œuvre
sur plusieurs des terrains ; le premier visant plus l’usage et la gestion par l’individu dans
les (éco)quartiers, tandis que l’autre peut s’appliquer à la ville entière.
i. ISIGAZ (Information Sécurité Intérieure GAZ) à Paris
Contexte
La démarche ISIGAZ (Information Sécurité Intérieure Gaz) a été initiée par GDF
Suez en 2005 dans le cadre des engagements de service public. Ce dispositif a été mis
en place en coopération avec des bailleurs sociaux et des associations locales
uniquement dans des quartiers sensibles où l'on trouve un nombre élevé de clients GDF
démunis. Dans le cas de Paris, le bailleur social ICF Habitat La Sablière, propriétaire et
gestionnaire d’habitats sociaux en Ile-de-France, a ainsi saisi le service ISIGAZ pour ses
723 locataires des résidences situées dans les 18e et 20e arrondissements de Paris.
Objectif
L’objectif du dispositif ISIGAZ est d’« d’informer et de sensibiliser les clients
démunis à la sécurité de leurs installations intérieures de gaz naturel » (GDF Suez, 2012).
Cette démarche permet également à GDF Suez de réduire ses impayés et de garantir la
sécurité et le bon fonctionnement de ses installations dans des HLM, ainsi que de
respecter son engagement d'opérateur de service public. Entre 2005 et 2007, 19 accords
ont été signés avec des bailleurs sociaux et le dispositif ISIGAZ a été mis en œuvre dans
une centaine de villes de France.
Fonctionnement
Pour ce faire, GDF Suez forme des médiateurs ou accompagnateurs en
coopération avec des associations partenaires locales ou des régies de quartier.
Préalablement formés, les médiateurs se rendent au domicile des locataires du bailleur
social. Dans le cas de ICF Habitat La Sablière à Paris, les médiateurs proviennent de
l’association PIMMS (Points Information Médiation Multiservices), association parisienne
dont l'objectif est de faciliter l’accès aux services publics, de proposer des services de
47
proximité et des services de médiation. (ICF La Sablière, 2008). Les médiateurs
interviennent à domicile sur la sécurisation des installations de gaz, informent sur le
fonctionnement et la maintenance des installations. De plus, ils sensibilisent les habitants
aux risques liés aux gaz et aux économies d’énergies. A travers cette démarche, ils
contrôlent également l’état du matériel et établissent un diagnostic, répondent aux
questions des résidents et renforcent le lien social avec les personnes démunies ou
isolées. La totalité des coûts est prise en charge par GDF Suez (Vaucluse Logement
2012).
Limites
Le dispositif ISIGAZ a néanmoins certaines limites. Afin d’être mis en œuvre,
l’accord du bailleur est nécessaire, et le dispositif ne s’applique qu’aux zones urbaines
sensibles. A cela s’ajoute que le dispositif ne prend qu’en compte les clients de GDF Suez
et donc uniquement les installations de gaz. De plus, ISIGAZ est issu du cadre restreint
des opérateurs de services publics français. Ces aspects font du dispositif un modèle
limité à la France. La procédure profite enfin surtout aux fournisseurs d’énergie et aux
bailleurs sociaux, les avantages pour les locataires restant limités.
Contributions et externalités
Toutefois, le dispositif ISIGAZ reste un dispositif innovant. En utilisant la promotion
et la sensibilisation directement auprès des consommateurs, ISIGAZ tente d'influencer les
leurs comportements et usages. Le lien social entre médiateurs et usagers, l’accent mis
sur les populations démunies et la perspective de réduire la précarité énergétique
démontrent la forte dimension sociale du programme. Le dispositif est à la base un service
autour de l’usage d’un bien, ce qui le ramène à l’économie de la fonctionnalité. L’approche
de co-production avec les bailleurs, les associations locales et la responsabilisation des
locataires est également innovante en soi. Ainsi, en envisageant l'élargissement de la
sphère du service à d’autres formes d’énergies et à l’efficacité énergétique en général
ainsi qu’à une catégorie plus large de consommateurs ; le service de conseil énergétique
révèle un important potentiel à inciter à la mutation des usages.
48
ii. La rénovation énergétique des bâtiments existants par les particuliers
Le secteur du bâti représente non seulement 44% des dépenses énergétiques mais
aussi 25% des émissions de GES en France. La rénovation énergétique des bâtiments
existants est donc un enjeu majeur de la transition écologique des villes. La loi
d’orientation énergétique de 2006 et les lois du Grenelle de l’environnement ont ainsi posé
des objectifs chiffrés de réduction de la consommation énergétique. Les émissions de
GES doivent être réduites par quatre d’ici à 2050 par rapport aux niveaux de 1990, ce qui
équivaut à une réduction de 3% par an. Des objectifs ambitieux concernant le
développement des énergies renouvelables et la réduction des émissions de GES ont
également été fixés. C’est pourquoi le secteur du bâtiment s’est engagé dans un
renouvellement de ses pratiques professionnelles afin d’assurer le virage vers le niveau
Bâtiments Basse Consommation (BBC), les bâtiments à bilan énergétique neutre ou
positif et la démarche Haute Qualité Environnementale (HQE). Au rythme de construction
actuel, 70% des logements de 2050 sont déjà construits. Aussi la loi Grenelle 1 fixe-t-elle
un objectif de 400 000 logements à rénover par an à partir de 2013, modifié à la hausse à
500 000 logements par le gouvernement Ayrault. L’exemple de Loos-en-Gohelle
Contexte
La municipalité de Loos-en-Gohelle est très engagée dans les démarches de
développement durable, notamment grâce à la volonté politique dont elle fait preuve,
impulsant de nombreuses mesures environnementales. Dès 2001, avec l’élection du
nouveau Maire, Jean François Caron, l’accent est mis sur l’innovation en faveur d'un
développement durable et l’amélioration du cadre de vie, intégrant fortement les citoyens
à la démarche. La ville a mené un diagnostic territorial afin d’établir une Charte du Cadre
de vie, signée en mai 2000, qui fixe les principes et le cadre de l’action de développement
de la commune, selon 7 volets environnementaux et un volet social. L’énergie est l’une
des dimensions fondamentales de la Charte et se décline en deux objectifs ambitieux : la
maitrise et la réduction des consommations d’énergie d’une part, le développement des
énergies renouvelables d’autre part. Pour initier la démarche énergie, la collectivité s’est
d’abord concentrée sur ses propres bâtiments en réalisant des diagnostics énergétiques
et en élaborant un programme pluriannuel pour réaliser les objectifs fixés en termes
49
d’énergie. Toutefois, au delà des bâtiments municipaux, c’est la rénovation énergétique du
bâti à une échelle plus large qui représente un réel enjeu. Aussi la ville de Loos-en-
Gohelle recherche-t-elle l’implication de ses citoyens dans cette démarche en incitant les
propriétaires à rénover leurs logements, en partenariat avec des entreprises privées.
Objectifs
La rénovation du bâti existant doit permettre d’atteindre les objectifs énergétiques
énoncés plus haut et ainsi d’inscrire la construction dans une démarche durable. L’idée
est d’améliorer la gestion de l’énergie en mettant en œuvre la sobriété et la diminution de
la consommation, tout en préservant le confort des habitants. Étant donné que la ville ne
peut entreprendre cette démarche pour tout le parc de bâti de la ville, il est crucial
d’impliquer les citoyens de manière active dans la démarche et de les inciter à prendre en
charge la rénovation de leur logement. L’action de la municipalité a donc pour objectif de
promouvoir la démarche de rénovation du bâti auprès des citoyens : il s’agit de leur
montrer l’intérêt d’une telle démarche, tant d'un point de vue écologique que d’un point de
vue plus « pragmatique » en insistant sur les économies financières que cela engendre à
long terme pour les particuliers.
Fonctionnement
La rénovation du bâti existant implique la coordination de différents acteurs afin
d’atteindre les objectifs fixés de réduction de la consommation d’énergie et des émissions
de GES, ainsi que d’utilisation des énergies renouvelables. La démarche de rénovation du
bâti est prise en charge et mise en avant par les pouvoirs publics. La ville de Loos-en-
Gohelle mène ainsi une campagne ambitieuse de communication à ce propos afin d’inciter
les citoyens à entreprendre une telle démarche.
Si le diagnostic et la rénovation énergétique en tant que telle sont réalisés par des
spécialistes professionnels, il est essentiel que les habitants soient à l'origine du
processus. La municipalité a donc entrepris de sensibiliser et informer les citoyens sur les
enjeux et également les intérêts que la rénovation de leur propriété représente. En effet, la
rénovation énergétique des logements permettra aux propriétaires d’effectuer des
économies conséquentes d’énergie, et donc des économies financières substantielles sur
le long terme.
Il s’agit donc pour les pouvoirs publics de mettre en avant les mécanismes
facilitateurs de la démarche. En effet, il existe des dispositifs incitatifs qui ne sont pas
50
forcément connus des citoyens et doivent être mis en avant dans une approche globale de
la démarche de rénovation. Par exemple, le crédit d’impôt développement durable ou
l’éco-prêt à taux zéro ont été spécifiquement créés pour inciter les particuliers à effectuer
les rénovations énergétiques nécessaires dans leurs logements.
Limites
Malgré les campagnes d’information et de communication, la rénovation
énergétique est une démarche ambitieuse et longue qui peut encore effrayer nombre de
propriétaires ou simplement être inabordable pour certains d'entre eux. En effet, cette
démarche engendre des coûts conséquents sur le court terme, bien visibles pour les
citoyens, mais le retour sur investissement, s’il est avéré, ne s’effectue que dans le long
terme, il est donc moins tangible. Cette dissociation entre les coûts à court terme et les
bénéfices à long terme peut être dissuasive pour les propriétaires.
De plus, il existe également une dichotomie entre les propriétaires et les locataires :
si les propriétaires sont responsables de la rénovation énergétique du logement, ce sont
les locataires qui vont en bénéficier directement, par le confort thermique et les économies
financières. Aussi, l’argument financier est-il moindre dans le cas des logements locatifs
pour les propriétaires.
Enfin, la rénovation énergétique induit l'apport de nouvelles technologies dans le
logement qui peuvent nécessiter un changement de pratiques. Elle implique également
une modification physique parfois importante du logement. Or ces deux aspects peuvent
être rédhibitoires pour les occupants qui ne souhaitent pas modifier leurs habitudes ou
l'aspect de leur habitation.
Contributions et externalités
Si les citoyens prennent conscience de la faisabilité et de l’intérêt de réaliser la
rénovation énergétique de leur logement, les opportunités sont grandes pour effectuer une
transition écologique au niveau du parc de bâti urbain. La rénovation énergétique
représente une démarche ponctuelle mais dont les bénéfices s’inscrivent dans le long
terme et sont réels, tant pour les habitants en termes financiers que pour la ville et ses
enjeux plus globaux. De même qu’à Loos-en-Gohelle, cette démarche existe dans de
nombreuses villes et certains architectes en ont fait leur spécialité. C’est le cas de Siem
Goede, rencontré à GWL (Amsterdam), qui, sur la demande de groupes d'habitants d'un
même immeuble, entreprend la complète rénovation énergétique de bâtiments. En effet,
51
l’efficacité de la rénovation ne peut qu’être optimisée si elle est entreprise à l’échelle du
bâtiment, voire du quartier, pour créer des « effets d’îlot » positifs.
Si les écoquartiers se font la vitrine de la ville durable et intègrent les normes d’éco-
construction, ils induisent de nouvelles constructions. La rénovation énergétique permet
une amélioration de la qualité d’usage des logements existants, et à plus grande échelle,
une revalorisation de l’image du quartier. Par la mise aux normes énergétiques et de
sécurité, la réduction des GES et des consommations d’énergie, ainsi que la promotion
des énergies renouvelables, la rénovation permet de réduire conséquemment la précarité
énergétique. Elle incite en outre à une prise de conscience de la part des citoyens, bien
que leur démarche puisse être purement intéressée par les intérêts financiers. La
rénovation énergétique participe d’une reconversion professionnelle du secteur du
bâtiment qui s’inscrit elle-même dans la dynamique fonctionnelle de gestion des
ressources.
Le véritable enjeu de la ville durable, en termes de transition énergétique, réside
plutôt dans la reconversion de l’existant, c’est pourquoi la rénovation énergétique doit être
promue et entreprise à grande échelle. L’effet de masse ne peut être atteint que grâce à
des stratégies territoriales et patrimoniales ambitieuses.
c) Services à la personne et à la collectivité La société contemporaine place le secteur tertiaire et les services au centre de son
activité économique et au cœur des interactions sociales. D'une société industrielle, nous
sommes passés à une ère des services, impliquant des mutations sociétales
fondamentales. Les services consistent en une prestation, un échange marchand « d'une
capacité technique ou intellectuelle » (Insee, s.d.). Nous nous pencherons donc sur les
deux types de services fondamentaux de notre vie quotidienne que sont les services à la
personne (bénéficiaires individuels) et les services collectifs (destinés à l'ensemble des
habitants ou d'intérêt général).
La direction de l'information légale et administrative définit les services à la
personne comme « les activités destinées à répondre aux besoins des particuliers dans
leur vie quotidienne. » (2012). Ils sont essentiels à l'existence des plus fragiles, telles que
les personnes en situation de handicap, les enfants ou les personnes âgées dépendantes.
Les mutations et nouveaux défis auxquels notre société est confrontée ont provoqué
52
depuis quelques décennies une augmentation très importante de la demande de tels
services. En effet, le vieillissement de la population et l'augmentation de son espérance de
vie oblige à repenser et élargir l'offre des services à la dépendance, tout comme la
féminisation du marché du travail interroge le système de garde d'enfants français. De
même, la crise de l'emploi incite à trouver des systèmes innovants pour faciliter l'insertion
professionnelle des personnes peu qualifiées, qui, face au déclin des secteurs industriels
et agricoles, sont de plus en plus marginalisées sur le marché du travail. La loi Borloo du
26 juillet 2005 a ainsi institutionnalisé et fourni un cadre de référence nécessaire aux
services à la personne face à un besoin grandissant. Elle a également facilité leur
développement par des incitations financières. Ainsi le secteur était subventionné à
hauteur de 4,6 milliards d’euros en 2007 (Debonneuil, 2008).
Les services collectifs comprennent quant à eux les services à la collectivité, c'est-
à-dire relevant de l'espace public, et les services destinés à un ensemble de personnes,
délivrés par une structure privée ou publique. Les premiers désignent par exemple les
services d'entretien de voirie, des espaces verts, relevant historiquement de la sphère
publique. Ceux-ci sont considérés comme des services d'intérêt général et sont ainsi
encadrés et subventionnés par l'Etat, et seulement indirectement à la charge des
habitants. Les services collectifs sont des services qui n'impliquent pas un échange
individuel, mais sont prodigués à un ensemble de personnes. Ils peuvent être marchands
ou non, relever du secteur associatif ou privé. On observe dans cette catégorie des
services de diverses nature : d’un espace repassage-blanchisserie à des cours de vélo,
par exemple.
Une caractéristique essentielle de notre économie de services demeure en outre
l'implication nécessaire d'une présence physique voire d'une interaction sociale dans la
distribution du service. C'est pourquoi certaines zones isolées sont peu fournies en
services, car il est difficile pour les entreprises classiques de s'y implanter sans garantie
de recettes. De même, les catégories les plus socialement marginalisées de la population
n'y ont pas toujours accès par manque de ressources, créant un besoin réel qu'il est
nécessaire de combler. Dans ce contexte, les opérateurs de services alternatifs tels que
les structures issues de l'ESS, jouent un rôle prépondérant.
Le développement des services de proximité revêt ainsi plusieurs enjeux. La
solidarité est au cœur de l’action des opérateurs innovant dans ce domaine: les
entreprises d’insertion agissent ainsi pour l’intégration des personnes en rupture par
rapport au marché du travail actuel. Elles permettent dans le même temps une offre de
53
services souvent bon marché et accessibles aux classes populaires. Un autre défi auquel
répond l’ESS consiste en la reterritorialisation des services, qui doivent être ancrés dans
la vie du quartier, pour favoriser là encore les liens sociaux. En conséquence, les services
délivrés à l’échelle locale permettent la création d’une communauté complète et
multifonctionnelle au sein du quartier, rendant les longs déplacements inutiles et ayant
ainsi un bénéfice environnemental indirect.
i. Jardins partagés
Dénommés “jardin ouvrier” au début du siècle, ces jardins gérés collectivement sont
devenus “jardins familiaux” après la guerre. Ils sont maintenant souvent qualifiés de
jardins collectifs ou jardins partagés. Le jardin revêt dès le départ une vocation sociale,
offrant à la fois un espace de socialisation dans la plus pure tradition ouvrière, tout en
donnant aux classes populaires un accès à la nature et au loisir du jardinage. Cela pouvait
également représenter un complément alimentaire pour des familles souvent démunies.
L'utilité sociale est donc l'un des piliers fondamentaux du jardin partagé. Comme l'affirme
Daniel Cérézuelle : “la constante pendant un siècle environ reste que cet équipement a
été conçu, développé et géré pour des populations économiquement défavorisées,
menacées même par la paupérisation, mais qui étaient culturellement et socialement
intégrées par leur participation au monde du travail (d'où le terme de jardin "ouvrier"), ou
par leur insertion dans des réseaux de sociabilité (d'où le terme de jardin "familial").”
L’Exemple de La Fête des jardins rêvés de la ZAC de l'Union
Contexte
La ZAC de l'Union, actuellement en construction, accueillera en son sein un parc de
plus de 10 hectares, créant un véritable cœur de verdure au sein de l'écoquartier (d'une
surface totale de 80 hectares). La fête des jardins rêvés consiste en l'implantation de
plusieurs jardins éphémères sur le site en construction et dans des quartiers adjacents,
afin de donner vie au chantier et impliquer les futurs habitants et usagers du quartier.
Objectifs
Il s'agit par l'instauration de ces jardins d'inciter les futurs habitants et usagers de
l'écoquartier à participer à l'élaboration de l'écoquartier, tout en opérant la “couture” avec
54
les quartiers voisins. En effet, la plupart des jardins étant implantés sur des terrains à
construire, l'objectif du collectif des Saprophytes en charge du projet est de réussir à
impliquer suffisamment la population pour créer une dynamique d'appropriation citoyenne
de ces jardins et une volonté de les faire perdurer. Tout l'enjeu est donc de rendre les
citoyens actifs sur le territoire, leur donner l'envie et les outils pour être des acteurs à part
entière de l'aménagement de leur futur lieu de vie ou de travail. Il s'agit également de
développer le vivre ensemble pour favoriser la cohésion sociale du futur quartier. Les
jardins partagés revêtent aussi une vocation environnementale, avec la promotion d'une
alimentation saine, produite localement et de manière autonome. L'instauration de jardins
partagés sur le chantier de la ZAC de l'Union a en outre pour but annexe la création d'un
lien nouveau entre les citadins et la nature.
Fonctionnement
Un concours a d'abord été organisé par la Société d'économie mixte (SEM)
concernant l'aménagement du parc au sein de l'écoquartier en construction. Le collectif
des Saprophytes a répondu et son projet l'a remporté. L'entretien des onze jardins a été
confié à différentes « équipes » volontaires composées de professionnels de
l'aménagement, tels que des architectes, paysagistes, etc. et d'acteurs sociaux : centres
socio-culturels locaux, écoles. Chaque équipe a pris en charge la conception du jardin,
défini ses objectifs, sa population cible, les installations qu'elle entendait mettre en place,
selon un projet construit indépendamment des commanditaires. Chaque jardin est ainsi
géré de manière autonome, l'organisation étant laissée à la discrétion de leurs créateurs.
Des fêtes ponctuent le projet afin de le dynamiser et le faire connaître. La communication
s'intensifie alors pour mobiliser la population, et est soutenue par des animations
culturelles, un parcours itinérant dans le quartier en construction et autour des jardins.
Limites
L'un des principaux obstacles au succès des jardins partagés est la mobilisation
des habitants, paradoxalement visée par leur instauration. Une contrainte volontairement
imposée par les aménageurs à la Fête des jardins rêvés est le potentiel caractère
éphémère des installations. Mais celle-ci a également été pensée comme outil de
mobilisation et catalyseur de l'implication des habitants.
55
Contributions et externalités
Le jardin partagé est donc aujourd'hui encore un outil de développement social
contre l'exclusion qui gagne en popularité dans les zones sensibles, dans un contexte de
crise de l'intégration et de l'emploi. Il permet aussi de renforcer la cohésion sociale au sein
du quartier, en favorisant les interactions des habitants.
Dans le cas de la ZAC de l'Union, les jardins partagés ont été prioritairement
conçus pour impliquer les futurs habitants dans la construction d'un écoquartier bien
particulier, puisqu'il a notamment vocation à revitaliser une zone en constant déclin
économique : la ceinture formée par les anciennes cités minières parmi lesquelles les trois
communes impliquées dans le projet : Tourcoing, Roubaix et Wattrelos.
Ce projet est également intéressant en ce qu'il s'inscrit dans une certaine continuité
culturelle, perpétuant une tradition du monde ouvrier et donc ancrée territorialement.
ii. Le béguinage
Originaire de Belgique, les “béguinages flamands” désignaient auparavant des
communautés de femmes pieuses mais laïques, les béguines, qui vivaient de façon
autonome et communautaire, en dehors de toute hiérarchie religieuse. Aujourd'hui le
“béguinage retraite” s'est formellement détaché de toute connotation religieuse, puisqu'il
s'agit seulement de logements mis à disposition de personnes âgées vivant de manière
solidaire dans un même ensemble de bâtiments. Au-delà d’un service à l’habiter, le
béguinage peut être perçu comme un véritable service à la personne dans la mesure où la
mise à disposition de tels logements vise à lutter contre la marginalisation des personnes
âgées. L’exemple de Loos-en-Gohelle
Contexte
Loos-en-Gohelle est une petite ville située dans l'ancien bassin minier du Pas-de-
Calais, concentrant une pauvreté importante et donc des enjeux sociaux considérables.
Cependant l'instauration de béguinages permet de recréer du lien social tout en
conservant l'identité culturelle du territoire, par la reprise d'une tradition locale ancienne.
56
Objectifs
Les béguinages sont des structures innovantes en ce qu'elles permettent d'éviter la
marginalisation des personnes âgées, catégorie de population souvent touchée par
l'isolement. Il s’agit de proposer une alternative à la maison de retraite, et donc d’adoucir
la période souvent difficile que représente la vieillesse. C’est donc une solution qui vise
une catégorie bien définie de la population.
Fonctionnement
Les béguinages sont des communautés de personnes âgées vivant de manière
autonome dans des appartements ou des maisons de plain-pied adaptés aux individus à
mobilité réduite ou partiellement dépendante, tout en possédant des espaces partagés
propices aux interactions entre les habitants et à la réception de visiteurs. Ils sont mis en
place par la municipalité en partenariat avec les bailleurs sociaux, en l'occurrence Maisons
& Cités dans le cas de Loos-en-Gohelle. De cette manière les loyers des logements
restent raisonnables. Le plus souvent, l'animation ainsi que l'assistance aux personnes
habitant le béguinage relève d'un coordinateur payé par les contributions mensuelles
obligatoire (charges) des locataires. Pourtant, le béguinage existant à Loos-en-Gohelle ne
bénéficie pas des services d'un tel prestataire, les loisirs étant parfois pris en charge par le
CLAG (Comité Local d’Actions Gérontologiques). Le béguinage a également été pensé
pour être implanté à proximité du centre-ville, donc des commerces et administrations ;
afin de faciliter les déplacements de ses habitants. Un autre projet de béguinage dans la
petite ville prévoit de réserver certains logements au sein de la résidence à des familles
pour favoriser les échanges et la mixité sociale.
Limites
Un obstacle évident au succès du béguinage existant à Loos-en-Gohelle est
l'absence d'animateur par manque de moyens. De plus la concentration de personnes
âgées dans un même espace donne peu de place à la mixité sociale, et peut donc
potentiellement favoriser un certain repli-sur-soi peu souhaitable.
Contributions et externalités
Ces logements particuliers participent donc à la création de lien social, et
représentent une alternative aux maisons de retraite traditionnelles qui concentrent dans
un cadre médicalisé une majorité de personnes complètement dépendantes ou atteintes
57
de démence, et qui demeurent souvent très coûteuses. Les béguinages sont ainsi un
exemple de réponse solidaire au défi social que représente le vieillissement de la
population. Quand la résidence en maison de retraite est souvent une décision difficile à
prendre pour les familles et une expérience mal vécue par les personnes âgées, il s'agit là
d'un déménagement volontaire au sein d'une communauté adaptée aux aléas de la
vieillesse. Pourtant, l'absence de mixité sociale peut représenter un vrai obstacle à
l'intégration dans la société urbaine des personnes résidant dans le béguinage. Il apparaît
aussi que l'animation d'un gardien-coordinateur est essentielle pour le maintien d'un lien
social entre les habitants. Seulement, sa présence est conditionnée par les moyens
financiers de la municipalité ainsi que des résidents.
De plus, le béguinage présente un intérêt environnemental indirect par sa location
au centre de la ville, limitant les déplacements des personnes âgées, souvent très
dépendantes de la voiture du fait de leur condition physique.
iii. Aide à l’insertion
La notion d’insertion couvre trois domaines : l’insertion scolaire visant à enrayer les
phénomènes d’abandon ou d’exclusion du système éducatif, l’insertion sociale cherchant
à aider à l’intégration et la lutte contre les discriminations ; et l’insertion professionnelle,
dont le but est de conduire le jeune ou l’adulte vers un emploi ou une activité au plus près
de son projet et de la réalité du marché de l’emploi. Souvent, ces domaines sont
appréhendés de façon conjointe, les mesures visant à l’insertion professionnelle aidant
par la même occasion l’insertion sociale par exemple. La notion d’insertion apparaît dans
les textes officiels en France dans les années 1970 et est maintenant un axe important
des politiques publiques et urbaines. A titre d’exemple, la loi Borloo de 2005 affirme
l’importance des entreprises d’insertion (EI et ETTI) dans l’accompagnement des
personnes en difficulté. Cet objectif a également été un axe d’action majeur pour de
nombreuses associations comme les Régies de Quartier et est maintenant relayé à
l’échelle des écoquartiers comme un axe majeur à promouvoir pour créer un véritable
espace « durable », favoriser l’intégration et le lien social ainsi que lutter contre l’exclusion.
58
L’exemple des Ecossolies, Ile de Nantes
Contexte
Les Ecossolies est une association qui regroupe des professionnels, des
entreprises, des institutions et des militants de la région nantaise se reconnaissant dans
l’ESS. Créée en 2004 pour la mise en œuvre d’un événement promouvant les structures
et les acteurs de l’ESS dans les pays de Loire, l’association s’est élargie et a perduré. Ses
objectifs sont maintenant d’aider au développement de l’ESS via la mise en contact des
différents acteurs de l’ESS et le soutien d’initiatives économiques promouvant l’insertion
professionnelle, la démocratie, le lien social et la qualité de vie dans les quartiers. En 2008,
l’opportunité représentée par des friches industrielles mobilisables dans le quartier de l’Ile
de Nantes ainsi que l’aide de la ville leur ont permis de s’implanter dans l’écoquartier en
devenir et de diversifier leur activité : leurs cinq branches principales sont maintenant
l’hébergement de locaux d’entreprises liées à l’ESS, la vente de produits associés, la mise
en place d’une cantine commune dirigée par trois structures de l’insertion, un rôle
événementiel et la mise en œuvre d’un incubateur de projets. Les Ecossolies envisagent
donc la création d’un lieu multifonctionnel de coopération, l’insertion professionnelle étant
une dimension transversale du projet.
Objectifs
L’aide à l’insertion a pour but de permettre à tous de trouver une place reconnue
dans la société. Dans le cas des Ecossolies, cette aide est principalement réalisée par le
biais de mécanismes d’insertion professionnelle à savoir de remise en contact avec le
milieu du travail ou de réadaptation au marché du travail : contrats aidés, mise à
disposition d’offres d’emploi et de stage dans le domaine de l’ESS, aide au montage de
projet avec mise à disposition de conseillers et de financements, etc. En d’autres termes,
les Ecossolies ont bel et bien une finalité sociale d’intégration au delà de l’objectif
économique. A l’échelle du quartier, cette volonté d’insertion professionnelle permet aussi
de créer une véritable dynamique de quartier et de rapprocher les emplois des zones
d’habitation, limitant ainsi les déplacements nécessaires, territorialisant la vie des
habitants et créant une identité du quartier. Enfin, le but est également de renforcer la
cohésion sociale et l’intégration de tous les habitants.
59
Fonctionnement
L’objectif d’insertion professionnelle des Ecossolies ne se traduit pas seulement par
l’emploi de jeunes demandeurs d’emploi mais pas une mise en réseaux des différentes
entreprises et des membres, permettant aussi bien de faire circuler les offres d’emploi que
de créer des dynamiques de coopération, de complémentarité et de montage de projet.
Par exemple, la mise en place de la cantine des Ecossolies est à la charge de trois
structures de l’insertion qui coopèrent pour développer une offre commune. De même, le
magasin a pour but de commercialiser des services et des produits des entreprises
associées à l’ESS : une offre permanente sera assurée par quatre entreprises choisies par
les Ecossolies après consultation et une offre ponctuelle provenant d’autres entreprises
associées (structures d’insertion, d’autoproduction, de réemploi de textile…) sera
également proposée. Enfin, la fonction d’incubateur et de pépinière de projets permet la
mise en réseaux de différentes compétences ou idées pour former un projet qui sera aidé
par l’association, offrant ainsi une opportunité pour développer de nouvelles dynamiques
d’emploi et de production de richesse.
Limites
Les principaux obstacles rencontrés sont liés à la gouvernance et à la mise en
œuvre d’un projet aussi ambitieux. La procédure complexe d’acquisition et de rénovation
du lieu, la diversité des partenaires, des types de structures et des attentes et le manque
d’un réel pilotage permettant d’orchestrer les dynamiques de coopération et de démocratie
participative ont conduit à un ralentissement notoire du projet. Cette ambition de lieu
multifonction a aussi été un défi important, sa réalisation allant à l’encontre des principes
de l’urbanisme français, qui un nombre limités d’acteurs selon le projet et le domaine
d’activité.
Enfin, la transversalité des procédures d’insertion et de mise en réseaux lie leur
effectivité et leur efficacité à la phase de maintenance du projet : de fait, pour le moment, il
est difficile d’avoir un recul suffisant pour évaluer leur réussite.
Contributions et externalités
La dynamique d’aide à l’insertion mise en place par les Ecossolies s’inscrit
directement dans la logique à la fois de l’économie de la fonctionnalité et de l’Economie
sociale et solidaire. En effet, ce n’est pas tant l’offre d’un emploi qui est assurée que celle
de services de mise en réseaux et de portage de projets. Approfondissant les logiques «
60
classiques » d’insertion mises en place par les Régies de Quartier ou par des associations
comme l’AFEV (Association de la fondation étudiante pour la ville, qui prend en charge
l'entretien des espaces verts, des ateliers de bricolage, des services de course, etc.), les
Ecossolies en proposent une approche plus transversale et immatérielle, basée sur la
coopération et la mutualisation comme vecteurs majeurs de lien social. Au-delà de
l’insertion professionnelle, ces services visent également à renforcer l’insertion sociale et à
créer une identité du quartier basée sur l’inclusion de tous ses habitants.
Enfin, ces services ne promeuvent pas seulement la mixité sociale et le dynamisme
de quartier mais ont également d’importants impacts en termes d’innovation technique et
sociale. En effet, la prospection et le portage de nouvelles activités pionnières permettent
de repenser l’urbanisme et éventuellement de le faire évoluer vers une approche de plus
en plus englobante et transversale de l’espace urbain.
iv. Les Accorderies
Créées en 2002 au Quebec, les Accorderies ont pour but de lutter contre l’exclusion
et la pauvreté, de favoriser la mixité sociale ainsi que de renforcer le dynamisme de
quartier. Le système repose sur un principe simple : les habitants d’un quartier peuvent se
regrouper pour échanger des services, sur la base de leurs savoir-faire, et ce sans aucune
contrepartie financière. Ainsi, un accordeur proposant un service (par exemple effectuant
une heure de dépannage informatique) se voit en échange attribuer un crédit de temps,
qu’il peut ensuite utiliser comme bon lui semble pour obtenir l’un des services proposés
par d’autres accordeurs de son quartier. Cette nouvelle forme de coopération et de
solidarité permet ainsi de renforcer les liens au sein du quartier tout en répondant aux
besoins des personnes en situation d’isolement et de pauvreté. Ce système a rapidement
connu un succès considérable au Québec et le Réseau Accorderie québécois compte
aujourd’hui près de 2000 habitants proposant plus de 700 services au sein de leurs
quartiers. En 2010, suite à un partenariat effectué entre le Réseau Accorderie du Quebec
et la fondation MACIF (compagnie d'assurance), les premières Accorderies ont été créés
en France, dans le 19e arrondissement à Paris et à Chambéry en Savoie, et continuent
aujourd’hui à se développer.
61
L’exemple de l’Accorderie du 19e arrondissement
Contexte
La première Accorderie française est née en 2010 dans le 19e arrondissement de
Paris. Mise en place via la Régie de Quartier locale avec le soutien financier de la
fondation MACIF et de la ville de Paris, ce système a été envisagé comme une réponse
aux enjeux du quartier, caractérisé par un fort taux de chômage, un nombre important de
familles monoparentales ainsi qu’une forte mixité sociale et culturelle. L’initiative a été
couronnée d’un grand succès avec plus de 100 accordeurs rejoignant l'association en
deux mois et une grande diversité de services offerts (cours de photographie, aide au
déménagement, accompagnement à la recherche d’emploi…). Début 2013, l’Accorderie
comptait 520 membres dont 70% d’habitants du 19e arrondissement et la réussite du
projet a généré des initiatives similaires dans d’autres arrondissements (18e, 14e).
Objectifs
L’Accorderie du 19e partage les mêmes objectifs que les Accorderies québécoises,
à savoir la lutte contre la pauvreté et l’exclusion ainsi que le renforcement des solidarités
entre des personnes d’âges, de classes sociales, de nationalités et de sexes différents au
sein d’un quartier. Pour cela, l’Accorderie offre une structure de coopération et de
mutualisation des compétences, pensées comme conditions d’une amélioration réelle de
la qualité de vie de tous.
Fonctionnement
L’Accorderie du 19e fonctionne sur le principe d’une adhésion gratuite des futurs
accordeurs, sous réserve de proposer au moins un service aux autres membres. Cette
adhésion implique également de la part de chaque accordeur, une obligation morale vis-à-
vis du groupe et une aptitude réelle à rendre service. Chaque accordeur a accès à un
«annuaire des accordeurs» sous forme papier et sur le site internet de l’Accorderie,
chaque offre de services répondant au principe « une heure de service rendu vaut une
heure de service reçu» quelle que soit la nature et la complexité du service. Il s’agit
ensuite de prendre contact avec l’accordeur pour convenir de l'échange (type de service,
date et durée de l’intervention). Lorsque le service est rendu, le nombre d'heure de service
sera crédité ou débité selon qu'il s'agit d'un service donné ou reçu. Lorsqu’une personne
devient accordeur, 15 heures sont déposées dans son compte, ce qui lui permet
62
d’échanger des services immédiatement. Le bon fonctionnement du système est
dépendant de l’implication de chaque accordeur en termes d’offre et de demande. Deux
salariés prennent soin du local servant à la mise à disposition de l’annuaire et à la réunion
des accordeurs.
Limites
Les obstacles majeurs à la mise en place et la viabilité des Accorderies sont tout
d’abord leur mode de financement : dépendantes uniquement de subventions, elles n’ont
en effet pas de modèle économique viable et ne peuvent donc pas exister en l’absence de
soutien institutionnel ou privé.
Un second problème souligné par Anne Mistral, directrice adjointe de la Régie de
Quartier du 19e, est l’engouement des populations ne faisant pas partie du quartier pour
ce système. La Régie a ainsi du établir des critères d’adhésion pour éviter un
élargissement géographique au détriment de l’identité du quartier et a préféré favoriser la
création d’autres Accorderies dans d’autres quartiers.
Contributions et externalités
Les Accorderies se situent dans la droite lignée de l’économie de fonctionnalité et
de l’ESS. En effet, ce ne sont plus des biens mais des services qui sont échangés, et un
véritable décloisonnement des domaines d’activité est opéré dans un but de recréation du
lien social et de solidarité à l’échelle du quartier. L’ancrage territorial est ainsi une
dimension cruciale des échanges. A ce titre, les Accorderies fonctionnent sur le principe
de l’holarchie, avec la multiplication de plusieurs structures construites sur le même
modèle comme une solution privilégiée à l’élargissement géographique d’une structure
unique. Ce système propose également une véritable alternative à une offre de services
pensée comme un « assistanat » et développe l’idée d’un échange. Enfin, il offre une
démonstration de l’efficacité d’un système alternatif, qui intègre la majorité des habitants
d’un quartier en se passant de transaction pécuniaires, dans la mesure où le temps fait
office d’unité de comptage. Conclusion : analyse transversale des services
L’étude comparée de ces différents services et sphères fonctionnelles permet
d’établir une typologie de leur articulation avec les enjeux de développement durable. Si
63
chaque service diffère dans ses caractéristiques, il est toutefois possible d’établir des
tendances générales par type de service.
Ainsi, les services à la mobilité intègrent de façon relativement complète les trois
piliers du développement durable : si leur visée principale est de rationaliser et limiter
l’usage de la voiture et les externalités environnementales négatives qui y sont associées
(pollution, émission de gaz à effet de serre), ils ont également pour objectif d’améliorer
l’accessibilité urbaine pour toutes les classes sociales. Ainsi, dans le cadre d’un
écoquartier, l’accent est mis sur les modes de transport doux (vélo, marche) et communs
(bus, tram), afin que la majorité des lieux soient accessibles sans voiture individuelle, que
ce soit au sein du quartier ou via sa connexion avec l’espace urbain. L’autopartage, le
covoiturage ou les stations de vélo en libre service traduisent une volonté de répondre aux
enjeux environnementaux et sociaux. L’aspect économique, souvent moins publicisé, est
néanmoins important dans la mise en œuvre de ces services : à titre d’exemple, la
mutualisation des espaces de parking entre les différents usagers dans les parkings silos
permet d’optimiser l’espace et de réduire les coûts de construction.
Les services de gestion des ressources intègrent également les trois dimensions du
développement durable, avec cependant une prédominance des aspects économique et
environnemental sur les considérations sociales. En effet, l’intérêt majeur de services tels
que la rénovation énergétique des bâtiments existants par les particuliers est économique,
dans la mesure où la diminution de la consommation d’énergie a le plus souvent
d’importantes implications en termes d’économies financières pour les résidents. Ces
économies d’énergie génèrent par ailleurs des bénéfices environnementaux majeurs
(réduction des gaz à effet de serre, etc.) et contribuent aux objectifs de réduction de la
consommation énergétique fixés par les lois du Grenelle de l’environnement (2007). Les
écoquartiers sont des territoires privilégiés pour la mise en œuvre de telles opportunités
dans la mesure où leurs occupants sont souvent sensibles à ces considérations. Enfin, les
bénéfices sociaux sont souvent moins développés ou moins visibles dans cette sphère
fonctionnelle. Cependant, optimiser la gestion des ressources permet de réduire la
précarité énergétique et augmenter le confort. Ainsi, des services comme ISIGAZ
permettent aux habitants moins aisés de limiter leurs dépenses et dans le quartier de
Weingarten à Fribourg, des habitants d’un HLM à énergie positive ont été formés afin de
transmettre les modes d’utilisation et les avantages retirés à tous les locataires.
Enfin, la sphère fonctionnelle des services à la personne fait du domaine social son
pilier central. La création de lien social, l’intégration et l’insertion de tous les habitants du
64
quartier et le renforcement du lien intergénérationnel sont ainsi les axes majeurs des
services observés dans les écoquartiers, du béguinage aux Accorderies. Le but principal
est donc d’insuffler un véritable dynamisme de quartier et de favoriser une réelle qualité
de vie. Cependant, dans le cadre des écoquartiers, ces services dépassent la simple
visée « sociale » et ont également pour objectif de sensibiliser les populations aux enjeux
du développement durable, à l’instar de la Fête des jardins rêvés dans la ZAC de l’Union,
et d’aider à la production de richesses, comme par exemple les mesures d’aide à
l’insertion économique par le biais des Ecossolies.
Ainsi, chacune des sphères fonctionnelles de services étudiées met en œuvre
plusieurs des dimensions du développement durable à l’échelle du quartier et œuvre ainsi
à la réalisation d’un espace « soutenable ».
De plus, la majorité des services observés et présentés ci-dessus participent d’une
vision intégrée, où chaque service est pensé en intégration avec les autres au sein d’une
même sphère fonctionnelle. C’est ainsi le cas de l’usage mixte des parkings silos et de la
création de zones multimodales mais également des services d’insertion ou la mise en
place de jardins partagés. Les espaces et les structures sont donc souvent organisés
dans les écoquartiers en intégrant les usages et les services qui pourront s’y rattacher par
la suite, la mise en œuvre des services devenant de plus en plus transversale. Ce
phénomène fait écho aux théories de l’économie de la fonctionnalité et de l’ESS, dans la
mesure où les services semblent, dans une certaine mesure, se développer de façon
systémique, mobilisant des ressources immatérielles et développant la complémentarité
entre économie de marché classique et économie de services, cherchant ainsi à
maximiser la valeur d’usage des biens. Aussi, les caractéristiques des services observés
dans les écoquartiers étudiés invitent à une réévaluation des relations entre usages et
techniques dans la mesure où ils impliquent une pratique renouvelée de l’espace urbain et
mettent en œuvre une nouvelle conception de l’aménagement des villes.
3. Quels équilibres entre technique et usages ?
Après avoir analysé les services qui ont retenu notre attention pour leur capacité à
créer des liens et des dynamiques renouvelés et intégrant le développement durable dans
l’espace urbain, il nous est possible de revenir sur la question des usages. En effet, la
capacité d’un service à répondre aux enjeux globaux et locaux dépend de la nature des
65
usages qu’il génère. Le fonctionnement programmé du service doit donc questionner les
usages existants et évaluer dans quelle mesure et par quels moyens il est possible de les
modifier.
Dans la sphère fonctionnelle de la mobilité, l’objectif des pouvoirs publics est de
détourner peu à peu les usagers des automobiles, et d’accroître l’utilisation des transports
doux, dans une logique multimodale. Toutefois, la marge de manœuvre des aménageurs
est restreinte en ce qui concerne un changement de pratiques. En effet, les paramètres
physiques des aires urbaines traduisent l’omniprésence de la voiture dans les modes de
vie (éloignement, etc.) et l’action des aménageurs est dépendante des réseaux existants
de transports en commun. Ainsi, s’ils ne sont pas responsables de ces réseaux, ils ont la
capacité de développer et d’implanter de nouveaux services à la mobilité, potentiellement
capables d’initier de nouveaux usages. Aussi les solutions envisagées tentent-elles à la
fois d’optimiser certains modes de fonctionnement relatifs à la voiture, et de promouvoir
d’autres usages en facilitant l’accès à des modes de transport non polluants (bornes de
vélo en libre service, bus électriques, etc.) ou en proposant des équipements innovants.
C’est le cas des parkings silos et du système d’autopartage. Les parkings silos en
tant que tels n’impliquent pas nécessairement une modification de l’usage de la voiture,
mais, en complémentarité avec d’autres services, ils créent de nouvelles opportunités
pour améliorer la performance de l’espace urbain « parking ». Ainsi, la performance
d’usage du parking est optimisée en diversifiant l’offre de service qui s’y développe, et
notamment en utilisant les parkings comme lieux de promotion de la multimodalité. En
outre, l’autopartage promeut un usage différent de la voiture : si les usagers utilisent
toujours l’automobile comme mode de déplacement, le principe de mutualisation permet
une réelle optimisation de l’usage de la voiture. Dans ce cas, le mode de déplacement
utilisé ne change pas, mais c’est bien l’usage qui en est proposé qui évolue, incitant à un
mode de déplacement plus soutenable.
Finalement, dans la sphère de la mobilité, la technique est mobilisée pour optimiser
certaines pratiques existantes en fournissant des équipements qui améliorent la
performance d’usage. De plus, ces aménagements créent un espace pour promouvoir
d’autres pratiques, dans ce cas la multimodalité et la mutualisation des modes transports.
On observe une tendance similaire dans les améliorations techniques apportées aux
transports en commun. Les usagers sont encouragés à accroitre leur usage des transports
en commun du fait de l’amélioration des équipements existants. Par exemple, l’installation
de systèmes de bus en site propre permet une meilleure desserte qui optimise l’offre de
66
transports, ce que viennent renforcer les systèmes d’information en temps réel. La
technique permet ici une optimisation et une rationalisation de la pratique des transports
véhiculées par l’offre de services.
Certains aménagements physiques, qui incitent à de nouvelles pratiques de
l’espace urbain, sont nécessaires pour maximiser l’impact des services à la mobilité. Par
exemple, la réduction des espaces de stationnement (qui va de pair avec la mise en place
des parkings silos) est réellement susceptible de changer les pratiques puisqu’elle a le
potentiel de détourner certains utilisateurs de leur voiture en rendant le stationnement
compliqué. Mais pour réaliser ses objectifs, cette mesure doit être combinée avec le
développement et la promotion de formes alternatives de mobilité. Ainsi, la piétonisation
de certains espaces (par exemple à GWL), ou encore un partage plus équilibré entre
espace piéton, cycliste et automobile, présentent un vrai potentiel pour inciter à l’utilisation
des modes doux, s’ils sont associés à une offre pertinente de transports doux (vélos en
libre service) et de transports en commun (bus, tram, etc.). Le principal levier pour inciter à
un changement de pratiques dans la sphère de la mobilité relève de l’accessibilité, au
sens géographique, physique et social, des modes de transport. Il faut promouvoir des
modes de déplacement et des équipements plus « pratiques » que l’usage traditionnel de
la voiture. Cela induit une complémentarité et une diversité des réponses apportées aux
besoins de déplacement.
Dans le cas de l’énergie, le point de départ des améliorations écologiques semble
reposer sur une prise de conscience de la part des populations de l’intérêt (aussi bien
financier qu’en termes de qualité de vie à long terme) d’un usage économe des
ressources. Cette prise de conscience peut être traduite par un changement des pratiques,
comme c’est le cas pour ISIGAZ. Le conseil énergétique permet d’inciter les habitants à
changer leurs pratiques dans leur logement afin de réaliser des économies énergétiques
et financières. Ainsi ce service n’implique-t-il pas de changement de technique.
La prise de conscience de l’intérêt écologique et économique de la rénovation des
logements existants peut inciter à des changements techniques dans le logement.
Cependant, cela n’implique pas forcément de changements en termes de mode de vie,
dans la mesure où l’utilisation de matériaux écologiques, de nouvelles technologies, et
d’énergies renouvelables ne requiert pas nécessairement de nouvelles pratiques.
Néanmoins, le choix des techniques de rénovation conditionne la modification future des
usages, puisque certaines nouvelles technologies peuvent amener des changements de
pratiques, par exemple la ventilation double flux.
67
Ainsi les économies d’énergie peuvent être réalisées par une rationalisation des
pratiques ou par une amélioration technologique, l’idéal résidant dans leur combinaison.
Pourtant dans les deux cas, le développement d’une conscience écologique, ou au moins
d’une sensibilisation à ces problématiques est indispensable pour initier une démarche
durable.
Enfin, dans le cas des services à la personne et à la collectivité, ils relèvent
principalement d’une intégration du lien social et de la solidarité dans des services déjà
existants : jardins publics, services aux personnes âgées et aide à l’emploi. Si ces
services existaient déjà, l’idée de solidarité vient ajouter une certaine plus value en créant
une logique de proximité dans les quartiers. Ici, il s’agit plutôt de faire évoluer des
pratiques existantes vers une dimension plus solidaire en créant des structures facilitant
cette évolution.
La technique ne joue donc qu’un rôle relativement marginal dans l’offre de services
à la personne ou de services collectifs. Ils relèvent plutôt d’un changement des mentalités
initié par l’institutionnalisation de mécanismes de solidarité.
En conclusion, ces nouveaux services participent à la création d’un environnement
dans lequel de nouvelles pratiques peuvent se développer, et d’autres évoluer vers un
usage optimisé et rationalisé. Ces évolutions sont encouragées par des innovations
techniques, une prise de conscience des enjeux écologiques et un développement de
structures de solidarité. Le rôle des différents leviers varie selon la sphère de
fonctionnalité. L’équilibre entre nouvelles techniques et modification des usages s’avère
également différent pour chaque service. On constate cependant que toute technique
nécessite un usage adapté de même que chaque usage nécessite des techniques ou
structures particulières.
Les services étudiés ci-dessus présentent un intérêt particulier pour cette analyse
car leur fonctionnement met en œuvre une ou plusieurs des dimensions du
développement durable : équité sociale, efficacité environnementale et développement
économique. Surtout, ils constituent une offre de services qui intègre désormais des
dimensions nouvelles telles que la dématérialisation du principe de croissance, l’économie
des ressources, la territorialisation des activités. Conçus en complémentarité les uns aux
autres, ils tentent d’apporter la réponse la plus adaptée aux enjeux d’une sphère
fonctionnelle donnée. Au-delà d’une vision purement technique, les écoquartiers travaillent
donc sur l’évolution des modes de vie, dans laquelle l’offre de services vient appuyer et
compléter les aménagements techniques. Aussi les sphères sont-elles appréhendées de
68
manière intégrale en considérant chaque échelle de réponse à un besoin. Cette offre de
services renouvelée, mettant en œuvre les principes du développement durable et des
théories alternatives aux modes de vie et de consommation actuels, cristallise une
nouvelle approche urbaine, plus systémique, et esquisse les contours d’un nouveau
paradigme urbain. Loin des principes de ségrégation des espaces et d’omniprésence
automobile dont la Charte d’Athènes s’est fait le vecteur, le nouveau paradigme urbain
articule la production urbaine aux objectifs de développement durable, combinant ainsi
lien social, performance environnementale et efficience économique. Chaque espace
urbain est, en outre, envisagé de façon systémique : la mixité fonctionnelle y est cruciale,
tout comme l’articulation des services offerts, au sein d’une même sphère fonctionnelle
voire entre les sphères.
III. QUELS LEVIERS POUR SOUTENIR LA PRODUCTION DE CES SERVICES ?
Pour que de tels services émergent et contribuent réellement à la mise en place
d’un modèle plus soutenable, il est nécessaire que leur conception et leur gestion
intègrent les enjeux globaux du territoire autant que les besoins et les pratiques des
usagers. Or, ces aspects divers sont portés par des acteurs différents. Si les pouvoirs
publics portent les enjeux globaux du territoire, en termes de développement économique,
de préservation de l’environnement et de justice sociale, les acteurs privés ainsi que les
habitants sont davantage porteurs des besoins et des pratiques du territoire. Il s’agira
dans cette partie d’étudier les dynamiques et les structures de rencontre de ces acteurs
dans les projets d’écoquartiers qui permettent l’émergence de cette offre renouvelée de
services (1). Au delà du jeu d’acteurs, certains outils sont essentiels pour appuyer la mise
en œuvre effective des services et leur appropriation par les usagers (2). Ces structures et
outils constituant de réels leviers pour la mise en place d’un modèle plus soutenable, la
question de leur reproductibilité sera envisagée (3).
1. Etablir une gouvernance intégrée pour la gestion des services
La réalisation d’un modèle plus soutenable ne peut être effective que si elle
implique efficacement tous les acteurs du territoire. Au delà de leur base technique, c’est
69
bien la conception fonctionnelle et la gestion des services qui représentent le levier
essentiel de l’appropriation des logiques durables par les usagers. Or cette dynamique de
production et de gestion des services s’inscrit nécessairement dans le contexte territorial
du périmètre auquel le service a vocation à être développé. Aussi l’émergence d’un
service est-elle conditionnée par la gouvernance d’un territoire donné. On constate que les
écoquartiers, qu’ils soient finalisés ou en projet (comme c’est plutôt le cas en France)
présentent un mode de gouvernance qui cherche à intégrer la plupart des parties
prenantes. Certains, notamment les exemples non français, témoignent d’une logique
plutôt ascendante, où l’initiative motrice d’un groupe de citoyens bénéficie du soutien
d’une volonté politique essentielle. En revanche, les projets d’écoquartiers français
relèvent plutôt d’une logique descendante dans laquelle les pouvoirs publics jouent un rôle
moteur et structurant, tant dans l’aménagement du territoire que dans l’offre de services.
Toutefois, ces projets descendants essaient d’impliquer fortement les citoyens dans la
production des services. Que la logique soit ascendante ou descendante, la gouvernance
intégrée des quartiers permet une conception et une gestion concertées des services,
condition essentielle de la production d’un espace répondant tant aux enjeux globaux
qu’aux besoins particuliers. Ces dynamiques témoignent de divers modes d’implication
des nombreux acteurs (a), qui sont cristallisés dans des structures d’offre de service
différentes (b).
a) Equilibres entre les différents acteurs : pouvoirs publics, citoyens et acteurs privés
i. Initiative publique et participation citoyenne : Le principe de l’approche descendante
En France, les collectivités sont à l'origine de tous les projets d’écoquartiers
étudiés. L’approche descendante du projet urbain représente donc la norme. Ainsi, la ville
impulse le projet, prenant souvent en charge tout le portage, du choix de financement et
de l'aménageur à l'organisation de concours et la publication d'appels d'offre. Dans le cas
de la ZAC de l’Union, les communes de Tourcoing, Roubaix et Wattrelos se sont ainsi
fédérées pour développer le projet d’écoquartier sur un terrain commun à leurs trois villes :
l’Union. Elles ont ensuite délégué la maîtrise d’ouvrage et la conception du cahier des
70
charges à une Société d’économie mixte (SEM). En ce sens, les collectivités sont
assurées de la prise de décisions conformes à l’intérêt général. C’est également la
garantie d’une vision globale à l’échelle d’un territoire plus étendu que le seul quartier. La
SEM, par sa nature hybride mais étroitement liée aux pouvoirs publics fait consensus et
permet un leadership important et une compétence élargie, couvrant l’intégralité des
domaines de la maîtrise d’œuvre. Cependant, les municipalités conservent un pouvoir de
décision final sur le projet. Son issue demeure donc étroitement liée, et souvent
dépendante, de considérations politiques. Dans le cas de la ZAC de l’Union, la capacité
d’accord et de consensus entre les différentes parties prenantes de la sphère publique
(les trois villes) est également un paramètre non négligeable du processus de validation
des propositions. Le processus de délégation de la maîtrise d’ouvrage fut très similaire
dans les autres exemples français étudiés : la SAMOA a ainsi coordonné le projet l’Ile de
Nantes, et c’est la SERS qui a été mandaté par la ville de Strasbourg dans le cas de
l’écoquartier Danube.
Un nouveau cadre pour la participation citoyenne
Malgré la nature descendante de l’aménagement dans le contexte français, le
cadre établi par le label EcoQuartier intègre les récentes préoccupations sur la nécessité
d’une participation citoyenne dans les projets urbains. Cette volonté de partager les
décisions avec ceux qui vivent ou vivront l’espace urbain et de développer une “expertise
citoyenne” est à relier avec une nouvelle approche urbanistique qui pénètre peu à peu
l’urbanisme français: en effet, la réussite des projets et des services urbains est de plus
en plus perçue comme liée à la prise en compte des usages, des comportements et des
attentes. Ainsi en France, les habitants sont souvent associés à la conception de
l’écoquartier via des groupes de travail, des réunions, des enquêtes publiques voire des
forums sur internet organisés et gérés par les pouvoirs publics. Cette concertation, doit
être organisée aux termes de l’article L.300-2 du Code de l’urbanisme avant - entre autres
- « toute création, à l’initiative de la commune, d’une zone d‘aménagement concerté ;
toute opération d’aménagement réalisée par la commune ou pour son compte lorsque, par
son importance ou sa nature, cette opération modifie de façon substantielle le cadre de vie
ou l’activité économique de la commune ». Sachant que la totalité des cas d’écoquartiers
français étudiés sont réalisés via la création de ZAC, la concertation est donc un élément
qui doit être systématiquement mis en place par la structure porteuse du projet. Dans cette
logique, des procédures de consultation peuvent également avoir lieu à l’échelle d’un ilot
71
immobilier : ainsi, la société coopérative HLM « Habitat de l’Ill » développe un immeuble
dans l’écoquartier Danube à Strasbourg où chaque futur habitant est consulté quant à
l’élaboration de son appartement et des espaces collectifs de l’immeuble, à la fois sur
l’aménagement physique de l’espace et les services attendus. Néanmoins, il est
nécessaire de préciser que si cette pratique est relativement courante dans les
écoquartiers européens, elle n’est que peu utilisée dans les projets français.
Le processus engagé dans la conception de l’écoquartier GWL-Terrain à
Amsterdam s’impose par sa valeur de contraste avec les exemples français. Ainsi, si le
projet est certes né de la volonté de la municipalité de créer un quartier écologique, elle a
immédiatement mis en place un dispositif de concertation et d’implication active des
citoyens, qui ont répondu très favorablement. A la différence des cas français, les citoyens
ont donc directement été sollicités, malgré la nature descendante du projet, d’abord initié
par les pouvoirs publics.
Le rôle crucial de la volonté politique
La volonté politique est en outre une composante essentielle de ce type d’initiative
descendante, caractéristique des terrains français. Les pouvoirs publics, donnent donc par
leur leadership une orientation claire au projet, étroitement liée à leur politique générale,
donnant une portée plus globale au projet, qui est intégré dans le cadre des mesures
développées en faveur du développement durable. L'élaboration de l'Ile de Nantes est
exemplaire à ce propos. Il est en effet ressorti des différents entretiens que l'impulsion
donnée par la ville ainsi que par ses principales figures politiques (en particulier Jean-Marc
Ayrault, alors maire de Nantes) fut déterminante dans la conduite effective du projet. Le
rôle des instances politiques a également beaucoup relevé de la communication. L'image
du projet de l'Ile de Nantes l'a rendu très populaire localement lui conférant une réelle
dynamique. L’écoquartier est devenu l’un des piliers de la politique menée par la ville, et
donc un enjeu central dans l'attractivité du centre ville. La ville de Loos-en-Gohelle est
également une référence française en termes de volontarisme politique en faveur de la
participation citoyenne. Les initiatives de la collectivité locale sont toutes axées sur le
prisme du développement durable. Ainsi, il n’est pas question à Loos-en-Gohelle de
mesures sociales, économiques et environnementales dissociées, mais d’une logique
intégrative, conciliant les différents axes du développement durable. Dans un contexte
territorial particulier – celui d’un ancien bassin minier extrêmement marqué par la
pauvreté, la municipalité mène d’ambitieuses politiques de services dans ce sens
72
(incitation à la rénovation énergétique du bâti, projets sociaux innovants comme des
béguinages, etc.). Le développement durable est donc porté comme un véritable leitmotiv
par la municipalité, qui le présente comme une solution aux maux de la région, et ainsi
comme une orientation d’avenir.
De la participation publique à la distribution de services dans l’écoquartier
En outre, en France, la ville participe systématiquement à l'offre de services au sein
des écoquartiers. Le plus souvent, leur intervention concerne seulement la livraison des
services publics, comme c’est le cas dans toutes les municipalités françaises. Cependant
il arrive que cette implication dépasse la simple sphère des services publics; ainsi à
Pantin, la collectivité a mis à disposition des terrains destinés à l'implantation de jardins
partagés. Ainsi dans cette acception descendante, les autorités publiques jouent un rôle
de facilitation dans l’offre de services innovants proposés à l’échelle du quartier. Par
exemple, elles ont souvent privilégié les Régies de Quartier par rapport aux entreprises
d’entretien des espaces publics classiques, en énonçant certains critères favorisant les
Régies lors des appels d’offre pour la réalisation de certaines activités de service.
Cependant, en ce qui concerne la phase de maintenance des écoquartiers, il s’avère que
les structures privées ou citoyennes telles que les associations sont les plus innovantes et
créatives en termes de services. En effet, elles sont directement impliquées dans la vie du
quartier et perçoivent de ce fait mieux le « quartier vécu ». La diversité des structures et
des sphères concernées traduit l’usage multifonctionnel des écoquartiers. Leur
dynamisme est donc crucial dans la vie de l’écoquartier puisqu’elles sont à l’origine
d’ateliers, de services, de manifestations et d’actions de sensibilisation primordiales pour
la préservation et l’amélioration de la qualité́ et du cadre de vie du quartier, qu’il soit
environnemental ou social.
Conclusion
Ainsi l’approche descendante qui caractérise la conduite des projets d’écoquartiers
en France présente l’avantage d’insérer le projet dans une dynamique plus vaste. Le
portage du projet par la collectivité permet en effet de vraiment penser la couture de
l’écoquartier avec les zones voisines, dans une conception territoriale plus large qui n’est
pas conditionnée par des intérêts spatio-centrés. L’intégration de l’écoquartier à la
politique de développement durable à l’échelle de la ville est donc dans ce cas effective.
De plus, les cas observés témoignent d’une coordination optimisée par la délégation de la
73
maîtrise d’ouvrage à une entité relativement autonome qui fait preuve d’un champ de
spécialisation large et qui peut se placer en intermédiaire entre la municipalité et les
différents acteurs intervenants dans l’écoquartier. En outre, ce type d’approche
descendante, très caractéristique du système administratif français, peut être questionné.
Il témoigne en effet de la complexité parfois pesante de la bureaucratie, qui laisse peu de
place aux initiatives spontanées. Cela peut constituer une bride à la créativité citoyenne
en termes d’innovation de services.
Néanmoins, il semble que les procédures de participation citoyenne mises en place
soient liées à un besoin de reconnaissance de la légitimité du projet des municipalités. Ce
processus peut ainsi paraître contestable, en ce qu’il revêt parfois une dimension
superficielle, n’impliquant le plus souvent qu’une simple consultation, peu ou pas
contraignante et qui ne parvient à mobiliser que peu de citoyens. Ce schéma, très
classique dans le cas des écoquartiers français, a été beaucoup moins observé lors des
terrains européens. En effet, comme il a été précisé ci dessus, les citoyens jouent un rôle
bien plus actif dans la conception et la gestion des écoquartiers en Allemagne et aux Pays
Bas.
ii. Initiative citoyenne et soutien public : le principe de l’initiative ascendante
Les citoyens comme vecteurs principaux des projets d’écoquartiers
Si les projets d’écoquartiers français étudiés sont tous caractérisés par l’aspect
descendant de leur initiative et de leur mise en œuvre, la plupart des exemples européens
sont au contraire marqués par leurs dynamiques ascendantes : ainsi, dans certains projets
d’écoquartiers (Eva Lanxmeer, Vauban), on observe un véritable transfert de
compétences municipales en termes de conception et d’opération de service aux citoyens.
L’exemple d’Eva Lanxmeer est à ce titre particulièrement représentatif : les habitants ont
joué un rôle crucial dans la conception du quartier et se sont fait les acteurs principaux de
sa valorisation et de sa promotion avant même sa construction. Ainsi, c'est une citoyenne
sans soutien associatif préalable, Marleen Kaptein, qui est à l'origine du projet. Sa
détermination a été le réel moteur de la réalisation du quartier, dans la mesure où elle a
d’elle-même mobilisé un groupe de personnes intéressées, pour ensuite chercher un
soutien municipal. De fait, l’initiative du projet, la recherche de partenaires et la
consultation des habitants ont eu lieu dans le cadre de la fondation Eva, crée en 1994 par
Marleen Kaptein. Une place importante a également été réservée au montage de projet et
74
au design des maisons par les futurs habitants. Cette dynamique d’implication citoyenne a
été poursuivie lors de la phase de maintenance du quartier : chaque habitant doit adhérer
symboliquement à une charte lors de son installation et faire également partie de
l’association d’habitants BEL, ce qui permet d’assurer la continuité des objectifs
environnementaux et du dynamisme de la vie de quartier. Enfin, les habitants prennent
également en charge la mise en œuvre de services ordinairement gérés par la
municipalité, comme l’approvisionnement en eau et en énergie des habitations (Thermo
Bello) et le traitement de la majorité des eaux usées. Dans le cas d’Eva Laxmeer, les
citoyens ont donc été les acteurs principaux de la conception et de la maintenance du
projet, la municipalité faisant figure de partenaire. Cependant, malgré le caractère
intrinsèquement ascendant du projet, la volonté politique des élus de la ville de Culemborg
a été déterminante dans la conduite effective du projet : la municipalité s'était en effet déjà
engagée dans une politique de développement durable ambitieuse et marqué son
volontarisme dans ce sens et, de ce fait, a accueilli favorablement le projet, lui donnant les
moyens de voir le jour. La ville de Culemborg a ainsi soutenu l’initiative jusqu'à sa
livraison, proposant et finançant un terrain à la location idéale (vaste espace disponible à
proximité directe de la gare), prenant en charge sa conception à travers le choix des
architectes, et plaidant en sa faveur lors du conflit l'opposant à la législation de la
province.
Des dynamiques similaires ont également pu être observées dans le quartier
Vauban à Fribourg : initié par les habitants en 1990, l’idée d’un quartier « écologique » a
été développée et défendue par les habitants lors de diverses manifestations (occupations
temporaires de bâtiments) pour finalement être formalisée lors de la création de
l’association « Forum Vauban » en 1995. A terme, la municipalité de Fribourg a fini par
répondre favorablement à la demande et au projet des habitants, grâce notamment au
lobbying des membres du parti « Grünen » au Conseil. Ainsi, les autorités publiques ont
pris en charge une grande partie du financement du projet à différents niveaux de
gouvernement : la ville a acheté le terrain, auparavant propriété fédérale, à des prix très
en-deçà du marché et subventionné l’association « Forum Vauban », tandis que les
autorités régionales ont pris en charge le coût des infrastructures publiques. Quant aux
entreprises publiques de distribution de services (eau, électricité, gaz etc.), elles ont
également investit dans la mise à disposition du réseau aux usagers de Vauban.
Cependant, le « Forum Vauban » a été l’outil majeur de consultation et de participation
citoyenne et s’est positionné comme un acteur essentiel dans la conception, la promotion
75
et la mise en œuvre du projet. A plus petite échelle, la construction du quartier s’est
largement appuyée sur des initiatives citoyennes appelées Baugruppen. Les Baugruppen
sont des groupes de citoyens rassemblés via une forme juridique simple (coopérative,
association) qui mutualisent leurs ressources pour concevoir un logement ou un groupe
de logements correspondant à leurs aspirations personnelles et leur permettant d’inventer
une vie collective plus riche entre voisins. Ces groupes défendent ainsi un projet d’habitat
et de vie qu’ils cherchent à réaliser par eux même en se passant d’un promoteur
immobilier et des intermédiaires associés. Pour ce faire, ils répondent donc à un appel
d’offre pour l’attribution d’un ilot immobilier, au même titre que les promoteurs immobiliers
et financent collectivement leur projet. Bien mené, ce type de construction permet de faire
jusqu’à 30% d’économies par rapport à un projet immobilier classique et a pour principal
avantage de donner aux habitants une grande liberté dans la mise en œuvre de leur projet
et d’étendre ainsi les espaces mutualisés (salles communes, salons, jardins…).
Longtemps, les doutes sur la capacité des Baugruppen à réaliser leur projet immobilier ont
limité leur accès aux ilots immobiliers mais cette absence de statut n’a pas empêché les
initiatives de fleurir à Vauban et Rieselfeld. Depuis 2009, le statut des Baugruppen a
finalement été reconnu dans le Baulandpolitische Grundsaetze et le
Stadtentwicklungsplan (équivalents allemands du PLU) de la ville de Fribourg et leur
reconnaissance légale permet d’asseoir leur présence dans le paysage urbain de la ville.
Un ancrage territorial et idéologique des initiatives
Le caractère ascendant de tels projets et leur réussite peut s’expliquer par le
caractère « militant » de tels écoquartiers : en effet, leur conception revêt un caractère
idéologique et, de ce fait, les habitants partagent des valeurs que l’écoquartier cherche à
véhiculer. Cependant, cette dimension idéologique est associée à un fort pragmatisme qui
permet de ne pas perdre de vue la réalisation effective d’une meilleure qualité de vie. La
genèse même d’Eva Lanxmeer est ainsi intrinsèquement associée à un projet de vie
qualifié d’ « approche intégrale » et couplant architecture écologique, gestion intégrée des
ressources, éducation et participation citoyenne. Le succès des projets est également
fortement lié au contexte légal et culturel dans lesquels ils ont lieu : ainsi, à Fribourg, la
culture de la participation citoyenne a amené de nombreux projets d’autopromotion à se
réaliser, bien avant qu’un cadre légal pour de telles initiatives soit mis en place. Enfin,
dans chaque projet étudié, les dynamiques de coopération entre les citoyens et les
pouvoirs publics jouent un rôle central dans la mise en œuvre effective de l’écoquartier.
76
En outre, la conception d’écoquartiers selon une dynamique ascendante présente
de nombreux avantages : elle permet la mise en œuvre d’un projet en phase avec les
attentes des habitants et assure donc un soutien et une mobilisation des citoyens autour
du projet. Dans les cas étudiés, elle assure également la mise en place de véritables
dynamiques de coopération entre les pouvoirs publics et la société civile, permettant
l’élaboration progressive d’un projet répondant, dans une certaine mesure, aux aspirations
des différents acteurs du territoire. Cependant, ces dynamiques peuvent également
présenter des inconvénients, à commencer par la monopolisation de la parole par un
groupe d’habitants qui ne serait pas nécessairement représentatif des citoyens. Un autre
écueil à éviter est la création d’un quartier déconnecté des enjeux territoriaux
environnants. Un dernier enjeu est celui de la continuité de la participation citoyenne dans
la phase de maintenance du quartier
Vers des dynamiques ascendantes françaises?
La réussite des projets d’écoquartiers réalisés selon une dynamique ascendante
incite à questionner l’absence de telles initiatives dans le contexte français et leur
potentielle adaptation. Si de telles dynamiques existent en France, elles ont du mal à
émerger dans la mesure où les paramètres juridiques et culturels font obstacle à ce type
de projets. La participation citoyenne n’est en effet pas inscrite dans la tradition française
et, d’après F. Faucheux, se situerait essentiellement sur le terrain du conflit. Cependant,
une évolution semble progressivement avoir lieu au niveau légal et culturel pour accorder
de plus en plus de place aux initiatives des habitants. Ainsi, un projet de loi vise à inscrire
les sociétés d’autopromotion et les coopératives d’habitants dans la loi et pourrait faciliter
l’accès des groupes de citoyens aux ilots immobiliers lors d’appels à projets. A Strasbourg,
la réalisation du quartier Danube a également fait l’objet d’une politique de réservation des
terrains pour favoriser ces réalisations et l’association Eco Quartier Strasbourg
accompagne à la demande des projets d’autopromotion pour en faciliter la mise en œuvre.
Les rôles que les citoyens et la municipalité sont amenés à jouer dans la création et
la mise en œuvre des écoquartiers sont très variables selon le contexte culturel et légal
dans lequel le projet s’insère. Ainsi, si en France l’initiative et la mise en place de
l’écoquartier relève quasi systématiquement des pouvoirs publics (dynamiques
descendantes), les exemples néerlandais et allemand sont au contraire structurés par des
dynamiques ascendantes où l’initiative citoyenne joue un rôle essentiel. Cependant,
77
malgré de claires différences de portage et d'initiative, les dynamiques de coopération
entre les différents acteurs des projets urbains sont centrales à la réalisation effective de
tous les écoquartiers. Il convient donc de s’interroger sur le rôle des protagonistes privés
dans le jeu d’acteurs à l’œuvre dans la gouvernance de l’écoquartier.
iii. L’implication des acteurs privés et mixtes
Au-delà de la dichotomie entre procédures descendantes et ascendantes, la
question de la gestion des services ne se limite pas qu’aux acteurs publics et à la
participation des citoyens. Il est également nécessaire de s’interroger sur le vaste champ
d’acteurs privés et mixtes et sur leur rôle dans la conception et la mise en œuvre des
services au sein des écoquartiers. La catégorie des acteurs privés regroupe un large
ensemble de structures qui peuvent être impliquées dans la maîtrise d’ouvrage aussi bien
que dans la maîtrise d’œuvre et même au delà. En effet, si certains acteurs privés
interviennent principalement en phase de conception (par exemple les SEM, promoteurs
immobiliers), d’autres sont plutôt impliqués dans la construction (professionnels du
bâtiment, architectes) ou encore dans la phase de gestion (prestataires de services). Si
les pouvoirs publics apportent leur vision globale des enjeux territoriaux et les citoyens
leur expérience en termes d’usages et de pratiques, les acteurs privés contribuent à
ancrer l’offre de services dans une logique pragmatique. Ils apportent en effet une
expertise professionnelle qui semble indispensable à la mise en œuvre des services et à
leur articulation entre eux dans la logique de sphère. Cette expertise peut ainsi contribuer
à anticiper la question des usages selon les différents aménagements et équipements
fournis.
Les acteurs privés dans la phase de conception
Disposant de plus de compétences techniques dans le domaine de l’aménagement
et souvent de plus de ressources financières, les acteurs privés sont traditionnellement
sollicités par les autorités publiques pour la conception de projets d’écoquartiers. En
France, afin de réaliser un projet d’aménagement, une zone d’aménagement concerté
(ZAC) doit être crée. Au sein de la ZAC, la collectivité territoriale peut agir comme
aménageur ou déléguer cette tâche à une entreprise mixte telle qu’une société
d’économie mixte (SEM), mais certains acteurs privés tels que les promoteurs immobiliers
peuvent également assumer ce rôle. En tant que maître d’ouvrage, l’aménageur privé est
78
en charge d’établir un cahier des charges esquissant les grandes orientations qui portent
les objectifs du projet. La négociation de ce cahier des charges est un moment crucial
dans la conception d’un écoquartier, car les caractéristiques principales du quartier, dont
la performance écologique, la part de logements sociaux ou encore le zonage du projet.
Cette négociation, qui se fait entre professionnels, aménageurs et pouvoirs publics est
également le moment où les contraintes financières et les objectifs en termes de
développement durable du projet sont mis en balance. Les aménageurs ont donc un rôle
important à jouer afin d’assurer que les aménagements et les services envisagés à partir
des besoins et des usages soient effectivement exécutables. Par conséquent, les acteurs
privés impliqués dans la maîtrise d’ouvrage disposent souvent d’une compétence
technique assez globale, non spécialisée.
Les acteurs privés dans la phase de construction
Si la phase de conception associe encore fortement les acteurs privés aux pouvoirs
publics, la phase suivante, de construction confère une certaine autonomie aux acteurs
privés en charge de la maîtrise d’œuvre. En effet, les structures privées impliquées dans
la maîtrise d’ouvrage peuvent mandater d’autres entreprises privées, plus spécialisées
(dans les domaines de la construction, du logement, du paysagisme, etc.). Ces structures
plus spécialisées deviennent alors maîtres d’œuvre, et agissent dans une logique de
sous-traitance.
Les maîtres d’œuvre interviennent souvent après avoir remporté des appels d’offre
consécutifs à la rédaction du cahier des charges. Ils sont donc sélectionnés pour leur
capacité à mettre en œuvre de manière concrète les objectifs et démarches fixés dans le
cahier des charges. C’est leur capacité à apporter les réponses les plus pertinentes aux
enjeux posés par les aménagements et les services qu’ils proposent qui est alors
valorisée. C’est par exemple le cas du quartier Vauban à Fribourg. Lors de l’attribution des
parcelles aux promoteurs, la ville a utilisé un système de points afin de favoriser les
promoteurs et les projets de haute qualité environnementale ou qui faisaient preuve
d’initiatives sociales innovantes, en cohérence avec les principes fondamentaux définis
dans le plan d’aménagement.
La délégation de maîtrise d’œuvre prend souvent la forme de partenariats public-
privé (PPP) ou contrat de partenariat. Le PPP est un mode de financement qui regroupe
des acteurs privés et publics autour d’un projet prédéfini d’aménagement ou de mise à
disposition d‘équipements. Cependant, les partenariats avec de grands opérateurs privés
79
peuvent être à double tranchant : permettant la mise en place de solutions innovantes
avec des financements et des ressources excédant ceux des collectivités territoriales, le
PPP peut aussi inféoder les objectifs de la collectivité aux logiques économique de
l’opérateur pour qui l’écoquartier n’est qu’un marché à gagner.
Les acteurs privés tels que les professionnels de la construction, et de
l’aménagement paysager sont ainsi responsables du développement de l’immobilier
(résidentiel ou commercial) et des infrastructures (par exemple les parcs). Ils disposent
pour cela d’une certaine marge de manœuvre dans la mise en œuvre des cahiers des
charges, et impactent donc réellement la forme urbaine et les équipements techniques
dans l’écoquartier. Ainsi, en façonnant les espaces privés et publics au sein desquels se
développent les services, les acteurs privés de la phase de construction conditionnent en
partie l’offre future de services et leur appropriation par les habitants.
Les acteurs privés dans la phase de gestion
Une fois les objectifs, les orientations, les libertés et les contraintes définis par la
maîtrise d’ouvrage, l’espace dans lequel les services peuvent être développés est donc
dessiné par les maîtres d’œuvre. L’offre de service est alors articulée en lien avec les
aménagements et les équipements proposés. C’est la responsabilité des opérateurs et
des prestataires de service qui doivent développer une offre cohérente avec les objectifs
du quartier et les aménagements proposés.
Les opérateurs de service public sont souvent des entreprises publiques mises en
concurrence (SNCF…), des entreprises privés à capital majoritairement public (EDF, La
Poste…) ou encore des entreprises majoritairement privées mandatées par l’État ou des
collectivités territoriales dans le cadre d’une concession. C’est, entre autres, le cas des
Vélib’ à Paris, qui est exploité par JC Decaux.
Toutefois, les entreprises n’ont pas forcément les mêmes intérêts que les acteurs
publics aussi les négociations de contrats, tout comme les appels d’offres ouvrent-ils une
certaine marge de manœuvre. Dans la mesure où cette négociation intervient en amont
de la réalisation du projet, l’offre de service peut être pensée en cohérence avec les futurs
aménagements, et vice versa.
Avec davantage d’expérience professionnelle et de connaissance du terrain, les
opérateurs de services jouent un rôle non négligeable dans la gestion des services. Ce
sont souvent de grandes entreprises (Véolia, Suez) dont les domaines d’action sont très
divers (traitement de déchet, transports, approvisionnement en eau), et qui œuvrent pour
80
le compte de la collectivité ou du maître d’ouvrage, notamment par le biais de
concessions. De plus, ces grandes entreprises tendent désormais à intégrer le
développement durable dans la plupart de leurs domaines d’action, qui dépassent parfois
l’échelle du quartier. De tels exemples se trouvent notamment dans le domaine de la
mobilité, par exemple pour les réseaux de transports publics d’une agglomération urbaine
(le cas de la VAG à Fribourg, ou de la SEMITAN à Nantes). Ainsi, les opérateurs de
services publics ont une place importante au sein d’une offre renouvelée de services.
Au contraire, les prestataires de services ne sont pas soumis à un contrat de
service public ou une concession mais offrent leurs services à des acteurs privés ou des
particuliers dans une logique de marché. Ils sont mandatés par ces derniers et leur
fournissent un service répondant à leur demande. Par exemple, les bailleurs sociaux
peuvent faire appel à un prestataire de service pour l’entretien de l’ensemble des espaces
verts et des parties communes. En France, ils peuvent d’ailleurs mandater les Régies de
Quartier pour ce genre de services. Le service d’autopartage de particulier à particulier
MyWheels lancé à EVA Lanxmeer intervient également dans cette logique, et délivre un
service aux particuliers sans être mandaté par la commune. Les professionnels de la
rénovation mobilisés dans le cadre du programme de rénovation énergétique à Loos-en-
Gohelle figurent également dans cette catégorie. La gestion du service relève de la
compétence du prestataire de service, mais le consommateur, soit il acteur privé ou
particulier, peut influencer dans une certaine limite le mode et la gestion de service en
choisissant parmi les alternatives offertes sur le marché.
De l’importance des acteurs privés Le rôle structurant des acteurs privés « classiques » de l’aménagement (SEM,
promoteurs) sur la conception d’un écoquartier, influence donc fortement la réalisation de
la forme urbaine et des dispositifs techniques fournis par les maîtres d’œuvre (entreprises
du bâtiment, urbanistes), qui à leur tour conditionnent les futurs usages et la gestion des
services. Toutefois, il faut garder à l’esprit que ces différentes phases sont
intrinsèquement liées, aussi l’offre de service en phase de gestion n’est elle pas
pleinement conditionnée par les aménagements en phase de construction, mais les deux
sont plutôt pensés dans une logique commune qui intègre avant tout les usages.
En résumé, tous les acteurs des projets urbains (citoyens – individus ou
associations -, pouvoirs publics, acteurs privés) sont être intégrés dans la gouvernance
81
des écoquartiers, à différents niveau d’action. Ceci permet de mener à bien le projet de
manière collaborative, compréhensive et pragmatique, et d’établir les bases d’une bonne
gestion des services susceptibles d’inciter à un comportement plus soutenable. Ces
différents acteurs sont donc tous intégrés à la chaîne de production et de gestion des
services urbains, que ce soit lorsqu’ils contribuent à définir les grandes orientations de
l’écoquartier (pouvoirs publics, citoyens) qui conditionnent l’offre de service (prestataires et
opérateurs privés) et les aménagements et équipements (entreprises spécialisées) mis en
place.
b) Le cadre formel de la gouvernance intégrée Les équilibres entre les acteurs au sein des écoquartiers sont traduits dans un
cadre formel de l’action qui établit un environnement propice au développement des
services. Ainsi, si la gouvernance des projets d’écoquartiers regroupe toutes les parties
prenantes autour d’enjeux communs, il est nécessaire que la collaboration entre les
acteurs soit traduite formellement dans les structures productrices de services afin
d’assurer la continuité de la logique de concertation. Les terrains effectués ont permis de
mettre en lumière deux formes principales de formalisation du cadre collaboratif de
production et de gestion des services : la mutualisation et la coopération. Ces deux formes
présentent un fort intérêt pour la production et la mise en œuvre des services étudiés car
elles perpétuent le dialogue entre acteurs, permettant d’adapter et de diversifier l’offre de
service.
i. La mutualisation
Certains services analysés dans la seconde partie de notre rapport témoignent
d’une forte dynamique de mutualisation, fut-ce de l’espace (parking silo) ou des biens
(autopartage). L’expérience de nos terrains nous permet de définir la mutualisation
comme la mise en commun entre différents acteurs d’un certain capital nécessaire à l’offre
d’un service. La mutualisation permet donc d’associer les différents acteurs autour des
facteurs de production et de mise à disposition des services. Ce cadre d’action permet en
outre de mieux intégrer les objectifs de développement durable dans la réalisation des
services. En effet, certaines entreprises privées pourraient ne pas vouloir rompre avec leur
82
modèle technique (et intégrer les contraintes environnementales) : ce fut le cas à Eva
Lanxmeer où l’entreprise de distribution d’eau dépendant de la municipalité a refusé de
réfléchir à de nouvelles solutions correspondant aux objectifs du quartier. Aussi
l’intégration de différents acteurs dans une gestion mutualisée, et notamment des
habitants, a permis de faire converger les différents intérêts.
Taoufik Souami, développe l’idée d’un cercle de décideurs qui est
traditionnellement composé des services de la municipalité, des entreprises publiques,
des agences municipales et des développeurs, auxquels s’ajoutent d’autres acteurs privés,
ce qui fait particulièrement écho aux cas français. Toutefois, les terrains européens ont
révélé que le cercle de décideurs peut être initialement formé de citoyens, avant d’inclure
les services de la municipalité, ce fut notamment le cas à Eva Lanxmeer où la Fondation
EVA fut le premier organe décideur et développeur du projet, puis représentant des
habitants. Ce cadre de mutualisation peut s’appliquer à la gestion de services collectifs ou
d’espaces permettant l’implantation et le développement des services.
Gestion mutualisée de services collectifs
L’émergence d’une gestion mutualisée de certains services collectifs est apparue
sur plusieurs terrains. Cette gestion peut être la responsabilité d’une entreprise privée ou
d’une association. Dans les deux cas, nous avons constaté que la mutualisation de la
gestion du service résulte d’une réclamation émanant des citoyens. Ceux ci revendiquent
la gestion et la prise en charge d’un certain service auprès de la municipalité, et par
conséquent un transfert de compétences des autorités publiques à une autorité citoyenne.
Les raisons de cette réclamation sont diverses mais traduisent souvent une volonté de
mieux adapter le service au contexte du quartier, et notamment aux objectifs qu’il
revendique en termes de développement durable. Souvent, ce transfert de compétences
est le fruit d’une négociation fructueuse entre administration publique locale et leaders
citoyens du quartier. L’enjeu pour les citoyens est de montrer l’intérêt que les pouvoirs
publics ont à leur transférer la compétence de ce service, et également de prouver leur
capacité à le prendre en main de manière effective. D’une part, les groupements citoyens
s’appuient sur le potentiel gain financier pour les pouvoirs publics de transmettre la
gestion d’un service aux citoyens : si ceux ci font preuve de leur capacité à réaliser ce
service, les pouvoirs publics n’ont plus à le financer, du moins plus dans sa totalité. En
effet une grande partie des coûts engendrés par le service en question peuvent désormais
83
être mutualisés entre les habitants du quartier, en particulier, le coût humain, puisque la
plupart des services mutualisés observés impliquent le volontariat de la main d’œuvre.
Un exemple notable est celui des entreprises Thermo Bello et Terra Bella à Eva
Lanxmeer. La responsabilisation des habitants dans la gestion de leur environnement est
l’un des principes fondateurs de l’écoquartier, comme une condition de l’adaptation de leur
comportement aux enjeux du développement durable. Réunis dans l’association d’habitant
BEL, les citoyens ont réclamé la prise en charge des services d’approvisionnement en eau
et chauffage, et également d’entretien des espaces verts. L’entreprise de distribution
d’eau anciennement présente sur le site souhaitant se désengager du quartier, les
citoyens ont voulu racheter de manière mutualisée l’infrastructure productrice située dans
leur quartier. L’association d’habitants BEL menait déjà un groupe de travail sur l’énergie
et les installations énergétiques, qui a suggéré que si la compagnie d’eau cédait les
infrastructures, alors le quartier pourrait prendre en charge une part importante de la
production énergétique. Un groupe d’habitant a donc étudié la faisabilité de ce transfert en
réfléchissant à la création d’une entreprise autonome. Au bout de cinq mois, rassemblés
au sein d’une association de développement, les habitants ont proposé un premier
business plan et une étude de faisabilité, en 2008. Cette même année, l’association BEL,
regroupant tous les habitants du quartier a décidé en assemblée générale la création
d’une entreprise, Thermo Bello, qui aurait le mandat d’acheter les infrastructures
productrices d’énergie à la compagnie municipale. Le projet a remporté un vif succès
puisque 80% des familles se sont prononcées favorables après la présentation du
business plan, et que le projet a été entériné par 74 voies contre 6 en assemblée générale.
Le financement de l’entreprise témoigne de cette dynamique mutualisée : il résulte
d’investissements financiers provenant en grande partie des habitants d’Eva Lanxmeer
(par le biais de l’association BEL ou de prêts accordés à l’entreprise par les habitants)
mais également d’un prêt de la banque accordé grâce à une garantie municipale et enfin
d’investisseurs externes tels que des entreprises d’énergie nationales, au titre de la
politique nationale en matière d’économie d’énergie. L’objectif fixé pour l’entreprise est de
développer une exploitation durable, et de permettre au quartier d’atteindre une
performance énergétique neutre en émission de GES. Thermo Bello fonctionne donc
grâce à une infrastructure dont la propriété est mutualisée et la gestion concertée. L’avenir
de l’entreprise et ses orientations sont discutés régulièrement en assemblée générale afin
d’impliquer les citoyens dans la gestion de leur ressources. La viabilité économique de
Thermo Bello n’est pas encore excellente, cependant l’entreprise a réduit les dépenses
84
énergétiques du quartier de 50% en mettant l’accent sur l’efficacité technique de
l’installation.
Dans la même logique, l’entreprise Terra Bella a été créée pour prendre en charge
le service d’entretien des espaces verts. L’entreprise est en partie financée par la mairie
de Culemborg qui subventionne son activité, mais la main d’œuvre est volontaire et
l’entreprise obtient également des revenus d’activités économiques complémentaires
(telles que la vente de jus de pomme produit sur place). Terra Bella a été créée à
l’initiative des citoyens qui souhaitaient s’impliquer dans l’entretien des espaces verts du
quartier, et ont donc réclamé ce droit auprès de la mairie. En outre, cela a permis
d’intégrer ce service dans la dynamique durable du quartier : les habitants entreprennent
l’entretien des espaces verts sans utiliser de produits chimiques, en respectant la
biodiversité et en maintenant une place conséquente pour la nature dans l’espace public.
En prenant en charge de manière mutualisée et volontaire des services
normalement offerts par les pouvoirs publics, les habitants de Eva Lanxmeer ont ainsi pu
accorder ces services avec les principes fondamentaux du quartier.
Si la gestion mutualisée de certains services prend la forme d’entreprises à Eva
Lanxmeer, elle a également été rencontrée sur le mode associatif. Les associations
d’habitant BEL à Eva Lanxmeer, ou encore Koepel (« coupole », qui regroupe) à GWL,
auxquelles les habitants doivent adhérer lorsqu’ils intègrent le quartier, proposent des
services conçus et produits collectivement. De plus les équipements nécessaires à ces
services constituent un capital matériel mutualisé et mis à la disposition de tous les
habitants du quartier. Ainsi à GWL l’association Koepel met en place des journées
d’entretien des espaces publics partagés auxquelles peuvent participer les habitants. Pour
assurer cette démarche, l’association a établi un schéma directeur en collaboration avec
la coordinatrice en charge des relations entre la mairie d’arrondissement et le quartier. Ce
schéma insiste sur la volonté des habitants de rendre GWL plus vert. Toutefois la mairie a
fait part de sa réserve par manque de financement pour l’entretien de plus d’espaces verts.
Le schéma directeur propose donc que les habitants se chargent de l’entretien des
espaces verts, ce qui permettrait à la mairie de faire des économies. En transférant de
plus en plus de responsabilités aux habitants pour l’entretien des espaces publics, la
mairie leur permet d’avoir plus de liberté, dans une certaine mesure, pour l’aménagement
de ces espaces. Ainsi la mairie était auparavant opposée à l’agriculture urbaine car elle
aurait été responsable de l’entretien des cultures disposées dans l’espace urbain. Dans la
85
mesure où les habitants deviennent responsables de cet espace, ils peuvent désormais
créer des jardins partagés et des espaces d’agriculture urbaine.
Il semblerait que la forme de l’entreprise soit plus adaptée si le service pris en
charge implique la mutualisation d’un capital important, comme dans le cas de Thermo
Bello. Toutefois dans les deux cas étudiés, grâce à la gestion mutualisée et concertée des
services, les habitants ont pu répondre eux même à certains de leur besoins ou de leurs
aspirations en termes de cadre de vie. Ils peuvent ainsi façonner les espaces publics et
leur offre énergétique selon les principes et les valeurs portées par le quartier et les
associations d’habitants. Même si l’implication des habitants est irrégulière et loin d’être
automatique, ces expériences semblent couronnées de succès, en particulier dans le cas
d’Eva Lanxmeer. Il semblerait que les pouvoirs publics trouvent un réel intérêt à la
délégation de tels services, à la fois en termes financiers et en termes de légitimité de
l’action. Les services semblent en effet plus adaptés au quartier dans la mesure où les
habitants ont la possibilité de répondre directement à leurs besoins.
Gestion mutualisée d’un espace commun permettant la mise en œuvre de services
portés par les usagers
Dans d’autres cas, la mutualisation n’a pas lieu directement au niveau de l’offre du
service mais essentiellement au niveau d’un espace public indispensable à l’offre de
certains services, notamment ceux portés par les usagers et les habitants du site. D’une
part, la majeure partie des écoquartiers visités possède des espaces mutualisés qui ont
pour but de favoriser le développement du lien social au sein du quartier. Ces espaces
sont dédiés à des utilisations collectives et gérés de manière mutualisée par les habitants.
Par exemple, la majorité des logements construits via des Baugruppen à Fribourg dispose
d’un espace mutualisé constitué d’une cour et d’un jardin, ainsi que d’un espace habitable
et de salles pour des réunions festives. Cet espace est à la disposition de tous et incite au
rassemblement des habitants. La gestion d’un tel espace implique une grande logique de
mutualisation puisque les habitants doivent constamment se concerter pour accorder les
différents usages de l’espace. De plus, les associations de quartier de Vauban et
Rieselfeld possèdent un local mis à la disposition des habitants afin de les encourager à
entreprendre des projets pour le quartier. Ces espaces mutualisés permettent d’offrir aux
habitants des services de conseil pour leurs projets et mettent également à leur
86
disposition du matériel pour les réaliser (par exemple pour des fêtes, des marchés publics,
des évènements sportifs et culturels).
Un autre exemple d’espace mutualisé est celui de la conciergerie à GWL,
Amsterdam. Cette maison disposant d’un jardin n’est pas accessible à tous les habitants,
mais elle l’est dans le cadre de services spécifiques rendus aux habitants. Le concierge
du quartier vit et gère notamment l’entretien de certains espaces verts et de la voierie. Il
s’assure également qu’aucune voiture ne pénètre dans ce quartier interdit aux
automobiles. Lors d’occasions spéciales, la conciergerie offre la possibilité aux habitants
qui le souhaitent de se rassembler.
Sur un autre registre, La Fabrique à Nantes est un bâtiment mis à disposition des
associations par la ville. La Fabrique se définit comme une friche artistique, portée par un
comité informel. Après avoir construit le bâtiment sur une ancienne friche industrielle, la
municipalité a établi des contrats avec deux associations. L’une, Trampolino dispose
d’une partie du bâtiment et soutient les initiatives musicales en mettant à disposition des
artistes des studios de répétition et du matériel. L’autre, Stereolux, est engagée à utiliser
le lieu pour animer la vie culturelle du quartier et de la ville pendant 70% du temps en
produisant leurs propres spectacles et évènements culturels. Les 30% du temps restants,
Stereolux doit louer l’espace à d’autres structures, idéalement de petites structure
engagées dans l’animation culturelle, afin qu’elles puissent promouvoir leurs activités. La
municipalité aide au financement de cette location pour les plus petites structures. La
Fabrique promeut donc la diversification et le dynamisme de l’activité culturelle du quartier
et de la ville en mettant un espace mutualisé à la disposition des différents acteurs des
musiques actuelles à Nantes.
La gestion mutualisée d’espaces dédiés au développement de services permet
donc de dynamiser la vie de quartier et d’encourager les initiatives citoyennes en leur
donnant les moyens de se développer. Cela permet que les habitants et les usagers
développent eux même une offre de services dans le but de contribuer au dynamisme de
la vie collective.
ii. La coopération
La coopération est un élément fondamental de la gouvernance des services
développés dans les écoquartiers. En effet, dans la mesure où les écoquartiers doivent
87
mettre en œuvre les principes du développement durable, et donc intégrer les volets
social, économique et environnemental, il est important que la conception et la gestion de
ces services mobilise toutes les parties prenantes. La plupart des écoquartiers présente
donc des mécanismes de coopération, plus ou moins étendus, entre acteurs publics,
aménageurs, prestataires de services, résidents, usagers et salariés, ce qui est essentiel
afin d’aboutir à la création d’espaces et de services répondant le mieux aux besoins des
usagers et aux enjeux du territoire. Elle prend différentes formes mais procède
essentiellement par la mise en commun de ce que l’économie de la fonctionnalité nomme
le patrimoine immatériel local : les compétences, la confiance et l’information générées par
chaque acteur du territoire doivent être confrontées. Ainsi les acteurs sont amenés à
coopérer pour répondre au mieux aux enjeux du territoire et aux besoins des populations.
Entre acteurs privés
Une première forme de coopération existe entre les acteurs privés. Souvent à
l’initiative des aménageurs, des formes de coopération se développent entre les différents
professionnels pertinents pour la conception et la gestion des services dans les
écoquartiers. Pour le projet de l’Union, par exemple, l’aménageur a très vite pris
conscience de la nécessité d’une gouvernance particulière pour mettre en place des
aménagements durables et penser les services. En effet, l’ambition du projet impliquait
que cent-cinquante personnes de toutes professions (écologues, architectes, ingénieurs,
sociologues, prestataires de services...) étaient investies à temps plein sur le projet, en
dehors des habitants. Il fallait donc trouver la structure permettant d’intégrer au mieux
toutes ces professions dans un projet commun. La SEM Ville Renouvelée, aménageur de
la ZAC de l’Union a donc mis en place des groupes de travail thématiques afin
d’institutionnaliser la participation des acteurs privés. Un Club des partenaires a été créé
afin de préciser les attentes respectives des acteurs et d’organiser leur implication dans le
projet. Cela a permis, selon Agnès Crucé, directrice du projet, de mettre en lumière les
sujets essentiels du projet et de les questionner selon une approche pluridisciplinaire. Par
exemple, les écologues insistaient sur l’importance de la biodiversité, mais quelle place
accorder à une telle notion dans un quartier urbain ? La confrontation des différentes
sensibilités et expertises a permis de préciser les potentialités de chaque espace naturel
ou urbain, de chaque parcelle du projet. Le club des partenaires est aujourd’hui un réseau
de deux cent personnes, acteurs du territoire, tous conscients des enjeux du projet et
investis dans un dialogue constant de coproduction de l’espace et des services. Ce
88
dialogue a permis de programmer les usages possibles du site, et les services qui en
résultent.
Une autre forme de coopération entre acteurs privés a été observée sur le projet de
la ZAC de l’Union. Il s’agit de la cotraitance, dans le cadre de la « Fête des jardins rêvés ».
Si le but de la Fête des jardins rêvés est d’impliquer les habitants et les différents acteurs
du territoire, l’évènement fédère des équipes de cotraitance constituées d’acteurs privés.
Chaque jardin du parcours de la fête procède d’une collaboration entre une organisation
disposant de la compétence d’aménagement et d’animation du territoire, et une
organisation d’acteurs locaux, souvent dans le domaine du social. Par le biais d’appels à
projets, le collectif des Saprophytes, qui organisait la fête a encouragé la formation
d’équipes aux compétences mixtes afin de faire de la parcelle un jardin répondant aux
besoins de son environnement social. Par exemple le jardin de la Plaine Image a été
réalisé dans un contexte d’entreprise. L’environnement direct du jardin est un parc
d’entreprises, aussi les usagers du jardin seront essentiellement diurnes, et peu présents
le soir et le week-end. Le cabinet de paysagistes a donc travaillé en collaboration avec
l’association Sésame, qui fédère des salariés, dans la production d’un espace répondant à
leurs besoins.
Les Sociétés Coopératives et Participatives (SCOP), sont une forme juridique
française institutionnalisant la coopération entre les acteurs privés d’une entreprise. Bien
que soumises à l’impératif de profitabilité, elles présentent une gouvernance démocratique
et une répartition des bénéfices orientés vers la pérennité des emplois et du projet de
l’entreprise. Les SCOP sont de forme SA ou SARL, mais les associés majoritaires sont les
salariés. Ils détiennent au moins 51% du capital social et 65% des droits de vote. Tous les
salariés ont vocation à devenir associés de la structure. Le dirigeant d’une SCOP est élu
par les salariés associés et le partage du profit se fait équitablement entre tous les salariés,
les salariés associés et les réserves pour l’entreprise. La SCOP est la seule coopérative
dont les membres associés sont les salariés. Dans le cadre des écoquartiers et des
services étudiés, cela permet de donner une place significative à tous les acteurs
professionnels engagés sur un projet de mutualisation par exemple.
La société SCOPIC, à Nantes, est née en 2004 pour mener une activité de
communication et d’évènementiel. Dès l’origine, SCOPIC a permis la création d’un
véritable espace de vie en alliant différents évènements tels que la venue de maraichers,
le marché de Noel des jeunes créateurs, ou encore des expositions d’artistes. SCOPIC
dynamise donc la vie de quartier en fédérant différents acteurs privés. Lorsque la SAMOA,
89
en charge de l’aménagement de l’Ile de Nantes, a mis des terrains en vente, SCOPIC
s’est associé en tant que maître d’usage à trois groupements immobiliers (Vinci, Brémond,
Harmonie Habitat) afin de devenir propriétaire d’un lot (l’île-Pad) et d’en programmer les
usages. SCOPIC a donc du travailler en partenariat avec différents professionnels
(avocats, conseillers en développement économique) et également avec des entreprises
de leur réseau de communication souhaitant s’implanter sur l’île-Pad. Ce regroupement de
professionnels, a nécessité une forme telle que la SCOP dans la mesure où chaque
structure apportait des financements au projet. Ainsi la forme SCOP a permis à SCOPIC
de fédérer les acteurs de son activité dans une même structure et de distribuer
équitablement les bénéfices. Toutefois, SCOPIC souhaite maintenant évoluer vers une
organisation bicéphale en une SCOP et une SCIC, mais nous évoquerons cette structure
ci après.
Ainsi lorsque l’offre d’un service est portée essentiellement par des acteurs privés,
ces structures permettent de combiner les objectifs et d’associer les compétences pour
une réponse optimale aux enjeux du quartier.
Entre acteurs privés et publics
Si la coopération entre acteurs privés est essentielle, celle qui peut exister entre
acteurs privés et publics l’est encore plus. En effet, nous avons déjà expliqué l’importance
de la puissance publique pour sa capacité d’initiative, de support et de financement dans
les projets d’écoquartiers. Aussi l’implication des acteurs publics dans les structures
offrant les services étudiés est elle cruciale. Cette gestion peut prendre différentes formes
et permet d’intégrer les impératifs et les objectifs des collectivités territoriales avec les
attentes et les capacités des acteurs privés. Les exemples des Régies de Quartier, ainsi
que le diverses formes juridiques de coopération telles que les Société d’Economie Mixte
(SEM), ou encore les Sociétés Coopératives d’Intérêt Collectif (SCIC) sont
particulièrement à cet égard. Il est à noter que ce sont des formes de gestion française.
Les Régies de Quartier sont des associations loi 1901 dont la gouvernance associe
acteurs publics, associations de quartier et habitants. Elles observent le principe de
cogestion. L’association est constituée de trois collèges. Le premier est constitué des
habitants, le second des pouvoirs publics (des élus de la collectivité territoriale), le dernier
des partenaires socio économiques (tels que les missions locales, centres sociaux,
associations du quartier, etc.). Ainsi, les intérêts et attentes des différents acteurs sont
90
intégrés dans le fonctionnement collégial des Régies. Les décisions prises et les services
élaborés procèdent alors d’une formulation coopérative qui intègre toutes les
composantes du quartier.
Les SEM sont, dans la majeure partie des cas, la structure choisie pour mener à
bien l’aménagement des projets d’écoquartiers en France. Les quartiers de l’Ile de Nantes,
de Danube et de l’Union sont tous trois développés par des SEM (respectivement la
SAMORA, la SERS, et la SEM Ville Renouvelée), mandatées par les pouvoirs publics. Les
SEM sont des sociétés anonymes dont le capital est à la fois public (provenant des
collectivités locales) et privé. Les SEM interviennent dans des secteurs variés, tels que le
logement, les transports, l’aménagement urbain, l’eau, l’énergie, le développement
économique. Elles participent donc de l’offre globale de services urbains. L’intérêt
d’associer public et privé est de produire un service d’intérêt général à un moindre coût.
Par l’implication des pouvoirs publics, le conseil d’administration des SEM assure que les
intérêts des collectivités soient pris en compte de manière globale. Ainsi, le projet de
l’Union est originellement lancé à la demande des maires, afin de recréer de l’activité
économique dans la zone. La SEM Ville Renouvelée est officiellement aménageur de la
friche de l’Union depuis 2007, chargée de mettre en œuvre la programmation des espaces
publics et des terrains afin que les opérateurs puissent développer leurs services. La SEM
a établi une charte d’aménagement des écoquartiers afin de donner un cadre à son action.
C’est ainsi qu’elle a pu réaliser au mieux la mise en œuvre opérationnelle des volontés
politiques. La Charte a œuvré comme un référentiel de l’action publique et privée. En
outre, le cadre de la SEM a permis de dépasser un certain immobilisme des pouvoirs
publics (le projet de l’Union associant trois municipalités) en impliquant les acteurs privés.
Une autre forme juridique, la SCIC permet d’accommoder des acteurs de natures
différentes engagés dans la distribution de services au sein des écoquartiers, en
particulier lorsqu’il s’agit de structures mettant en œuvre la mutualisation des espaces et
des moyens. La SCIC met en place des mécanismes coopératifs identiques à ceux de la
SCOP, évoquée plus haut. Cependant, les membres associés au capital peuvent être de
toute nature, et pas seulement privés : les salariés, mais également tous ceux qui
souhaitent s’impliquer dans le projet tels que les collectivités territoriales, les partenaires
privés, les usagers... Les SCIC produisent des biens ou des services répondant à des
besoins collectifs donnés sur un territoire, en mobilisant au mieux les ressources
économiques et sociales disponibles. La SCIC met donc en œuvre le principe d’intérêt
collectif et d’utilité sociale en organisant les acteurs de tous horizons autour de pratiques
91
de dialogue, débat démocratique et de prise de décision collective. Tout ceci est renforcé
et garanti par sa vocation d’organisme à but non lucratif. Les SCIC sont les seules formes
de coopérative permettant d’avoir un modèle de multi-sociétariat.
Ainsi, SCOPIC souhaite évoluer en deux formes juridiques afin de dissocier l’intérêt
économique et l’intérêt général de son activité. Un Groupement d’Intérêt Economique a
donc été créé afin d’assurer le développement économique international de l’activité en
mettant en commun les activités des quinze entreprises de communication regroupées
autour de SCOPIC. En parallèle, SCOPIC a créé une SCIC regroupant l’association
SOPIC, la ville et la SAMOA, et qui à long terme intégrera des représentants de la vie de
quartier. La SCIC a retenu l’attention des dirigeants de SCOPIC car elle permet de
formaliser le partenariat avec la ville et d’intégrer tous les acteurs du territoire concernés
par l’intérêt collectif de l’action de SCOPIC.
Les Ecossolies, également sur l’Ile de Nantes ont choisi la formule SCIC dans la
mesure où cela permet que toutes les parties prenantes soient présentes au capital et
puissent travailler collectivement sur le projet. Les Ecossolies regroupent de nombreux
acteurs de l’ESS et sont soutenues par Nantes Métropole et différents partenaires privés,
ainsi leur conseil d’administration est composé d’une équipe de salariés, des adhérents et
des financeurs. Les Ecossolies mettent à disposition des acteurs de l’ESS un espace multi
fonctionnel, de manière mutualisée, aussi la SCIC s’est elle imposée comme la meilleure
forme pour assurer la gouvernance d’un tel espace, après que la démarche participative
ait affaibli le pilotage du projet.
A l’étranger, le projet Eva Lanxmeer a été développé conjointement par différents
acteurs : la ville de Culemborg, la fondation EVA, un bailleur social (Kleurrijk Wonen), et
l’association des futurs habitants (BEL). Ces différents acteurs étaient regroupés au sein
de la même entité que l’on peut qualifier d’équipe opérationnelle. La ville a ainsi pu
apporter des fonds et prendre en charge les risques associés au projet, tandis que les
acteurs de la fondation EVA se faisaient les garants des principes fondateurs du quartier.
Ces structures de coopération traduisent fortement les principes de l’ESS, mais
également de l’économie de la fonctionnalité dans la mesure où elles s’inscrivent dans
une logique de développement économique équitable et concerté, sont ancrées dans un
territoire et favorisent ainsi l’action de proximité et le maillage des acteurs.
92
La coopération et la mutualisation apparaissent comme des cadres de production
et de gestion des services particulièrement propices à l’émergence d’un modèle
économique et social plus soutenable. Si les structures de coopération existent et sont
bien institutionnalisées en France, il semble que le concept de mutualisation, et
notamment de la mutualisation de services collectifs pourrait être développé. Les cas de
réclamation par les habitants de transfert de compétences en matière de service public
semblent peu courants en France. Ceci peut s’expliquer par une différence culturelle,
cependant l’intérêt pour les pouvoirs publics de déléguer la gestion de certains services
aux habitants d’un quartier semble réel, et fonctionne à l’étranger. Il pourrait donc être
intéressant de réfléchir à l’adaptation de ce mécanisme en France.
2. Mobiliser des outils variés pour la mise en œuvre des services Les modes de production et de gestion des services, en intégrant le jeu des acteurs
au sein de structures de coopération et de mutualisation constituent des leviers importants
pour la création d’un modèle plus soutenable. Toutefois, afin de réaliser les différents
objectifs fixés au sein des écoquartiers, notamment concernant l’appropriation des enjeux
par les citoyens via leur implication active et leurs usages, certains types d’outils peuvent
être mobilisés.
a) Les outils physiques
Le succès des services innovants dans le domaine du développement durable
dépend certes dans une certaine mesure de la pertinence et de la bonne gestion du projet,
mais est aussi étroitement liée à la capacité à convaincre les usagers de faire l'effort de
les utiliser. Il existe pour cela différents outils physiques ou équipements qui permettent de
soutenir la mise en place des services auprès des habitants. Dans la plupart des cas il
s'agit d'outils incitatifs, qui encouragent les habitants à adopter un service respectueux de
l'environnement. Ces infrastructures sont souvent des gages de praticité, qui participent
au confort de l'usager du service. D'autres outils sont quant à eux contraignants, incitant la
population à ne plus adopter des comportements peu durables. Il s'agit de décourager sur
le long terme ces habitudes, en rendant compliquée leur perpétuation, par exemple par
93
l'absence d'infrastructures de soutien au service en question. Cette approche
contraignante participe de la déconstruction du mode de vie découlant de la société de
consommation et qui repose sur quelques piliers fondamentaux tels que la voiture.
Une manière fondamentale d'encourager le lien social est de prévoir des espaces
publics centraux qui favorisent les rencontres et les échanges. Des infrastructures telles
que des maisons des services ou de loisirs, où des habitants issus de différentes
catégories sociales peuvent interagir sont une manière très simple de favoriser une
ambiance vivante et socialement stimulante dans l'écoquartier.
Pour favoriser l'utilisation de services de mobilité durables, il est important de
travailler sur l'implantation des infrastructures qui sont liées dans l'espace urbain, y
compris en dehors du quartier. L'incitation des habitants à se déplacer à vélo, par exemple,
passe par l'installation du plus de bornes de vélos en libre service, à des endroits
stratégiques, ainsi que par leur entretien régulier. Le « bicloo » à Nantes remplit cet
impératif. La multimodalité est aussi favorisée, afin de rendre les déplacements en
transports collectifs ou autres modes faciles d'accès et adaptables. Pour changer les
usages il s'agit de rendre l'usage de tels moyens de transports plus pratique que la voiture.
Ainsi, l'écoquartier Danube à Strasbourg prévoit des plateformes multimodales, qui
permettront d'allier différents modes de transports doux : une station de vélo/bus/tramway
à proximité directe d'une gare, par exemple.
Un outil contraignant notable qui supporte la mise en place des services à la
mobilité dans l'écoquartier est la réduction du nombre de places de parking construites et
disponibles sur le site. Cette stratégie se répercute sur l'environnement physique de
l'écoquartier puisque l'absence d'une place de parking donnera lieu à la construction d'une
autre infrastructure, et diminue nécessairement la place autant physique que symbolique
de la voiture au sein du quartier. Ainsi à GWL-Terrein, il a été prévu seulement une place
de parking pour six appartements, cela dans le but de dissuader les habitants de posséder
une voiture. En effet, le temps d'attente pour obtenir une place étant actuellement
d'approximativement quinze ans, le potentiel dissuasif d'une telle mesure apparaît très
clairement. En évaluant rationnellement par un calcul coût/bénéfice l'avantage d'avoir une
voiture dans une telle situation, il est fort possible qu'une personne choisisse d'utiliser les
transports en commun ou des modes doux plutôt que de devoir parcourir la ville afin de
garer sa voiture. Le gain de temps est dans ce cas assez évident. Seulement, aller contre
les usages de cette manière implique nécessairement des conflits. Ainsi, le quartier de
GWL a connu quelques problèmes avec les quartiers environnants : du fait du manque de
94
places, beaucoup d'habitants allaient garer leur voiture dans les voisinages, empêchant
les résidents du quartier en question d'y accéder. Il est donc absolument fondamental de
proposer des services à la hauteur des contraintes posées dans l'écoquartier :
contrebalancer l'absence de parkings par un réseau de transports en commun facilement
accessible, rapide et bien connecté, par exemple.
Une manière complémentaire et primordiale pour inciter au changement de
comportement réside ainsi dans l'aménagement urbanistique du quartier pour le rendre
propice aux déplacements piétons ou à vélo. Aussi l'environnement de GWL a-t-il été
pensé de manière à favoriser les modes doux : c'est un quartier entièrement piéton qui
offre donc des chemins aux courbes douces, entourés de végétation ; certains espaces de
jeu pour les enfants ont été créés, des pistes cyclables le traversent de part en part. En
bref, il était question de rendre le quartier agréable aux piétons et en conséquence justifier
la proscription de la voiture de l'espace public.
b) Les outils pédagogiques
Au même titre que les outils physiques, les outils pédagogiques sont fondamentaux
dans la conception et la mise en œuvre des écoquartiers. Ils se situent à la fois comme
pendant des innovations techniques, dont ils assurent la prise en main par les habitants et
comme vecteurs de l’esprit même des écoquartiers, dans la mesure où ils véhiculent et
relayent les idées durables sur le long terme. En ce sens, la pédagogie est fondamentale
car elle favorise la participation des habitants dans la création et l’appropriation de leur
cadre de vie. Mais au-delà de la simple information des habitants, les outils pédagogiques
couvrent une grande diversité de populations cibles (décideurs publics, bailleurs sociaux,
sociétés de transports, aménageurs et habitants), de buts (communication, formation,
éducation, conseil) et de supports (conférences et workshops, services de conseils ou de
renseignements, livrets d’accueil, etc.). Loin de donner une approche exhaustive des
outils pédagogiques, cette section vise à fournir un aperçu des différents outils rencontrés
et des objectifs qu’ils poursuivent.
La plupart des outils rencontrés répond à un but de communication et d’éducation :
chantiers ouverts (Fête des jardins à la ZAC de l’Union), maisons de projets (Hangar 32
sur l’Ile de Nantes, la ZAC de l’Union et Vauban), livrets d’explication et d’information
remis aux nouveaux habitants pour les former au fonctionnement technique des services
95
et au fonctionnement durable (Quartier Vauban, GWL), actions de sensibilisation des
populations aux enjeux du développement durable (Ile de Nantes), etc. Nombreux sont les
outils mobilisés pour informer et initier des changements de comportements et de
pratiques, que ce soit avant l’installation des habitants ou durant la phase dite de gestion
du quartier. Bien qu’étant le plus souvent à destination des habitants, certains outils sont
également mobilisés à destination des salariés : ainsi dans la ZAC de l’Union, des ateliers
de sensibilisation à la mobilité douce et la multimodalité sont organisés pour les salariés
des entreprises déjà implantée sur le site. Ces moyens sont donc mis en œuvre à des
temporalités et des échelles variables selon la population ciblée et peuvent être aussi bien
des services en tant que tels (information et co-conception des appartements par Habitat
de l’Ill et les futurs habitants de l’immeuble du Quartier Danube, Isigaz) que des structures
promouvant ou expliquant le fonctionnement de services.
Ces outils de communication et d’éducation sont parfois transformés en outils de
formation à l’usage des professionnels du bâtiment ou des futurs usagers mais aucun des
terrains étudiés n’en a fourni d’exemple.
Enfin, dans certains cas, les outils pédagogiques sont mobilisés à des fins de
conseil et d’aide à la décision. C’est par exemple le cas d’Isigaz, service de conseil qui
vise à modifier les usages des habitants quant à leur consommation d’énergie. Des
services similaires de conseil à destination des habitants sont également mis en place par
certains promoteurs immobiliers ou associations afin d’aider les futurs propriétaires (achat
ou construction en autopromotion) à aménager leur appartement. C’est le cas par
exemple de l’association Eco-Quartier Strasbourg qui a mis en place un service
d’accompagnement des groupes d’autopromotion (conseils sur les questions juridiques) et
dont l’initiative est soutenue par la SERS (SEM en charge de l’aménagement) dans le
cadre du projet de l’écoquartier Danube.
Ainsi, les outils pédagogiques apparaissent comme essentiels à la mise en œuvre
des écoquartiers : en effet, ils font connaître le projet, mobilisent les habitants autour de
valeurs communes et peuvent ainsi renforcer ou maintenir la cohésion sociale ainsi que
faciliter l’appropriation du projet et par extension, la création d’une vie de quartier. Ils sont
essentiels à l’installation de nouvelles techniques et au développement de nouveaux
processus de décisions et partenariats. Cependant, les outils pédagogiques peuvent
également avoir des effets collatéraux en créant une norme de comportement et de mode
de vie permettant l’instauration d’un certain contrôle social. Vincent Renauld souligne ainsi
que le projet social des écoquartiers véhicule une norme de « l’habitant », plaçant ainsi la
96
vie privé sous un contrôle social exogène et s’émancipant largement des usages sociaux :
« Il ne s’agit pas pour la figure de l’habitant d’édifier de nouveaux environnements mais
d’utiliser ceux produits pour lui selon les modes d’emplois fournis par les experts en
savoir-vivre. » Une illustration de ce phénomène est le cas de GWL, quartier entièrement
piéton où les voitures sont bannies : un « concierge » veille ainsi à ce que personne ne
rentre avec son véhicule dans le quartier sous aucun prétexte, même en cas de
déménagement. La proscription des voitures devient donc une obligation absolue,
contraignant les modes de vie.
c) Les outils normatifs
Les outils normatifs sont des outils plus ou moins contraignants que les différents
acteurs mobilisent pour dissuader ou inciter certains comportements. Dans le cadre
étatique, ce sont les acteurs publics qui mettent en œuvre ces outils, mais des groupes
sociaux peuvent eux-mêmes établir des outils normatifs dans leur propre sphère. La
mobilisation et la modification des supports normatifs établissent des institutions dans le
sens durkheimien : « On peut appeler institution toutes les croyances et tous les modes de
conduite institués par la collectivité. » (Durkheim, 2004). Les normes de conduite
acceptées par l’ensemble des acteurs sont un outil essentiel pour établir, promouvoir et
institutionnaliser des services durables dans le sens social, économique et
environnemental. En “condamnant” des pratiques et des services non soutenables, les
normes permettent d’enraciner des pratiques plus durables dans l’espace urbain. Les
outils normatifs sont également nécessaires pour faire respecter les engagements
environnementaux et pour fournir un cadre institutionnel à la réalisation des écoquartiers
(Souami 2009).
Les instruments mobilisés sont caractérisés par trois différents critères: leur
caractère contraignant, leur mode de fonctionnement et leur échelle d’application. Les
outils normatifs s’échelonnent donc d’outils principalement non-contraignants mais de
caractère incitatif à des lois pénalisantes entrainant des sanctions importantes, en passant
par des normes sociales sanctionnant un comportement déviant d’un acteur. En
conséquence, différents modes de fonctionnement existent qui différent dans la mesure
où ils recourent à la dissuasion ou à l’incitation. Un outil normatif peut normaliser et
97
régulariser, c’est le cas du label ÉcoQuartier ou des normes de HQE. D’autres outils
établissent un comportement conforme que les acteurs doivent respecter sous peine de
sanction. Le règlement de stationnement dans un quartier en est un exemple. Finalement,
les outils normatifs interdisent certaines pratiques ou autorisent voire en imposent
d’autres : on peut ainsi citer l’interdiction de stationnement dans certaines zones (GWL),
l’obligation de raccorder chaque logement à un réseau d’eau chaude ou l’autorisation
explicite de pratiques inhabituelles comme l’attribution de parcelles à des collectifs de
particuliers.
Cet éventail d’outils normatifs est appliqué à différentes échelles, du niveau
international et européen au niveau national et enfin au niveau local voire du quartier ou
de l’îlot. Les outils normatifs aux niveaux international et européen sont en première ligne
des initiatives et recommandations, comme les Agendas 21 ou de la législation dans un
objectif de cadrage, comme les directives de l’Union Européenne. Un bon exemple est la
Directive 2012/27/UE relative à l’efficacité énergétique (Commission Européenne 2012).
Elle impose aux distributeurs d’énergie d’encourager la réduction de la consommation
d’énergie, aux pouvoirs publics de rénover 3% de leur patrimoine immobilier chaque
année et aux entreprises de fournir plus d’informations à leurs clients enfin de réduire leur
consommation d’énergie. Les pouvoirs publics et les acteurs privés restent relativement
libres dans la mise en œuvre tant que les résultats remplissent les conditions fixées dans
la directive.
À l’échelle nationale, les outils normatifs ont surtout vocation à imposer des
obligations à respecter dans le processus d’aménagement et des outils pour mettre en
œuvre des politiques de développement durable à l’échelle locale. La loi solidarité et
renouvellement urbain (SRU) de 2000 rend par exemple la concertation obligatoire et les
Plans de déplacements urbains (PDU) plus prescriptifs. Mais c’est dans le Plan Local
d’Urbanisme (PLU) que sont inscrits le plus grand nombre d’engagements
environnementaux. Des dispositions présentes dans le PLU sont en outre : les objectifs
de réduction de la consommation d’énergie et d’eau et d’amélioration de la gestion de ces
ressources, d’éviter l’étalement urbain et d’améliorer la gestion de l’espace, d’optimisation
des matériaux utilisés, préserver et valoriser le patrimoine bâti et naturel, préserver et
valoriser le paysage et la qualité visuelle, d’améliorer la qualité des logements, améliorer
la propreté, la sécurité et la gestion des risques, de réduire la pollution sonore, de l’eau et
de l’air, de minimiser les déchets et leur gestion, s’assurer de la diversité de la population
98
et des quartiers de la mixité sociale et fonctionnelle, de favoriser l’accès de la population
à tous les services et équipements de la ville à travers des moyens de transport
accessibles, efficaces et bon marché, et enfin de favoriser les modes de déplacement à
faible impact environnemental (Charlot-Valdieu et al. 2009).
La comparaison internationale révèle que la nature contraignante de toutes ces
mesures varie d’un pays à un autre. Le contrat de construction précisant le contenu, les
objectifs et les engagements est, par exemple, plus contraignant en Allemagne qu’en
France. Les cadres juridiques sont plus ou moins flexibles et permettent donc d’adapter
plus ou moins facilement les outils normatifs aux besoins du développement durable, afin
de faciliter l’implantation de structures et la gestion de services durables. Un exemple de
cette souplesse des montages juridiques se trouve dans les écoquartiers néerlandais de
Culemborg et d’Amsterdam. Une forme spécifique de contrat a été utilisée pour déléguer
la fabrication et la gestion d'une partie du quartier. Les municipalités concernées ont
passé contrat avec les habitants des écoquartiers organisés en association pour leur
laisser la gestion de certains espaces verts communs. Dans ce genre de contrats, les
conditions d’usage et modes d’évaluation sont stipulés. Les contrats portent sur des
périodes précises et sont reconduits suivant une évaluation.
Au niveau local, la mise en œuvre des plans locaux est primordiale. La modification
des PLU est un outil normatif prometteur. De nombreux écoquartiers en Europe ont
modifié le PLU et réduit le nombre de stationnements prévus par logement à moins de
deux places par logement. Ceci est fait dans un souci de repenser la place des voitures
dans les quartiers et de réduire le nombre de voitures dans l’espace public et collectif
(Meunier-Chabert 2012). Cette stratégie a globalement connu du succès, autant dans les
écoquartiers de Fribourg et Amsterdam que dans les écoquartiers français. Un autre
exemple de modification du PLU existe à la ZAC de l’Union à Roubaix. Le PLU a été
révisé pour prévoir la mise en place d’un minimum d’espaces privatifs par opération, afin
d’encourager la mutualisation des espaces collectifs pour enraciner de nouveaux modes
gestion.
A Fribourg, lors de l’élaboration des plans pour le quartier Vauban, les futurs
habitants souhaitaient réduire le nombre de voitures dans le quartier pour favoriser les
modes de déplacement doux, créer des espaces publics de qualité et faciliter les
déplacements à pied ou en vélo au sein du quartier. Pour cela, le quartier a été conçu et
aménagé de sorte que les chemins piétons, les pistes cyclables, les infrastructures de
transports collectifs et les espaces publiques et non la voiture dominent l’espace public.
99
Cela a fonctionné au point que la qualité de vie soit supérieure aux quartiers ordinaires.
Toutefois, l’utilisation de la voiture a été réduite notamment à l’aide du concept de mobilité
du quartier. Cette démarche a été mise en œuvre dès le développement du quartier. Son
objectif consiste à réduire le nombre de voitures dans le quartier. La démarche repose sur
plusieurs axes. Dans un premier temps, lors de l’aménagement du quartier, les modes de
transports alternatifs ont été pris particulièrement en compte et l’infrastructure destinée
aux déplacements automobiles a été minimisée. Dans un deuxième temps, des solutions
de déplacements alternatives ont été mise en places, telles que les pistes cyclables, des
offres d’autopartage et des arrêts des transports collectifs. La ligne directrice du concept
était d’augmenter la distance entre logement et voiture, afin que des modes de transport
alternatifs se trouvent plus proches que la voiture, dans un souci de dissuader l’utilisation
de la voiture. Une grande partie du quartier n’est pas équipée de places de stationnement.
D’après la loi allemande, chaque logement doit être équipé d’un certain nombre de
parkings. Or, trois parkings collectifs ont été installés à la périphérie du quartier afin de
mettre à disposition des places de stationnement. (Forum Vauban - s.d.)
Les habitants ont le choix d’acheter une place de stationnement pour leur voiture
ou de renoncer à la voiture. Mais la loi allemande impose la mise à disposition d’une place
de stationnement pour tous les logements, même sans voiture. Pour résoudre ce
problème, une solution particulière a été développée. L’association ayant organisé le
concept de mobilité a acheté un terrain qui peut servir à la construction d’un autre parking
collectif afin de satisfaire la demande potentielle de parkings. Les habitants sans voiture
peuvent adhérer à cette association pour une somme fortement inférieure au prix d’une
place de stationnement. Ils signent un contrat dans lequel ils s’engagent à ne pas utiliser
régulièrement une voiture et à ne pas en posséder. Une fois ces conditions remplies, les
habitants sans voiture sont exemptés de l’obligation de posséder une place de
stationnement. Cet exemple souligne l’importance du cadre légal, dans ce cas l’obligation
de fournir des places de stationnement. Dans le cas de Vauban, cette obligation légale
complique la réalisation d’un quartier sans voiture. L’outil normatif limite donc le succès
d’un nouveau mode de gestion de quartier. Il a fallu l’engagement des habitants et la
création d’un nouvel outil normatif, d’un nouveau système institutionnel sous forme
d’associations et de contrats pour réaliser le concept du quartier réduit en voitures (Späth
Phillip 2013). Grâce à cette boite à outils mobilisés par le concept de mobilité, environ
50% des habitants de Vauban ne possèdent pas de voiture et le quartier jouit d’une haute
qualité de vie.
100
Les outils normatifs ne sont pas seulement cruciaux dans le domaine de la mobilité,
mais aussi dans celui du logement. Le principe de construction et d’accès collectif au
logement, (Baugruppen), appliqué aussi à la coopérative GENOVA eG à Vauban, est
fortement répandu dans le quartier Vauban, mais il a vu le jour dans l’écoquartier de
Rieselfeld, également à Fribourg. Une telle approche permet - entre autres – de réaliser
des bâtiments plus respectueux de l’environnement et de développer des aspects sociaux,
que des entreprises de la construction ne prendraient pas nécessairement en compte ou
pour un prix bien plus élevé (Wirtschafts ministerium Baden-Württemberg 2001). De plus,
elle permet d’établir un règlement ou une charte d’habitants que les habitants doivent
respecter et ainsi d’inciter ou de prohiber certains usages ou comportements. Bien que
non prévu dans le règlement allemand pour l’attribution de parcelles d’une zone à
urbaniser, la ville de Fribourg a accepté et institutionnalisé ce mode d’autopromotion dans
ses principes d’aménagement, ce qui a permis de réaliser une grande partie des
logements à Vauban et à Rieselfeld de cette manière. Le cas des Baugruppen montre à
son tour l’importance de la flexibilité du cadre juridique et de l’utilisation d’outils normatifs
dans la gestion des écoquartiers et la mise en œuvre de services innovants.
Les institutions et les outils normatifs ont une grande capacité de dissuasion ou
d’incitation, c’est pour cela que les outils réglementaires sont aussi un des outils
principaux de contrôle du développement. Ils sont à prendre en compte car leurs effets ne
peuvent être ignorés, ni dans leur capacité à représenter un obstacle pour un service ou
une gestion innovante, ni dans leur capacité à inciter cela. Cependant, les outils normatifs
ne représentent pas toujours le premier choix non plus. Dans certains cas, l’outil normatif
peut limiter la créativité, avoir un coût social trop élevé ou être trop inflexible et difficile à
mobiliser. Selon Nicolas Michelin (2012), le label ÉcoQuartier « entraîne[rait] un
appauvrissement du génie de la conception qui va avec le génie du lieu ». L’idée est plutôt
d’avoir des objectifs et de les contextualiser afin d’aboutir à des solutions au lieu d’utiliser
des idées préconçues, ce que certains outils normatifs risquent de faire. Les outils
normatifs apportent aussi un contrôle social, souvent formalisé ou mutualisé, qu’il faut
prendre en compte. Ceci se fait par exemple à travers des chartes d’usage ou des
gestionnaires dans les écoquartiers.
L’outil normatif est un outil puissant, avec comme but la “discipline du minuscule”
(Foucault, 1975), d’incorporer le comportement approprié. Afin d’augmenter la légitimité
de tels outils normatif, la co-production de normes est essentielle. Si des outils normatifs
101
sont mobilisés, il est important de co-responsabiliser et de « discipliner l’habitant sans
toucher au mieux-vivre de l’éco-quartier ». (Boissonade, 2011)
d) Les outils promotionnels
Il est nécessaire d'appuyer ces services d'éducation sur une communication
intelligente, pour attirer l'attention de la population et l'inciter à s'informer. Tous les
supports doivent être employés, afin de toucher le plus de personnes possibles. Ainsi, il
s'agit de promouvoir le service auprès d'une population-cible, avec pour but d'encourager
les comportements durables, donc d'influencer les habitants. Plusieurs outils sont
mobilisables pour faire la promotion des différents services au sein de l'écoquartier,
inciter à un certain mode de vie ou une implication plus intense des habitants. Ces modes
de promotion visent souvent à toucher une population plus large que le cercle parfois
restreint des personnes prenant part activement à la vie du quartier. Les acteurs
interviewés ont ainsi souligné à plusieurs reprises la tendance à « l'entre-soi » dans les
espaces créés pour la participation citoyenne : il semble que l'on y retrouve parfois
systématiquement les mêmes individus.
Les nouveaux outils numériques offrent des perspectives immenses à la
communication. Internet est en effet devenu un vecteur incontournable de promotion et
d'information des habitants et usagers. Les newsletters distribuées par email ou les
forums sont ainsi devenus des modes de communication classiques utilisés par une
majorité des associations d'habitants rencontrées. Ils n'engagent en effet que peu de frais,
sont efficaces et écologiques. Les réseaux sociaux sont également de plus en plus
sollicités pour interpeller les jeunes sur des sujets liés à leur espace de vie. Les feuillets
traitant d'informations très locales sont aussi publiés, de manière à toucher certaines
catégories de population n'ayant pas accès à Internet (en particulier les personnes âgées).
De nombreux quartiers visités publient ainsi régulièrement une newsletter ou un journal
afin de tenir informées les populations des avancements du projet, ou bien des
évènements quotidiens de la vie de quartier.
L'événementiel est certainement le mode de promotion le plus populaire. En effet
l'organisation de fêtes ou d'évènements ponctuels permet de mobiliser avec succès les
habitants, notamment ceux habituellement peu impliqués dans la vie du quartier. C'est
ainsi une action de promotion qui ne demande potentiellement aucun effort aux personnes
102
visées, ni d'engagement en termes d'intérêt, d'idéologie ou de temps. Il s'agit d'un moment
de loisir et d’agrément organisé pour sensibiliser les usagers. Le point culminant des
jardins rêvés de la ZAC de l'Union, est ainsi la « fête », qui, le 1er juin 2013, a pris la
forme d'une déambulation urbaine sur le site du futur écoquartier. La journée fut aussi
agrémentée par des performances artistiques et autres activités culturelles. Il s'agit de
divertir pour capter l'attention dans un premier temps, puis sensibiliser dans un second
temps, et enfin mobiliser. Les soirées « souper-ciné » organisées à Loos-en-Gohelle ont
été menées dans la même logique : proposer un moment agréable et gratuit, pendant
lequel il est possible d'agir sur les esprits et sensibiliser (donc éduquer) en passant des
cours-métrages en lien avec les thématiques sociales et environnementales. Ces
moments de détente sont à privilégier pour une communication efficace : les habitants
sont plus ouverts à de nouvelles expériences et davantage attentifs au message. Des
événements sur un temps plus long, tels que des expositions, sont aussi possibles.
Cependant, ceux-ci touchent généralement un public plus restreint et informé. Ce genre
d'action peut également être conçu dans un objectif de promotion de l'écoquartier en lui-
même. Ainsi, l'Atelier de l'Ile de Nantes et la SAMOA ont conduit la transformation des
cales de lancements rénovées dans de vieux bateaux de la Cité des Chantiers, au sein de
l'Ile de Nantes, pour en faire un centre culturel, accueillant divers projets, dont des
expositions liées à l'histoire industrielle et maritime de la ville. Ce genre de projet contribue
à améliorer l'attractivité de l'écoquartier par la mise en valeur de son potentiel culturel et
historique.
Il existe en outre des stratégies de promotion utilisant les réseaux internes, pour
une plus grande visibilité auprès d'un public précis. Des Plans déplacements entreprises
(PDE) ont ainsi été mis en place dans certaines structures déjà implantées dans la Plaine
Image de la ZAC de l'Union. Il s'agit grâce à un certain panel d'outils incitatifs de
promouvoir des comportements plus durables auprès des salariés d'une entreprise. Cela
peut ainsi consister en la garantie d'un retour à domicile rapide en cas d'urgence (en taxi
par exemple), une distribution de kits de vélo pour promouvoir ce mode de déplacement,
la mise en place d'un service d'autopartage au sein de l'entreprise, etc. Le contexte
professionnel occupant une large place dans la vie des personnes actives, c'est un
secteur stratégique à cibler pour des mesures de promotion efficaces.
Ainsi la communication liée aux services dans les écoquartiers passe-t-elle par un
large panel d'actions de sensibilisation, mobilisation, information, promotion et explication.
Tous ces dispositifs sont nécessaires au soutien des différents services proposés ainsi
103
qu'au tournant souhaité vers de nouveaux modes de vie plus durables. La promotion est
désormais un élément fondamental de la mise en œuvre d'un écoquartier, et des
politiques environnementales en général.
3. Evaluer les obstacles et les possibilités pour la reproduction des services
Ces services, modes de gouvernance et outils permettent d’interroger la production
de la ville durable. En effet, ils participent d’un projet collectif, d’un objectif global qui doit
guider les politiques d’aménagement et de développement urbain. Si les écoquartiers sont
un contexte propice au développement de tels services et d’une telle gouvernance, ils
doivent être intégrés dans le contexte urbain et participer à l’effort collectif. Ainsi, les
écoquartiers devraient être perméables aux zones voisines et intégrer les attentes des
populations riveraines. Ils doivent s’articuler avec les autres composantes de la ville.
L’objectif est d’organiser la proximité et de construire un vivre ensemble qui ne cloisonne
pas l’écoquartier au regard de l’extérieur. Le projet d’écoquartier apparait comme un îlot
écologique au sein de la ville, censé se connecter au territoire et essaimer les innovations
qu’il met en œuvre. Cependant, certains écoquartiers témoignent d’une conception
idéalisée du quartier, et l’espace urbain environnant doit s’y adapter. Par exemple à GWL,
si le quartier est uniquement piéton et décourage ainsi l’usage de la voiture dans son
périmètre, il ne permet pas de maîtriser réellement les flux de déplacement de ses
habitants en dehors du quartier. De même, les autres usagers n'ont pas été pris en
compte dans sa conceptualisation. L’approche menée dans les écoquartiers est donc
parfois cantonnée à l’échelle spatiale du quartier, notamment dans les écoquartiers
européens visités. Face à cette logique d’échelle restreinte, s’oppose l’approche des
grands opérateurs de services qui peinent à prendre en compte le périmètre du quartier
en tant que tel et appréhendent plutôt le territoire dans sa globalité, uniformément. Ils
répondent ainsi à des logiques différentes d’ordre économique, telles que la rentabilité ou
encore les économies d’échelle. Or, pour penser la ville durable, il semble qu’il soit
nécessaire de confronter ces deux approches opposées et d’envisager une reproductibilité
des services et mécanismes développés au sein des écoquartiers à l’échelle du territoire.
Ainsi, les écoquartiers ne constituent pas nécessairement la bonne échelle, ni une
solution généralisable pour produire la ville durable. Comme le souligne Da Cunha, « ils
ne sont qu’un des niveaux pertinents pour expérimenter, collectivement, la mystérieuse
104
alchimie du passage de l’intention à l’acte. Les pistes de solutions suggérées ne sont pas
génériques mais situées dans des contextes précis » (2013) . L’enjeu, pour la ville durable,
est d’identifier ce que des opérations d’urbanisme menées à l’échelle du quartier peuvent
apporter à la réflexion sur les stratégies de transition vers la ville durable. Ainsi les
écoquartiers devraient être « à la fois laboratoires et tremplins annonçant le virage
progressif qui s’opère vers la ville durable » (La Revue Durable, 2008). En d’autres termes,
le véritable enjeu des écoquartiers ou quartiers durables est de ne plus se limiter aux
bonnes pratiques pour mettre en place de bonnes politiques.
La réflexion sur la reproductibilité des services et des leviers qui les soutiennent
incite à préciser quel(s) objet(s) sont reproductibles. En effet, s’agit-il d'un transfert de
capital matériel, de ressources telles que les technologies, des outils physiques évoqués ;
ou bien d’un transfert de capital immatériel tels que les informations, les pratiques, les
compétences, qui font plutôt référence à la gouvernance ? Il semblerait que les
technologies et les outils physiques soient facilement transférables dans la mesure où ils
font partie d’une certaine « culture » de l’urbanisme actuel. Toutefois le transfert de capital
immatériel, et en particulier des modes de gouvernance, apparaît comme le véritable
levier pour installer des liens économiques et sociaux plus soutenables à l’échelle de la
ville. Plus que les solutions techniques, nous étudierons donc plutôt la question du
transfert des modes de gouvernance car ils contiennent le plus de potentiel quant à
l’intégration des différents axes du développement durable.
Parmi les services étudiés, certains s’inscrivent dans une logique de reproductibilité.
Par exemple, dans la mesure où l’entreprise Thermo Bello à Eva Lanxmeer est
productrice d’énergie et possède sa propre infrastructure, la possibilité d’étendre son
activité au delà de l’écoquartier existe. Toutefois, Gerwin Verschuur a expliqué que telle
n’était pas l’intention des dirigeants. Selon lui, l’extension de la production et de la
distribution de ce service à d’autres quartiers n’est pas une solution pertinente car son
fonctionnement est profondément ancré dans le contexte de l’écoquartier, tant d’un point
de vue géographique que social. Aussi constitue-t-il plutôt une structure qui aurait
vocation à inciter et soutenir des initiatives similaires à celle de Thermo Bello, en
partenariat avec la municipalité. L’implication des habitants étant essentielle dans le
fonctionnement de l’entreprise, il préconise la création de plusieurs structures similaires,
ancrées dans leur quartier et mises en réseau pour optimiser le transfert de compétences
et de pratiques, sur le modèle de l’holarchie. Les dirigeants de l’entreprise Gartencoop à
105
Fribourg ont affiché le même objectif : l’idée n’est pas d’étendre leur activité mais de
soutenir des initiatives similaires sur d’autres territoires. Dans le cas de l’Accorderie du
19ème arrondissement de Paris, le service a connu un succès tel que les membres de la
plateforme n’habitent pas forcément le 19èmearrondissement, mais également les quartiers
environnants. Aussi la nature du service, fondée sur la logique de proximité, s'est-elle peu
à peu perdue, poussant les dirigeants de la Régie à restreindre l’adhésion aux résidents
du 19ème et d’inciter plutôt à la création d’autres Accorderies dans les autres quartiers. A
terme, un réseau des Accorderies devrait être créé afin d’unifier le fonctionnement et de
partager les bonnes pratiques. Par ailleurs, les premiers Baugruppen ont été créés à
Rieselfeld puis développés largement à Fribourg. Ils ont connu un grand succès dans
toute l’Allemagne et sont reproduits de manière similaire dans de nombreuses villes. Ainsi
le principe est diffusé et amélioré grâce aux retours d’expérience, mais jamais une
organisation centrale n’a été créée pour fédérer les différentes organisations et encadrer
leur démarche au niveau national.
Ces expériences suggèrent que l’échelle du quartier est la plus pertinente pour
l’implantation des services et des structures étudiées. La combinaison des logiques de
proximité, de territorialisation et de mise en réseau apparaissent comme particulièrement
pertinente pour intégrer les différents enjeux du développement durable. Dans tous les
cas étudiés, la reproduction par agrandissement d’échelle ne constitue pas une solution
pertinente pour les acteurs, qui insistent sur la nécessité d’ancrer les services dans le
territoire et son contexte socio-culturel. L’objectif d’impliquer les habitants et de rassembler
toutes les parties prenantes autour d’un projet donné s’avère ainsi plus réaliste à l’échelle
du quartier. Les dynamiques de proximité et d’identification au territoire sont
fondamentales pour produire la ville durable, car elles conditionnent l’implication des
acteurs et leur appropriation des enjeux du territoire.
Partant de ces constations et réflexions, il apparait que la reproductibilité des
services s’effectuerait plutôt dans une logique holarchique, et selon une approche ancrée
dans le contexte territorial de chaque quartier. Plutôt que d’étendre l’offre d’un service à
une échelle supérieure à celle du quartier, il s’agirait de reproduire la structure et l’offre de
ce service en conservant l’échelle du quartier. Le service serait ainsi adapté à chaque
quartier, tout en reposant sur des principes communs. Les différentes structures proposant
ce service dans différents quartiers pourraient être fédérées en réseau afin de partager les
bonnes pratiques et les retours d’expérience. Cette mise en réseau est essentielle pour
106
garder une cohérence du tissu urbain et ne pas créer des entités totalement
indépendantes, progressant de manière autonome. Cette approche holarchique est
particulièrement pertinente à l’échelle des métropoles qui connaissent des disparités
économiques, sociales et culturelles parfois extrêmes entre les différents espaces qui
constituent le tissu métropolitain. L’enjeu de l’adaptabilité des services au contexte dans
lequel ils s’ancrent est donc d’autant plus grand que les quartiers sont différents.
Les pouvoirs publics ont un rôle essentiel à jouer dans la dissémination des
services et leur mise en réseau. En effet, ils ont la capacité de porter des projets à valeur
d’exemplarité afin d’inciter et de supporter des initiatives similaires dans différents
quartiers. Ils peuvent ainsi favoriser l’émergence de projets similaires et leur mise en
réseau. De cette manière, les collectivités favorisent l'émergence d’un certain type
d’initiatives en ciblant les subventions accordées pour le développement de projet. Par
ailleurs, les pouvoirs publics peuvent instituer un cadre formel par le biais de la
codification ou de la labellisation (comme c’est le cas en France) afin de guider
l’émergence de services et de structures similaires. Toutefois, la normalisation des cadres
d’action peut également être un frein à la créativité et à l’innovation, et ainsi limiter
l’approche contextuelle que devraient adopter les services. De plus, les pouvoirs publics
semblent les plus à même d’articuler les enjeux de l’écoquartier aux enjeux du territoire
qui l’entoure. En effet, les terrains ont montré que les projets français témoignent d’une
prise en compte plus étendue des besoins du tissu urbain dans lequel s’insère
l’écoquartier, alors que les écoquartiers étrangers semblent relever d’une logique plus
limitée en termes de périmètre. Toutefois, les cas français demeurent à l’état de projet,
aussi ce jugement pourrait-il être plus affiné lorsque les écoquartiers français seront
finalisés.
107
CONCLUSION
L’intégration des principes de développement durable dans les services est donc
engagée dans les écoquartiers, et résulte en une offre renouvelée qui aspire à combiner
dynamisme économique, contribution sociale et respect de l’environnement, renouvelant
ainsi l’approche urbanistique en esquissant les contours d’un nouveau paradigme urbain
« durable ». Nous avons ainsi pu constater la pertinence de l’application des principes de
l’économie de la fonctionnalité et de l’Economie sociale et solidaire à l’étude des services
susceptibles d’engranger un modèle de développement urbain plus soutenable. L’ESS a
en effet pénétré l’économie par plusieurs biais, répondant aux nouveaux défis posés à
l’économie de services par la prise en compte des besoins sociaux, et l’instauration d’une
gouvernance renouvelée mettant en œuvre un jeu d’acteurs plus équitable. Les principes
de l’économie de la fonctionnalité sont quant à eux extrêmement pertinents à l’échelle du
quartier durable. Les services qui découlent de ces nouveaux modes de fonctionnement
sont en effet ancrés territorialement et conçus dans une logique de complémentarité qui
traduit la notion de sphère fonctionnelle. La mise en œuvre et la gestion des services
semblent donc enrichies des principes de l’ESS et de l’économie de la fonctionnalité. Enfin,
il semble pertinent, d’après l’étude des principes fondamentaux de l’holarchie, de proposer
une reproductibilité relative au quartier. Il s’agirait de généraliser des pratiques, services et
modes de gestion sans pour autant opérer de transfert à l’échelle de la métropole per se,
mais bien plus en formant un réseau d’une multitude de structures interdépendantes mais
autonomes au sein de la ville. Enfin notre étude des modes de gestion et des outils
disponibles à la mise en place de services innovants dans les écoquartiers a permis de
conclure à la nécessité d’une gouvernance intégrée, et profondément reliée à la
gouvernance du reste de la ville, comme condition préalable et indispensable à la
réalisation du nouveau paradigme urbain.
Les écoquartiers sont en outre des pépinières idéales à la mise en œuvre de
services innovants qui favorisent un développement urbain durable, dans la mesure où ils
offrent une structure qui se veut innovante et expérimentale. C’est particulièrement le cas
dans les approches descendantes puisque les pouvoirs publics plus que les autres
acteurs ont les moyens de soutenir l’innovation et l’exemplarité. En appelant à une
nouvelle approche de l’environnement, l’écoquartier suggère de nouveaux rapports
108
sociaux et économiques. Il les favorise également par ses infrastructures et le mode de
gouvernance qui y est promut.
Ce rapport met en lumière des différences notables entre les cas français et les cas
européens. D’une part, le modèle qui émerge de l’étude des différents projets français
s’inscrit dans la dynamique descendante, avec une importante force motrice émanant des
pouvoirs publics, et une participation citoyenne systématique mais très encadrée. De
nombreuses formes juridiques permettent d’institutionnaliser la coopération entre les
différentes parties prenantes. Il en résulte des projets d’écoquartiers avec une
gouvernance forte et proposant des services dont la gestion est souvent coopérative ;
mais qui semblent bien articuler enjeux globaux du territoire et besoins relatifs au quartier.
D’autre part, les exemples européens témoignent pour la plupart (excepté GWL) d’une
dynamique plutôt ascendante, mais dans tous les cas la puissance publique apparait
finalement comme un partenaire indispensable à un projet initié et gouverné
principalement par les habitants. Les services qui en résultent témoignent d’un ancrage
territorial très fort et mettent en œuvre le principe de mutualisation. Il semble donc que la
logique descendante favorise une certaine « ouverture » des projets sur le territoire avec
une approche plus globale combinant développement économique, équité sociale et
performance environnementale. En revanche, cette ouverture aux enjeux du territoire
environnant, si elle permet une cohérence entre l’écoquartier et la ville, rend plus difficile
l’implication active des citoyens qui s’identifient moins à un espace plus large dont les
enjeux les dépasse. Les écoquartiers européens apparaissent en quelques sortes plus
centrés sur eux-mêmes et semblent mettre en œuvre une vision plus radicale dans
l’intégration et la mise en œuvre des principes du développement durable. Ces projets
d’initiative citoyenne ont davantage été pensés comme des fins en soi, des espaces
indépendants au mode de vie très particulier, parfois éloigné des enjeux globaux du
développement durable à l’échelle du territoire qui les entoure. Toutefois, l’implication des
citoyens semble plus active tant dans la gouvernance des quartiers que dans la gestion
des services, ce qui permet une très bonne adéquation entre les moyens mis en œuvre
dans l’écoquartier et les modes de vie des citoyens. Il apparait que dans les quartiers
européens, les citoyens se sont fortement approprié les services et les usages incités par
les aménagements, ce qui transparait notamment dans les logiques de mutualisation.
109
Il est intéressant d’étudier les possibilités de rencontre entre ces deux modèles,
considérant leurs avantages et leurs limites respectifs. L’idéal serait en effet de poursuivre
une bonne articulation des enjeux globaux du territoire et des besoins spécifiques du
quartier, tout en autorisant une meilleure implication et appropriation par les citoyens de
ces enjeux et des services et usages qui en découlent. Ainsi, la dynamique engagée par
le label EcoQuartier en France pourrait être complétée de certaines mesures inspirées des
cas européens.
Le label EcoQuartier a en effet permis d’établir un cadre détaillé pour la conception
et la gestion des écoquartiers en France. Cette formalisation permet surtout d’inscrire les
projets d’écoquartiers dans la politique environnementale globale, et d’envisager leur
production de manière plus encadrée. On pourrait donc envisager que la dynamique
impulsée par le label soit enrichie de procédés d’implication citoyenne active. Par exemple,
le label pourrait conférer une réelle place à la co-production dans les engagements de la
Charte, et inciter à l’intégration d’organisations citoyennes dans l’équipe opérationnelle.
Les mécanismes de mutualisation pourraient également être étendus dans la mesure où
ils favorisent une implication et une bonne appropriation des services par les citoyens, et
également le développement de services auto-portés.
Ainsi, en impliquant de manière plus active les citoyens dans la production et la
gouvernance des écoquartiers, ils pourraient être plus actifs dans le renouvellement de
l’offre et la gestion des services qui les concernent plus directement que l’aménagement
global du territoire. In fine, cela permettrait que les usagers s’approprient mieux les
aménagements du site, qu’ils auraient contribué à programmer.
D’autre part, une des principales conclusions de ce rapport concerne la
reproductibilité des services innovants étudiés, ainsi que leurs structures et outils de
gestion. Cette recherche documentaire complétée par une analyse originale de différents
terrains en Europe semble confirmer la pertinence du quartier en tant qu’échelle
d’application et de mise en œuvre d’un nouveau paradigme urbain « durable », véhiculant
une nouvelle approche de la ville et des rapports socio-économiques. Ainsi, une mise en
réseau des structures de services dans l’espace métropolitain apparaît comme une
solution prometteuse garantissant l’instauration de nouveaux liens socio-économiques
dans une perspective environnementale. Concevoir la ville comme un ensemble d’entités
autonomes mais interdépendantes serait alors un vecteur essentiel pour la réalisation du
paradigme urbain durable à l’échelle de la métropole.
110
Pour finir, ce rapport ayant étudié les services innovants proposés dans les
quartiers et écoquartiers en France et en Europe, il serait désormais intéressant d’orienter
de futures recherches vers l’étude de cas extra-européens visant au renouveau des
structures sociales, économiques et environnementales. La distance entre le contexte
socio-culturel et le cadre politique en Europe, et ceux des pays extra européen représente
cependant une difficulté supplémentaire, notamment quant à la question de la
reproductibilité.
11
1
AN
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S
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1 –
Gri
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112
Annexe 2 – Acteurs interviewés
113
114
Annexe 3 – Grille d’entretien
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121
Annexe 5 – Monographies de terrain
122
ILE DE NANTES – NANTES
Aerial overview of the Ile-de-Nantes, © Jibi44/Wikipedia Commons 2008
THE ECODISTRICT
From the former docklands to a new center of the city Surrounded by the Loire river and centrally located in the city of Nantes, the Ile-
de-Nantes island was home to the city’s naval industry. With its decline, the brownfield
Location Island in the city center of Nantes, in Western France
Number of inhabitants 4.400 (2011), 15 000 inhabitants anticipated
Start of development and construction 1991 (development), 2002 (construction)
Completion 2012 (first phase), 2030 (second phase)
Game of actors Top-down process planned and implemented
by the Urban Community of Nantes in
cooperation with other public and private
actors
Services studied Cultural promotion and event management,
social economy development, office work
space development
123
left a gap in the city. In the early 1990s, decided to initiate a long term urban renewal
process to restructure and transform the island into a new center of the city. Instead of
developing independently several projects such as the transformation of the naval industry
brownfield and of a former train station, the creation of a new Palace of Justice, the
development of a new ecodistrict, and the relocation of the city’s hospital, the city called
for a competition to develop a master plan for the entire district. The successful project
aims at connecting the island through green axes, providing new public spaces, to value
its heritage, ensuring social and functional diversity and promoting sustainable mobility
while also reducing the environmental footprint of the area.
Public actors organized in the SAMOA driving the process
The Ile-de-Nantes project was initiated in a top-down-procedure and fostered by
the city of Nantes, in particular by Jean-Marc Ayrault, who, elected as mayor, declared it
a political priority. He and his majority in the city council were the driving forces for the
realization of the project and launched the necessary procedures. A team of architects
was selected and commissioned in 2000 to develop a development concept integrating the
different projects in a development plan for the entire island district. A second
development phase was initiated in 2010 when the architects were replaced due to
divergent conceptions of the political actors and the planners. In 2003, the SAMOA, a
semi-public body was created and entrusted with the entire development project.
Map of the Ile-de-Nantes renewal project© SAMOA 2012
124
Chaired by the mayor of Nantes, the SAMOA regroups all relevant local public
stakeholders and financing institutions. For the second phase of the projects, workshops
have been organized to facilitate the dialogue between public and private actors as well
as citizens. Citizens were involved to the extent that a group of selected citizens was
invited to express their opinion on the project.
THE SERVICES
La Fabrique de l’Ile-de-Nantes: A collective space for culture
The brownfields of the Ile-de-Nantes have been used by several different Initiatives.
La Fabrique de l’Ile-de-Nantes is one of them. Describing itself as a cultural project
supporting new local musicians and accompanying new artists, offering a place for
contemporary music and digital arts. The Fabrique consists of two eye-catching buildings
and a garden space, constructed and funded by the city of Nantes to provide a venue
for the youth and for contemporary culture. It includes amongst others two large
concert venues, an area for experimental art, two cafés, a multimedia area, 16 rehearsal
studios and individual rooms for artists and musicians, a garden area and offices in a total
area of 7500 m². However, its innovative character can be found in the governance and
management of the place.
La Fabrique Ile-de-Nantes © Baierl 2013
125
While officially owned and subsidized by the local authorities, La Fabrique was
developed in cooperation with five associations: l'Olympic, Trempolino, Mire, Apo 33
and Microfaune. It is now run by a board that includes 35 cultural initiatives, with each
actor having one voice. Two larger associations, Stereolux (organizing concerts and
managing the venue) and Trempolino (promoting and supporting musicians) dominate in
numbers and resources, the one actor-one voice principles requires coordination and
cooperation between the actors.
Agreements, subsidies and informal coordination for the governance of a collective
structure
The cities subsidies are the central leverage tool to ensure specific functions of
La Fabrique. Beyond the informal coordination and democratic governance procedure
that allows smaller associations to participate, the agreement between operators
and the local authorities provides the possibility for smaller associations with less
resources to rent the venues for lower rents subsidized by the city of Nantes. A certain
amount of time slots is reserved for associations or groups besides the two largest ones
and for external actors.
In addition, small groups, musicians and artists can receive additional funding for
projects and events. The established structure not only creates and strengthens social
links but also reduces the costs for all involved associations.
Ecossolies - A collective space for social economy actors
Close to La Fabrique another project is
developing and being constructed.
Ecossolies is an association regrouping
professionals and volunteers,
individuals and organisations involved in
the social economy. Through initiative of
local authorities, the association is
founded in 2004. Focusing on the Nantes
area, its objective is to connect and
coordinate local actors of the social economy Ecossolies construction site, © SAMOA 2013
126
and to promote economic development with an emphasis on employment, social
cohesion and participation.
In 2012, construction of 5 580 m² office and working spaces for social economy
organizations began. As for La Fabrique, Ecossolies provide mutualized space for a
collective of actors with associated benefits such as economic efficiency and reduced
use of resources and a strengthening of social links, this time in a perspective of
social economy development.
SCOPIC: Anticipating use, behaviours and services for a real estate development
project
SCOPIC is a Nantes-based communication and event agency. Also engaged in the
animation of its neighborhood community life and providing co-working spaces, SCOPIC
decided to move to the ecodistrict of Prarie-aux-Ducs as part of a development project.
ÎlePAD, as the project is called, is led by a consortium of local and national construction
companies and social housing providers. They are developing an energy positive
housing block, for which the agency is assessing the needs and behaviours of future
inhabitants and workers. Based on expected usages and demands, SCOPIC is adapting
the arrangement of the built environment to optimize it for the future residents and
users and works to include the required services from the start.
SCOPICs assessment of use, behaviours and needs is potentially a way to optimize on a
micro-level the quality of real estate development and urban planning for the users and
residents to come. Furthermore, this analysis and anticipation also improves living
quality, social and cohesion, economic efficiency and reduces the ecological footprint.
Market initiated by SCOPIC, © SCOPIC 2011
127
Promotion of the Ile-de-Nantes by the SAMOA
As the SAMOA corporation is in charge for the entire urban renewal project and manages
the development of the Ile-de-Nantes, they are also responsible for its promotion.
SAMOA publishes regular printed newsletters as well as a magazine that both inform
about ongoing development on the Ile-de-Nantes. Additionally, a former hangar on the
island, the Hangar 32, is used as central information point to inform the public about the
Ile-de-Nantes project.
128
L’UNION – ROUBAIX
Explanatory sign for the planning of l’Union. © M. Delafoulhouze
Location Roubaix – Tourcoing – Wattrelos, France
Number of inhabitants 3000 (+ 3000 workers) to be expected
Start of planning and development 2007
Completion 2009 (first buildings), to be achieved in 2022
Type of initiative Top down
Services studied Mobility services, collective gardens
THE ECODISTRICT
An ecodistrict to revitalize a declining area
The site where the ZAC de l'Union is located in North of France in a former industrial area specialized in textile. Because of the decline of the sector and outsourcing,
the area has been slowly fallen into decay. This region is now one of the poorest in France,
129
with very high unemployment rates. Being located between three different towns, the
local councils had to work together to undertake a redevelopment project. Studies for
reconversion projects really started in 2005, initiated by the “SEM” (public-private
organization) made responsible for the development of the project by the municipalities.
The ecodistrict is 80 hectares large and combines new constructions and rehabilitation
of old, traditional buildings and factories. The driving reason for the construction of the
ecodistrict is thus to bring back economic activity and jobs in the area. The ZAC
includes a strong social dimension. In compliance with French legal standards, it thus
plans to reserve 30% of the housing stock to social housing. Indeed, the idea is to build a
neighborhood accessible to everyone in a socially vulnerable area. The demand of the
local population for the public authorities to bring back life in this declining area was
indeed a leading reason for the project to emerge. The valuable ambitions of the project of
ecodistrict were awarded by the French ministry of sustainable development
(MEDDE) in 2009.
The principle of multi-functionality in a polluted landscape
The Union ecodistrict will be functionally mixed:
it will include economic structures like shops and offices,
as well as habitations to create a real neighborhood life.
Thus, to attract companies, the masterplan called for an
economic specialization strategy, and thus required
the implementation of a cluster in the field of innovative
textiles. The goal is to build a well integrated city
district, not a peripheral quarter. It was also about taking
advantage of the good connection of the site to Lille and
the adjacent towns around thanks to a well developed
collective transportation network (a subway station and
different bus routes). Moreover, the
contracting authorities decided at the very
beginning to give a strong environmental dimension to the redevelopment project. It was
an ambitious decision, since the site was very polluted because of the industrial over-
exploitation that lasted since the early 20th century.
Former industrial infrastructure © M. Delafoulhouze
130
A top-down but integrative governance
Once the ecodistrict model was chosen to drive the Union project, it became
necessary to integrate the principles embraced by the label of the French ministry, and
thus promote citizens participation. Initiated through a top-down approach according
to the French tradition, the project development led by the SEM had to include some
elements of citizens consultation, and emphasize the collaboration between actors
intervening in the project in order to involve them, promote cooperation and build a district
responding to the population's expectations. Therefore, a partners' club (“Club des
partenaires”) was created to foster dialogue between professionals, through the
organization of workshops and meetings. Some voluntary inhabitants are also part of the
process to some extent: the SEM organizes meetings to collect people's opinion on
the planning of the future ecodistrict, and allow them to suggest some ideas. To do so,
the contracting authority uses existing local structures to promote participation, such as
neighborhood committees (“conseils de quartier”). A structure where people can go to
know more about the project (“la Maison de l'Union”) has also been implemented as an
intermediary between the administration and the citizens. During the meetings, the
stakeholders have a voice and, if their suggestions cannot literally constrain the decision-
making process, some of them are taken into consideration. However, the city councils of
the three towns have the final decision-making power: politics matter in the making of the
Union ecodistrict, even though this aspect is clearly balanced by the role of intermediary
played by the SEM in the coordination of all actors. Finally, what is at stake in this
process is to achieve and get a global vision of the management to establish a more
integrated governance.
THE SERVICES
Breath life into the construction site
The ecodistrict construction should be completely achieved in 2022. So, the SEM,
which is in charge of coordinating the whole project, organized a competition between
professionals to find a creative and innovative project to use the available land of the
site during the construction in order to make it nicer and more attractive to live to future
inhabitants, who will arrive through different steps.
131
Indeed, the masterplan includes a large park (10 hectares), that will be a kind of green
lung in the middle of the 80 hectares ecodistrict. The
agency that won combines the skills of landscapers,
architects and graphic designers. It suggested to create
11 collective gardens that would be taken care of by
different teams getting together social workers and urban
planning professionals. They are all very autonomous in
their organization and communication, but occasional
gatherings (with food, cultural animations etc.) are also
organized by the agency, which coordinates and
supervises the operations. Future inhabitants as well as
neighbors can take part of the process and do some
gardening. The provision of such a service thus aims at
involving people and make the project more visible and
attractive, as well as “sewing” the future ecodistrict to the existing surrounding
neighborhoods. It is a way to mobilize citizens for them to take part in urban planning.
Indeed, if the gardens are supposed to be fleeting (because the land is meant to be built
on), it is up to the population to involve more intensively in their future neighborhood for
them to remain.
Innovative mobility services
Since the ecodistrict is not achieved, the services have not been implemented yet.
However, the SEM has already expressed its will to develop very innovative mobility
services. To match sustainable development requirements and in order not to overload
the highway that covers the area with the 3000 working people expected in the offices of
the Union, soft transportation means will be promoted. Urban planning strategies have
been used to deter people to come to work by car: for example, less parking spots
have been planed (1 space for 120 m2 instead of 1 for 30 m2 traditionally). Parking lots
will also be optimized by the multi-story strategy, that mutualizes residential and office
parking lots. This system allows also to implement service providing structure in the
heart of the parking lot (“conciergerie” type) as well as stores. Existing public
transportation networks (subway lines, buses routes, etc.) will also be improved. Finally,
Collective gardens © M. Delafoulhouze
132
an important measure is the transportation plan for enterprises (“Plan déplacement
entreprise”) that aims at encouraging companies to facilitate the use of alternative
transportation for their employees, for instance through car-sharing platforms.
Matching technology and uses
Finally, the Union project emphasizes a lot the necessity to match the new environment-
friendly technology and day-to-day uses of people to implement successfully innovative
services. That is why their implementation will come with intense work with inhabitants and
users in order to get to a behavioral change. Pedagogical tools such as a “welcome
booklet” will automatically be distributed to new inhabitants once they move in their new
home, in order for them to use right the energy-efficient technology. Communication is
thus considered by the leader organization of the project as a crucial aspect of the strategy
to adjust technology to uses and reciprocally.
133
DANUBE – STRASBOURG
Overview of the Quartier Danube, Strasbourg © www.territoires.gouv.fr
Location City of Strasbourg, France
Number of inhabitants Around 1600 expected
Start of planning and development 2008 (Planning), 2012 (first phase of
development)
Completion Not relevant
Type of initiative Top down
Services studied Housing and real estate services
THE ECODISTRICT
An ambitious project initiated by the public powers…
Initiated in 2009 by the public powers of the city of Strasbourg, Danube is a project
of 650 residential units, along with shops, offices and public services, located on a
relatively small brown field area (7 ha). Its location is however very strategic, since Danube
will be both close to the city center and right on the Strasbourg-Kehl axis, thus contributing
to the creation of a cross-border metropolis. Moreover, it is set between two existing
134
districts (Neudorf and Esplanade) and hence perceived as an interface to renew urban
connections. As a result, the integration of the new ecodistrict in the urban fabric has been
an essential feature in the conception and the implementation of the project.
Laureate of the “EcoQuartiers 2008/2009” competition launched by the ministry of
Ecology, Energy, Sustainable Development and Land planning in the “mobility” category,
this ambitious project aims at “being a laboratory for the city of the future”, in terms of
environmental performances, social and functional mixity as well as of integrated and
collaborative governance.
As a “laboratory”, Danube is perceived as the right place to experiment new
technologies and to develop renewable energies: hence, all buildings have to be
constructed in accordance with the “very high environmental quality” norms and some of
them will be passive or even energy positive constructions. Innovative buildings are also
promoted with 10% of the real estate stock devoted to “cohousing groups” projects.
Mobility shift is also a central pillar for energy savings and environmental performance in
Danube: with one private parking space for two dwelling units and the localization of
parkings in the periphery of the district, the space devoted to car traffic within the
ecodistrict is supposed to be very restricted, thus allowing the development of sustainable
transportation means: car sharing, bike renting and parking structures will be implemented,
and an important network of public transports (bus and tramways) is already set for all
inhabitants to be easily connected with the whole city.
This shift from the car to sustainable transportation is also perceived as a way to
promote social mixity, since car ownership is not indispensable (or even an impediment) to
live in Danube and to be connected with the other districts of the city. Social and
intergenerational mixity is also fostered with the provision of infrastructure for all kind of
inhabitants (student accommodation and retirement home, 50% of social housing…).
Public spaces are as well conceived as “meeting spaces” for all, at the scale of the
ecodistrict, of the block and of the building. For example, a part of the public gardens are
to be set by the inhabitants, and collective spaces are to be implemented in most of the
future housings (roofs with a collective garden, barbecue, chairs…).
135
Map of the Quartier Danube, Strasbourg © http://www.saa-architectes.com/
…promoting collaborative governance.
The conception of Danube has been first induced by the municipality of Strasbourg.
Nevertheless, shared governance is a pillar of the project and consultation, partnership
and collaboration are promoted within the various actors. The “Atelier de projet Danube”
has been created in 2008 to provide information to citizens, organize public debates and
workshops about mobility, environmental and housing issues, thus helping the public
powers to understand citizens’ and associations’ expectations and to elaborate the bill of
specifications. Open to all actors interested or involved in the project, the “Atelier de projet”
held its first meeting in 2010 and is associated with a forum on line where all the citizens
can discuss about various issues.
The space devoted to “cohousing groups” projects reflects these attempts to
develop a coproduction of the district. The association “Eco-Quartier Strasbourg” is an
important partner for the municipality, since it can help the coproduction projects by
providing support and advises on legal and organizational matters. Real estate developers
are also encouraged to implement consultation procedures with the future inhabitants of
their buildings.
However, the construction process is only at its beginning (first building phase from
the beginning of 2012 to the end of 2013). Thus, it is quite hard to assess the actual
impact of the consultation and coproduction process on the district for now.
136
THE SERVICES
Housing and real estate services
The relevant services encountered in Danube were mostly housing and real estate
services, due to the early stage of development of the district. However, real estate
developers are not only in charge of building residential units but also to connect housing
patterns with urban services implemented at the district level, such as mobility or
individual services. For instance, some real estate developers will have to cope with an
underground parking (such as Habitation Moderne) or to reserve space for a bike storage
room. The bill of specifications specifies as well the necessity to enforce consultation with
the future inhabitants, and to some extent, to associate them in the design of the building
or of common areas within it.
Inhabitants’ participation has been enforced to various extent, depending of the
real estate developers. As an example, consultation is a real priority for Habitat de l’Ill, in
charge of the construction of 14 residential units devoted to social access to property. In
partnership with the various private actors involved in the construction of the residential
units (architects…), the real estate developer organize regular meetings with the future
owners to discuss the use of the common areas and to foster their appropriation by the
inhabitants. Other meetings are also set for the buyers to meet the architects and to
elaborate the design of their apartments with them. Architectural coherence and
inhabitants’ desires are then coordinated. The aim of the process is to create an actual
use of the building by the collectivity and thus to implement a real quality of life. However,
other real estate developers, and more particularly those in charge of residential units for
rent, cannot implement such dynamics, since they are not able to know their future tenants
during the design phase. To overcome this difficulty, real estate developers such as
Habitation Moderne are working on the creation of a charter explaining the rules of use
of common areas and will organize a welcome meeting with the first tenants to face their
potential questioning.
At last, collective house ownership is enabled via the reservation of spaces for
“cohousing groups” projects, under the supervision of the municipality and of the
association “Eco-Quartier Strasbourg”: the construction phase hasn’t started yet but there
is a real will from the various actors to cooperate in order to initiate a shift where citizens
can be considered as housing producers.
137
The creation of Danube provide evidence of a real will to elaborate an integrated
governance, associating civil society, public powers, private actors and inhabitants.
Hence, consultation process is widely promoted and enacted by the municipality, as well
as integrated in the bill of specifications. It is also taken over by real estate developers and
the citizens themselves, to develop innovative participation forms at the scale of the
block or of the residential unit. Nevertheless, since the construction of the district is at its
very first steps, it will be interesting to study the effective implementation and the continuity
of this dynamics.
138
LOOS – EN – GOHELLE
Location City of Loos-en-Gohelle, Nord-Pas-de-Calais
Number of inhabitants 7000
Start of planning and development Non relevant
Completion Non relevant
Game of actors Leadership of the municipality and
commitment to sustainable development.
Strong mechanisms for citizen participation.
Services studied Environmental consulting, local exchange
trading system, energy-saving renovation,
“béguinage”
THE CITY
A very specific socio-economic context that poses major challenges for urban policies Loos-en-Gohelle is a rural town located in the northern region of France. The
economy of the whole region, hence of the city used to be majorly based on the coal
mining industry. From 1850 to the 1980s, economic and demographic growth in Loos-en-
Gohelle was thus strongly correlated with the growth of this industrial sector. The decline of the mining industry, starting in the 1970s, led to a major recession of the region,
leaving most of the active population unemployed and an important number of brownfields.
Since then, the city faces crucial challenges regarding the redevelopment of these brownfield but also in terms of economic development and social mobility. It has to
address sharp states of poverty and deprivation.
A City Council strongly committed to sustainable development…
139
In response to its socio economic challenges, the city committed to the principles
of sustainable development since this its principles are very relevant to address the
needs for economic and social development as well as environmental rehabilitation of the
territory of Loos-en-Gohelle. The City Council demonstrates a strong will of innovating
and integrating the environment in its policies since the last mayor was elected in 2001.
The City prepared an Agenda 21 by establishing a diagnosis of its territory. This diagnosis
was twofold: it developed a first “social” axis by gathering citizen’s expectations, and a
“physical” axis that evaluated the built environment, ecosystems and landscape
architecture of the city. This diagnosis also led to the creation, in 2000, of a “Charter for
the Quality of Life” that constrains all development projects into a frame that includes
mobility optimization, efficient water, energy and waste management, landscape
architecture, High Environmental Quality for buildings, risk management and citizen
participation.
…That sharply involves its citizens
The City Council aims at involving it citizens in the most extensive way possible,
hence it tends to implement mechanisms of participative democracy, as a means for a
better understanding of the needs and expectations of citizens. Citizens are systematically
consulted on any matter of public policy. Through the “Forum Local Loossois”, the
population is regularly invited to take part in the planning process of municipal projects, or
to give its opinion about it. For each aspect of policy making and implementation, a
collaborative work is undertaken. The city also developed the “fifty-fifty program” which
gives the opportunity to a group of citizens to submit a project to the city council for
improving the quality of life. The supports of the City Council results in the allocation of
funds and provision of technical expertise, while the project is managed and implemented
by the citizens. Additionally, the population was deeply involved in the rewriting of the
local master plan (Plan Local d’Urbanisme) through workshops and public enquiries.
Finally, for the creation of its ecodistrict, the city led “walking diagnosis”: city walks during
which citizens could draw up the inventory of the strengths and weaknesses of their urban
environment.
140
THE SERVICES
Developing services to address the sharp socio-economic challenges
Beyond basic urban services such as mobility services, waste management, etc.,
for which the City of Loos is implementing sustainable development, a few services are
developed that address more directly the challenges of the city to promote a more
sustainable lifestyle.
The city is encouraging landlords to undertake energy saving renovation in their
properties. The municipality took the lead by renovating its buildings, as a way to
exemplify the benefits of such a process. But the real challenges is that citizens undertake
such renovations, since the reconversion of existing built environment has great potential
to implement the energy transition in cities. The renovation in itself is managed by a
professional company specialized in energy-saving buildings. However, such works are
quite expensive and the upfront costs can be deterring for landlord who do not necessarily
foresee the long-term financial benefits. The city made its mission to inform and provide
advices to landlords for them to understand the material, financial and environmental
benefits of energy saving renovation. Indeed, if they are often conscious of environmental
benefits, the landlords do not necessarily perceive that such works can improve thermal
comfort, reduce energetic insecurity and trigger major financial savings on the long
run. Therefore, the city council, after showing such benefits and setting its buildings as
examples, committed to a wide communication strategy to promote this service. The
municipality does not provide funding for this since it does not have the financial means for
it, and also want to make the citizens more aware and responsible. However, numerous
financial tools are provided by the government and are put forward by the city in order to
help landlords applying to them. So far, a few groups of inhabitants undertook the
renovation of their properties, and the city continues its strategy of exemplification.
The municipality of Loos-en-Gohelle is also considering the possibility of organizing
a local exchange trading system. The concept is to encourage citizens to provide
services to each other, based on the skills and tools that they each have. For instance,
one could exchange an hour of English lesson against the fixing of his plumbing system.
This service does not require a lot of investment, but only the building of platform to gather
the citizens and organize the exchange. It also much relies on mutual trust. This kind of
service promotes community feeling and the logic of geographic proximity within a city.
It can contribute to reduce the number and length of trip by having citizens relying on more
141
localized services. Hence the local exchange trading system can have strong social
benefits, as well as environmental and economic benefits.
Loos-en-Gohelle created structures for elderly people (béguinage), in order to
provide them with services adapted to their special needs. Instead of gathering them in a
retirement home, the béguinage consists in a neighbourhood in which they have their own
homes, a certain autonomy and independency, but everything is set for their comfort and
security. The neighbourhood provides mutualized common spaces for receiving friends
and special gatherings. Special events are organized to keep the elderly involved in the
community. Moreover, citizens from surrounding neighbourhood provide the services to
individual in order to strengthen social cohesion in the area. The béguinage mostly
implies strong social benefits.
Promoting the services and involving the citizens
The promotion of these services, which is necessary to involve citizens, is done through a
great number of events (Souper-ciné for instance). There is also a web forum for gathering
the suggestions and opinions of the population about a number of projects.
Photo credit: http://www.loos-en-gohelle.fr/
142
VAUBAN - FRIBOURG
Aerial overview of the Quartier Vauban, Freiburg © Stadt Freiburg
Location City of Freiburg im Breisgau, South-West Germany
Number of inhabitants 5 381 (2011)
Start of development and construction
1993 (Development), 1998 (Construction)
Completion 2000 (First section), 2006 (Last section)
Game of actors Initiated and fostered by organized citizens,
strongly involved in a bottom-up process,
resulting in conflictual co-production
Services studied Mobility services, housing and real estate
services, food retailing services
THE ECODISTRICT
From a former barracks compound to a residential ecodistrict with young population
Vauban is a neighborhood at the southern periphery of the city of Freiburg, in
south-west Germany. It was developed on a former barracks compound of 42 hectares
143
used by the French military until 1992. Built from 1998 to 2006 as a sustainable
neighborhood, Vauban is considered one of the oldest and also most exemplary eco-
districts.
As of today, the district, conceived as predominantly residential area, is home to
more than 5300 residents with a relatively young average age of 28.7 years.
Map of the Quartier Vauban, Freiburg © eRich Lutz
In the district, low energy construction and access to district heating is
mandatory and passive construction style, the use of solar energy and reuse of grey
water is common. A mobility concept that reduces car use and favors public transportation
as well as non-motorized mobility has been implemented. As a result, the district is not
structured by automotive transportation, rather, Vauban is a traffic-reduced area
structured by high-quality walking, cycling and public transport infrastructures
complemented by public spaces and green areas.
The keystone of Freiburg’s first ecodistrict: civil society associations fostering a
bottom-up process
Civil society actors played a great role in the renewal of the former military site into
an eco-district. Since 1992, different groups of citizens such as the Forum Vauban
promoted the creation of a sustainable neighborhood. Housing shortage almost imposed
the decision on the local authorities to designate this area as a new residential area.
However, the demand to create a neighborhood that would be sustainable in economic,
social and ecological terms came largely from the Forum Vauban. This association
144
emerged in 1994, regrouping several initiatives, political supporters and technical
knowledge that requested the creation of a sustainable district in Freiburg and acted as
intermediary with the local authorities.
Actors and structures involved in the development process © Öko-Institut e.V.
Broad public support and political pressure led the City of Freiburg, in charge of
planning the new district, to include these civil society actors in a participatory process of
learning by planning. The development plan was adopted in 1995, construction started in
1998 and the last phase of construction finished in 2006. The initiative and impetus for a
sustainable district in Vauban and a great share of the implementation were characterized
by a bottom-up process carried on by several local associations. While the planning
process was steered, organized and to a great part financed by the city of Freiburg, the
impetus for most of the innovative social structures, modes of governance and services
came from the civil society. The political pressure for social and environmental innovation
resulted in a conflictual process of co-production, partly even against local authorities.
THE SERVICES
Mobility, housing and food retail services
The services examined at the district level in Vauban are in particular services
providing mobility, housing and food retail. Indeed, the mobility concept and the will to
build high ecological standard housing created a demand for services in the domains of
mobility and housing. Mobility services was made necessary by the implementation of the
145
mobility concept in Vauban, as inhabitants required mobility services as an alternative
to the use of cars. So, for instance, the district offers two mutualized public parking
lots to keep cars at the periphery of the district and non-car owners get financial
advantages by joining a dedicated association. Car-sharing services are organized at the
city or regional level but ready-to-use cars are located in the district while five public
transport stops cover the area.
In terms of housing, the services offered are different forms of access to
ownership and housing. Collective house ownership is enabled by housing
cooperatives or associations such as the GenoVa e.G. and the S.U.S.I. e.V. Private
associations for collective house-building, so-called Baugruppen, offer an alternative
to private or public real-estate and are widespread in Vauban. They offer a possibility to
take into account environmental and social specificities wanted by future inhabitants while
lowering construction and maintenance costs. An exemplary food provision service is also
offered by local food shop cooperative, the Quartiersladen Vauban providing local and
organic food to lower prices than adjacent supermarkets to its members.
Public transport infrastructure at the heart of Vauban, © Baierl 2013
Predominant local self-governing associations and cooperatives as host
organizations
Predominant modes and structures of governance of these services observed in
Vauban, Freiburg, are associations or cooperatives, whose members are in most cases
also local residents and customers of the concerned services. Members are usually
involved in democratic or consensual decision-making and most service providers are
146
territorialized non-profit organizations with the single goal to organize a service.
Management of services has in most cases a particular focus on self-governance and
social or ecological objectives. They are usually the result of local civil society actors,
bottom-up initiatives.
Promotion through local networks and public meetings
Services and their host organization are promoted through local networks and word-
of-mouth-propagation. Tools used for promotion include flyers, webpages and public
meetings.
Mutually reinforcing environmental and social externalities and contributions
Housing and house-ownership services helped meeting demands for ecologic
housing and also provide positive environmental externalities, as their collective and
mutualized character reduce energy, material and land consumption. Also, several
housing services produce positive social externalities by taking into account barrier-free
and inclusive design in order to foster interactions and social cohesion. Mobility
services allow to satisfy the demand for transportation of the local residents. In addition,
they provide positive environmental externalities as they reduce car-use and facilitate a
modal shift to non-motorized or public transportation, resulting in less air and noise
pollution and energy consumption. Food services help meet the local demand for food on
site by providing affordable, local and organic food. This produces the positive
environmental externality of reducing the need to use motorized modes of transport to buy
food which itself has a better environmental balance.
On a more general basis, the different positive impacts enable and reinforce each
other. For instance the on-site provision of food reinforces non-motorized mobility while
the Baugruppen structures create environmental benefits that reduce the carbon footprint
of the district. The mobility services improve the quality of public space and together with
the structure of the built environment, they promote social exchange and foster social
cohesion.
Housing built by Baugruppen around a traffic-reduced street,
© Baierl 2013
147
RIESELFELD - FRIBOURG
THE ECODISTRICT
A new district from scratch on the outskirts of Freiburg Due to constantly high demand for housing, the City of Freiburg im Breisgau
decided in 1992 to launch an urban planning competition for the development of a new
Location City of Freiburg im Breisgau, South-West Germany
Number of inhabitants 9 540 (2011)
Start of development and construction 1991 (Development) and 1993
(Construction)
Completion 1996 (First section), 2010 (End of
development project)
Game of actors Top-down project with strong participatory
dimension, involvement of future habitants in
Services studied social, cultural and leisure services,
promotion of self-organization, housing
development
Aerial overview of the Rieselfeld © Erich Meyer/Projektgruppe Rieselfeld
148
district for approximately 10 000 inhabitants at the outskirts of Freiburg. This new district
should be located on the area of a former sewage field (Rieselfeld), from which it got its
name.
The final concept included several measures to reduce energy intensity and
environmental degradation characterized by high density development, low-energy
housing (max. 65kwh/m²), limit traffic speed to 30 km/h, a central tram and road axe so as
to reduce commute time to the city center to 15 min, district heating and a water reuse
concept.
The four construction sections were divided in small parcels, requiring different
housing structures and dwelling sizes, attributing different amounts to owner-occupied
dwellings, rented flats and subsidized social housing, selling parcels to cooperative
housing projects, private developer and individual house builders and limiting the number
of parcels that could be acquired by one real developer. These measures allowed for a
social and structural diversity to emerge.
A civil-society-driven process of social and cultural community-building
The development of the Rieselfeld district was influenced by the lessons from the
adjacent neighborhood of Haslach-Weingarten. Built as a high-rise social housing
district in the 1960s by the city of Freiburg, it suffered from the absence of any social
structures and the socially weak and marginalized community. In order to avoid the same
pitfalls, social considerations were included from the start in the development of this new
district. Creating social structures and supporting community-building by
accompanying the new inhabitants was included from the start in the development
concept.
Map of the Rieselfeld district © Projektgruppe Rieselfeld 2010
149
Lecturers and students from the Protestant University of Applied Sciences of
Freiburg suggested to launch a program for social work in the new neighborhood to
accompany the development of the district and to promote community life. The program
was launched in 1995 and since 1996 the city provided financing. One person was thus
working on-site at the future district of Rieselfeld to receive future inhabitants, to gather
their needs, wishes and concerns and to provide information and orientation. An essential
part of this program was to develop social and cultural life, to promote and to support
local initiatives, organizations and services.
THE SERVICES
One of the birthplaces of co-housing groups Rieselfeld district was one of the first places in which co-housing initiatives emerged. These associations, private partnerships or owner associations allow groups to
develop a collective housing project. Such initiatives enable groups to realize housing projects according to their wishes, for instance by taking into account environmental
considerations. Baugruppen are also up to one third cheaper than conventional real estate
models as they bypass intermediary real estate structures, making them economically efficient. This housing development model not only reduces the environmental impact of its inhabitants by using sustainable building techniques and being more energy efficient.
They also strengthen community structures in the district as inhabitants developed their
project together and usually some spaces and structures are mutualized, such as a
collective garden, guest rooms or well as common guest rooms as well as heating or water
infrastructure.
Glashaus in Rieselfeld, © Baierl 2013
150
A pivotal point of the district promoting activities and offering services
Initially operated by the university, the social work program was soon supported by
an association called K.I.O.S.K. e.V. Founded in 1996, the association aims at
promoting and organizing social and cultural life. Since the end of 1996, the
association also operated an office in Rieselfeld. The development plan for Rieselfeld
stipulated the construction of a district meeting place and neighborhood club, which
was realized in 1996. It was planned that a social welfare organization should become the
supporting association, but inhabitants claimed that the K.I.O.S.K association, more
locally involved and renown should take the role of the supporting association. After
public protest and discussion, the supporting function was finally attributed to K.I.O.S.K.
The district meeting place and neighbourhood club, called “glashaus – Stadtteiltreff” is
now managed and governed by K.I.O.S.K.
The association receives therefore subsidies from the cities but remains largely
independent in the use and organization of the place. As the association consists
mostly of local inhabitants. Thus, the glashaus is - though not owned - largely self-
governed by Rieselfeld residents. Supported by social workers involved since the
development of the district, several working groups also organize the local activities and
associations. Available spaces and resources can be used by residents and local
organization and a variety of regular activities and services are offered by local volunteers.
This makes the glashaus a mutualized space offering collectively organized services.
A variety of services offered and facilitated
The glashaus offers a variety of services and facilitate others. K.I.O.S.K e.V.
provides community and social work for the district on behalf of the municipality in
exchange of subsidies. The association also provides places for the local youth to meet,
organizes events and courses for the younger population and provides youth care. Local
volunteers run, coordinated by K.I.O.S.K., a café, the Café im glashaus located in the
neighborhood club. In addition, K.I.O.S.K promotes and supports the organization of
cultural and social activities. For instance, flea markets, groups, exhibitions and sport
activities are organized by residents at glashaus facilities or with their material support.
Regular activities such as dancing or language classes take place and self-help groups or
sport groups meet on a regularly basis. Special activities are organized for elderly or non-
german residents. The city of Freiburg also runs the youth library branch for Rieselfeld in
the same building. Therefore, the glashaus is not only located in the center of Rieselfeld
151
but also pivotal point for social and cultural activities. Due to the relatively high
number of activities organized and the facilitator role of K.I.O.S.K, a considerable
number of inhabitants are volunteering or organizing activities and services.
This structure and the services offered not only foster social cohesion and
reinforce social links by enabling inhabitants to organize themselves and to provide
activities and services collectively around a local meeting-place. Mutualisation of space
and shared resources reduce potential costs of services and activites and eventually
reduce the environmental impact by reducing the resources and space required.
Promotion as a self-organized service
K.I.O.S.K organizes the promotion of its services and activities itself via a working
group. The association publishes a weekly newsletter, called Liftfass, informing about
ongoing activities. On a monthly basis, a group of volunteers publishes a local
newspaper, the Stadtteilzeitung Rieselfeld, covering events, informing about
developments in the district. These publications are thus at the same time tools used for
communication and promotion of the services and structures and a service offered to the
residents.
152
EVA LANXMEER - CULEMBORG
Overview of the neighbourhood © Marleen Kaptein
Location Culemborg, Netherlands
Number of inhabitants 600
Start of planning and development 1993 (initiative), 1996 (planning and 1st co-
production development phase), 1999 (2nd
development phase)
Completion 2000 (1st phase), 2002 (2nd phase)
Game of actors Bottom up process.
Services studied Car sharing (Albatros), Heating system
(Thermo Bello), Landscape maintenance
(Terra Bella)
THE ECODISTRICT
A bottom up process to ensure the appropriation and implementation of environmental concerns
Located in the municipality of Culemborg, the land on which Eva Lanxmeer is built
used to be an agricultural land surrounding a water pumping station. At a time where a
153
large redevelopment initiative was started by the municipality, Marleen Kaptein created
the foundation EVA, a center for information and advising regarding environmental matters
in real estate development. She suggested the construction the Eva Lanxmeer district in
the early 1990s. From the beginning, she was willing to associate the future inhabitants
to the planning of the project, as she believed that only true citizen participation could
induce a change in behaviours regarding environmental management. The goal was to
contribute to an environment friendly society by realizing a sustainable pilot project, to
demonstrate practical solutions in a natural daily habitat and advance the interest and
involvement of the general public in global environmental matters. To do so, the EVA
Concept combines diverse strategies in an
integral approach. It was established by an
interdisciplinary group of 10 people to
define the required qualities for a sustained
neighbourhood of human scale. The idea
was then to gather citizens concerned with
these strategies and encourage them to
create their own social environment from
this starting point.
From the integral EVA Concept to the ecodistrict: the necessary involvement of the
municipality
Based on the concept, a programme was established for Eva Lanxmeer. It was
structured by three pillars: a functional mixity with mixed types of housing estate, office
buildings and studios, an ecological city farm, and the EVA Center for Integral ecology. In
1995, the first contact with the City of Culemborg was established. The city was well
known for its experience green policies, sustainable buildings and citizen participation. In
1996, the initiators of the project hence started a co-production process with the
municipality of Culemborg. In a joint commissionership, the City and the EVA Foundation
developed a plan based on the EVA Concept. Hence the municipality was committed to
risk bearing while the EVA Foundation was the guardian of the EVA Concept in the
process. All actors were gathered in a project group that instituted a cooperative process.
The inhabitants were deeply involved in the urban planning process through workshops
The EVA Concept, starting points: ! Ecological architecture including
sustainable building materials and energy systems,
! Organic landscape architecture and integral water resource management,
! Permaculture principle (ecosystem approach)
! Involvement of citizens in development process,
! Education and advices to make experiences rewarding.
154
in which they would express their wishes and ideas. The project was developed in two
phases: the public commissionership phase, conducted essentially by the architects and
the urban planning department of the municipality; and the Private and Collective
Commissionership phase, for projects initiated and carried on by citizens in collaboration
with experts. The neighbourhood was completed in 2002, but neither the EVA center, nor
the city farm were developed yet.
THE SERVICES
Implementing the EVA Concept through service delivery
In order to implement the EVA Concept, it was necessary to mobilize highly
environmentally friendly technologies and processes. Hence, the neighbourhood was
conceived as a living ecosystem and the services were conceived in this logic.
In terms of mobility, the neighbourhood has a decentralised car parking system, all the
parking spots being located at the borders of the district. Hence there are limited parking
place (one per household). This attempt of limiting car ownership is complemented with
the car sharing service offered by MyWheels (a nationwide company supported by the
local company, Albatros). This service offers both commercial and peer-to-peer car
sharing. There are no go-through roads in the district, and only pedestrian and bike lanes.
As for the provision and maintenance of green areas, the development of Eva Lanxmeer
implemented a gradual transition from private space to public natural zones. Some
neighbours own sheltered terraces and private gardens for which they are responsible.
Then are “commonly owned” gardens such as
playgrounds and meeting places, and finally the
public green zones. In 2004, the Terra Bella
foundation was creating by the citizens to
undertake a mutualized maintenance of public
spaces and green areas. The municipality
delegated the provision of this service to the
company because the citizens
reclaimed the management of
green areas.
Common green area © Marleen Kaptein Kaptein
155
The management of water resource is done by local storage and treatment,
essentially by using the capabilities of the natural environment: the water is stored in
ponds, grey water (household) purified with reed beds while blackwater (toilets) goes to
biogas plants. Ultimately, Eva Lanxmeer rejects no wastewater in municipal sewers.
The local energy company, Thermo Bello, now undertakes the provision and
maintenance of the heating system. The responsibility of this service was also
delegated to inhabitants by the municipality, when they created a company to purchase
the heating system. The infrastructure was upgraded to be coherent with the EVA Concept
so that heating is now distributed through the neighbourhood by a company that is locally
managed and an infrastructure that is mutually owned by inhabitants.
The result: a sustainable neighbourhood with strong involvement of citizens
The mobility services are conceived in order to reduce car use to the profit of
walking and cycling. This promotion of alternative modes of transportations creates a
greened and more inviting district that offers lots of possibilities for social contact and
playgrounds for children as space is left free from cars for public use.
The combination of all services and technical installations (for renewable energies and
recycling for instance) contribute to sharply increase the environmental performance of the
district.
Beyond the ecological logic of the services developed in Eva Lanxmeer, their
management is particularly interesting. The inhabitants association, BEL, which plans
community events and involves citizens in all the matters that concern the district,
organizes much of the neighbourhood’s life. The fact that citizens reclaimed the transfer
of responsibility for certain services from the municipality speaks for their strong and
active involvement in the neighbourhood. Both Terra Bella and Thermo Bello companies
result from a mutualisation of the services among neighbours, who take on the
management and delivery, so that the service better
follows to the EVA Concept.
The EVA Concept has been successfully implemented, as
a result of the co-production and strong cooperation
between citizens and public authorities. It seems that
behaviours and lifestyles are becoming more sustainable
and more eco-conscious. Community gathering in Eva Lanxmeer © Marleen Kaptein
156
GWL – AMSTERDAM
A former water tower in GWL © M. Delafoulhouze
Location Amsterdam, Netherlands
Number of inhabitants 1400
Start of planning and development 1995
Completion 1998
Type of initiative Top down
Services studied Conciergerie, car-sharing
157
THE ECODISTRICT
An urban redevelopment project in the heart of Amsterdam
GWL-Terrein is a urban redevelopment project that was decided by the
municipality (Westerpark Council) in 1993 and built on a brownfield, where a water-
treatment plant was firstly located. The neighborhood was initially home to a rather poor
population, and thus the idea was also to revitalize the area. The public authorities wanted
to build an “ecological district” in the center of Amsterdam. It is thus a car-free, high-density neighborhood (600 housing units on 6 ha), the buildings have been designed to
be energy-efficient, and there is a rain-water collection technology. However, the efforts
made in terms of environmental exemplarity is based on grounds of 1998 technology. This
ambitious project aimed at being socially mixed, and so it includes 40% of social housing. It is conveniently located next to a tram station, which links the neighborhood to
the center of Amsterdam in less than 15 minutes.
A top-down approach balanced by a strong mobilization of citizens
The project was born from the will of the municipality to build a environmental-
friendly district, that emerged from political considerations. However, this top-down initiative requested from the very beginning some citizen participation to back the
project. The solicitation was a real success: around 600 inhabitants replied that they were
interested by living in such a neighborhood. They were also involved in the process of designing the district, in cooperation with the team of architects: they strongly insisted to
make the neighborhood car-free.
The social role of urban design
The district has been designed by a team progressive urbanist-architects who
payed special attention to imagine welcoming public spaces that promote social interactions between neighbors. The inhabitants participated in the choice process. Thus
the streets are curved and especially designed to walk, and families can take part in the
management of a bunch of collective gardens. The area was supposed to be very green,
and still intends to improve its public spaces. The buildings at the borders of the
158
neighborhood were designed so as to to create a sense of community and place, but it
is not cut from the rest of the city neither. The fact that is it car-free and the rate of
parking spot per inhabitant very low (1 for 6 housing units) is also a way to make it less
present in our environment and
lives in order encourage
environment-friendly behaviors.
It is a constraint that was thought
to promote a shift in the
inhabitants' way of living and
thinking. Being very well covered
by public transportation and ideally
located in “the bike city”
(Amsterdam), GWL offers facilities
as alternatives to motorized
vehicles.
THE SERVICES
The conciergerie: a multi-service structure
The conciergerie is seen as the community care-taker. It is formalized by a little
house, and is a service providing structure for all kind of needs within the neighborhood.
The concierge’s first task is to get people together and create networks. He welcomes
new inhabitants in order to make the link between movings and arrivals and make them
sign the charter that establishes the environment-friendly principles of the
neighborhood and the founding rules. Of course the concierge also checks and fixes
the damaged buildings and facilities, and tries to resolve conflicts between neighbors.
A citizen-based and mutualized management of services
Some of the inhabitants of GWL took very soon the leadership of collective services
management. They indeed created an association of inhabitants, the “Koepel”, or
“Umbrella Association”, with a board of active members, who are either property-owners or
Collective garden © M. Delafoulhouze
159
renters. It is very autonomous regarding the municipality, since it hired a concierge to
handle day-to-day services with the money earned thanks to the 6 € participation all
families have to pay each month as a contribution. They also organize all sorts of
activities (football games tournaments, cleaning days, etc.) in the neighborhood and have
a role of intermediate with public authorities, as well as they supervise the concierge's
activities. The members of the association take care of the communication to mobilize the
inhabitants and promote community building and sustainable way-of-living, through
monthly newsletters and meetings.
Mutualization as a tool to foster inhabitants' involvement
Indeed, this mutualized management of services aims at involving the inhabitants
in the life and the maintenance of their neighborhood. The board of the association
thus works in small groups on a masterplan that will soon be implemented in the
neighborhood to improve the common areas. A next step for deeper mutualization is to be
undertaken through the masterplan: the Umbrella association wants a transfer of
responsibility from the municipality to the inhabitants (according to their own demand)
regarding the maintenance of green areas. This evolution is very ambitious, and aims at
involving the inhabitants in the governance of the ecodistrict in general. Indeed, by
fostering dedication to the maintenance of the neighborhood, the members of the
association want to create a stronger sense of civic duty and neighborhood belonging.
Thus, the ecodistrict in GWL displays a rather innovative governance, that eventually
aims at getting the inhabitants more responsible, including regarding the environment;
while promoting stronger social and territorially-based ties.
Common outdoor area © M. Delafoulhouze
160
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