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Incidents en transport aérien E d i t o Bureau d’Enquêtes et d’Analyses pour la sécurité de l’aviation civile Bâtiment 153 Aéroport du Bourget 93352 Le Bourget Cedex FRANCE Tél. : +33 1 49 92 72 00 Fax : +33 1 49 92 72 03 [email protected] L es efforts à fournir pour faire partager l’expérience acquise après un incident peuvent sembler fastidieux et pourtant la sécurité dépendra beaucoup d'une bonne exploitation des incidents. Les enquêtes sur les accidents révèlent souvent l’existence de précurseurs et la dégradation progressive d’un système. Il est donc nécessaire de développer les efforts dans le sens de la collecte et du partage des informations sur les incidents, de manière ouverte et responsable. L’incident prenant des formes multiples et se caractérisant par de faibles conséquences observées, les définitions offertes par les textes réglementaires ne permettent pas d'en dresser une liste exhaustive. Aussi, signaler un incident revêt un caractère subjectif : ceux qui l’ont vécu doivent évaluer si dans d’autres circonstances, ou si l’un des paramètres avait été modifié (une prise de conscience par l’équipage un peu plus tardive par exemple), les conséquences auraient pu en être beaucoup plus importantes. Ceux qui vivent ces situations inhabituelles se montreront donc d’autant plus disponibles pour le traitement de l’événement qu’ils seront convaincus de l’utilité de la démarche pour l’ensemble de la communauté aéronautique. En revanche, toute démarche à caractère punitif ou répressif compromettra les progrès de la sécurité, sans vrai bénéfice par ailleurs à la discipline ou à la justice. La sécurité repose principalement sur l’application de règles précises à chaque étape du vol. A ce titre, les phases au sol font bien sûr partie du vol. La communication y est essentielle pour que l’impact des actions individuelles sur l’ensemble des opérations soit bien perçu par chacun. Le succès de cette communication dépend notamment de l’existence d’un référentiel commun entre les différents acteurs du système. Les quelques situations décrites dans ce numéro soulignent cet aspect. On y trouve des cas où un déficit de communication a engendré une situation délicate et, inversement, des exemples qui illustrent des incidents détectés et corrigés grâce à une communication particulièrement efficace. Sommaire : Décollage interrompu à la suite d’une erreur de chargement .............................................................................. 2 Collision avec groupe de parc ............................................................................................................................. 3 Accélération - Arrêt sur ATR 42 ........................................................................................................................... 4 Interruption prolongée des communications radio ............................................................................................... 5 Fuite de kérozène au départ ................................................................................................................................ 6 Glossaire des fonctions des personnels sols ....................................................................................................... 7 Feu génératrice ................................................................................................................................................... 8 Numéro 2 - septembre 2004

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Incidents en transpor t aérien

E d i t o

Bureau d’Enquêtes et d’Analysespour la sécurité de l’aviation civile

Bâtiment 153Aéroport du Bourget93352 Le Bourget CedexFRANCETél. : +33 1 49 92 72 00Fax : +33 1 49 92 72 [email protected]

Les efforts à fournir pour faire partager l’expérience acquise après unincident peuvent sembler fastidieux et pourtant la sécurité dépendrabeaucoup d'une bonne exploitation des incidents. Les enquêtes sur les

accidents révèlent souvent l’existence de précurseurs et la dégradationprogressive d’un système. Il est donc nécessaire de développer les effortsdans le sens de la collecte et du partage des informations sur les incidents, demanière ouverte et responsable.

L’incident prenant des formes multiples et se caractérisant par de faiblesconséquences observées, les définitions offertes par les textes réglementairesne permettent pas d'en dresser une liste exhaustive. Aussi, signaler un incidentrevêt un caractère subjectif : ceux qui l’ont vécu doivent évaluer si dans d’autrescirconstances, ou si l’un des paramètres avait été modifié (une prise deconscience par l’équipage un peu plus tardive par exemple), les conséquencesauraient pu en être beaucoup plus importantes. Ceux qui vivent ces situationsinhabituelles se montreront donc d’autant plus disponibles pour le traitementde l’événement qu’ils seront convaincus de l’utilité de la démarche pourl’ensemble de la communauté aéronautique. En revanche, toute démarche àcaractère punitif ou répressif compromettra les progrès de la sécurité, sansvrai bénéfice par ailleurs à la discipline ou à la justice.

La sécurité repose principalement sur l’application de règles précises à chaqueétape du vol. A ce titre, les phases au sol font bien sûr partie du vol. Lacommunication y est essentielle pour que l’impact des actions individuellessur l’ensemble des opérations soit bien perçu par chacun. Le succès de cettecommunication dépend notamment de l’existence d’un référentiel communentre les différents acteurs du système. Les quelques situations décrites dansce numéro soulignent cet aspect. On y trouve des cas où un déficit decommunication a engendré une situation délicate et, inversement, desexemples qui illustrent des incidents détectés et corrigés grâce à unecommunication particulièrement efficace.

Sommaire :Décollage interrompu à la suite d’une erreur de chargement .............................................................................. 2Collision avec groupe de parc ............................................................................................................................. 3Accélération - Arrêt sur ATR 42 ........................................................................................................................... 4Interruption prolongée des communications radio ............................................................................................... 5Fuite de kérozène au départ ................................................................................................................................ 6Glossaire des fonctions des personnels sols ....................................................................................................... 7Feu génératrice ................................................................................................................................................... 8

Numéro 2 - septembre 2004

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Incidents en transport aérien

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DécollaDécollaDécollaDécollaDécollaggggge intere intere intere intere interrrrrrompu à la suiteompu à la suiteompu à la suiteompu à la suiteompu à la suited'une erd'une erd'une erd'une erd'une errrrrreur de ceur de ceur de ceur de ceur de charharharharhargggggementementementementement

Déroulement du volAu cours d'une escale courte, un coordonnateurdoit réaliser le plan de chargement d'un aviontransportant du fret. Pour pallier la réception dedernière minute de colis, il établit un documentmanuscrit provisoire comportant lesinformations à sa disposition quelques minutesavant le chargement. Il transmet ce documentau chef avion, qui débute alors les opérations,tandis qu'il établit le plan définitif de manièreinformatique.

Le chef avion organise les opérations au piedde l'avion, notamment en ordonnant lesconteneurs au sol à partir du plan provisoire eten commençant à les faire charger en soute oùun agent de manutention les réceptionne. Ledernier conteneur à charger reste ouvert pouraccueillir les colis de dernière minute.

Le coordonnateur apporte le plan définitif au chefavion et le signe mais il n'a pas le tempsd'effectuer une vérification en soute. Cedocument est ensuite transmis au commandantde bord sans que le chef avion l'ait contresigné.

Lors du décollage, le pilote rencontre desdifficultés pour effectuer la rotation et procède àune accélération-arrêt.

De retour au parking, il est constaté que lechargement a été placé dans la soute dansl'ordre inverse de celui prévu par le plan dechargement.

Renseignements complémentairesLa figure ci-contre représente le plan dechargement manuscrit transmis au chef avion.Le repère A correspond à l'avant de l'avion. Lesemplacements A à J sont marqués au plancherde la soute et la porte de chargement est situéeà l'avant.

Le chef avion effectuait pour la première fois lechargement de ce modèle d'avion. La sociétéd'assistance ne prévoit pas de formationcomplémentaire pour ses agents expérimentés,dans la mesure où les principes de chargementdes avions varient peu d'un modèle à l'autre.

Les conteneurs les plus lourds doivent êtrepositionnés à l'arrière et donc, étant donné laconfiguration de la soute, être chargés lespremiers.

Avant de débuter les opérations de chargement,le chef avion avait fait aligner les conteneurs.Pour s'assurer de la validité du plan dechargement provisoire, sur lequel il avait un

doute, il a demandé par radio confirmation quele conteneur référencé X1 devait bien être enposition A. Le coordonnateur a validé cetteinformation. Le chef avion a procédé auchargement, en débutant par le conteneur X1,ainsi placé à l'arrière.

Le chef avion a confondu l'orientation du plan.Pour lever le doute, sa question n'a fait référencequ'au plan et non à la position réelle (avant ouarrière) des conteneurs dans l'avion. Lechangement de modèle d'avion (il n'y avait pasd'ambiguïté entre l'avant et l'arrière sur les plansde chargement qu'il avait l'habitude d'utiliser) acertainement contribué à cette erreur. Il estintéressant de noter que l'agent de manutentionen soute ne disposait pas d'une copie du plande chargement.

La vérification que le coordonnateur aurait dûeffectuer, ainsi que la vérification des signaturespar le commandant de bord, auraient puconstituer des barrières de protection. Lorsqu'ilappose sa signature, un agent est censés'assurer de la conformité de ses actions avecles procédures en vigueur.

EnseignementsCet événement montre qu'au fil du temps et descontraintes opérationnelles, certaines barrièresde protection, notamment les vérifications,peuvent se transformer en étapes formelles etperdre de leur efficacité.

A la suite de cet événement, la procédure dechargement a été modifiée par la sociétéd'assistance. Dorénavant :

- le chargement de la cargaison en soute necommence que lorsque le coordonnateur arejoint le chef avion avec le plan de chargementdéfinitif ;

- l 'agent de manutention réceptionnant le freten soute reçoit une copie du plan.

En outre, une indication d'orientation du plan dechargement (avant/arrière) par rapport à laconfiguration de la soute, ainsi qu'une indicationdes masses maximales admissibles pourchaque position pourraient contribuer à éviterce type d'erreurs.

X1

X2

X3

X4

X5

X6

X7

X8

A

B

C

D

E

F

G

H

J

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n° 2 - septembre 2004

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Collision aCollision aCollision aCollision aCollision avvvvvec un gec un gec un gec un gec un grrrrroupe de paroupe de paroupe de paroupe de paroupe de parccccc

Déroulement du volUn biturbopropulseur ATR est stationné sur leparking en escale longue. C'est le premier voldu jour pour l'équipage et pour l'avion. Il pleut(bruine, sol humide, bonne visibilité). L'équipagese rend à l'avion environ quarante cinq minutesavant l'heure de départ.

L'avion est fermé, pastillé. Le groupe de parcest connecté, en fonctionnement. Il n'y a pasd'assistant sol. L'équipage organise l'avitail-lement en carburant et le commandant de bordassure la sécurité pendant le démarrage dumoteur deux en mode hôtel1 afin de chauffer lacabine. Après l'embarquement des passagers,la porte est fermée et l'équipage effectue lesactions puis la check-list avant mise en route(vérifications du frein de parc et de la pressionhydraulique incluses). Il reçoit l'autorisation demise en route et attend l'assistant sol avant dedémarrer les moteurs. Celui-ci arrivetardivement, fait le tour de l'avion, connectel'interphone et transmet à l'équipage "abordsdégagés, portes fermées, cales train avant, parémise en route".

A la fin de la séquence de démarrage, lecommandant de bord autorise l'assistant sol àdébrancher le groupe de parc et à quitterl'écoute:"...mise en route terminée vous pouvezdébrancher le groupe, quitter l'écoute, le bloc àvingt bonne journée à bientôt."

Aucune mention n'est faite des cales.

L'assistant accuse réception et puis quittel'écoute afin de replier le câble et d'éloigner legroupe de parc. Il fait signe à un autre agentd'enlever les cales du train avant et s'éloigne del'avion.

Alors qu'il est en train de ranger le câble, il voitl'avion se mettre en mouvement. Il se précipitepour faire signe à l'équipage mais celui-ciregarde à l'intérieur du cockpit ; l'avion percutele groupe de parc.

Le commandant de bord pense à une explosiond'un moteur et freine instinctivement auxpieds ; quant au copilote, il regarde le panneaud'alarme, pensant également à un problème demoteur.

Renseignements complémentairesA cause de la conception du parking, le groupede parc était positionné sur la droite de l'avion,en dehors du champ de vision de l'équipage.De plus, il était placé perpendiculairement à l'axeavion et non parallèlement.

Contrat d'assistanceC'est une société distincte del'exploitant qui effectue l'assistanceen escale. Cette société, égalementexploitante d'aéronefs, ne possèdepas d'avions à hélices. Le contratd'assistance spécifie que l'ensem-ble des consignes de la sociétéd'assistance s'appliquent mais ellesn'intègrent pas les particularités desturbopropulseurs (par exemple lepassage des hélices en MAX RPMdoit faire l'objet d'une confirmationde l'assistant sol). Les personnelsau sol s'occupaient des avions àhélice sans méthode bien définie,comme l'indique l'assistant :

"Les équipages nous demandent de retirer lescales et le GPU en même temps et il estimpossible de garder le contact interphonejusqu'au départ de l'avion ; ils sont souventpressés et nous font signe de retirer les calesalors que nous sommes en train de ranger lecâble du GPU".

ProcéduresLes procédures de la société d'assistancedonnent les indications suivantes :

"Les cales de roues des trains principaux doiventêtre retirées avant le démarrage des moteurs.Pour pouvoir les retirer du train principal, il fauts'assurer de la présence des cales aux rouesdu train avant et de l'applicationeffective du frein de parc avion."Il est précisé qu'il faut "attendre quetout le matériel de piste soit dégagépour interrompre la liaisoninterphone".

La procédure de l'exploitant prévoitque le retrait des cales est demandéà la fin des actions après mises enroute (voir check-list ci-contre). Il ya six items entre le retrait du groupede parc et celui des cales.

On constate donc que ladocumentation de la société assistante n'est pasentièrement compatible avec celle del'exploitant.

EnseignementsL'équipage a rapporté n'avoir pas relâché le freinde parc, n'ayant pas reçu le signal de l'assistant.Or, le frein était relâché au moment du retraitdes cales. Cela peut s'expliquer soit par unedéfaillance mécanique qui n'a pas pu êtrereproduite par la suite, soit par une action

APRES MISE EN ROUTE

CONDUITE DU VOL

Les hélices seront mises sur MAX RPM dès le signal OK del’assistant sol

GUIDE DES ACTIONS

- ENG START OFF- GROUPE DE PARC DEBRANCHES- VOLETS 15°- ANTI SKID TESTE- MANETTES HELICES MAX RPM LOW

PITCH- ACW VERIFIES- HYD PWR VERIFIES- PROBES AND WIND SHIELD HTG ON- ANTI ICING COMMENECESSAIRE- TRAPPE DE COMMUNICATION FERMEE- CALES ENLEVEES

Position des véhicules et personnels

1 Fonctionnement du moteur sans rotation de l’hélice pour fournir l’électricité et le conditionnement d’air au sol.

zone de manoeuvre parking avion

Assistant avion Agent sol ayantretiré les cales

Cales

Groupe de Parc

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AccélérAccélérAccélérAccélérAccéléraaaaation-artion-artion-artion-artion-arrêt sur rêt sur rêt sur rêt sur rêt sur AAAAATR 42TR 42TR 42TR 42TR 42

involontaire de l'équipage. L'avion s'est retrouvénon freiné et cales enlevées avant que la zonede sécurité ne soit dégagée.

L'embarquement puis le départ dans uneambiance confuse et affectée par l'arrivéetardive de l'agent sol peuvent avoir perturbé letravail de l'équipage.

Le retard de l'assistant sol ne créait pas un climatpropice à la coopération entre le cockpit et lesol. L'équipage qui s'était passé de lui jusque làn'avait pas eu le temps d'établir un plan d'actioncommun avec lui. La concision du messageentre le commandant de bord et l'assistant lesuggère.

L'application de procédures générales, qui netiennent pas compte des spécificitésd'exploitation des avions à hélices, a égalementcontribué à l'installation d'un contexted'imprécision, l'équipage et l'assistant netravaillant pas sur un référentiel commun. Il s'enest suivi une interprétation du message ducommandant de bord par l'assistant allant au-delà de ce qui lui avait été effectivement dit.Il y a un risque évident associé au fait d'enlever

ou de faire enlever les cales sans avoir faitconfirmer que le frein de parc est appliqué niconvenu de quel côté sera fait le signe avant dequitter le contact visuel pour le roulage.

Enfin, la procédure de l'exploitant qui prévoit defaire retirer les cales tout à la fin, lorsque lematériel de piste a été dégagé et après avoireffectué toutes les actions avant mise en routeest difficilement applicable si, comme dans lecas de l'événement, l'assistant sol est seul pours'occuper de l'avion.

Après cet événement la compagnie d'assistancea établi la consigne suivante :

"les cales ne seront retirées QUE lorsque tousles équipements sol sont retirés de la ZEC quelleque soit la teneur du dialogue.L'agent en charge doit maintenir l'avion au pointde stationnement par le geste approprié jusqu'aumoment où l'assistant départ chargé des calesest sorti de la zone d'évolution avion. L'agenten charge est responsable de la sécurité : il luiappartient de maintenir la liaison avec l'équipage(interphone et gestuelle)".

Déroulement du volUn ATR 42 est au décollage sur une piste courte(moins de 1 500 m). A VR, le commandant debord (PF) amène la commande de profondeuren butée sans que l'avion décolle. Pensant à undécouplage de la gouverne, il demande aucopilote d'agir également sur la commande deprofondeur. L'action combinée des deux pilotesest inefficace. Le commandant de bordinterrompt donc le décollage. La vitesse est alorsde 108 kt. Les inverseurs de pas sont utilisés etl'avion s'immobilise à 125 m de l'extrémité depiste. Durant la phase d'interruption dudécollage, la commande de profondeur n'a pasété maintenue en avant.

Au parking, aucune anomalie n'est décelée surla chaîne de commande de la profondeur. Enrevanche, on constate que la soute arrière estvide alors qu'elle aurait dû contenir 93 kg debagages.

Renseignements complémentairesSur la feuille de chargement, la répartitionprévisionnelle des passagers était la suivante :12 en zone avant, 17 au centre et 10 à l'arrière.Les bagages étaient répartis comme suit :300 kg dans les soutes à bagage avant, 93 dansla soute arrière.

Le réglage du trim de profondeur calculé était

de 2° à cabrer pour un centrage de 19,5 %. Enréalité, le réglage affiché par l'équipage avant ledécollage n'a été que de 1,6° à cabrer.

Au cours de l'embarquement, un des passagers,handicapé, a dû être placé à l'arrière del'appareil, ce qui a nécessité de déplacer deuxpassagers vers le milieu de la cabine. Cetteinformation n'a pas été transmise à l'équipagede conduite par les agents d'enregistrement.

D'autre part, l'agent d'assistance n'a pas suiviles consignes de l'agent de trafic et a chargél'ensemble des bagages dans les soutes avant.

Ces deux erreurs cumulées ont entraîné unemodification du centrage (13,7 %), au delà dela limite avant de l'enveloppe certifiée del'aéronef (15 %).

La force appliquée sur la commande deprofondeur a été estimée à 51 kg ; elle amenaitla commande en butée arrière sans pour autantque la gouverne se positionne à plein cabrer enraison de l'élasticité des câbles. Les simulationsmenées par le constructeur montrent que l'avionpeut décoller avec le centrage et le calage dutrim relevés le jour de l'événement, mais leslongueurs de roulement sont aors incompatiblesavec la longueur de piste disponible lors de cedécollage.Incidents en transport aérien

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EnseignementsL'incident est la conséquence d'un cumul defacteurs qui, intervenant isolément, n'auraientpas eu de conséquence sur le vol :

InterInterInterInterInterrrrrruption pruption pruption pruption pruption prolongéeolongéeolongéeolongéeolongéedes commdes commdes commdes commdes communicaunicaunicaunicaunications rtions rtions rtions rtions radioadioadioadioadio

Déroulement du volL'un des pilotes d'un vol long courrier arrivantd'Asie est en "repos court" pendant la croisière.

Les hauts-parleurs du cockpit sont coupés.L'autre pilote utilise son casque pour assurer laveille radio.

Un PNC entame une discussion. Le pilote enfonction retire son casque. Au cours de ladiscussion, le second pilote se réveille mais leshaut-parleurs ne sont pas réactivés.

Après environ une heure trente, l'équipages'aperçoit de son erreur et appelle sur lafréquence correspondant à sa position. Uncontrôleur allemand les informe qu'ils vont êtreinterceptés par des chasseurs. Le contact VHFétait perdu depuis le survol de l'Ukraine et l'aviona traversé plusieurs pays avant de rétablir lescommunications. L'équipage n'ayant jamaisaffiché 7600, le contrôle n'a jamais considérél'avion en panne de radiocommunications.

La chasse française escorte l'avion jusqu'à sonatterrissage, avec l'accord du commandant debord.

Renseignements complémentairesLes données radar en Allemagne montrent quel'avion a eu une trajectoire conflictuelle avecplusieurs autres vols, générant des alertes pourle contrôleur.

La transcription des radiocommunicationsmontre que l'équipage est stressé par la prisede conscience de son erreur, puis par laprésence des chasseurs avec lesquels il ne peutpas avoir de contact. La confusion s'installe etdégrade les communications à tel point que lecontrôleur allemand demande à l'équipage s'ilest familier avec l'anglais.

Le contrôle allemand a tenté de rentrer encontact avec l'équipage via le SELCAL d'autresavions.

EnseignementsAprès cet incident, l'exploitant a fait un rappelsur la vigilance accrue à apporter après uneprise de repos par un membre d'équipage. Il ainsisté sur les points importants à vérifier :

- navigation : pilote automatique, modes,altitude ;- communication : haut-parleurs, clefs desradios ;- position : palonniers, sièges, accoudoirs.

- la feuille de centrage n'a pasété rééditée après les modifi-cations intervenues après l'enre-gistrement des passagers ;

- le plan de chargement n'a pasété respecté par les agentsd'assistance piste.

Il faut y rajouter une imprécision(mineure) lors du réglage du trimde profondeur.

Après cet événement, l'ex-ploitant a pris les mesuressuivantes :

- diffusion de deux notes derappels aux équipages et auxagents de trafic ;

- annonce de la présence (ou non) de bagagesen soute arrière par le PNC au CdB, avant lafermeture des portes.

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Incidents en transport aérien

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Fuite de kérFuite de kérFuite de kérFuite de kérFuite de kérosène au déparosène au déparosène au déparosène au déparosène au départtttt

Déroulement du volL’avion, un bi-réacteur moyen-courrier exploitépar une compagnie étrangère, effectue un vol àpartir d’une escale française. Lescommunications radio entre le cockpit et le solse font en anglais. Environ cinq minutes aprèsl’arrivée au poste de stationnement, alors queles opérations d’avitaillement sont en cours, lesuperviseur piste constate une tache dekérosène sous le réacteur gauche. Il appelle lechef d’équipe piste qui constate la fuite etinforme l’agent de trafic. L’équipage est prévenu.Le copilote vient faire une inspection, remarqueune tache de la taille d’une assiette et retourneau poste de pilotage où il fait part de sesobservations au commandant de bord.

Le superviseur et le chef d’équipe piste partentvers d’autres avions. Le superviseur revientaider au chargement et fait le tour de l’avionavant d’assister le départ au casque. L’équipagequi a reçu une clairance de repoussage nonstandard, demande à être aligné vers le sud-est, mais le superviseur ne comprend pas cettedemande qu’il confond avec le QFU de la pisteen service.

Le repoussage est effectué vers le nord-ouest,à l’inverse de ce qui a été demandé. Le moteurdroit est mis en route, puis le moteur gauche.Lors du démarrage de ce dernier, une fuiteapparaît. Elle est signalée à l’équipage qui arrête

le moteur gauche.Entre-temps, lecontrôleur solinforme l’équi-page qu’à caused’une urgencemédicale, leurposte de station-nement doit êtrelibéré rapidementet qu’il y a sixavions au départderrière eux. Le

commandant de bord demande que l’avion soitavancé de quelques mètres pour permettre lepassage de l’autre avion.

Le superviseur ne comprend pas tous les détailscar, pour lui, le pilote parle vite, avec un fortaccent. Le chef d’équipe piste observe lerepoussage et revient vers le superviseur qui,ayant des difficultés de communication avecl’équipage, lui transmet le casque.

Le chef d’équipe confirme au commandant debord que l’avion présente une fuite sur leréacteur gauche. Il comprend que l’équipagedemande de retourner à son point destationnement. Le chef d’équipe rend alors le

casque au superviseur pour prendre le volantdu tracteur, débute le tractage et arrête en voyantle poste de stationnement occupé. L’équipagequi a estimé que la fuite pouvait provenir du mâtde drainage, ce que le commandant de bordavait déjà eu l’occasion de constater plusieursfois sur ce type d’avion, remet le moteur gaucheen route après en avoir informé le superviseur.

L’agent de trafic qui avait participé à l’arrivée del’avion termine alors la préparation d’un départdans le poste de pilotage d’un autre avion. Surla fréquence, il est annoncé que leur départ estempêché par un avion obstruant le passage, enattente à cause d’un passager malade. Ildescend s’informer du délai estimé, et revoitl’avion sur lequel il avait constaté la fuite. Desdifficultés de compréhension entre l’équipage etle sol se manifestent. Habitué aux accentsétrangers, l’agent de trafic prend le casque.

Il demande au pilote ses intentions en ce quiconcerne le passager malade ; il lui est réponduqu’il s’agit d’une fuite (leak) et non d’un malade(sick). Il constate effectivement une fuite auniveau du réacteur et indique qu’au vu de lafluidité ce doit être du kérosène. Le pilote luidemande de vérifier, ce qu’il refuse moteurtournant, mais il lui précise que la vérificationpourra être effectuée après le déplacement. Lepilote demande alors que lui soit préciséel’importance de l’écoulement qui lui est décritcomme dix larmes (tears) par seconde.Cependant, lorsque le commandant de borddemande si la fuite s’est arrêtée, il reçoit deuxfois la réponse "roger". Il en conclut que leproblème est résolu et sollicite alors ladéconnexion de la barre de tractage confirmantle départ. L’agent de trafic demande au chefd’équipe piste la déconnexion de la barre et faitsigne à l’équipage du dégagement.

Le superviseur et le chef d’équipe piste voientalors l’avion rouler vers la piste. Le superviseurappelle ses opérations pour qu’elles contactentla tour de contrôle. En même temps, le chefd’équipe court aux opérations demander que l’oncontacte le pilote ou que l’on prévienne la tourde contrôle.

Entre-temps, l’avion est arrivé au point d’attente.Le service du contrôle, prévenu parl’encadrement de l’aérodrome, suspendl’autorisation pour le décollage, le temps que lechef d’équipe et un agent du bureau de piste serendent au point d’attente pour vérifier laprésence d’une fuite. La fuite étant confirmée,ils conduisent l’avion jusqu’à un nouveau pointde stationnement, accompagnés des véhiculesdu secours incendie. Le vol est reporté et uneéquipe de maintenance intervient.

Configuration de l’aire de stationnement après le repoussage

nord avion bloqué

deuxième avion arrivantau parking

sens du repoussage

QFU en service

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Renseignements complémentairesLa recherche de panne a fait apparaître un troudans la canalisation du circuit carburant auniveau du circuit basse pression.

Les comptes-rendus des différents acteurs decet événement diffèrent sensiblement. Cesécarts soulignent les difficultés decommunication qui ont conduit à l’erreurd’appréciation de l’importance de la fuite parl’équipage. En effet, le commandant de bord, àplusieurs occasions, n’a pas pu se fairecomprendre du personnel au sol. Du côté despersonnes au sol, elles n’ont pas réussi àtransmettre leur message à l’équipage du faitde difficultés de maîtrise de l’anglais en dehorsde la phraséologie standard. Il faut noter quetrois personnes se sont relayées au casque etque le commandant de bord n’a pas remarquéqu’il changeait d’interlocuteur. Le message"roger" finalement reçu par l’équipage lorsqu’ila demandé si la fuite s’était arrêtée l’a conduit à

valider l’hypothèse qu’il avait faite sur unécoulement au niveau du mât de drainage.

EnseignementsDes incidents relatifs à des fuites de carburanten vol ont déjà montré quelles difficultés dedétection ce type de panne pouvait générer.2 Ladécision du personnel au sol d’alerter l’équipagepar l’intermédiaire des contrôleurs s’est avéréeefficace.Certains facteurs (ici la langue) peuventperturber la communication d’informationsimportantes pour la sécurité. Cet événementsouligne aussi l’importance de lever le doute dèsqu’une information paraît avoir été mal compriseou mal interprétée. En effet, sur la based’informations peu précises, le commandant debord a rapproché la fuite d’une situation qu’ilconnaissait et l’a associée à une fuite du mâtde drainage sans remettre en cause cetteanalyse.

2 Par exemple, l'incident survenu le 24 août 1997 entre Paris et Lorient à l’A320 immatriculé F-GHQH exploité par Air France

GlossairGlossairGlossairGlossairGlossaire des fe des fe des fe des fe des fonctions des peronctions des peronctions des peronctions des peronctions des personnels solsonnels solsonnels solsonnels solsonnels sol

autres appellations- agent d’escale trafic- chef avion- coordonnateur avion

MissionCoordonne les intervenants autour de l’avion lors de la touchéepour assurer le départ à l’heure du vol dans le respect desrègles de sécurité et de la qualité du service.Etablit les documents de chargement et réalise le centrage del’avion en optimisant la charge offerte.

autres appellations- agent service avion- agent d’exploitation- assistant de piste

MissionAssure les opérations de manutention (chargement et déchar-gement des bagages, fret et poste), sur la piste et dans leszones de traitement des bagages, et de conduite d’engins

autre appellation- agent escale avion

MissionAssure, en escale, les opérations de service à l’avion (guidage,repoussage de l’avion, branchements électriques) dans desconditions de sécurité optimales

autre appellation- superviseur piste

MissionEncadre une équipe de personnels de piste en veillant à laqualité, au respect des procédures et de la sécurité sur leterrain, et à la bonne utilisation du matériel de piste.

Agent de trafic et de coordination

Agent de piste

Assistant avion

Assistant avionChef d’équipe piste

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Incidents en transport aérien

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Déroulement du volDe jour, au cours du roulage après une étapemoyen-courrier, l'équipage d'un biturbopro-pulseur démarre le groupe auxiliaire depuissance et voit apparaître l'alarme : "Right GenFault". Les pilotes appliquent la check-listoccasionnelle qui consiste en un reset de lagénératrice droite. Cette action reste sans effet.Le message d'anomalie réapparaît ainsi qu'unmessage "Config Generator".

Les pilotes arrivés au point de stationnementaperçoivent le technicien d'escale qui leur faitsigne et leur montre le moteur droit.

Ils constatent alors un épais dégagement defumée blanche provenant de ce moteur et, uneseconde plus tard, l'apparition de l'alarme "RightEngine Fire". Ils effectuent la procédure feumoteur et percutent l'extincteur du moteur droit.

Les techniciens de piste constatant undégagement de fumée sur le haut du moteurpercutent un extincteur de piste par mesure deprécaution.

Le débarquement des passagers se déroulenormalement sous la surveillance du SSIS.

L'intervention rapide et efficace du personnel depiste présent a permis la maîtrise du débutd'incendie dans les trente secondes.

Renseignements complémentairesUne inspection visuelle du compartiment moteurmontre que la partie arrière de la génératrices'est désolidarisée et a reculé jusqu'au bâtimoteur (voir photo ci-dessous). L'huile servantà la lubrification et au refroidissement s'estrépandue sur les parties chaudes du moteur droitet s'est enflammée.

La génératrice est constituée d'un rotor et d'unstator pour la partie électrique, lubrifiés par del'huile provenant du boîtier de réduction dumoteur. La circulation de l'huile est assurée parune pompe à engrenage. L'examen de lagénératrice a mis en évidence un phénomène"d'inondation" provoqué par une différence entreles flux d'huile rentrant et sortant. Uneévacuation insuffisante de l'huile a conduit à uneélévation de la pression et de la température decelle-ci, avec pour conséquence la rupture desinserts du couvercle arrière de la génératrice.L'huile s'est ensuite répandue directement surle moteur. La cause de l'insuffisance du fluxd'évacuation n'a pu être déterminée par leconstructeur.

EnseignementsTrois cas similaires ont été enregistrés. Unnouveau standard de génératrice a été installé,comprenant une nouvelle pompe de vidangepermettant une meilleure évacuation d'huile.

La coordination entre l'équipage et l'équipe ausol a joué un rôle déterminant dans la rapiditédu traitement de l'incendie.

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MINISTÈRE DE L’EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS, DE L’AMENAGEMENT DU TERRITOIRE, DU TOURISME ET DE LA MERBUREAU D’ENQUÊTES ET D’ANALYSES POUR LA SÉCURITÉ DE L’AVIATION CIVILEDIRECTEUR DE LA PUBLICATION : PAUL-LOUIS ARSLANIAN, DIRECTEUR DU BEACONCEPTION-RÉALISATION : COMMUNICATION - CONTACT : PIERRE JOUNIAUX - TÉL. : 01 49 92 72 49E-MAIL : [email protected]

Vue du compartiment moteur avec la partie arrière de la génératrice désolidarisée