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F O N D S A F R I C A I N D E D É V E L O P P E M E N T A F R IC A N D E V E L O P M E N T F U N D B A N Q U E A F R IC A I N E D E D É V E L O P P E M E N T Le département de l’évaluation des opérations (OPEV) a évalué l’assistance de la Banque en matière de GEA pour la période 1990- 2010, en mettant un accent particulier sur le Ghana et le Mali. Dans le cadre de cette évaluation, des expériences antérieures ont été passées en revue, des enseignements tirés et des recommandations formulées pour inspirer et orienter les futurs investissements dans ce secteur 1 . L’évaluation a été guidée par deux principales questions : (1) L’appui de la Banque en matière de GEA a-t-il abouti à des résultats durables ? (2) Quels sont les enseignements qui pourront améliorer l’efficacité de l’appui de la Banque dans ce domaine ? Cette note d’information présente les principales conclusions et recommandations de l’évaluation. 1 Le rapport intitulé « Gestion de l’eau pour l’agriculture : Évaluation de l’aide de la Banque africaine de développement au Ghana et au Mali 1990-2010 » peut être consulté sur le site web de la BAD : www.afdb.org/opev Responsable de l’évaluation : Guy-Blaise Nkamleu, Chargé d’évaluation principal, OPEV Quel bilan pour la Banque ? Aide à la gestion de l’eau pour l’agriculture au Ghana et au Mali : Quelques images concernant la GEA: Planification construction des barrages acheminement de l’eau ver les plantations production de la banane/riz pour le marché et la consommation Le financement des infrastructures et des institutions connexes est au centre de la vision de la Banque africaine de développement (BAD). Dans le secteur de la gestion de l’eau pour l’agriculture (GEA), cette vision prend forme avec les importants investissements faits dans des projets d’irrigation et de drainage pour soutenir l’agriculture africaine. Département de l’évaluation des opérations Groupe de la Banque africaine de développement Résumé d’évaluation

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Page 1: Département de l’évaluation des opérations · 2019. 6. 29. · de GEA. Dans bon nombre de cas, les opérations de GEA ont abouti à la livraison de produits qu’elles n’ont

FONDS AFRICAIN DE DÉVELO

PPEMENT

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CAN D

EVELOPMENT FUND

BANQUE

AFRICAINE

DE DÉVELOPPEMENT

Le département de l’évaluation des opérations (OPEV) a évalué l’assistance de la Banque en matière de GEA pour la période 1990-2010, en mettant un accent particulier sur le Ghana et le Mali. Dans le cadre de cette évaluation, des expériences antérieures ont été passées en revue, des enseignements tirés et des recommandations formulées pour inspirer et orienter les futurs investissements dans ce secteur1.

L’évaluation a été guidée par deux principales questions : (1) L’appui de la Banque en matière de GEA a-t-il abouti à des résultats durables ? (2) Quels sont les enseignements qui pourront améliorer l’efficacité de l’appui de la Banque dans ce domaine ?

Cette note d’information présente les principales conclusions et recommandations de l’évaluation.

1 Le rapport intitulé « Gestion de l’eau pour l’agriculture : Évaluation de l’aide de la Banque africaine de développement au Ghana et au Mali 1990-2010 » peut être consulté sur le site web de la BAD : www.afdb.org/opev

Responsable de l’évaluation : Guy-Blaise Nkamleu, Chargé d’évaluation principal, OPEV

Quel bilan pour la Banque ?Aide à la gestion de l’eau pour l’agriculture au Ghana et au Mali :

Quelques images concernant la GEA: Planification construction des barrages acheminement de l’eau ver les plantations production de la banane/riz pour le marché et la consommation

Le financement des infrastructures et des institutions connexes est au centre de la vision de la Banque africaine de

développement (BAD). Dans le secteur de la gestion de l’eau pour l’agriculture (GEA), cette vision prend forme avec les

importants investissements faits dans des projets d’irrigation et de drainage pour soutenir l’agriculture africaine.

Département de l’évaluation des opérationsGroupe de la Banque africaine de développement

Résumé d’évaluation

Page 2: Département de l’évaluation des opérations · 2019. 6. 29. · de GEA. Dans bon nombre de cas, les opérations de GEA ont abouti à la livraison de produits qu’elles n’ont

CONCLUSION 1 : La Banque a peut-être raté des opportunités d’investissement dans la GEA, car s’est contentée de réagir aux réflexions stratégiques des gouvernements des pays membres régionaux au lieu d’y contribuer.

La qualité laissant à désirer des études economiques et sectorielles et la faible participation de la Banque à la concertation sur les politiques sont des facteurs qui ont limité la contribution straté-gique de la Banque à la GEA.

- La stratégie de la Banque dans le domaine de la GEA à l’échelon national est fortement déterminée par la philosophie des pouvoirs publics, sans que l’institution ne joue le rôle de pourvoyeur de connaissances et ne contribue à la recherche d’approches novatrices ou différentes.

- La Banque et les emprunteurs n’ont pas vraiment fait d’ef-forts pour trouver d’autres solutions en matière de GEA. Au Ghana et au Mali, les projets dans ce secteur étaient de moyenne et grande envergures. La Banque n’a pas aidé les gouvernements à rechercher d’autres opérations ou approches en matière de GEA (par exemple, la collecte des eaux de pluie et la micro-extraction des eaux souterraines) soit par le biais d’études sectorielles et économiques ou de concertations sur les politiques.

- Les agriculteurs n’ont d’autres choix que de pratiquer la riziculture, ce qui pourrait favoriser la sécurité alimentaire, mais pas la rentabilité et la viabilité. Dans ces deux pays, la quasi-totalité des projets porte sur la culture du riz, qui est, par nature, une culture peu rentable comparée aux produits horticoles. En tant que culture irriguée, le riz ne peut être rentable que si, en utilisant les cultivars appropriés, l’on parvient à faire une double récolte. En général, les projets de GEA de la Banque ne remplissaient pas ces conditions parce que les sols étaient habituellement aménagés en parcelles planes caractérisées par un faible drainage pour obtenir de hauts rendements. À plus long terme, l’aménagement des sols

en parcelles planes que l’on peut difficilement drainer pour produire des cultures à forte valeur ajoutée, pourrait réduire les possibilités de revenus provenant éventuellement de la combinaison de l’irrigation et du drainage.

CONCLUSION 2 : Dans le cadre de son assistance, la Banque fait ce qu’il faut, mais pas nécessairement comme il se doit.

La mauvaise conception des projets a été une des causes majeures indirectes de la faible performance des interven-tions de la GEA.

- Dans les deux pays, les projets de GEA étaient très pertinents et correspondaient parfaitement aux objectifs du gouverne-ment et à la stratégie de la Banque, comme indiqué dans les documents de stratégie appropriés.

- À la phase de conception, les résultats escomptés ainsi que les délais de réalisation prévus par les projets dénotaient un grand optimisme, en dépit des expériences passées en ce qui concerne les retards dans la mise en œuvre et les difficultés à atteindre les objectifs.

- Les risques n’ont pas été correctement étudiés et évalués, et les possibilités de les atténuer n’ont pas fait l’objet de recherches poussées. Cela est particulièrement vrai pour les projets plus anciens dans lesquels les hypothèses ont été examinées de manière superficielle. Au Ghana, par exemple, les formules utilisées étaient les suivantes, respectivement, pour le Projet d’irrigation de Kpong (KIP), « tous les risques ont été pris en compte », et pour le Projet de développement de la petite irrigation (SSIDP), « il n’y a pas de risques importants ». Par conséquent, aucune approchée axée sur le risque et sur l’atténuation éventuelle n’a été envisagée.

- À la suite des récentes améliorations apportées aux matrices de projet, les risques liés aux projets de GEA font l’objet d’un traitement plus approfondi. De façon plus générale, il y a eu d’importants gains d’efficacité au moment du démarrage et de la mise en œuvre des opérations pour les récents projets de GEA.

Dans bon nombre de cas, les opérations de GEA ont abouti à la livraison de produits qu’elles n’ont pas réussi à transformer en résultats.

- Dans la plupart des cas, les opérations ont permis de fournir les infrastructures essentielles pour la GEA, dans leur majo-rité, mais ces infrastructures ne fonctionnent pas comme prévu. De belles infrastructures ont été construites dans le cadre de la plupart des projets de GEA de la Banque. Dans certains cas, les pouvoirs publics des deux pays ont fourni les ressources pour l’entretien des infrastructures achevées.

Encadré 1. Un examen du portefeuille de l’agriculture de la Banque pour la période 1990-2007, montre que cette institution a approuvé dans ce secteur 517 opérations, dont 217 avaient une composante eau. Un montant de 3,447 milliards de dollars a été approuvé pour les 217 opérations de GEA, aux prix de 2007. À titre de comparaison, pour des projets agricoles sans la composante eau, 3,54 milliards de dollars ont été approuvés pour 300 opérations. Sur les 217 opérations, il y en avait 136 qui portaient spécifiquement sur la GEA (c’est-à-dire qu’il s’agissait d’opérations, dont au moins 50 % du financement était consacré à l’eau) et 81 qui n’entraient pas dans cette catégorie.

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Cependant, de nombreuses infrastructures sont inachevées ou feront partie de la seconde phase, d’autres encore resteront probablement inachevées et inutilisées.

- Les autres volets des projets ont été sacrifiés pour que la principale infrastructure soit achevée. Tous les projets étudiés comportaient plusieurs volets, englobant des activités supplémentaires liées à l’infrastructure principale, telles que l’appui à la production animale et halieutique. Néanmoins, ces volets ont souvent été sacrifiés pour parachever l’infras-tructure principale.

- En général, les mesures d’accompagnement prévues notam-ment dans les secteurs de la santé et de l’éducation ont été mises en application, et elles ont eu un impact appréciable, en ce sens qu’elles n’ont pas entamé la confiance des bénéficiaires lorsque la mise en œuvre des principales composantes accusait du retard.

- Les cibles prévues en ce qui concerne les superficies à irriguer n’ont pas du tout été atteintes. Cependant, les bénéficiaires ont, dans l’ensemble, tiré parti des investissements faits dans la GEA, mais pas autant que prévu.

- Il semble que le « syndrome de la deuxième phase » ait pesé sur les résultats déjà médiocres de la GEA, en particulier au Mali où le personnel du projet était plus préoccupé par la préparation d’un projet-relais que par la réalisation d’un projet autonome et abouti.

CONCLUSION 3 : Bon nombre de projets ont été déclarés « achevés à 90 % », mais du point de vue des utilisateurs potentiels, ce résultat équivaut à « 0 % »

Les défaillances des travaux de génie civil ont été les causes indi-rectes de la mauvaise exécution des projets de GEA au Ghana et au Mali.

- La qualité des infrastructures est essentielle au succès de la Banque dans le secteur de la GEA. S’agissant des systèmes de GEA, le taux de 90 % d’achèvement équivaut à 0 % pour les utilisateurs potentiels.

- La Banque n’a pas joué son rôle consistant à veiller à la bonne qualité des infrastructures de GEA. Des procédures de passation des marchés rigides et lourdes ont été principalement à l’origine des retards dans la mise en œuvre, ce qui, à terme, a eu des répercussions sur la qualité des infrastructures.

- Les organes d’exécution ont procédé au recrutement et à la supervision des entrepreneurs chargés des travaux de génie civil, de manière désordonnée. Dans certains cas, les questions environnementales telles que la définition et la restauration des zones d’emprunt n’ont pas été clairement décrites dans les dossiers d’appel d’offres dans ces deux pays et, de ce fait, les entrepreneurs sont partis sans remettre en état les zones d’emprunt et de déblais.

- Les projets de GEA de la Banque n’ont pas la flexibilité nécessaire pour s’adapter aux changements qui interviennent pendant la mise en œuvre du projet. L’exécution des activités de GEA nécessite l’adoption d’une approche souple. Pendant l’exécution du projet, il y a eu beaucoup de situations imprévues nécessitant une réaction rapide, mais le manque de flexibilité, pour y faire face comme il convient, a été une cause majeure de l’inefficacité de l’exécution du projet.

Encadré 2 – Les projets de GEA posent des problèmes particuliers et il faut donc les planifier, les concevoir et les exécuter minutieusement afin d’éviter des échecs ou de laisser les bénéficiaires dans un plus grand dénuement. Ces problèmes sont les suivants :i) L’irréversibilité du développement de l’hydraulique agricole. Les opérations de GEA peuvent modifier le régime foncier, altérer

la topographie, transformer les sols du fait du nivelage, etc. Si les résultats escomptés ne sont pas atteints, les agriculteurs ne peuvent pas renouer avec leurs vieilles pratiques agricoles et se retrouveront de façon permanente dans une situation pire qu’avant.

ii) Le caractère saisonnier des ouvrages. Lors de la phase d’exécution, le moindre retard dans l’achèvement des ouvrages peut entraîner, pour les agriculteurs, la perte de la production de toute une campagne, car il sera peut-être trop tard pour semer lorsque le programme sera opérationnel.

iii) La fragilité des ouvrages inachevés. Les infrastructures d’hydraulique agricole inachevées sont généralement très vulnérables à l’érosion ou aux dépôts. Tout retard entraînant le non-achèvement des travaux pendant la saison des cultures peut se solder par la dégradation ou la destruction de l’ouvrage partiellement achevé pendant la saison des pluies.

iv) La flexibilité de l’exécution. L’exécution des activités de GEA nécessite l’adoption d’une approche très flexible. Lors de la phase d’exécution, il se produit toujours des situations imprévues et critiques auxquelles il faut immédiatement faire face, et toute absence de réaction ou de flexibilité entraîne généralement l’échec du projet. Ces problèmes doivent être pris en compte à toutes les étapes du cycle du projet.

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RECOMMENDATIONS

Pour améliorer l’efficacité de la Banque dans le secteur de la GEA au Ghana et au Mali, les recommandations ci-après ont été formulées à l’issue de l’évaluation :

1. La Banque devrait mettre davantage de ressources dans des études économiques et sectorielles de bonne qualité, opportunes et pertinentes, afin de contribuer à la réflexion stratégique à l’échelon national et d’améliorer la qualité de ses projets de GEA.

2. La Banque devrait jouer, auprès des gouvernements, le rôle de l’ami à l’esprit critique, en remettant en cause les plans et les hypothèses, au lieu de prendre les projets et les politiques proposés pour argent comptant.

3. La Banque devrait être plus réaliste en ce qui concerne les résultats attendus de la GEA, les délais d’exécution des opérations et les conditions de leur durabilité.

4. La Banque devrait renforcer son rôle en matière de contrôle de la qualité et de facilitation afin de garantir une exécution harmonieuse et de bonne qualité des opérations de GEA.

Le Groupe de la Banque africaine de développement (BAD) a pour objectif premier de faire reculer la pauvreté dans ses pays membres régionaux en contribuant à leur développement économique durable et à leur progrès social. A cet effet, il mobilise des ressources pour promouvoir l’investissement dans ces pays et leur fournit une assistance technique ainsi que des conseils sur les politiques à mettre en œuvre.

La mission du Département de l’évaluation des opérations est d’aider la Banque africaine de développement à promouvoir une croissance durable et la réduction de la pauvreté en Afrique au moyen d’évaluations indépendantes et influentes. OPEV évalue de manière indépendante les opérations, les politiques et les procédures de la Banque en vue de garantir l’apprentissage et l’obligation de rendre compte dans le cadre des opérations de la Banque et de promouvoir l’impact des opérations sur le développement.

Directeur : Rakesh Nangia, [email protected] de division, Évaluation des projets et programmes : Mohamed Manai, [email protected] de division, Évaluations de haut niveau : Odile Keller, [email protected]

Département de l’evaluation des operations, Banque africaine de developpementBP 323, 1002 Tunis-Belvedere, TunisieTel : (216) 71 102 841 Fax : (216) 71 194 460

Helpdesk : [email protected] www.afdb.org/opev