determinants des stocks de carbone des … final blanchardreduc.pdf · 2. resultats 2.1....

104
213 Rue La Fayette 75480 Paris cedex 10 Unité de Recherche UR-041 « Séquestration du carbone dans les sols tropicaux » Laboratoire MOST – BP 64501 34394 montpellier cedex 5 DETERMINANTS DES STOCKS DE CARBONE DES SOLS DES PETITES ANTILLES (MARTINIQUE, GUADELOUPE). ALTERNATIVES DE SEQUESTRATION DU CARBONE ET SPATIALISATION DES STOCKS ACTUELS ET SIMULES. Eric Blanchart & Martial Bernoux SUBVENTION N° 01105 du 10/08/2001 2005 Référence du Programme : GESSOL Référence de l’appel à propositions : 2000-2002 MINISTÈRE DE L’ÉCOLOGIE ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLE

Upload: doanngoc

Post on 11-Sep-2018

220 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

213 Rue La Fayette 75480 Paris cedex 10

Unité de Recherche UR-041« Séquestration du carbone dans les sols tropicaux »

Laboratoire MOST – BP 6450134394 montpellier cedex 5

DETERMINANTS DES STOCKS DE CARBONE

DES SOLS DES PETITES ANTILLES (MARTINIQUE, GUADELOUPE). ALTERNATIVES DE SEQUESTRATION DU CARBONE ET SPATIALISATION DES STOCKS ACTUELS ET SIMULES.

Eric Blanchart & Martial Bernoux

SUBVENTION N° 01105 du 10/08/2001 2005

Référence du Programme : GESSOL Référence de l’appel à propositions : 2000-2002 MINISTÈRE DE L’ÉCOLOGIE ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLE

SOMMAIRE

1. Rappel du projet de recherche, des objectifs et des axes de recherche

1.1 Justification du programme de recherche

1.2 Les 5 axes de recherche du programme

2. Résultats

2.1 Déterminants des stocks de C dans les sols des Petites Antilles

2.1.1 Matériels et méthodes

2.1.2 Les stocks de C en fonction du type de sol (0-30 cm)

2.1.3 Les stocks de C en fonction de la texture (0-30 cm)

2.1.4 Les stocks de C en fonction de l’occupation des terres (0-30 cm)

2.2 Alternatives de gestion

2.2.1 Systèmes bananiers

2.2.2 Systèmes canne à sucre

2.2.3 Systèmes agroforestiers

2.2.4 Systèmes maraîchers et prairiaux

2.3 Propriétés physiques et biologiques

2.4 Spatialisation et modélisation (Martinique)

2.4.1 Constitution de bases de données géographiques

2.4.2 Estimation des stocks de C

2.4.3 Modélisation

2.5 Approche économique du carbone séquestré

3. Conclusions

4. Bibliographie

1

1. RAPPEL DU PROJET DE RECHERCHE, DES OBJECTIFS ET DES AXES DE RECHERCHE

1.1. Justification du programme de recherche En position d'interface dans l'environnement, les sols jouent un rôle de premier plan dans les grands cycles biogéochimiques. En stockant ou en libérant des éléments, ils influent sur les composantes de la fertilité et sur divers aspects environnementaux tels que la qualité de l'air (rôle des sols en tant que puits ou source de carbone atmosphérique, lieu de dénitrification) et des eaux (nitrates, phosphates, pesticides). La matière organique des sols étant un des déterminants essentiels de nombreuses propriétés édaphiques, son étude en terme de qualité, dynamique et stockage selon le mode de gestion des terres est très importante (Feller et al., 1996 ; Feller & Beare, 1997). Aussi, l'évolution à moyen et long terme des stocks organiques des sols est un indicateur à prendre en compte dans le jugement sur la durabilité des agroécosystemes et la protection de l'environnement. Les préoccupations concernant le réchauffement global et l'augmentation des teneurs en gaz à effet de serre (CO2, CH4, NOx, O3) de l'atmosphère conduisent à s'interroger sur le rôle des sols en termes de source ou de puits de carbone (Post et al., 1982 ; Schlesinger, 1984 ; Schlesinger, 1986 ; Bouwmann, 1989), et sur l'impact des actions humaines, particulièrement en milieu tropical ou subtropical (Detwiler, 1986 ; Lugo & Brown, 1993 ; Bernoux et al., 1998). Les stocks des éléments dans les sols, et en particulier ceux du carbone, sont en constante évolution sous l'effet de facteurs naturels (climat, végétation, effets de l'altération, de la lixiviation, et plus généralement de l'ensemble des processus pédogénétiques) et anthropiques (impacts locaux des utilisations des sols, effets diffus d'apports hydriques et atmosphériques). En un point donné, les variations des stocks de carbone sont dues à divers processus : modification des apports de matière organique, transferts de carbone sous forme solide (particulièrement par érosion en nappe) ou soluble (lixiviation et ruissellement) et pertes par minéralisation (CO2, CH4), de la matière organique des sols. Ainsi, la conversion des forêts en terres agricoles et/ou pâturages a concerné 200 millions d'hectares entre 1980 et 1995 (FAO, 1997), principalement dans les régions tropicales et subtropicales. À l'intérieur de modes d'usage des sols identiques, toute modification de l'itinéraire technique peut induire, en modifiant vitesses de restitution et de minéralisation, des variations du stockage du carbone dans les sols. Or, pour différentes raisons, en particulier la recherche de la durabilité des systèmes de culture et l'étude des changements globaux, de nombreuses alternatives basées sur une gestion plus organique et biologique du sol sont actuellement testées en régions intertropicales, et ce avec la préoccupation de favoriser le stockage du C dans les sols. Des estimations régionales des stocks de carbone et de leurs variations sous l'effet des changements d'usage et de gestion des terres sont donc nécessaires pour : - mieux préciser le rôle de la matière organique dans les propriétés des sols - quantifier l'évolution des stocks de C dans le système sol-plante et la qualité des émissions de gaz à effet de serre (notamment CO2) sous différentes conditions de climat, de sol et d'utilisation des terres - fournir des données quantifiées indispensables à l'évaluation économique du C séquestré dans le système sol-plante, thème largement discuté au cours des réunions de Kyoto (1997) et de Buenos Aires (1998).

2

En milieu tropical, peu de données ont été systématiquement recueillies et sont actuellement disponibles pour une évaluation précise des possibilités de séquestration du carbone dans les sols selon le mode d'usage des terres et la variabilité des conditions pédo-climatiques. Concernant le déterminisme des processus mis en jeu, on doit noter, hors des aspects bio-climatiques, bien documentés aux échelles régionales, l'absence d'une approche systématique des déterminants de la séquestration du C dans les sols à l'échelle de la parcelle. Ainsi, on peut noter (Feller et al., 1999) une quasi-absence de données organisées des rôles de paramètres aussi importants que la minéralogie, les pratiques cumulées à la parcelle, les activités biologiques, l'érosion, le niveau et la qualité des restitutions organiques… sur le stockage du C (Turner et al., 1997). Le programme réalisé ici vise donc, dans cette nouvelle optique, à une relecture des données déjà acquises antérieurement sur la matière organique de sols tropicaux et à un complément systématique sur des déterminants non ou peu étudiés et à la prise en compte de nouvelles situations. Le programme de recherche concerne les Petites Antilles (Martinique, Guadeloupe) qui disposent, sur un espace relativement réduit : - d'une grande variété de climats (précipitations moyennes annuelles variant de 1.2 à plus de 8.0 m), - des principaux types de sols tropicaux riches en minéraux secondaires (Vertisols, Sols ferrallitiques, Andosols),

- d'une très grande diversité des modes d'usage du sol (forêt naturelle, prairies permanentes, cultures de canne ou banane semi-pérennes, successions de cultures associées ou mono-spécifiques à cycle court), comportant des niveaux d'intensification très variables susceptibles d'influer sur le stock de carbone (intensité, profondeur, durée de travail du sol, intrants minéraux). Bibliographie Bernoux M., Arrouays D., Cerri C., de Alencastro Graça P.M., Volkoff B. & Trichet J. (1998)

Estimation des stocks de carbone des sols du Rondônia (Amazonie Brésilienne). Etude et Gestion des Sols, 5 : 31-42.

Bouwmann A.F. (1989) Soils and the greenhouse effect. John Wiley, New York Detwiler R.P. (1986) land use change and the global carbon cycle : the role of tropical soils.

Biogeochemistry, 2 : 67-93. FAO (1997) State of the World's forests. Food and Agriculture Organization of the United

Nations. 200 pages. Feller C., Albrecht A. & Tessier D. (1996) Aggregation and organic carbon storage in

kaolinitic and smectitic soils. In Carter M.R. (ed) Structure and organic matter storage in agricultural soils. Advances in Soil Science, CRC Press, Boca Raton : 309-359.

Feller C. & Beare M.H. (1997) Physical control of soil organic matter dynamics in tropical land-use systems. Geoderma, 79 : 49-67.

Lugo A.E. & Brown S. (1993) Management of tropical soils as sinks or sources of atmospheric carbon. Plant and Soil, 149 : 27-41.

Post W.M., Emmanuel W.R., Zinke P.J. & Stangenberger A.G. (1982) Soil carbon pools and world life zones. Nature, 298 : 156-159.

Schlesinger W.H. (1984) Soil organic matter : a source of atmospheric CO2. In Woodwell G.M. (ed) The role of terrestrial vegetation in the global carbon cycle : measurement by remote sensing. John Wiley & Sons, Londres, 11-27.

3

Schlesinger W.H. (1986) Changes in soil carbon storage and associated properties with disturbance and recovery. In Trabalka J.R. & De Reichle (eds) The changing carbon cycle : a global analysis. Springer Verlag, New York : 194-220.

Turner D.P., Winjum J.K., Kolchugina T.P. & Cairns M.A. (1997) Accounting for biological and anthropogenic factors in national land-base carbon budgets. Ambio, 26 : 220-226.

1.1. Axes de recherche du programme

Les principaux objectifs de recherche tels qu’annoncés dans le projet de recherche sont organisés en 5 axes : Axe 1. Analyse des principaux déterminants édaphiques des stocks organiques des différents sols et effet des grands modes d'occupation de ces terres (échelle parcelle) sur les stocks de C du sol : constitution d’une base de données informatisée. Ceci se fera à partir de la valorisation de données déjà existantes et de données à recueillir au cours de ce projet. Axe 2. Analyse des variantes contingentes de l'itinéraire technique : recherche d’alternatives de gestion des terres en vue d’une séquestration accrue du C dans le sol, dans le cadre d'une agriculture durable. Axe 3. Conséquences du mode d’usage des terres et/ou des alternatives de gestion sur les propriétés biologiques (diversité et biomasse de la faune) et physiques (stabilité de l'agrégation et érodibilité) des sols. La protection physique de la matière organique dans les agrégats sera également étudiée, en raison de son importance dans le phénomène de séquestration du C. Axe 4. Spatialisation des stocks actuels de C des sols de la Martinique et de la Guadeloupe et de leur devenir selon différentes alternatives de gestion (depuis l'échelle de la parcelle à celle de la région). Constitution de banques régionales de données géoréférencées à partir de données existantes (valorisation) ou de celles acquises au cours de ce projet (SIG). Axe 5. Approche économique du C séquestré pour quelques situations :

- prairies derrière maraîchage (sur vertisols) - simplification du travail du sol - autres (à définir après enquête auprès des agriculteurs)

Coordination Eric Blanchart et Martial Bernoux (IRD Montpellier) Participants CEMAGREF : Frédéric Saudubray, Sylvie Maubourguet (Martinique) CIRAD : André Lassoudière, Raphaël Achard (FLHOR, Martinique), Robert Oliver (MOST,

Montpellier) INRA : Dominique Arrouays, Sébastien Lehman, Emmanuel Grolleau (Infosol, Orléans),

Yves-Marie Cabidoche, Jorge Sierra (APC, Guadeloupe) IRD : Bernard Barthès, Eric Roose (MOST, Montpellier), Corinne Venkatapen (BOST,

Martinique)

4

2. RESULTATS

2.1. Déterminants des stocks de C dans les sols des Petites Antilles L’étude des déterminants édaphiques (minéralogie, texture) et agronomiques (modes

d’occupation des terres, itinéraires techniques, intensification) des stocks de carbone nécessite de connaître, à l’échelle de la parcelle, les stocks de carbone pour les différents types de sols des Petites Antilles et sous différents systèmes de culture. Cette étude a principalement été menée à la Martinique où une centaine de situations croisant types de sol et systèmes de culture ont été analysées. Les types de sols sont les sols peu évolués sur cendres et ponces, les sols à allophane (andosols), les sols à argiles 1:1 (sols brun-rouille à halloysite, sols fersiallitiques, ferrisols), les sols à argile 2 :1 (vertisols et les sols rouge à montmorillonite) (Colmet-Daage et Lagache, 1965). Les principaux modes d’occupation des terres de la Martinique ont également été pris en compte : forêts, prairies, cultures industrielles (ananas, canne à sucre, banane), cultures vivrières et maraîchères, vergers. Pour chaque mode d’occupation des terres, le niveau d’intensification, l’âge de la parcelle et l’antécédent cultural ont été notés.

2.1.1. Matériels et méthodes La méthode employée pour calculer les stocks de carbone du sol consiste à mesurer la teneur en carbone C organique total à différentes profondeurs du sol et de transformer ces données, en prenant en compte la densité apparente et la pierrosité ou charge en éléments grossiers du sol. Les stocks de carbone sont calculés d’après la formule : C (kg/m2) = C (mg.g-1 sol)*Da*e Avec : Da, la densité apparente (g.cm-3) et e, l’épaisseur de l’horizon de sol exprimée en dm. Pour les sols présentant des éléments grossiers (> 2 mm de diamètre), les stocks organiques sont calculés d’après la formule suivante : C (kg/m2) = C (mg.g-1 sol)*(100-% en éléments grossiers)*Da* e. Les stocks ont été calculés pour une profondeur de référence de 0-30 cm (profondeur moyenne de l’horizon labouré selon les normes internationales) et de 0-100 cm. Sur chaque parcelle, une fosse d’1 m de profondeur (ou fosse principale) a été creusée (parfois moins quand le sol s’avérait moins profond). Les prélèvements de sols et mesures de Da ont été réalisés dans les horizons 0-10, 10-20, 20-30, 30-40, 60-70 et 90-100 cm. À égale distance entre la fosse principale et la limite de la parcelle deux répétitions (ou fosses de plus petites dimensions) ont été réalisées sur les 30 premiers centimètres du sol afin de pouvoir calculer des valeurs de stocks organiques rendant compte d’une éventuelle variabilité intra-parcellaire. Une fois au laboratoire, les échantillons ont été émiettés, débarrassés des racines grossières, séchés à l’air libre pendant quelques semaines, broyés au marteau et au rouleau, puis passés au tamis à mailles carrées de 2 mm de diamètre. En revanche, les échantillons de sols à allophanes sont émiettés, tamisés frais puis, conservés au réfrigérateur. La texture ou granulométrie a été analysée pour les 30 premiers centimètres de sol (méthode de la pipette Robinson). La teneur en C est effectuée sur les échantillons de sol broyés à 200 µm grâce à un microanalyseur CNS (Carlo Erba).

5

2.1.2. Les stocks de C en fonction du type de sol (0-30 cm) Bien que les systèmes de culture étudiés ne soient pas les mêmes pour les différents types de sol, l’examen des stocks de carbone moyen (avec valeur maxi et mini) par type de sol permet de se faire une première idée de la relation entre type de sol et stock de carbone (Tableau 1). Tableau 1 : Stocks de C (kgC m-2) moyens, maximaux et minimaux pour les différents types de sols de Martinique. Sols jeunes sur

cendres et ponces

Andosols Sols brun-rouille à halloysite

Ferrisols Vertisols Sols rouges à montm.

Maximum 59 78 77 137 103 62 Moyenne 35 51 48 61 71 52 Minimum 16 26 35 35 28 32 Les vertisols (high activity clay HAC) sont les sols présentant les stocks de carbone moyens (tous systèmes de culture confondus) les plus élevés tandis que les sols jeunes présentent la valeur moyenne la plus faible. Les andosols (à allophane ALL) et les sols à argile 1:1 (low activity clay LAC) présentent des valeurs moyennes intermédiaires. 2.1.3. Les stocks de C en fonction de la texture (0-30 cm) À partir des stocks de carbone calculés par horizon, et du pourcentage en éléments fins (0-20 µm) mesurés dans les 30 premiers centimètres du sol, on obtient l’ équation suivante : CLAC+HAC (kg m-2) = 0,5285 (A+LF %) + 22,25 (n = 85 ; r2 = 0,30) (Figure 1). On observe une corrélation positive entre stock organique et texture du sol. Les sols sableux ont des stocks de carbone plus faibles que les sols argileux. Ceci explique donc que les sols les plus argileux (vertisols) ont des stocks de C en moyenne supérieurs aux types de sol légèrement moins argileux (ferrisols et sols à halloysite). Les figures 1a et 1b montrent notamment que la relation entre stock de carbone et texture n’est pas très différente entre les sols à argile 2 :1 (HAC) et les sols à argiles 1 :1 (LAC). En revanche, les andosols, pour des textures identiques aux autres types de sols, présentent des stocks de C légèrement plus élevés.

6

CLAC (kg/m2) = 0,4069 (A+LF %) + 26,621R2 = 0,20 ; n = 58

CHAC (kg/m2) = 0,592 (A+LF %) + 21,854R2 = 0,22 ; n = 27

0

20

40

60

80

100

120

140

160

0 20 40 60 80 100

% Argiles + Limons fins (0-20 µm)

CLAC+HAC (kg/m2) = 0,5285 (A+LF %) + 22,25R2 = 0,30 ; n = 850

20

40

60

80

100

120

140

160

0 20 40 60 80 100

% Argiles + Limons fins (0-20 µm)

Figure 1 (a et b) : Relation entre stocks de C et teneurs en éléments fins pour les grands types de sols de la Martinique (ALL = sols à allophane, HAC = sols à argiles 2:1, LAC = sols à argiles 1:1). 2.1.4. Les stocks de C en fonction de l’occupation des terres (0-30 cm) Les sols sous forêt présentent les stocks organiques les plus élevés ; ces stocks diminuent sous prairies et sous cultures. Sous cultures, les stocks de carbone sont relativement élevés sous canne. Dans les sols à texture sableuse, ces stocks organiques sous canne avoisinent ceux mesurés sous prairies et dépassent, dans certains cas, les stocks mesurés sous forêt. En revanche, les parcelles sous cultures maraîchères fortement intensifiées présentent les stocks organiques les plus faibles, aussi bien dans l’horizon 0-10 cm que dans l’horizon 0-30 cm, et ce, quelle que soit la texture du sol (la diminution des stocks en carbone sous cultures maraîchères fortement intensifiées atteint dans l’horizon 0-10 cm près de 60 % des stocks organiques mesurés sous forêt). Les sols cultivés en banane, en cultures maraîchères et en cultures vivrières moyennement intensifiées présentent des stocks organiques compris entre ceux observés sous canne et cultures maraîchères fortement intensifiées. Sous quasiment tous les modes d’occupation, on observe une corrélation faible, mais positive entre stock organique et texture du sol.

7

CFor�t (kg/m2) = 0,8399 (A+LF %) + 18,465R2 = 0,59 ; n = 9

CPrairie (kg/m2) = 0,6197 (A+LF %) + 25,178R2 = 0,46 ; n = 19

CCanne (kg/m2) = 0,5019 (A+LF %) + 27,506R2 = 0,32 ; n = 21

CBanane (kg/m2) = 0,2023 (A+LF %) + 28,505R2 = 0,16 ; n = 15

CMaFi/ViFi (kg/m2) = 0,2701 (A+LF %) + 20,046R2 = 0,23 ; n = 5

CMami/Vimi (kg/m2) = 0,0303 (A+LF %) + 41,499R2 = 0,01 ; n = 7

0

20

40

60

80

100

120

140

160

0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100% Argiles + Limons fins (0-20 µm)

For�tPrairieCanneBananeMaFi/ViFiMami/VimiMafi/VifiAnanasVergerJ. cr�ole

Figure 2 : Relation entre stock de carbone (0-30 cm) et teneurs en éléments fins (0-20 µm) pour les différents modes d’occupation des terres. Sous prairie la diminution des stocks en carbone varie avec la texture de 10 à près de 16 % des stocks organiques mesurés sous forêt. Sous cultures, ces diminutions varient avec la texture de 35 à 50 % , en moyenne, des stocks organiques mesurés sous forêt. Ces premiers résultats montrent que les potentialités de stockage de carbone (représentés par le ∆C entre situations cultivées et situations séquestrantes – forêts, prairies, canne à sucre) sont nettement plus élevées pour les sols argileux (vertisols, sols à halloysite, ferrisols) que pour les sols sableux ou sablo-argileux. Cette étude sera approfondie dans les mois qui viennent. Les données issues de la littérature seront ajoutés à la base de données ce qui permettra d’affiner les conclusions.

2.2. Alternatives de gestion L’agriculture des Antilles Françaises connaît depuis plusieurs années de profonds bouleversements liés à la nécessité de trouver des techniques présentant un impact environnemental plus faible. En effet, les techniques de culture conventionnels présentent dans de nombreux cas des risques de pollution (pollution par le chlordécone dans les bananeraies, envasement des baies liées à l’érosion…). De nombreuses alternatives de gestion ont été proposées par la recherche ; elles méritent d’être étudiées du point de vue du stockage du carbone.

2.2.1. Systèmes bananiers

A la Martinique, les systèmes bananiers sont généralement situés sur les sols brun-rouille à halloysite (côte Nord-Atlantique). Depuis plusieurs années, le CIRAD teste de nouveaux systèmes de culture : bananeraies pérennes, bananeraies intensives (avec replantations fréquentes), bananeraies en rotations avec la canne à sucre ou l’ananas. Des stocks de carbone ont été mesurés sous bananeraies pérennes et au bout de 2 ans de rotations, avec canne à sucre ou ananas. Sur ces situations expérimentales, des parcelles d’érosion et des lysimètres ont été installés dans le but de suivre les pertes en carbone par érosion, ruissellement et drainage. Des

8

bilans de carbone à la parcelle ont ainsi pu être calculés. Les résultats de cette étude sont en cours de publication (Blanchart et al., Development in Soil Science, accepté) et ont été présentés au colloque international « Effect of Land Use Management on Erosion and Carbon Sequestration », Montpellier, 23-28 Sept. 2002 (communication orale). Les principales conclusions sont que les stocks de C (sur une base massique) ne varient pas significativement (bien qu’une légère augmentation soit observée sous canne à sucre) entre les traitements, excepté dans les parcelles « sol nu » où les stocks ont diminué de 2 à 4 Mg C ha-1 an-1. Les pertes en C sont relativement importantes et principalement sous une forme solide dans les traitements « sol nu » (1,3 to 3,0 Mg C ha-1 an-1), intermédiaires (surtout sous forme solide) sous ananas billoné (0,35 Mg C ha-1 an-1) et faibles (surtout sous forme dissoute) sous canne à sucre (0,043 to 0,047 Mg C ha-1 an-1), ananas à plat et paillé (0,045 Mg C ha-1 an-1) et bananeraies (0,05 to 0,055 Mg C ha-1 an-1). Ces résultats soulignent l’importance du paillis pour réduire l’érosion. Le calcul des bilans de carbone a permis de déduire les pertes en C par minéralisation. Ces pertes (> 5 Mg C ha-1 an-1) étaient beaucoup plus importantes que celles dues à l’érosion et au drainage dans les systèmes cultivés. A l’inverse, sous sol nu, les pertes en C par minéralisation (2,40 Mg C ha-1 an-1) étaient aussi importantes que les pertes par érosion + drainage. A la Guadeloupe, la diversité des systèmes de culture bananiers d’altitude a été exploitée (Clermont-Dauphin et al, 2004) : entre un pôle de bananeraie pérenne (exploitation des rejets des pieds mères de cycle en cycle), sans intrant, et un pôle de bananeraie intensive (replantation de plants in vitro tous les 3 ans avec travail du sol, fertilisation N,P,K,Mg excédent les besoins, chaulage fréquent au calcaire broyé et à la dolomie, utilisation massive de pesticides), tous les intermédiaires ont pu être repérés selon trois classe d’intensités de 0 à 2 pour chaque variable : travail du sol (T), application de fertilisants s.l., application de nématicides-insecticides. Ces systèmes de culture sont développés sur des andosols à allophanes ou sols bruns andiques (nitisols selon FAO) à halloysite prédominante et allophane minoritaire. Le stockage du carbone des bananeraies pérennes sur andosol représente 70 à 180 Mg C ha-1 sur 30 cm, soit des valeurs excédent parfois largement les stocks de forêts primaires (70 à 90 Mg C ha-1). Sous les mêmes occupations, les sols bruns andiques comportent 60 à 110 Mg C ha-1. Pour chacun des sols, les valeurs minimales ont été enregistrées pour des sols travaillés tous les 3 ans, respectivement 60 et 50 Mg C ha-1. Les cultures bananières pérennes, couvrantes et restituant une importante biomasse au sol, apparaissent comme favorisant la séquestration du carbone. Dans le détail, le niveau de stock apparaît conditionné par l’abondance de l’allophane, mais aussi relié à l’état des charges variables, ici exprimé par la différence entre le pHH2O et le pHKCl (Figure 3). L’état des charges est conditionné par le pH, et la teneur en carbone des sols (un modèle unique a été défini pour les andosols). Le pH est fortement dépendant de la teneur en calcium échangeable, et indépendant de celle en potassium.

9

y = 87,17e0,58x

R2 = 0,65

y = 32,76e0,99x

R2 = 0,51

020406080

100120140160180

-0,5 0 0,5 1 1,5

pHH2O - pHKCl

Stoc

k de

Car

bone

0-3

0 cm

M

g ha

-1

andosol, T- andosol + cendres 70', T-andosol, T+ sol brun rouille, T-sol brun-rouille, T+ Exponentiel (andosol, T-)Exponentiel (sol brun rouille, T-)

Figure 3 : Etat des stocks de carbone entre 0 et 30 cm sous bananeraies d’altitude sur andosols à allophanes et sols bruns andiques, en fonction de l’état des charges variables. Il apparaît, sur l’ensemble des andosols, une relation croissante entre l’état des charges variables et la teneur en potassium échangeable : au voisinage du point de charge nulle, les fertilisations potassiques, même récentes, n’ont aucun effet significatif sur l’état du potassium échangeable (Figure 4) ; elles ont au contraire un fort impact pour les sols bruns andiques, éloignés de leur point de charge nulle. D’où une hypothèse forte : les andosols, près de leur point isoélectrique, auraient une faible affinité pour le potassium, qui serait alors le premier facteur limitant de la productivité des bananeraies.

10

0,0

1,0

2,0

3,0

4,0

5,0

-1 -0,5 0 0,5 1 1,5

pHH20 - pHKCl

K+ é

chan

geab

le c

mol

(+) k

g-1

andosol non fertilisé

andosol fertilisé

andosol récemmentfertiliséandosol sous forêtprimairesol brun-rouille nonfertilisésol brun-rouille fertilisé

Figure 4 : Etat des charges variables et efficience apparente des fertilisations sur le niveau de potassium échangeable. Les premiers résultats obtenus dans le cadre de la thèse de J. Sansoulet, tant en lysimétrie qu’en batch, confirment cette hypothèse : à cet état, les andosols sorbent beaucoup plus le nitrate que le potassium. Cette étude permettra d’affiner la stratégie de fertilisation s.l. des andosols, pour optimiser la productivité en minimisant les pertes de solutés fertilisants et en maximisant la séquestration du carbone.

2.2.2. Systèmes canne à sucre La récolte de la canne à sucre se fait traditionnellement aux Antilles après brûlis de la canne. Depuis quelques années (< 10 ans), avec le développement de la mécanisation (et le remodelage des terres) et sous la pression du voisinage souffrant des cendres de canne, le non brûlis de la canne tend à se généraliser. Cette technique du non-brûlis a montré son intérêt vis-à-vis du stockage du carbone dans un certain nombre de pays de la zone tropicale (Brésil notamment, Razafimbelo et al., 2003). Deux parcelles de canne à sucre, situées côte à côte sur la même exploitation(sur ferrisol) nous ont permis de vérifier le rôle bénéfique du non-brûlis sur les stocks de C. Anciennement cultivées de façon traditionnelle (brûlis), ces deux parcelles se sont différenciées depuis 6 ans : l’une est récoltée après brûlis, l’autre en non-brûlis. Le sol de la parcelle non brûlée présente un stock de C de 61,7 t/ha (sur 30 cm) significativement supérieur à celui de la parcelle brûlée dont le stock est de 54,8 t/ha. La différence se fait essentiellement dans l’horizon 0-10 cm, le changement de pratique n’affecte pas les horizons sous-jacents.

11

2.2.3. Systèmes agroforestiers

2.2.3.a. Contexte et objectifs

Dans son rapport de l'année 2000, l'IPCC a estimé que l'agroforesterie pourrait apporter 40% de la séquestration de C à l'échelle planétaire à l'horizon 2010, dont 8% dans les sols, notamment en région tropicale. Au-delà du fait que l'hypothèse concernant le taux d'adoption de cette pratique risque d'être trop optimiste, l'information disponible actuellement (Koskela et al., 2000) montre que la disponibilité en N dans le sol peut limiter sévèrement la séquestration de C. L'objectif de ce travail consistait à analyser la relation entre ces deux variables, dans un système agroforestier (légumineuse arbustive C3 - graminée C4) où la présence de la légumineuse a contribué significativement à l'augmentation de la teneur en N et en C du sol (Dulormne et al., 2003). Parallèlement, il s'agissait de quantifier le rôle des racines de la légumineuse sur le processus de séquestration.

2.2.3.b. Le système agroforestier Nous avons mené une expérimentation en mésocosme sur deux parcelles agroforestières (P2 et P6, de 20 m x 13 m chacune) installées en 1989. Le système a été géré en cut-and-carry, où les résidus de la taille de l'arbre (tous les 2 ou 6 mois en P2 et P6, respectivement) et de la fauche de l'herbe (tous les 40 ou 80 jours en P2 et P6, respectivement) ont été enlevés de la parcelle, et les animaux exclus. Avec ce type de gestion, la litière de l'arbre est négligeable et seulement ses racines sont une source de C et N (p.ex. exsudats, recyclage après taille) (Dulormne et al., 2003). La méthode de l'abondance naturelle 13C a été utilisée à la fois pour identifier l'origine de C du sol (plante C3 ou plante C4), et pour quantifier la biomasse racinaire de l'arbre.

2.2.3.c. Séquestration du C Douze ans après l'installation des parcelles, la teneur en C du sol a augmenté de 26 Mg ha-1 en P6 (18 de l'arbre, 8 de l'herbe) et 14 Mg ha-1 en P2 (16 de l'arbre, -2 de l'herbe). Dans le cas de N, l'augmentation a été de 2.5 et 1.7 Mg ha-1 en P6 et P2, respectivement. En P2 les résultats impliquent une perte nette de carbone initial du sol, même si N a joué un rôle important en les limitant ou en contribuant à la séquestration du C de la litière produite par l'herbe. La différente contribution de l'arbre et de l'herbe a été associée à la quantité (arbre > herbe) et à la qualité des apports (C/N 20 pour l'arbre et 55 pour l'herbe). Les différences entre parcelles ont été liées à la différente gestion des systèmes, qui a eu des conséquences sur les entrées et les sorties de C et de N :

* biomasse racinaire de l'arbre et recyclage après taille : P6 > P2 (le rapport C/N des racines était similaire dans les deux cas)

* litière de l'herbe : P6 > P2 (le rapport C/N était similaire dans les deux cas) (Dulormne, 2001)

* exportation de N (taille + fauche) : P6 < P2 (Dulormne et al., 2003) D'ailleurs, en P6 le rapport C/N de l'augmentation issue de l'arbre a été significativement inférieure, ce qui pourrait indiquer un apport plus important d'exsudats en relation à l'apport organique dû au recyclage des racines. Ce N "libre" (p.e. ammonium) pourrait favoriser la séquestration de C de l'herbe, avec un rapport C/N plus élevé. Nos résultats montrent que, dépendant de la gestion, un système agroforestier peut perdre une partie de C du sol, malgré l'augmentation de N et même si la séquestration nette est positive.

12

2.2.4. Systèmes maraîchers et prairiaux 2.2.4.a. contexte et objectifs Les résultats présentés ici ont été acquis dans le cadre de deux thèses de l’ENSAM (Jean-Fernand Ndandou, 1998 et Tiphaine Chevallier, 1999). Ces études n’ont donc pas été financées par le programme GESSOL, mais les résultats apportent des compléments sur notre compréhension du stockage du carbone dans les sols des Antilles ; ils méritent donc d’être rappelés succinctement ici. Après de longues décennies de culture de canne à sucre, les vertisols du Sud-est de la Martinique ont été, vers le début des années 80 et suite au développement d’un périmètre irrigué, utilisés pour des cultures prairiales et maraîchères. Les sols sous canne à sucre présentaient en moyenne pour 0-10 cm des stocks de C de 23 MgC.ha-1 ; après 10 années, les prairies irriguées et fertilisées présentaient des stocks de 36 MgC.ha-1 et les cultures maraîchères des stocks de 16 MgC.ha-1.

2.2.4.b. Stockage de C sous prairie La dynamique et les déterminants du stockage de carbone dans un vertisol auparavant cultivé en maraîchage et transformé en prairie a été étudiée par Chevallier et al. (2000, 2001, 2004).

Figure 5 : Flux de C (MgC.ha-1) en 5 ans (0-20 cm) sous prairie (antécédent culture maraîchère) dans un vertisol (modifié d’après Chevallier, 1999). En 5 ans de prairie, l’entrée de C sous forme de racines et de litière a été estimée à 75 MgC.ha-1 (Figure 5). Sur ces 75 MgC.ha-1, 11 MgC.ha-1 sont stockés dans le sol en 5 ans tandis que 64 MgC.ha-1 sont minéralisés. A celles-ci s’ajoutent 5 MgC.ha-1 résultant de la minéralisation de MO ancienne (origine maraîchère). Lors de la transformation d’une culture

13

maraîchère en prairie, le stockage sur 20 cm de profondeur est donc de 6 Mg.ha-1 sur 5 ans (soit un stockage moyen de 1,2 Mg.ha-1.an-1). 2.2.4.c. Influence de la profondeur de travail du sol La mise en culture maraîchère d’une prairie entraîne une dilution de la matière organique dans l’horizon labouré et un accroissement des pertes en C par minéralisation et érosion (Ndandou, 1998).

0

10

20

30

40

Tene

ur e

n ca

rbon

e (m

gC.g

-1 s

ol)

Temps (années)

labour

rotobêche

sans travail

0prairie

1 2cultures maraîchères

10

-17%-23%

-28%-37%

-57%

Figure 6 : Evolution des teneurs en carbone (0-10 cm) après mise en culture d'un vertisol sous prairie selon deux modes de préparation du sol (labour à 40 cm et rotobêche à 10 cm), après un et deux cycles de culture de melon. Comparaison avec une prairie âgée et une culture maraîchère de 10 ans (Blanchart et al., 1997). La diminution des teneurs en C de l’horizon 0-10 cm est importante, notamment lorsque la mise en culture maraîchère est faite de façon conventionnelle (labour à 40 cm, nombreuses reprises) : pertes de 28 % en 1 an et pertes de 37% en 2 ans (Figure 6). En revanche, la mise en culture maraîchère selon une technique conservatrice du sol (travail superficiel à la machine à bêcher) réduit ces diminutions des teneurs en C (23% en 2 ans). Au final, après deux ans de culture de melon, les stocks de C pour l’horizon 0-40 cm sont égaux à 93,3 MgC.ha-1 sous prairie, 82,6 MgC.ha-1 sous culture maraîchère avec travail superficiel du sol et 71,1 MgC.ha-1 sous culture maraîchère avec labour. Ces deux études montrent d’une part que le travail superficiel du sol en cultures maraîchères préservent les stocks de C et d’autre part que les prairies irriguées et fertilisées représentent un moyen satisfaisant de stocker du C dans les vertisols. La mise en place de rotations cultures maraîchères / prairies constituerait donc un moyen performant de conserver les stocks de C et de limiter l’envasement des baies du Sud de la Martinique fortement lié à l’érosion de ces sols.

14

2.3. Propriétés physiques et biologiques

Les conséquences du stockage du carbone sur d’autres propriétés du sol, biologiques et physiques notamment, ont en partie été étudiées. Seule la macrofaune du sol a été étudiée dans certaines situations bien caractérisées du point de vue des stocks de C (comparaison entre situations conventionnelles et alternatives de gestion permettant un stockage du C). La stabilité structurale des sols sera étudiée au cours du premier semestre 2005. L’érodibilité (par simulation de pluie) ne sera pas mesurée pour des raisons logistiques. Trois couples de deux parcelles ont été étudiés, dans le but de connaître l’impact de systèmes de culture alternatifs sur certaines propriétés du sol. Les parcelles sont les suivantes :

- systèmes bananiers : comparaison entre un système intensif et un système pérenne (alternatif) sur sol brun-rouille à halloysite,

- systèmes canne à sucre : comparaison entre une canne brûlée et une canne non brûlée (alternatif) sur ferrisol,

- comparaison entre un culture maraîchère et une prairie (alternatif) sur vertisol. Pour chacun des couples de parcelles, les parcelles sont situées côte à côte, ont le même antécédent et leur différenciation s’est effectuée depuis au moins 5 ans. Les résultats concernant la macrofaune du sol sont présentés sur les figures 7 et 8.

Figure 7 : Densité (ind/m2) des différents groupes de macrofaune dans différents systèmes de culture. Légende : Bi = Bananeraie intensive, Bp = Bananeraie pérenne, M = Culture maraîchère, P = Prairie, Cb = canne brûlée, Cnb = Canne non brûlée. Les chiffres indiquent le nombre de groupes taxonomiques

15

Figure 8 : Biomasse (g/m2) des différents groupes de macrofaune dans différents systèmes de culture. Légende : voir Figure 7. Les principaux groupes rencontrés dans les différents systèmes de culture étudiés sont les vers de terre (Annélides) et les Myriapodes (Diplopodes et Chilopodes). Ces groupes dominent en densité et en biomasse. Le passage d’un système traditionnel à un système alternatif entraîne pour chacun des couples de parcelles une augmentation significative des biomasses de macrofaune ; ce sont principalement les vers de terre qui augmentent en biomasse, aux dépens des autres groupes de macrofaune. Ainsi le nombre de groupes taxonomiques évolue différemment selon les couples de parcelles : augmentation dans la bananeraie pérenne par rapport à la bananeraie intensive, diminution dans la prairie par rapport au maraîchage, pas de modification lors du passage de la canne brûlée à la canne non brûlée. Les densités augmentent pour les parcelles alternatives de banane et de canne, en revanche, la prairie présente des densités inférieures à celles du maraîchage.

2.4. Spatialisation et modélisation (Martinique) 2.4.1. Constitution de bases de données géographiques

2.4.1.a. Occupation des sols

L ´occupation des sols de la Martinique a été conduite à partir des « cartes des cultures et d´utilisation du sol au 1/20.000ième exécutées par le Bureau des Sols du Centre des Antilles de l´ORSTOM (actuel IRD). Ces cartes ont été établies sous la direction de F. Colmet Daage à partir de l´interprétation par J. Bernard de prises de vues aériennes en couleur effectuées par F. Colmet Daage. Deux cartes, l´une pour 1969/1970 et l´autre pour 1979/1980, ont été publiées sous la forme d´une mosaïque de 24 feuilles individuelles (Figure 9).

16

Figure 9 : Articulation des feuilles individuelles Digitalisation et traitement d´image La digitalisation de ces cartes a été réalisée à partir des calques originaux. La digitalisation a été conduite avec un scanner HP ScanJet en utilisant une résolution de 200 dpi et 256 couleurs. Les calques ont été fortement dégradés par l´action du temps et présentent une coloration brun jaunâtre plus ou moins accentuée de la partie imprimée (fond topographique). Par contre les tracés effectués à l´encre de chine sont restés parfaitement noirs. Ce contraste permet l´application de filtres pour séparer la couche des tracés du reste de l´information (Figure 10)

17

Figure 10 : Image digitale brute et détails de la feuille 2 de la carte des cultures 1969/1970. Mais avant de procéder au filtrage il a été nécessaire de « surpasser » en noir les contours de la feuille, ainsi que les marques qui correspondent à la grille UTM. Ces marques sont en effet indispensables pour géoréférencer les informations, mais aussi corriger les déformations physiques qu´ont pu subir les calques. Une image en noir et blanc comportant les limites de la feuille, les coordonnées UTM et les contours des différents usages a été obtenue après les opérations de filtrage (Figure 11).

18

Figure 11 : Extrait de la feuille nº14 (Fort-de-France) et l´image correspondante en noir et blanc des contours après les opérations de filtrage. Par la suite, à l´aide d´un logiciel de traitement d´image (Paint Shop Pro), les différentes plages ont été colorées à l´aide d´une palette (Figure 4) de couleurs aléatoirement choisies mais unique par usage (une seule combinaison Rouge Vert Bleu par usage, par exemple pour la lettre B correspond la couleur définie par R = 255, V = 255, B = 0). Ainsi à chaque feuille de la carte correspond une image colorée en 256 couleurs selon la même palette des couleurs (Figure 12).

Figure 12 : Palette des couleurs (et extrait en détail) utilisée pour colorier les feuilles, et extrait de la feuille nº14 (Fort-de-France) colorié selon cette palette.

19

Par la suite les feuilles sont assemblées entre-elles. Certaines corrections sont nécessaires pour une parfaite correspondance des feuilles. Dans certains cas, les contours des usages ne se poursuivent pas sur la feuille adjacente et sont terminés arbitrairement à la limite de la feuille. A l’issu de cette opération deux couvertures complètes (une pour 1969/1970 et l’autre pour 1979/1980) de la Martinique est obtenue sous la forme d’une image digitale avec une palette spécifique de couleurs (Figure 13).

Figure 13 : Aspect de la mosaïque colorée reconstituée pour la carte des usages de 1979/1980 Géo-référencement et vectorisation Les images ont été importées dans Arcview 3.2a équipé de l’extension Spatial Analyst qui permet de travailler les fichiers type raster. Les fichiers images ont été dans un premier temps transformé en fichier raster de Arcview (GRID). Le géo-référencement à été effectué à l’aide

20

de l’extension « Image Warp 2.0 ». Les cartes ont été géoréférencées à l´aide de la grille kilométrique UTM qui figure sur les calques. Cette grille semble être celle utilisée par l´IGN pour la Martinique : UTM - Zone 20 - système géodésique Fort-Desaix). Au total 1083 points de référence ont été utilisés (Figure 14).

Figure 14 : Capture d’écran montrant le logiciel Arcview lors du géo-référencement. Le logiciel propose plusieurs équations polynomiales (jusqu’au degré 12) pour ajuster l’image, les différentes options ont été testées pour déterminer la meilleur possible. Finalement l’image a été ajustée avec une équation polynomiale (Figure 15). L’erreur moyenne sur les abscisses a été de 8m, et sur les ordonnées de 5m, ce qui est largement satisfaisant.

21

Figure 15 : Détails montrant la position des points de référence par rapport à la grille kilométrique UTM. Les grilles géo-référencées ont été filtrées pour supprimer les pixels isolés (visible sur le détail de gauche de la Figure 9). Ensuite les Grilles ont été converties au format vectoriel. La table des attributs a ensuite été construite en croissant les valeurs RVB des couleurs avec leur signification. Chaque polygone est informé par le code original (Champ NOMS) qui consiste en un groupe de 1 à 5 lettres qui correspondent à des composantes (Cf. Tableau 2). Par exemple le code FBU indique une dominante de la composante F en association avec la composante B et U en moindre importance. Tableau 2 : Signification des lettres utilisées comme composante Composante Commentaire A Ananas B Bananeraies C Cannes à sucre D Marécages sales ou saumâtres E Friches anciennes après cultures avec repousse d´arbustes F Forêts humides généralement naturelle H Savanes ou Prairies pâturées en régions humides K Jardins Caraïbes P Palétuviers S Savanes ou Prairies pâturées en régions relativement sèches T Friches après cultures (pâturées ou non) U Cultures vivrières Y Broussailles de régions sèches Z Petites forêts sèches Les légendes originelles sont ainsi très complexes 311 codes différents pour la carte de 1969-70 et 199 codes différents pour celle de 1979-80. Une deuxième légende (champ « Légende », Tableau 3) simplifiée a été constituée pour l’analyse des cartes.

22

Tableau 3 : Légende simplifiée de l’usage des terres Code Légende

Légende Description

100 Ananas Ananas 200 Non végétation Autres (zones urbaines, routes, plages, carrières, non classé,...)

300 Bananeraies Bananeraies

400 Bananeraies

mixtes Bananeraies mixtes avec présence d´autres cultures (cannes à sucre, jardins caraïbes,...) ou de grands arbres isolés ou groupés

500 Broussailles sèches

Broussailles de régions sèches avec ou sans présence de grands arbres isolés ou groupés

600 Cannes à sucre Cannes à sucre

700 Cultures vivrières

Cultures vivrières avec ou sans présence de grands arbres isolés ou groupés

800 Cultures vivrières mixtes

Cultures vivrières avec présence d´autres cultures (cannes à sucre, jardins caraïbes,...)

900 Forêts humides Forêts humides généralement naturelles

1000 Forêts sèches Petites forêts sèches avec ou sans présence de grands arbres isolés ou groupés

1100 Friches Friches (pâturées ou non), avec ou sans présence d´autres cultures (cannes à sucre, jardins caraïbes,...)

1200 Jardins Caraïbes Jardins Caraïbes avec ou sans présence de grands arbres isolés ou groupés

1300 Maraîchages Production de fruits et légumes pour exportation (Aubergines, Tabac, ...)

1400 marécages mangroves

Marécages sales ou saumâtres, palétuviers

1500 Savanes humides

Savanes ou Prairies pâturées en régions humides avec ou sans présence de grands arbres isolés ou groupés

1600 Savanes humides mixtes

Savanes ou Prairies pâturées en régions humides avec présence d´autres cultures (cannes à sucre, jardins caraïbes,...)

1700 Savanes sèches Savanes ou Prairies pâturées en régions relativement sèches

1800 Savanes sèches arbustives

Savanes, ou Prairies pâturées en régions relativement sèches, avec ou sans présence soit de grands arbres isolés ou groupés, soit une association avec des petites forêts sèches, soit des broussailles

1900 Savanes sèches mixtes

Savanes, ou Prairies pâturées en régions relativement sèches, avec présence d´autres cultures (cannes à sucre, jardins caraïbes,...)

23

Résultats pour l´ensemble de la Martinique Les résultats pour les deux cartes sont donnés dans le tableau 4. Les résultats pas communes sont réunis dans l’annexe 1. Tableau 4 : Superficies occupées par les principaux usages en 1969/70 et 1979/80

Occupation Superficie 1969/70

Superficie 1979/80 Variation

ha % Ananas 1262 687 -46 Autres (zones urbaines, routes, plages, non classé,...) 4448 5224 17 Bananeraies 8934 9189 3 Bananeraies mixtes 2429 3393 40 Broussailles sèches 2563 2127 -17 Cannes à sucre 9079 5967 -34 Cultures vivrières 1374 1178 -14 Cultures vivrières mixtes 1850 1817 -2 Forêts humides 24551 24600 0 Forêts sèches 6010 5883 -2 Friches 7714 3578 -54 Jardins Caraïbes 4426 8212 86 Maraîchages 756 106 -86 marécages mangroves 855 2362 176 Savanes humides 10541 11558 10 Savanes humides mixtes 5090 6689 31 Savanes sèches 5361 7651 43 Savanes sèches arbustives 9089 8065 -11 Savanes sèches mixtes 1504 2192 46 Total 107835 110477 2 La surface totale s’établit à 107835 ha pour 1969/70 (Figure16a) et 110477 ha pour 1979/80 (Figure 16b). Ces valeurs sont proches de celle de 110000 ha rapporté comme étant la surface départementale par les statistiques officielles (Statistique Agricole Annuelle et Agreste). La différence est due principalement au tracé des contours de l’île, notamment en ce qui concerne les plages, les mangroves et les petits îlets. La différence est la plus importante pour la carte de 1969/70 et peut être attribuée à la faible superficie occupée par les mangroves, moins de 900 ha alors qu’elles représentent plus de 2300 ha en 1979/80. Lors de la superposition des deux cartes, 1771 ha de mangroves de la carte de 1979/80 ne correspondent à aucune catégorie sur celle de 1969/70.

24

1969/1970

1979/1980

Figure 16 : Cartes des usages des sols de la Martinique, situation en 1969/1970 et 1979/1980

25

Certains usages sont relativement stables en surface totale, c’est le cas des forêts qui représentent l’usage dominant avec environ 24600 ha de forêts humides et 5900 ha de forêts sèches (Figure 17). Les bananeraies demeurent également, relativement stables avec environ 9000 ha. D’autres usages varient beaucoup, ce peut être soit des variations réelles soit un artefact dû à des attributions dans une catégorie au détriment d’une autre. Cette dernière hypothèse est la plus probable pour les différentes catégories de savanes et celle da la friche, leur total est de 39299 ha et 39733 ha respectivement pour les cartes de 1969/70 et 1979/80, soit une variation d’environ 1%. Alors que ces catégories varient individuellement entre 11 et 54% en valeur absolue. Par contre les variations rencontrées pour la canne à sucre semblent plutôt liées à une véritable récession du secteur cannier. Les statistiques publiées par Agreste donnent une superficie cultivée en canne à sucre de 5520 ha en 1981 (proche de la valeur obtenue pour la carte de 1979/80) et de 3084 ha en 1989, illustrant le déclin de ce secteur entre 1970 et 1990.

Figure 17 : Carte de la variation des surfaces cultivées en 1970 et 1980 (Les zones où les usages sont inchangés entre 1970 et 1980 sont représentées en bleu. Les forêts sont en vert et les villes en noir).

26

2.4.1.b. Base de données-sols (avec carte couleur)

Situation du sujet La Martinique dispose depuis la fin des années 60 d'une carte des sols extrêmement détaillée, au 1/20.000 (Colmet-Daage et al., 1969) ainsi que d'un ensemble important de données sur les sols, accumulées depuis le début des années 60. En effet, plusieurs chercheurs en science du sol se sont succédés à la Martinique, travaillant dans les domaines de (1) la classification, la cartographie et les caractéristiques des sols (F. Colmet-Daage, J.F. Turenne), (2) l'évolution physique des sols sous culture (Y.M. Cabidoche, C. Hartmann) et (3) le bio-fonctionnement et la matière organique des sols (A. Albrecht, E. Blanchart, M. Brossard, J.L. Chotte, V. Eschenbrenner, C. Feller). Malheureusement, ces données sont encore mal exploitées et mal valorisées en raison d'une dispersion des données et de l'absence d'une numérisation de la carte des sols. Objectifs, résultats attendus Les principaux objectifs de cette action consistent à numériser la carte au 1/100.000 et d'inclure dans la base de données DONESOL un certain nombre de profils de sol provenant notamment des analyses effectuées par F. Colmet-Daage pour l'établissement de la carte des sols au 1/20.000. Programme de travail : hypothèses, méthodes, outils et protocoles Le travail a été réalisé à l'INRA Orléans (Infosol) qui dispose des outils et du savoir-faire nécessaires à la réalisation de ce travail, sous la responsabilité de D. Arrouays. Ce travail a d’abord été effectué par un CDD (embauché par l'IRD) qui avait déjà effectué à l'INRA une étude analogue et qui connaissait parfaitement les logiciels, il a ensuite été repris et entièrement finalisé par un technicien d’Infosol. Etapes d’avancement L'IRD a fourni à l'INRA les documents nécessaires à la réalisation de ce travail : cartes au 1/20 000, notices de description des profils pédologiques et de leurs analyses, carte de localisation des profils. L'INRA Infosol a mis en banque Donesol les profils pédologiques. Cette phase de transcription et de saisie a duré environ 3 mois. Elle a été suivie d’une phase de saisie de leurs coordonnées à la table à digitaliser, puis d’une saisie des contours cartographiques à 1/100 000. A l’issue de ce travail les différentes Unités Typologiques de Sol ont été répertoriées et décrites dans Donesol. La phase finale a comporté la description des Unités Cartographiques dans Donesol et l’édition d’une carte de synthèse. Description technique du travail réalisé

1. Numérisation de la carte des sols a. Digitalisation des contours de la carte

Documents utilisés : - carte des sols de la Martinique au 1/100 000ème dressée par F. Colmet-Daage (carte sur

papier cartonné – document original) ; - carte des sols au 1/20 000 de F. Colmet Daage (24 coupures); - Top 25 de l’IGN de Fort de France (4501MT), du Lamentin (4502MT), et du Marin

(4503MT) ;

27

- carte topographique au 1/100 000 de la Martinique issue de la BD topographique de l’IGN et imprimée sur fond stable transparent.

La première phase de digitalisation a d’abord consisté à identifier le système de projection de la carte des sols au 1/100 000ème non référencé sur les documents originaux. Par superposition avec le fond topographique de l’IGN à la même échelle, il ressort qu’il s’agit du système géodésique Fort-Desaix et de la projection Mercator Transverse Universel fuseau 20 Nord. Il a ensuite fallu redessiner les contours de la carte des sols sur un fond stable en superposant la carte des sols au 1/100 000ème avec le fond topographique. Ce travail délicat a permis de corriger notamment les déformations de la carte papier et d’ajuster précisément les contours de la carte des sols avec le fond topographique. A ce stade, la carte des sols au 1/20 000ème a permis de lever les ambiguïtés des limites des contours des unités de sol sur le document original graphiquement très chargé. Sept amorces du quadrillage UTM du fond topographique ont été reportées sur la nouvelle carte des sols pour servir de tic de calage à la future couverture numérique. La nouvelle carte des sols sur fond stable (61X69 cm) a été scannée par une société privée et rendue au format de fichier “ dxf ”. Pour simplifier, nous nommerons désormais ce fichier « couverture de la carte des sols ». Cette couverture à l’état “ brut de scan ” a ainsi pu être importée dans le logiciel Arc/info de ESRI. La dernière phase de la numérisation graphique se scinde en deux parties : D’une part la création de la topologie. Il a d’abord fallu corriger les polygones ouverts, les polygones artefacts, et les nœuds pendants. Cette opération se fait en partie automatiquement sous Arc/Info mais une correction manuelle s’impose en finale. La création de la topologie a permis d’attribuer un identifiant unique pour chaque polygone. D’autre part le géoréférencement. Grâce aux tics de calage, la couverture numérique a pu être géoréférencée dans le même système géodésique et la même projection que le fond topographique IGN. La carte numérisée des sols de la Martinique est présentée à la figure18.

28

Figure 18 : Carte des sols de la Martinique.

b. Attribution des labels (identifiant des polygones)

Documents utilisés : - carte des sols au 1/20 000 de Colmet Daage (24 coupures); - impressions sur calques de coupures au 1/20 000ème issus de la couverture numérique des

sols au 1/100 000ème. Ces calques correspondent à la série des 24 coupures de la carte des sols au 1/20 000ème ;

- impression sur film transparent d’une grille d’un pas de 1 ha à l’échelle du 1/20 000 éme (5mmx5mm) de la dimension d’une coupure de la carte des sols à la même échelle ;

- légende de la carte des sols au 1/20 000ème établie par Colmet-Daage

29

L’attribution des labels a pu se faire en trois phases : La première a consisté à identifier les plus petites unités de sol portées sur la carte au 1/20 000éme qui deviendront les futures unités typologiques de sols (US) de la couverture au 1/100 000ème. Ainsi, en superposant, sur les coupures de la carte des sols au 1/20 000ème, les polygones de la couverture au 1/100 000ème agrandie au 1/20 000ème (imprimés sur calques) et la grille, l’occurrence de chaque US a pu être identifiée au sein de chaque polygone sous forme d’une table. Cette table prévue pour faire le lien entre la base de donnée graphique et sémantique contient le numéro identifiant de tous les polygones, autant de colonne qu’il y a d’US, et l’occurrence de chaque US dans les polygones. Un numéro unique a été attribué à chaque polygone sur les calques de travail. Lors de la deuxième phase, devant la complexité et surtout la diversité des US rencontrées, il a fallu opérer à une simplification des US par agrégation en fonction des caractères dominants des unités décrites dans la notice du 1/20 000ème. Sur 303 US répertoriées sur les coupures au 1/20 000éme, 88 ont été sélectionnées pour leur intérêt pédologique et leur représentativité à une plus petite échelle. Nous verrons plus loin comment ces US sont décrites dans la base de donnée DONESOL2. L’objectif de la troisième phase fut simplement d’attribuer à chaque polygone de la couverture numérique, son numéro unique des calques de travail qui fait référence à la table d’occurrence des US. La fonction “ frequency ” d’Arc/info a permis d’identifier et de corriger les doublons en leur attribuant un nouveau numéro sur la couverture et dans la table nouvellement créée.

c. Digitalisation des profils

Documents utilisés : - Coupures originales de cartes topographiques au 1/20 000ème sur lesquelles figure

l’emplacement des profils de sols décrits et analysés par F. Colmet-Daage - Top 25 de l’IGN de Fort de France (4501MT), du Lamentin (4502MT), et du Marin

(4503MT) ; La question du choix de la méthode utilisée pour la création d’une couverture de points géoréférencés s’est posée. Afin de concilier efficacité et précision pour ce travail, il a été jugé préférable de mesurer directement sur les coupures originales les distances X et Y séparant les profils des croix du carroyage UTM en reportant leur coordonnées dans un fichier. Vu l’échelle utilisée (1/20 000ème) on peut raisonnablement admettre une tolérance d’une vingtaine de mètres (1mm sur la carte). Ce fichier a par la suite été importé dans Arc/info pour y générer une couverture de points géoréférencés dans le même système que la couverture des sols afin de pouvoir les croiser.

2. Mise sous forme de base de données sous Donesol2 a. Création des tables de donesol2

Documents utilisés : - légende de la carte des sols au 1/20 000ème établie par F. Colmet-Daage ; - légende de la carte des sols au 1/100 000ème établie par F. Colmet-Daage ; - Sélection de profils des Antilles avec rattachement à la classification de la carte des sols des

Antilles au 1/20 000 (4 volumes). Ces documents, rédigés par F. Colmet-Daage et J. & M. Gautheyrou en 1967 regroupent à la fois les descriptions des profils ouverts lors de la

30

réalisation de la carte des sols au 1/20 000ème et les analyses pédologiques effectuées sur les principaux horizons de sol.

Fichiers numériques utilisés : - couverture de la carte des sols au 1/100 000ème - couverture des profils de sols au 1/100 000ème - couverture de l’occupation du sol (fournie par l’IRD) - Modèle numérique de terrain à un pas de 50 m (généré à partir d’une couverture de courbes

de niveaux fournie par l’IRD) - Format type des tables de la base de données Donesol2 sous Access Tables Access à renseigner dans la base de données : - table du répertoire des organismes ayant participé à la réalisation de cette étude ; - table étude (données générales sur l’étude) ; - table des unités cartographiques de sols (grands types de sols appelés plus loin UC) ; - table des unités typologiques de sols (sous-ensembles issus des unités cartographiques

appelés plus loin UTS) ; - table des strates de l’UTS (données qualitatives ou descriptives et quantitatives ou issues

d’analyses des strates de l’UTS) ; - table d’affectation d’une strate à une UTS ; - table d’affectation d’une UTS à une US ; - table profil (description synthétique du Solum) ; - table horizon (données descriptives de chaque horizon pour tous les Solums) ; - table analyses (résultats des analyses physico-chimiques effectuées pour chaque horizon) ; - table d’affectation d’un profil à une étude ; Les tables access ont été renseignées uniquement à partir des documents papier et fichiers numériques mentionnés ci-dessus de la manière suivante : - Table organisme Dans cette table ont été rassemblées toutes les données utiles permettant d’identifier et de contacter les organismes concernés par cette étude, maître d’ouvrage et maître d’œuvre ainsi que leurs partenaires. Ils y sont classés par type : laboratoire d’analyse, bureau d’étude, organisme de recherche, organisme public etc. - Table étude La table étude mentionne les caractéristiques générales de la base de données sur les sols de la Martinique. Il y figure notamment l’échelle de la carte d’origine, l’année, le thème, l’état d’avancement, la superficie cartographiée, la zone cartographiée, la zone de représentativité (c'est-à-dire la zone située autour de l’étude dans laquelle on a de grande chance de rencontrer de manière dominante des sols semblables à ceux décrits dans l’étude), le nombre d’UC (14 pour la Martinique), le nombre de profils décrits par F. Colmet-Daage (654 mais seulement 375 correctement géoréférencés), le nombre de profils analysés (autant que de profils décrits mais seulement 357 d’exploitables dans Donnesol2), la nature du document (carte papier, notice, profils et Annexes), la disponibilité légale du document (selon les accords passés entre le ou les organismes propriétaires de l’étude et l’organisme gestionnaire de la base de données), le degré d’informatisation des données géométriques (limites de l’étude et des UC) et enfin le

31

degré d’informatisation des données sémantiques. Un champ optionnel permet d’ajouter d’éventuels commentaires sur l’étude. - Table des unités cartographiques de sol (UC) Les 14 UC de la carte des sols de la Martinique ont été renseignées par les principaux attributs suivants. Leur nom, leur superficie, le nombre d’UTS dans l’UC, la nature des liaisons spatiales entre les UTS dans l’UC, le relief général de l’UC, son domaine morphologique, son type de surface à l’échelle hectométrique, le type de paysage agricole dominant dans lequel se situe l’UC, son altitude minimale et maximale et enfin, un dernier champ est réservé à d’éventuels commentaires généraux sur l’UC. - Table des unités typologiques de sol (UTS) 303 unités de sols ont été recensées sur la carte des sols au 1/20 000ème. Beaucoup d’entre elles ont des caractères très proches, qui à l’échelle du 1/100 000ème nous ont permis de les regrouper en 88 unités typologiques de sols. Leur nom reprend généralement celui de l’UC auquel s’ajoute des caractéristiques propres faisant référence à des propriétés physique (ex : vertisols profonds hydromorphes) ou chimiques (ex : Vitrisols humifères peu acides). Cette table a surtout pu être renseignée grâce aux analyses et descriptions de profils ouverts par F. Colmet-Daage. Il a d’abord fallu sélectionner les profils les plus représentatifs d’une UTS. Généralement plusieurs profils ont permis d’établir les valeurs modales, minimales et maximales de nombreux attributs, dont voici la liste exhaustive : - nom de l’UC ; - nom de l’UTS sur la carte; - nom de l’UTS dans le CPCS ; - organisation géologique du profil ; - profondeur minimale, modale et maximale d’apparition de la couche M, R ou D ; - nom du ou des matériaux géologiques ou roche mère ; - classe du matériau mère ; - étage géologiques du (ou des) matériaux mère (1 à 3 matériaux possibles) ; - profondeur d’apparition du ou des matériaux mère (1 à 3) ; - pierrosité totale exprimée en % ; - nom des éléments grossiers principaux et secondaire; - taille des éléments grossiers principaux secondaires ; - acidité des éléments grossiers principaux secondaires ; - forme dominante des éléments grossiers principaux secondaires ; - origine de la différenciation de l’UTS en strates (4 niveaux possibles) ; - texture dominante de la fraction fine ; - deuxième texture dominante du solum dans le cas où il se distingue par sa variation de

texture ; - type de charge en éléments grossiers ; - deuxième type de charge en éléments grossiers du solum dans le cas où il se distingue par

une variation de sa charge en éléments grossiers ; - intensité de l’effervescence ; - degré de salinité de l’UTS ; - couleur d’ensemble du sol ; - deuxième couleur du solum dans le cas où il se distingue par une variation de couleur ; - degré de structuration du sol ;

32

- second degré de structuration du solum dans le cas où il se distingue par une variation de son degré de structuration ;

- compacité d’ensemble du sol ; - deuxième niveau de compacité du solum dans le cas où il se distingue par une variation de

ce caractère ; - perméabilité d’ensemble du sol ; - deuxième niveau de perméabilité du solum dans le cas où il se distingue par une variation de

ce caractère ; - régime hydrique ; - régime de submersion ; - forme d’excès d’eau ; - origine de l’excès d’eau ; - profondeur du niveau maximum supposé de la nappe ; - profondeur moyenne d’apparition de l’horizon rédoxique ; - profondeur moyenne d’apparition de l’horizon réductique temporaire ; - profondeur moyenne d’apparition de l’horizon réductique permanent ; - profondeur moyenne d’apparition de l’horizon tourbeux ; - classe de drainage naturel de l’eau au sein du sol ; - type d’humus ; - type de discontinuité majeure ; - profondeur minimale d’apparition de la discontinuité majeure ; - profondeur modale d’apparition de la discontinuité majeure ; - profondeur maximale d’apparition de la discontinuité majeure ; - conséquence de la discontinuité majeure au plan agricole ; - type de stratification choisi par le pédologue pour la description des solums ; - degré général de la complexité de l’organisation des strates au sein de l’UTS ; - nom de la classification de référence utilisée pour désigner les strates ; - commentaires sur l’UTS. - Table des strates d’une UTS Cette table recense les variables qualitatives et quantitatives de chaque strate ou horizon diagnostic au sein de chaque UTS. Lorsque la quantité de profils décrits le permet, on définit pour les variables qualitatives un mode principal, secondaire et mineur et pour les variables quantitatives une valeur minimale, modale et maximale. Les variables qualitatives sont principalement : - la couleur - la régularité de la limite inférieure ; - la taille du sable ; - la classe texturale dans le diagramme triangulaire de l’Aisne ; - le nom des éléments grossiers ; - l’effervescence ; - la salure ; - la structure ; - les revêtements ; - les taches ; - la pénétration racinaire ; - l’abondance de la matière organique ; - les caractéristiques mécaniques.

33

Les principales variables quantitatives décrites sont : - l’épaisseur de la limite inférieure - la granulométrie - l’abondance des éléments grossiers ; - la taille de la structure principale ; - la largeur des fentes de retraits ; - le taux de MO ; - le calcaire total et actif ; - le PH ; - les bases échangeables ; - les éléments libres ; - les éléments majeurs totaux ; - la salinité. - Table d’affectation d’une UTS à une UC Outre le fait de relier une UTS à une UC, cette table permet également de décrire grâce à une série de variables les types relation existant entre l’UTS et l’UC. Il est également à noter que certaines UTS peuvent appartenir à plusieurs UC. Des fonctions d’analyse spatiale d’Arc/Info ont été utilisées pour renseigner des variables comme le pourcentage d’une UTS au sein d’une UC, la répétitivité des UTS, leur localisation, leur mode de distribution, leur échelle d’individualisation dans l’UC, leur contiguïté. D’autres variables n’ont pu qu’être estimées après une observation détaillée des cartons au 1/20.000ème. Il s’agit principalement de la netteté des limites entre deux UTS contiguës, des facteurs du milieu responsables de leur différenciation, du type de forme géomorphologique, de l’aspect de la surface de l’UTS (pierrosité, fentes de retraits) et des contraintes agronomiques principales. Les variables relatant la valeur des pentes pour une UTS donnée (maximale, moyenne et minimale) ainsi que son orientation dominante ont été calculées grâce au modèle numérique de terrain lui-même issu d’une couverture de lignes isohypses. L’occupation du sol par UTS a été obtenue par croisement d’une couverture d’occupation des sols de la Martinique à l’échelle du 1/100.000ème fournie par l’IRD avec celle de notre carte des sols à la même échelle. Un dernier champ “ commentaires ” permet éventuellement d’éclaircir la nature de la relation UTS/UC. - Table des profils Sur les 654 profils décrits et analysés, seuls 375 ont pu être correctement géoréférencés et 357 saisis dans la base de données. Cela tient surtout à la qualité des analyses et à la représentativité des profils considérés. La liste des variables décrites étant conséquente, nous ne citerons ici que les grandes familles de variables, notamment celles ayant trait à :

- la localisation géographique ; - le climat ; - la situation générale ; - l’organisation géologique du profil ; - la différenciation du profil en horizons ; - les caractéristiques hydriques ;

34

- le nom du sol et le type de profil. - Table des horizons A chaque profil sont associés un ou plusieurs horizons. Ils sont décrits dans cette table par une série de variables que l’on peut regrouper dans les catégories suivantes : - situation dans le solum ; - éléments grossiers ; - effervescence et salure ; - structure ; - revêtements ; - faces ; - taches ; - racines ; - matière organique ; - fentes ; - pores ; - cristaux ; - ciments ; - nodules ; - caractéristiques mécaniques ; - types d’horizons. Un champ commentaires sur l’horizon permet d’ajouter les remarques utiles de descriptions faites par F. Colmet-Daage. - Table des analyses Une analyse est, dans le cas de cette carte, toujours reliée à un seul horizon. La base de données sur les sols de la Martinique en compte 869 qui sont décrites par 82 attributs faisant référence à des analyses chimiques ou physiques ainsi qu’à leur mode de préparation. A titre d’exemple, citons simplement :

- la méthode de dosage du carbone ; - la teneur en carbone organique ; - pH- eau et KCl ; - les différentes formes d’azote ; - les bases échangeables ; - les éléments libres ; - les éléments majeurs totaux ; - l’humidité à différents pF.

Enfin, des tables non détaillées ici comme celle “ d’affectation d’une strate à une UTS ” et celle “ d’affection d’un profil à une étude ” permettent de gérer le lien relationnel entre les différentes tables décrites précédemment. Conclusions : résultats attendus pour les scientifiques et les gestionnaires A l’issue du travail la base de données géoréférencées (SIG) et la carte numérisée est maintenant répartie en différents lieux : - base DONESOL à l'INRA-Orléans

35

- base Valpédo à l'IRD Montpellier -La base DONESOL est copiée au Pôle de Recherches Agronomique de Martinique ainsi que dans les implantations IRD de Martinique et de Piracicaba. les deux SIG Martinique pourront à terme utiliser ces données (SIGMA des services de l'état et SIGMA du Conseil Général de la Martinique). Dans le cadre de ce présent programme, la base est utilisée :

- Au niveau des profils de sol, afin de permettre l’estimation des stocks de C en fonction des sols et des occupations [d(b)],

- Comme support de spatialisation pour la modélisation de bilans de C régionaux [d(c)].

2.4.2. Estimation des stocks de C L’estimation des stocks de carbone des sols de la Martinique est faite en combinant les cartes d’usages, des sols et une base de donnée spécifique. 2.4.3.a. Base de données « carbone » Une base de données spécifique à l’estimation des stocks de C à été organisée. Cette base regroupe les informations géoréférencées issues de la base DONESOL, des travaux de la thèse de C. Venkatapen (détaille dans la partie 2.1 de ce rapport), et d’un important travail de recherche et valorisation des données disponible dans la littérature. Au total des stocks de C on été calculés pour 855 profils (Figure 19) qui sont identifiés par un type de sol et un type d’utilisation et une indication souvent de la teneur en argile moyenne.

Figure 19 : localisation des profils utilisés pour le calcul des stocks de C. Les clouleurs correspondent à l’origine des données : En noir C. Venkatapen, en bleu la littérature, en rouge base Donesol, et en vert autres profils de Colmet-Daage (1970).

36

2.4.3.b. Composante spatiale des sols La carte présentée précédemment à été simplifié à 10 principaux type de sols, plus deux classes qui correspondent respectivement aux zones non cartographiées et aux zones urbanisées (Figure 20).

Figure 20 : Carte des sols simplifiée. 2.4.3.c. Stocks de C par type de sol Les stocks ont été calculés pour les profondeurs 0-10cm, 0-30 cm et 0-100 cm en fonctions des données disponibles. Afin de parvenir à une évaluation des stocks, de nombreuse données manquantes ont du être estimées. L’évaluation de la densité apparente (DA) a été réalisée par utilisation de moyennes par type de sol. Dans le cas spécifique des données rapportés par

37

Colmet Daage certains horizons ne disposent que d’une valeur de matière organique (MO). Il a été vérifié (Figure 21) à partir des horizons renseignés à la fois par la teneur en C et en matière organique que le rapport OM/ C est proche, et non statistiquement différente de 1,724 (coefficient de Van Bemmelen) qui a été ainsi utilisé.

0

20

40

60

80

100

120

1,5 1,55 1,6 1,65 1,7 1,75 1,8 1,85 1,9 1,95 2 ouplus...

Fréquence

y = 1,7164xR2 = 0,999

0,020,040,060,080,0

100,0120,0

0 20 40 60C‰

MO‰

0

20

40

60

80

100

120

1,5 1,55 1,6 1,65 1,7 1,75 1,8 1,85 1,9 1,95 2 ouplus...

Fréquence

y = 1,7164xR2 = 0,999

0,020,040,060,080,0

100,0120,0

0 20 40 60C‰

MO‰

Figure 21 : Fréquence des rapports OM/C observés et en encart graphique des teneurs de MO en fonction de celle de C. Les stocks de C moyen par type de sol ont été calculés (Tableau 5). On constate que comme c’est souvent le cas, plus la profondeur augmente moins de données sont disponibles. Dans les bases de données anciennes, de nombreux profils présentent des données manquantes pour certains horizons ou certaines couches. Il peut-être utile de disposer d´outils pour valoriser ces données incomplètes. Actuellement trois types d´approches existent. La plus simple est d´utiliser un rapport calculé sur des profils complets pour estimer les stocks pour des profils incomplets pour des profondeurs supérieures selon l´équation suivante : C (0-100 cm) du profil N = R / C (0-30 cm) du profil N, où R =(C (0-100cm) des profils complets / C (0-30cm) des profils complets). Une deuxième approche consiste à développer des modèles simplifiés de distribution verticale faisant intervenir un nombre réduit de paramètres et pouvant être ajustés aux données disponibles. La dernière approche, mais aussi la plus compliquée, est basée sur l´utilisation de modèles mécanistes qui combine des effets de diffusion verticale et de minéralisation. Pour l’instant nous avons évalué les données manquantes en utilisant un rapport déterminé par type de sol. Quoi qu’il en soit les résultats obtenus avec les résultats estimés sont toujours comparés avec les résultats issus des seules valeurs calculables directement.

38

Tableau 5 : Statistiques (moyen, ecart-type, minimum, maximum et médaine) par type de sols pour les stocks des couches 0-10 cm, 0-30 cm et 0-100 cm, et les teneurs moyennes en argiles du profil. Type de sol1

n Moy. Ecart Type

Min Max Médiane

n Moy. Ecart Type

Min Max Médiane

0-10 cm 0-100 cm S1 86 28,2 11,2 7,5 72,3 27,0 11 91,3 54,8 36,8 242,4 81,4 S2 42 29,0 15,8 9,9 94,0 24,5 18 176,4 62,9 81,9 306,8 162,0 S3 131 20,8 5,7 4,2 41,5 19,6 49 99,5 24,3 56,7 161,7 93,8 S4 26 18,9 8,0 12,4 51,6 17,4 9 79,2 20,9 49,2 113,8 79,0 S6 43 19,6 10,4 4,0 63,3 17,4 15 121,4 38,0 53,3 215,9 128,9 S7 59 18,0 11,4 3,7 62,3 15,0 25 70,7 27,0 30,7 126,0 72,0 S8 56 23,1 8,7 7,3 47,3 21,7 14 106,9 28,4 71,2 171,0 100,9 S9 211 21,7 10,4 4,3 60,0 17,9 26 114,1 48,3 56,9 258,1 104,9 S10 19 22,7 11,1 11,9 58,7 19,8 8 107,7 37,3 62,5 181,9 96,3 S12 165 26,4 13,7 6,2 71,0 21,0 28 89,6 30,0 36,5 172,1 84,2 tous 838 23,2 11,4 3,7 94,0 19,9 203 104,4 45,2 30,7 306,8 97,5 0-30 cm Teneur en Argile S1 64 73,6 26,3 22,5 160,2 73,8 20 16,9 16,2 3,5 77,0 11,9 S2 39 74,3 33,2 21,0 172,7 65,7 14 23,5 7,1 10,1 41,0 22,6 S3 109 55,7 14,8 18,7 93,5 54,5 126 56,4 9,6 21,0 75,5 56,4 S4 24 50,4 26,3 28,4 154,9 42,3 24 57,5 10,3 33,3 74,7 59,9 S6 33 55,1 23,3 21,4 137,3 50,5 37 46,2 17,4 13,4 77,6 51,0 S7 49 42,4 21,8 11,2 93,4 38,4 55 16,1 10,7 4,0 53,4 13,0 S8 40 59,8 19,4 21,9 117,9 60,2 51 54,0 11,3 24,0 75,3 56,0 S9 118 53,1 23,1 12,5 179,9 47,6 208 50,6 12,6 15,1 81,3 51,1 S10 14 53,1 12,9 35,7 78,6 50,8 16 47,7 12,5 25,0 66,7 48,0 S12 58 48,2 14,7 17,0 82,0 46,3 164 43,4 14,2 7,0 62,7 46,3 Tous 548 56,5 23,6 11,2 179,9 52,7 715 46,0 17,1 3,5 81,3 50,0 1Types de sols : S1 = Andosols sur cendres, S2 = Andosols sur tuf, S3 = Ferrisols, S4 = Intergrades Ferrisols-Sols rouges, S6 = Sols à alluvions, S7 Sols jeunes, S8 = Sols rouges à montmorillonites, S9 = Vertisols, S10 = Sol vertiques, S12 = Sols brun-rouille à halloysite.

2.4.3.d. Cartes des stocks de C. Plusieurs cartes des stocks de C ont été produites soit selon une approche cartographique soit selon une approche géostatistique. Dans l’approche cartographique une matrice des stocks de C par type d’usage et par type de sol permet d’obtenir les stocks de C pour les situations qui correspondent à la carte des usages de 1969/70 et de 1979/80. Pour chaque profondeur une matrice a ainsi été déterminée, la matrice correspondant à la couche 0-30 est donnée à titre d’exemple dans le Tableau 6. Les valeurs qui sont en gras sont celles qui ont été directement calculées à partir de la base de données, les autres sont issus de décisions basées sur le choix le plus logiques en fonction de la situation : moyenne pour le type de sol ou d’usage, valeur d’un type de sol ou d’usage similaire. Ces matrices sont ensuite combinées à la composante spatiale pour obtenir une carte des stocks de C.

39

Tableau 6 : Matrice des valeurs des stock de C pour la couche 0-30 cm.

Andosols sur

cendres

Andosols sur tuf

Ferrisols Intergrades Ferrisols-

Sols rouges

non cartographié

Sols à alluvions

Sols jeunes

Sols rouges à montmorillonite

Vertisols Sols vertiques

Sols brun-

rouilles à halloysite

Zone urbaine

Ananas 72,4 60,2 36,9 a 60,5 36,9 36,9 36,9 a a 36,9 - Bananeraies 66,1 57,1 58,5 60,5 53,9 49,5 43,6 54,0 33,9 44,4 42,9 - Bananeraies mixtes 69,2 57,1 58,6 53,3 57,6 49,5 43,6 45,8 33,9 41,1 42,9 - Broussailles sèches a a a 49,5 49,5 49,5 49,5 49,5 49,5 49,5 49,5 - Cannes à sucre 51,3 56,5 53,6 47,2 54,5 53,6 46,2 67,4 61,1 56,7 44,3 - Cultures vivrières 45,6 43,5 52,7 52,7 41,9 37,7 34,8 25,5 40,4 44,6 57,8 - Cultures vivrières mixtes 56,4 43,5 35,0 35,0 46,1 37,7 92,9 25,5 40,4 44,6 44,1 - Forêts humides 72,4 109,7 48,9 48,9 84,3 84,3 53,8 84,3 103,9 60,5 62,8 - Forêts sèches a a 81,5 81,5 81,5 81,5 81,5 81,5 84,3 81,5 72,9 - Friches 119,0 83,2 51,3 35,0 56,7 54,7 56,7 65,1 41,3 56,7 57,9 - Jardins Caraïbes 73,3 73,3 57,9 37,2 54,8 54,8 35,9 62,3 56,4 56,9 20,0 - Maraichages 60,0 60,0 44,3 44,3 43,4 42,8 28,9 32,6 46,9 46,9 47,6 - Savanes humides 77,4 88,9 56,2 68,9 62,6 76,8 73,7 73,7 57,6 57,6 64,4 - Savanes humides mixtes 84,7 58,9 42,8 68,9 46,2 76,8 62,6 62,6 57,6 57,6 65,1 - Savanes sèches a a 40,8 42,8 39,7 37,4 46,2 46,2 44,7 44,7 41,5 - Savanes sèches arbustives a a 40,8 42,8 41,5 56,8 39,7 39,7 37,8 37,8 41,5 - Savanes sèches mixtes a a 40,8 42,8 63,9 47,1 37,2 41,5 41,2 41,2 41,5 - marécages mangroves nd nd nd nd nd nd nd nd nd nd nd - Autres (zones urbaines...) - - - - - - - - - - - - a = catégorie inexistante sur les cartes, nd = valeur non déterminée. Les stocks de C calculés à l’échelle de la Martinique pour les différentes couches considérées et selon les cartes d’usage sont résumés dans le Tableau 7. Le pourcentage de la surface concernée par le calcul de chaque stock calculé est également informé. La différence par rapport à 100% (107 744 ha) correspond aux zones sans données disponibles mais surtout aux zones urbanisées (environ 4000 ha soit 3,7%) Tableau 7 : stocks de C pour les différentes couches considérées et selon les jeux de données utilisés

1969/70 1979/80 Couche Données Stock

Mt C Surface

% Stock Mt C

Surface %

0-10 cm a 2,568 94,0 2,536 94,0 0-30cm a 6,281 94,0 6,259 93,9 b 6,390 94,0 6,379 94,0 0-100cm a 11,730 94,0 11,548 93,9 b 12,062 94,0 11,996 93,9

a = Données brutes uniquement, b utilisation de données estimées (voir partie 2.4.3.c). L’erreur associée à ces stocks, basée sur les écart-types des statistiques présentées dans le Tableau 5, est de l’ordre de 40%. Il n’est pas donc possible de conclure que les baisses

40

observées entre les deux périodes sont uniquement le reflet d’un processus de déstockage du carbone. Toutefois, si on considère les surface qui n’ont pas changées d’usage entre 1970 et 1980 (Voir Figure 17), le stock correspondant est de 6,729 Mt C soit environ 57% du total. La partie qui a évolué est passée, pour la couche 0-100 cm, de 4,786 MtC à 4,592 MtC, soit une baisse de 4%. On constate que pour vérifier si cette baisse est réelle il faudrait obtenir des stocks de C régionaux avec une erreur de plus de 10 fois moindre que l’actuelle. La Figure 22 illustre la répartition spatiale de ces stocks pour une situation qui moyenne les deux dates : 11,859 Mt de C calculée pour 95,8% de la surface.

Figure 22 : Stock de carbone pour une situation moyenne 1970-1980. Il est intéressant de replacer ce calcul par rapport aux calculs fait au niveau global. En utilisant la carte des sols de la FAO et les stocks moyens calculés par Batjes (1996), il est

41

possible de calculer un stock mondial de 1589 milliards de tonnes. Pour la Martinique le stock est de 15 Mt C pour une surface de 1185 km2. On constate que les superficies sont exagérées pour les petites îles à cause de l´échelle de la carte : 1/5 000 000. Si on ramène ce calcul proportionnellement à la surface de 1077,4 km2, et en considérant seulement 94% de la surface, ce stock serait de 12,8 MtC. Notre calcul est donc du même ordre de grandeur, mais évidement plus précis et surtout gagne en précision quant à la distribution spatiale de ces stocks. Pour améliorer le calcul des stocks, il faudrait également prendre en compte les surfaces réelles, et non pas les surfaces projetées. Une première correction a été faite en utilisant un modèle numérique de terrain (MNT) disponible. Le MNT utilisé est celui proposé par la NASA (http://www2.jpl.nasa.gov/srtm/index.html): Shuttle Radar Topography Mission (SRTM). Le SRTM a une taille de pixel d’environ 90m.

Figure 23. MNT dérivé du SRTM pour la Martinique. A partir de ce MNT il a été calculé le facteur de correction (rapport entre la surface réelle et la surface projetée) par hectare. Ce facteur de correction varie de 1 à 2,13 avec une médiane à 1,316. Toutefois la distribution de ce facteur est log-normale et l’on constate que 38% de la superficie à un facteur inférieur ou égal à 1,010 (1%) et que seule 24% de la surface présente un facteur supérieur à 1,050 (5%). Le stock corrigé pour la couche 0-100 cm est augmenté de seulement 0,467 MtC. Vu la densité de point de mesure relativement importante, il est possible d’envisager une approche par interpolation. De nombreuses interpolations ont été menées en fonction du mode de krigeage choisi, en conclusion toutes les technique de krigeage testé (ordinaire, universel…) fournissent des résultats similaires. La Figure 24 montre les stocks de C pour la couche 0-30 cm obtenus par krigeage universel avec dérive linéaire et un variogramme de type sphérique, comparé à la carte des stocks obtenus selon l’approche cartographique.

42

Stock de Carbone(0-30 cm / t C/ha)Stock de Carbone(0-30 cm / t C/ha)

Figure 24. Stocks de C pour la couche 0-30 cm obtenus par krigeage (à gauche) et basés sur les cartes (à droite).

2.4.3. Modélisation Une approche exploratoire a été menée pour déterminer si le modèle mécaniste Morgane peut être appliqué aux situations de la Martinique. Actuellement aucun résultat concret ne peut être présenté. Cette phase de modélisation intervient en aval des autres étapes, et sera traitée dans la thèse de Corinne Venkatapen qui est en court.

2.5. Approche économique du C séquestré

2.5.1. Le contexte institutionnel

Rappelons pour mémoire la chronologie et le cadre des accords internationaux pour la lutte contre les changements climatiques élaborés par les états de la planète depuis 15 ans. La Convention Cadre des Nations Unies sur le Changement Climatique a été adoptée en mai 1992 et est entrée en vigueur en mars 1994 après avoir été ratifiée par 50 États ; elle imposait à tous ses signataires de mettre en place des programmes nationaux de réduction des émissions de gaz à effet de serre et de présenter des rapports périodiques sur leurs résultats. En outre, 38 pays industrialisés signataires appelés « pays de l’Annexe I » (les pays de l’OCDE sauf le Mexique et la Corée, et les pays dits en transition) devaient avant l'an 2000 stabiliser leurs émissions de gaz à effet de serre aux niveaux de 1990, contrairement aux pays en voie de développement, non contraints. Toutefois, devant l’inanité des mesures permettant de respecter leurs engagements contractés initialement dans le cadre de la CCNUCC, les gouvernements de 180 États ont franchi une nouvelle étape le 11 décembre 1997 en adoptant à Kyoto un protocole à cette convention. Les pays de l’Annexe I se sont engagés par le Protocole de Kyoto à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre en moyenne de 5,2% par rapport au niveau de 1990, entre 2008 et 2012. Pour cela, des quotas d’émissions autorisées (qui figurent dans l’Annexe B du Protocole) ont été

43

attribués à chaque pays de l’Annexe I (engagements chiffrés de stabilisation ou de réduction des émissions). Les pays de l’Annexe 1 seraient juridiquement contraints par leurs engagements dès que i) 55 pays au moins auraient ratifié le protocole ii) parmi ces pays, ceux concernés par l’annexe B du Protocole cumuleraient 55 % du niveau des émissions atteint en 90 par tous les pays de l’annexe B L’entrée en vigueur du traité est désormais prévue le 16 février 2005 puisque d’une part 128 États l’ont ratifié et que la ratification par la Russie intervenue le 18 novembre 2004 permet que la deuxième condition soit remplie : ce pays étant responsable de 17,4% des émissions des pays de l’Annexe B qui viennent s’ajouter aux 44,2% des autres pays de l’Annexe B ayant antérieurement ratifié le Protocole, la mise en œuvre des engagements pris à Kyoto est donc devenue possible en l’absence de la participation remarquée des États-Unis (responsables de 36,1% des émissions des pays de l’Annexe B, ils ont cependant décidé le 28 mars 2001 de ne pas ratifier le Protocole de Kyoto)

2.5.2. L’estimation des coûts en Martinique

2.5.2.a La méthode employée Les pays qui se sont engagés dans le cadre du Protocole de Kyoto à réduire leurs émissions de GES privilégieront probablement des politiques dont les coûts ne dépassent pas les avantages (réduction des émissions brutes, puits de carbone). Cette démarche, appelée analyse coûts-avantages (ACA), est une transposition à l’économie publique des règles de choix des projets d’investissements privés, et nécessite de comparer coûts sociaux et avantages sociaux de la dépollution. Il faut donc recenser tous les effets d’un projet sur le bien-être, positifs et négatifs, et les estimer monétairement. Concernant la séquestration du carbone par les activités agricoles en Martinique, l’ACA permettrait donc d’estimer la valeur de la tonne de carbone séquestré. Toutefois, l’évaluation marchande (au prix du marché) des dommages sociaux évités pose problème : elle se heurte d’une part à des incertitudes scientifiques sur les phénomènes de changement climatique, d’autre part à des problèmes d’estimation monétaire des coûts et des avantages non marchands qui constituent la plus grande part des effets de la stratégie de réduction des émissions (par exemple, détérioration des écosystèmes, disparition de territoires, déplacements de populations…). D’autre part, du fait de la longue durée de vie des gaz à effet de serre dans l’atmosphère ("polluants stocks"), les effets d’une stratégie de séquestration ne se feront sentir qu’après des décennies ; l’estimation de la valeur de ces avantages pour les générations futures repose sur un calcul intertemporel qui nécessite le choix, délicat, d’un taux d’actualisation. Enfin, recenser les avantages de manière exhaustive pour toutes les parties concernées, à l’échelle de la Martinique, de la région Caraïbe et au-delà s’avère très difficile. Pour toutes ces raisons le recours à une analyse coûts-efficacité (ACE) peut être justifié : forme d’évaluation économique qui tente d’identifier le moyen le plus économe et le plus efficace pour atteindre un objectif préétabli, elle ne comporte pas d’évaluation monétaire des avantages issus de la réalisation de l’objectif, à la différence de l’analyse coûts-avantages. Ce dernier est posé comme acquis ex-ante, par exemple du fait d’un engagement public existant (niveau de réduction des émissions dans le cadre du Protocole de Kyoto) ; l’analyse consiste alors à trouver le moyen de l’atteindre à moindre coût, les coûts représentant les dépenses privées (agriculteurs exploitants) et publiques (montant des subventions, coûts des contrôles) engagées pour des changements d’orientation culturale ou d’itinéraire technique. La démarche pratique consiste à "minimiser" le coût total des mesures permettant d’atteindre

44

l’objectif préétabli, et d’en déduire la valeur du carbone ou coût marginal du stockage (coût nécessaire pour absorber une tonne supplémentaire de carbone dans les sols agricoles)

carbonedeStockssociauxCoûts

marginalCoût ∆∆

=

Deux méthodes peuvent être mobilisées pour estimer la valeur du carbone : les "modèles énergétiques" s’en tiennent à l’optimisation du coût marginal pour le secteur étudié, ici un coût brut ou direct pour l’agriculture, alors que les "modèles d’équilibre général" permettent d’estimer un coût macroéconomique (coût marginal des ressources de l’ensemble de l’économie qui doivent être engagées pour diminuer les émissions d’une tonne de carbone supplémentaire). C’est cette dernière approche qu’il conviendrait de conduire pour estimer la valeur du carbone en Martinique, mais compte tenu de la faiblesse des outils de modélisation économique disponibles et de l’insuffisance des données pré-existantes, la première méthode a été retenue dans le cadre du programme GESSOL ; dans un premier temps, seuls les coûts bruts pour le secteur agricole ont pu être estimés dans le cas de deux "situations séquestrantes".

2.5.2.b Résultats concernant un exemple de changement d’usage et un changement d’itinéraire technique

Un changement d’usage des terres et un changement d’itinéraire technique ont été choisis, leur coût direct privé (supporté par l’agriculteur exploitant) a été calculé puis mis en relation avec les variations de stocks de carbone induites. Dans le sud-est de la Martinique, la création d’un périmètre irrigué entre 1979 et 1988 a permis le développement, sur vertisols, de cultures maraîchères et de prairies irriguées (ou non) et pâturées par les petits ruminants. Ce sont donc ces deux orientations culturales qui ont été comparées en raison de leur intérêt économique et social (faible taux de couverture de la demande par la production locale, activités traditionnelles bénéficiant d’un certain savoir-faire, etc.) Le premier calcul a porté sur la conversion des cultures maraîchères en prairies pâturées dont on sait (Chevalier, 1999) qu’elle accroît le stockage du carbone d’environ 1,2 tonne de carbone par hectare et par an. Trois systèmes types de production maraîchère et deux systèmes d’élevage de petits ruminants ont été identifiés à l’issue d’un travail d’enquêtes mené auprès des agriculteurs exploitants de trois communes (Le Marin, Le Vauclin, Sainte-Anne) : les systèmes de production maraîchères sont les ‘cultures maraîchères pour le marché local’ (système 1), les ‘melons d’exportation’et la ‘production de laitues’, les deux types d’éleveurs retenus étant l’‘élevage sur prairie naturelle’ et l’‘élevage sur prairie plantée’ La méthode comptable a permis d’estimer les coûts directs de la conversion de chacun des trois systèmes maraîchers à l’élevage, à l’échelle de l’exploitation agricole. Ces coûts s’obtiennent en additionnant le coût d’ajustement (différence de coût de production = ∆CP) et le coût d’opportunité (coût monétaire par hectare ‘du renoncement au chiffre d’affaire’ obtenu dans le système antérieur =-∆CA). Pour représenter dans les modèles la diversité des formes juridiques d’exploitation agricole, le coût de la main d’œuvre, estimé au niveau du SMIC, englobe la main d’œuvre familiale et les salariés agricoles.

45

Coût direct ou brut pour l’exploitant en euros par hectare

Changement d’usage

Coût d’ajustement

CAJ = ∆CP

Coût d’opportunité ‘monétaire’

COM = -∆CA

Coût direct de conversion CC = CAJ + COM=-∆R

Prairie naturelle avec antécédent

"maraîchage système 1"

-10636 à

- 14427

8585* à

15177

+4541 à

-5842

Prairie plantée avec antécédent

"maraîchage système 1"

-7518 à

-11922

5662 à

12262

+4204 à

-6260

Prairie naturelle avec antécédent "melon"

-13831 à

-14157

12948 à

13102

-730 à

-1210

Prairie plantée avec antécédent "melon"

-11253 à

-11652

10025 à

10187

-1067 à

-1628

Prairie naturelle avec antécédent "laitue"

-22478 à

-22804

4279 à

42945

+19987 à

+20467

Prairie plantée avec antécédent "laitue"

-19900 à

-20299

39868 à

40030

+19569 à

+20130 * Un coût d’opportunité de +8585 euros correspond en réalité à une baisse du produit d’activité par hectare (rendement) de 8585 euros entre l’activité maraîchage et l’activité élevage. Il en découle que le passage de l’activité "melon d’exportation" à l’élevage de petit ruminant permet d’économiser de 730 à 1628 euros par hectare (coût négatif), soit si l’on se ramène au coût évité par tonne de carbone, une fourchette de 608 à 1357 euros économisés par hectare. En revanche, passer des autres activités maraîchères destinées au marché local à l’élevage n’est pas forcément rentable, avec un désavantage certain pour l’abandon du système 3 (laitue) : le passage de la laitue à l’élevage entraîne un coût annuel supplémentaire pour l’exploitant d’environ 16700 euros en moyenne par tonne de C stocké. La méthode comptable a aussi permis d’estimer les coûts directs pour l’exploitant de la conversion du labour conventionnel (LC) au travail simplifié (TS), compte tenu des changements technico-économiques engendrés :

Changements Technico-économiques LABOUR

CONVENTIONNEL TRAVAIL

SIMPLIFIE OUTILS 1 Sous-soleuse

2 Charrues à socs 3 Pulvériseurs

ROTOBECHE Billonneuse

TRACTEUR Puissance conseillée

90 chevaux

55 chevaux

Productivité horaire de l’outil : temps 162 heures 90 heures

46

d’utilisation par hectare et par an Consommation de carburant (l/ha) 55 37

COUTS EN EUROS Coûts des investissements matériels : Tracteur Outils

39000 19550

27000 12400

TOTAL 58550 39400 Charges d’amortissement et charges financières (en € par ha), pour une exploitation moyenne de 4,5 ha

2081 1400

Charges de carburants et lubrifiants (€ par ha) 33 22

Coûts de main d’œuvre (€ par ha) 130 70 Charges totales affectées par le changement d’itinéraire technique (€/ha)

222222444444 111444999222

LéCed

CM-apc-nccdiceEéplmcFedhe

Comparaison des itinéraires techniques LC, et TS avec rotobêche, pour la préparation des vertisols en cultures maraîchères.

e passage du labour conventionnel au travail simplifié avec rotobêche en vertisols permet une conomie directe de 752 € par hectare soit 3320 euros par tonne de carbone séquestré. es résultats pourraient servir de base à la détermination de taxes et de rémunérations des xploitants agricoles dans le cadre d’une politique d’orientation favorisant la réduction nette es émissions de GES à travers les changements de gestion des terres.

2.5.3. Conclusion

oncernant la mise en œuvre éventuelle d’une politique de séquestration du carbone en artinique, il apparaît donc que :

La simplification du travail du sol semble pertinente puisqu’elle permet à la fois un ccroissement des stocks de carbone dans les vertisols et une économie directe pour le roducteur. De plus, des recherches précédentes de l’IRD ont mis en évidence l’intérêt de ette pratique pour limiter l’érosion, cela sans affecter les rendements. En revanche, envisager un changement d’usage des terres du maraîchage vers l’élevage ovin e semble pas rationnel. D’une part, les calculs effectués montrent que, même si cette onversion est efficace en terme de stockage de carbone dans les sols, elle peut engendrer des oûts directs importants pour les producteurs. D’autre part, elle entraînerait une perte ’emplois de l’ordre de 75 %, dans la mesure où le maraîchage est environ quatre fois plus ntensif en emplois que l’élevage, et où l’extension des surfaces en prairies pâturées n’est pas oncevable dans le contexte actuel. Le coût social de cette perte d’emplois est aussi à prendre n compte. nfin, il est nécessaire de rappeler que seuls les coûts directs pour l’exploitant ont ici été valués. Pour les deux situations séquestrantes envisagées, il faudrait, pour estimer un coût our la collectivité, ajouter les coûts de mise en œuvre et de contrôle par les pouvoirs publics, es coûts collectifs de suppression et de créations d’emplois, les coûts d’opportunité non onétaires (coûts culturel et affectif du renoncement à l’usage antérieur de la terre) et les

oûts directs environnementaux. inalement, l’estimation pertinente d’une valeur ‘macroéconomique’ de la tonne de carbone n Martinique nécessiterait l’élaboration d’un modèle d’optimisation des coûts en fonction ’un objectif de stockage, qui permettrait de comparer des orientations culturales, des usages ors production agricole des terres, et leurs impacts climatiques, agronomiques, économiques, nvironnementaux et sociaux dans la région prise dans son ensemble.

47

3. CONCLUSIONS Cette étude a permis de préciser les principaux déterminants des stocks de C dans les sols des Antilles. Si la minéralogie et la texture du sol influencent profondément les stocks de C des sols, c’est principalement le mode de gestion des terres et l’itinéraire technique qui déterminent le niveau de C dans les sols. Les mesures de stocks de C sous différents systèmes de culture ont également permis de préciser les potentialités de stockage de C de certains systèmes et les durées nécessaires pour atteindre des niveaux de C élevés. Cette étude a également permis de montrer comment des changements de systèmes de culture ou de pratiques culturales influençaient non seulement les stocks de C (et les formes de carbone) mais également certaines propriétés physiques et biologiques des sols. Enfin, la spatialisation des données a permis de dresser la carte des stocks de C à deux dates (1969/1970 et 1980) ; il aurait également été intéressant d’établir la carte des stocks de C pour l’année 2000 mais les données concernant les surfaces cultivées (RGA, statistiques agricoles) ne sont pas encore disponibles. La valorisation des résultats de cette étude sur les stocks de carbone dans les sols des Petites Antilles a débuté à travers notamment :

- l’installation de la carte numérisée des sols de Martinique et la base de données-sols géoréférencées sur le SIG du PRAM (Pôle de Recherche Agronomique de la Martinique) ;

- l’installation des carte numérisées dd’usages des terres de 1969/70 et 1979/80 de

Martinique sur le SIG du PRAM (Pôle de Recherche Agronomique de la Martinique) ; de plus ces fichiers sont disponibles sur simple demande.

- deux communications orales dans le cadre du congrès international de la Caribbean

Food Crops Society (Fort-de-France, juillet 2002) : Venkatapen et al. (2002), Etienne et al. (2002) (Cf. bibliographie) ;

- L’édition du numéro 4 des Cahiers du PRAM (Pôle de recherche Agronomique de la

Martinique), intitulé « Les stocks de carbone dans les sols des Antilles. Importance agronomique et environnementale », préfacé par A.B. Delmas (MEDD) et contenant 8 chapitres présentant les principaux résultats de cette étude. Ces cahiers du PRAM sont destinés à un public de politiques, décideurs, socioprofessionnels de l’agriculture en Martinique, chercheurs, universitaires…ce numéro est annexé au présent rapport.

- la formation de cinq étudiants : L. Paupelard (DESS Gestion des systèmes agro-sylvo-

pastoraux en zones tropicales, Paris XII, 2001), M. Etienne (ENITA Clemont-Ferrand, 2001), L. Lecurieux-Laferronay (DESS Gestion des systèmes agro-sylvo-pastoraux en zones tropicales, Paris XII, 2003), S. Maubourguet (DESS Economie et Environnement, Marseille, 2004) et A. Ripoche (2e année INAPG, 2004).

48

4. BIBLIOGRAPHIE Albrecht A., Brossard M. & Chotte J.L. (1991) Matière organique et propriétés des sols cultivés à la

Martinique. Rapport final du Contrat de Plan Etat-Région Martinique-ORSTOM. Rapp mult. ORSTOM Fort-de-France. 173 p.

Albrecht A., Brossard M., Chotte J.L., Feller C. (1992) Les stocks organiques des principaux sols

cultivés de la Martinique (Petites Antilles). Cah. ORSTOM, ser. Pédol., 27 (1) : 23-36. Albrecht A., Brossard M., Chotte J.L. & Feller C. (1992) Effets des systèmes de culture sur les stocks

organiques des sols de la Martinique (Petites Antilles). Cah. ORSTOM, ser. Pédol., 27 : 23-36. Arrouays, D., Balesdent, J., Germon, J.C., Jayet, P.A., Soussana, J.F. and Stengel, P.(2002)

Contribution à la lutte contre l'effet de serre. Stocker du carbone dans les sols agricoles de France ? Rapport d’expertise, INRA, Paris, 330 p.

Barret P., Cadet P., Feller C., Albrecht A. (1991) Variabilité intra-parcellaire du remodelage en

relation avec la productivité végétale. Cah. ORSTOM, ser. Pédol., 26, (2) : 105-113. Blanchard O., Criqui P., (2ième trim 2000) “La valeur du carbone : un concept générique pour les

politiques de réduction des émissions” Economie internationale, La revue du CEPII (Centre d’études prospectives et d’informations internationales), n°82, 28 p.

Blanchart E. & Langlais C. (2001) Matière organique et agriculture. Cahiers du PRAM, Martinique Blanchart E., Khamsouk B., Roose E., Dorel M., Laurent J.Y., Larré-Larrouy M.C., Rangon L.,

Pinot J.P. & Louri J. (2002) Comparaison des pertes de carbone par érosion et drainage aux variations de stock de carbone du sol en deux années : cas d’une rotation bananiers-cannes-ananas-sol nu sur un nitisol argileux sur cendres volcaniques en Martinique. Colloque "Effect of Land Use Management on Erosion and Carbon Sequestration", Montpellier, 23-28 Sept. 2002. Communication orale.

Blanchart E., N'Dandou J.F., Albrecht A., Hartmann C., Laurent J.Y., Mahieu M. & Parfait F. (1997)

Influence de la profondeur de travail du sol sur les propriétés biologiques du vertisol. Cas de la transformation d'une prairie en culture maraîchère. Deuxième journée technique de l'Association Martiniquaise pour le Développement des Plantes Alimentaires. Le Lamentin, avril 1997. Actes du colloque. Conférence orale.

Bonnieux F., Desaigues B., (1998) Economie et politiques de l’environnement. Dalloz. Bontemps P., Rotillon G. (1998) Economie de l’environnement. La Découverte, 113 p. Brossard M., Laurent J.Y. (1992) Le phosphore dans les vertisols de la Martinique (Petites Antilles),

relation avec la matière organique. Cah. ORSTOM, ser. Pédol., 27 (1) : 109-119. Cadet P., Albrecht A. (1992) Le remodelage des terres à la Martinique, effet sur le peuplement de

nématodes parasites de la canne à sucre en relation avec la croissance végétale. Cah. ORSTOM, ser. Pédol., 27 (1) : 49-58.

Chevallier (1999) Dynamique et déterminants du stockage du carbone dns un vertisol sous prairie.

Thèse de doctorat de l’ENSAM, 141 pages.

49

Chevallier T., Voltz M., Blanchart E., Chotte J.L., Eschenbrenner V., Mahieu M. & Albrecht A. (2000) Spatial and temporal changes of soil C after establishment of a pasture on a long-term cultivated vertisol (Martinique). Geoderma, 94 : 43-58.

Chevallier T., Blanchart E., Girardin C., Mariotti A., Albrecht A. & Feller C. (2001) The role of

biological activity (roots, earthworms) on medium-term C dynamics in Vertisol under a Digitaria decumbens (Gramineae) pasture. Applied Soil Ecology, 16 : 11-21.

Chevallier T., Blanchart E., Albrecht A. & Feller C. The physical protection of soil organic carbon in

aggregates: a mechanism of carbon storage in a Vertisol under pasture and market gardening. Agriculture, Ecosystems and Environment,in press.

Chevignard T., Fardeau J.C., Doubleau-Piasco Sylvie, Feller C., Turenne J.F., Vallerie M. (1986)

Effets du remodelage parcellaire sur la fixation des phosphates en divers types de sols des Antilles. Agronomie, 1986, 6 (2) : 149-156.

Chevignard T., Feller C., Andreux F. & Quantin P. (1987) Le "remodelage" des terres en Martinique :

modification des propriétés de "ferrisols" et d'andosols cultivés en canne à sucre. Cah. ORSTOM, série Pédol., 23 : 223-236.

Chotte J.L. (1988) Importance de l’activité rhizosphérique dans la dynamique de reconstitution du

stock organique des sols (vertisol, Martinique). Traçage isotopique 15N. Cah. ORSTOM, ser.Pédol., 23 : 345-346.

Clermont-Dauphin C., Cabidoche Y.-M., Meynard J.-M. (2004) Effects of intensive mono-cropping

of bananas on properties of volcanic soils in the uplands of the French West Indies. Soil Use and Management (sous presse).

Cocu N. (1999) La carte des sols de la Martinique comme support pour le cadrage de sites et la gestion

agronomique : exemples dans la vallée de la Lézarde. Rapport de fin d'études. FUSAG, Gembloux, Belgique. 72 pages + Annexes.

Colmet-Daage F. (1965) Cartes d'aptitude des sols de la Martinique au 1/20.000. ORSTOM Antilles. Colmet-Daage F. & Lagache P. (1965) Caractéristiques de quelques groupes de sols dérivés de roches

volcaniques aux Antilles françaises. Cah. ORSTOM, série Pédologie, 3 : 91-122. Colmet-Daage F., Gautheyrou J. & Gautheyrou M. (1967) Sélection de profils des Antilles avec

rattachement à la classification de la carte des sols des Antilles au 1/20.000 (3 volumes). ORSTOM Antilles.

Colmet-Daage F., Bernard Z., Gautheyrou J., Gautheyrou M., Lagache F., Crecy J. de, Poumaroux A.

& Pallud A. (1969) Carte des sols de la Martinique. BSA, ORSTOM, Pointe-à-Pitre. Colmet-Daage F. (1969) Carte des sols des Antilles : Guadeloupe volcanique et Martinique au

1/20.000. ORSTOM Antilles. Colmet-Daage F. (1969) Aperçu sur les sols des Antilles. Congrès de la Caribbean Food Crops Society

(Pointe-à-Pitre, Guadeloupe). Conseil d’analyse économique (1998) Fiscalité de l’environnement. La documentation française,

Paris, 198 p. Conseil d’analyse économique (2003) Kyoto et l’économie de l’effet de serre. La documentation

française, Paris, 89 p.

50

Dulormne M (2001) Analyse de l'effet ombrage dans un système agroforestier légumineuse arbustive -

herbe. Ph. D. thesis, University Paris XI, France, 137 pp. Dulormne M, Sierra J, Nygren P, Cruz P (2003) Nitrogen-fixation dynamics in a cut-and-carry

silvopastoral system in the subhumid conditions of Guadeloupe, French Antilles. Agroforestry Systems 59: 121-129.

Etienne M. (2001) Gestion de la fertilité des sols par les agriculteurs martiniquais. ENITA, Clermont-

Ferrand. Giraud P.N., (2002) Effet de serre : modélisation économique et décision publique. Rapport du groupe

présidé par Pierre-Noël Giraud, Commissariat Général du Plan, La documentation française, Paris, 319 p.

Hartmann C., Blanchart E., Albrecht A., Bonneton A., Parfait F., Mahieu M., Gaullier C. & Ndandou

J.F. (1998) Nouvelles techniques de préparation des vertisols en culture maraîchère à la Martinique. Incidences pédologiques et agro-économiques. Agriculture et Développement, 18 : 81-89.

IPCC (2000) Special Report. Land use, land-use change, and forestry. 2000. Cambridge University

Press, Cambridge, UK. Koskela J, Nygren P, Berninger F, Luukkanen O (2000) Implications of the Kyoto Protocol for

tropical forest management and land use: prospects and pitfalls. University of Helsinki Tropical Forestry Reports 22. http://honeybee.helsinki.fi/tropic/kyoto.pdf

Lecurieux-Laferronay L. (2003) Etude des pratiques des agriculteurs maraîchers en terme de gestion

de la fertilité des sols. Typologie des exploitations agricoles. Étude des déterminants des pratiques. DESS Gestion des systèmes agro-sylvo-pastoraux en zone tropicale, Paris XII.

Ndandou (1998) Variations du stock organique et des propriétés physiques d’un vertisol sous prairie

après mise en culture maraîchère. Effet du mode de travail du sol. Thèse de doctorat de l’ENSAM, 125 pages.

Paupelard P. (2001) Etude des déterminants agro-pédo-climatiques du niveau des stocks de carbone

des sols de la Martinique cultivés en canne à sucre. DESS Gestion des systèmes agro-sylvo-pastoraux en zones tropicales, Paris XII.

Quantin P., Balesdent J., Bouleau A., Delaune M., Feller C. (1991) Premiers stades d’altération de

ponces volcaniques en climat tropical humide (Montagne Pelée, Martinique). Geoderma, 50 : 125-148.

Saffache P., Blanchart E., Hartmann C., Albrecht A. (1999) L’avancée du trait de côte de la Baie du

Marin (Martinique) : conséquence de l’activité anthropique sur les bassins versants alentour. Elsevier, C. R. Acad Sci. Paris, Sciences de la terre et des planètes, 328 : 739-744.

Starmühlner F., Therezien Y. (1982) Résultats de la mission hydrobiologique austro-française de 1979

aux îles de la Guadeloupe, de la Dominique et de la Martinique (Petites Antilles). Rev. Hydrobiol. Trop. 15 (4) : 325-345.

Turenne J.F. & Plenecassagne A. (1976) Dynamique de la matière organique en sols cultivés. Effet

d'une culture intercalaire de sorgho en vertisols irrigués. Cah. ORSTOM, série pédol., 14 : 193-205.

51

ANNEXE 1

Statistiques de l’utilisation des terres par commune

52

Occupation 1969/1970 Communes Ananas Autres Bananes Bananeraies

mixtes Broussailles sèches

Cannes à sucre

Cultures vivrières

Cultures vivrières mixtes

Forêts humides

Forêts sèches

Friches Jardins Caraïbes

Maraich. Marécage Mangrove

Savanes humides

Savanes humides mixtes

Savanes sèches

Savanes sèches arbustives

Savanes sèches mixtes

Total

Code 100 200 300 400 500 600 700 800 900 1000 1100 1200 1300 1400 1500 1600 1700 1800 1900

Ajoupa Bouillon 91,1 47,1 51,9 3,4 2,7 21,2 440,0 69,3 96,9 3,4 351,9 53,0 1231,9

Anses d´Arlet 59,4 6,2 243,1 1177,9 28,3 39,3 3,1 164,6 743,1 97,3 2562,3

Basse-Pointe 389,5 89,1 483,6 90,7 32,3 857,4 295,8 174,0 35,5 16,9 285,1 24,2 2774,2

Bellefontaine 30,4 451,7 6,6 26,8 17,4 132,8 81,7 19,4 86,7 10,9 102,0 209,5 5,7 1181,6

Case Pilote 60,0 573,2 59,7 13,4 703,1 33,7 23,6 60,2 55,4 43,4 210,6 1,5 1837,9 Ducos

48,8 223,7 82,0 548,5 74,8 62,0 74,6 494,5 255,6 3,8 18,0 819,8 131,1 2837,2 Fonds Saint Denis 3,2 25,5 0,8 5,0 15,4 3,2 2207,6 72,5 9,3 1,2 13,0 11,9 2368,5 Fort-de-France 1055,5 153,3 67,4 44,6 15,4 1,5 1253,2 128,7 334,8 24,1 53,4 477,0 504,2 161,4 4274,5 Grande Rivière

19,2 75,2 1465,0 20,5 1,2 77,1 1658,2 Gros-Morne

91,1 95,5 234,0 25,1 224,5 60,1 425,3 1250,4 406,9 168,4 48,5 778,2 798,0 4606,0 La trinité

52,6 174,7 365,9 9,2 1436,6 9,0 80,4 219,8 747,3 577,2 210,4 38,5 67,7 122,6 115,3 71,7 201,5 41,8 4542,1 Le Carbet

135,0 86,5 1,9 455,8 170,7 24,7 12,4 294,4 82,0 12,8 33,4 145,5 30,7 121,7 124,0 40,3 1772,2 Le Diamant

33,3 219,1 93,0 574,0 0,2 32,7 17,9 15,4 378,1 1208,4 152,6 2724,7 Le François

135,5 1023,0 391,5 497,6 20,9 52,9 320,2 80,4 454,4 390,3 20,3 39,3 529,5 169,7 735,7 391,4 23,2 5276,0 Le Lamentin

50,8 491,7 803,9 284,0 1098,9 4,2 4,4 198,9 1004,9 348,3 96,3 256,1 1121,9 371,2 19,4 4,6 6159,6 Le Lorrain

55,2 61,9 943,5 280,9 67,2 40,4 128,5 2378,1 215,4 225,2 35,9 499,0 75,8 8,9 5015,7 Le Marigot

36,6 472,0 129,2 9,6 113,6 1108,7 110,3 43,1 32,0 78,5 27,8 2161,4 Le Marin

80,9 28,3 0,1 346,6 68,7 24,5 255,3 563,7 72,6 63,3 6,0 43,9 4,3 515,3 902,1 163,1 3138,9 Le Morne Vert

13,6 89,9 3,2 45,7 194,3 692,7 32,0 18,0 200,8 18,9 0,0 3,7 16,7 1329,5 Le Précheur

86,8 112,3 183,7 260,4 48,4 1792,2 21,7 6,8 35,8 162,1 47,0 23,9 146,9 49,6 2977,5 Le Robert

159,0 710,4 541,5 308,2 23,2 27,3 240,4 191,8 778,4 213,8

53

10,3 31,5 520,8 154,9 125,7 235,8 86,9 4359,9 Le Vauclin

136,7 185,8 177,6 124,7 80,0 34,8 310,2 323,6 239,9 179,4 20,9 56,7 254,3 124,1 935,6 520,5 134,2 3839,0 Macouba

96,1 35,4 376,1 84,5 2,0 808,4 37,1 27,7 17,2 187,7 10,6 1682,9 Morne-Rouge

306,5 73,6 224,9 30,5 22,0 1758,1 245,4 148,7 10,7 16,7 817,1 87,9 1,2 5,7 3749,2 Rivière-Pilote

87,2 185,2 349,6 482,4 87,5 138,3 354,8 354,2 177,0 104,4 9,1 12,7 241,3 392,7 118,2 268,3 214,1 3577,1 Rivière-Salée

122,0 167,8 1036,4 32,4 14,7 281,3 157,6 380,3 114,3 7,2 69,1 815,8 184,0 389,6 170,1 9,4 3952,0 Saint-Anne

102,5 306,9 10,7 168,4 698,8 74,0 16,0 43,3 103,6 669,2 1457,4 84,1 3734,7 Sainte-Luce

47,2 22,7 3,5 285,0 10,4 6,8 286,3 553,2 110,0 39,9 25,5 31,2 151,1 494,5 600,9 115,9 2784,1 Sainte-Marie

9,4 159,3 905,6 20,5 766,4 111,8 319,9 377,7 16,5 319,4 588,3 55,9 0,2 248,4 532,5 0,7 4432,4 Saint-Esprit

67,3 559,3 257,7 337,9 69,2 35,1 103,9 311,1 216,8 15,3 197,4 144,9 1,9 2317,7 Saint-Joseph

7,6 140,8 377,6 3,5 61,1 11,0 50,1 1300,0 482,6 130,9 60,4 881,3 822,8 4329,7 Saint-Pierre

111,9 219,4 135,4 258,9 169,9 176,7 1535,5 187,4 63,0 69,3 354,7 28,1 78,5 368,5 86,3 3843,6 Schoelcher

207,8 481,8 13,4 8,8 820,5 56,3 70,0 120,1 7,2 86,1 157,2 79,7 2109,1 Trois-Ilets 132,0 150,3 225,1 571,0 112,4 40,5 2,2 24,9 61,9 294,6 988,0 91,5 2694,5 Total 1261,8 4448,3 8933,6 2428,7 2563,4 9079,5 1374,0 1849,8 24551,1 6010,0 7714,1 4425,9 755,5 854,6 10540,8 5090,3 5361,2 9088,8 1504,2 107835,4

Occupation 1979/1980 Communes Ananas Autres Bananes Bananeraies

mixtes Broussailles sèches

Cannes à sucre

Cultures vivrières

Cultures vivrières mixtes

Forêts humides

Forêts sèches

Friches Jardins Caraïbes

Maraich. Marécage Mangrove

Savanes humides

Savanes humides mixtes

Savanes sèches

Savanes sèches arbustives

Savanes sèches mixtes

Total

Code 100 200 300 400 500 600 700 800 900 1000 1100 1200 1300 1400 1500 1600 1700 1800 1900

Ajoupa Bouillon 55,7 26,8 267,9 0,0 19,3 456,4 24,5 134,9 206,1 40,3 1231,9

Anses d´Arlet 34,1 3,9 290,7 1067,6 74,9 5,8 229,1 777,5 88,8 2572,4

Basse-Pointe 372,1 69,8 847,8 3,2 10,3 46,6 1037,2 26,9 165,3 167,0 31,8 2778,1

Bellefontaine 19,2 419,2 1,6 3,1 10,9 153,3 36,0 52,1 131,8 90,4 49,8 140,9 71,0 1179,3 Case Pilote 123,5 452,7 22,2 104,7 708,9 6,9 5,5 47,1 74,1 87,6 16,5 133,3 57,6 1840,6 Ducos 115,0 218,1 79,4 628,8 6,1 113,1 290,0 485,5 2,7 17,5 716,6 164,0 0,3 2837,2 Fonds Saint Denis 1,9 13,2 140,8 55,2 1798,2 19,2 188,4 100,5 51,2 2368,5 Fort-de-France 1291,3 47,5 41,4 6,7 1340,2 23,0 14,8 409,1 23,5 630,5 457,1 5,4 4290,5 Grande Rivière

54,2 87,7 1466,8 2,7 40,5 4,5 1656,4 Gros-Morne

110,4 52,7 289,6 41,7 111,8 76,4 491,2 1258,3 116,4 309,1 736,8 991,6 20,0 4606,0 La trinité

67,8 150,6 601,7 4,6 739,1 18,2 11,2 302,3 763,5 285,7 446,6 47,5 457,1 224,0 188,1 201,5 39,0 4548,1 Le Carbet

80,2 36,2 278,4 12,6 70,3 120,7 184,0 151,1 131,1 7,1 172,1 107,1 160,5 177,5 82,3 1771,3 Le Diamant

50,8 39,3 95,8 101,3 434,7 34,7 68,1 8,5 13,7 492,6 1173,1 213,9 2726,6 Le François 200,3 219,8 572,4 557,9 30,2 20,1 257,5 246,3 269,2 581,7 12,5 904,1 345,2 525,8 440,5 107,0 5290,3 Le Lamentin

10,3 768,7 729,5 355,9 1347,8 86,1 13,7 210,9 368,9 528,4 175,3 976,5 588,8 6160,8 Le Lorrain

92,8 1262,7 300,1 9,5 58,4 58,4 2355,1 115,6 291,0 343,2 130,5 5017,3 Le Marigot

39,4 413,6 129,5 9,2 0,4 45,8 1097,1 7,0 64,9 79,9 189,7 86,7 2163,2 Le Marin

86,2 17,9 0,0 55,7 30,9 242,3 521,1 137,5 174,7 22,4 37,2 1,5 930,8 666,3 221,7 3146,4 Le Morne Vert

2,5 23,2 29,0 196,5 568,6 139,0 101,3 225,2 28,5 15,7 1329,5 Le Précheur

86,5 27,0 107,5 140,1 29,4 1739,0 10,9 180,1 19,0 209,1 137,5 6,8 101,4 182,6 2977,0 Le Robert 132,4 525,4 710,4 187,4 2,9 41,4 273,9 161,7 401,8 350,4 27,9 610,6 395,1 161,3 320,1 61,3 4364,0 Le Vauclin 136,8 46,6 273,3 7,3 24,9 65,7 337,6 184,0 47,9 204,2 55,1 193,4 71,2 1489,2 539,1 163,4 3839,8 Macouba 70,8 14,4 543,2 13,8 0,7 1,7 838,5 14,9 63,1 78,5 44,4 1684,0 Morne-Rouge

93,2 687,8 1,9 11,2 38,2 1803,7 82,8 191,8 10,3 650,5 177,9 3749,2 Rivière-Pilote

62,0 142,6 389,4 391,3 44,7 75,4 446,3 368,1 115,0 475,2 10,4 196,4 174,1 192,6 342,4 152,0 3577,9 Rivière-Salée 81,6 102,3 43,6 0,3 836,8 54,3 0,2 311,9 153,3 176,2 196,0 52,1 1068,9 248,9 451,7 125,1 48,4 3951,8 Saint-Anne

121,6 0,1 118,1 612,8 5,6 56,8 4,3 95,9 1076,6 1472,5 168,1 3732,5 Sainte-Luce

76,8 1,5 145,3 228,4 1,5 1,9 335,0 422,6 32,4 77,9 9,8 75,4 108,1 714,3 418,4 144,5 2793,9 Sainte-Marie 96,6 1012,6 111,4 318,8 75,4 262,1 386,3 13,4 175,0 730,5 548,9 698,0 4,7 4433,7 Saint-Esprit 71,0 568,1 341,2 75,0 52,2 39,2 110,8 294,5 256,2 2,0 442,0 65,5 2317,7 Saint-Joseph 94,1 344,8 34,7 93,5 41,0 84,0 1325,0 174,7 349,0 911,9 876,9 4329,7 Saint-Pierre

192,0 179,5 3,7 294,8 116,5 66,6 33,3 1446,7 70,1 262,1 37,1 434,4 35,1 372,9 189,7 108,9 3843,4 Schoelcher

265,1 355,8 3,4 772,9 358,2 125,5 30,1 18,1 51,5 135,0 2115,5 Trois-Ilets

128,8 48,1 309,8 826,2 6,0 113,9 24,6 512,2 638,5 101,6 2709,7 Total 687,1 4912,7 9187,1 3393,2 2123,8 5955,1 1177,9 1817,3 24497,9 5812,4 3568,6 8174,9 105,0 603,8 11508,7 6688,5 7589,2 7957,8 2173,0 107934,0

54

ANNEXE 2

Les cahiers du PRAM – numéro 4 – décembre 2004.

55

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:15 Page 1

he

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:15 Page 2

3

n°4 Décembre 2004

SO

MM

AIR

ES

OM

MA

IRE

LA PÉDOLOGIE AU PRAM p. 5

EDITORIAL p. 7● Daniel BARRETEAU, Thierry GOGUEY, Frédéric SAUDUBRAY, Alain XANDÉ

AVANT-PROPOS p. 9● André-Bernard DELMAS

1 LE PROGRAMME GESSOL-ANTILLES p. 11● Eric BLANCHART, Martial BERNOUX

2 EFFET DE SERRE ET SÉQUESTRATION DU CARBONE AU NIVEAU GLOBAL : APPROCHE HISTORIQUE ET ÉTAT ACTUEL p. 13

● Christian FELLER, Martial BERNOUX, Vincent ESCHENBRENNER, Bernard BARTHÈS, Eric BLANCHART

3 LES POLITIQUES PUBLIQUES p. 17● Sylvie MAUBOURGUET, Vincent ESCHENBRENNER, Dominique ARROUAYS,

Martial BERNOUX, Jean-François SOUSSANA

4 LES PETITES ANTILLES : DES CLIMATS ET DES SOLS VARIÉS SUR DE COURTES DISTANCES p. 21

● Yves-Marie CABIDOCHE, Eric BLANCHART, Dominique ARROUAYS, Emmanuel GROLLEAUX, Sébastien LEHMAN, François COLMET-DAAGE

5 EVOLUTION DE L’OCCUPATION DES SOLS EN MARTINIQUE p. 27● Martial BERNOUX, Eric BLANCHART, Corinne VENKATAPEN,

Norberto C. NORONHA, Maurice BURAC, François COLMET-DAAGE, Claude SCHERER

6 STOCKS DE CARBONE DANS LES SOLS POUR DIFFÉRENTS AGROSYSTÈMES DES PETITES ANTILLES p. 31

● Eric BLANCHART, Yves-Marie CABIDOCHE, Jorge SIERRA, Corinne VENKATAPEN, Christian LANGLAIS, Raphaël ACHARD

7 DÉTERMINANTS DES STOCKS DE CARBONE DANS LES SOLS ET SPATIALISATION À L’ÉCHELLE DE LA MARTINIQUE p. 35

● Corinne VENKATAPEN, Eric BLANCHART, Martial BERNOUX, Maurice BURAC

8 ESTIMATION DE LA VALEUR DE LA TONNE DE CARBONE DU SOL DANS LE SECTEUR AGRICOLE MARTINIQUAIS p. 39

● Sylvie MAUBOURGUET, Frédéric SAUDUBRAY

9 QUELQUES BRÈVES p. 45

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:15 Page 3

he

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:15 Page 4

5

La pédologie au PRAMPhoto 1.Elisabeth ROSALIE

(CIRAD),responsable du laboratoire d’analysedes sols et végétaux du CIRAD.

Photo 2.Anne-Laure TRANSLER-UNFER

étudiante UAG-IRD,travaillant sur le posteinformatique du SIRS-Sols (Systèmed’Information à Référence Spatiale sur les sols).

Photo 3.Erik BRAUDEAU (IRD),responsable du Laboratoire de Pédologie de l’IRD.

Photo 4.CHN : appareil de précision pour l’analyseautomatique et en sériedu carbone et de l’azotedans les sols.

Photo 5.Nelly TELLE (CIRAD),dosage du carbone total,phosphore et azoteminéral par auto-analyseur à fluxcontinu.

Photo 6.Luc RANGON (IRD),rétractomie : mesure encontinu du retraitd’échantillons de sols enfonction de l’évapora-tion de sol en fonctionde l’évaporation del’eau (à 40° C).

Photos 7 et 8.Echantillons de solspour l’analyse rétractométrique.

Photo 9.Thierry WOIGNIER

(CNRS-IRD),Etude de la structuredes sols à allophane parséchage hypercritique.

1

2

3

4

5

6

87

Au PRAM, la recherche sur les sols est menée dans trois directions :● des recherches fondamentales sur la caractérisation hydrostructurale des sols avec la réalisation

d’un système d’information à référence spatiale,● des recherches agronomiques visant à l’amélioration des pratiques agricoles,● des analyses physico-chimiques répondant aux demandes des agriculteurs.

9

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:17 Page 5

Photo 3. Morne Larcher.Vertisol sous prairie ensaison sèche. Les nom-breuses roches affleu-rant en surface indi-quent un phénomèneimportant d'érosion.

Photo 2. Macouba. Soljeune sur cendres etponces cultivé en bana-ne. On remarque dessignes d'accumulationde particules fines dansles sillons et en bas depente, indice de phéno-mènes d'érosion.

Photo 1. A écrire??????????????????????????????????????????????????????????????????

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:17 Page 6

7

P our la parution de ce quatrième numéro des Cahiers du PRAM, nous avons choisi de pré-senter les résultats d’un programme de recherche intitulé “Déterminants des stocks decarbone des sols des Petites Antilles (Martinique, Guadeloupe). Alternatives de séques-

tration du carbone et spatialisation des stocks actuels et simulés”. Ce programme a été initié enréponse à un appel d’offre du Ministère de l’Ecologie et du Développement Durable, lancé en 1998et renouvelé en 2000 (GESSOL).

Ce choix s’explique par trois raisons principales :● Tout d’abord, et ceci constitue la raison d’être des Cahiers du PRAM, nous avons souhaité

présenter certaines avancées de la recherche agronomique devant faciliter le développement d’une agriculture durable en Martinique.

● Ensuite, nous avons voulu mettre en exergue l’intérêt, face à des questions aussi complexes, d’initier des projets pluridisciplinaires inter-organismes. Ce programme constitue, depuis la création du PRAM, le premier projet regroupant de manière opérationnelle les quatre organismes membres à savoir le Cemagref, le CIRAD, l’INRA et l’IRD. Le groupe de recherche GEODE-Caraïbes de l’Université des Antilles et de la Guyane y a été également associé.

● Enfin, il nous a semblé opportun, à l’heure où de nombreuses réflexions sont engagées sur l’avenirde la recherche, de mettre en évidence l’intérêt d’une recherche martiniquaise à la fois pour la Martinique mais aussi pour contribuer à apporter des éléments de réponse à des questions émergentes au niveau international.

Ce numéro des Cahiers du PRAM rend compte des principaux résultats acquis dans le cadre de ceprogramme. Sa publication et sa diffusion ont été permises grâce au soutien financier du Ministèrede l’Ecologie et du Développement Durable (dans le cadre du Programme GESSOL-Antilles 1999,n° 01 105) et à une subvention spécifique du Ministère délégué à la Recherche. Nous tenons ici àles remercier pour leur soutien.

Des avancées notables ont été réalisées en matière d’inventaire, de cartographie et de connais-sances sur la préservation de la matière organique des sols en Martinique et en Guadeloupe enfonction de différents agrosystèmes.En ce qui concerne plus spécifiquement la Martinique, on notera que ce projet a permis de numé-riser la carte des sols et de constituer une banque de données pédologiques regroupant la majo-rité des informations disponibles depuis trente ans. Il a également servi de support pour réaliserune estimation de la valeur de la tonne de carbone stocké dans les sols. Pour terminer, et sachantque le PRAM a également un rôle important à jouer dans la formation, notons qu’il a permis departiciper à la formation de plusieurs étudiants (accueil de quatre stagiaires, pendant six mois cha-cun) et de finaliser une thèse portant sur les déterminants des stocks de carbone dans les sols.

Pour des non-spécialistes, il n’est pas évident de faire le rapprochement entre le réchauffement cli-matique, les gaz à effet de serre et le stockage du carbone dans les sols, même si tout un chacuna entendu parler du Protocole de Kyoto (qui entrera en vigueur en février 2005). Dans une pério-de où l’on se doit d’être de plus en plus vigilent à la préservation de l’environnement, ce numérodes Cahiers du PRAM s’est voulu particulièrement didactique, tout en maintenant un haut degréde rigueur scientifique, d’où les approches progressives allant des considérations les plus généralesjusqu’à des données très détaillées. Nous vous en souhaitons une lecture agréable et utile.

Le Comité Exécutif du PRAMDaniel BARRETEAU (IRD)Thierry GOGUEY (CIRAD)Frédéric SAUDUBRAY (Cemagref)Alain XANDÉ (INRA)

ED

ITO

RIA

LE

DIT

OR

IAL

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:19 Page 7

he

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:19 Page 8

9

P ar ses différentes fonctions, le sol joue un rôle clé vis-à-vis de l’environnement : ilconvient de le protéger au même titre que l’air et l’eau. La Commission Européenne aconfirmé cela, en 2002, en développant une politique environnementale de protection

et de suivi de la qualité des sols, à l’image de ce qui a été fait pour la qualité de l’eau.

Les décisions à prendre en matière de protection du sol s’inscrivent dans un contexte où la compo-sante scientifique est prépondérante. En effet, l’évolution à long terme du système naturel en causeet les déterminants climatiques, pédologiques, technico-économiques de cette évolution sont aucœur des réflexions en cours. Les travaux préparatoires à la future Directive Cadre Européenne ontainsi mis l’accent en 2004 à Bruxelles sur les pressions auxquelles le sol est soumis (pressions ayantdes effets à plus ou moins long terme, réversibles ou irréversibles) et sur les composant du sol à pro-téger dont, en particulier, la matière organique.

L’efficacité des moyens de maîtrise possible par rapport à l’objectif final attendu est une autrecomposante dans cette protection du sol. Ils ne peuvent être dissociés des enjeux sous-jacentsd’usage et de gestion des sols comme par exemple les relations entre agriculture et environne-ment. ces enjeux concernent l’agriculture multifonctionnelle, en tant que productrice de nouveauxservices environnementaux. Ils interfèrent plus généralement avec l’ensemble des impacts de laproduction agricole sur les ressources naturelles, dans lesquels le sol joue un rôle déterminant.

Conscient depuis longtemps de ce besoins de connaissances sur le fonctionnement des sols et deson rôle vis-à-vis de l’environnement et de la production agricole, le MEDD a lancé dès 1998 le pro-gramme de recherche GESSOL (GEStion des SOLs). Plusieurs propositions ont été financées dans cecadre dont le présent projet sur les déterminants et la spatialisation des stocks de carbone dans lessols des Antilles.

Les fonctions environnementales et agronomiques de la matière organique sont bien connues :elle permet le stockage d’éléments nutritifs, l’augmentation de la capacité d’échange cationique,l’amélioration de la stabilité structurale des sols et l’amélioration des activités fauniques, micro-biennes du sol. La matière organique du sol intervient également dans le cycle global du carbone,et peut se comporter comme un puits ou une source de gaz à effet de serre vis-à-vis de l’atmo-sphère. Les études portant sur les déterminants et les niveaux des stocks de matière organique(appréhendés à travers les stocks de carbone) sont donc d’une importance capital pour évaluer ladurabilité des systèmes et leur impact sur l’environnement.

Les Antilles constituent, dans le milieu tropical, un modèle d’étude particulièrement intéressantpour la compréhension des déterminants des stocks de carbone dans les sols, en raison de la gran-de variété des types de sols et de leurs usages, et de l’importance des gradients climatiques. Lademande de références scientifiques de la part des utilisateurs sur le terrain est forte.

Le présent numéro des Cahiers du PRAM répond à la volonté du MEDD et des chercheurs des ins-tituts de recherche impliqués dans ce projet (Cemagref, CIRAD, INRA et IRD) d’informer les poli-tiques, décideurs, agriculteurs, utilisateurs du sol... des résultats de cette étude qui traite de l’évo-lution d’une propriété des sols considérée comme prioritaire par la Commission européenne : lamatière organique des sols. Il répond aussi à l’objectif des programmes de recherche du MEDD quiest bien de fournir des connaissances à l’usage des utilisateurs sur le terrain.

Il faut donc féliciter les auteurs de ce numéro spécial des Cahiers du PRAM qui, par leur publica-tion, vont contribuer à diffuser dans un large public les connaissances acquises et à faire connaîtrel’action du MEDD pour protéger le sol dans un esprit de durabilité.

André-Bernard DELMAS

Chargé de mission, Ministère de l’Ecologie et du Développement Durable

AV

AN

T-P

RO

PO

SA

VA

NT-P

RO

PO

S

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:21 Page 9

he

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:21 Page 10

11

1

E n raison de sa position d’interfacedans l’environnement, le sol joue unrôle très important dans les grands

cycles biogéochimiques ; il est aussi le sièged’une biodiversité considérable encore malconnue et constitue le support trophique de laproduction végétale. Le sol est donc un patri-moine dont la gestion durable doit s’imposercomme une préoccupation nationale (voiremondiale) forte.Si le sol a des fonctions agronomiques bienconnues (support de la fertilité), il présenteaussi des fonctions environnementales souventpeu perçues du grand public, telles que :● la qualité de l’air et le réchauffement climatique,

le sol pouvant jouer le rôle de source ou depuits de carbone atmosphérique, le dioxydede carbone (CO2) étant un lieu de dénitrifi-cation (émission de N2O, puissant gaz à effetde serre),

● la qualité de l’eau, dans la mesure où le ruissellement, l’érosion et l’infiltration despolluants altèrent la qualité chimique et bio-logique des eaux superficielles et souter-raines.

Devant la prise en compte de ces fonctionsnouvelles, le Ministère de l’Environnement etdu Développement Durable (MEDD) a lancé en1998 un appel d’offres destiné à soutenir desprojets permettant de “définir des notions dequalité des sols qui ne soient pas les seulsconcepts de fertilité physique, chimique et bio-logique des agronomes”.

La matière organique des sols étant un desdéterminants essentiels des nombreuses pro-priétés édaphiques, son étude en terme dequalité, dynamique et stockage selon le modede gestion des terres est très importante. Aussi,l’évolution à moyen et long terme des stocksorganiques des sols est un indicateur à prendreen compte dans le jugement sur la durabilitédes agroécosystèmes et la protection de l’envi-ronnement. Les préoccupations concernant leréchauffement global et l’augmentation desteneurs en gaz à effet de serre, dioxyde de car-bone (CO2), méthane (CH4), oxydes d’azote(NOx), et ozone (O3), de l’atmosphère condui-sent à s’interroger sur le rôle des sols en termesde source ou de puits de carbone et sur l’im-pact des actions humaines, particulièrement enmilieu tropical ou subtropical.

Les stocks des éléments dans les sols, et en par-ticulier ceux du carbone, sont en constanteévolution sous l’effet de facteurs naturels (cli-mat, végétation, effets de l’altération, du drai-nage, et plus généralement de l’ensemble desprocessus pédogénétiques et anthropiques(impacts locaux des utilisations des sols, effetsdiffus d’apports hydriques et atmosphériques).En un point donné, les variations des stocks decarbone sont dues à divers processus : modifi-cation des apports de matière organique,transferts de carbone sous forme solide (parti-culièrement par érosion en nappe) ou soluble(drainage et ruissellement) et pertes par miné-ralisation (CO2, CH4) de la matière organiquedes sols.Pour un même type d’occupation des sols,toute modification de l’itinéraire techniquepeut induire, en modifiant vitesses de restitu-tion et de minéralisation, des variations dustockage du carbone dans les sols. Or, pour dif-férentes raisons, en particulier la recherche dela durabilité des systèmes de culture et l’étudedes changements globaux, de nombreusesalternatives basées sur une gestion plus orga-nique et biologique du sol sont actuellementtestées en régions intertropicales et ce, avec lapréoccupation de favoriser le stockage du car-bone (C) dans les sols.Des estimations régionales des stocks de carbo-ne et de leurs variations sous l’effet des chan-gements d’usage et de gestion des terres sontdonc nécessaires pour :● mieux préciser le rôle de la matière organique

dans les propriétés des sols● quantifier l’évolution des stocks de C dans

le système sol-plante et la qualité des émis-sions de gaz à effet de serre (notammentCO2) sous différentes conditions de climat,de sol et d’utilisation des terres

● fournir des données quantifiées indispensablesà l’évaluation économique du C séquestrédans le système sol-plante, thème largementdiscuté au cours des réunions de Kyoto(1997) et de Buenos Aires (1998).

En milieu tropical, peu de données ont été sys-tématiquement recueillies et sont actuellementdisponibles pour une évaluation précise despossibilités de séquestration du carbone dansles sols selon le mode d’usage des terres et lavariabilité des conditions pédoclimatiques.Concernant le déterminisme des processus mis

Le programme GESSOL-AntillesEric BLANCHART

Martial BERNOUX

IRD, UR 041,Laboratoire Matière Organique des Sols Tropicaux,BP 64501,34394 Montpellier cedex 5

Le programme GESSOL-Antilles

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:22 Page 11

en jeu, on doit noter, en dehors des aspectsbio-climatiques, bien documentés aux échellesrégionales, l’absence d’une approche systéma-tique des déterminants de la séquestration duC dans les sols à l’échelle de la parcelle. Ainsi,on relève un manque de données organiséessur des paramètres aussi importants que laminéralogie, les pratiques cumulées à la par-celle, les activités biologiques, l’érosion, leniveau et la qualité des restitutions orga-niques, le stockage du C…

L’Unité de Recherche “Séquestration du carbo-ne dans les sols tropicaux. Effet de la gestiondes agroécosystèmes“ (UR 041) de l’IRD, asso-ciée à des laboratoires de l’INRA (Unité InfosolOrléans, UR Agropédoclimatologie Guadeloupe),du Cemagref (UR Agriculture et espace insulai-re - Martinique), du CIRAD (FLHOR Martinique,MOST Montpellier) et à l’Université Antilles-Guyane (Groupe de recherche GEODE), arépondu à cet appel d’offres en 1999. Le projetdont les résultats sont présentés dans ce numé-ro des Cahiers du PRAM vise à une relecturedes données déjà acquises antérieurement surla matière organique des sols des Antilles et àun complément systématique sur des détermi-nants non ou peu étudiés et à la prise en comp-te de nouvelles situations.

Le projet concerne les Petites Antilles(Martinique, Guadeloupe) qui disposent, surun espace relativement réduit :● d’une grande variété de climats (précipitations

moyennes annuelles variant de 1,2 à plus de8,0 m),

● des principaux types de sols tropicaux riches en minéraux secondaires (Vertisols, Sols fer-rallitiques, Andosols),

● d’une très grande diversité des modes d’usagedu sol (forêt naturelle, prairies permanentes,cultures de canne ou banane semi-pérennes,successions de cultures associées ou mono-spécifiques à cycle court), comportant desniveaux d’intensification très variables sus-ceptibles d’influer sur le stock de carbone(intensité, profondeur, durée de travail dusol, intrants minéraux).

LES PRINCIPAUX OBJECTIFS DE RECHERCHE DE CE PROGRAMMESONT ORGANISÉS EN CINQ AXES AXE 1 Analyse des principaux déterminants éda-phiques des stocks organiques des différentssols et effet des grands modes d’occupation deces terres (échelle parcelle) sur les stocks de Cdu sol : constitution d’une base de donnésinformatisée.

AXE 2 Analyse des variantes contingentes de l’itiné-raire technique : recherche d’alternatives degestion des terres en vue d’une séquestrationaccrue du C dans le sol, dans le cadre d’uneagriculture durable.

AXE 3 Conséquences du mode d’usage des terreset/ou des alternatives de gestion sur les pro-priétés biologiques (diversité et biomasse de lafaune) et physiques (stabilité de l’agrégation etérodibilité) des sols.

AXE 4 Spatialisation des stocks actuels de C des sols dela Martinique et de la Guadeloupe et de leurdevenir selon différentes alternatives de ges-tion (depuis l’échelle de la parcelle à celle de larégion). Constitution de banques régionales dedonnées géoréférencées à partir de donnéesexistantes (valorisation) ou de celles acquisesau cours de ce projet (SIG).

AXE 5 Approche économique du C séquestré pourquelques situations.

Ce programme de recherche est en liaison avecune étude pour la Mission Interministérielle del’Effet de Serre (Resp. D. Arrouays, INRA-Infosol, Orléans) dont l’objectif est de consti-tuer une base de données sur les stocks de Cdes sols du territoire métropolitain et de déve-lopper un modèle générique (MORGANE) desimulation de l’évolution de ces stocks sous l’ef-fet de changements climatiques ou de change-ments d’usage. Le travail effectué dans notreprogramme de recherche permet de constituerdes références en ce qui concerne les stocks decarbone dans les DOM insulaires.

12

1

CONTACTEric Blancharte-mail : [email protected]

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:22 Page 12

1. EFFET DE SERRE “NATUREL” VERSUS “ANTHROPIQUE”La notion d’“effet de serre” réfère à comparerla planète Terre à une serre dont les parois enverre (ou en plastique) seraient ici représentéespar notre atmosphère avec, comme à l’inté-rieur de toute serre, une élévation de la tem-pérature de la Terre. La température moyennede notre planète est actuellement d’environ15°C. En absence d’atmosphère, donc d’effetde serre, elle serait de - 18°C. Le fait que notreTerre porte la vie est donc la conséquence d’uneffet de serre dit “naturel“ (c’est aussi la vie quiest responsable de l’atmosphère actuelle).L’amplitude de cet effet de serre est en partiedéterminée par la composition de l’atmosphè-re en certains gaz dits à “effet de serre“ (GES),souvent en très faibles concentrations, et quisont caractérisés par un “pouvoir de réchauffe-ment global“ (PRG), comme le gaz carboniqueCO2, le méthane CH4 ou l’oxyde nitreux N2O. La composition de l’atmosphère a fortementchangé au cours des âges géologiques, et ceciavec une certaine chronicité : on connaît, parexemple, des variations de température pou-vant atteindre 10-12°C tous les 50.000 ans envi-ron. Signalons tout de suite que ces variationsde température dues à la variation de la com-position de l’atmosphère ont des conséquencestrès importantes sur l’ensemble des variablesclimatiques et le fonctionnement global desécosystèmes terrestres. Sur le plan géologique,on se situerait actuellement à un maximum detempérature (figure 1) et notre devenir auxéchelles “géologiques“ (d’ici quelques dizainesde milliers d’années) devrait donc être un âgeglaciaire. Toutefois, les nombreuses mesures de tempéra-

ture qui sont collectées depuis un siècle à la sur-face de la Terre indiquent une nette tendance àune augmentation de la température de notreplanète, augmentation estimée à environ 0,6°C(figure 2). Parallèlement, on sait avec une trèsgrande certitude, que la composition de l’atmo-sphère en GES a été fortement modifiée depuisle début de l’ère industrielle avec une croissancequasi-exponentielle des concentrations en CO2,CH4 et N2O (figure 3), augmentation que l’on atendance à mettre à l’origine de celle de la tem-pérature, même si la certitude de cette causalitén’est pas encore établie de manière absolue. Cesmodifications de la composition en GES de l’at-mosphère sont, par contre, clairement dues auxactivités humaines, que ce soit l’industrie oul’agriculture. L’industrie est basée sur l’utilisa-tion de combustibles fossiles, comme le pétrole,le gaz ou le charbon, qui conduisent à l’émissiond’énormes quantités de CO2, mais aussi sur l’uti-lisation d’autres réserves carbonées comme lescalcaires qui libèrent aussi du CO2 lors de lafabrication du ciment. L’agriculture (sensu lato)participe aussi à l’émission de GES, à travers ladéforestation (émission de CO2 par brûlis), uneutilisation excessive des engrais azotés (émissionde N2O), une mauvaise gestion des troupeaux(émissions de CH4) ou encore de l’irrigation(émissions de CH4 et N2O). On estime les partici-pations respectives de l’industrie et de l’agricul-ture à ces modifications de la composition atmo-sphérique à respectivement 66 et 34%. C’estpour ces raisons que l’augmentation de 0,6°Cobservée depuis un siècle est considérée commeun effet de serre additionnel que l’on qualified’“origine anthropique“. Et lorsque l’on évoque“l’effet de serre“ actuellement, c’est essentielle-ment à cette augmentation récente de la tem-pérature que l’on se réfère.

Effet de serre et séquestration du carbone au niveau global : approche historique et état actuel

13

2

Christian FELLER

Martial BERNOUX

Vincent ESCHENBRENNER

Bernard BARTHÈS

Eric BLANCHART

IRD, UR 041 “Séquestration du carbone dans les sols tropicaux”,911 avenue Agropolis,BP 64501,34394 Montpellier cedex 5

Figure 1. Variations de

la températuredes 400.000 dernièresannées par rapport à

la température actuelle(d’après les sondages

antarctiques de Vostok).aux échelles actuelles

Effet de serre et séquestration du carbone au niveau global : approche historique et état actuel

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:24 Page 13

2. LE CYCLE GLOBAL DU CO2Le CO2 est le gaz qui contribue le plus à l’effetde serre. C’est donc son exemple que nous uti-liserons pour illustrer nos connaissancesactuelles des flux et compartiments du carboneet du CO2 aux échelles globales. Concernant les compartiments de stockage duC (estimé en giga-tonnes carbone GtC, ou mil-liards de tonnes C), les masses stockées sont,dans l’ordre décroissant suivant : roches,65.500.000 ; océan, 40.000 ; combustibles

14

2

Figure 2. Variations

de la température depuis1850 par mesures à la surface du sol ou

par satellite. (Sources : www.epa.govwww.cru.uea.ac.uk/cru/info/warming/).

Figure 3. Variations depuis

1000 ans de la composition de

l’atmosphère en CO2

(les courbes pour, CH4

et N2O présentent le même comportement)

Figure 4. Flux annuels de C-CO2

à l’échelle globale,exprimés en giga-tonnes

de C (GtC)

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:24 Page 14

fossiles, 10.000 ; sols 1500-2000 GtC sur 0-100 cmou 700 sur 0-30 cm ; atmosphère, 730 et végé-tation, 470-655. Il faut donc noter que le seulcompartiment sol est supérieur à ceux de l’at-mosphère et de la végétation.

Concernant les flux annuels de C-CO2, l’utilisa-tion des réserves fossiles conduit à émettre6,3 GtC qui vont alimenter l’atmosphère.L’agriculture participe aussi à ces émissionsavec 1,6 GtC-CO2. En revanche, les écosystèmes(sol-plante) continentaux absorbent, via laphotosynthèse, environ 2,3 GtC du C-CO2.L’atmosphère est également en équilibre avecl’océan qui réabsorbe 2,3 GtC du C-CO2 totalémis. Le bilan final est donc une augmentationannuelle de 3,3 GtC-CO2 dans l’atmosphère(figure 4). Lutter contre l’effet de serre, c’est à la foisdiminuer les émissions de GES vers l’atmosphè-re et augmenter leur fixation par les comparti-ments carbonés terrestres. Ce dernier processusest appelé “séquestration“. En fait, on ne saitpas encore “gérer“ la séquestration parl’océan, mais, par contre, on peut tenter degérer celle des écosystèmes continentaux enmettant en place des modes de gestion desterres qui sont favorables à une séquestrationdes GES, et, en particulier du C-CO2 dans lavégétation et dans les sols. La séquestration duC dans la végétation sera effective dès lors quel’on met en place, sur le long terme (plusieursdizaines d’années), de nouveaux systèmes quiimpliquent l’arbre. Cela peut être la reforesta-tion, les plantations sylvicoles ou l’agroforeste-rie. Cette séquestration dans la végétation estaccompagnée aussi d’une séquestration du Cdans les sols, car les restitutions organiques ausol sont alors augmentées par rapport auxsituations antérieures à ces nouvelles pra-tiques. Par contre, tous les autres modes degestion agricole des terres comme les culturesannuelles ou pérennes ou les pâturages ne per-mettent pas, sur le long terme, une séquestra-tion de C dans la végétation. Mais, selon lestechniques culturales ou pastorales appliquées,le compartiment sol peut fonctionner, soitcomme un compartiment émetteur de GES, soitcomme un compartiment séquestrant. Les 30premiers centimètres des sols du mondecontiennent X GtC. Il suffirait d’augmenterannuellement leur stock actuel de 0,5% pourque cette augmentation compense la totalitédes émissions dues à la consommation des com-bustibles fossiles. Or selon le mode de gestiondes sols, on sait que l’on peut facilement aug-

menter de 10 à 30% le stock de carbone dessols cultivés, sur des périodes de 10 à 30 ans. Onréalise ainsi que, sur le moyen terme (0 à 30ans), le sol représente un compartiment impor-tant de séquestration du C.

3. APPARITION ET SIGNIFICATION DES TERMES “SÉQUESTRATION DEC DANS LE SOL”L’utilisation de la locution “séquestration du Cdans le sol“ est d’usage courant de nos jours et,très souvent, dans un sens strictement iden-tique à celui de “stockage de C dans le sol“. Onpeut donc s’interroger sur : (1) la date d’appa-rition de la locution “séquestration du C dansle sol“, (2) de la signification que l’on doit luiattribuer : identique ou non à la notion géné-rale de “stockage de C dans le sol“ ?Une analyse bibliométrique de l’utilisationsimultanée des trois termes : “sol (ou soil)“,“carbone (ou carbon)“ et “séquestration (ousequestration)“ a été faite sur ISI-Web ofScience pour des références indexées de 1940 à2003 concernant leur présence, soit dans letitre, soit dans le texte (tableau 1). La premièreapparition simultanée des trois termes date de1991 pour le texte (Thornley et al.) et de 1992pour le titre (Dewar & Cannell).

La même interrogation a été faite pour lestermes et formules “sol (ou soil)“, “gaz (ougas)“ pour “CO2 ou CH4 ou N2O“ afin de situerla notion de “séquestration du C“ à celle del’importance des études sur les flux de GESdonc de problématique d’effet de serre et de“changement global“. Les résultats rapportés à

15

2

Années Références

1991 11992 5 (1)1993 14 (1)1994 71995 22 (1)1996 241997 36 (2)1998 47 (3)1999 38 (3)2000 94 (8)2001 104 (14)2002 149 (15)2003 (jusqu’au 17 juin) 69 (9)

Total (1940-2003) 594 (56)

Tableau 1. Nombre de références

indexées dans le ISI-Webof science (1940-2003)

avec les trois termes“sol (ou soil)”,

“carbone (ou carbon)“et “séquestration

(ou sequestration)”respectivement dans le

texte et dans le titre(entre parenthèses).

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:24 Page 15

la figure 1 et comparés au tableau 1 montrentque c’est bien à la même époque que se déve-loppent aussi de manière croissante lesmesures de flux de GES à l’interface sol-plante-atmosphère.

4. DÉFINITION DE LA SÉQUESTRATION DU CARBONEDANS LES SOLSLa notion de “séquestration du C dans les sols“est donc bien totalement associée à celle deflux de GES à l’interface sol-plante-atmosphèreet ; elle est utilisée à partir des années 1990. Laquestion qui se pose maintenant est de savoirsi la notion de “séquestration“ est strictementsimilaire à celle de “stockage“ ? Cet aspect estlargement résumé ci-dessous.A notre avis, la notion de “séquestration de C“n’est pas strictement équivalente à celle de“stockage de C“, et ce, pour deux raisonsmajeures :● la “séquestration“ réfère seulement au stockage

de C dans le sol provenant directement ouindirectement, pendant l’échelle de temps etla surface de sol considérées, du C du CO2

atmosphérique (C-CO2). Cela signifie que desstockages de C provenant de la matière orga-nique (MO) d’origines industrielles issues enpartie des réserves fossiles comme des com-posts urbains ne peuvent être considérésdans la notion de séquestration. De mêmetoutes les variations de C au niveau parcellai-re liées aux cycles “érosion-sédimentation“comme le dépôt de C érodé puis déposé nepeuvent entrer simplement dans un bilan deC séquestré, car il ne s’agit que d’un transfertde C du sol d’un point à un autre et non à unflux de C entre l’atmosphère et le systèmesol-plante. Or, les transferts de C par érosion-sédimentation, à l’échelle parcellaire, sont dumême ordre de grandeur que celles prove-nant d’un stockage de C-CO2, et donc, l’onpeut ainsi sous- ou surestimer fortement lesbilans de “C séquestré“ si l’on ne prend pasen compte ces aspects ;

● la “séquestration“ réfère aussi dans diverses définitions aux flux de GES. Et dans cetteoptique, la notion de “séquestration du C“devrait être élargie à celle de l’ensemble desflux de GES au niveau du système sol-planteet exprimée en équivalents C-CO2, prenanten compte le potentiel de réchauffementglobal de chaque GES (CH4 et N2O) en réfé-rence à celui du CO2.

Ceci nous a conduit à proposer une nouvelledéfinition de la “séquestration du C dans lesol“ (ou le système sol-plante) et que nous don-nons ci-dessous :La “séquestration du carbone dans le sol“ ouencore “séquestration du carbone dans le sys-tème sol-plante“ pour un agroécosystèmedonné, en comparaison avec un agroécosystè-me de référence, et pour une période et unesurface données, doit être considérée commele résultat du bilan net, exprimé en équivalents(eq.) C-CO2 ou eqCO2, de tous les flux de GES, àl’interface sol-plante-atmosphère du site demesure.

L’acceptation de cette définition pour la“séquestration du C dans les sols“, due à unchangement d’usage des terres ou une modifi-cation des itinéraires techniques, impliquedonc les mesures suivantes pour l’estimation debilans de “C séquestré“, pour un espace et unedurée donnés :● variations du stock total de C des sols et, si

possible, la part correspondant au C déposé ou érodé et du C soluble (ruisselé et lixivié), afin d’en déduire la part du C séquestré (correspondant strictement à la fixation de C-CO2) ;

● variations des flux des autres GES, en particulierCH4 et N2O.

Cette définition implique aussi que lorsquenous parlons de variations de stocks de C dansle sol sans faire référence exclusivement à lapart qui concerne les seuls flux de C-CO2 (via laplante), il vaut mieux utiliser le terme de “stoc-kage de C dans le sol“ que le terme de “séques-tration de C dans le sol“.Enfin, nous attirons l’attention sur les pro-blèmes et artefacts liés au mode de détermina-tion du stockage du C dans le sol (approche“synchronique“ vs “diachronique“) que nousne reprendrons pas ici, mais qui sont essentielspour une évaluation correcte du C séquestrédans le sol.

16

2

Figure 5. Nombre relatif

de références indexéesdans le ISI-Web

of science (1940-2003)pour les trois gaz CO2,

CH4 et N2O avec lademande “sol ET gaz”

en ‰ du nombre deréférences obtenues

avec la seule demande“Sol”.

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

Buenos Aires Decisions(1998), Report of theConference of the Partieson fourth session, held atBuenos Aires from 2 to 14 november 1998.FCCC/CP/1998/16/Add.1.http://www.unfccc.org/

Kyoto Protocol (1997),Kyoto Protocol to theUnited NationsFramework, Convention onClimate Change. Kyoto,11/12/1997.http://www.unfccc.org/

CONTACTChristian Fellere-mail :[email protected]

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:24 Page 16

INTRODUCTIONL’un des défis majeurs de ce XXIe siècle est sansnul doute le réchauffement global. Les change-ments climatiques dus à l’augmentation desconcentrations atmosphériques de “gaz à effetde serre“ (GES) font maintenant l’unanimitédes chercheurs, même si l’on ne peut en prévoirl’amplitude exacte. La plupart des décideurspolitiques reconnaît que l’application du princi-pe de précaution (qui énonce que “quand il y arisque de perturbations graves ou irréversibles,l’absence de certitude scientifique absolue nedoit pas servir de prétexte pour différer l’adop-tion de… mesures“) passe par la mise en œuvrede politiques publiques à différents niveaux :international, régional, national et local.

LA CONVENTION CADRE DES NATIONS UNIES ET LE PROTOCOLE DE KYOTO Pour prévenir les changements climatiques dusà l’accumulation des GES, la communautéinternationale a élaboré la Convention Cadredes Nations Unies sur le ChangementClimatique (CCNUCC, UNFCCC en anglais).Cette convention a été adoptée à New York le9 mai 1992 et ouverte à la signature le 4 juin1992, à Rio de Janeiro, lors de la Conférencedes Nations Unies sur l’Environnement et leDéveloppement (“Sommet de la Terre“). Ellefixe l’objectif “de stabiliser […] les concentra-tions de gaz à effet de serre dans l’atmosphèreà un niveau qui empêche toute perturbationanthropique dangereuse du système clima-tique“ (art. 2). Elle impose à tous ses signa-taires de mettre en place des programmesnationaux de réduction des émissions et deprésenter des rapports périodiques. Elle s’inspi-re de deux principes figurant fréquemmentdans le droit international de l’environnement: le “principe d’équité“ selon lequel “il incom-be aux Parties de préserver le système clima-tique dans l’intérêt des générations présenteset futures, sur la base de l’équité et en fonctionde leurs responsabilités communes mais diffé-renciées, et de leurs capacités respectives. Ilappartient, en conséquence, aux pays dévelop-pés (Parties) d’être à l’avant-garde de la luttecontre les changements climatiques et leurseffets néfastes“ et le principe de précaution.Après avoir été ratifiée par 50 États, elle estentrée en vigueur le 21 mars 1994 (la signature

d’un traité est l’acte par lequel un État manifesteson intérêt à l’égard du traité sans pour autantêtre engagé à le respecter au moment de lasignature ; la ratification est l’acte par lequel unÉtat exprime son consentement définitif à êtrejuridiquement lié par le traité). Actuellement, 188États l’ont ratifiée, c’est-à-dire, tous les États saufquatre (Andorre, Brunei, Iraq, Somalie). Trente-cinq pays développés sont désignésdans l’Annexe I de la Convention (les pays del’OCDE sauf le Mexique et la Corée, et les paysdits en transition) : contrairement aux pays envoie de développement, ils devaient, avant l’an2000, stabiliser leurs émissions de gaz à effetde serre aux niveaux de 1990. Vingt quatred’entre eux – les plus riches – constituentl’Annexe II de la Convention (la Russie, laBiélorussie, l’Ukraine et les pays d’Europe del’Est n’en font pas partie). Les autres pays (156)sont globalement désignés “non Annexe I“.Cependant, dès 1994, il est devenu évident queles engagements contractés initialement dans lecadre de la CCNUCC ne permettraient pas à euxseuls de stopper l’augmentation globale desémissions de gaz à effet de serre. Le 11 décembre1997, les gouvernements de 180 États ont franchiune nouvelle étape en adoptant un protocole àla CCNUCC à Kyoto dont l’objectif principal est delimiter quantitativement les émissions de GES despays de l’Annexe I. Pour cela, des quotas d’émis-sions autorisées (qui figurent dans l’Annexe B duProtocole) sont attribués à chaque pays del’Annexe I (Engagements chiffrés de limitation oude réduction des émissions). Fixés en référenceaux émissions de 1990, ces objectifs devront êtreatteints pendant la première période d’engage-ment (2008 à 2012). Globalement, compte tenudes quotas des différents pays de l’Annexe B, laréduction correspondrait, si le Protocole entraiten vigueur, à des émissions, pendant la premièrepériode d’engagement, inférieures de 5,2% à cequ’elles étaient en 1990.

POUR QUE LE PROTOCOLE DE KYOTO ENTRE EN VIGUEUR, DEUX CONDITIONS DOIVENTÊTRE REMPLIES :1- 55 États minimum doivent avoir ratifié le

Protocole ;2- parmi eux, ceux visés par l’annexe B du

Protocole doivent cumuler 55% du niveaudes émissions atteint en 90 par tous les paysde l’annexe B.

17

3

Sylvie MAUBOURGUET 1

Vincent ESCHENBRENNER 2

Dominique ARROUAYS 3

Martial BERNOUX 2

Jean-François SOUSSANA 4

1 Stagiaire de DESS enEconomie etEnvironnement,PRAM / CemagrefMartinique et IRD

2 IRD, LaboratoireMatière Organique des Sols Tropicaux,BP 64501,34394 Montpellier cedex 5

3 INRA, Unité Infosol,Orléans

4 INRA,Unité d'Agronomie,Site de Crouel,234, Av. du Brézet,Clermont-Ferrand,F-63039 Cedex 02

Les politiques publiquesLes politiques publiques

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:26 Page 17

Actuellement, 128 États l’ont ratifié : la premiè-re condition est donc remplie. La deuxièmecondition vient de l’être le 18 novembre 2004,lorsque le représentant permanent de la Russieauprès des Nations Unies a remis au SecrétaireGénéral les instruments de ratification. La Russiereprésente 17,4% des émissions des pays del’Annexe B qui viennent s’ajouter aux 44,2% desautres pays de l’Annexe B qui l’avaient déjà rati-fié. La ratification par la Russie était devenueindispensable dans la mesure où les États-Unis(responsables de 36,1% des émissions des paysde l’Annexe B) ont décidé, le 28 mars 2001, dene pas ratifier le Protocole de Kyoto.Le Protocole de Kyoto entrera en vigueur 90 joursaprès la ratification russe, soit le 16 février 2005.

LA POLITIQUE EUROPÉENNE DE LUTTE CONTRE LES CHANGEMENTSCLIMATIQUES : UNE MISE EN ŒUVRE DES MÉCANISMES DE FLEXIBILITÉ ISSUS DU PROTOCOLE DE KYOTOLe Protocole de Kyoto prévoit l’ouverture d’unmarché de Permis d’émissions négociables (PEN)à l’échelle mondiale : les quarante-quatre paysde l’Annexe I peuvent compenser leurs excé-dents d’émissions en achetant des “crédits car-bone“ (droits d’émissions qui autorisent lesémissions d’une certaine masse d’équivalentsCO2 pendant une période donnée et qui sontdélivrés sur la base des quantités de carboneséquestré) aux pays qui parviennent à mainte-nir leurs émissions en dessous du seuil fixé ouqui séquestrent du carbone. Deux autres méca-nismes permettront aux pays signataires des’acquitter de leurs engagements de réductiondes émissions à moindre coût :● l’application conjointe entre pays de

l’Annexe I (AC) : accord bilatéral par lequelun pays finance des investissements deréduction d’émissions chez un partenaire enéchange de l’obtention de “crédits supplé-mentaires d’émissions“ ;

● le Mécanisme de développement propre (Mdp) : obtention de crédits supplémen-taires en mettant en œuvre des projets deréduction d’émissions dans les pays en voiede développement (non contraints par desobjectifs de réduction d’émissions).

Dans le cadre du Protocole de Kyoto, l’UnionEuropéenne s’est engagée à réduire de 8% sesémissions nettes de GES durant la période 2008-2012, par rapport à l’année de référence 1990.

Une directive européenne du 2 juillet 2003 ins-taure un système PEN entre pays de l’Unioneuropéenne (UE) : premier mécanisme multi-national d’échange de quotas d’émissions decarbone au monde, il commencera à fonction-ner en 2005 pour tous les États membres del’Union élargie. Ceux-ci doivent plafonner lesémissions de CO2 des entreprises à forteconsommation d’énergie (pour la France :10.000 aciéries, centrales électriques, raffineriesde pétrole, papeteries, usines de production deverre et cimenteries) en leur délivrant des quo-tas (quantité d’émissions dans l’atmosphèreautorisées). Les États membres devaient sou-mettre à la Commission leurs plans d’allocationdes quotas par secteur d’activité et par entre-prise avant avril 2004 (la France devait envoyerson plan définitif avant le 30 novembre 2004).

UNE PRISE EN COMPTE INSUFFISANTE DU RÔLE DES “PUITS DE CARBONE DESSOLS AGRICOLES” DANS LES ACCORDS INTERNATIONAUXET EUROPÉENSLes puits de carbone des sols ne sont que partiel-lement reconnus par le Protocole de Kyoto. Leurutilisation est soumise à des règles strictes.L’article 3.3 du traité autorise les pays de l’AnnexeI à inclure les activités liées aux forêts (boisement,déboisement, reboisement) dans le calcul de leursémissions, avec des contingents stricts attribuésaux pays signataires. Une variante prometteusesemble être l’agroforesterie (système de produc-tion combinant élevage, cultures et forêt).Les autres activités relatives à l’utilisation dessols, les changements de modes d’occupation dessols et de pratiques agricoles et sylvicoles(LULUCF : Land use, Land use change andForestry), telles que la gestion des forêts, des solsagricoles, des pâturages et la revégétalisation desols non forestiers, sont identifiées dans l’article3-4 du Protocole comme autre moyen de réduireles émissions de GES durant la période 2008-2012. Depuis la sixième Conférence des parties(Bonn 2001), les pays industrialisés sont autorisésà comptabiliser dans leur inventaire d’émissionsles flux issus des changements d’usages desterres. Le Protocole de Kyoto a prévu la créationd’un Fonds pour le carbone dans le secteurLULUCF, destiné à financer l’amélioration dessols, l’augmentation des rendements et les cul-tures de parcelles agroforestières.

18

3

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

ARROUAYS D.,BALESDENT J.,GERMON J.C., JAYET P.A.,SOUSSANA J.F. &STENGEL P. (2002),Contribution à la luttecontre l’effet de serre.Stocker du carbone dansles sols agricoles deFrance ? Rapport d’expertise, INRA,Paris, 330 p.

Conseil d’analyse économique (2003), Kyotoet l’économie de l’effet deserre. La documentationfrançaise, Paris, 89 p.

GIRAUD P.N. (2002) Effet de serre :modélisation économiqueet décision publique,Rapport du groupe présidépar Pierre-Noël GIRAUD,Commissariat Général duPlan, La documentationfrançaise, Paris, 319 p.

Groupe intergouvernementald’experts sur l’évolution duclimat (GIEC ou IPCC)(2001), Troisième rapportd’évaluation (TAR) :Les éléments scientifiques(GT I), Bilan 2001 deschangements climatiques :conséquences, adaptationet vulnérabilité (GT II),Bilan 2001 des change-ments climatiques :mesures d’atténuation (GT III).

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:26 Page 18

Lors de la COP 7 (septième conférence desParties, Marrakech, 2001), les activités desarticles 3.3 et 3.4 ont été reconnues comme éli-gibles dès la première période d’engagement(2008-2012) pour les pays de l’Annexe I lors-qu’elles ont commencé dès 1990. Toutefois, dif-férents plafonds ont été fixés pour la prise encompte de ces activités LULUCF :● au titre du MDP, seuls les projets de boisement

et de reboisement sont autorisés et ces acti-vités ne sont éligibles qu’à concurrence de1% des émissions annuelles (5% par périoded’engagement) d’un pays de l’Annexe I(Section K, Article 12) ;

● pour la première période d’engagement, les activités de gestion des forêts au titre de l’ar-ticle 3.4 seront plafonnées selon un montantdéfini par pays (par exemple, 0,88 MtC paran pour la France) ; en outre, un plafond de9 Mt de carbone par an a été fixé au titre deces activités, lorsque celles-ci compensentdes émissions nettes calculées selon l’article3.3 (déforestation excédant la reforestation :cas de l’Australie).

Les prévisions effectuées par les pays de l’Annexe Ipour la prise en compte des puits dans le Protocolede Kyoto sont rappelées dans le tableau 1.

La prise en compte des puits de carbone dessols par le Protocole est donc limitée, même si,comme l’ont souligné les experts de l’INRAceux-ci représentent le réservoir de surface leplus important. Par exemple, même si l’article12 concernant le MDP autorise les pays del’Annexe I à subventionner les puits de carbone

dans les pays en voie de développement, larevégétalisation des sols non forestiers n’estpas éligible au titre de ce mécanisme. Enfin, au niveau européen, la proposition de laCommission de juillet 2003 exclut les projets ACet MDP liés aux “puits de carbone“.

LA POLITIQUE FRANÇAISE : LE RESPECT DE L’OBLIGATION D’INVENTAIRE NATIONAL DES ÉMISSIONS DE GESAu titre de l’article 5.1 du Protocole de Kyoto,des inventaires nationaux des émissions nettesde GES doivent être réalisés périodiquement.Le Groupe intergouvernemental d’experts surle climat (GIEC) a élaboré une méthode d’in-ventaire et a produit une liste de recomman-dations sur les bonnes pratiques à suivre lors deces inventaires. En ce qui concerne le secteuragricole, la méthode retenue par le GIEC diffè-re selon les gaz. Les flux nets de N2O et de CH4

vers l’atmosphère sont inventoriés, de mêmeque les stocks de carbone (et non les flux deCO2) dans les forêts et dans les sols agricoles.Le calcul d’un flux de gaz à effet de serre estréalisé en multipliant un terme extensif d’acti-

vité (superficie ou effectif animal concerné) parun terme intensif, qui correspond à un facteurd’émissions par unité de surface. Les incerti-tudes sur ces deux types de facteurs sontimportantes dans le secteur agricole. En parti-culier, les incertitudes sur les émissions de N2Oà partir des sols agricoles seraient de deux

19

3

Tableau 1. Prise en compte

des puits de carbonedans le protocole

de Kyoto (d’après S. Gastaldo,Point sur les négocia-

tions de la COP 6 à Bonn, MATE,

document non publié).Convention :

sources >0, puits <0.

Pays Emissions Prévision des réductions d’émissions comptabilisables 1990 (MtC par an)

tous gaz

(MtC par an Article 3.3 Article 3.4 Article 3.4 Article 12UTCF inclus) Déboisements Gestion Activités (Re)boisement

et reboisements forestière agricoles dans le MDP

Union Européenne 1157 1,3 -8,5 -0,3 -11,6dont France 151 1,7 -2,6 -1,5

Fédération de Russie 828 8,2 -25,8 -8,3Canada 163 4,4 -16,4 -4,6 -1,6Japon 335 0,7 -13,7 -3,3

Etats-Unis (pour mémoire) 1654 7,2 -35,2 -10,4 -16,5Reste de l’Ombrelle 415 -7,7 -1,7 -2,2 -4,1

Reste Europe Centrale/Est 357 -4,5 -3,5Reste Europe de l’Ouest 15 -0 ,5 -0,1 -0,1

Total Annexe I(hors Etats-Unis) 3271 +6,8 -71,2 -7,1 32,7

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:26 Page 19

ordres de magnitude. Les incertitudes liées àl’article 3.4 ne sont pas encore connues. Par l’accord passé fin mai 2002 entre les paysde l’Union Européenne, la France s’est engagéeà maintenir ses émissions de GES à leur niveaude 1990. Cet objectif de simple stabilisation,retenu en raison d’émissions déjà faibles (duesnotamment à l’importance de l’électro-nucléai-re), imposera tout de même de réaliser desefforts pour compenser les émissions crois-santes dans des secteurs comme les transports.L’inventaire réalisé par le Centre interprofes-sionnel technique d’étude de la pollutionatmosphérique (CITEPA) en 2001 indique queles émissions de gaz à effet de serre françaisesse situent pour l’année 2000 à 3,2% au-dessousde celles de 1990 en incluant les puits de car-bone (forêts) selon les règles UNFCCC, mais à1,7% au-dessus sans les puits de carbone. Leniveau d’émissions net de dioxyde de carboneest en 2000 supérieur de 2% à celui de 1990, lesrejets de méthane sont en recul de près de10%, les émissions d’oxyde nitreux en diminu-tion de 16%. A titre de comparaison, pour l’an-née de référence 1990, les émissions de l’en-semble de l’Europe (secteur de l’Utilisation desTerres, ses Changements, et Forêt – UTCF –inclus) atteignaient 1157 Mt équivalents carbo-ne et celles des USA, 1654. La France contri-buait donc pour 3% au total des émissions despays de l’Annexe I (en incluant les Etats-Unis). La contribution des différents secteurs auxémissions françaises de GES est illustrée par lafigure 1 : le secteur agricole représenterait16% des émissions de GES (sans prendre encompte les variations de stocks de carbone dusol). En particulier, le secteur agricole contribuefortement aux émissions de N2O (à partir desengrais minéraux et organiques et des déjec-tions animales) et de CH4 (émis par la fermen-tation entérique des ruminants domestiques).

Comme l’indique le tableau 1, la prise en comp-te des puits dans le Protocole de Kyoto estdominée à la fois par les activités de gestionforestière (article 3.4) et par le boisement ou lereboisement via le MDP (article 12). Les activi-tés agricoles (au titre de l’article 3.4) sont peu,ou pas, prises en compte pour la premièrepériode d’engagement. La France, en particu-lier, qui prévoit de faire porter l’essentiel deson effort sur la gestion forestière et sur desboisements ou reboisements dans des Pays enDéveloppement, n’a pas inscrit à ce jour d’acti-vités agricoles dans ses projets de réductionsd’émissions par des activités UTCF.

CONCLUSIONLes enjeux de la séquestration du carbonedans les sols ne semblent pas encore êtrecompris par les décideurs publics ni être prisen compte dans les politiques internationaleset européennes de lutte contre l’effet deserre. La France de son côté, s’en tient à sondevoir d’inventaire des émissions de GES, enfinançant toutefois la recherche sur le rôledes sols dans le cycle du carbone (programmeGESSOL).Signalons toutefois que la CommissionEuropéenne a récemment adopté une com-munication sur les sols (le 16 avril 2002, Réf.COM 2002 179 final), afin de préparer unedirective sur ce thème. La section 3.2 de cettecommunication concerne le déclin de lamatière organique de certains sols cultivés,notamment dans le sud de l’Europe et dans lesrégions de culture intensive, qui crée des pro-blèmes de baisse de la fertilité et d’érosiondes sols. Ce texte mentionne le cycle global ducarbone, ainsi que les enjeux internationauxconcernant la séquestration du carbone dansles sols.

20

3

Figure 1. Part relative des

activités dans les émissions de gaz à

effet de serre en Franceet leur croissance à

l’horizon 2010 en l’absence de mesures

nouvelles. Chiffres de la Mission

Interministérielle del’Effet de Serre, MIES.

SITES INTERNETwww.grida.no/climate/ipccwww.inra.fr/sia2003.effet-serre.htmlwww.rac-f.orgwww.unfccc.int

CONTACTSylvie MAUBOURGUET

e-mail :[email protected]

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:27 Page 20

L a Guadeloupe et la Martinique ontbeaucoup de points communs sur leplan du milieu physique. Ce sont

toutes deux des îles montagneuses volca-niques, escarpées en tout ou partie, de dimen-sion exiguë : moins de 70 km de longueurmaximale.

1. CLIMATCes îles, tropicales dans les tranches 10-20° delatitude, ont une température moyenneannuelle de 24 à 26°C au niveau de la mer, ungradient altitudinal décroissant d’entre 2/3 et3/4 °C par 100 m, une faible amplitude de tem-pérature, que ce soit entre le jour et la nuit ouentre saisons (moins de 8 degrés). Elles s’interposent dans les alizés, vents tou-jours humides circulant d’est en ouest avectrois conséquences :● La répartition spatiale de la pluviométrie est

sous la dépendance de l’effet orographiqueet de l’effet de fœhn : elle s’accroît sur lesversants de 1 m à plus de 10 m d’eau par anlorsqu’on s’élève et que les masses d’airhumide se refroidissent ; elle décroît rapide-ment lorsqu’on redescend sur les versantsouest, pour atteindre la pluviométrie ordi-naire sur l’océan, d’environ 1 à 1,1 m enannée moyenne.

● L’exiguïté n’autorisant pas d’effet decontinentalité, il n’y a pas de zone aride nide dessèchement fort de l’air ; en consé-quence, l’évapotranspiration potentielle(ETP) ne dépasse pas 1,8 m/an, et 5 mm/jpour les périodes les moins pluvieuses ; elleest sous la dépendance principalement durayonnement global, décroissant avec l’alti-tude à cause de la nébulosité, et de la baissede température. De ce fait, il existe partout

au moins une saison humide de plusieursmois, au cours desquels le bilan hydrique estexcédentaire, et où apparaissent un draina-ge et/ou un ruissellement importants.

● Les pluies thermoconvectives (orages tropicaux)complètent les pluies orographiques : ellessont de forte intensité et leurs fréquence etvolume varient peu avec l’altitude ; enconséquence les pluies potentiellementérosives sont distribuées à toutes les alti-tudes.

Elles sont toutes deux exposées au risque cyclo-nique (tempêtes et ouragans tropicaux), avecdes vents destructeurs des cultures, associéssouvent (mais pas toujours) à des pluies deforte durée et intensité.

2. NATURE MINÉRALE DES SOLSCes îles sont d’origine volcanique et de compo-sition plus souvent andésitique que basaltique.En conséquence, même sur les plateaux cal-caires de la Guadeloupe, la roche mère des solsest toujours andésitique ou basaltique : tousses minéraux sont altérables, les sols évoluéssont tous constitués de minéraux secondairesfins, d’argiles au sens large.Le type de minéral “argileux“ prédominantdépend de la pluviométrie et de l’âge dessols : plus la pluviométrie est élevée, plus lasilice et les bases sont évacuées lors de l’alté-ration, plus les “argiles“ qui se forment sontpauvres en silice et plus les sols sont acides.C’est ainsi que l’on trouve dans les deux îlesdes sols riches en minéraux secondaires, ayantdes propriétés très différentes selon leursnatures, sous la dépendance de la pluviomé-trie et de l’âge des sols, conformément auschéma suivant :

21

4

Yves-Marie CABIDOCHE 1

Eric BLANCHART 2

Dominique ARROUAYS 3

Emmanuel GROLLEAUX 3

Sébastien LEHMANN 3

François COLMET-DAAGE 4

1 INRA, URAgropédoclimatique dela Zone Caraïbe,Domaine Duclos,97170 Petit-Bourg

2 IRD, LaboratoireMatière Organique desSols Tropicaux,BP 64501, 34394Montpellier cedex 5

3 INRA, US Infosol,Ardon, 45160, Olivet

4 L’Audillière,45510 Vienne en Val

Tableau 1. Logique de distribution

des sols et de leursminéraux “argileux”

dans les petites Antilles(ETP = évapotranspira-

tion potentielle).

Les Petites Antilles : des climats variés, des sols de natures contrastées et de fertilités inégales sur des espaces restreints

Les Petites Antilles : des climats variés, des sols de natures contrastées et de fertilités inégales sur des espaces restreints

Sols jeunes (103-104 ans) Sols anciens (105-106 ans)Minéraux primaires sableux Minéraux primaires disparus

Pluviométrie < ETP Sol vertique à smectite Vertisol à smectite(1,3 à 1,5 m/an)

ETP < Pluviométrie < 2 ETP Sol brun à halloysite Sol fersiallitique ou ferrisol à smectite et halloysite

Pluviométrie > 2 ETP Andosol à allophane Sol ferrallitique à halloysite et oxydes de Fe et Al

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:28 Page 21

En conséquence, les propriétés des sols, étagésdans le paysage, varient sur de courtes dis-tances (figure 1). Ces îles offrent un condenséde l’ensemble des propriétés et contraintes dessols de la zone intertropicale. Leur usage agri-cole requiert des systèmes de culture à adapterpour chaque couple sol-climat, à une échellemicro-régionale. La carte des sols deMartinique est présentée dans la figure 2.

3. PROPRIÉTÉS HYDRODYNAMIQUESDES SOLS, TRANSFERTS DE SOLU-TÉS ET ÉROSION SUPERFICIELLELa conséquence hydrodynamique principale dela distribution des types d’argiles concerne l’in-filtrabilité à saturation : 1 mm/j pour les verti-sols, 10 à 50 mm/h sur les sols bruns, plus de 50mm/h pour les andosols et sols ferrallitiques.Elle augmente avec l’accroissement pluviomé-trique, en raison de l’organisation des diffé-rents minéraux argileux qui se forment : deszones sèches aux zones humides, on passe dematrices minérales réticulaires cellulaires(smectites) à des matrices micro-agrégées (hal-loysite), puis à des matrices macro-agrégéesfloconneuses (allophanes). Ainsi, plus les excèsd’eau climatiques sont faibles, plus faible est lafraction drainante par rapport à la fractionruisselante. Donc pour une même quantité desoluté disponible (par exemple nitrate) dans unsol, la concentration dans le flux drainant serabeaucoup plus élevée dans les régions sèchesque dans les régions humides. Or c’est le fluxdrainant qui alimente les nappes, et dans leszones les plus sèches elles sont précieuses.Les sols des zones sèches, riches en argiles gon-flantes, échappent aux lois classiques de l’hy-drodynamique (loi de Darcy) : leur retrait pro-voque la formation de macrofissures, qui peu-vent être le siège d’infiltration rapide de l’eauqui ne peut s’infiltrer dans les prismes qui lesséparent, et ce bien avant que la porosité struc-turale des prismes ne soit remplie (Cabidocheet al., 2000). La conjonction d’une fertilisationrécente, surtout en surface, et d’une pluie d’in-tensité courante aboutit immédiatement à uneélution en forte concentration vers la nappe.La conductivité hydraulique en non saturé estelle aussi dépendante du type d’argile : dansles vertisols, elle est tellement faible que l’onpeut estimer que l’eau et les solutés exploitéspar les racines sont limités au voisinage centi-métrique de ces dernières ; au contraire dansles andosols et sols ferrallitiques, des remon-tées capillaires sur plusieurs mètres peuvent

contribuer à alimenter les racines. En consé-quence, les nitrates entraînés au-delà de lazone enracinée ne peuvent plus être immobili-sés dans les vertisols ; au contraire, un lessiva-ge associé à une courte période de pluies excé-dentaires peut être ensuite ré-immobilisé dansles sols ferrallitiques et andosols.Le risque d’érosion superficielle, sur les solsnaturels, suit un schéma contre-intuitif: il estd’autant plus faible que la pluviométrieannuelle augmente. En effet :● les sols neutres (zones sèches) sont plus

dispersables que les sols acides (zoneshumides), surtout si leur garniture en ionsadsorbés sur les argiles est magnésienne etsodique, cations peu floculants en particulierdans les vertisols du sud de la Martinique ;

● l’infiltrabilité à saturation augmente ;● les pluies intenses ne sont guère moins

fréquentes, ni moins abondantes, dans lesrégions sèches que dans les régions humides.

L’érodibilité maximale affecte ainsi les sols ver-tiques sur roches volcaniques : bas de la côtesous-le-vent en Guadeloupe, bas de la côtecaraïbe en Martinique, vertisols du sud de laMartinique (Blanchart et al., 2000) ; les ando-sols et sols ferrallitiques (et ferrisols) sont apriori moins érodibles.Cependant, la richesse en “argiles“ fait quetous les sols sont déformables en deçà d’unecertaine teneur en eau : élevée pour les sols àargiles gonflantes, plus basse pour les sols àhalloysite ou à allophane. La micro-fissurationqui apparaît dans le deuxième cas permet laformation d’agrégats millimétriques quideviennent aisément transportables par le ruis-sellement. Le schéma de risque d’érosion estalors modifié, la surface d’un sol ferrallitiqueou d’un andosol maintenu nu en saison sèchedevient érodible sur des surfaces labourées, enforte pente et dont la perméabilité a été dimi-nuée au fond du labour.Les sols sableux sont les plus jeunes : ils sontbien représentés sur les cendres et poncesdes flancs de la Montagne Pelée. Très fil-trants, ils sont cependant fortement suscep-tibles d’érosion par leur structure particulai-re et leur richesse en sables allégés par desbulles (ponces et cendres). Ces cendres sontencore présentes à faible profondeur sousdes andosols jeunes ; ainsi, le décapage parérosion mécanique sèche, ou les retourne-ments trop profonds peuvent les faire affleu-rer, faisant apparaître de l’érosion superfi-cielle dans des sols peu érodibles avantanthropisation.

22

4

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

COLMET-DAAGE F. &LAGACHE P. (1965),Caractéristiques dequelques groupes de solsdérivés de roches volca-niques aux AntillesFrançaises. Cahiers ORS-TOM, Série Pédologie, 3 :91-121.

COLMET-DAAGE F.,GAUTHEYROU J. &GAUTHEYROU M. (1967),Sélection de profils desAntilles avec rattachementà la classification de lacarte des sols des Antillesau 1/20.000 (3 volumes).ORSTOM Antilles.

BLANCHART E.,ACHOUAK W.,ALBRECHT A.,BARAKAT M., BELLIER G.,CABIDOCHE Y.M.,HARTMANN C., HEULIN T.,LARRÉ-LARROUY C.,LAURENT J.Y., MAHIEU M.,THOMAS F., VILLEMIN G.& WATTEAU F. (2000),Déterminants biologiquesde l’agrégation des verti-sols des Petites Antilles.Conséquences sur l’érodi-bilité des sols. Étude etGestion des Sols, 7 :309-328.

CABIDOCHE Y.M.,GUILLAUME P.,HARTMANN C., RUY S.,BLANCHART E.,ALBRECHT A., MAHIEU M.,ACHOUAK W., HEULIN T.,VILLEMIN G., WATTEAU F.& BELLIER G. (2000),Déterminants biologiquesdu système poral des verti-sols cultivés des PetitesAntilles. Conséquences surla disponibilité de l’eau dusol pour les plantes. Étudeet Gestion des Sols, 7 :329-352.

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:28 Page 22

23

4

Figure 1. L’arc insulaire des

Petites Antilles : des solsvariés et types. Exemple de la

Guadeloupe.

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:28 Page 23

4. FERTILITÉ DES SOLS, IMPORTANCE DU STOCK ORGANIQUELes caractéristiques climatiques confèrent auxdeux îles un potentiel permanent de produc-tivité végétale élevé au point de vue de laphotosynthèse et de la température. Encorefaut-il que l’alimentation en eau et la fourni-ture de nutriments puissent “suivre“. La pre-mière est liée à la longueur de la saisonsèche, la deuxième à la qualité minérale dessols, sauf pour l’azote dont l’abondance et ladisponibilité seront dépendantes du stockorganique.La fertilité minérale des sols est distribuée demanière très inégale, car l’appauvrissementen silice lors de la formation des minérauxsecondaires croissant avec la pluviométrie,s’accompagne d’un appauvrissement enpotassium, calcium, magnésium. Ainsi les solsles plus acides (sols ferrallitiques, andosolsanciens, sols fersiallitiques anciens) ont unefertilité minérale fragile, qui peut même s’ac-compagner d’une toxicité aluminique pourcertaines plantes. Au contraire, les vertisols

des zones sèches ont une fertilité minéraleélevée. Par ailleurs, tant que les sols sontjeunes, ils conservent des minéraux primairesdont l’altération en cours fournit des miné-raux disponibles.La fourniture d’azote est en revanche étroite-ment conditionnée par l’état du stock orga-nique des sols : même si l’on apporte de l’en-grais, la moitié de l’azote absorbé par lesplantes provient de la minéralisation du stockorganique du sol. Le maintien d’un stock orga-nique élevé est par ailleurs la seule manière dediminuer la dispersabilité des vertisols, deconférer une capacité d’échange cationiquenon pénalisante dans les sols ferrallitiques,d’éviter les fuites de potassium dans les ando-sols et, pour tous les sols de conserver la bio-disponibilité du phosphore.La gestion du stock organique n’est pas chosesimple car quatre facteurs interviennent :● la nature et l’abondance des minéraux

secondaires : plus ils sont fins et capables decréer des liaisons chimiques avec la matièreorganique, plus celle-ci sera stabilisée dans lesol ;

24

4

La réalisation du projet GESSOL a été l’occasiond’informatiser la carte des sols de la Martinique, édi-table au 1/100 000e, et sa base de données au formatDONESOL.Levée par F. Colmet-Daage dans les années 1960 etpubliée en 1965 (Colmet-Daage & Lagache), elle estdésormais disponible sous forme numérique au formatArcGis (ESRI). Elle contient des informations surfa-ciques, l’ensemble des unités de sols décrites par lepédologue de l’IRD et des informations ponctuellessur les profils de sols ayant fait l’objet d’analyses chi-miques et physiques (Colmet-Daage et al., 1967). Cescouches d’informations étant géoréférencées, il estaisé de les croiser avec d’autres sources d’informa-tions géographiques pour en exploiter les données.Elles sont par ailleurs liées à une base de donnéessémantiques DONESOL (INRA) qui renseignechaque polygone de la carte sur son contenu comme letype de sol, sa profondeur, sa texture, sa minéralogie,son pH, etc. De la même façon, les profils sont décritstrès précisément ainsi que les résultats de leurs ana-lyses.La carte distingue neuf grands ensembles de sols enMartinique : les andosols, les vitrisols, les sols brun-

rouille à halloysite, les ferrisols, les sols fersialli-tiques, les vertisols, les sols vertiques (à régimehudique et mollisols), les alluvions (continentales etmarines) et les colluvions.

La pluviométrie et l’âge des sols jouant un rôle pré-pondérant sur leur répartition, nous distinguons toutd’abord les andosols ou sols à allophanes qui sontissus de tufs, cendres et ponces volcaniques sous unclimat extrêmement arrosé. Ils bordent la MontagnePelée et les Pitons du Carbet. Plus à l’est, sur desmatériaux plus anciens et moins arrosés, les andosolss’enrichissent en gibbsite.

On distingue ensuite sur le pourtour de la côte nord del’île, du Carbet jusqu’au Marigot, les sols peu évoluéssur cendres ou vitrisols. Ce sont des sols sableux,humifères, sans cohésion allophanique.Puis, comme une ceinture autour des andosols, les solsbrun-rouille à halloysite qui dérivent directement del’évolution des andosols sous un climat encore trèshumide.Le centre de l’île, plus ancien, se découpe en troisensembles d’ouest en est. Le pourtour intérieur de la

LA CARTE INFORMATISÉE DES SOLS DE LA MARTINIQUE

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:28 Page 24

● l’importance des restitutions organiques, liée à la productivité végétale ;

● l’importance de la minéralisation de la matière organique : elle est réglée par l’im-pact des conditions pédoclimatiques sur l’ac-tivité de la microflore ;

● l’importance de l’érosion superficielle : ce sont les couches de surface, les plus riches enmatière organique, qui sont arrachées lespremières.

Si le premier correspond à une capacité intrin-sèque d’un sol à conserver de la matière orga-nique, les trois derniers sont grandementmanipulables par les pratiques culturales : descultures pérennes et couvrantes fertiliséesauront tendance à accroître le stock, des cul-tures à cycle court peu couvrantes sur sol lour-dement travaillé feront baisser le stock, enaccélérant la minéralisation, voire en accélé-rant l’érosion.

25

4

CONTACTYves-Marie Cabidochee-mail :[email protected]

baie de Fort de France est essentiellement constituéd’alluvions marines. Les ferrisols et sols fersialli-tiques occupent la partie centrale et sont souvent jux-taposés, les seconds étant plus riches en argiles detype smectite.

Toute la partie sud de la Martinique se caractérise parses vertisols qui peuvent prendre diverses formesselon l’altitude qui influe directement sur le climatcomme les mollisols (ou vertisols en région humide eten altitude) et des vertisols à régime hudique en régionmoyennement humide, à faible altitude. La nature dumatériau parental explique par exemple la présence devertisols calcimorphes dans la pointe sud vers SainteAnne.

Les vertisols au sens propre, se distinguent en plu-sieurs classes selon leur profondeur qui varie selon laposition topographique (généralement tronqués sur lespentes et plus profonds dans les vallons).Enfin, dans les vallées étroites ou en bas de pentes, ondistingue les colluvions qui sont tous les sols remaniéssur les versants les plus raides par colluvionnement ouglissements de terrains.

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:28 Page 25

he

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:28 Page 26

Figure 1. Articulation des feuilles

individuelles

Figure 2. Image digitale brute et

détails de la feuille 2 de la carte des cultures

1969/1970.

INTRODUCTION

À la fin des années 70 etjusqu’au début desannées 80, des cartes trèsprécises des cultures etd’utilisation du sol àl’échelle du 20.000e ontété établies par le Bureaudes sols du Centre desAntilles de l’ORSTOM(actuel IRD), en collabora-tion avec la DirectionDépartementale del’Agriculture. Ces cartesont été publiées sous laforme d’une mosaïque de24 feuilles individuelles(figure 1). Deux de cesmosaïques (l’une corres-pondant à la période1969/1970 et l’autre à lapériode 1979/1980) ontété transformées encartes vectorisées pour enpermettre une meilleureétude.

Paradoxalement, le mau-vais état de conservationdes calques originaux apermis une numérisation

relativement aisée. En effet, les calques jaunispar le temps présentent une coloration brunjaunâtre plus ou moins accentuée du fondtopographique, alors que les tracés effectués àl’encre de Chine sont restés parfaitement noirs(figures 2 et 3).

LES CARTES DE L’OCCUPATION DES SOLS Diverses étapes (filtres de couleurs, correc-tions, information de la légende…) ont éténécessaires à l’obtention des cartes vectori-sées et correctement géoréférencées. Leslégendes originales sont très complexes, il ya ainsi 311 codes d’usage différents pour lacarte de 1969/1970 et 199 pour celles de1979/1980. Une légende simplifiée a doncété proposée (tableau 1) pour l’établisse-ment des cartes définitives et leurs ana-lyses.

27

5

Martial BERNOUX 1

Eric BLANCHART 1

Corinne VENKATAPEN 2

Norberto C. NORONHA 3

Maurice BURAC 4

François COLMET-DAAGE 5

Claude SCHERER 6

1 IRD, LaboratoireMatière Organique desSols Tropicaux,BP 64501,34394 Montpellier cedex 5

2 PRAM / IRD,Laboratoire dePédologie, BP 8006,97259 Fort-de-Francecedex - UAG

3 Université de SãoPaulo, CENA, Lab. deBiogéochimie de l’envi-ronnement, CP96,13400-970 Piracicaba,SP, Brésil

4 UAG, Groupe deRecherche GEODE-Caraïbes,Campus Universitairede Schœlcher

5 L’Audillière,45510 Vienne en Val

6 PRAM / CemagrefMartinique, Unité derecherche «Agricultureet espace insulaire»,Quartier Petit Morne,BP 214,97285 Lamentin Cedex 2 – UAG-GEODE

Evolution de l’occupation des sols en MartiniqueEvolution de l’occupation des sols en Martinique

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:29 Page 27

RÉSULTATS PRÉLIMINAIRES : VARIATIONS DES SURFACES CULTIVÉES EN 1970 ET 1980Les résultats pour les deux cartes sont donnés dans le tableau 2

28

5

Tableau 1. Légende simplifiée del’usage des terres

Tableau 2. Variation des surfacescultivées en 1970 et 1980

Légende Description

Ananas AnanasBananeraies BananeraiesBananeraies mixtes Bananeraies mixtes avec présence d´autres cultures (cannes à sucre, jardins caraïbes...)

ou de grands arbres isolés ou groupésBroussailles sèches Broussailles de régions sèches avec ou sans présence de grands arbres isolés ou groupésCannes à sucre Cannes à sucreCultures vivrières Cultures vivrières avec ou sans présence de grands arbres isolés ou groupésCultures vivrières mixtes Cultures vivrières avec présence d´autres cultures (cannes à sucre, jardins caraïbes...)Forêts humides Forêts humides généralement naturellesForêts sèches Petites forêts sèches avec ou sans présence de grands arbres isolés ou groupésFriches Friches (pâturées ou non), avec ou sans présence d´autres cultures

(cannes à sucre, jardins caraïbes...)Jardins caraïbes Jardins Caraïbes avec ou sans présence de grands arbres isolés ou groupésMaraîchages Production de fruits et légumes pour exportation (aubergines, tabac...)Marécages & mangroves Marécages sales ou saumâtres, palétuviersSavanes humides Savanes ou Prairies pâturées en régions humides avec ou sans présence de grands arbres isolés

ou groupésSavanes humides mixtes Savanes ou Prairies pâturées en régions humides avec présence d´autres cultures

(cannes à sucre, jardins caraïbes...)Savanes sèches Savanes ou Prairies pâturées en régions relativement sèchesSavanes sèches arbustives Savanes, ou Prairies pâturées en régions relativement sèches, avec ou sans présence soit de grands

arbres isolés ou groupés, soit une association avec des petites forêts sèches, soit des broussaillesSavanes sèches mixtes Savanes, ou Prairies pâturées en régions relativement sèches, avec présence d´autres cultures

(cannes à sucre, jardins caraïbes...)Autres Non-végétation (zones urbaines, routes, plages, carrières, non classé...)

Occupation Superficie 1969/70 (ha) Superficie1979/80 (ha) Variation (%)

Ananas 1262 687 -46Bananeraies 8934 9189 3Bananeraies mixtes 2429 3393 40Broussailles sèches 2563 2127 -17Cannes à sucre 9079 5967 -34Cultures vivrières 1374 1178 -14Cultures vivrières mixtes 1850 1817 -2Forêts humides 24551 24600 0Forêts sèches 6010 5883 -2Friches 7714 3578 -54Jardins Caraïbes 4426 8212 86Maraîchages 756 106 -86Marécages & mangroves 855 2362 176Savanes humides 10541 11558 10Savanes humides mixtes 5090 6689 31Savanes sèches 5361 7651 43Savanes sèches arbustives 9089 8065 -11Savanes sèches mixtes 1504 2192 46Autres (zones urbaines, 4448 5224 17routes, plages, non classé...)Total 107835 110477 2

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:29 Page 28

La surface totale s’établit à 107.835 ha pour1969/70 (figure 2) et 110.477 ha pour 1979/80(figure 4). Ces valeurs sont proches de celle de110.000 ha rapportée comme étant la surfacedépartementale par les statistiques officielles(Statistique Agricole Annuelle et Agreste). Ladifférence est due principalement au tracé descontours de l’île, principalement en ce quiconcerne les plages, les mangroves et les petitsîlets.La différence la plus importante pour la cartede 1969/70 peut être attribuée à la faiblesuperficie occupée par les mangroves, moins de900 ha, alors qu’elles représentent plus de2300 ha en 1979/80. Lors de la superpositiondes deux cartes, 1771 ha de mangroves de lacarte de 1979/80 ne correspondent à aucunecatégorie sur celle de 1969/70.

Certains usages sont relativement stables ensurface totale, c’est le cas des forêts quireprésentent l’usage dominant avec environ

24.600 ha de forêts humides et 5900 ha deforêts sèches. Les bananeraies demeurentégalement relativement stables avec environ9000 ha. D’autres usages varient beaucoup,ce peut être soit des variations réelles, soit unartefact dû à des attributions dans une caté-gories au détriment d’une autre. Cette der-nière hypothèse est la plus probable pour lesdifférentes catégories de savanes et celle dela friche. Leur total est de 39.299 ha et 39.733ha respectivement pour les cartes de 1969/70et 1979/80, soit une variation d’environ 1%.Alors que ces catégories varient individuelle-ment entre 11 et 54% en valeur absolue. Parcontre, les variations rencontrées pour lacanne à sucre semblent plutôt liées à unevéritable récession du secteur cannier aucours de cette décennie.

Les statistiques publiées par Agreste donnentune superficie cultivée en canne à sucre de5520 ha en 1981 (proche de la valeur obte-

29

5

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUESAGRESTE Martinique (1981).Statistiques Agricoles Annuelles.Ed. Ministère de l’Agriculture etde la Pêche.

AGRESTE Martinique (1989).Statistiques Agricoles Annuelles.Ed. Ministère de l’Agriculture etde la Pêche.

BERNOUX M., VENKATAPEN C.,BLANCHART, NORONHA N.C.(2003). Carte digitale de l´occu-pation des sols de la Martinique1969-1970 d´après les calquesoriginaux de la carte des culturesau 1/20 000e de la Martinique(1969-1970) établies sous ladirection de F. COLMET-DAAGE. Fichier électronique usage1970_v1- version 1 du 19/02/2003.

BERNOUX M., VENKATAPEN C.,BLANCHART E., NORONHA N.C.(2003). Carte digitale de l´occu-pation des sols de la Martinique1979-1980 d´après les calquesoriginaux de la carte des culturesau 1/20 000e de la Martinique(1979-1980) établies sous ladirection de F. COLMET-DAAGE.Fichier électroniqueusage1980_v1- version 1 du 19/02/2003.

VENKATAPEN C. (à paraître).Etudes des déterminants géogra-phiques et spatialisation desstocks de carbone des sols de laMartinique. Thèse de Doctorat.Université des Antilles et de laGuyane.

Figure 3. Carte d’utilisation

des terres en 1969/1970avec la légende simplifiée.

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:29 Page 29

nue pour la carte de 1979/80) et de3084 ha en 1989, illustrant le déclin dece secteur entre 1970 et 1990. Lasuperposition des cartes montrequ’environ 60.000 ha n’ont pas vu leurusage changé entre 1970 et 1980(figure 5). Les zones où les usages sontinchangés entre 1970 et 1980 sontreprésentées en bleu. Les forêts sont envert et les villes en noir.

CONCLUSIONCes cartes fournissent une base très utileà la compréhension de l’évolution del’occupation des sols entre 1970 et 1980.De nombreuses applications (carte derisque de pollution par exemple) etétudes (études statistiques par commu-ne, par type de sol…) sont rendues pos-sibles de par le format vectoriel de cescartes.

30

5

CONTACTMartial BERNOUX

e-mail :[email protected]

Figure 5. Carte de la variationdes surfaces cultivées en 1970 et 1980

Figure 4. Carte d’utilisation des terres en 1979/1980avec la légende simplifiée.

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:29 Page 30

31

INTRODUCTIONL’agriculture des Antilles Françaises connaîtdepuis plusieurs années de profonds boulever-sements liés à la nécessité de trouver des tech-niques présentant un impact environnementalrelativement faible. En effet, les techniques decultures conventionnelles présentent, dans denombreux cas, des risques de pollution (pollu-tion par le chlordécone, envasement des baiesliés à l’érosion…) ou de dégradation peu oudifficilement réversibles. Pour de nombreuxsystèmes de culture, des alternatives de gestionont été proposées par la recherche ; elles méri-tent d’être étudiées du point de vue du stocka-ge du carbone.

1. CAS DES SYSTÈMES BANANIERS

1.a ROTATIONS (MARTINIQUE)A la Martinique, les systèmes bananiers sontgénéralement situés sur les sols brun-rouille àhalloysite (côte Nord-Atlantique) (cf. carte dessystèmes de culture). Depuis plusieurs années,le CIRAD teste de nouveaux systèmes de cultu-re : bananeraies pérennes, bananeraies inten-sives (avec replantations fréquentes) et bana-neraies en rotation avec la canne à sucre oul’ananas. Les stocks de carbone ont été mesuréssous bananeraies pérennes et au bout de deuxans de rotation, avec canne à sucre ou ananas.Sur ces situations expérimentales, des parcellesd’érosion et des lysimètres ont été installésdans le but de suivre les pertes en carbone parérosion, ruissellement et drainage. Des bilansde carbone à la parcelle ont ainsi pu être cal-culés. Les principales conclusions de cette étude sontque les stocks de C ne varient pas significative-ment entre les traitements (bien qu’une légèreaugmentation soit observée au bout de deuxans sous canne à sucre), excepté dans les par-celles “sol nu“ où les stocks ont diminué de 2 à4 Mg C ha-1 an-1. Les pertes en C sont :● relativement importantes et principalement

sous une forme solide (carbone dans lesagrégats de sol) dans les traitements “solnu“ (sans végétation) (baisse de 1,3 à 3,0 MgC ha-1 an-1),

● intermédiaires (surtout sous forme solide)

sous ananas billonné (0,35 Mg C ha-1 an-1),● faibles (surtout sous forme dissoute – carbone

soluble) sous canne à sucre (0,043 à 0,047 MgC ha-1 an-1), ananas à plat et paillé (0,045 MgC ha-1 an-1) et bananeraies (0,05 à 0,055 MgC ha-1 an-1).

Ces résultats soulignent l’importance du paillispour réduire l’érosion. Le calcul des bilans decarbone a permis de déduire les pertes en C parminéralisation. Ces pertes (> 5 Mg C ha-1 an-1)étaient beaucoup plus importantes que cellesdues à l’érosion et au drainage dans les sys-tèmes cultivés. À l’inverse, sous sol nu, lespertes en C par minéralisation (2,40 Mg C ha-1

an-1) étaient aussi importantes que les pertespar érosion + drainage.

1.b SYSTÈMES BANANIERS D’ALTITUDE (GUADELOUPE)

En Guadeloupe, la diversité des systèmes deculture bananiers d’altitude a été exploitéepour qualifier leur rôle séquestrateur du carbo-ne (Clermont-Dauphin et al., 2004) : entre unpôle de bananeraie pérenne (exploitation desrejets des pieds mères de cycle en cycle), sansintrant, et un pôle de bananeraie intensive(replantation de plants in vitro tous les troisans avec travail du sol, fertilisation N, P, K, Mgexcédent les besoins, chaulage fréquent au cal-caire broyé et à la dolomie, utilisation massivede pesticides), tous les intermédiaires ont puêtre repérés selon trois classes d’intensité de 0à 2 pour chaque variable : travail du sol (T),application de fertilisants s.l., application denématicides-insecticides. Ces systèmes de cultu-re sont développés sur des andosols à allo-phanes ou sols bruns andiques (nitisols selonFAO) à halloysite prédominante et allophaneminoritaire.Le stockage du carbone des bananeraiespérennes sur andosol représente 70 à 180 MgC ha-1 sur 30 cm, soit des valeurs excédent par-fois largement les stocks de forêts primaires (70à 90 Mg C ha-1). Sous les mêmes occupations,les sols bruns andiques comportent 60 à 110Mg C ha-1. Pour chacun des sols, les valeursminimales ont été enregistrées pour des solstravaillés tous les trois ans, respectivement 60

Eric BLANCHART 1

Yves-Marie CABIDOCHE 2

Jorge SIERRA 2

Corinne VENKATAPEN 3

Christian LANGLAIS 4

Raphaël ACHARD 4

1 IRD, LaboratoireMatière Organique desSols Tropicaux,BP 64501,34394 Montpellier cedex 5

2 INRA, URAgropédoclimatique dela Zone Caraïbe,Domaine Duclos,97170 Petit-Bourg

3 PRAM / IRD,Laboratoire dePédologie, BP 8006,97259 Fort-de-Francecedex – UAG-GEODE

4 PRAM / CIRAD,BP 214 97285 Le Lamentin.

Stocks de carbone dans les sols pour différents agrosystèmes des Petites AntillesStocks de carbone dans les sols pour différents agrosystèmes des Petites Antilles

6

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:31 Page 31

et 50 Mg C ha-1. Les cultures bananièrespérennes, couvrantes et restituant une impor-tante biomasse au sol, apparaissent commefavorisant la séquestration du carbone.Dans le détail, le niveau de stock apparaîtconditionné par l’abondance de l’allophane,

mais aussi relié à l’état des charges variables, iciexprimé par la différence entre le pHH2O et lepHKCl (figure 1). L’état des charges est condi-tionné par le pH, et la teneur en carbone dessols (un modèle unique a été défini pour lesandosols). Le pH est fortement dépendant dela teneur en calcium échangeable, et indépen-dant de celle en potassium. Il apparaît, sur l’ensemble des andosols, unerelation croissante entre l’état des chargesvariables et la teneur en potassium échan-

geable : au voisinage du point de charge nulle,les fertilisations potassiques, même récentes,n’ont aucun effet significatif sur l’état dupotassium échangeable (figure 2) ; elles ont aucontraire un fort impact pour les sols brunsandiques, éloignés de leur point de charge

nulle. D’où une hypothèseforte : les andosols, près deleur point isoélectrique,auraient une faible affinitépour le potassium, qui seraitalors le premier facteur limi-tant de la productivité desbananeraies.

Les premiers résultats obte-nus dans le cadre de la thèsede J. Sansoulet, tant en lysi-métrie qu’en batch, confir-ment cette hypothèse : àcet état, les andosols sor-bent beaucoup plus le nitra-te que le potassium. Cetteétude permettra d’affiner lastratégie de fertilisation s.l.des andosols, pour optimi-ser la productivité en mini-

misant les pertes de solutés fertilisants et enmaximisant la séquestration du carbone.

2. CAS DES SYSTÈMES AGROFORESTIERSDans son rapport de l’année 2000, l’IPCC(Intergovernmental Panel on Climate Change)a estimé que l’agroforesterie, notamment sousles tropiques, pourrait apporter 40% de laséquestration de carbone (C) à l’échelle plané-

taire à l’horizon 2010, dont8% dans les sols. Pourtant,l’information disponibleactuellement montre que ladisponibilité en azote peutlimiter sévèrement laséquestration de C dans lesol (Koskela et al., 2000).L’objectif de ce travail étaitd’analyser la relation entrela séquestration de C et lateneur en azote dans unvertisol calcique deGuadeloupe sous cultureagroforestière (légumineu-se arbustive Gliricidiasepium et graminéeDichanthium aristatum), où

Figure 2.Relation entre stock

de carbone (0-30 cm) etteneurs en éléments fins

(0-20 µm) pour les différents modes

d’occupation des terres.Légende :

MaFi/ViFi = Culturesmaraîchères ou vivrières

fortement intensifiées(plusieurs cultures

par an),Mami/Vimi = Cultures

maraîchères ou vivrièresmoyennement

intensifiées,Mafi/Vifi = Cultures

maraîchères ou vivrièrespeu intensifiées (1 culture/an).

32

6

Figure 1. Etat des stocks de carbone entre 0 et 30cm sous bananeraiesd’altitude sur andosols àallophanes et sols brunsandiques, en fonction del’état des chargesvariables

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:31 Page 32

33

6

la présence de la légumineuse a contribuésignificativement à l’augmentation du stockorganique du sol (Dulormne et al., 2003).Nous avons mené une expérimentation surdeux parcelles (P2 et P6, de 20 m x 13 m chacu-ne) installées en 1989. Le système a été géré en“cut-and-carry“ : les résidus de la taille del’arbre (tous les deux ou six mois en P2 et P6,respectivement) et de la fauche de l’herbe(tous les 40 ou 80 jours en P2 et P6, respective-ment) ont été enlevés de la parcelle. Avec cetype de gestion, la litière de l’arbre est négli-geable, seules ses racines sont une source de Cet d’azote (p.ex. exsudats, recyclage de racineset de nodosités après la taille) (Dulormne et al.,2003). La méthode de l’abondance naturelle13C a été utilisée à la fois pour identifier l’ori-gine de C du sol (légumineuse ou graminée), etpour quantifier la biomasse racinaire dechaque espèce.Douze ans après l’installation des parcelles, lateneur en C du sol a augmenté de 26 tonnes/haen P6 (18 tonnes de C proviennent de l’arbre et8 tonnes de la graminée) et 14 tonnes/ha en P2(16 tonnes de C proviennent de l’arbre et–2 tonnes des graminées). Concernant l’azote,l’augmentation a été de 2,5 et 1,7 tonnes/ha enP6 et P2, respectivement. En P2 les résultatsindiquent une perte nette du C initial du sol(cf. –2 tonnes de C). L’augmentation du stockd’azote dans cette parcelle a pourtant réduitcette perte, en contribuant à la séquestrationdu C de la litière produite par la graminée. Lescontributions respectives de l’arbre et de lagraminée à la séquestration totale de C ont

reflété la quantité (plus grande pour l’arbre) etla qualité des apports (rapport carbone/azoteplus faible pour l’arbre). Les différences entre parcelles sont dues auxconséquences de leur gestion différente (fré-quence de taille de l’arbre et de fauche de lagraminée) sur les entrées et les sorties de C etd’azote : (1) les quantités de racines de l’arbrerecyclées après taille (source de C et d’azote) etde litière de la graminée (source de C) sont plusgrandes en P6 ; (2) l’exportation d’azote de laparcelle (taille + fauche) est plus grande en P2(Dulormne et al., 2003).Nos résultats montrent que, en fonction de lagestion du système, une culture agroforestièrepeut entraîner la perte d’une partie du carbo-ne du sol même si la séquestration totale restepositive, grâce à la contribution de la légumi-neuse arbustive. Par ailleurs, l’augmentationdu stock d’azote observée dans le sol de nosparcelles (175 kg d’azote/ha an en moyenne),est environ 750 fois plus grande que les pertesd’azote par dénitrification citées par quelquesauteurs dans des systèmes agroforestiers (ex.0,23 kg d’azote/ha/an, Millar & Baggs, 2004). Lebilan de cet élément est donc largement positifdans ce type de système.

3. CAS DES SYSTÈMES MARAÎCHERS SUR VERTISOLS –TRAVAIL SUPERFICIEL DU SOLAprès de longues décennies de culture decanne à sucre, les vertisols du sud-est de laMartinique ont été, vers le début des années

Figure 3. Evolution des teneurs encarbone (0-10 cm) aprèsmise en culture d’unvertisol sous prairieselon deux modes depréparation du sol(labour à 40 cm et rotobêche à 10 cm),après un et deux cyclesde culture de melon.Comparaison avec uneprairie âgée et une culture maraîchère dedix ans (Blanchart et al.,1997).

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:31 Page 33

34

6

80 et suite au développement d’un périmètreirrigué, utilisés pour des cultures prairiales etmaraîchères. Les sols sous canne à sucre pré-sentaient en moyenne pour 0-10 cm des stocksde C de 23 MgC.ha-1 ; après dix années, lesprairies irriguées et fertilisées présentaient desstocks de 36 MgC.ha-1 et les cultures maraî-chères, des stocks de 16 MgC.ha-1. Les stocks decarbone sont donc particulièrement faiblesdans les vertisols sous cultures maraîchères etsont responsables des importantes pertes enterre enregistrées, ceci expliquant en partiel’envasement de la baie du Marin.La mise en culture maraîchère d’une prairie(dont le sol est riche en carbone) entraîne unedilution de la matière organique dans l’horizonlabouré et un accroissement des pertes en Cpar minéralisation et érosion (thèse de J.F.Ndandou, 1998).

La diminution des teneurs en C de l’horizon0-10 cm est importante, notammentlorsque la mise en culture maraîchère estfaite de façon conventionnelle (labour à 40cm, nombreuses reprises) : pertes de 28%en un an et pertes de 37% en deux ans(figure 3). En revanche, la mise en culturemaraîchère selon une technique conserva-trice du sol (travail superficiel à la machineà bêcher) réduit ces diminutions desteneurs en C (23% en deux ans). Au final,après deux ans de culture de melon, lesstocks de C pour l’horizon 0-40 cm sontégaux à 82,6 MgC.ha-1 sous culture maraî-chère avec travail superficiel du sol et 71,1

MgC.ha-1 sous culture maraîchère aveclabour, alors que la prairie âgée présenteun stock de 93,3 MgC.ha-1.

4. INSTALLATION DE PRAIRIES SUR VERTISOLSLa dynamique et les déterminants du stockagede carbone dans un vertisol auparavant cultivéen maraîchage et transformé en prairie a étéétudiée en détail dans le cadre de la thèse de T.Chevallier (1999). En cinq ans de prairie, l’entréede C sous forme de racines et de litière a été esti-mée à 75 MgC.ha-1 (figure 4). Sur ces 75 MgC.ha-1,11 MgC.ha-1 ont été stockés dans le sol en cinqans tandis que 64 MgC.ha-1 ont été minéralisés.A celles-ci s’ajoutent 5 MgC.ha-1 résultant de laminéralisation de MO ancienne (d’origine maraî-chère). Lors de la transformation d’une culture

maraîchère en prairie, le stockage sur 20 cm deprofondeur est donc de 6 Mg.ha-1 sur cinq ans(soit un stockage moyen de 1,2 Mg.ha-1.an-1).

Ces deux dernières études montrent d’une partque le travail superficiel du sol en culturesmaraîchères préservent les stocks de C etd’autre part que les prairies irriguées et fertili-sées représentent un moyen satisfaisant destocker du C dans les vertisols. La mise en placede rotations cultures maraîchères / prairiesconstituerait donc un moyen performant deconserver les stocks de C et de limiter l’envase-ment des baies du sud de la Martinique forte-ment lié à l’érosion de ces sols.

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

CLERMONT-DAUPHIN C.,CABIDOCHE Y.M., MEYNARD J.M.(2004), Effects of intensivemonocropping of bananas onproperties of volcanic soils inthe uplands of the French WestIndies, Soil use and manage-ment 20 (2) : 105-113.

DULORMNE M., SIERRA J.,NYGREN P., CRUZ P. (2003),Nitrogen-fixation dynamics ina cut-and-carry silvopastoral sys-tem in the subhumid condi-tions of Guadeloupe, FrenchAntilles. Agroforestry Systems59, 121-129.

KOSKELA J., NYGREN P.,BERNINGER F., LUUKKANEN O.(2000), Implications of theKyoto Protocol for tropicalforest management and landuse : prospects and pitfalls.University of Helsinki TropicalForestry Reports 22.

MILLAR N., BAGGS E.M. (2004),Chemical composition, or qua-lity, of agroforestry residuesinfluences N2O emissions aftertheir addition to soil. SoilBiology & Biochemistry 36, 935-943.

SAFFACHE P., THOMAS Y.F.,VANKATAPEN C., DURANTY J.2000. Etude de l’envasementde la baie du Marin (Martinique).Rapport commandé par leMinistère de l’Environnementet de l’Aménagement duTerritoire, 14 p. multigr. (+ 63 p. d’annexes).

SITE WEBhttp://honeybee.helsinki.fi/tropic/kyoto.pdf

CONTACTEric BLANCHART

e-mail : [email protected]

Figure 4. Flux de C (MgC.ha-1) encinq ans (0-20 cm) sousprairie (antécédent cul-ture maraîchère) dansun vertisol (modifiéd’après Chevallier, 1999).

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:31 Page 34

35

7

INTRODUCTIONL’étude des déterminants édaphiques (minéra-logie et texture du sol) et agronomiques(modes d’occupation des terres, itinérairestechniques) des stocks de carbone nécessite deconnaître, à l’échelle de la parcelle, les stocksde carbone pour les différents types de solsdes Petites Antilles et sous différents systèmes

de culture. A la Martinique, une étude a étémenée entre 2000 et 2003 ; elle s’est basée surune centaine de situations croisant types desol et systèmes de culture. L’importance desprincipaux déterminants vis-à-vis des stocks decarbone a été précisée et la carte des stocks decarbone, à l’échelle de la Martinique, a étéréalisée.

Corinne VENKATAPEN 1

Eric BLANCHART 2

Martial BERNOUX 2

Maurice BURAC 3

1 PRAM / IRD,Laboratoire dePédologie, BP 8006,97259 Fort-de-Francecedex – UAG-GEODE

2 IRD, LaboratoireMatière Organique desSols Tropicaux,BP 64501, 34394Montpellier cedex 5

3 UAG, Groupe derecherche GEODE-Caraïbes,Campus Universitairede Schœlcher

Tableau 1. Stocks de C (MgC ha-1)moyens, maximaux et minimaux pour lesdifférents types de solsde Martinique.

Déterminants des stocks de carbone dans les sols et spatialisation à l’échelle de la MartiniqueDéterminants des stocks de carbone dans les sols et spatialisation à l’échelle de la Martinique

Sols jeunes Andosols Sols Ferrisols Vertisols Sols rouges sur cendres brun-rouille à et ponces à halloysite montmorillonite

Maximum 59 78 77 137 103 62Moyenne 35 51 48 61 71 52Minimum 16 26 35 35 28 32

Figure 1 (a et b).Relation entre stocks deC et teneurs en élémentsfins pour les grandstypes de sols de laMartinique (ALL = solsà allophane, HAC =sols à argiles de type2:1, LAC = sols àargiles de type 1:1).

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:33 Page 35

36

7

1. LES STOCKS DE C EN FONCTION DU TYPE DE SOL (0-30 CM)Bien que les systèmes de culture étudiés ne soientpas les mêmes pour les différents types de sols,l’examen des stocks de carbone moyens (avecvaleur maximale et minimale) par type de sol per-met de se faire une première idée de la relationentre type de sol et stock de carbone (tableau 1).

Les vertisols (sols à argile de type 2:1, notésHAC pour High Activity Clay) sont les sols pré-sentant les stocks de carbone moyens (tous sys-tèmes de culture confondus) les plus élevéstandis que les sols jeunes présentent la valeurmoyenne la plus faible. Les andosols (à allo-phane ALL) et les sols à argile 1:1 (notés LACpour Low Activity Clay) présentent des valeursmoyennes intermédiaires.

LES STOCKS DE C EN FONCTIONDE LA TEXTURE (0-30 CM)A partir des stocks de carbone calculés par hori-zon, et du pourcentage en éléments fins - com-pris entre 0 et 20 µm, c’est-à-dire les argiles (A)et les limons fins (LF) - mesurés dans les 30 pre-miers centimètres du sol, on obtient l’équationsuivante :CLAC+HAC (kg m-2) = 0,5285 (A+LF%) + 22,25(n = 85 ; r2 = 0,30) (figure 1).

On observe une corrélation positive entre stockorganique et texture du sol. Les sols sableuxont en général des stocks de carbone plusfaibles que les sols argileux. Ceci explique doncque les sols les plus argileux (vertisols) ont desstocks de C en moyenne supérieurs aux typesde sol légèrement moins argileux (ferrisols et

sols à halloysite). Les figures 1a et 1b montrentnotamment que la relation entre stock de car-bone et texture n’est pas très différente entreles sols à argile 2:1 (HAC) et les sols à argiles 1:1(LAC). En revanche, les andosols, pour des tex-tures relativement grossières, présentent desstocks de C légèrement plus élevés.

2. LES STOCKS DE C EN FONCTION DE L’OCCUPATION DES TERRES (0-30 CM)Les sols sous forêt présentent les stocks orga-niques les plus élevés ; ces stocks diminuentsous prairies et sous cultures. Sous cultures, lesstocks de carbone sont relativement élevéssous canne. Dans les sols à texture sableuse, cesstocks organiques sous canne avoisinent ceuxmesurés sous prairies et dépassent, dans cer-tains cas, les stocks mesurés sous forêt. Enrevanche, les parcelles sous cultures maraî-chères fortement intensifiées présentent lesstocks organiques les plus faibles, aussi biendans l’horizon 0-10 cm que dans l’horizon 0-30cm, et ce, quelle que soit la texture du sol (ladiminution des stocks en carbone sous culturesmaraîchères fortement intensifiées atteintdans l’horizon 0-10 cm près de 60% des stocksorganiques mesurés sous forêt). Les sols culti-vés en banane, en cultures maraîchères et encultures vivrières moyennement intensifiéesprésentent des stocks organiques comprisentre ceux observés sous canne et culturesmaraîchères fortement intensifiées.Sous quasiment tous les modes d’occupation,on observe une corrélation faible, mais positiveentre stock organique et texture du sol.Sous prairie la diminution des stocks en carbo-ne varie avec la texture de 10 à près de 16%des stocks organiques mesurés sous forêt. Sous

Figure 2. Relation entre stock decarbone (0-30 cm) etteneurs en éléments fins(0-20 µm) pour les différents modes d’occupation des terres.

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:33 Page 36

37

7

cultures, ces diminutions varient avec la textu-re de 35 à 50% , en moyenne, des stocks orga-niques mesurés sous forêt.

Ces premiers résultats montrent que les poten-tialités de stockage de carbone (représentéespar le ∆C - différences de stocks de carbone -entre situations cultivées et situations séques-trantes – forêts, prairies, canne à sucre) sontnettement plus élevées pour les sols argileux(vertisols, sols à halloysite, ferrisols) que pourles sols sableux ou sablo-argileux.

3. CARTE DES STOCKS DE CARBONEDE LA MARTINIQUELe croisement entre la carte des systèmes deculture et celle des types de sol à l’échelle de

la Martinique, connaissant pour chaque croi-sement (systèmes de culture x type de sol)permet de dresser la carte des stocks de car-bone dans le premier mètre. La figure 3 pré-sente la situation moyenne pour les années70 à 80.

Au total, les sols de Martinique stockent10,5 millions de tonnes de carbone.Toutefois ce calcul ne prend en compte queles régions pour lesquels un stock de carbo-ne a pu être calculé (ce qui représente toutde même 92,8% de la surface). Pour le reste,soit on ne dispose pas d’information perti-nente (1,5% de la surface), soit cela corres-pond à une zone urbanisée (5,7% de la sur-face).

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

ALBRECHT A., BROSSARD M.,CHOTTE J.L. & FELLER C (1992),Les stocks organiques des princi-paux sols cultivés de laMartinique (Petites Antilles).Cahier ORSTOM, Série Pédologie,volume XXVII, n°1, pp. 23-36.

CHEVALLIER T. (2000),Dynamique et déterminants dustockage du carbone dans unvertisol sous prairie (Martinique).Thèse de Doctorat. EcoleNationale SupérieureAgronomique de Montpellier,142 p. + Annexes.

COLMET-DAAGE F., GAUTHEYROU J.& GAUTHEYROU M. (1970),Sélection de profils des Antillesavec rattachement à la classifica-tion des sols des Antilles au1/20.000 (1960-1967).Martinique : volcanisme ancienet récent. ORSTOM - Centre desAntilles, 4 vol.

FELLER Ch., ALBRECHT A.,BLANCHART E., CABIDOCHE Y.M.,CHEVALLIER T., HARTMANN Ch.,ESCHENBRENNER V.,LARRE-LARROUYM.C. & NDANDOU J.F.(2001), Soil organic carbonsequestration in tropical areas.General considerations and ana-lysis of some edaphic determi-nants for Lesser Antilles soils.Nutrients Cycling inAgroecosystems, n°61, pp. 19-31.

FELLER Ch., FRITSCH E., POSS R.& VALENTIN C. (1991), Effet dela texture sur le stockage et ladynamique des matières orga-niques dans quelques sols ferru-gineux et ferrallitiques (Afriquede l’Ouest, en particulier). CahierORSTOM, Série Pédologie, volu-me XXVI, n°1, pp. 25-36.

VENKATAPEN C. (à paraître),

Figure 3. Carte des stocks de carbone des sols deMartinique

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:33 Page 37

38

7

Photo 1.Sainte-Marie. Profil-type d'andosol sur tufs. Sol profond recouvert de prairie.

Photo 2.Sainte-Marie. Détail du profil précédent. Horizonorganique très sombre,riche en matière organique,caractéristique desandosols.

Photo 3.Case-Pilote. Prairie degraminées. Profil-typede sol à Case-Pilote :sol brun-rouille à hal-loysite argileux. On dis-tingue un horizon orga-nique sombre de 10 à 15cm d'épaisseur reposantsur un horizon minéralde couleur plus claire.La roche-mère massiveapparaît vers 1 m deprofondeur.

Photo 4.Saint-Joseph. Sol brun-rouille à halloysite surtufs. Les labours pro-fonds ont entraîné ladilution de l'horizonorganique dans l'en-semble du profil tra-vaillé.

Photo 5.Sainte-Anne. Vertisolsous cultures maraî-chères intensives. Le sol,laissé à nu pendant unebonne partie de l'année,est sensible aux aléasclimatiques et à l'éro-sion.

21

3

4

5

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:34 Page 38

L a Martinique pourrait participer auxefforts de réduction des émissionsnettes de gaz à effet de serre (GES)

auxquels la France s’est engagée en signant etratifiant le protocole de Kyoto ; l’agriculture,elle-même émettrice de GES, est concernée parce processus. Mais toute politique publiqueincitant les exploitants agricoles à stocker ducarbone doit être précédée d’une évaluationde ses coûts.L’opportunité d’une politique agricole de“séquestration du carbone dans les sols“ enMartinique peut se mesurer par le calcul ducoût marginal des ressources macroécono-miques engagées pour stocker une tonne decarbone supplémentaire dans les sols.Ce coût, encore appelé “valeur de la tonne decarbone“, est le rapport entre la variation descoûts sociaux (coûts privés et coûts publics)induite par les mesures décidées (en euros) etla variation des quantités de carbone stocké(en tonnes de C) :

Ce ratio pourrait servir de base au choix de larémunération incitatrice à accorder à toutexploitant pour qu’il accepte de changer depratique pour favoriser la réduction nette desémissions de gaz à effet de serre.

LE CADRE ÉCONOMIQUE DE L’INTERVENTION PUBLIQUEDans la théorie néoclassique standard, le rai-sonnement marginaliste permet de montrerque dans le cas d’un équilibre concurrentiel,tout producteur de bien privé supposé ration-nel adopte un comportement d’optimisation :il choisira de produire la quantité qui égalise leprix du bien (sa recette marginale) et le coûtmarginal de production (supplément de coûtpour une unité additionnelle de bien produit),c’est-à-dire celle qui maximise son profit margi-nal. Ce niveau de production optimal peut engen-drer des effets secondaires appelés externali-tés : lorsqu’elles sont négatives, elles entraî-

nent une perte de bien-être pour plusieursagents, sans que le marché ne dédommage lesagents affectés. Les émissions de GES représen-tent un cas d’externalités négatives issues desactivités de production et de consommation.Le stockage du carbone dans le sol est enrevanche un cas d’externalité environnementa-le positive : l’agent qui met en place des tech-niques de réduction des émissions par le stoc-kage du carbone génère des bénéfices environ-nementaux pour la collectivité (gain en bien-être) sans recevoir de rémunération par le mar-ché. Les externalités sont une des manifestationsdes “défaillances“ du marché mises en éviden-ce par les théoriciens de l’économie du bien-être, et justifient l’intervention publique. L’Étatpeut contraindre ou inciter les agents pollueursà assumer le coût social de la “dépollution“. Ilpeut aussi rémunérer les agents qui améliorentle bien-être de leurs concitoyens.

DE L’ANALYSE COÛTS-AVANTAGES À L’ANALYSE COÛTS-EFFICACITÉLes pays qui se sont engagés dans le cadre duProtocole de Kyoto à réduire leurs émissions deGES privilégieront des politiques dont les coûtsne dépassent pas les avantages (réduction desémissions brutes, puits de carbone). Cettedémarche, appelée analyse coûts-avantages(ACA), est une transposition à l’économiepublique des règles de choix des projets d’in-vestissements privés, et nécessite de comparercoûts sociaux et avantages sociaux de la dépol-lution. Il faut donc recenser tous les effets d’unprojet sur le bien-être, positifs et négatifs, etles estimer monétairement. Concernant la séquestration du carbone par lesactivités agricoles en Martinique, l’ACA per-mettrait donc d’estimer la “valeur du carboneséquestré“ ou le coût nécessaire pour absorberune tonne supplémentaire de carbone dans lessols agricoles. Toutefois, l’évaluation marchan-de (au prix du marché) des dommages sociauxévités pose problème : elle se heurte d’unepart à des incertitudes scientifiques sur lesphénomènes de changement climatique,d’autre part à des problèmes d’estimation

39

8

Sylvie MAUBOURGUET 1

Frédéric SAUDUBRAY 2

1 Stagiaire de DESS en Economie etEnvironnement, PRAM /Cemagref Martinique etIRD

2 PRAM / CemagrefMartinique, URAgriculture et espaceinsulaire,Quartier Petit Morne,BP 214,97285 Lamentin cedex 2

Estimation de la valeur de la tonne de carbone du sol dans le secteur agricole martiniquaisEstimation de la valeur de la tonne de carbone du sol dans le secteur agricole martiniquais

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:37 Page 39

monétaire des avantages non marchands quiconstituent la plus grande part des effets de lastratégie de réduction des émissions. En effet,estimer le coût d’évitement des risques de mor-bidité et de mortalité, de la détérioration desécosystèmes, de la disparition de territoires oudes déplacements de population,… soulève desquestions d’ordre méthodologique et éthique(la vie humaine peut-elle avoir un prix ?).D’autre part, une politique de réduction de laconcentration en CO2 dans l’atmosphère a deseffets sur les générations présentes, mais enaura aussi sur les générations futures, enMartinique, et au-delà du territoire ; du fait dela longue durée de vie des gaz à effet de serredans l’atmosphère (“polluants stocks“), leseffets d’une stratégie de séquestration ne seferont sentir qu’après des décennies.L’estimation de la valeur de ces avantagesrepose sur un calcul intertemporel qui nécessi-te le choix, délicat, d’un taux d’actualisation.Enfin, recenser les avantages de manièreexhaustive pour toutes les parties concernées,à l’échelle de la Martinique, de la régionCaraïbe et au-delà s’avère très difficile.Pour toutes ces raisons le recours à une analy-se coûts-efficacité (ACE) peut être justifié :forme d’évaluation économique qui tented’identifier le moyen le plus économe et leplus efficace pour atteindre un objectif pré-établi, elle ne comporte pas d’évaluationmonétaire des avantages issus de la réalisationde l’objectif, à la différence de l’analyse coûts-

avantages. Ce dernier est posé comme acquisex-ante, par exemple du fait d’un engagementpublic existant (niveau de réduction des émis-sions dans le cadre du Protocole de Kyoto) ;l’analyse consiste alors à trouver le moyen del’atteindre à moindre coût, les coûts représen-tant les dépenses privées (agriculteurs exploi-tants) et publiques (montant des subventions,coûts des contrôles) engagées pour des chan-gements d’orientation culturale ou d’itinérairetechnique. La démarche pratique consiste à“minimiser“ le coût total des mesures permet-tant d’atteindre l’objectif préétabli, et d’endéduire la valeur du carbone ou coût marginaldu stockage. Deux méthodes peuvent êtremobilisées pour estimer la valeur du carbone :les “modèles énergétiques“ s’en tiennent àl’optimisation du coût marginal pour le sec-teur étudié, ici un coût brut ou direct pourl’agriculture, alors que les “modèles d’équi-libre général“ permettent d’estimer un coûtmacroéconomique (coût marginal des res-sources de l’ensemble de l’économie qui doi-vent être engagées pour diminuer les émis-sions d’une tonne de carbone supplémentai-re). C’est cette dernière approche qu’ilconviendrait de conduire pour estimer lavaleur du carbone en Martinique, mais comp-te tenu de la faiblesse des outils de modélisa-tion économique disponibles et de l’insuffisan-ce des données pré-existantes, la premièreméthode a été retenue dans le cadre du pro-gramme GESSOL.

40

8

Figure 1. Changement d’usage :conversion du maraîchage en prairie

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:37 Page 40

LA MÉTHODE EMPLOYÉEL’optimisation du coût macroéconomiquepour un objectif de stockage du carbonedans les sols de Martinique est un travail delong terme ; dans un premier temps, seulsles coûts bruts pour le secteur agricole ontpu être estimés dans le cas de deux “situa-tions séquestrantes“. Un changementd’usage des terres et un changement d’iti-néraire technique ont été choisis, leur coûtdirect privé (supporté par l’agriculteurexploitant) a été calculé puis mis en rela-tion avec les variations de stocks de carbo-ne induites.

Dans le sud-est de la Martinique, la créationd’un périmètre irrigué entre 1979 et 1988 apermis le développement, sur vertisols, de cul-tures maraîchères et de prairies irriguées (ounon) et pâturées par les petits ruminants. Cesont donc ces deux orientations culturales qui

ont été comparées en raison de leur intérêtéconomique et social (faible taux de couvertu-re de la demande par la production locale, acti-vités traditionnelles bénéficiant d’un certainsavoir-faire, etc.)La conversion des cultures maraîchères enprairies pâturées accroît le stockage du carbo-ne d’environ 1,2 tonne de carbone par hecta-re et par an (Chevalier, 1999). Le coût partonne de carbone de ce changement a alorsété estimé.

En Martinique et sur vertisols, le travailconventionnel du sol est composé de trois ouquatre opérations (souvent après le passaged’un girobroyeur) : quelquefois sous-solage,labour à 40 centimètres de profondeur avecune charrue à soc, et souvent deux reprisesaprès labour, dont le passage d’un pulvériseur(à disques) ou d’un rotavator pour sectionnerles mottes, émietter le sol et préparer le lit desemences. Le remplacement du travail tradi-tionnel par un travail simplifié sur les 10 pre-miers centimètres, réalisé avec une rotobêche(machine composée d’une multitude debêches articulées qui effectuent les trois opé-rations précédentes en un seul passage) per-met d’accroître annuellement les stocks decarbone de 0,223 tonne par hectare (IRD,1998). Il peut donc être intéressant de compa-rer les coûts des deux types de préparation, etd’estimer l’économie ou le coût de la simplifi-cation du travail du sol.

PRINCIPAUX RÉSULTATSTrois systèmes types de production maraîchèreet deux systèmes d’élevage de petits ruminantsont été identifiés à l’issue d’un travail d’en-quêtes mené auprès des agriculteurs exploi-tants de trois communes (Le Marin, Le Vauclin,Sainte-Anne) : cultures maraîchères pour lemarché local, melons d’exportation, produc-tion de laitues, élevage sur prairie naturelle ousur prairie artificielle.La méthode comptable a permis d’estimer les

41

8

Figure 2. Changement d’itinérairetechnique :simplification du travaildu sol

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:37 Page 41

coûts directs de la conversion d’un système àl’autre, à l’échelle de l’exploitation agricole.Ces coûts s’obtiennent en additionnant lecoût d’ajustement (différence de coût deproduction = ∆CP) et le coût d’opportunité(coût monétaire par hectare “du renonce-ment au chiffre d’affaire” obtenu dans le sys-tème antérieur =-∆CA). Pour prendre encompte la diversité des formes juridiques

d’exploitation agricole, le coût de la main-d’œuvre, estimé au niveau du SMIC, prend encompte la main d’œuvre familiale et les sala-riés agricoles.

Le passage de l’activité “melon d’exportation“à l’élevage de petits ruminants permet d’éco-nomiser de 730 à 1628 euros par hectare (coûtnégatif), soit si l’on se ramène au coût évitépar tonne de carbone, une fourchette de 608à 1357 euros économisés. En revanche, passerdes autres activités maraîchères destinées aumarché local à l’élevage n’est pas forcémentrentable, avec un désavantage certain pourl’abandon du système 3 (laitue) : le passagede la laitue à l’élevage entraîne un coûtannuel supplémentaire pour l’exploitant d’en-viron 16700 euros en moyenne par tonne de Cstocké.

La méthode comptable a aussi permis d’estimerdes coûts directs pour l’exploitant de la conver-sion du labour conventionnel (LC) au travailsimplifié (TS), compte tenu des changementstechnico-économiques qu’elle implique :Le passage du labour conventionnel au travailsimplifié avec rotobêche en vertisols engendreune économie directe de 752 euros par hectaresoit 3320 euros par tonne de carbone séquestré.

Concernant la mise en œuvre éventuelle d’unepolitique de séquestration du carbone enMartinique, il apparaît donc que :● La simplification du travail du sol semble

pertinente puisqu’elle permet à la fois unaccroissement des stocks de carbone dans lesvertisols et une économie directe pour leproducteur. De plus, des recherches précé-dentes de l’IRD ont mis en évidence l’intérêtde cette pratique pour limiter l’érosion, celasans affecter les rendements.

● En revanche, envisager un changement d’usage des terres du maraîchage vers l’éle-vage ovin ne semble pas rationnel. D’unepart, les calculs effectués montrent que,même si cette conversion est efficace enterme de stockage de carbone dans les sols,elle peut engendrer des coûts directs impor-tants pour les producteurs. D’autre part, elle

42

8

Coût direct ou brut pour l’exploitant en euros par hectare

Changement d’usage Coût d’ajustement Coût d’opportunité Coût direct de conversion‘monétaire’

CAJ = ∆CP COM = -∆CA CC = CAJ + COM=-∆R Prairie naturelle avec -10636 8585* +4541

antécédent à à à“maraîchage système 1“ - 14427 15177 -5842

Prairie plantée avec -7518 5662 +4204antécédent à à à

“maraîchage système 1“ -11922 12262 -6260Prairie naturelle -13831 12948 -730avec antécédent à à à

“melon“ -14157 13102 -1210Prairie plantée -11253 10025 -1067

avec antécédent à à à“melon“ -11652 10187 -1628

Prairie naturelle -22478 4279 +19987avec antécédent à à à

“laitue“ -22804 42945 +20467Prairie plantée -19900 39868 +19569

avec antécédent à à à“laitue“ -20299 40030 +20130

* Un coût d’opportunité de +8585 euros correspond en réalité à une baisse du produit d’activité parhectare (rendement) de 8585 euros entre l’activité maraîchage et l’activité élevage.

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:37 Page 42

entraînerait une perte d’emplois de l’ordrede 75%, dans la mesure où le maraîchage estenviron quatre fois plus intensif en emploisque l’élevage, et où l’extension des surfacesen prairies pâturées n’est pas concevabledans le contexte actuel. Le coût social decette perte d’emplois est aussi à prendre encompte.

Enfin, il est nécessaire de rappeler que seulsles coûts directs pour l’exploitant ont ici étéévalués. Pour les deux situations séques-trantes envisagées, il faudrait, pour estimerun coût pour la collectivité, ajouter les coûtsde mise en œuvre et de contrôle par les pou-voirs publics, les coûts collectifs de suppres-sion et de créations d’emplois, les coûts d’op-portunité non monétaires (coûts culturel etaffectif du renoncement à l’usage antérieurde la terre) et les coûts directs environnemen-taux.Finalement, l’estimation pertinente d’unevaleur “macroéconomique” de la tonne decarbone en Martinique nécessiterait l’élabora-tion d’un modèle d’optimisation des coûts enfonction d’un objectif de stockage, qui per-mettrait de comparer des orientations cultu-

rales, des usages hors production agricole desterres, et leurs impacts climatiques, agrono-miques, économiques, environnementaux etsociaux dans la région prise dans sonensemble.

43

8

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

BLANCHARD O., CRIQUI P.(2ème trim. 2000),“La valeur du carbone : unconcept générique pour lespolitiques de réduction desémissions”, Economieinternationale, La revue duCEPII (Centre d’étudesprospectives et d’informations internationales),n°82, 28 p.

Changements technico-économiques

LABOUR TRAVAIL SIMPLIFIE

OUTILS CONVENTIONNEL1 sous-soleuse ROTOBECHE

2 charrues à socs Billonneuse3 pulvériseurs

TRACTEURPuissance conseillée 90 chevaux 55 chevauxProductivité horaire de l’outil : temps d’utilisation par hectare et par an 162 heures 90 heuresConsommation de carburant (l/ha) 55 37

Coûts en eurosCoûts des investissements matériels : Tracteur 39000 27000Outils 19550 12400TOTAL 58550 39400Charges d’amortissement et charges financières 2081 1400(en € par ha), pour une exploitation moyenne de 4,5 ha Charges de carburants et lubrifiants (€ par ha) 33 22Coûts de main-d’œuvre (€ par ha) 130 70Charges totales affectées par le changement d’itinéraire technique (€/ha) 2244 1492

Comparaison des itinéraires techniques LC, et TS avec rotobêche, pour la préparation des vertisols en cultures maraîchères.

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:37 Page 43

he

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:37 Page 44

ARRIVÉES / DÉPARTS

● Depuis le 15 octobre dernier, Thierry GOGUEY est le nouveau Directeur Régional du CIRAD. Il succède à Jean-Jacques BARAËR.

● André LASSOUDIÈRE, chercheur du programme Bananes, Plantains et Ananas (BPA) du CIRAD a quitté laMartinique le 30 juillet 2004. Il est rem-placé par Frédéric SALMON.

● Le 15 septembre dernier, Christian LAVIGNE, chercheur au programme Arboriculturefruitière du CIRAD, a succédé à DanielDUCELIER, parti en retraite.

● Frédéric SAUDUBRAY, Directeur du CEMAGREF, a quitté la Martinique le 22 décembre 2004. Son intérim est assurépar Michel GAYALIN.

● Pierre MARIE (IGREF) arrive en Martinique le 4 décembre 2004. Il sera chargé du projet «Baie du Robert» etaura également pour rôle de renforcerles liens entre la recherche et l’ensei-gnement agricole (LEGTA de Croix-Rivail).

UN SERVICE DE COMMUNICATION AU PRAMDepuis le 5 janvier 2004, le PRAM a unBureau de la communication / documenta-tion. Justine LORDINOT de l’IRD en est la res-ponsable.Son adresse e.mail : [email protected]

LE PRAM SUR INTERNET

Un site web est en cours de réalisation. Ilsera très prochainement consultable àl’adresse suivante : www.pram-martinique.org

45

9

Quelques brèvesQuelques brèves

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:38 Page 45

LES CAHIERS DU PRAM N°4

Edité par le Pôle de Recherche Agronomique de la Martinique (PRAM)

Directeur de la publication : Thierry GOGUEY (CIRAD)Coordination : Daniel BARRETEAU (IRD), Eric BLANCHART (IRD), Frédéric SAUDUBRAY (Cemagref)

Comité de lecture : D. BARRETEAU (IRD), M. BERNOUX (IRD), E. BLANCHART (IRD), F. SAUDUBRAY (Cemagref), J.-P. VIODÉ (IPG).

Photographies : IRDConception, photogravure et impression : Imprimerie Berger Bellepage 05 96 75 14 15

Tirage : 500 exemplaires – Décembre 2004 – ISSN : en cours

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:38 Page 46

bl

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:38 Page 47

Cahier PRAM n°4 31/01/05 13:38 Page 48