contemporaine À noille l’imaginaire géographique · 2018. 4. 13. · anne-marie séguin...

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COLLECTION Géographie CONTEMPORAINE Sous la direction de Mario Bédard, Jean-Pierre augustin et RICHARD DESNOILLES L’imaginaire géographique Perspectives, pratiques et devenirs Extrait de la publication

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  • Épine 17,6 mm396 p. / 100 M

    puq.ca,!7IC7G0-fdcefi!

    ISBN 978-2-7605-3245-8

    À la fois existentielle et identitaire, notre condition territo-riale nous oblige à nous intéresser aux diverses lectures que nous faisons de notre territoire puisque ce sont elles qui dictent nos comportements à son égard. Or le regard que nous portons sur notre territorialité est fort complexe. Si nous la percevons par nos sens, nous l’appréhendons aussi à partir de nos schèmes cognitifs et de nos valeurs. Regarder un paysage, par exemple, ne consiste pas à en dégager une image neutre, mais plutôt à en reproduire une image déjà pleinement codifiée et signifiée. Pareille lecture agit donc d’elle-même, partie prenante d’un imaginaire géogra-phique qui structure le regard comme l’usage que nous faisons du territoire. Et c’est cette idée, selon laquelle l’imaginaire géo- graphique serait la matrice de notre présence au, de et par ce monde, que les scientifiques de divers horizons réunis dans ce livre souhaitent explorer en le posant comme un, sinon le principe fondateur de notre condition territoriale.

    Mario Bédard, Ph. d., est professeur agrégé au département de géogra-phie de l’Université du Québec à Montréal, membre du Centre de recherche sur les innovations sociales (CriSES) de l’institut du patrimoine et membre du Centre Gaston Bachelard de recherches sur l’imaginaire et la rationalité.Jean-Pierre augustin, Ph. d., est professeur à l’Université Michel de Montaigne de Bordeaux et membre de l’UMr adES (aménagement, déve-loppement, Environnement, Santé et Sociétés) du CNrS.riChard dESNoillES, Ph. d., est post-doctorant en urbanisme et en aménagement du territoire à l’Université de Bordeaux iii (adES) et à l’Uni-versité du Québec à Montréal (CriSES).

    Ont COLLaBOrÉ À Cet OuVrageJean-Pierre augustin Mayté Banzo Mario Bédard éva Bigando Sandra Breux Marc Brosseau laurent Couderchet richard desnoilles Michel Favory Martine Freedman Julien laurent olivier lazzarotti daniel le Couédic Sylvain lefebvre lucie K. Morisset Suzanne Paquet Sylvain Paquette Michel Parazelli Philippe Poullaouec-Gonidec Charles robitaille romain roult anne-Marie Séguin Frédéric tesson Jean-Jacques Wunenburger

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    Géo ColleCtionGéographie Contemporaine

    Sous la direction de Mario Bédard, Jean-Pierre augustin

    et richard deSnoilleS

    L’imaginaire géographiquePerspectives, pratiques

    et devenirs

    3245D-Couvert.indd 1 11-12-07 10:49

    Extrait de la publication

  • La collection Géographie contemporaine change d’image. Le souci de renouveau de la direction des Presses de l’Université

    du Québec et l’attachement aux traditions du directeur de la collection ont abouti à un compromis qui rend la collection plus attrayante tout en affirmant la continuité avec sa mission, soit celle de diffuser des travaux de nature scientifique ou pédago gique qui permettent d’enrichir la réflexion géographique. Ce changement est l’occasion d’un rapide bilan. Cette collection qui, au départ, voulait remplir un vide s’est avérée féconde. Depuis 1998, plus de vingt titres ont été publiés, plusieurs ayant donné lieu à des rééditions. Analysant le monde à toutes ses échelles, du mondial au local, des travaux de chercheurs du Québec et d’ailleurs ont interrogé le territoire et les possibilités qu’il offre dans un contexte qui requiert la révision des choix de déve loppement de nos sociétés. La collection devient ainsi ce qu’elle cherchait à être, soit une tribune en langue française pour l’analyse des territoires. La nouvelle image, plus accessible, réaffirme cet objectif. Le monde, dans sa globalité, est impen sable sans des repères territoriaux qu’il importe de rendre visibles. Sans ces repères, les liens sociaux sont impossibles, la préoc cupation pour le bien commun disparaît et seul l’indi vidualisme a droit de cité. Les repères territoriaux sont nécessaires pour un développement respectueux des générations futures, certes, mais aussi des collectivités qui nous entourent et avec lesquelles nous partageons la planète. C’est ce que l’éduca-tion géographique des citoyens rend possible et c’est le défi qui a guidé et qui continuera de guider les travaux de la collection Géographie contemporaine.

    Juan-Luis Klein Directeur de la collection

    ColleCtionGéographie Contemporaine

  • L’imaginaire géographique

  • La Loi sur le droit d’auteur interdit la reproduction des œuvres sans autorisation des titulaires de droits. Or, la photocopie non autorisée – le « photocopillage » – s’est généralisée, provoquant une baisse des ventes de livres et compromettant la rédaction et la production de nouveaux ouvrages par des professionnels. L’objet du logo apparaissant ci-contre est d’alerter le lecteur sur la menace que représente pour l’avenir de l’écrit le développement massif du « photocopillage ».

    Presses de l’Université du Québec Le Delta I, 2875, boulevard Laurier, bureau 450, Québec (Québec) G1V 2M2 Téléphone : 418 657-4399 − Télécopieur : 418 657-2096 Courriel : [email protected] − Internet : www.puq.ca

    Diffusion / Distribution :Canada et autres pays : Prologue inc., 1650, boulevard Lionel-Bertrand, Boisbriand (Québec)

    J7H 1N7 – Tél. : 450 434-0306 / 1 800 363-2864France : Sodis, 128, av. du Maréchal de Lattre de Tassigny, 77403 Lagny, France – Tél. : 01 60 07 82 99Afrique : Action pédagogique pour l’éducation et la formation, Angle des rues Jilali Taj Eddine

    et El Ghadfa, Maârif 20100, Casablanca, Maroc – Tél. : 212 (0) 22-23-12-22Belgique : Patrimoine SPRL, 168, rue du Noyer, 1030 Bruxelles, Belgique – Tél. : 02 7366847Suisse : Servidis SA, Chemin des Chalets, 1279 Chavannes-de-Bogis, Suisse – Tél. : 022 960.95.32

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  • Presses de l’Université du Québec

    Sous la direction de Mario Bédard, Jean-Pierre augustin

    et RichaRd deSnoilleS

    L’imaginaire géographiquePerspectives, pratiques

    et devenirs

    Extrait de la publication

  • Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada

    Vedette principale au titre :

    L'imaginaire géographique : perspectives, pratiques et devenirs

    (Géographie contemporaine)

    Textes présentés lors d'un colloque tenu à Montréal les 26 et 27 oct. 2009.

    Comprend des réf. bibliogr.

    ISBN 978-2-7605-3245-8

    1. Géographie humaine appliquée - Congrès. 2. Imaginaire - Congrès. 3. Banlieues - Congrès. 4. Paysage urbain - Congrès. 5. Urbanisme - Congrès. 6. Territorialité humaine - Congrès. I. Bédard, Mario, 1960- . II. Augustin, Jean-Pierre. III. Desnoilles, Richard. IV. Collection : Géographie contemporaine.

    GF24.I42 2011 304.2 C2011-941652-2

    Les Presses de l’Université du Québec reconnaissent l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre du Canada et du Conseil des Arts du Canada pour leurs activités d’édition.

    Elles remercient également la Société de développement des entreprises culturelles (SODEC) pour son soutien financier.

    Mise en pages : Interscript

    CouvertureConception – Richard Hodgson et Michèle BlondeauPhotographies – de gauche à droite :

    iStockphoto, no 632079 iStockphoto, no 4436839

    Terrasses du temple baha'i à Haïfa en Israël, Mario Bédard

    2012-1.1 – Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés © 2012, Presses de l’Université du QuébecDépôt légal – 1er trimestre 2012Bibliothèque et Archives nationales du Québec / Bibliothèque et Archives Canada – Imprimé au Canada

  • Table des matières

    Liste des figures et tableaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . XIII

    Introduction – L’ImagInaIre géographIque, un contrepoInt à La réaLIté ? perspectIves, pratIques et devenIrs . . . . . . 1Richard Desnoilles, Mario Bédard et Jean-Pierre Augustin

    L’imaginaire et l’urbain : quel imaginaire et quel urbain ? . . . . . . . . . . . . . . 4dessein d’un tel positionnement vis-à-vis de l’imaginaire géographique et du périurbain . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5de l’imaginaire à l’utopie en passant par la notion de projet . . . . . . . . . . . . 7Les thèmes explorés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9

    partie 1 . L’imaginaire et le paysage : la norme en question . . . . . . . . . . 10partie 2 . L’imaginaire séducteur au service du local . . . . . . . . . . . . . . . . 12partie 3 . L’urbanisme affinitaire comme finalité imaginaire ? . . . . . . . . 15

    Partie 1 – L’imaginaire et Le Paysage – La norme en question . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19

    chapitre 1 – Le paysage urbaIn ou Le déguIsement du monde . . . . . . . . 21Daniel Le Couédic

    Le chemin des ânes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22L’ennui proverbial des villes modernes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24

    Extrait de la publication

  • VIII L’imaginairegéographique

    plan générique et architectonique spéciale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25concrétiser une expérience . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27sitte en amérique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29des sédimentations factices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31« neuf raisonnable » et déprimants retours . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32rassurer et plaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35retrouver les vertus particulières . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36un univers de loisir . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38New Urbanism . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39L’esprit bienveillant de la ville . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40plaidoyer pour une dialectique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42

    chapitre 2 – Le projet de paysages ou L’opportunIté d’un renouveau paradIgmatIque et IdentItaIre grâce à un ImagInaIre fédérateur, InstItuant et heurIstIque . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43Mario Bédard

    La problématique du paysage et de sa mise en image . . . . . . . . . . . . . . . . . 46Limites et contraintes du paradigme cognitif et logique de la modernité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47

    Le renouveau inhérent à un projet de paysage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51Les vertus imaginalisantes d’un projet de paysage . . . . . . . . . . . . . . . . . 53

    conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55

    chapitre 3 – engager L’ImagInaIre pour penser Le devenIr des paysages des pérIphérIes urbaInes . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57Sylvain Paquette et Philippe Poullaouec-Gonidec

    L’imaginaire urbain comme mise en récit de la ville . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59La mise en désir des nouveaux territoires périurbains . . . . . . . . . . . . . . 60

    Intérêt du paysage des périphéries urbaines pour penser l’imaginaire . . . . 64Lecture des valeurs paysagères de la périphérie urbaine de montréal . . . . . 66processus de qualité porteurs d’imaginaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71

    engager l’imaginaire des populations habitantes . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72engager l’imaginaire des professionnels de l’aménagement . . . . . . . . . 74engager l’imaginaire des élus . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76

    conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77

    chapitre 4 – J’iMAGiNe PoUR voUS ! Le recycLage des ImagInaIres dans Les pérIphérIes urbaInes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79Mayté Banzo, Éva Bigando, Laurent Couderchet et Frédéric Tesson

    Le mythe de la nature en ville comme support des imaginaires aménagistes et politiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 82un imaginaire recyclé qui se heurte à l’imaginaire habitant . . . . . . . . . . . . . 88

    une méconnaissance de l’espace concerné par les pouvoirs publics . . . 88un imaginaire habitant tourné vers l’ailleurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 91

  • Tabledesmatières IX

    mais où sont donc passées la concertation et la participation ? . . . . . . . . . . 92en guise de conclusion : préserver l’imaginaire habitant avant le formatage de l’action aménagiste . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 94

    chapitre 5 – Le quartIer chInoIs de québec, une appeLLatIon abusIve ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 97Martine Freedman

    repères historiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 98Le quartier chinois de québec, une appellation abusive ? . . . . . . . . . . . . . . . 100Les projets de réhabilitation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 104Le quartier chinois de québec, une construction qui s’appuie sur l’imaginaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 106conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 109

    Partie 2 – L’imaginaire séducteur au service du LocaL . . . . . . . . 111

    chapitre 6 – Le projet urbaIn contemporaIn faIt-IL encore rêver ? . . . 113Sandra Breux

    penser et circonscrire les représentations géographiques . . . . . . . . . . . . . . . 115L’aménagement : un jeu de représentations ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 117représentations et projet urbain : éléments de méthode . . . . . . . . . . . . . . . 119

    Le projet griffintown . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 120échantillon et collecte de données . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 122

    Le projet urbain : représentations officielles et représentations profanes . . . 124projet urbain : les différentes facettes de l’utopie contemporaine . . . . . . . . 132

    chapitre 7 – L’IdentIté québécoIse naturaLIsée : La fIctIon archItecturaLe de La montagne trembLante . . . . . . . . . . . 137Lucie K. Morisset

    au canada français plutôt qu’en suisse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 142un village canadien-français . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 144Le vieux-québec, style villégiature . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 156La montagne qui était plus historique que la ville . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 165d’une hétérotopie patrimoniale à une hétérochronie fictionnelle . . . . . . . 171

    chapitre 8 – pauLette à La mer ou de L’ImagInaIre géographIque comme constructIon du regard de L’autre . . . . . . . . . . . . 175olivier Lazzarotti

    Image, texte et contexte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 178une « modeste station balnéaire » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 178Les années 1930, un apogée touristique local . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 179une famille d’estivants en villégiature . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 181

    Le tourisme, une pratique sensationnelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 182« cela va très bien… » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 182« nous sommes très bien logées… » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 182

  • X L’imaginairegéographique

    « je m’amuse bien sur la plage » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 184« j’ai pris un bain hier… » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 185« qués-qu’il y avait comme baigneurs » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 186

    une certaine image du bonheur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 187« cher pèpère, chere memère, » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 187de l’effet pygmalion des lieux touristiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 188paulette en « eutopie » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 189

    conclusion : aux limites de la condition géographique . . . . . . . . . . . . . . . . . 190

    chapitre 9 – L’ImagInaIre patrImonIaL et Le projet d’urbanIsme : perspectIve cognItIve sur L’agIr spatIaL . . . . . . . . . . . . . . . . 193Michel Favory

    représentations sociales, espace et action d’urbanisme : cadre conceptuel et mode d’analyse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 195

    considérations théoriques sur le rapport entre l’espace et les représentations sociales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 195considérations méthodologiques sur le rapport entre l’espace et les représentations sociales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 197nos modes d’analyse et corpus . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 198

    L’action patrimoniale d’urbanisme à bazas . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 203L’agenda spatial du projet d’urbanisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 203

    La place de la cathédrale de bazas : lieu sensible et représentations publiques de la règle du lieu . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 209

    La pensée publique sur la spatialisation conforme : l’architecte des bâtiments de france et les élus municipaux . . . . . . . . . 209La pensée publique mayorale et la spatialité incluse dans ses représentations du patrimoine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 213

    La spatialité représentative habitante : écart cognitif et difficile compromis dans l’espace public local sur le sens patrimonial des lieux . . . . 215conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 222

    chapitre 10 – ImagInaIre des bas-fonds chez bukowskI . . . . . . . . . . . . . . 225Marc Brosseau

    bukowski et l’imaginaire géographique des bas-fonds . . . . . . . . . . . . . . . . . 227« dé-former les images » : la banalité des bas-fonds . . . . . . . . . . . . . . . . 228composantes de cet imaginaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 229

    Imaginaire conquis ou conquérant ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 232La médiation de l’imaginaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 234

    chapitre 11 – pratIques et ImagInaIres urbaIns : La vILLe, ses représentatIons et ses espaces de représentatIon . . . 237Suzanne Paquet

    représentations et imaginaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 238représentations et pratiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 240représentations et production de l’espace . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 243espaces de représentation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 245Imaginaires et espace urbain . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 248

    Extrait de la publication

  • Tabledesmatières XI

    Partie 3 – L’urbanisme affinitaire comme finaLité imaginaire ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 251

    chapitre 12 – reconversIon des hérItages oLympIques et vaLorIsatIon de L’urbaIn : Le stade de montréaL peut-IL devenIr un haut LIeu de L’ImagInaIre géographIque coLLectIf ? . . . 253Romain Roult, Sylvain Lefebvre et Julien Laurent

    aspects conceptuels et méthodologiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 255ancrage « spatiotemporel » d’une enceinte sportive . . . . . . . . . . . . . . . . 255jeux olympiques et redynamisation urbaine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 258Le stade comme élément de structuration urbaine . . . . . . . . . . . . . . . . . 259considérations méthodologiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 260

    montréal 1976, un héritage lourd à porter . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2611970-1976, de l’obtention de jeux modestes à leur extravagance . . . . . 2611976-2006, une cathédrale déchue . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2662006-2010, de nouvelles ambitions pour le stade . . . . . . . . . . . . . . . . . . 269

    conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 272

    chapitre 13 – Les représentatIons du « vIvre-ensembLe » dans Le dIscours pubLIcItaIre sur Le Logement neuf à montréaL . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 275Anne-Marie Séguin

    Le discours publicitaire comme révélateur des représentations du « vivre-ensemble » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 278quelques précisions méthodologiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 279

    Le corpus d’annonces publicitaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 279Les représentations du « vivre-ensemble » telles que révélées par le discours publicitaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 280conclusion : qu’est-ce que le discours publicitaire nous enseigne sur le « vivre-ensemble » montréalais ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 283

    chapitre 14 – La RUe RADieUSe : ImagInaIres coLLectIfs et gestIon de L’urbanIté en marge . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 287Michel Parazelli et Charles Robitaille

    Les exigences sociosymboliques du branding urbain . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 289représentation sociospatiale et imaginaire géographique . . . . . . . . . . . . . . 293éléments méthodologiques de l’analyse du contenu des représentations sociospatiales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 297

    variables et indicateurs d’une représentation sociospatiale . . . . . . . . . . 298corpus d’articles et méthode d’analyse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 299

    résultats préliminaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 302pôle normatif saleté/propreté . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 304pôle normatif sauvage/cultivé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 304pôle normatif incivilité/civilité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 306pôle normatif insécurité/sécurité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 308

    L’imaginaire écosanitaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 310conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 312

  • XII L’imaginairegéographique

    chapitre 15 – Le confLIt des ImagInaIres du pérIurbaIn . . . . . . . . . . . . . . 315Jean-Jacques Wunenburger

    L’imaginaire mystifié des excentrés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 316L’imaginaire utopique du périurbain . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 319L’imaginaire poétique des milieux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 321archétypo-poétique de l’urbain . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 323conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 326

    épilogue – L’ImagInaIre géographIque, constItutIf de La constructIon terrItorIaLe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 329Jean-Pierre Augustin, Richard Desnoilles et Mario Bédard

    bibliographie générale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 335

    notices biographiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 369

  • Liste des fi gures

    et tableaux

    figure 3 .1 croissance démographique de l’île de montréal et des municipalités incluses à l’intérieur des couronnes sud et nord de la communauté métropolitaine de montréal (1991-2006) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61

    figure 3 .2 mises en chantier relevées à l’intérieur des couronnes périurbaines de la communauté métropolitaine de montréal (1998-2008) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 62

    figure 3 .3 formes paysagères interpellées dans les enjeux d’aménagement entretenus à l’échelle des municipalités périurbaines de la communauté métropolitaine de montréal . . . . . . . . . . . . . 67

    figure 3 .4 Localisation des images géoréférencées et mises en ligne par les utilisateurs du site panoramio pour le territoire de l’agglomération de Longueuil . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70

    figure 4 .1 schémas de cohérence territoriale de bordeaux et montpellier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 83

    figure 4 .2 modèles et chaîne d’information circulaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85figure 4 .3 une ville plus verte et plus viable . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 86figure 4 .4 schématisation du nouveau rapport à la nature . . . . . . . . . . . . . . 92figure 5 .1 carte du quartier chinois dans saint-roch . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 99figure 5 .2 répartition des commerces tenus par des chinois

    et de ceux recommandés par leur association en 1951 . . . . . . . . . 102

    Extrait de la publication

  • XIV L’imaginairegéographique

    figure 5 .3 carte mentale de benoît woo de l’emplacement de l’ancien quartier chinois . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 107

    figure 5 .4 carte du service d’urbanisme de la ville de québec pour justifier le projet de jardin à la chinoise . . . . . . . . . . . . . . . . 107

    figure 6 .1 Localisation de l’arrondissement du sud-ouest sur l’île de montréal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 120

    figure 6 .2 cartes mentales 1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 130figure 6 .3 cartes mentales 2 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 131figure 6 .4 cartes mentales 3 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 131figure 6 .5 cartes mentales 4 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 132figure 7 .1 h . ross wiggs, architecte, colour scheme for j .b . ryan

    development mont tremblant, 19 septembre 1939 . . . . . . . . . . . 145figure 7 .2 un rare incinérateur régionaliste : celui que wiggs propose

    pour la station de ryan . h . ross wiggs, architecte, Incinerator house, cafeteria for joseph b . ryan, 21 décembre 1938 . . . . . . . . 146

    figure 7 .3 projet de l’architecte henry ross wiggs pour le lodge de mont-tremblant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 147

    figure 7 .4 projet de l’architecte henry ross wiggs pour l’église de la station de mont-tremblant, 4 décembre 1939 . . . . . . . . . . . 149

    figure 7 .5 « projet b, premier prix . maison d’un fils de cultivateur, laquelle pourrait plus tard s’agrandir » ; projet lauréat d’henry wiggs au concours du gouvernement duplessis une belle maison dans une belle province . on reconnaît les ingrédients du régionalisme canadien-français qui ont fait la fortune de l’architecte dans la station de mont-tremblant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 156

    figure 7 .6 secteurs d’aménagement, noyau central (« village ») du versant soleil . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 168

    figure 7 .7 dessins de présentation du « hameau des pionniers » et de ses abords au versant soleil . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 168

    figure 7 .8 guide d’aménagement pour les ouvertures de « La place soleil », illustré d’exemples d’architectures anciennes réelles des quatre coins du québec mais correspondant néanmoins à l’époque citée dans ce secteur du village . . . . . . . . . . . . . . . . . . 170

    figure 8 .1 Les mots de paulette . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 177figure 9 .1 Le quadrant cognitif . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 201figure 9 .2 plan de la zppau de bazas . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 204figure 9 .3 agenda spatial du territoire de protection patrimoniale . . . . . . . 206figure 9 .4 quadrant cognitif du référentiel de la gestion de la règle

    du lieu (en caractère romain) et des principes de mise en valeur (en italique) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 211

    figure 9 .5 analyse cognitive de contenu du discours du maire de bazas pour le lancement de l’opération de restauration des façades de la place de la cathédrale (1994) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 214

    figure 9 .6 représentation sociale associative de la « bonne patrimonialisation » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 218

  • Listedesfiguresettableaux XV

    figure 9 .7 représentation sociale de l’opération de restauration immobilière patrimoniale de la place de la cathédrale . . . . . . . . 220

    figure 11 .1 guy debord, the naked city, 1957 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 247figure 14 .1 carte du faubourg saint-Laurent . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 291figure 14 .2 distribution du nombre d’articles retenus et étudiés selon

    les années et le journal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 300figure 14 .3 représentations sociospatiales des acteurs s’exprimant

    dans les médias écrits (La presse et Le devoir) sur la position des sans-abri dans les lieux publics (1993-2009) . . . . . . . . . . . . . . 303

    figure 14 .4 distribution du nombre d’articles selon la présence d’énoncés associés aux quatre pôles de représentations sociales (imaginaire écosanitaire) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 305

    tableau 10 .1 éléments typifiants de l’imaginaire des bas-fonds chez bukowski . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 231

    tableau 14 .1 Indicateurs et variables d’une représentation sociospatiale . . . . . 298tableau 14 .2 grille d’analyse de contenu des discours pour chacun

    des articles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 301tableau 14 .3 grille d’analyse transversale des discours des articles . . . . . . . . . . 302

  • Extrait de la publication

  • Introduction

    L’imaginaire géographique, un contrepoint à la réalité ?

    Perspectives, pratiques et devenirsrichard desnoilles, mario bédard

    et jean-pierre augustin

    […] la géographie du monde ne commence-t-elle pas dans une géographie psychique, l’espace du dehors ne se

    trouve-t-il pas déjà prédéterminé dans un espace du dedans ?

    (Wunenburger, 1996, p. 399)

    Depuistoujours,lesgéographesinterrogentnosrelationsàl’espace,au territoireouau lieu.Plusrécemment, lamondialisationet lescoûtscroissantsdenosmodesdevieont faitensortequecesrelationssontdevenuesunepréoccupationnotablechezl’ensembledessciences1.Maisquecesoitentantquechercheurs,praticiens,gestionnairesousimples

    1. Quoiquedansunemoindremesure,alorsquepourlespremiersleterritoireestunsujetet,pour lessecondes,unobjet,undistinguod’importancesurlequelnousreviendrons.

  • 2 L’imaginairegéographique

    habitants,notreconditionterritoriale–aussibienexistentielleetbiophy-siquequerelationnelleetidentitaire–nousobligeànousintéressertoutspécialementauxdiverseslecturesquenousenfaisons.Cesonteneffetces lecturesquidictentnoscomportementsà l’égarddecetteconditionterritoriale,qu’ils’agissed’aménagement,degestionoudeplanificationdesestraitsetdesesressources.

    Or,d’entréedejeu,nousconstatonsqueleregardquenousportonssurnotre territorialitéest fortcomplexe,car il impliquesimultanémentplusieursperspectives: sinous lapercevonsde faitparnossens,nousl’appréhendonsenmêmetempsàpartirdenosschèmescognitifsetdenosvaleurs–quidéfinissentlesensàaccorderànosaffectsetpercepts–afindecomprendre, si cen’estdenousapproprier (oudecomposeravec)unenvironnementtantôtfamilier,tantôtétrange(Kant,2000/1790;Lefebvre,2000/1974).Regarderunpaysage,parexemple,neconsistepasàendégagerouàenproduirel’imageneutred’unterritoirequisedévoi-leraitsansaffectationànous,maisplutôt,commeavecunsténopé,àendéclinerouàenreproduireuneimagedéjàpleinementcodifiéeetsignifiée(Sauer,1925;Micoud,1991).

    Pareille lecturen’estdoncpas le fruitd’unprocessusconscient.Elleagitplutôtd’elle-même,partieprenantequ’elleseraitd’unimaginairegéographiquequi l’animeetquistructure leregardcommel’usagequenousfaisonsduterritoire.Etc’estprécisémentcette idéeselon laquellel’imaginairegéographiqueseraitlamatricedenotreprésenceau,deetparcemonde2quecetouvragecollectifsouhaiteexplorerenleposantcommeun–sinonle–principefondateurdenotreconditionterritoriale.

    CequestionnementestleprolongementducolloqueL’imaginaire géographique, un contrepoint à la réalité ? Perspectives, pratiques et devenirs périphériques.Cecolloque, tenuàMontréal les26et27octobre2009, futorganiségrâceauCentrederecherchesurlesinnovationssociales(CRISES)enpartenariatavecleCentrederecherchebordelaisAménagement,Déve-loppement,Environnement,SantéetSociétés (ADES),avec l’appuiduDépartementdegéographiedel’UniversitéduQuébecàMontréal,delaChairederechercheduCanadaenpatrimoineurbain,delaMaisondessciencesdel’hommed’Aquitaine,del’UniversitédeBordeauxetduConseilrégionald’Aquitaine,quenoustenonsàremercier.Cetterencontreavaitpourdesseinderevisitercettenotiond’imaginairedébattuedepuisl’Antiquitéetquiaétéremiseàjourauseindesdisciplinesdesciencessocialesdepuis

    2. Notreprésenceau,deetparcemondeestuneformulationalambiquéesuccinctepoursoulignerl’ampleuretl’importancedenotreprésenceencemondecarnousysommesentermesdesiteetdesituation[au],nousensommesdemanièreidentitaire[de]etnousendépendonsdemanièreexistentielle[par].

  • Introduction 3

    maintenantplusd’undemi-siècleavec,commeprécurseurs,Mills(1967),Bachelard(1974),Debord(1996),Durand(1968)ouencoreCaillois(1974)etCastoriadis (2002/1975).Surtout,depuis ledébutdesannées19803,certainsgéographesn’hésitentpasàétudierlesliensqu’entretientlasociétéavecsonterritoireà travers leprismede lareprésentation.Cesauteursfrancophones(Bailly,1980;Berdoulay,1988;Berque,2000a;Debarbieux,1992,1993,1995;Gumuchian,1991;B.Lévy,1989,1997;Racine,1985;Raffestin,1983)ouanglophones(AgnewetDuncan,1989;DuncanetLey,1993;Gregory,1994;Harvey,1989;Meinig,1983;Pocock,1981;Tuan,1974,1977,1978,1989)montrentque,s’avérantbienplusqu’unechimère,l’ima-ginairegéographiqueestaucœurdesrapportsquelessociétésentretiennentavecleurterritoire(Casey,1993,1997;Castree,2001;Cosgrove,1998/1984;DiMéo,2002,2004;Massey,2005;O’Thuatail,1996).Cesauteursmontrent,chacunàsamanière,qu’ilestimpossibledecomprendrelemondesansleprismedelareprésentationquicomposeetrecomposesanscessedeuxcatégoriesfondamentalesdel’esprit:l’espaceetletemps(Kant,1787).Cetespaceetcetempsformenteneffetinexorablementlesêtresquilesinter-prètentenretour,aupointdefairedeleurmondeceluideleurspropresmythes. Imaginairespatial, imaginairesocial, imaginairemythiqueouencoremythe imaginaire, telssont lesdivers thèmesquenousvoulonsexplorerparletruchementdel’imaginairegéographiquequi,systémati-quementtenterons-nousd’établir,façonnenosrapportsau territoire.

    Plus spécifiquement, ce livre a pour ambition de réfléchir surl’importancedecetimaginaire,enparticulierlorsqu’ilsedéploiedanslespériphériesurbaines.Présuméessansâmeetindistinctes,cesmargesontlongtempsétépeuoupasétudiées4, considéréesparplusieurscommedonnéesnégligeablesd’uneurbanitéoud’unurbanismequis’yprojette-raientparaccident,sicen’estparobligation,alorsquedeplusenplusd’individusetdefonctionscommerciales, institutionnelles,productivesourésidentielless’yretrouveraientpardéfaut, telun trop-plein.Oronconstatequecespériphériesetcesmargessontrapidementdevenuesàcepointnombreusesetdynamiquesqu’ellespourraientfortbiens’avérerêtre(sicen’estdéjàfait)despôlesd’urbanitéenbonneetdueforme,caracté-riséesnotammentpardesrapportsauterritoire,àlanatureetàl’histoireautresqueceuxqu’expérimententetsurlesquelssesontédifiéeslesvilles-centresetlesbanlieuesdontellesémanent.

    3. Encorequecertainsyétaientsensiblesbienauparavant,dontWright(1947),Dardel(1990/1952)ouLowenthal(1961).

    4. Enfin,demanièrebienrelative,puisquecephénomèneest toutdemêmeassezrécent(findesannées1970).Ilresteque,pourimportantqu’ilsoit,tantstructurellementquenumériquement,onnes’yintéressevraimentquedepuisquelquesannées.

    Extrait de la publication

  • 4 L’imaginairegéographique

    Enpleineconstruction,sicen’estaucœurdeleurprocessusderequalificationouderéinvestissement,cespériphériesetcesmargessol-licitent toutparticulièrement l’imaginairegéographiquedesunsetdesautres,fussent-ilsrésidents,associationslocales,élusoupromoteursimmo-biliersdeces lieuxouterritoires,voiredesmunicipalitésvoisines.C’estpourquoinousnousyintéresserons(encorequedemanièrenonexclusive),déconstruisantquitelprocessusdebrandingterritorial,projetimmobilier,projetdepaysageoufaçonnementsocioterritorialparl’imagepourévaluerdansquellemesurel’imaginairepeuti)normerouii)êtreauserviced’uneformedeséduction locale,qui l’urbanismeaffinitaire iii)pourdégagers’il estnonpasunemais lafinalitédenotre imaginairegéographique.Nouscroyonseneffetquenouspourronspeut-êtreymontrerplusaisé-ment commentl’imaginairegéographiquepeuts’avéreressentielànotreconditionhabitanteetànotregesteterritoriale.Mais,avantd’introduiredavantageparlemenucesdiversesthématiques,exposonsunpeupluspourquoinousexploreronsicil’idéequel’imaginairegéographiquenousapparaîtêtreuninstrumentheuristiquedelaconnaissancedenotrepré-senceaumonde.

    L’imaginaire et l’urbain : quel imaginaire et quel urbain ?L’imaginaireestomniprésentdèslorsqu’onévoque,conçoitouaménageleterritoire.Etqu’ils’agisseparexempledeBailly(1980),Berdoulay(1988)ouDebarbieux(1995),biendesgéographesontrappeléquel’imagination,loind’être cette«folledu logis»ennemiede la raison, estbel etbienune facultécognitive.Latraditionkantienneveutquel’imaginationsoitmême leseulmoyenpour faired’une idéeunobjetapteàêtreétudié.Chaqueobjetd’étude,préciseBachelard(1974),s’apparenteàunensembledemarquessymboliquesauseinduquell’imaginationcrée,assembleetcombine lesélémentsduréelperçu.Dès lors, l’imaginaire5et lemonde

    5. Ilest importantdebiendistinguerimaginaired’imagination.Ilestsouventd’usagedeconsidérerlepremiercommeleproduitdelaseconde,etdoncdel’assimileràunsystèmestatiqueclos,voireàunensembled’images (ceàquoiondevraitseréférercommeàuneimagerie).Notreproposadhèreplutôtàuneautrelectures’inspirantnotammentdeBachelard(1974)etdeDurand(1968),etselonlaquelle l’imaginaireestunsystèmedynamiqueouvertquiintègreensonseinetsurdéterminemêmel’activitédel’imaginationenceciqu’il«ouvresurdespossibles,estdotéd’unedynamiquecréatrice interne(poïétique),d’uneprégnancesymbolique (profondeurdesensseconds)etd’unepuissanced’adhésiondusujet»(Wunenburger,2003,p.63).L’imaginaireaainsiuneépaisseuretunsoufflequiledistinguentdelaseulefonctionnalitédel’imaginationouencoreduseulrendu(oujeu)del’image.

  • Introduction 5

    desreprésentationssontconsidéréscommedesélémentsquiconditionnentfortementetlaconstructiondenossavoirsetnospratiquesterritoriales.L’imaginaireestainsiconsubstantieldelaraison,etleslieux,fussent-ilsabstraitsouréels,constituentautantdemédiateursdelamémoireoud’unidéaletdeleursrécitsrespectifs;leterritoireestdoncsillonnéetstructurépardesréseauxdesymbolesquiontpourbutdeconstruireunsystèmedesignes(Lévi-Strauss,1978;Durand,1976).

    Sileschercheurs,quellequesoitleurdiscipline,ontdéjàlargementinterrogé les ressortssymboliquesde l’urbainàpartirdeperspectivesanthropologiques,politiquesousociologiques,l’unedesambitionsdecelivre,disions-nous,estdedécrypter,àpartird’unpointdevuegéogra-phique, lesystèmedesignesetdesymbolesquiestàsedessiner,etce,plusspécialementenmilieupériurbain,voirerurbain.Eneffet,si l’ima-ginaireesturbi et orbi,faut-ilenvisagerqueseulelaville-centrepuisseêtredigned’unimaginairefondateuret,donc,considérerstricto sensucequin’estpasdelavillecommedesnon-lieuxoudesnon-paysages,brefdesterritoiressanslégitimité,sanssignification(Choay,1992),sansaveniretsansâme(Lajarge,2003)?Lacultureurbainenes’est-ellepaspourtantpropagéebienau-delàdesesseulesusuelleslimitessociospatiales(Mongin,2005;Pellegrino,2000)?Nefaut-ilpasvoirencesespacespériphériqueslemoyen,sicen’est l’opportunitéd’élaborerunenouvellemanièredepenser,deconstruireetd’aménager le territoire,etplusspécifiquementl’urbain,auseinduquelémergeraitungenius locipasmoinslégitimequeceluide laville-centre,etquisait,peut-êtremêmeungenius lociautre,plusenphaseet tirantprofitdes leçonsde lares urbanumquidictenosmodus vivendidepuislaRenaissance?Autrementdit,cetouvrageveutvoirsietcommentlesmargesdenotreurbanitéquisontàs’édifierseservent(dumoinsceuxqui leshabitent,planifientougèrent)oupourraientseservirde l’imaginairegéographique,etdoncde laré-inventiondenosrapportsauterritoirecommeàsesdiversesconstituantes,notammentsca-laires,pourseré-enchanter,sinonpours’affirmercommelesnouveauxcreusetsd’uneurbanitéquiestàse(re)dessineretquirisque,àterme,demoduleràsontourvilles-centresetbanlieuesd’antan.

    Dessein d’un tel positionnement vis-à-vis de l’imaginaire géographique et du périurbainChaquevilleetchaqueterritoiretenteaujourd’huidesedoterd’imagesplusfortesetévocatricesafindepromouvoirsonidentitétoutensepro-jetantdanslefutur(Desnoilles,2008).Lorsquesontmisesenexerguelesnotionsdemarge,defrangeoudelisière,qu’ellessoienturbainesounon,

    Extrait de la publication

  • 6 L’imaginairegéographique

    lesmotsquireviennentleplussouventpourlesqualifiersontincertitude,confusion,voireembarrasetmêmeparfoisindifférence.Pourtant,écriventRoncayoloetPaquot,«labanlieued’aujourd’hui,c’estlefaubourgdedemain»(1992,p.437).Lespériphériesnejustifientpaseneffetcettemiseauban,puisque,silamajoritédelapopulationoccidentalevitenmilieuurbain,elledemeuresurtoutautourdesvilles-centres,etmêmedeleurspremièresbanlieues,c’est-à-diredanscesunitésquis’érigentauxconfinsdel’urbainetdoncàlarencontredurural,quecesoitparétalementcontinuoupro-jectiondiscontinuedupremiersurlesecond.Dèslors,fairedel’imaginairegéographiqueunprincipeélémentairedespratiquesscientifiquesetges-tionnairesdenosmilieuxurbainscommedenotreurbanité,n’est-cepasnousdonner l’occasionderéfléchirauxmodalitésdupenser etdudirel’espace,lelieuetleterritoirequenoushabitonsetquinoushabitent,demettreaujourlesformesdegouvernancequipermettentdegéreretd’inter-prétercetimaginaireparl’intermédiairedel’aménagementduterritoire?Celivreseveut,sommetoute,l’occasionderéfléchiràlaquestionsuivante:commentlaville,etplusparticulièrementlavilleduxxiesiècle,danssonrégimeutopique–voiremythique–,est-elletoujourscréatricedemilieuxoùvivreetoù«fairesens»?Eneffet,bienplusqu’iln’estunechimère,l’imaginairegéographique,parsapropensionfoncièrementterritorialisante,n’est-ilpasaucœurdesrapportsquelessociétésentretiennentavecleurterritoireet,decefait,avecl’Autre?

    Traiterdesreprésentationsurbaines,c’estselonnouschercheràcomprendreledevenirmêmedesterritoires,etdel’urbainenparticulier,carcesreprésentationsnousdemandentdansunpremiertempscommentréinvestiretréarticulercesmêmesterritoiresetcetteurbanitéàl’heuredelamondialisation,desréseauxetdesfluxqui tendraientà favoriserunmodedeviehomogèneet,decefait,àgommerlesdiversesaspéritésdeslieux(Castells,1999;Sassen,2001).Noussavonsaujourd’huiqueleretouraulieu(Appaduraï,1996;Dollfus,2007)constituelereversd’uneseuleetmêmepiècequiestpartagéeavecleprocessusdelamondialisationetsonactiondéterritorialisante.Ainsi,leretoursurlesensdulieu(Relph,1976,1997;Tuan,1977;Rose,1995;Creswell,1996;HillieretRooksby,2002;ShamaietIlatov,2005;Mitchell,2006)montrequenousn’ensommespasencoreàlafindesterritoires(Badie,1995).Dèslors,est-ceque,dansunsecondtemps,l’articulationentrelavilleetl’imagepeutsefaireendehorsduchamppolitique?Le territoire,aussibanalsoit-ilenapparence,nedoit-ilpasfairel’objetd’uneattentiontouteparticulière?Plusencore,cetteprésuméebanaliténedoit-ellepasappeleràlaplusgrandedesvigilances,étantloindesregardsduplusgrandnombreetloindesterritoiresconsa-crésparcemêmeplusgrandnombre?Laquestiondupouvoirestaucœurdurapportsanscesseréinterrogéentreleshommesetleurterritoire(Claval,

    Extrait de la publication

  • Introduction 7

    1973;Raffestin,1980;Wallerstein,1991;O’Tuathail,1996;Agnew,2002).Ilfautàcetégardréexaminerlaplacedespouvoirspublicsainsiquedumondecitoyenetassociatif,quisont toutaussicréateursdepratiquesspatialesetsurtoutsocialespermettantl’émergenced’uneurbanitéflexible(Augustin,2002,2008a;Sassen,2009)surcesterritoires.Saisircetteurbanitéflexible,n’est-cepascomprendre les innovations, les renouvellementsmêmesdusensdel’urbain?Mieuxencore,n’est-cepassaisirplusfinementtoutcequ’impliquelefaitd’habiterleterritoire(Lazzarotti,2006a)?

    De l’imaginaire à l’utopie en passant par la notion de projetLaremiseenquestiondenotreplaceetdenotre rôle relativementauterritoirequenoushabitonsestaucœurde l’imaginairegéographiqueet desoncorollairequ’est lerégimeutopique.Parceque le territoireseconstruitaugrédel’histoireetdeschoixpolitiquesqui lecaractérisent,nouspartonsduprincipequ’ilestunevolonté,maisaussiunespoirdansl’œildeceluiquil’esquisseetquilevit.Cetravaildel’imaginaireseveutopératoiregrâcenotammentàdiversprincipesderéalitéaménagistequi,contraintesdel’action,loisetrèglements,l’ancrentetl’assainissent,quecesoit sous la formede territoireenprojet,une formuledeplusenpluscourammentemployée,sinondeprojetdeterritoire,deprojetdepaysageoudeprojeturbain(etmêmedegrandprojeturbain).Orqu’est-cequepareilprojetsicen’estlaprojectiond’uneconditionhabitante,etdoncdutriptyquehabitat-habitant-habiterpropreàun lieudansune image(ouserait-ce l’image d’un lieu retenu comme géosymbole de ce territoire[Bédard2002,2008;BédardetBreux,2011]),sinonuneimagerie(voirlanotedebasdepageno4)–quiseveutipso facto idéale?Réunissantdescaractéristiqueslocales,évoquantsesracines,maisaussiglobales,syno-nymesd’ouvertureaumonde,lenouveauterritoireainsiimaginalisépour-raitsymboliserunesociétéautre,sinonuneconditionhabitantealternativeoù laréponseaudoutecollectifpourraits’incarnerenuneconstructioncollective,suffisammentambitieusepoursedoterd’unnouvelavenir.Unprojet territorial, fût-ilurbainoupériurbain,peutainsiêtreunmoyend’espérerànouveau(Fortier,1995;Favory,1996;Cluzet,2002),voiredere-signifierunespace,un lieu,unterritoiregrippéparunequelconquecrise,grâceàlacréationouàlaréaffirmationd’uneimage–etdoncd’unidéal–fédératrice(Lussault,1993,2000;Castells,1999).

    Sibiendesprojetsémanentd’unseulacteur(municipalitéoupro-moteur,parexemple)oud’unseultyped’acteurs(associatif,économique,institutionnel,politique,parexemple), raressontceuxquise réalisent

    Extrait de la publication

  • 8 L’imaginairegéographique

    effectivementouquis’avèrentvéritablementprofitablesetpérennessansque lesautresacteursconcernésaientétésoitconsultés,soit impliquésdanssesdiversprocessusd’élaboration,demiseenplacepuisdegestion,neserait-cequeparcequeleterritoirecibléparteloutelprojetinterpelletoujoursunemultituded’acteurs,d’activités,d’échelles,d’intérêtsetdevaleurs.Desplus locauxauxplusglobaux, lesespacespériphériquesetmarginauxsemblentêtre,aumoinsdanslasphèreurbaineetconsidérantlesnombreuxprojetsoumétamorphosesdontilssontl’objet,lesterritoiresà lafois lespluslocauxmaisaussi lesplusmondiauxquisoient,car ilss’inscriventdans les incessantsprocessusdeterritorialisation,déterrito-rialisationetre-territorialisation(Raffestin,1986)quicaractérisentaupre-mierchefnotreépoque.Lesréponsesauxquestionsqueces territoiresposentenmatièredegouvernance,sinondebien-être,nousobligentde factoàbienprendreencomptecejeudeséchellesetdesintérêtsquiarticulelesrapportsquecesdiversacteursentretiennentnonseulementàl’égardduterritoire,maisaussilesunsenverslesautres.

    Or,considérantlacomplexitéetlavariabilitédenosrapportsauterritoire, toutspécialementenmilieupériurbain,etdès lorsquenoussommesfoncièrementinterpelléspardesprojetsmettantencauselesfon-dementsmêmesdenosrelationsàcelui-ci, l’imaginairen’est-ilpasunmoyentoutspécialementfécondd’abordersimultanémentlapraxis etletechnè?Lesfacettesmatériellesetimmatériellesdenotreconditionhabi-tante–paradigmatiquementséparéesdepuisDescartesàdesfinsdescien-tificité,sicen’estdemanipulation–sontsystématiquementindissociables(Taylor,1992,2003).Lacréationd’uneimage,parexemple,n’est-ellepasunemédiationquienappelledenossavoir-faire,savoir-direetsavoir-penser(technè),notammentlenon-ditetlepoïétique,poursaisir,opéra-tionnaliseretreprésenterdanstouteleurchargedesensune actionouuneréalitéeffective(praxis)(Wunenburger,1997)?Cettepuissanced’évocationdel’imaginairenes’avère-t-ellepasêtrel’assisenonseulementdetouteinnovationoucréation,maisencoredetoutesignification,carc’est ensonseinques’opèretoutletravaild’expression,d’affiliationetdesymbolisa-tion?Danscetteperspective,l’imaginaireestenquelquesorteunecondi-tion sine qua non non seulement de toute transformation sociale ouconstructioncollective (Castoriadis,1978),maisaussidenotrehabitus.Nouspermettantdepenser,sicen’estdefaçonnerunnouveaumonde,notamment lemondedeceluiqui fabriqueetquivitdans,età travers,uneimagechoisie(Castoriadis,2002),l’imaginaireproposesommetoutedes scénarii, schèmes interprétatifs et images qui, émanant soit de cequi est,decequiaété,decequiauraitpuêtreoudecequel’onvoudrait

  • Introduction 9

    quisoit,structurentettranscendentnosrelationsauterritoire,notammentàl’urbain.C’estcetteassertionquenousentendonsexplorerdanslecadred’uneréflexionsur l’imaginairegéographiquedéclinée icien troisaxesthématiques.

    Les thèmes explorésLapériphérie,disions-nous,peutêtreconsidéréecommebanaleenceciqu’ellen’estnidelaville,nidurural:elleestainsilethéâtredetensionscontradictoiresqui,émanantdecesdeuxmondes,suscitentdenombreusesquestionsquantàsonstatut,àsonrôleetàsondeveniraumomentoùelleestdeplusenplussollicitée.Commentparexemplefairecohabiterdesdynamiquesmétropolitainesavecdesdynamiquesagricoles?Com-mentrendrecohérentsdes territoiresvouésàunegestionconflictuelleau vudesusetcoutumescommedesloisetrèglementsdistinctsquilesgouvernent?Mais,plusencore,sileterritoire,fût-ilville-centre,banlieueoupériphérie,est strictementconsidérécommeunsubstratanonyme,simplesommedestraitsdesonsite(topographie,ressourcesnaturellesethumaines,etc.)etdesasituation(positionvis-à-visd’autrespôles,acces-sibilité,etc.), iln’équivautdès lorsqu’à l’undesnombreuxparamètresobjectauxàconsidérerauseind’unevasteéquationcirconstanciellequilevidedetouteautresubstance.Orcetteincapacitéàconsidérerleterri-toire commeunvéritablesujetàpartentière,qualifiéetdéfiniparlesgensqui l’habitent (et leursprédécesseurs)etqui, le faisantà leur image, luiconfèrentunepersonnalité,uneâme,estdirectementresponsabledesamé-nagementsardusquel’onenfaittropsouvent,pournepasdiredesnom-breuseserrancestantsociospatialesqu’environnementalesquiontdénaturétantdelieux.

    L’imaginairegéographique,notammentsous la formedeprojetoud’imageschoisies,avancions-nousci-dessus,nousapparaîtêtreunmoyenfortappropriépourrendrepluscohérents l’aménagementet lagestionduterritoire,notammentenredonnantàcederniertoutesachargedesensdifférenciatrice,et,de facto,enenrestituant toute ladimensionidentitaireetrelationnelle.C’estàtoutlemoinscequecherchentàfairevaloir laquinzainede textescolligés iciauseinde troisgrandsthèmespourcadrerleurpropos.Malgréleurapparentéloignement,cestroisaxesnouspermettrontdepénétreraucœurdecetimaginairegéographiqueetdeplusaisémentlerévélercréateuretanimateurd’espace,delieuetdeterritoire, leur fondementcommunétantd’interroger lesmodalitésdusentimentd’appartenanceetduvivre-ensemblequi,animant respecti-vementnosterritorialitésverticalesethorizontales(DiMéo,2004,2007;

  • 10 L’imaginairegéographique

    Bédard,2008),fondentetstructurentnosrapportsauterritoire.Eneffet,etquelsquesoient l’objetspécifiqueprivilégié, l’approchedisciplinaireempruntéeou lecadre théoriqueemployé, les textesdecesdiversaxesexplorentsommetoutelesmêmesgrandesquestionsquantànotrecondi-tionhabitante,dont:Quellesociétéidéalevoulons-nousconstruire?Quichoisitcette idéalité?Quivitcette idéalité?L’imaginairegéographiqueest-iletpeut-ilêtreun idéalpartagé?Devons-nousconsidérer lavillecommeunprojetpermanentetl’urbanitécommeunidéaluniverselsanscesserenouveléet innovant?Leterritoirepeut-ilêtredéfiniparunseulimaginaire?Commentrendre le territoireappropriableetnonexclusif?Commentfaireduterritoireuneproductionvéritablementsociale?Quelestnotrerôledanscetteproduction?Celaprécisé, introduisonsplusendétailchacundecesaxesetlestextesdesdiverschercheurscanadienseteuropéensquisesontprêtésaujeuauquelnouslesconviions.

    Partie 1. L’imaginaire et le paysage : la norme en questionCepremieraxedésiremontrerenquoil’imaginaireestcréateurdeterri-toire, sinon de manières de l’aménager. Les autorités nationales vontd’ailleursdanscesenslorsqu’ellesfontparexempledupaysageunnouvelintrantdelaconstructiondesesterritoires(Mercier,2002).QuecesoitauQuébec(aveclaChartedupaysagequébécois),enFrance(aveclaLoisurlaprotectionet lamiseenvaleurdespaysages)ouauseinde l’Unioneuropéenne(aveclaConventioneuropéennedupaysageentréeenvigueuren2006),lepaysageesteneffetdevenul’expressiond’unintérêtcollectifautourduquelchacunseretrouve.Àl’instardeGuéneau(2001)etJacobs(2005),nombreuxsontceuxquipensentquelepaysageseraitparailleursunmoded’expressionprivilégiéde laperpétuelleréinventiondenotremoded’habiter.Entenducomme«unecompositionchoisieetsensibledenotreimaginaire,tournéecertesverslemondenaturel,maisencoreet sur-toutvers[…]nosmesuresetnosattentes»(Bédard,2009,p.300),lepaysagemontresurtoutque lanorme(qu’il s’agissede législationou d’attentesconditionnéesparune imageouunereprésentationd’un lieu)entreauserviced’uneémotionstructuranteduterritoire.L’aménagementduter-ritoireetl’urbanismeontalorspourdessein(oudevraientavoir,cartousn’yconcourentpascommeilseraiciillustré)deprotégercetterecherched’émotion,maisaussidelamettreenvaleur,etd’encréerdenouvellespouvantcompléteretrenforcersapoétique.Cespaysages,sinoncesimages,instituésouexhaussésparl’entremised’unegestepolitiqueetaménagistemoduléeparunenormepaysagère,sicen’estunidéaldemilieuoudemodedevie,n’ontpaspourdesseind’endiguer lepouvoird’évocationdes territoiresciblés,maisaucontrairededavantage leurpermettre,etdoncàleurspopulations,defonctionnersouslerégimedel’authenticité

    Extrait de la publication

  • Introduction 11

    (Berque,2004).Lesecondgroupedetextes icirassemblésproposeainsidevoiren quoilesterritoires,notammentenpériphérie,peuventseréin-venterlorsqu’ilssontinterpelléspardesexpériencesurbanistiquesoudespropositionspaysagèresenquêted’uneplusgrandeauthenticité,véritablemoteurdesdiscoursaménagistesencedébutdexxiesiècle.

    Cetidéald’authenticitéesttoutspécialementabordéparLeCouédic,quiexplorelaconfrontationentre,d’unepart,unurbanismefonctionnaliste,foncièrement techniciste, largementmodélisable,cheràLeCorbusierettoujourspopulaire,commeentémoignentdiverscasrécentsd’aménage-menturbainenFrance,puis,d’autrepart,unurbanismeplusenphaseaveclesspécificitésdechaqueville,notammentdanssesexpressionsartis-tiques.SoitunurbanismequiestpostuléparCamilloSitte,dèslorsplusàmêmedepermettreàsonquant-à-soietàsonsenspropredelibrements’exprimer,véritableartdebâtirlavilleetdenourrirlesentimentd’appar-tenancedeseshabitants.Prenantactede l’incidencegrandissantede lamiseenmarchédesterritoirespardesimagesdemarque(brandingterri-torial),Bédardinterroge lareprésentativitédeces imagesetde factodespaysagesainsisélectionnés.Soutenantlathèsequelesconflitsd’usageetd’incompréhensionquicaractérisentsisouventnosinterventionsaména-gistessontattribuablesàun imaginaireatrophiéetàune imaginationdéterritorialisanteenvertunotammentd’imagessous-représentativesdic-téesparunecultureduvoiretdesseulesapparences,lasolutionpourraitselon luivenirenpartied’unprojetdepaysagesqui, faisantappelà lavocationcréatricedenotreimaginationetauxvertusfédératricesdespay-sageslesplussymboliquesduterritoireciblé,pourraitrelancerlecaractèreinstituantdenotreimaginaireetenappelerd’uneiconographieplusaudiapasondusensdulieutelqueperçu,vécuetsouhaitéparseshabitants.

    À partir du cas de la périphérie montréalaise, Paquette etPoullaouec-Gonidecexaminentégalementcesquestionsd’authenticitéet dereprésentativité.Désireuxdemontrerdequellemanièreuneperspec-tivepaysagèreconstitueunélémentclépourpenser l’articulationentreimaginaire,paysageetprojet,ilsillustrentenquoil’imaginaireestindisso-ciabledel’actionetdudevenirurbains.Plusprécisément,ilssedemandentcommentl’imaginairemoduleledéveloppementdesterritoirespériphé-riques;silepaysageestconsidérédansleursprojetsd’aménagement,etquellelecturedesterritoiresconvoque-t-il?Ilssedemandentégalementquelsmoyenspeuventêtremisenplacepourstimuleretengagerdavantagelesimaginairesque lespopulationshabitantes, leséluset lesaménagistesentretiennentrespectivementenverslesterritoiresetcadresdeviepériur-bainsafind’enrichir lesprocessusdeplanification.Reprenantcette idéed’imaginairesnonenphaseetl’assertiondeBachelardselonlaquelleentrerdansl’actionbloquel’imagination,Banzo,Bigando,CouderchetetTesson

  • 12 L’imaginairegéographique

    cherchentàsavoircommentsestructurentavantl’actionlesimaginairesaménagistes,politiquesetsociaux.Pouryparvenir,etàpartirdel’exempleduparcdeJallesdanslapériphériebordelaise,ilsdémontrentenquoilesimaginairesaménagisteetpolitiqueyfontfidel’imaginairehabitant,puiscommentilssontlargementmarquésparlemythevertueuxdelanatureenville,unmytheicipeunovateurpuisquevecteurdeprojetsreproduisantunimentlesseulespratiquesrecevablesauxpluspetiteséchelles.FreedmanillustreenfinenquoiilestpossiblederefaçonnerletissusocioterritorialdelavilledeQuébecenyconstruisantdetoutespiècesunquartierchinois.Uneconstructionpossiblenonpasàpartirdelaréhabilitationdesoncadrebâtioudesesfonctionsd’antan,puisquejamaispareilquartiern’aexistéetquenulleconcentrationchinoisen’yaétésignificative,maisbienàpartirdela(ré)inventiond’unlieuoùlesChinoisétaientparticulièrementvisiblesgrâceauxreprésentationsquelesunsetlesautress’enfontetauxrepré-sentationsnourriesnotammentpardiversesproductionsartistiques.Une(ré)inventionqu’elledémontrecommeattribuable,d’unepart,auxvelléitésdesautoritésmunicipalesdésireusesdesoulignerainsi,fût-ceparmythi-fication, lecaractèremultiethniqueetaccueillantde laville;et,d’autrepart,àcertainsdescendantschinoisdésireuxdes’ydotersoitd’unlieufondateur,soitd’unpôlededéveloppementquileursoitpropre.

    Partie 2. L’imaginaire séducteur au service du localQuantaudeuxièmegroupedetextes,ilposeplusdirectementlaquestiondel’attractivitédesterritoires.L’imaginaire,quecesoitparpurecréation,sinonparl’entremisedupaysage,delamiseenpaysageoudelamiseenimages,re-contextualiseleterritoiredanssonacception,soninterprétationetsamiseenscène.Surtout,etcecidifférenciecetaxeduprécédent,sonattractivitéesticipostuléecommeétantindissociabled’unestratégiedeséductionlocale,notammentpourfavoriserlarétentionouledéveloppe-mentlocalqui,dansuncontextedemondialisation,cherchelocalementàrépondreàdesenjeuxglobauxparlavalorisation,lagestionetladurabi-litédesonterritoireàtraverslesobjetsquesontlepatrimoine,letourisme,lespratiquessportivesetculturelles.L’attractivitédeslieuxestd’ailleursgénéralementinterprétéecommeleseulmoyensurlequelletourismepeutêtredéveloppé(Lew,1987),aupointparailleursdefaireadveniruntou-rismede l’imaginaire.Certainsavancentmêmeque, sansphénomèneattractif, lesmodalitésdutourismeactuellementconnuesnepourraientexister (Gunn,1988).Maisau-delàdecettestratégiedemiseenvaleurtournéevers l’extérieur,considéréecommeessentielleàsondéveloppe-ment,cetravailsurl’attractivitédoittoutautantavoirpourrôledeconfor-teraupremierchefleshabitantsduditterritoire,etainsitoutautantassurer

  • Introduction 13

    leurbien-êtreenleuroffrantdesbiensetservicesrépondantàleursattentesquenourrirleursentimentd’appartenanceenvertud’unmilieuetd’unmodedevieàl’intérieurdesquelsilspeuventseprojeteretsereconnaître.

    Celaétantprécisé,cettedeuxièmesectionentendtoutspécialementexplorerlesmodalitésdecréationdelieuxplusspécialementévocateursouattractifs,ceslieuxqui,fussent-ilspureabstraction,établissentunrap-port familieroudeséductionavec l’autre, le toutenvertud’untravailsoutenusurl’imaginaireduditlieu,detellesorteque,sansparexemplelesavoirvisitésouhabités,ilssignifientassurémentquelquechosepourceluiqui lesnommeouqui lespense.Laquestionestdevoircommentl’émergencedepareilslieuxhautementsignificatifs,sicen’estfortementsignifiés(Bédard,2002a)puisquecréateursd’imaginaire,estpossible,ous’effectuedansuncontextedeforteconcurrenceoùlesterritoirespeinentàsedifférencier.Onscrute ici toutparticulièrement lesmodalitéset lesintentionsdemiseenvaleurd’uneculture,d’unetradition,d’unpatri-moine,etc.,afindecomprendrecommentlesdiversagentslocaux(asso-ciatifs,économiques,institutionnels…)chantentleslouangesde«leurs»lieuxpourattirer leplusgrandnombredevisiteursoud’investisseurs,toutencontinuantde faire sensauprèsde leurshabitants,maisaussicommentilssontprêts,pouryparvenir,à(ré)inventerdeslieuxouàleurgrefferdestraitsexogènesprésumésaccrocheurs.

    Breux,quiétudiel’importancedelaconcordancedesimaginairespourarriveràunaménagementdu territoirepérenneet recevable, sedemandes’ilyaunimaginairespécifiquequianimeleprojeturbain,puissicedernierestpartieprenantedel’imaginairegéographiquecollectifduterritoireoùilentendseréaliser.AnalysantàpartirducasdeGriffintown,àMontréal,ladimensionutopiqueetcréatricedel’urbanismecontempo-rain,elleexaminelafaçondontestprésentéceprojeturbainparsespro-moteurset lesélus.Ellesepencheégalementsur lamanièredont ilestperçupar leshabitantsdece lieu,soulignant ledécalagequ’ilyaentrelesreprésentationsdesunsetdesautres,etdoncentrelesidéauxdéve-loppementauxquisontprêtésàceterritoire.ÀpartirducasduvillagedeMont-Tremblant,situéaunorddeMontréal,Morissetdécortiquelafictionarchitecturalequil’aconstituéetqui,recyclantlemythedelaspécificitéquébécoiseaumoyend’emprunts,derelectures,voiredecréationsex nihilo,enafaitunvillagequébécoistoutàfaitvraiettoutàfaitfaux,parfaitementlocaletparfaitementétranger.Méditantsurlanatureetlavocationdelamémoirepatrimoniale,elleindiquequ’au-delàduchoixd’imagespropresàunemiseenmarchépeuvent s’édifierdevéritables stratégiesarchi-tecturalespermettantlamiseenplaced’unimaginaireidentitaireautre,étrangerau lieud’implantation,quipeutnonseulementre-signifierce

    Extrait de la publication

  • 14 L’imaginairegéographique

    lieu,maisaussidevenirpartieprenantedesonpatrimoinesiceuxquilerecherchentycroient suffisammentet le fréquententassidûmentpour«forcerlamain»auxautorités,voirefairedouterlesgensducru.

    Réfléchissantsurl’imaginairedutourismefrançaisdel’entre-deux-guerresàpartirdelacartepostaled’unefilletteenvoyéeàsesgrands-parentsdepuisunestationbalnéairede laCôted’Opale,dans lePas-de-Calais,Lazzarotti sonde pour sa part les dispositifs psycho-géographiques àl’œuvredanslerécitquel’enfantpropose.Ilydémontrequelagéographieestnonseulementl’undesmatériauxdesesreprésentations,maisencorel’undesprincipesactifsdeladynamiquepsychologiqueetdel’imaginairesocioterritorialqu’elledépeint.Désireuxd’illustrerquel’imaginairepar-ticipeàlaconstitutiond’unnoussocialetcultureldansleprocessusd’auto-institutiondelasociété,Favoryinvestiguelanotiond’imaginairepatrimonialurbain,tellequ’elleestappliquéeàBazas,auSud-Gironde,pourmobiliserdesreprésentationssocialeslorsdel’élaborationd’unepolitiqued’urba-nismepatrimonial.Ilproposeàcettefinuneméthoded’analysequi,lar-gementinspiréedessciencescognitivesetpolitiques,puisarticuléeautourdelanotiondespatialitéreprésentative,chercheàcomprendrelapartdesreprésentationssocialesdansunsystèmed’actionslocalisées,etpluspré-cisémentàcernerdanscesreprésentationslesrelationsquilientlespatial,lesocialet lecognitifcomme leshiatusquisubsistententre lesdiversgroupesconcernés.

    Suiventenfindeuxtextesquiontpourobjetdemettreplusspé-cialementenévidencel’importancedesartspournousrappelercombiencesdernierspeuventstructurerourecentrernosregardsetnospratiquesurbaines,etquec’estnotammentàtraversladéconstructiondutravaildel’artiste,plusprécisémentgrâceàl’explorationdestenantsetaboutissantsdenosreprésentationssocioterritoriales,quepeutêtresaisiesinonréin-vestienotreconditionurbaine.Cettedémarchehybrideou fusionnelleentrelessciencessocialesetlesarts,dontlalittératureetlaphotographie,acecideparticulièrementbénéfiquequ’elleproposed’autresapprochesdelaréalité,sinondelareprésentationquenousnousenfaisonsouqu’onnousenfait.

    Grâceauxarts,leterritoireetlesrapportstantmatérielsqu’imma-térielsquenousentretenonsàsonendroitsedévoilentcommejamaisdanstouteleurcomplexité.Lesartistesnesont-ilspaslesmédiateursparexcel-lencedecettecomplexité,plussensiblesqu’ilsseraientàl’indicibleetàlapoésiedenotreconditionhabitanteetdèslorsplusàmêmedeladéchiffreretdelacommuniquer?Laprincipalefonctiondel’artn’est-ellepas,selonProust(1973/1954),denousaideràsaisirleRéeldanstoutesadémesure,etdoncàtranscenderlaréalitépourretrouverl’essencedeschosesetle

  • Introduction 15

    vraisensdel’existence?Sil’espacepeutêtreconsidérécommeuntexte(Barthes,1985),nefaut-ilpasaussiaborderleslieuxdansletexte,leslieuxcommetexteetmême le textecommelieu (Westphal,2000;BrookeretThacker,2005;Brosseau,2008a)?PourLefebvre(2000/1974),lespratiquesspatialessontdanslaproductionetlare-productiondereprésentations.Dèslors,lesartsnoussontprécieuxenceciqu’ilsnouspermettentd’inter-rogernosconnaissances,noscodes,nosnormesdanslaproductionetlare-productionmêmesdeces représentations.Voiren l’espaceun récitprocuresommetouteausujetlepouvoird’interpréteretdedonnersensaumonde.

    C’estàtoutlemoinscequeBrosseauchercheàdémontreralorsque, illustrantenquoi lesbas-fondsdépeintsparBukowskinourrissentdesimaginairesgéographiquesconquisouconquérantsquiinformentnospratiquesettrajectoiresurbaines,ilproposeuneconceptiondialogiquedel’imaginairecommeformedemédiationquis’inscritdefaçonrécursiveentre le sujetet l’objetextérieurpourdonnersensà la relationque lepremierentretientaveclesecond.Àpartirducouplagephotographieetcommunication,puisdulienàfaireentrelareproductiontechniquedesimagesetlareproductionsocialedespratiques,Paquetexploreelleaussil’idéeque lesreprésentationsconditionnent les imaginairespuisqu’elleslesprécèdentsystématiquement.Pourledémontrer,ellesedemandecom-mentunecertaineformedereprésentationpeutdevenirlaconditionpre-mièred’unmodestéréotypédeproductiondel’espace,puisillustrequecesmêmesespacesdereprésentation, lorsqu’ilssontré-appropriésparl’arturbain,peuventêtreconsidéréscommemodesalternatifsdeconsti-tutiond’imaginairesurbainsporteursd’utopies.

    Partie 3. L’urbanisme affinitaire comme finalité imaginaire ?Ledernieraxetraitedel’imaginairedansl’undesesaboutissementslesplusstructurants,sicen’estdesplusévocateurs.Leterritoire,onleconstatedeplusenplus,sefragmenteenunemultituded’archipelsplusoumoinsreliés lesunsauxautres.Cette logiqued’archipels,héritéedes logiquesdumondeindustrieletpostindustriel, remetenquestionnotrecapacitédeproduireunespacecohérent (Choay,1972). Il s’ensuitdes logiquesaffinitaires (Donzelot,2003)voulues (de typecommunauté fermée)ousubies(lieuxoùnerestentqueceuxquin’ontpupartir)quisontautantdedéterritorialisationsnousintimantaujourd’huiàpenserlesdiverspro-cessusde reterritorialisationqui sontà leursuccéder (Raffestin,1987;Ferrier,1998).Cesprocessussontdeplusenplussollicitésalorsquenosvillessontàserequalifier,sicen’estàserepositionner,quecesoitsous

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  • 16 L’imaginairegéographique

    lapressiondepériphériessanscesseplusdemandantes,d’uncadrebâtitoujoursàréviser,puisdesegmentsdelapopulationdeplusenplusciblésoustigmatisésetauxquelsnotreurbanitépeineàrépondre.

    Cettedernièresectioninterrogeàcettefinunimaginairetripartite,simultanémentsocial,territorialetpolitique.Leterritoire,s’ilestaisémentconsidérécommeunesécession,etdonccommeseulobjet,estaussisujet,commenousl’avonsauparavantétabli.Aussicroyons-nousqu’ilpeutetdoitconduiretousetchacun,élus,gestionnaires,promoteursethabitants,àrepenserlacapacitédenossociétésà faire société età « fairesens» parson truchement,c’est-à-direà rendredenouveauopératoireunvivre-ensembleetsignifiantunsentimentd’appartenance.Commentfaire,danscesconditions,pourquel’imaginairenesoitpasseulementlevecteurd’unidéalélitisteetd’unentre-soia-territorial,maisqu’ilfavoriseplutôtunedimensionpartagée,communautaire,identitaire,etc.,duterritoire,d’unlieu,d’unespace?Commentl’imaginaire,toutspécialementlorsqu’ilestgéographique,peut-ilallercontrepareilcloisonnementoupareilledéshé-renceetconduireaupartage,sansrupturesociale,d’unterritoire?

    LatenuedesJeuxolympiquesd’étéestpourtoutevillel’occasionrêvéedesefairevaloiretdesepositionneravantageusementsurl’échiquierdesmétropolessurlesquellesondoitcompter.Ilresteque,pourcefaire,lavillesélectionnéedoitréaliserunprojeturbaincomplexeettrèscoûteuxquia immanquablementunfort impactsursa trameurbaine,voiresurl’imaginairedeseshabitants.Faisantleurl’idéeselonlaquellepareilévé-nementprocèded’unephilosophiesportiveépriseduseulaspectéphémèrede laperformance,Roult,LefebvreetLaurentcherchentàcomprendrecomment lestadeolympiquedeMontréal,principale infrastructuredesjeuxquiyeurentlieuen1976,aétéplanifiépuisreconvertidansunenvi-ronnementurbaind’abordnonadapté. Ilsexplorentàcettefin les ima-ginairesgéographiquesdesdiversacteursconcernéspourdégager lesdiverseslogiquesaménagisteseturbanistiquesàl’œuvre,puisleursréper-cussionssurlepaysageéconomiqueethumainmontréalais,etaupremierchefsurlequartieroùilaétéédifié.Proposantunelectureinterprétativedesannoncespubliées sur le logementneufdansungrandquotidienfrancophonemontréalais,etplusspécialementsurcequis’apparenteàdesenclavesrésidentiellessécurisées,Séguinétudiequantàellelesrepré-sentationsduvivre-ensemblequiysontdépeintesetlesvaleursqu’ellesévoquent.Ellesedemandeainsisil’enclavementphysique,laprivatisationdeséquipementsnormalementpublics, larecherchede lasécuritéet lereplicommunautairesontdesobjectifsàcepointvalorisésparlesMontréalaisque,structurantleurimaginairehabitant,ilsdominentlediscourspromo-tionnelsurlelogementneufetfavorisentde factouneplusgrandeségré-gationurbaine.S’intéressantauxpratiquessystématiquesdediscrimination

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  • Introduction 17

    misesenœuvreàMontréalpourchasserceuxquifonttacheaucentre-villequ’ons’évertueàrevitaliser,ParazellietRobitailleessaientdedéterminercommentlesautoritéspubliquesetlespromoteursdecesprojetsarriventàjustifierleursmesuresderépressiondessans-abri.Pouryrépondre,etunpeucommeSéguinouRoultet al.,ilsscrutentlesreprésentationssocio-spatialesquisontfaitesdessans-abridanslesespacespublicsmontréalaisparlesdiversacteursconcernésettellesqu’ellessontexpriméesdanslesdeuxprincipauxquotidiensfrancophonesmontréalais.Ilsillustrentnotam-mentquec’estgrâceàun imaginaireécosanitairequ’on justifiepareilleségrégation.

    Reprenant en quelque sorte les propos des uns et des autres,Wunenburgeropposedemanièreplussystématiquelesdeuxgrandstypesd’imaginairequisemblentmodulernotreurbanité.Pourcombattre leslotissementssansâmeoumettrefinauxterritoiresréservésauxdéclassés,ilyauraitd’unepartunimaginaireutopiqueperformatifquiferaitcoexisterfonctionnellementleshabitatsetgrâceauquelonpourraitextirperdelavilletouteslestensionsetviolences.Convaincuqu’onnepeutainsipro-duire«mécaniquement»descomportementssurmesure,Wunenburgerverraitd’autrepartunurbanismealternatifpoétiquequi,sensibleàl’ima-ginationetàlamémoiredesgens,s’émancipedelaseuleraisonetvaloriselesdimensionssymboliquesetmythiques.Attenduquel’unetl’autrenesontpassansvertuset limites, l’espaceurbain,poursuitWunenburger,doit(re)devenirunmondedifférencié,complexeetholistique.Etlespéri-phériesurbaines,champdetous lespossiblessoutient-il,nousdonnentl’occasionderevoirlesprincipesetlesvaleursquifontdelavillelemilieuoùsedéfinissentnotrevivre-ensembleetnotreêtre-au-monde.

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  • Épine 17,6 mm396 p. / 100 M

    puq.ca,!7IC7G0-fdcefi!

    ISBN 978-2-7605-3245-8

    À la fois existentielle et identitaire, notre condition territo-riale nous oblige à nous intéresser aux diverses lectures que nous faisons de notre territoire puisque ce sont elles qui dictent nos comportements à son égard. Or le regard que nous portons sur notre territorialité est fort complexe. Si nous la percevons par nos sens, nous l’appréhendons aussi à partir de nos schèmes cognitifs et de nos valeurs. Regarder un paysage, par exemple, ne consiste pas à en dégager une image neutre, mais plutôt à en reproduire une image déjà pleinement codifiée et signifiée. Pareille lecture agit donc d’elle-même, partie prenante d’un imaginaire géogra-phique qui structure le regard comme l’usage que nous faisons du territoire. Et c’est cette idée, selon laquelle l’imaginaire géo- graphique serait la matrice de notre présence au, de et par ce monde, que les scientifiques de divers horizons réunis dans ce livre souhaitent explorer en le posant comme un, sinon le principe fondateur de notre condition territoriale.

    Mario Bédard, Ph. d., est professeur agrégé au département de géogra-phie de l’Université du Québec à Montréal, membre du Centre de recherche sur les innovations sociales (CriSES) de l’institut du patrimoine et membre du Centre Gaston Bachelard de recherches sur l’imaginaire et la rationalité.Jean-Pierre augustin, Ph. d., est professeur à l’Université Michel de Montaigne de Bordeaux et membre de l’UMr adES (aménagement, déve-loppement, Environnement, Santé et Sociétés) du CNrS.riChard dESNoillES, Ph. d., est post-doctorant en urbanisme et en aménagement du territoire à l’Université de Bordeaux iii (adES) et à l’Uni-versité du Québec à Montréal (CriSES).

    Ont COLLaBOrÉ À Cet OuVrageJean-Pierre augustin Mayté Banzo Mario Bédard éva Bigando Sandra Breux Marc Brosseau laurent Couderchet richard desnoilles Michel Favory Martine Freedman Julien laurent olivier lazzarotti daniel le Couédic Sylvain lefebvre lucie K. Morisset Suzanne Paquet Sylvain Paquette Michel Parazelli Philippe Poullaouec-Gonidec Charles robitaille romain roult anne-Marie Séguin Frédéric tesson Jean-Jacques Wunenburger

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    Géo ColleCtionGéographie Contemporaine

    Sous la direction de Mario Bédard, Jean-Pierre augustin

    et richard deSnoilleS

    L’imaginaire géographiquePerspectives, pratiques

    et devenirs

    3245D-Couvert.indd 1 11-12-07 10:49

    Extrait de la publication

    Perspectives, pratiques et devenirsL’imaginaire et l’urbain : quel imaginaire et quel urbain ?Dessein d’un tel positionnement vis-à-vis de l’imaginaire géographique et du périurbainDe l’imaginaire à l’utopie en passant par la notion de projetLes thèmes explorésPartie 1. L’imaginaire et le paysage : la norme en questionPartie 2. L’imaginaire séducteur au service du localPartie 3. L’urbanisme affinitaire comme finalité imaginaire ?

    L’imaginaire géographique, un contrepoint à la réalité ?IntroductionListe des figures