auteur et image d’auteur en analyse du discours

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  • Argumentation etAnalyse du Discours3 | 2009 :Ethos discursif et image dauteur

    Auteur et image dauteur enanalyse du discoursAuthor and Image of the Author in Discourse Analysis

    DOMINIQUE MAINGUENEAU

    Rsums

    Franais EnglishLe dveloppement rcent, dans le champ de lanalyse du discours, dune rflexion sur lauteur et limage dauteur met en cause les distinctions traditionnelles : lauteurnest ni lnonciateur du texte, ni une personne en chair et en os, qui relve du contexte.Quant limage dauteur , elle nappartient ni au producteur du texte ni au public ; elleest le produit dune interaction entre des intervenants htrognes.Tout dabord, on sefforce de clarifier le terme auteur , qui peut avoir un fonctionnementrelationnel ( lauteur de ce tract ) et un fonctionnement rfrentiel ( unauteur important ). On distingue trois dimensions dans la notion dauteur : 1) linstancequi rpond dun texte : auteur-rpondant , 2) lauteur-acteur , qui, organisant sonexistence autour de lactivit de production de textes, 3) lauteur corrlat dune uvre, dunopus : l auteur-auctor , qui est susceptible davoir une image dauteur .On cherche ensuite dfinir quelles conditions une entit peut accder au statutd auctor . Lexistence dune nom propre ne suffit pas. Divers cas sont tudis : leshommes politiques, qui ne rdigent pas eux-mmes leurs discours, les marquescommerciales, les agences de publicit, les tres collectifs (partis politiques, groupesdartistes).Enfin on aborde les problmes pos par le dveloppement dInternet : lauteur dun blogpeut-il prtendre au statut d auctor ? Sur Internet le statut d auctor apparatmenac par la prolifration des producteurs et des textes, par la disparition des mdiateurset par linstabilit des textes. Cette rflexion est illustre par ltude de deux blogs : celuidune caissire dhypermarch qui est devenue clbre grce son blog et celui duneblogueuse inconnue nomme Julie . Dans la phrase de transition actuelle entre le rgimetraditionnel o dominait limprim et un rgime numrique en transformationperptuelle, on doit se demander si Internet va ou non crer de nouvelles formesdauctorialit.

    The recent development, in the field of Discourse Analysis, of a reflection on the notions of

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  • author and image of the author calls into question traditional distinctions: authors areneither the enunciators of the text nor persons in the flesh, who are part of the context. Asfor the image of the author, it depends neither on the producer of the text nor on theaudience: it is the result of the interaction between heterogeneous stakeholders.To begin with, we shall try to clarify the term author , which can establish a relation(the author of this pamphlet) or designate an individual (an important author). Adistinction is made between three dimensions of the notion of author : 1) the entity thatanswers for a text : the author as a guarantor, 2) the author as an actor who has aspecific status in society, 3) the author as correlated to a work, an opus: the author-auctor,who can be associated with an image.We then try to analyse under what conditions an entity can rise to the status of auctor .Having a proper name is not sufficient. Various cases are studied: the politicians, who donot write their discourses, companys brands, advertising agencies, collective beings(political parties, groups of artists).Finally, we tackle the problems raised by Internet: can the author of a blog claim to be anauctor ? On the Web the status of auctor is at risk, because of the proliferation ofproducers and texts, the elimination of the mediators and the instability of texts. Thisreflection is illuminated by studying two blogs: that of a supermarket cashier who gotfamous thanks to her blog and that of an unknown woman named Julie. In the currenttransition from the traditional regime of textuality, when printing prevailed, and a digitalregime which is constantly evolving, one must wonder whether Internet will or will notcreate new forms of authorship.

    Entres d'index

    Mots-cls : analyse du discours, auteur, auctorialit, image dauteur, rpondant, auctor,blog, InternetKeywords : discourse analysis, author, authorship, image of the author, guarantor, auctor,blog, Internet

    Texte intgral

    Un tournant dans les tudes

    Quand on veut tudier la notion d image dauteur , on se heurte a priori trois difficults :- Comme le souligne la syntaxe, cette notion mobilise non pas une mais deuxproblmatiques : celle de lauteur, et celle de limage dauteur. La solution defacilit consiste se focaliser sur limage, en prenant lauteur pour une donnestable. Malheureusement, il nen est rien : on est bien oblig de se demander dequelle instance limage dauteur est suppose tre limage .- Si la notion dauteur est tablie depuis longtemps dans le vocabulaire de lathorie littraire1 et a fait lobjet dintenses rflexions, celle dimage dauteur estrcente. Certes, on na pas manqu demployer et l lexpression imagedauteur , quoique plutt sous la forme limage de tel auteur dans tel lieu et/ou telle poque , mais ces tudes taient menes du point de vue de la rception.Les questions que lon peut poser aujourdhui partir de la notion dimagedauteur taient auparavant disperses dans diverses rubriques de lhistoirelittraire et ntaient pas intgres dans un cadre thorique cohrent.- La problmatique de limage dauteur, mais aussi et surtout celle de lauteur, sesont dveloppes presque exclusivement sur des corpus littraires. Il nest doncpas vident den traiter dans une perspective plus large danalyse du discours.

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    Autant dire que le texte qui va suivre ne prtend pas dvelopper une thorieconstitue, mais mettre en place un certain nombre de repres.

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  • littraires

    Plusieurs mthodes introduisent une distinction entre auteur rel et auteur implicite , lecteur rel et lecteur implicite . L auteur rel est la personne qui a compos le rcit. Par auteur implicite on dsignelimage dauteur que le texte engendre progressivement au cours de lalecture (avec sa culture, son temprament, ses tendances, sa foi, etc.)[http://www.portstnicolas.org/Interpretation-de-la-Bible-dans-l.html,accd le 8/12/2008].2

    Le fait que la problmatique de limage dauteur soit rcente dans les tudes littraires peut sexpliquer. On peut y voir une manifestation parmi beaucoupdautres dun tournant qui est en train de soprer autour des courantspragmatiques et de lanalyse du discours. Comme jai essay de le montrer diverses reprises (Maingueneau 2004 ; 2006),ce tournant implique une mise encause la coupure immmoriale entre le Texte , ncessairement majuscule, etson contexte , coupure qui fondait tacitement la sparation entre histoirelittraire et tude immanente des uvres, que celle-ci soit thmatique,stylistique, narratologique... Cette coupure a t radicalise partir du 19e sicledans le rgime esthtique qui trouv son couronnement dans le ContreSainte-Beuve de Proust, qui tablit une opposition quasi sacre entre moicrateur et moi social . Une telle esthtique ne peut que rejeter uneproblmatique de l limage dauteur .

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    Cette coupure a su perdurer sans difficult dans les approches de typenonciatif. Il suffit dobserver lobstination avec laquelle on sattachecommunment bien sparer le narrateur et lcrivain , lintratextuel etlextratextuel. Elle peut mme passer lintrieur de la notion dauteur. On le voitdans ces quelques lignes extraites dun document prsent par le futur Pape, leCardinal Ratzinger, au nom de la Commission biblique pontificale quisynthtise et vulgarise diverses approches de la Bible ; dans la rubrique analysenarrative on trouve ces lignes :

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    Une telle distinction est indiscutable, mais on voit que, prise dune certainefaon, elle conforte la topique immmoriale dun intrieur et dun extrieur dutexte. En tmoigne linterprtation de la notion d image dauteur , qui estenferme dans lespace du texte. Les choses ne seraient sans doute pas si simplessi lon sinterrogeait sur lauteur en tant quinstance qui signe le texte : dans ce cas,en effet, il ne sagit ni de la personne de l auteur rel ni de l auteurimplicite .

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    En fait, les notions dauteur et dimage dauteur excdent les catgorisationstraditionnelles. L auteur celui dont traite Foucault dans son fameux texte de1969 nest ni lnonciateur, corrlat du texte, ni la personne en chair et en os, quiserait renvoye au contexte . Quant limage dauteur , elle nappartient niau producteur3 du texte ni au public ; elle constitue une ralit instable, le produitdune interaction entre des intervenants htrognes.

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    Si lon peut dvelopper aujourdhui une rflexion sur limage dauteur, cest quela mise en scne discursive de lcrivain nest plus apprhende comme unensemble dactivits qui demeureraient lextrieur de lenceinte sacre du Texte,mais comme une dimension part entire la fois de la communication littrairecomme co-nonciation et du discours littraire comme activit dans un espacesocial dtermin. On retrouve un niveau de complexit suprieur le principemme dune scne dnonciation des uvres (Maingueneau 1993, 2004) :noncer en littrature, ce nest pas seulement configurer un monde fictionnel, cestaussi configurer la scne de parole qui est la fois la condition et le produit de

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  • En analyse du discours

    Auteur et image dauteur

    cette parole. Des problmatiques troitement lies comme celles de lethos (Maingueneau 1987, Amossy (d.) 1999), de la posture (Viala 1993, Meizoz2002) ou, plus rcemment, de limage dauteur , chacune dans leur ordrepropre, vont dans le mme sens.

    La difficult consiste videmment ne pas passer dun textualisme un sociologisme qui nous ramnerait, sous un visage diffrent, au dispositiftraditionnel.

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    En matire de rflexion sur lauteur lanalyse du discours souffre dun dficitcertain. Dans leur grande majorit, ceux qui sen rclament ont lud la fameusequestion pose par Michel Foucault la fin des annes 1960 ( Quest-ce quunauteur ? ). Pourtant, une analyse du discours qui assume pleinement la diversitdes genres de discours ne devrait pas luder cette question, quelle rencontre sanscesse.

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    La rticence des analystes du discours peut se comprendre, si lon considre lesconditions dans lesquelles sest dvelopp leur champ de recherche.

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    Je ninsisterai pas sur les recherches menes en Amrique du Nord, o ce sontde manire privilgie les corpus conversationnels qui ont t pris en compte ;pour ce type de corpus lanalyste peut avoir limpression que la question delauctorialit est dpourvue dintrt : les locuteurs sont l, en chair et en os, lesparoles qui sortent de leur bouche sont leurs paroles. Ici lauteur sabsorbe dans lelocuteur.

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    En revanche, le dficit de rflexion sur lauctorialit peut sembler plussurprenant dans lanalyse du discours europenne, et surtout francophone, olon accorde une grande importance aux corpus crits.

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    On pourrait expliquer cette rticence par le fait que lanalyse du discours, dansla mesure o elle a occup les corpus laisss libres par les facults de lettrestraditionnelles, a largement vit aborder des types de discours comme le discourslittraire, religieux ou philosophique, domaines o la question de lauctorialit estdifficilement ludable.

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    Mais il est aussi permis de se demander si la problmatique de la polyphonielinguistique, et plus largement tout ce qui tourne autour de lhtrognit ou dela modalisation, na pas fait obstacle une rflexion sur lauctorialit. Ces travauxposent en effet la question de la pluralit des sources nonciatives, mais endemeurant dans un espace linguistique. Ce faisant, ils se placent dans leprolongement de certains prsupposs de la linguistique moderne, qui prfreloralit et souscrit spontanment la mfiance que Socrate exprimait dans lePhdre lgard de lcriture : un crit na pas de pre pour lassister. De fait, parnature un crit a un auteur, pas un locuteur. Lauctorialit vient miner latransparence du langage, elle excde la stricte communication linguistique.

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    La notion dauteur se construit sur deux restrictions successives. La premire neretient parmi les emplois du mot auteur que ceux qui ont trait la productiondun texte. La notion dauteur nest en effet nullement rserve aux productionsverbales. On ne dira pas, sauf dans des contextes trs particuliers, lauteur de lavoiture ou lauteur du bricolage , mais on voit prolifrer dans les mdias desdsignateurs tels que lauteur des injures , lauteur des coups de couteau ,

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  • Titre sur Internet : Ligue 1 : lauteur des propos racistes sera jug le 18 mars. [http://www.europe1.fr/Sport/Football/L1-L2, consult le 31/10/08] Lors du procs devant les assises des Alpes-Maritimes, au mois defvrier 1994, les graphologues Florence Buisson-Debas et Gilles Gessner,asserments auprs du tribunal de Nice, ont affirm que Ghislaine Marchaltait bien lauteur de la phrase fatale. [http://hebdo.nouvelobs.com/hebdo/parution/, consult le 31/10/08]

    [Sans compl. de n., absol. ou suivi dun adj. dterminant lorig., le genre, laqualit de lauteur]1. LITTRATUREa) Celui ou celle dont la profession est dcrire des romans, des pices dethtre, des uvres dimagination en vers ou en prose. Synon. crivain,romancier, dramaturge.

    lauteur de lagression , etc., qui relvent clairement de la sphre judiciaire.Cette catgorisation judiciaire peut concerner tout aussi bien des noncs, commeon le voit dans ces deux exemples pris au hasard sur Internet :

    Ici la phrase fatale ou les propos racistes ne sont pas envisags commedes entits linguistiques seulement mais au mme titre que des coups decouteau ou un vol : il sagit dimputer une responsabilit dans un cadre judiciaire.

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    Mais la notion dauteur qui nous concerne ici nest pas proprement parlerdordre judiciaire mme si elle renvoie elle aussi une origine et uneresponsabilit , mais dordre textuel. Le problme est alors de savoir quellesconditions un texte est susceptible davoir un auteur . A lvidence, on diradifficilement quune conversation a des auteurs : on prfrera parler de participants . Une production textuelle, semble-t-il, nest auctorisable quesi elle fait lobjet dune re-prsentation qui permet de lapprhender de lextrieur,comme un tout. Ce qui nest pas le cas dans un change verbal en cours. Il y a auctorisation si lnonc, ft-il oral, est dlimit et introduit dans un espace oil y a ncessit de dterminer une attribution parmi un ensemble doriginespossibles, une responsabilit. Dans ce terme se mlent intimement assignationdorigine (X est la cause de lnonc) et dimension thique (X doit pouvoir enrpondre ).

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    La seconde restriction fait passer le terme auteur du fonctionnementrelationnel au fonctionnement rfrentiel. La problmatique de limagedauteur ne vaut que pour le second. Le fonctionnement relationnel institueen repre le texte produit : lauteur de ce tract, de cette lettre, de ce manuel, de cetarticle... En revanche, le fonctionnement rfrentiel autonomisesyntaxiquement lauteur : lauteur dun tract publicitaire nest pas, saufsituation exceptionnelle, un auteur , pas plus quun percepteur qui criraitbeaucoup de lettres aux contribuables qui relvent de sa comptence. Le Trsor dela Langue Franaise met en vidence cette restriction, quil aggrave mme, enrestreignant les domaines pour lesquels lauteur sautonomise :

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    Ainsi, alors quil ny a aucune difficult dire par exemple quune imagedauteur est attache quelquun qui crit des ouvrages religieux, politiques,philosophiques..., il semble, comme le montre le TLF, que le fonctionnementrfrentiel soit plutt focalis sur les producteurs de littrature. On noteracependant que, dans lusage, auteur et image dauteur sappliquent aussi diverses sortes de producteurs esthtiques : photographes, cinastes en particulier(on parle ainsi de film dauteur ) Tout se passe donc comme si lauteur et limage dauteur tendaient se spcialiser dans la sphre esthtique.

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    Pour autant, il reste dterminer o passe la frontire entre les deuxfonctionnements, partir de quand lauteur de X devient un auteur tout

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  • Pour tre considr comme un auteur, le sujet nonciateur doit avoir donn ses paroles, son texte, une marque propre qui les distingue des noncscourants, des propos de la vie quotidienne. Luvre textuelle est un nonc original , innovationnel, qui, la diffrence des poncifs, des clichs, desstrotypes, des ides reues, renferme une ide neuve , indite, jamaisdite dans la culture (1998 : 50-51).

    Le personnage dun philosophe nest certainement pas ce qui importe, et jelaisserais volontiers de ct toute anecdote, ntait la curiosit invincible quechacun nourrit lgard des dtails concrets touchant le caractre et la viede ceux dont il admire les uvres (1990 :17)7.

    Les trois dimensions de la notiondauteur

    court. On est tent dinvoquer un critre comme la qualit, comme semble le faireG. Leclerc :

    Mais on ne voit pas pourquoi un producteur peu original ne serait pas unauteur. En fait, il semble bien quici deux acceptions d auteur interfrent.Lune rfre plutt un statut social ; un homme politique, par exemple ValryGiscard dEstaing4, a beau avoir publi au cours de sa carrire quelques ouvragespolitique et autobiographiques, voire un roman5, on le catgorisera difficilementcomme auteur , sans complment du nom. Lautre acception implique unevaluation, indpendamment de tout statut social : elle ne vise que le vritable auteur, dont la forme accomplie est le grand auteur , susceptible de figurerdans une anthologie lusage des tablissements scolaires.

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    Ce que le producteur de littrature a de singulier cest quil prtend se qualifierpar la seule production de textes. En revanche, un homme politique, un prtre ouun savant ne sont pas censs faire de la production de textes lessentiel de leuractivit. Il suffit dailleurs de considrer un discours voisin, le discoursphilosophique, pour voir que sous certains aspects il diffre sur ce point dudiscours littraire, alors mme que nul ne contesterait au philosophe une imagedauteur. En particulier, la relation entre lhomme et luvre y apparatdiffrente. En tmoigne le fait que le discours philosophique est rticent lgardde la pseudonymie, de la mystification, bref de tous les jeux sur lauctorialitauxquels se livrent les crivains. En outre, les crivains ont des existences souventchaotiques, souvent sans rapport vident (en fait, cest tout lart des analystes demontrer la cohrence cache) avec leur uvre. A ces deux traits les auteursphilosophiques ne souscrivent pas : en rgle gnrale leurs textes ont unrpondant qui renvoie leur personne, pas un pseudonyme6, un responsabledevant lhumanit, et leur vie ne cesse dessayer de se mettre en conformit avecles rgles qui rgissent leur univers de pense. Le comble est atteint quand,comme dans la philosophie antique, la notion de doctrine ne distingue pas entredoctrine philosophique et art de vivre. Les biographies des philosophes attirentdonc moins que celles des crivains. Cela se vrifie aussi au niveau de lexgse desuvres : la dmarche qui consiste mettre en relation les vnements de la viepersonnelle et les fictions (Du Bellay du par Rome et crivant Les regrets,Molire jaloux dArmande Bjart, Lamartine crivant Le lac aprs la mort de lafemme aime), est priphrique en philosophie. Les spcialistes se plaisentdailleurs croire quil nest nul besoin de sintresser la vie des philosophes. Peude spcialistes de littrature diraient de leur crivain prfr ce que dit G. G.Granger au dbut dun livre consacr Wittgenstein :

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  • En fait, si lon parle si volontiers et sans sinterroger davantage del uvre dun auteur, cest quon la suppose dfinie par une certainefonction dexpression. On admet quil doit y avoir un niveau (aussi profondquil est ncessaire de limaginer) auquel luvre se rvle, en tous sesfragments, mme les plus minuscules et les plus inessentiels, commelexpression de la pense, ou de lexprience, ou de limagination, ou delinconscient de lauteur, ou encore des dterminations historiques danslesquelles il tait pris (1969b : 35).

    A prsent, il me semble quon peut clarifier les choses en distinguant troisdimensions dans la notion dauteur.

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    La premire dimension, la plus vidente sans doute, est celle de linstance quirpond dun texte. Ce nest ni lnonciateur, ni le producteur en chair et en os,dou dun tat-civil, ni mme lcrivain en ce que celui-ci dfinirait des stratgiesde positionnement. Cette instance na rien de spcifiquement littraire puisque tre lauteur dun texte vaut de nimporte quel genre de texte ; avec toutefoiscette rserve que cette fonction au statut historiquement variable peut, selon lesgenres de textes, correspondre des processus trs complexes8. On pourrait parlerici d auteur-rpondant 9.

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    La seconde dimension est celle de lauteur-acteur , qui, organisant sonexistence autour de lactivit de production de textes, doit grer une trajectoire,une carrire. Ce nest pas ncessairement une profession, mais cest un typedactivit, de comportements. Ce statut varie considrablement selon les lieux, lespoques et selon les positionnements des intresss ; lui sont attaches certainesreprsentations strotypes variables historiquement. Ainsi le mot mmed auteur selon les conjonctures historiques entre-t-il en concurrence avec telsou tels autres : crivain , homme de lettres , littrateur , artiste , intellectuel , pote , scripteur

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    La troisime dimension est celle de lauteur en tant que corrlat dune uvre.Pour viter linstabilit du mot auteur et lambigut du mot uvre , quidsigne un texte singulier ou lensemble des textes attachs un producteur, onpourrait parler d auteur-auctor . Si tout texte implique par nature un auteur-rpondant , seul un nombre trs restreint dindividus accde ce statutd auctor , dinstance doue dautorit. Il suffit pour cela quon puissecirconscrire un Opus, et non une suite contingente de textes disperss. LOpuspeut parfois tre constitu dun texte unique, pour peu que son auteur nait pu enproduire quun seul, ou que seul un texte de lui ait retenu lattention.

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    Dans lArchologie du savoir M. Foucault, sinterrogeant sur les prsuppossqui font lunit dune uvre, crit ce propos :

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    On notera que la notion dimage dauteur va dans un sens oppos, puisquaulieu de replier lunit dun ensemble de textes sur la profondeur cache duneexpression, elle dploie un espace de relations : relations son texte de lauteur,qui prend en compte les reprsentations des publics, reprsentations de cet auteuret de ses textes dans ces publics.

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    Lactivit proprement littraire se distingue dautres voues galement laproduction de textes, comme le journalisme ou la politique, en cela que toutepersonne qui publie un texte qui relve de la sphre esthtique devient ipso facto auteur-auctor en puissance. Mais il ne sera pleinement auctor, sourcedautorit, que si des tiers lui construisent une image dauteur quil peut grer.Ds lors, on comprend la stratgie de nombreux crivains des XVIIe ou XVIIIe

    sicles qui dans leur prface font mine de ne pas tre lauteur de leur texte, dtreeux-mmes ce tiers qui accrdite le texte (Herman, Kozul, Kremer 2008).

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    On peut envisager plusieurs tapes dans lmergence dune figure dauctor :30(1) En de, on a affaire des auctorialits quon pourrait dire ponctuelles ,31

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  • o un producteur individuel ou collectif se donne comme le rpondant (ft-ilanonyme ou pseudonyme) de textes qui restent dans leurs lieux, sans dfinir unOpus. Cest le cas des titres divers du journaliste qui signe des faits divers ou desreportages dans divers priodiques, du chef de service qui adresse du courrier ses subordonns, du prtre qui fait un sermon chaque dimanche, etc.

    (2) Quand il y a constitution dune figure dauteur par le producteur lui-mme,cela peut se faire de deux manires : soit il produit un ou plusieurs textes dans desgenres qui le qualifient comme auctor potentiel (un roman par exemple, ou unessai) ; soit il rassemble des textes disperss pour les convertir en Opus : cest lecas du journaliste qui regroupe des chroniques parues dans des journaux, duprdicateur qui publie un choix de ses sermons, etc. Mais ce regroupement peutgalement tre opr par un tiers, ou parfois par la coopration du producteur etde tiers. La situation est videmment trs diffrente quand le producteur est mortou quil est dans lincapacit dintervenir. Certains tiers peuvent alors construire,faire merger des auteurs, ou tout simplement modifier leur image, sils sont djconstitus. Le cas extrme est celui d auctores qui ne sont devenus tels quepar lintervention de tiers qui, partant du postulat quils taient des auctores ,leur ont construit un Opus : ainsi Blaise Pascal.

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    Prenons le cas dun homme politique. Il est le rpondant de chacun de sestextes, mais cela ne le qualifie pas ncessairement pour tre auctor . Pour tretel, il faudrait que ces textes deviennent les composants dun Opus. Or la plupartdes textes dun homme politique, surtout quand ils sont au gouvernement,relvent de routines et ne sont que lexpression dune politique dfinie ailleurs. Il ya nanmoins des circonstances o lhomme politique est cens sexprimer en sonnom, au sens fort. Cela ne fait aucun doute, par exemple, pour lAppel du 18 juindu gnral de Gaulle. Le caractre singulier dun vnement de parole augmentevidemment ses chances dappartenir un Opus. Dans ces conditions, les vuxadresss la nation chaque Premier de lan par le Prsident de la Rpublique nerelvent pas a priori dun Opus ; mais une dcision ditoriale, en particulier si onveut publier les uvres compltes du Prsident, peut toujours convertir cesvux en composants dun Opus10.

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    (3) Il faut ensuite distinguer la situation de l auctor en puissance, qui estidentifiable mais qui passe inaperu, et celle de l auctor identifi, le seul quiaura une image puisque le seul qui entre en interaction avec dautres instancesque lui-mme. Un roman, un essai, un livre dhistoire dont personne ne parle nefont pas accder rellement lauteur une image. Mais tout est question de degr ;sur ce point la nature des tiers impliqus joue un rle essentiel. Un recueil deposie publi compte dauteur et dont ne parle que lentourage immdiat duproducteur lui confre une qualit d auctor extrmement faible ; en revanche,un essai qui est publi par un grand diteur, recens par divers magazines et quiconduit son auteur dans un studio de tlvision confre un fort coefficientd auctorit .

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    A la limite, on peut concevoir quun auctor prestigieux intgre son Opusun ensemble de textes dautres auctores , pour peu que cet ensemble exprimeun point de vue personnel. Cest le cas par exemple sil publie une anthologie des cent plus beaux pomes de la littrature franaise . Le caractre prpondrantdu point de vue personnel de celui qui a slectionn les textes lemporte icilargement sur le fait que ces textes ne sont pas de lui. Ce type danthologie est trsdiffrent dune anthologie destine lenseignement secondaire, dans laquelle lesauteurs du manuel doivent se prsenter comme les mdiateurs dune institutionextrmement contraignante. Dans ce cas, il leur est pratiquement impossibledaccder au statut d auctor .

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    (4) Certains auteurs accdent mme au statut dauctor majeur : leur figure est si36

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  • le nom Mallarm ne se rfre pas de la mme faon aux thmes anglais,aux traductions dEdgar Poe, aux pomes, ou aux rponses des enqutes ;de mme, ce nest pas le mme rapport qui existe entre le nom de Nietzschedune part et dautre part les autobiographies de jeunesse, les dissertationsscolaires, les articles philologiques, Zarathoustra, Ecce homo, les lettres, lesdernires cartes postales signes par Dionysos ou Kaiser Nietzsche ,les innombrables carnets o senchevtrent les notes de blanchisserie et lesprojets daphorismes. (1969b : 35)

    Une ontologie auctoriale

    saillante que lon publie des textes deux qui ntaient pas destins tre publis :brouillons, correspondance prive, devoirs dcolier, carnets, journaux Foucaultavait soulign ce point :

    Certains des genres que cite ici Foucault sont des uvres au sens fort (pomespour Mallarm, Zarathoustra, Ecce homo pour Nietzsche), ou des uvresinabouties (autobiographies de jeunesse) ; dautres sont des textes qui contribuentau travail de rglage ou de figuration du producteur (Maingueneau 2004) :traductions, rponses des enqutes, articles philologiques ; dautres enfin nontpas t conus par le producteur comme destins sortir de la sphre prive :carnets, dissertations, thmes anglais. Pour ces auctores majeurs, ce sont desdcisions ditoriales fondes sur des oprations interprtatives qui font que tel outel genre par nature exclu par le crateur de la publication, va contribuer sonimage dauteur.

    37

    Force est donc de prendre acte de la distorsion entre le foisonnement desformes dauctorialit (tout genre de texte a un auteur-rpondant et lethoscorrespondant) et lextrme restriction des individus susceptibles dtre auteurs-auctores , associs une image dauteur .

    38

    Une question que nous avons jusquici laiss de ct est la nature des entits quisont susceptibles dtre dites auteurs , au sens d auctores . Cest l unproblme dlicat car de multiples paramtres doivent tre pris en comptesimultanment. Dans les pages qui suivent, je ne vais pas dfinir a priori quellessont les conditions ncessaires et suffisantes pour occuper la position dauteur (supposer que de telles conditions existent), mais rflchir partir dun certainnombre de cas dinstances auctoriales susceptibles daccder la dignitdauteur.

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    Une condition ncessaire mais pas suffisante, videmment pour quil y ait auctor est lexistence dun nom dauteur. Foucault rappelle ce propos que luvre , ce que nous appelons ici lOpus, cest communment une somme detextes qui peuvent tre dnots par le signe dun nom propre (1969b : 34). A celaon peut ajouter que lOpus doit tre l expression de son auteur. Prenonslexemple des publicits produites par une marque commerciale ; cette dernire seprsente comme une entit constitue autour dun nom propre et qui se pose ensource et en garant dun ensemble cohrent de textes censs exprimer sa personnalit . Pour autant, il apparat difficile de dire quune marque est unauteur. Dj, on notera que lunit des textes dont la marque se pose enresponsable est indpendante de lidentit des employs qui sont en charge de sacommunication externe. De plus, indpendamment des difficults souleves par lefait quune marque nest pas proprement parler un humain, la dissociation entrela marque et le producteur effectif des textes, en loccurrence lagence de publicit,semble problmatique (en fait, il peut sagir de diverses agences, en fonction decontrats qui sont rengocis rgulirement). Lagence de publicit elle-mme peut

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  • 27 novembre 2005 par NPS29Chers camarades,

    Il appartient chacun dentre vous de se faire librement et en connaissancede cause son jugement. Cest pourquoi, maintenant quil est dfinitif nousvous adressons ci-joint le texte intgral de la motion de synthse issu de laCommission des rsolutions. [ tlcharger ci-aprs] Comme vous le savez,le NPS avait un mandat de ngociation, vot par lAG des dlgus quiportait sur les quatre points majeurs que nous avions dfendu tout au longdes dbats du Congrs : - LEurope et la mondialisation - Les questionsconomiques et sociales - Les institutions et la dmocratie - La rnovationDans le texte que nous vous adressons vous trouverez en fond gris lesamendements que nous avons fait inclure lors des six heures de discussion.

    utiliser des employs diffrents tout en restant la mme agence. Si la notiondOpus implique tacitement lexistence dune entit doue dun point de vue ,dune conviction , dun style , ce qui fait obstacle ce quune marque soit un auctor , cest le fait quelle ne soit pas arrime lunit imaginaire duneconscience et dune histoire dont les textes seraient lexpression . En revanche,rien nempche tel(s) ou tel(s) individu(s) travaillant pour lagence de publicit,voire lagence, daccder un statut d auctor , ds lors quils sont identifiablescomme personnalits cratrices dans un espace de production symbolique.

    A prsent, quen est-il de lhomme politique qui ncrit pas lui-mme sesdiscours ? Comme la marque commerciale, il nest pas le producteur de son texte.La diffrence est nanmoins nette entre les deux cas de figure. Le texte delhomme politique aurait pu tre crit par lui, il exprime sa ligne politique et il leprofre en personne11. En revanche, la publicit se caractrise par son loignementdes producteurs quelle fait travailler. Dans un domaine comparable, celui de lahaute couture, on fait habituellement la distinction entre lauteur, savoir lecrateur qui a dessin la collection, et la marque pour laquelle il travaille : KarlLagerfeld pour Chanel .

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    En fait, le cas de la publicit lectorale nous montre que la notion de point devue , voire de conviction ne suffit pas : il faut aussi une prise en chargedirecte. Une publicit qui fait la promotion dun candidat une lection fait de cedernier non un locuteur mais une sorte de personnage, qui recourt ventuellementau discours direct. Aux USA, la fin des spots de la campagne prsidentielle onentend la voix du candidat qui dit I am X (G. Bush, J. Kerry, B. Obama...) and Iapprove this message . Ce faisant, le candidat affirme que ce spot exprime sonpoint de vue, mais il ne se pose pas comme sa source, il nen est pas le rpondant.

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    Nous avons suggr que, dans certaines conditions, une agence de publicitpouvait accder au statut dauteur. Mais cela nest possible que si lon donne unstatut aux entits collectives. A cet gard, on peut penser que des groupes tels queles partis politiques ou les mouvements littraires sont dans une situation pluspropice.

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    Leurs textes, produits dune laboration collective ngocie, sont au terme duprocessus attribus un auteur indivisible. Plus prcisment, il faut distinguerdeux cas trs diffrents : a) celui o les individus qui participent llaborationappartiennent une communaut de conviction forte ; b) celui o lon cherche aboutir un compromis qui prserve la diversit des instances ngociantes :ainsi les syndicalistes ngocient-ils des motions de synthse. Ces textes decompromis maintiennent une htrognit, mme sils sont assums par unecommunaut laquelle appartiennent les divers intervenants (le syndicat X, leparti Y). Dans un texte de synthse , le lecteur expert est en effet capable dereprer les apports respectifs de chacun. Voici un document significatif, qui manedune section du Nouveau Parti Socialiste ; nous avons mis en italique lepassage qui nous intresse ici.

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  • En annexe nous avons collationn selon nos quatre grands thmes lesdiffrents amendements pour vous permettre de mesurer lampleur et lacohrence des modifications obtenues par rapport aux orientations quenous avons dfendu [sic] dans les dbats du Congrs. Ce sont ces avancesqui nous ont conduit en conscience voter une trs large majorit dentrenous la synthse.Vous comprendrez aussi que nous ne souhaitons pas davantage entrer dansune polmique dont nous ne voyons pas qui elle sert, en tous cascertainement ni le NPS ni le PS.Nous nous contenterons daffirmer pour ce qui nous concerne que notresouci majeur est de prserver, dans le respect dune dmarche collective, quipour avoir ses contraintes a aussi sa force et sa lgitimit, notre unit etdonc la continuit du NPS.Bien des combats restent poursuivre dans la dure, et nous avons besoin,pour les mener de rester unis, cohrents et respectueux entre nous.Dans lattente de vous revoir,Amitis socialistes.Henri Emmanuelli, Vincent Peillon, Benot Hamon, Pascal Cherki, RenaudLagrave, Jean Gurard, Jean Louis Carrre, Pascal Terrasse, Gilbert Roger,Jacques Rigaudiat, Delphine Mayrargues, Rgis Juanico, David Assouline,Isabelle Thomas, Michel Vergnier, Germinal Peiro, Isabelle Martin,Christian Martin, Philippe Darriulat, Josy Pouyeto, Membres de laCommission de rsolution.Site : Pour un Nouveau Parti Socialiste en Finistre [http://nps29.free.fr/article.php3?id_article=105, consult le 2 novembre2008].

    Internet

    Cette lettre adresse aux militants voque la motion de synthse pour mieuxsouligner son htrognit : le Nouveau Parti Socialiste en revendique certainspassages quil porte lattention de ses membres.

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    En revanche, les communauts de conviction forte, o le texte merge de lacollaboration de points de vue convergents, impliquent la fiction dun groupeindivisible, beaucoup plus propice au statut d auctor . Un parti politique, ou uncourant bien identifi dans un parti, ne sont pas, en effet, des entits que lonpourrait dire compactes , comme par exemple le groupe de peintres regroups Munich autour de Kandinsky sous le nom Der blaue Reiter 12. Il sagit dungroupe trs restreint, dont les membres taient eux-mmes des crateurs partentire, associs des Opus. Leur nom avait prcisment t invent parKandinsky et Marc pour donner un titre un recueil de textes sur lart moderne :lalmanach Der blaue Reiter (1912). Ce titre qui a donn son nom au grouperfrait la fois au thme de prdilection de Marc (le cheval bleu) et celui deKandinsky, le cavalier, pour les intgrer dans une unit suprieure. Alors quunparti au nom propre et lappareil stables peut au fil du temps dfendre despositions trs htrognes, un groupe fond sur des aspirations esthtiques estindissociable de lidentit de ses membres, il se forme travers une conviction etun combat, et il disparat quand cet engagement perd son sens.

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    Jaimerais prsent considrer un cas sans aucun doute plus dlicat : celui deproductions textuelles qui, bien quelles sinscrivent dans une dmarche quiparticipe de la littrature, mettent en question la notion mme dOpus. Parexemple, est-ce que lauteur dun blog peut prtendre au statut d auctor ,susceptible dune image dauteur ?

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    Prenons lexemple du blog de Misspastouche, tenu en 2007 par une caissiredes hypermarchs Leclerc. Il a reu un nombre considrable de visites,

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  • Acte 1Vous tes confortablement installe derrire votre caisse sur votre chaise(Chance ! Celle-ci est un bon tat et tient le choc quand vous vous adossezdessus). Vous jetez un il distrait sur votre badge o est inscrit votreprnom, une petite maxime du style A votre service , Puis-je vous aider? , Le temps dun sourire et je suis vous ou encore Que puis-je fairepour vous ? et le nom de lentreprise avec le logo. Juste ct de votre TPE(la machine carte bancaire), est affich un mot avec quelques directives etexplications de la direction du genre : Pour tout paiement par chque,merci de prsenter une pice didentit , le logo de la chane du magasinapparat au bas de la feuille scotche. Un coup dil circulaire et vousdcouvrez en tte de gondole des produits dappels : des articles vants dansle dernier prospectus (distribu dans des dizaines de milliers de botes auxlettres et propos laccueil du magasin), les prix sont inscrits sur unepancarte flashy, le logo du magasin est visible en gros sur laffiche. Un peuplus loin dans le rayon, vous apercevez une grande affiche (elle doitdpasser le mtre en hauteur) avec de la publicit pour un produitquelconque, le logo de lenseigne est videmment bien prsent. Voustournez la tte ct galerie et le nom du magasin est coll aux murs diverspoints stratgiques. Bref, quimporte lendroit o votre regard se porte, vousvoyez le nom de lenseigne.

    ladresse : http://caissierenofutur.over-blog.com/. En voici un extrait :

    Ce passage constituerait une page de roman tout fait lgitime. Les conditionssemblent runies pour quil y ait opus : un nom dauteur (pseudonyme), lasingularit dune exprience et dun point de vue marqus par un style, unepermanence dans le temps assure par ladresse, lajout rgulier de textesnouveaux et la mise en archive des prcdents. Ajoutons cela que les ractionsdes internautes permettent la blogueuse de grer ce quon peut considrercomme une image dauteur.

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    Il surgit cependant une difficult : le mdium, en loccurrence Internet, na-t-ilpas prcisment pour effet de saper certaines conditions de laccs au statutd auctor ?

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    La prolifration des blogs met en effet hors jeu une contrainte qui napparaissaitpas clairement quand le livre ou le manuscrit dominaient : la raret. Certes,depuis que limprimerie existe on na cess de dplorer lexcs de livres, et doncdauteurs, mais rien de comparable avec ce qui se passe aujourdhui. Dautant plusquInternet offre au blogueur la possibilit de mettre en ligne un nombre illimitde textes, de longueurs considrables et au rythme quil veut. A ces textes sont engnral associes des images fixes, des vidos ou de la musique. En dautrestermes, rien ne rgle plus la production, sinon le bon vouloir du blogueur et lescontraintes imposes par le logiciel.

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    Cest que laccs la publication ny est plus limit par des intermdiaires.Dans le rgime impos par le livre, ces intermdiaires taient de deux sortes : a)les professionnels de ldition, qui slectionnaient les textes et les profilaient dansdes sries (en particulier les collections) ; leur slection fonctionnait aussi commeune certification de qualit, tant sur le plan matriel (lorthographe en particulier)quintellectuel ; b) les professionnels de limpression : limprimerie tait uneactivit lie une technologie complexe et relativement coteuse sur laquelle leproducteur du texte, sauf exceptions, navait gure de prise. Outre ces deux typesdintermdiaires, le blog permet den supprimer un troisime : le critique. Lapresse fonctionnait comme un filtre puissant qui, parmi les postulants lanotorit, ne slectionnait quun nombre rduit de textes.

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    Avec Internet le statut d auctor apparat ainsi doublement menac. Laprolifration des producteurs et des noncs rend trs problmatique ledtachement de figures saillantes sur ce fond ; les intermdiaires svanouissent,

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  • au profit dune confrontation directe entre un lecteur alatoire et une offre infinie.Par des processus dordre pidmique tel ou tel blogueur peut merger unmoment de lanonymat, mais la stabilisation dune figure apparat problmatique.De toute faon, le tiers qui consacre un texte nest plus une voix autorise (unprofesseur, un critique), mais un essaim dindividus pseudonymes qui ragissentdirectement sans tre eux-mmes accrdits. Ce qui rend difficile la constitutiondune image dauteur consistante.

    Lidentit mme de luvre devient problmatique, dans la mesure o lastabilit des textes est incertaine, et avec elle la possibilit mme de construire unemmoire. A la diffrence du texte traditionnel, dans lequel les modifications dunedition lautre sinscrivent dans un travail de rglage de lopus en fonctiondune trajectoire dans linstitution littraire, les modifications incessantes desblogs obissent des contraintes trs court terme ; il faut en particulier lesrenouveler sans cesse pour ne pas lasser les visiteurs qui en un clic peuvent setransporter ailleurs. A chaque heure, chaque minute le texte mis en ligne peut tremodifi dans son contenu, sa prsentation ou dans sa position dans larchitecturedu site ; si bien quil est impossible daffirmer quelle est la bonne version dutexte. La prolifration des modifications finit par dissoudre lide mme dunetransformation globale du texte. Ce phnomne est aggrav par le caractrecomposite des textes sur Internet : non seulement parce quon a affaire des hyperstructures (Adam & Lugrin 2000) qui dploient divers modules entableaux, mais parce que la multimodalit y est de rgle (sons, textes, images fixeset mouvantes). On ne retrouve pas la situation traditionnelle des avant-textes ,les brouillons en particulier, qui, comme leur nom lindique, supposent unedmarcation nette entre le texte publi et ce qui est plac avant lui. Mme quandlauteur traditionnel modifiait son texte dune dition lautre, il tait facile decomparer les diffrentes versions et dtablir un apparat critique. Rien de tel avecles textes numriques, puisque la notion davant-texte nest plus pertinentepour dcrire le passage dune version une autre de ce qui est mis en ligne.

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    Dans ces conditions, on comprend que le blogueur qui aspire devenir auteursoit tent de passer au statut dcrivain traditionnel. Le succs rencontr auprsdes internautes a permis Anna Sam, la caissire blogueuse, de publier ses textessous le titre Les tribulations dune caissire, paru en juin 2008 chez Stock. Ce quia permis de dcouvrir quelle avait 29 ans, quelle avait un DEA de littrature etquelle travaillait pour payer ses tudes. Elle a ainsi acquis ainsi une imagedauteur , conforte par une srie de passages la tlvision, dans les radios etles ftes du livre. Son blog sest alors converti en un blog en quelque sorte mixte , o les textes sur la vie de caissire sont associs de multiplesannonces promotionnelles sur les sances de ddicace de lauteur et ses autresactivits publiques.

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    On pourrait penser que cet exemple consacre in fine la domination du mdiumtraditionnel, le livre imprim : le blogueur finit par publier un livre. Mais leschoses sont sans doute plus complexes. Dans le systme traditionnel lditeurprenait le risque dditer un texte quil jugeait devoir plaire un certain public ; enrevanche, avec Anna Sam ldition intervient quand le public a dj consacr leblogueur. Du mme coup, le problme pour les blogueurs qui aspirent lareconnaissance est de se dtacher de la multitude. Ce qui, nen pas douter,pourra de moins en moins tre laiss au hasard. Surtout si, comme on peut lepenser, il se dveloppe progressivement, des modes daccs au statut d auctor qui soient spcifiques au Web.

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    Regardons prsent un beaucoup cas bien diffrent, celui dun blog pris auhasard sur Internet : le Blog de Julie , intitul Enfin-Libre 13. En voici unextrait :

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  • Samedi 8 novembre 2008Gueule de bois?Lautre jour, nous avons mang une fondue bourguignone (sic). Aprs lerepas, ma mre a laiss lhuile refroidir sur le plan de travail. Bah... sonestomac a pas trop aim. Jai vu le chat, dans lentre, sur le tapis, l o lesol chauffe. Il avait pas lair en top forme. Jappelle ma mre, qui constateelle aussi que le pre Lon est patraque. Aprs vrification, nous noussommes rendu compte quil avait bu de lhuile... Du coup, il est restpendant presque deux jours tout patraque, il a presque rien mang. On a suquil allait mieux... quand il recommenait monter sur la table! a ne lui avisiblement pas servi de leon! [http://enfin-libre.over-blog.net/article-24413205.html]

    Mardi 28 octobre 2008

    Like a bridge over troubled waterQuelquun peut-il lui direQue je laimeQuelquun peut-il lui direQue le quotidien la tue, tu saisQuelquun peut-il lui direQuelle nest pas un animal en cage.

    Quelle a besoin dun peu de tempsUn peu plus de temps.

    Je laimeEt je dcouvre quaimer a fait mal.

    Quelquun peut-il lui dire tout a?Moi je ny arrive pas.Les seuls mots qui sortent de ma bouche sont inutiles.Je taime. Tu me manque.

    Le texte est agrment par une photo du chat en question :58

    Il y a fort peu de chances que ce blog connaisse le mme destin que celui de lacaissire de Leclerc. Ici, on a affaire une sorte de journal intime ; avec cettediffrence quauparavant ce genre dcrit ntait publi que si son auteur avait djaccd au statut d auctor , associ un Opus majeur.

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    Mais les choses se compliquent quand en dessous on trouve le pome suivant :60

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  • Et on tourne encore en rond.

    Mais que peut-on y faire?Se donner un peu de mal suffirait-il?Voler un peu de temps.

    Jai peur.Quun jour la libert mappelle trop fortMe disant de menvoler.

    Mais je laime.

    Je veux juste un peu de tempsAvec LuiEt juste Lui.Juste Nous.

    Mais quelquun peut-il lui direQue je laime?

    Je laime.Lui...[http://enfin-libre.over-blog.net/article-24175604.html]

    Aprs tout, la littrature orale traditionnelle tait en un sens une littraturesans auteurs, un patrimoine collectif accumul sans rfrence desindividus. En revanche, les nouveaux romans et pomes, les nouvelles picesde thtre et les nouvelles taient des uvres dartistes bien dfinis dontelles portaient le nom ou le pseudonyme14.

    Ce texte relve-t-il du discours littraire ? Dun certain point de vue cela ne faitaucun doute. Ds lors, on est tent de dire que son rpondant peut prtendre devenir auctor . En fait, on ne peut pas dire que toutes les conditions soientrunies pour convertir son auteur en acteur identifi de quelque espace littraire.Noy dans la srie des textes du blog, lequel est lui-mme noy dans lespace sansbords dInternet, ce pome semble vou rejoindre cette infinit de pomes decirconstance quon a produits depuis des sicles.

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    Ce type de production, comme dailleurs les multiples sites qui impliquent desactivits dcriture, ne sont pas sans faire penser lnorme production galante du17e sicle, dont on pourrait dire quil sagit dune littrature sans auteurs .Formule qui peut sentendre de diverses manires :- une littrature crite par des gens qui se refusent tre considrs comme desprofessionnels des belles lettres ;- une littrature de personnes qui ne publient pas leurs textes ;- une littrature dont les producteurs, sils publient, ne se donnent pas pour lesauteurs de ce quils publient ;- une littrature socialise, immerge dans des interactions immdiates, dont ellene se dtache pas ;- une littrature o il y a trop de producteurs pour quon puisse en distinguer un.

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    On trouve aussi cette ide dune littrature sans auteurs applique un toutautre type de production, la littrature orale :

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    Dans le cas des blogs les producteurs sont individus. Mais cest labsence decontraintes de rarfaction qui fait problme. Dans le cas de la littrature orale onpostule lexistence dun nombre indfini de producteurs-rcitants antrieurs, sansquon puisse remonter un texte originel stable ou une individualit cratricequi ne soit pas nimbe de lgende, ou mythique.

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    On est alors incit rserver le statut d auctor aux figures que luniverstraditionnel de lcrit manuscrit ou imprim a consacres. Pour quune Julie

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  • Bibliographie

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    devienne auteur, dira-t-on, il suffit quelle rassemble ses pomes dans quelquelivre ou publie son blog sur papier, le dtachant des flux anonymes dInternet.Mais, ce faisant, on constitue en norme implicite le type dauctorialit associ lcriture et limprim. Or on se trouve aujourdhui dans une phrase de transitionentre le rgime traditionnel de domination de limprim et un rgime numrique en transformation perptuelle. Il est trs difficile de savoir siInternet ne va pas crer dans son propre espace de nouvelles formes daccs austatut d auctor , de nouveaux oprateurs de rarfaction et de certification destextes, qui vont coexister avec les prcdentes. Un analyste du discoursconsquent ne peut que prendre acte de la transformation de ces ventuellesvolutions de la figure dauteur.

    Adam, Jean-Michel & Gilles Lugrin. 2000. Lhyperstructure : un mode privilgi deprsentation des vnements scientifiques , Les Carnets du CEDISCOR 6, 133-150

    Amossy, Ruth (dir.). 1999. Images de soi dans le discours. La construction de lethos(Lausanne-Paris : Delachaux & Niestl)

    Booth, Wayne C. 1961. The Rhetoric of Fiction (Chicago : University of Chicago Press)DOI : 10.7208/chicago/9780226065595.001.0001

    Foucault, Michel. 1969a. Quest ce quun auteur ? , confrence publie dans le Bulletinde la Socit franaise de philosophie, 63 : 3, 73-104 [repris dans Dits et crits I,1954-1975. 1994 (Paris : Gallimard), 817-849]

    Foucault, Michel. 1969b. Larchologie du savoir (Paris : Gallimard)

    Granger, Gilles-Gaston. 1990. Invitation la lecture de Wittgenstein (Paris : Alina)

    Herman Jan, Mladen Kozul & Nathalie Kremer. 2008. Le roman vritable. Stratgiesprfacielles au XVIIIe sicle (Oxford : Voltaire Foundation)

    Leclerc, Gilles. 1998. Le sceau de luvre (Paris : Seuil)

    Maingueneau, Dominique. 1987. Nouvelles tendances en analyse du discours (Paris :Hachette)

    Maingueneau Dominique. 1993. Le contexte de luvre littraire. Enonciation, crivain,socit (Paris : Dunod)

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  • d'OpenEdition et bnficie de ses services, crivez : [email protected].

    Notes

    1 Il suffit de songer aux intenses dbats qua suscits le livre de W. C. Booth (1961), qui aintroduit la notion d auteur implicite .

    2 Ce document, issu de la Commission Biblique Pontificale a t prsent au papeJean-Paul II par le cardinal Joseph Ratzinger au cours de laudience du vendredi 23 avril1993, loccasion de la commmoration du centenaire de lEncyclique de Lon XIII Providentissimus Deus et du cinquantenaire de lEncyclique de Pie XII Divino afflanteSpiritu . Litalique est de moi.

    3 Jutilise dans cet article ce terme peu heureux pour en viter dautres (auteur, crivain,crateur), qui sont chargs de multiples valeurs ou qui reoivent une dfinition restreintedans ma terminologie.

    4 Il est dailleurs membre de lAcadmie franaise.

    5 Le passage (Fixot, 1994). Ce livre na pas eu de succs.

    6 Jexcepte videmment les philosophes comme Kierkegaard ou Sartre, quand ils criventdes romans, ou les textes publis sous un pseudonyme par peur de la rpression politique.Le seul cas qui fasse exception est celui du philosophe franais Alain (1868-1951) ; mais, cenest pas un hasard, il sest fait un nom dans le journalisme (trois mille propos publis) et sadressait un public large.

    7 Pour dissiper toute quivoque, nous prcisons quen tant quanalyste du discours, nousne souscrivons nullement cette conception de lauctorialit philosophique (Maingueneau1995). Ce qui nous importe ici est quelle participe de lidologie spontane de la majoritdes professionnels de la philosophie.

    8 On en verra quelques exemples plus bas.

    9 Dans le Trsor de la Langue Franaise on trouve la dfinition suivante : 1. Personnequi se porte garante de quelqu'un ou de quelque chose. Synon. caution, garant. LouisBonaparte incarnait le coup d'tat contre la Rpublique, l'tranglement de la libert dontl'Assemble demeurait la gardienne; aujourd'hui, en revanche, les liberts publiques n'ontd'autre rpondant et d'autre soutien que Charles de Gaulle (MAURIAC, Nouv. Bloc-Notes,1961, p. 134).

    10 Je me souviens avoir vu lpoque sovitique la vitrine dune grande librairie deBerlin-Est qui ne montrait quun seul livre : les discours officiels du Secrtaire gnral duParti communiste Tchernienko. Il sagissait, par un acte autoritaire, de convertir en auteurde plein droit un homme politique qui nexprimait pas de point de vue personnel. Coup deforce qui sexpliquait par le statut du Parti communiste, autorit suprme qui sanctifiait enquelque sorte les paroles de ses reprsentants.

    11 Jexcepte le cas du discours de politique gnrale du Premier Ministre britannique qui,comme on le sait, est lu par la Reine dAngleterre.

    12 Ce groupe d'artistes (le cavalier bleu) sest form partir de 1911 Munich. Ses acteursprincipaux sont Wassily Kandinsky, August Macke, Franz Marc, Paul Klee Y ont participegalement Gabriele Mnter, Heinrich, Campendonk, Alexej von Jawlensky

    13 http://enfin-libre.over-blog.net

    14 A. A. Mazrui, Collection UNESCO en ligne : Histoire gnrale de lAfrique, chapitre 19.[http://www.unesco.org/culture/africa/html_fr/chapitre819/chapitre5.htm].

    Maingueneau, Dominique. 1995. Lnonciation philosophique comme institutiondiscursive , Langages 119, 40-62.DOI : 10.3406/lgge.1995.1722

    Maingueneau, Dominique. 2004. Le discours littraire (Paris : Colin)

    Maingueneau, Dominique. 2006. Contre Saint Proust (Paris : Belin)

    Meizoz, Jrme. 2002. Recherches sur la posture : Jean-Jacques Rousseau , Littrature126, 3-17

    Viala, Alain. 1993. Elments de sociopotique, Viala, Alain & Georges Molini.Approches de la rception. Smiostylistique et sociopotique de Le Clzio (Paris : PUF)

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    Pour citer cet article

    Rfrence lectroniqueDominique Maingueneau, Auteur et image dauteur en analyse du discours ,Argumentation et Analyse du Discours [En ligne], 3 | 2009, mis en ligne le 15 octobre 2009,Consult le 26 juillet 2015. URL : http://aad.revues.org/660

    Auteur

    Dominique MaingueneauUniversit Paris 12, Cditec, Institut Universitaire de France

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