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  • 8/6/2019 AL7HG00TEPA0108Sequence03

    1/63

    Squence 3-HG00 167

    LEurope

    de 1945 nos jours

    >

    Les lves en Terminale L et ES tudient lensemble de la squence.

    Les lves en Terminale S sont dispenss de ltude de cette squence.

    Cned Acadmie en ligne

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    169Sommaire Squence 3-HG00

    Chapitre 1 > La construction europenne de1945 aux annes 1980 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 171

    A De lide europenne laube de sa ralisation 1945-1957

    B De 1957 1973, la Communaut conomique Europenne (CEE) Six

    C Du March Commun la Comunaut Europenne, 1973 - annes 80

    Chapitre 2 > Le temps des dmocraties populaires (1948-1989) . . . . . . . . 194

    A La sovitisation de lEurope de lEst : 1945-1953

    B Le temps des crises et des stratgies rformistes : 1953-1968

    C La souverainet limite et lmergence des socits civiles : 1968-1985

    D Le temps des turbulences ou la fin des dmocraties populaires : 1985-1990

    Chapitre 3 > Les enjeux europens depuis 1989 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 219

    A largissements et approfondissement

    B De trs nombreux dfis relever

    Cned Acadmie en ligne

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    Squence 3-HG00

    ontenu du chapitre 1

    170

    La construction europenne de 1945 aux annes 1980

    Problmatique :

    Pourquoi la construction europenne fut-elle essentiellement conomique et non politique de ses dbutsaux annes 1980 ?

    Plan : traitementde la problmatique

    Notions-Cls Repres

    Introduction Partir dune carte de ltat de lEurope unifieen 2003.Reprer les dates cls de la construction euro-penne travers une chronologie.

    A De lide europenne laubede sa ralisation 1945-1957Un contexte international porteurLes pres fondateurs et leurs valeursPremires ralisations et checs

    Etats-Unis dEurope fdralisme suprana-tional confdral unionistes Congrs de laHAYE Conseil de lEurope Convention euro-penne des droits de lhomme endiguement plan Marshall OECE Union Occidentale OTANDmocrates-chrtiens MRP CDUBenelux CECA Haute Autorit CED-Gaullistes UEO plan BEYEN-SPAAK-BECH

    confrence de Messine

    Etudier une dclaration fondatrice : Churchillen 1946Etudier un texte fondateur : la mmorandumSchuman de 1950Etudier une caricature britannique sur la CECA(1950)Analyser une affiche de propagande pour la CED(1954)

    B De 1957 1973, la CommunautEconomique Europenne (CEE) SixLes institutions du March CommunDes ralisations plus ou moins

    spectaculairesLpine gaullienneLe Royaume-Uni aux portes du

    March Commun

    Trente Glorieuses march unique FSE BEI Euratom consultatif Commission Conseil des ministres directives Parlementeuropen .PAC prix dorientation prix dintervention FEOGA prlvements restitution arran-gement de Luxembourg plan MANSHOLT union douanire TEC GATT sommet serpent montaire europen Confdration Europe des Patries traitfranco-allemand de 1963 politique de la chaise vide vetoTravaillistes Commonwealth AELE

    Etudier le trait fondateur de la CEE (1957)Retenir lorganisation des institutions de la CEE(organigramme)

    C Du March Commun laCommunaut Europenne, 1973- annes 80De leuropessimisme la relance

    de la construction europenne : lesvutions institutionnelles

    Les largissementsDes champs daction de plus en plus

    largis

    Dsordre montaire MCM Thatcher CIG SME Acte Unique Convention de SchengenAdhsions politiques EEEQuotas QMG gel des terres jachre aides compensatoires Europe bleue - TAC

    IFOP FEDER Erasmus ACP Conventionde Lom guerres douanires

    Observer une caricature des conseils (dessin dePlantu 1987)

    Cned Acadmie en ligne

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    Squence 3-HG00 171

    LEurope de lOuest en constructionjusqu la fin des annes 80

    Malgr la diversit linguistique et religieuse, une fragmentation politique trs marque, des identitsnationales fortes et rivales, des Europens depuis le XVIe sicle nont jamais cess de rver dunit

    pour lEurope. Les prcdentes tentatives dunion se sont ralises par le fracas des armes, au tempsde Napolon 1er surtout, et restrent toutes phmres. Le XXe reprend le rve de Victor Hugo des Etats-Unis dEurope et le ralise enfin. La boucherie franco-allemande de 1914-1918 fait prendreconscience Briand et Stresemann dans les annes 20 de la ncessit de construire une Europe pacifieet fdrale base sur la rconciliation franco-allemande. Mais cest un rve non relay par les opinionspubliques. La 2nde guerre mondiale dchire nouveau lEurope, lexigence de son unification nen estdsormais que plus pressante.

    De nos jours, 60 ans aprs, le chemin parcouru est impressionnant :

    Document 1

    LUnion Europenne de 15 27

    FRANCE

    Andorre

    6

    12

    3

    4

    0 300 km

    ROYAUME-UNI

    IRLANDE

    ALLEMAGNE*

    ITALIE

    MALTE

    SUISSE AUTRICHE

    1 : SLOVNIE2 : CROATIE3 : MACDOINE4 : BELGIQUE9 : PAYS-BAS

    10 : LUXEMBOURG

    ROUMANIE

    GRCE

    BULGARIE

    POLOGNE

    DANEMARK

    Iles Feroe(Dan.)

    Jan Mayen (Norv.)

    LITUANIE

    LETTONIE

    FINLANDE

    SUDE ESTONIE

    HONGRIE

    SLOVAQUIE

    REP.TCHQUE

    TURQUIE

    5

    CHYPRE

    ESPAGNE

    ALGRIE TUNISIE

    MAROC

    PORTUGAL

    Candidature en suspens

    Pays membres de l'UE au 1er mai 2004

    Pays entrs en 2004

    Pays entrs en 2007

    * seule la RFA est entredans le march commun en 1957.

    1957

    1957

    19731973

    1973

    1986

    1986

    1957

    1981

    1995

    1995

    1995

    1957

    1957

    1957

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    Squence 3-HG00172

    partir du noyau des Six (Benelux, Allemagne, Italie, France), la CEE sest largie 9 autres pays,dabord vers lEurope du Nord-Ouest en 1973, puis vers lEurope mditerranenne dans les annes1980 enfin vers le Grand Nord et lAutriche en 1995. A lexception de la Norvge et de la Suisse, toutelEurope occidentale est intgre dans lUnion Europenne. LEurope centrale et orientale est en voiedintgration : 8 PECO (pays dEurope centrale et orientale) la rejoignent en 2004 + 2 les mditerra-nennes : Malte et Chypre.

    Toutefois, notre carte reste par trop simplificatrice, de quel Europe sagit-il ? Une Europe conomique,

    politique, montaire ? Il y a tant de nuances qui incluent ou excluent les diffrents territoires europens.Et cest lhistoire de la construction europenne qui permet dexpliquer ces singularits.

    Quelques dates-cls dans la construction europenne, de 1945 la findes annes 1980

    Septembre 1946 Discours de Churchill sur les Etats-Unis dEurope

    Mars 1947 Benelux : Union douanire entre la Belgique, les Pays-Bas et le Luxembourg

    Dcembre 1947 Coordination des Mouvements Pour lUnification europenneAvril 1948 Cration de lOECE

    Mai 1948 Congrs de la Haye

    Avril 1949 Signature du Trait de lAtlantique Nord

    Mai 1949 Cration du Conseil de lEurope

    Mai 1950 Mmorandum Schuman

    Novembre 1950 Convention europenne des droits de lhomme

    Avril 1951 Trait instaurant la CECA

    Mai 1952 Trait sur la CED

    Aot 1954 Rejet par les dputs franais de la CEDOctobre 1954 Cration de lUEO

    Mai 1955 Plan BEYEN SPAAK MONNET sur la relance de lEurope

    1-2 juin 1955 Confrence de Messine

    Mars 1957 Signature des traits de ROME : CEE et EURATOM

    Janvier 1960 Cration de lAELE

    Aot 1961 1re candidature du Royaume-Uni la CEE

    Janvier 1962 Cration de la PAC

    Janvier 1963 Veto de DE GAULLE quant lentre du Royaume-Uni dans la CEE

    Janvier 1963 Trait franco-allemand de coopration

    Juin 1965 Crise entre la France et les 5 autres partenaires de la CEE au sujet de la PAC

    Janvier 1966 Compromis de Luxembourg

    Mai 1967 2e candidature du Royaume-Uni (+ celles du Danemark et de lIrlande)

    Novembre 1967 2e veto franais

    Juillet 1968 Ralisation du march commun des produits industriels

    Dcembre 1969 Sommet de la HAYE sur llargissement de la CEE

    Avril 1972 Cration du Serpent Montaire Europen

    Juillet 1972 Accords CEE AELE sur le libre-change

    Janvier 1973 Entre du Royaume-Uni, de lIrlande et du Danemark dans le CEE

    Fvrier 1975 1re convention de LOME entre la CEE et les pays ACP

    Mars 1975 Cration du FEDER (Fonds europen de dveloppement rgional)

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    Squence 3-HG00 173

    Mars 1979 Entre en vigueur du SME (systme montaire europen)

    Juin 1979 1res lections du Parlement europen au Suffrage Universel

    Octobre 1979 2e convention de LOME

    Janvier 1981 Entre de la Grce dans la CEE

    Janvier 1983 Naissance de lEurope bleue

    Mars 1984 Institution des quotas laitiers

    Juin 1984 Conseil europen de Fontainebleau, ristourne accorde au Royaume-Uni

    Juin 1985 Accord de Schengen

    Janvier 1986 Entre de lEspagne et du Portugal dans la CEE

    Fvrier 1986 Signature de lActe Unique

    Juillet 1987 Entre en vigueur de lActe Unique

    Juin 1989 1res tapes du plan Delors vers lUnion Economique et Montaire (UEM)

    A De lide europenne laube de sa ralisation1945-1957

    1945, lEurope nest plus quun champ de ruines ; louest les armes amricaines sont accueillies enlibratrices, lest lArme Rouge sinstalle. Laffaiblissement des Etats europens est tout autantconomique que diplomatique ; chaque partie du continent , occidentale comme orientale, esten voie de satellisation. Paradoxalement, ce contexte international de sujtion va permettrelaffirmation de lide europenne.

    Un contexte international porteur

    Winston Churchill, qui nest plus aux affaires depuis juillet 1945,multiplie les discours visionnaires ; enmars 1946 il dnonce Fulton lexistence dun rideau de fer qui spare lEurope, en septembre 1946 Zrich il lance une ide encore saugrenue : les Etats-Unis dEurope .

    Document 2

    Lappel de Churchill

    Je voudrais vous parler de la tragdie de lEurope, ce continent magnifique, qui comprend lesrgions les plus belles et les plus civilises de la terre, qui a un climat tempr et agrable et quiest la patrie de tous les grands peuples apparents du monde occidental. LEurope est aussi leberceau du christianisme et de la morale chrtienne. [] Elle est le point de dpart de la plusgrande partie de la culture, des arts, de la philosophie et de la science du pass et du prsent. SilEurope pouvait sentendre pour jouir de cet hritage commun, il ny aurait pas de limite sonbonheur, sa prosprit, sa gloire, dont profiteraient ses 300 ou 400 millions habitants. []En quoi consiste ce remde ? Il consiste recrer la famille europenne, cela dans la mesure dupossible, puis llever de telle sorte quelle puisse se dvelopper dans la paix, la scurit et lalibert. Il nous faut difier une sorte dEtats-Unis dEurope. []Dans cette tche imprieuse, il faut que la France et lAllemagne sassocient. La Grande-Bretagne,

    la famille des peuples britanniques, la puissance Amrique, et jen ai confiance, la Russie aussidoivent tre les amis et les soutiens de la nouvelle Europe et dfendre son droit la vie. Parconsquent je vous dis : Que lEurope ressuscite !

    W. Churchill, discours de Zurich, 19 septembre 1946.

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    Squence 3-HG00174

    Questions Quest-ce qui fait lunit de lEurope selon Churchill ?

    Quelle conception politique de lEurope implique lexpression Etats-Unis dEurope ?Pourquoi difier une sorte dEtats-Unis dEurope ? Utilisez le texte et mobilisez vosconnaissances pour rpondre cette question

    Quel paradoxe annonce le dernier paragraphe ?

    Rponses sa gographie : rgions les plus belles un climat tempr et agrable sa religion : berceau du christianisme et de la morale chrtienne

    sa civilisation et son anciennet : point de dpart de la plus grande partie de la culture, desarts

    Lexpression Etats-Unis dEurope implique une conception fdraliste de lEurope. Uneassociation fdrale suppose un pouvoir central supranational ici et une large autonomie laisse

    aux Etats ; cette expression est particulirement trompeuse car en fait Churchill y tait hostile.Plus que le contenu, cest leffet dannonce pour un orateur talentueux comme Churchill qui compte.Pour lui, 3 raisons motivent la cration d une sorte dEtats-Unis dEurope :

    la paix , que ne se reproduisent plus les guerres civiles europennes que furent la GrandeGuerre et la 2nde guerre mondiale,

    la scurit , noublions pas le rideau de fer annonc ds mars 1946 et la menace sovitiquequi se prcise : lArme Rouge reste en place en Europe orientale ; les lections libres promises Yalta nont pas lieu et la guerre civile clate en Grce,

    la libert . Constituer lEurope, ce serait crer un mle de rsistance au totalitarisme sovi-tique ; noublions pas non plus que la dmocratie nest pas la rgle en Europe, des dictatures

    traditionalistes se maintiennent louest : Portugal de Salazar, Espagne nationaliste de Franco.

    Dans la fin de son discours, Churchill fonde la nouvelle Europe sur le couple franco-allemand : que la France et lAllemagne sassocient ce qui se comprend, ce sont 2 grands adversaires irr-conciliables depuis 1870 ! Le paradoxe tient en ce que son pays, le Royaume-Uni, reste lcartde cette construction rve. LEurope de Churchill est dabord continentale.

    La position de Churchill est reprsentative des positions pro-europennes dans limmdiat aprs-guerrepar lesprit de rconciliation et de paix quelle promeut ; par les inquitudes gopolitiques quellesous-entend, cependant ds 1945 les Europistes , comme on les appelait parfois, sont divissquant lEurope quils veulent mettre en place.

    On repre 2 conceptions dominantes et opposes :

    la conception fdraliste en faveur dune fdration, dune union troite entre Etats euro-pens avec un gouvernement europen fort,

    la conception confdrale , plus souple, celle de Churchill en fait, partisane dune cooprationapprofondie entre gouvernements europens mais sans renoncement la moindre parcellede souverainet nationale. Les tenants de cette position sont alors appels unionistes parrfrence au mouvement cr par Churchill en mai 1947 :United Europe Movement.

    Malgr leurs divisions, les mouvements fdralistes et unionistes se runissent en mai 1948 LAHAYE dans un grand Congrs de lEurope . Churchill prside le congrs ; sont prsentes prs de

    800 personnes influentes dans leur pays dont de nombreux parlementaires. De ce vaste congrs paneu-ropen sort une double proposition afin de raliser lunion politique et conomique europenne :

    instituer une assemble europenne dlibrante

    crer un conseil extraordinaire de lEurope.

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    Squence 3-HG00 175

    Les divisions entre fdralistes et unionistes ne sont jamais surmontes ; cest pourquoi, et aprsngociations entre gouvernements, la 1re ralisation europenne est un compromis insatisfaisant.Le 5 mai 1949 est sign Londres le statut du Conseil de lEurope. Ce nouvel organisme resteconsultatif (pour satisfaire les unionistes) mais propose des objectifs que les fdralistes nauraientpas pu renier : le but du Conseil de lEurope est de raliser une union plus troite entre ses membresafin de sauvegarder et de promouvoir les idaux et les principes qui sont leur patrimoine commun etde favoriser leur progrs conomique et social .

    Plus concrtement, le Conseil de lEurope regroupe 10 pays dEurope occidentale uniquement, etcela son importance, nous y reviendrons : Belgique, Pays-Bas, Luxembourg, Royaume-Uni, Norvge,Sude, Italie, Irlande, France, Danemark en mai 1949 ; le conseil slargit la Turquie et la Grcefin 1949, et surtout la RFA ds 1950.

    Le Conseil de lEurope avait pour fonction initiale de crer une convergence europenne par desinstitutions communes, par un effort dharmonisation des lgislations nationales europennes ; cetteambition dans les faits sest rduite peu.

    Le Conseil de lEurope est dot de 2 institutions principales et sige Strasbourg : une Assemble parlementaire consultative, compose de dlgus nomms par les parlemen-

    taires nationaux, un Comit des ministres, constitu par les ministres des Affaires trangres ou de leurs dlgus,

    qui, huis clos, adoptent lunanimit les recommandations proposes par lAssemble.

    Le Conseil est doublement limit : le vote lunanimit rduit les possibilits daccord et leschamps de comptence du Conseil sont restreints aux domaines juridiques et culturels (alors queses statuts prvoyaient une action commune dans les domaines conomique, social, culturel, scientifique,juridique et administratif .

    Lapport du Conseil lhistoire europenne nest pas dcisif mais pas ngligeable non plus : tout unpersonnel sest form la tractation, son 1er prsident Paul-Henri SPAAK (voir plus loin). Le Conseil agalement adopt des textes majeurs comme en 1950 la Convention europenne des droits delhomme dont est ne en 1953 la Cour europenne des droits de lhomme de Strasbourg ; ellea cette originalit de recevoir les plaintes de personnes sestimant victimes de violations des principesnoncs par la Convention. Notons que la France la partiellement entrine en 1973 seulement, etdans sa totalit en 1981 (une fois la peine de mort abolie) !

    Au final, le Conseil de lEurope est un club des dmocraties europennes. Cela se confirme parladhsion du Portugal et de lEspagne aprs 1974-1975, des anciennes dmocraties populairesaprs 1989 ce jour, 43 Etats la composent soit toute lEurope sauf Andorre, Monaco, et le Vatican ;mais sur lequel on ne peut fonder aucun espoir de construction europenne.

    Le regain des mouvements europens de 1945 1949 aboutit au Conseil, une voie de garage pourla construction europenne. Limpulsion vient dailleurs ; on peut sans caricaturer affirmer que laconstruction europenne est fille de la guerre froide.

    Dans le cadre de leur politique dendiguement ou containment, les Etats-Unis entendent stopperpartout dans le monde la spectaculaire progression du communisme sovitique. Marshall, secrtaire

    dEtat, affirme que cest la misre qui fait le lit du communisme, et de fait en France comme en Italie leparti communiste est le 1er parti politique aprs guerre (comptent aussi pour expliquer ce poids politiquele rle des communistes dans la Rsistance et lhroque guerre de partisans des Sovitiques). Aussi,en juin 1947 est dcid lEuropean Recovery Program, un vaste plan daide aux conomies europen-nes ruines afin de permettre leur relvement (et des dbouchs pour les Amricains). Cette aide estconditionne par une coopration plus troite entre les pays bnficiaires ; Marshall est trs explicitesur ce point : Il faut que les pays de lEurope se mettent daccord Ceci est laffaire des Europens.Linitiative, mon avis, doit venir de lEurope .

    Aussi est cr une organisation de coopration : lOECE en avril 1948 (lOrganisation europennede coopration conomique, prside ds le dbut par P. H. Spaak. LOECE, devenue OCDE en1960, se voit attribuer un triple rle : rpartir laide amricaine, favoriser la concertation entre

    gouvernements europens bnficiaires et favoriser les changes commerciaux.Laide accorde est considrable : prs de 13 milliards de dollars, essentiellement des donsrpartis entre 16 pays mais surtout, + de 60 % entre 4 pays, respectivement le Royaume-Uni,la France, la RFA et lItalie. La concertation entre Etats se dveloppe ponctuellement mais il ny a

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    Squence 3-HG00176

    pas en ralit de vraie concertation densemble, de programmation cohrente lchelle europenne.Quant aux changes commerciaux, ils progressent, et ctait l une des exigences des Etats-Unis, grce labaissement des barrires douanires, des contingentements Ces changes se font non seulementavec les Etats-Unis mais aussi entre Etats europens.

    Pour les 16 pays dEurope occidentale qui ont accept le plan Marshall, le bilan conomiqueest trs favorable ; leffort de reconstruction et dinvestissement est lanc, lentre dansles Trente Glorieuses assure. Pour les Etats-Unis, lobjectif politique est atteint, la prosprit

    progressivement sinstalle et loigne la menace communiste.Pour la construction europenne, le plan Marshall est dcisif par le contexte quil cre. Eneffet, en Europe occidentale, une zone conomique dynamique merge sous le patronageamricain ; surtout dans le cadre de linjonction du plan Marshall cooprer, des habitudesde concertation, de tractation entre politiques europens se sont prises. Elles ne cesseront plus,mme si elles seront loin daboutir chaque fois.

    Limpression de communaut de destin pour louest europen se prcise avec le durcissementde la guerre froide ds 1948. En 1948, cest la fois le coup de Prague et le dbut du blocusde Berlin. LURSS fait peur. Au printemps 1948, les communistes prennent le pouvoir par la force enTchcoslovaquie crant une dmocratie populaire, tuant ainsi la seule dmocratie parlementairestable en Europe centrale depuis 1919. Toujours au printemps 1948, Staline entreprend le blocus terrestre

    de Berlin Ouest et pendant un an, la ville sera ravitaille par le pont arien amricain ; finalement le petit pre des peuples cdera. Pour les dmocraties librales europennes, lenseignement en tirer est clair : leur scurit est menace par lURSS et seule la puissance amricaine avecson parapluie nuclaire les empchera de tomber dans la sphre dinfluence sovitique. Ds1947, les Etats ouest-europens se sont proccups de leur scurit. Le 4 mars 1947, la France et leRoyaume-Uni signent une 1re alliance militaire : lUnion Occidentale ; la Belgique, les Pays-Baset le Luxembourg les rejoignent un an plus tard aprs le coup de Prague. Cest un trait daide etassistance au cas o lun dentre eux serait agress. Mais sans la puissance amricaine, cette allianceest de peu de poids. Les Europens demandent aux USA dentrer dans lalliance, et le 4 avril 1949leurs efforts aboutissent avec la signature du trait de lAlliance Atlantique Nord incluantUSA, Canada, les 5 de lUnion Occidentale plus lItalie, le Portugal, la Norvge, le Danemarket lIslande. En 1952, la Grce et la Turquie les joignent, puis la RFA en 1955. LOTAN, lor-

    ganisation militaire du trait, ds 1951 garantit la scurit ouest-europenne par lintgrationdes forces armes sous direction amricaine et la prsence de troupes amricaines sur lesol europen.

    En 1949, la guerre froide a cr en Europe 2 zones dinfluence rivales ; lest le camp des dmocratiespopulaires , louest le camp des dmocraties librales capitalistes et atlantistes (membres delAlliance Atlantique). Une communaut de destin est dsormais possible louest : les intrts cono-miques et gopolitiques sont convergents.

    Pour faire lUnion, il faut encore la volont. Celle-ci existe

    Les pres fondateurs et leurs valeurs

    Ils ont tous en commun dappartenir au mme courant politique, ils sont dmocrates chrtiens. Leurspartis politiques participent tous des coalitions gouvernementales dans limmdiat aprs-guerre, ilsagit du MRP (Mouvement Rpublicain Populaire) en France, de la CDU (Union dmocrate chrtienne)en Allemagne, du parti dmocrate-chrtien en Italie, du parti chrtien social en Belgique.

    Ces partis peuvent tre classs au centre-droit ; ils sont rsolument dmocrates et partisans dunrgime parlementaire plutt que prsidentiel ; en conomie ils restent des libraux modrs avecde fortes proccupations sociales, do leur attachement l tat providence ; sur le politique, lan-ticommunisme et leur atlantisme les caractrisent. LEurope occidentale telle quelle se dessine en1948 leur conviendrait si lon y ajoutait plus dintgration conomique et politique.

    De leur appartenance dmocrate-chrtienne dcoulent 2 aspects fondamentaux et qui vont informertoute la construction europenne jusqu nos jours :

    un aspect ngatif, cette tradition si typique des lites catholiques de faire la place de (descitoyens) plus quavec et dloigner les populations des dcisions pour les rserver des

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    Squence 3-HG00 177

    initis, do le reproche continuel et parfois injuste adress aux autorits europennes de quelquepoque que ce soit dtre composes de technocrates irresponsables,

    un aspect positif,le pragmatisme. Chaque occasion est bonne saisir. Les dmocrates-chrtiens nontpas didologie politique ou conomique devant laquelle il faut se plier linverse des communistes,des libraux ou des nationalistes. Pensons Monnet dclarant en 1950 : action concrte et rsolue,portant sur un point limit mais dcisif ou Schuman la mme anne : lEurope ne se fera pasdun coup elle se fera par des ralisations concrtes .

    Paul-Henri Spaak

    Alcide de Gasperi(1881-1954)

    Konrad Adenauer(1876-1967)

    Jean Monnet(1888-1979)

    Robert Schuman(1886-1963)

    Ces pres fondateurs sont finalement peu nombreux. Vous devez retenir :

    Chef du gouvernement belge, 1er prsident de lOECE, puis 1er prsident de lAssemble du Conseil delEurope et dont le rapport en 1955 servit de base aux discussions qui aboutirent en 1957 la crationdu March Commun.

    Prsident du Conseil en Italie dans limmdiat aprs-guerre, pre de la dmocratie parlementaire ita-lienne.

    Avocat, maire de Cologne de 1917 1933, destitu par les nazis, grande figure du Zentrum (parti centristecatholique auto-dissout au dbut de la priode nazie) ; en 1945, il cre la CDU puis est lu chancelierde la RFA en 1949 poste quil garde jusquen 1963. Pour lui, la construction europenne permet laRFA de rintgrer le concert des nations et dchapper un rapport de tutelle avec les Allis.

    Il commence en 1919 une brve carrire diplomatique la SDN comme secrtaire gnral adjoint quilquitte ds 1923. Il rapparat en 1938 au service de lEtat comme ngociateur dans lachat davionsaux Etats-Unis ; pendant la guerre il participe comme fonctionnaire britannique au Victory Programm,se joint de GAULLE. En 1945, il est commissaire gnral au plan. Il est lminence grise des hommespolitiques franais pro-europens, il propose en 1950 la CECA et la CED

    Dput de Moselle ds 1919, rlu jusquen 1940, membre du gouvernement Reynaud, il est arrt ladfaite par les Allemands. Aprs 1945, il est lun des fondateurs du MRP, ministre ds 1946, prsidentdu Conseil en 1947-1948 puis ministre des affaires trangres de 1948 1953. Il est avec Adenauer

    lhomme du rapprochement franco-allemand, base de la construction europenne. Plus tard, de 1958 1960, il est prsident de lAssemble parlementaire europenne.

    Cest dailleurs Robert Schuman, dans une dclaration solennelle du 9 mai 1950, sur la base dunmmorandum propos par Jean Monnet qui lance officiellement la construction europenne.

    Document 3

    Robert Schuman lance lide europenne

    La contribution quune Europe organise et vivante peut apporter la civilisation est indispensable

    au maintien des relations pacifiques. En se faisant depuis plus de vingt ans le champion duneEurope unie, la France a toujours eu pour objet essentiel de servir la paix. LEurope na pas tfaite, nous avons eu la guerre.

    LEurope ne se fera pas dun coup, ni dans une construction densemble ; elle se fera par desralisations concrtes crant dabord une solidarit de fait. Le rassemblement des nations euro-pennes exige que lopposition sculaire de la France et de lAllemagne soit limine. []

    Le gouvernement franais propose de placer lensemble de la production franco-allemande decharbon et dacier sous une Haute Autorit commune, dans une organisation ouverte la parti-cipation des autres pays dEurope.

    La solidarit de production qui sera ainsi noue manifestera que toute guerre entre la France etlAllemagne devient non seulement impensable, mais matriellement impossible. Ltablissement

    de cette unit puissante de production, ouverte tous les pays qui voudront y participer [],jettera les fondements rels de leur unification conomique.

    Dclaration solennelle du gouvernement franais faite par Robert Schumanministre des Affaires trangres, le 9 mai 1950.

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    Squence 3-HG00178

    Questions Pourquoi faut-il faire lEurope selon Schuman ?Quelle est sa mthode ?Que propose-t-il concrtement ?En 1950, do pouvaient venir les rsistances et oppositions lide europenne selon

    Schuman ?

    Rponses La gnration de Schuman a t traumatise par la guerre : lEurope na pas t faite, nousavons eu la guerre ; lobjectif premier du ministre des Affaires trangres franais est demp-cher tout retour de la guerre : toute guerre entre la France et lAllemagne devient non seulementimpensable, mais matriellement impossible ;il faut que lopposition sculaire de la France etde lAllemagne soit limine .

    Schuman est un pragmatique et un raliste. Il faut partir de ce qui est vraisemblable plutt quede grandes thories gnrales : LEurope ne se fera pas dun coup, ni dans une constructiondensemble ; elle se fera par des ralisations concrtes crant dabord une solidarit defait . Schuman propose une construction europenne fonde sur le rapprochement franco-alle-

    mand : toucher au 1er

    chef la France et lAllemagne soit les 2 grandes puissances de lEuropetraditionnellement rivales. Cette base sera ensuite ouverte la participation des autres paysdEurope . Schuman espre crer une solidarit en vue de leur unification conomique ;saconception de lEurope fdrale (qui napparat pas ici) est mise en retrait ; pour la raliser, il passepar lconomie ensuite viendra le temps de la construction politique.

    Concrtement, Schuman propose la mise en commun des productions de charbon et dacier (manire de surveiller le voisin allemand au cas o il aurait lintention de rarmer) mais la princi-pale nouveaut est dans la cration dune institution supranationale : placer lensemble de laproduction franco-allemande de charbon et dacier sous une Haute Autorit commune ;cest unpari politique de taille car il implique un abandon mme partiel et limit de souverainet.

    Les propositions europennes de Schuman pouvaient rencontrer 4 grands obstacles : en 1950, tous les contentieux de la guerre ne sont pas rgls, et notamment celui de la Sarre,

    grande rgion allemande productrice de charbon que la France continuait de revendiquer ; pour les gaullistes, tout abandon de souverainet est inacceptable ; pour les communistes,cest remettre en scne logre allemand, menacer la mre-patrie sovitique,

    favoriser le grand capital des matres de forge ; enfin, il fallait dpasser les rserves des opinions publiques, surtout franaise, encore trs

    anti-allemande en 1950.

    Premires ralisations et checs

    Une coopration troite entre nations europennes tait possible comme lont prouv en 1947 laBelgique, le Luxembourg et les Pays-Bas en crant le Benelux ; ces 3 pays instaurent un tarifdouanier commun et un march commun en supprimant les barrires douanires entre eux. Dautresprojets ont t envisags mais ont chou comme celui de lUnion Scandinaveen 1949 ou lUniondouanire franco-italienneen mars 1949.

    La CECA En 1950, Schuman propose aux Allemands la mise en commun de leur production de charbonet dacier. La proposition reoit un cho trs favorable car les deux nations sont complmentaires sur

    ce point : lAllemagne a dimportantes ressources en charbon tandis que la France est bien dote enfer. Konrad Adenauer rpondit avec enthousiasme car ctait un moyen pour lui dchapper la tutelledes Allis et dassurer le relvement conomique de la RFA.

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    Squence 3-HG00 179

    Document 4

    La CECA vue par un caricaturiste britannique : Le Pont de la Concorde

    Caricature de Llingworth parue dans Punch, 1950. Punch Cartoon Library

    Questions Dcrivez la scne.Quels enseignements gnraux peut-on en retirer ?

    Rponses De part et dautre dun foss, 2 hommes se font face ; Schuman au 1er plan et Adenauer au2nd. Chacun reprsente leur pays, Schuman et Cie, cest la France, Adenauer AC, la RFA. Schumanguide une poutrelle dacier estampille : Coal and steel plan ou plan du Charbon et de lAcier,qui servira de lien, de pont entre les 2 pays. Mais la rencontre nest pas sans sous-entendus etrserves : soupon ( suspicion ), mfiance ( mistrust ).

    Cest une caricature britannique, et cela a son importance. Elle tmoigne de la mfiance et duscepticisme britannique sur la proposition Schuman, elle garde son intrt en en quelle rvle :le rapprochement franco-allemand tait un moyen pour chacun des 2 partenaires de sesurveiller et de se neutraliser.

    Malgr lopposition des communistes en France qui y ont vu une Europe des cartels, des grandspatrons, de DE GAULLE un mli mlo de charbon et dacier , malgr lhostilit du patronatfranais qui craignait la concurrence trangre et les rserves britanniques (les travaillistes sont aupouvoir et ne veulent pas de cette Europe des patrons ), le trait de la Communaut europennedu Charbon et de lAcier est sign le 18 avril 1951. Communaut europenne car lItalie etles 3 pays du Benelux ont joint la France et la RFA.

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    Squence 3-HG00180

    La CECA devient effective en juillet 1952, cest la 1re tape dans la construction europenneet une relative russite. Pour quelle fonctionne, des institutions sont mises en place avec uneHaute Autorit de 9 membres, cest lexcutif de la CECA. Le Conseil des ministres des 6 Etatsmembres contrle la Haute Autorit et se charge de faire appliquer les dcisions de cette dernire.2 autres organismes la complte : une Cour de justice de 7 juges pour trancher les diffrends etveiller au respect du trait et une assemble parlementaire (dont les dputs sont choisis au seindes parlements nationaux).

    Lexistence de la Haute Autorit est dune importance cruciale ; cest elle qui dcide. Par son ind-pendance lgard des gouvernements, la Haute Autorit est un organisme supranational (dont le1er prsident est dailleurs Jean Monnet en aot 1952) ; ses ressources sont prleves sur la production(1 %) et non des dotations des Etats membres. En cela, il y a construction europenne.

    Dans les faits, le CECA a mis en place un march commun du charbon et de lacier, elle a favoris leschanges entre Etats membres dans ses domaines de comptence. Ce fut une russite conomique ;la CECA a contribu par limportance de ses investissements moderniser la sidrurgie europennetoutefois son action sociale, relle, fut insuffisante face aux ncessaires reconversion conscutives la modernisation : entre 1954 et 1972, 460 000 travailleurs du secteur charbonnier ont bnfici deses aides. Il y eut des limites : la CECA na pu empcher la crise charbonnire partir de 1958.Pendant les Trente Glorieuses, les hydrocarbures supplantent le charbon. Cette volution structurelle

    dpassait les moyens daction de la CECA. La Haute Autorit na gure pu, non plus, influer sur latendance la cartellisation des grandes socits sidrurgiques : en 1953 elles produisaient 40 % delacier, en 1970 60 %

    La CED La Communaut europenne de Dfense est un projet plus ambitieux. Cette fois, on dpasse lap-proche strictement conomique pour une intgration plus politique et ici militaire.

    Ce projet nat du contexte tendu de la guerre froide, la guerre de Core commence, des millionsde signatures approuvent lappel de Stockholm. Communisme rime encore avec pacifisme dans les

    opinions publiques. Reste que pour les politiques et les stratges ouest-europens un problme detaille est en suspens : quel statut accorder la nouvelle RFA ne en 1949 ? Quelle arme pourcet Etat ? Qui la dirigera ? Ren Pleven, prsident du Conseil propose en octobre 1950 de crer unearme europenne de 100 000 hommes avec un commandement unique et intgr, dans laquelle seraitcompte larme allemande. Cette proposition a lappui des Etats-Unis, en effet les Etats-Unis estimentle rarmement de la RFA urgent. Ds mai 1952, un accord intervient qui instaure la cration dela CED en mme temps quil autorise le rarmement allemand. Le projet est approfondi pourregrouper la fois CECA et CED en une structure supranationale.

    Pour tre ralise, la CED devait tre ratifie par les Parlements nationaux. En 1953, les 5 partenai-res de la France ont tous ratifi le trait, seule la France trane les pieds. Il faut dire que lesdivisions sont profondes.

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    Squence 3-HG00 181

    Document 5

    Questions Comment est reprsente la CED ? Quest-ce que cela signifie ?Quel groupe politique ne pouvait quy tre hostile ?

    Rponses La CED est reprsente comme un bouclier parsem de drapeaux des Six, elle est donc pensecomme une alliance dfensive : pour la paix .Parmi les 2 menaces identifies, le corbeau croix gamme rappelle un pass rvolu mais le cor-

    beau faucille et marteau insinue la menace sovitique. Le Parti communiste franais, au pas avecle Kominform, solidaire de la Mre patrie sovitique ne pouvait interprter la CED que comme un

    agression contre lURSS.De fait, seuls les chrtiens-dmocrates sont favorables la CED ; le prsident du Conseil PierreMends France est hsitant et peu engag, les gaullistes vituprent contre cet abandon de sou-verainet, les communistes srigent contre le rarmement revanchard allemand anti-sovitique. Le30 aot 1954, lassemble nationale dit NON au projet de CED par 319 voix contre 264.

    Lchec est cuisant, voire humiliant pour les chrtiens-dmocrates franais. Ses consquences sontconsidrables et parfois paradoxales : la RFA intgre lOTAN en 1955 et se remilitarise sous tutelle amricaine et non europenne.

    Elle intgre avec lItalie lUnion Occidentale qui devient lUEO (Union de lEurope Occidentale),substitut la CED !

    la construction europenne subit son plus grave chec, on peut la penser irrmdiablement com-promise en 1954 mais le pragmatisme des chrtiens-dmocrates va spectaculairement la relanceren quelques mois.

    Plus grave, lchec de la CED tue pour longtemps, jusqu la fin des annes 1980, tout projetdunion politique et toute ide de politique trangre commune.

    Paul Colin affiche en faveur de la CED, 1954 Bridgeman-Giraudon.

    Adagp, Paris 2009

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    Squence 3-HG00182

    Vers le MarchCommun

    En 1954, la construction europenne nest pas compltement bloque ; pour lintgration militaire,cest exclu, pour lintgration politique galement mais lintgration conomique amorce par la CECAfonctionne. Cest dans cette direction que les partisans de lEurope impulsent la relance du projetcommunautaire europen.

    Ce sont les pays du Benelux qui en sont linitiative. Ils proposent en mai 55 le plan BEYEN-SPAAK-BECH ; ce dernier largit les politiques communes aux domaines des transports, de lnergie(notamment lnergie atomique) et propose plus vaguement la cration dun March commun. Ds lors,

    les tractations commencent entre chefs de gouvernement des 6 de la CECA ; un accord est obtenu dsmai 1955 pour relancer la construction europenne, symbolis un mois plus tard par la conf-rence de Messine dans laquelle les Six sengagent franchir une nouvelle tape dabord dans ledomaine conomique avec comme objectif gnral : maintenir lEurope la place quelle occupedans le monde, pour lui rendre son influence et son rayonnement et pour augmenter dune manirecontinue le niveau de vie de la population . Un comit dexperts et de dlgus gouvernementauxest charg de dfinir les modalits concrtes, les grandes lignes de ce March commun, comit prsidpar Paul-Henri Spaak. Le rapport Spaak, bilan des travaux du comit, est adopt comme basede travail et de ngociation aux traits sur le March Commun et lEuratom, traits signs le25 mars 1957 au Capitole Rome.

    B De 1957 1973, la Communaut conomiqueEuropenne (CEE) Six

    Les institutions du March Commun

    Dans le trait crant le March Commun sont rappels ses objectifs et principes :

    Document 6

    Le trait de Rome instituant la CEE 25 mars 1957

    Article premier. Par le prsent trait, les hautes parties contractantes instituent entre ellesune Communaut conomique europenne.

    Art. 2. La Communaut a pour mission, par ltablissement dun march commun et par lerapprochement progressif des politiques conomiques des Etats membres, de promouvoir undveloppement harmonieux des activits conomiques dans lensemble de la Communaut, uneexpansion continue et quilibre, une stabilit accrue, un relvement acclr du niveau de vie,et des relations plus troites entre les Etats quelle runit.

    Art. 3. Aux fins nonces larticle prcdent, laction de la Communaut comporte, dans les

    conditions et selon les rythmes prvus parle prsent trait :a. llimination, entre les Etats membres, des droits de douane et des restrictions quantitatives

    lentre et la sortie des marchandises, ainsi que toutes autres mesures deffet quivalent ;b. ltablissement dun tarif douanier commun et dune politique commerciale commune envers

    les Etats tiers ;c. labolition, entre les Etats membres, des obstacles la libre circulation des personnes, des

    services et des capitaux ;d. linstauration dune politique commune dans le domaine de lagriculturee. linstauration dune politique commune dans le domaine des transports ; []i. la cration dun fonds social europen, en vue damliorer les possibilits demploi des tra-

    vailleurs et de contribuer au relvement de leur niveau de vie ;

    j. linstitution dune banque europenne dinvestissements, destine faciliter lexpansion co-nomique de la Communaut par la cration de ressources nouvelles ;k. lassociation des pays et territoires doutremer, en vue daccrotre les chances et de poursuivre

    en commun leffort de dveloppement conomique et social.

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    Questions Qui sont les hautes parties contractantes de larticle 1 ?Dans quel contexte conomique est instaure la Communaut ?Quels sont les principales actions prvues par le trait ?Quels organismes nouveaux sont prvus ? Quel est leur rle ?Que faut-il comprendre par pays et territoire doutremer ?Comment qualifier lEurope communautaire ainsi mise en place ?

    Rponses Il sagit des 6 pays membres de la CECA : Benelux, Italie, RFA et France. Le Royaume-Uni sest nouveau exclu de lui-mme, il avait particip aux ngociations prparatoires mais a refus touteide dintgration.

    Ce sont les Trente Glorieuses, un essor conomique prodigieux et sans prcdent. un march unique interne (a) sans douane et externe (b) : tarif douanier commun

    un espace de libre circulation des personnes, des services et des capitaux (c) des politiques communes, agricoles (d), dans le domaine des transports (e)

    Deux organismes nouveaux sont prvus : un fonds social europen (i) avec comme rle : amliorer les possibilits demploi des tra-vailleurs et contribuer au relvement de leur niveau de vie . Plus concrtement, le FSE fut cr enseptembre 1960, il agit sur la formation professionnelle, la mobilit gographique des travailleursavec comme action prioritaire de favoriser les reconversions. Les interventions du FSE sont resteslimites dans la mesure o les bnficiaires ont toujours t les Etats et non les particuliers ; lesEtats contributeurs sefforant de rcuprer systmatiquement leur mise. Le FSE na donc pas tun outil de solidarit communautaire de 1960 1972 ; rform en 1972 il sert en fait financerlintgration europenne.

    une banque europenne dinvestissement (j) avec comme rle : faciliter lexpansion cono-mique . La BEI accorde des prts pour la reconversion ou la modernisation des industries, pourlaide au dveloppement des rgions en retard, cest son action principale, notamment en faveur

    du Mezzogiorno italien, financer de grands travaux, ou encore accorder des prts aux pays etterritoires doutremer .

    Les pays et territoires doutremer sont essentiellement les colonies franaises (et belge pourle Congo) africaines plus les confettis parpills aux 4 coins du globe : Martinique, Guadeloupe,Polynsie, Runion

    LEurope ainsi mise en place est une grande aire de libre-change avec cependant une coordina-tion centrale ; cest une Europe conomique librale, en rien politique et avec des proccupationssociales relles (FSE) mais rduites.

    Au-del des objectifs, passons au concret du fonctionnement de la CEE. Les Traits de Rome donnentnaissance la fois au March Commun mais galement lEuratom ou CEEA= Communaut

    Europenne de lEnergie Atomique, en vigueur au 1er janvier 1959. Lobjectif essentiel de lEuratomest de valoriser lutilisation de lnergie nuclaire (civile) en mettant en commun recherche, savoirs,capitaux, en favorisant la mobilit des techniciens et les investissements. Quelques ralisations concrtesvirent le jour avec 4 centres de recherche et 5 centrales nuclaires dont Chooz au Nord de la France.Assez vite, lEuratom a pitin ; les Franais engags dans leur programme nuclaire militairerefusant de cooprer. La CEEA signe en mme temps que la CEE lui est donc trs secondaire

    Les institutions de la CEE sont un compromis original ; elles forment une organisation interna-tionale et non comme la Haute Autorit de la CECA une organisation supranationale.Plusieursindices le prouvent : la CEE ne dispose pas de ressources propres, d impt europen ; ses ressources sont des

    contributions des Etats membres : 28 % pour lAllemagne, idem pour la France et lItalie, 7,9 %

    pour les Pays Bas comme pour la Belgique, 0,2 % pour le Luxembourg, le Parlement europen na quun rle consultatif et de plus il nest que lmanation des parle-

    ments nationaux, le pouvoir de dcision ne revient pas la Commission comme pour la Haute Autorit de la

    CECA mais au Conseil des ministres !

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    Lorganisme central est la Commission. Constitue de 9 membres nomms pour 4 ans par leurgouvernement respectif et sigeant Bruxelles, la Commission est linitiative de proposi-tions faites au Conseil sur des points techniques ou politiques ; de plus elle veille au respect destraits, excute (applique) les politiques communes dcides. Elle gre le budget au moyen dunadministration subdivise en 20 directions gnrales, et lit pour deux ans un prsident. La Commissionest le vritable centre dimpulsion de la Communaut, cest delle que partent les novations et autourdelle que se forment les 1res administrations de fonctionnaires europens.

    Le Conseil des ministres est compos des reprsentants de chacun des 6 gouvernements.Cest lautre partie de lexcutif europen en ce quil adopte le budget et les directives de laCommission, il les rend excutoires. Chaque Etat des Six prside pour 6 mois et tour de rle leconseil des ministres. Le Conseil reste souple et varie en fonction des thmes traiter, ce sontles ministres spcialiss qui alors se retrouvent : agriculture, industrie Dans les faits, les gouverne-ments ont des reprsentants permanents Bruxelles pour assurer la continuit des travauxdu Conseil, cest le Coreper(sur le schma).

    Le Parlement na quun rle consultatif et de contrle. Lassemble parlementaire de la CEEdevient Parlement europen en 1962 quand elle fusionne avec celles de la CECA et de lEura-tom. Le Parlement sige Strasbourg, est compos de 142 dputs dsigns par les parlementsnationaux : 36 pour la France, autant pour lAllemagne, lItalie, 14 pour la Belgique comme pour les

    Pays-Bas, 6 pour le Luxembourg. Le Parlement formule des avis, est consult sur les propositions dela Commission, le seul vritable pouvoir en sa possession est le vote au 2/3 de ses membres dunemotion de censure permettant de renverser la Commission. Jamais ce pouvoir se sera utilis danslEurope des Six !

    Le Comit conomique et social est compos de 101 personnes nommes par le conseil des minis-tres ; il se veut reprsentatif de la vie conomique et sociale avec diffrentes activits reprsentes :agriculteurs, artisans, patrons, syndicalistes

    La Cour de justice sige Luxembourg ; elle est comptente la fois pour la CEE, la CECA etlEuratom et se compose de 7 puis 13 juges nomms pour 6 ans ; elle se prononce sur les diffrendsentre gouvernement et Commission, veille au respect du droit communautaire et tablit une

    jurisprudence europenne quand de nouveaux conflits sont trancher.

    La pratique impose quelques modifications institutionnelles. Dabord par souci de clarification etde fonctionnalit, les 3 excutifs de la CECA, dEuratom, de la CEE fusionnent. La dcision estprise en 1965 ; elle devient effective en 1967. La Commission passe alors 14 membres. Ensuite,les chefs dEtat ou de gouvernement ont pris lhabitude de se runir ; ces sommets raresau dbut (1961,1967) ont fini par devenir des runions dcisionnelles comme LA HAYE en1969 o lon dcide un 1er largissement, loctroi la Communaut de ressources propres(1 % de TVA). Ces sommets sont appels sinstitutionnaliser aprs 1975.

    Des ralisations plus ou moins spectaculaires

    La PAC Cest la principale ralisation du March Commun et elle nentre en vigueur quen janvier 1962soit plus de 4 ans aprs le trait de Rome. Ce retard sexplique par les enjeux propres au secteur agri-cole ; la France est dj la 1re puissance agricole des Six avant la PAC tandis que lAllemagneest importatrice mais les produits agricoles franais sont trop chers par rapport au marchmondial.

    La PAC est fonde sur 3 piliers :

    crer un march commun agricole.Cela passe donc par une libre circulation des produits agricoles entre les 6 Etats de laCommunaut ; cest aller lencontre des traditions de marchs protgs do dpres ngocia-

    tions. Cette libre circulation nest effective quen 1970 pour la plupart des produits agricoles, onngocie par paquets cest--dire groupe de produits ainsi le march unique des crales,viande porcine ou volailles est ralis ds juin 1967, janvier 67 pour les fruits et lgumeset seulement juin 1970 pour les vins.

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    Fixer un prix unique et commun des produits.Cet objectif nest applicable quune fois le march commun ralis pour le produit en question ;cest pourquoi la fixation des prix communs date des annes 1967-1968. Cest le conseil des minis-tres (de lagriculture) qui fixe ces prix mais les intrts des Six sont divergents, les uns achetanttandis que les autres vendent do des ngociations marathon. Dans ces ngociations, 2 prixsont fixs : le prix dorientation ou prix dobjectif est le prix souhaitable pour un produitselon les ministres ; le prix dorientation ou de soutien est un prix minimum garanti auxproducteurs ; la Communaut par ses organismes spcialiss achte les produits agricoles au prixdintervention quand les prix du march lui sont infrieurs. Pour fonctionner, ce systme ncessitedes fonds important, ce sera le rle du FEOGA (Fonds dIntervention et de Garantie Agricole),constitu de contributions des Etats membres. Le FEOGA garantit un revenu minimal aux agri-culteurs par le systme du prix dintervention. Les produits ainsi achets sont soit dtruits, soitstocks en cas de surproduction. Le FEOGA aide aussi les agriculteurs en finanant la modernisationdes exploitations et des structures agraires.

    Protger le march commun agricole.

    Le systme du prix dintervention ne peut fonctionner que si le March Commun agricole est pro-tg, en effet trs souvent le prix dintervention est suprieur au prix du march mondial.Aussi pour garantir ltanchit du March Commun sont mis en place les prlvements et resti-

    tutions. Quant un produit est import en dehors du March Commun, une taxe est prleve pouraligner son prix sur celui garanti dans la Communaut, cest le prlvement. Autant alors acheterau sein du March Commun ! Pour exporter, alors que les prix mondiaux sont infrieurs au prixdintervention,une subvention est accorde aux exportations, son montant quivaut la diffrenceentre le prix europen garanti et le prix mondial, cest la restitution.

    On le peroit bien vite, la PAC cote cher et ne peut gure sautofinancer ce qui tait prvu pourjanvier 1965, les prlvements devant combler les restitutions. Plus grave, la PAC favorise les Etatsproducteurs, surtout la France, au dtriment des Etats importateurs comme lAllemagne. La PACdevient objet de rivalits intra-communautaires do des crises spectaculaires comme cellede 1965, nous y reviendrons. Pour la PAC, cette crise se solde par le compromis de Luxembourgde janvier 1966 et un accord en mai selon lequel les prlvements couvriraient les restitutions pour90 % tandis que le reste serait combl par des contributions des Etats. Dans les faits, les contributions

    initialement provisoires (3 ans) ont t maintenues.La crise du financement de la PAC cache une autre crise plus profonde du secteur agricole savoirdes structures agraires inadaptes, un nombre encore trop grand dagriculteurs. Cest pour-quoi le vice-prsident de la Commission Sicco Mansholt proposa en dcembre 1968 une rformede lagriculture dans la CEE dans laquelle le prix dintervention serait abaiss, la concentrationdexploitation et la cessation dactivit pour les agriculteurs favorises : il faut que le taux annuelde diminution de la population agricole soit notablement acclr de 1970 1980, la superficieagricole utilise devrait tre rduite dau moins 5 millions dhectares il doit tre possible derduire progressivement le cot des interventions sur le march lui-mme .

    Le plan Mansholt suscite de trs vives manifestations agricoles, Bruxelles mme ; son analyse, duneincontestable justesse conomique, sous-estimait le cot social. Les Etats, notamment la France, plus soucieux

    de satisfaire leur clientle lectorale paysanne ont enterr le plan. Le problme pos reste entier.

    LUnion douanire Ctait lobjectif le plus immdiat du trait de Rome, crer un march sans barrires douanires nicontingentement. Un calendrier assez souple de dsarmement douanier avait t programm ds 1957 ; lebut devant tre atteint au 1er janvier 1970. Dans les faits, ce fut plus rapide que prvu : - 40 % ds 1961,- 30 % ds 1965 et au 1er juillet 1968 le march commun des produits industriels est ralis.

    Cette union est dcisive car elle a contribu dynamiser les conomies ouest-europennes dans lesannes 1960 : le commerce intra-communautaire quadruple jusqu 1968 ; de plus, les entreprisesdsormais mises en concurrence sont contraintes de se moderniser et de gagner en productivit.

    Comme pour les produits agricoles, on cherche protger ce march commun mergent aussi ds1968 est adopt un tarif extrieur commun. De 1958 1968,on a progressivement harmonis lesdroits de douane sur les importations hors Communaut. Ce tarif alimente en partie le budget de laCommunaut mais il a fallu le rviser la baisse dans le cadre des ngociations du GATT et notammentdu Kennedy Round.

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  • 8/6/2019 AL7HG00TEPA0108Sequence03

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    Squence 3-HG00186

    La ralisation rapide et spectaculaire du march commun pour les produits industriels saccompagnedun paradoxe, cest--dire que ne fut pas entreprise une politique industrielle commune malgrquelques dclarations officielles allant en ce sens. Il y a bien eu des programmes industriels euro-pens mais dans lesquels la Communaut en tant que telle nest pas implique ; on pense auprogramme Concorde dans laronautique conclu ds 1962 entre la France et le Royaume-Uniou la naissance du consortium Airbus ds 1970. Cette absence de politique industrielle a favo-ris les investissements amricains dans la Communaut au point quon peut se demander si les FMNamricaines nont pas t les principales bnficiaires du March Commun.

    Un rve encoreirralisable :

    lUnion montaire

    Ce nest pas un objectif premier du trait de Rome aussi les membres de la Communaut ne se sont-ilsgure donn les moyens de la raliser.Lunion conomique et montaire commence srieusement tre envisage lors du sommet de La HAYE (dcembre 1969) partir du mmorandum Barre(alors vice-prsident de la Commission) ; cet objectif est prcis dans le rapport Werner qui sert de basepour un accord en 1971 selon lequel en 1980 lUnion serait ralise avec parit fixe entre les monnaies.En ralit, aucun des Etats membres ntait encore prt abandonner ses prrogatives montairesau profit dune institution supranationale. A partir de 1971, le contexte change (Cf. chapitre 1squence 1), le dollar nest plus convertible en or et les monnaies flottent les unes par rapport auxautres mme si les fluctuations sont plus ou moins encadres.

    Pour viter de trop grands dsordres montaires qui fragiliserait le March Commun, les Sixdcident en mars 1972 de limiter plus troitement les fluctuations entre les monnaies de lazone communautaire 2,25 %, cest le serpent montaire europen auquel adhrent leslivres sterling et irlandaise pour le quitter peine 6 mois plus tard !

    Lpine gaullienne

    1958 marque les dbuts effectifs de la Communaut europenne, une Communaut pense et voulue parles dmocrates-chrtiens europens. Or 1958, cest aussi une rupture majeure dans lhistoire politiquefranaise avec le retour ds mai 1958 de de Gaulle au pouvoir ; dsormais les dmocrates-chr-

    tiens franais sont marginaliss politiquement. Or de Gaulle a une conception bien personnelle delEurope, qui nest pas celle des Pres Fondateurs ; voil qui aide comprendre le relatif immobilismedans la construction europenne pendant les annes 1960.

    Charles de GAULLE mne une politique extrieure de grandeur ; la Communaut ne lintresseque si elle est un outil qui assure grandeur et indpendance pour la France. Avec de Gaulle, cest leretour en force des ides de confdration (refus dabandonner toute parcelle de souverainet auprofit dinstitutions supranationales) or les pres fondateurs taient fdralistes. Cest un revirementcomplet. LEurope de de Gaulle est plus large gographiquement : de lAtlantique lOural , ce nepeut tre lEurope intgre de Schuman mais plutt lEurope des Etats, des patries. En 1960, dans uneconfrence de presse, il affirme : des Etats qui sont les seules entits qui aient le droit dordonneret lautorit pour agir. Se figurer quon peut btir quelque chose qui soit efficace pour laction et qui

    soit approuv par les peuples en dehors et au-dessus des Etats, cest une chimre . De Gaulle posel un problme essentiel, celui de la lgitimit des instances supranationales. En 1962, il ritre plusmchamment sa critique : il ny a que les Etats qui soient valables, lgitimes et capables Jene crois pas que lEurope puisse avoir aucune ralit vivante si elle ne comporte pas la France avec sesFranais, lAllemagne avec ses Allemands ils nauraient pas beaucoup servi lEurope sils avaientpens, crit en quelque espranto ou volapk intgrs .

    Son Europe des patries , il la conoit aussi sur laxe franco-allemand. Il entend tablir offi-ciellement la rconciliation franco-allemande, recevant Konrad Adenauer en juillet 1962 dans lacathdrale de Reims. Un trait franco-allemand est sign en janvier 1963, texte ambitieux quiprvoit une concertation de leurs politiques trangres, un rapprochement des doctrines de dfense, unchange de personnel militaire et une multiplication des changes en matire dducation, jeunesseCtait pour de Gaulle une base pour crer son Europe des patries indpendante des Deux Grands.Or les successeurs dAdenauer ne lont pas suivi, le trait a certes t ratifi mais les Allemands ne sesont pas dsolidariss de leurs alliances militaires avec les Etats-Unis (vitales leurs yeux) ni de leurconception plus fdraliste de la Communaut. Y voir ici la naissance de lAxe franco-allemand,moteur de la construction europenne est sinon une imposture, au minimum abusif.

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  • 8/6/2019 AL7HG00TEPA0108Sequence03

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    Squence 3-HG00 187

    De Gaulle nest pas homme se ployer et ses partenaires de la CEE lapprirent leurs dpens en 1965.La PAC est en pleine crise de financement or la France en est la plus grande bnficiaire. Sespartenaires demandent un contrle par le Parlement du budget du FEOGA ; de Gaulle refuse net etchoisit la politique de la chaise vide. Pendant 6 mois, de juin 1965 janvier 1966, la Francedserte les institutions de la CEE, paralysant son fonctionnement. Le diffrend est rgl en

    janvier 1966 par larrangement de Luxembourg. Cest un compromis aux consquences catastro-phiques pour la construction europenne ; dsormais le droit de veto dun Etat est de fait reconnuquand ses intrts vitaux sont en jeu, le recours la majorit qualifie est dans la pratique invalid.Le recul par rapport aux souhaits des Pres Fondateurs est impressionnant !La position franaise intransigeante et contre-courant conduit son isolement au sein de laCommunaut ; les refus dintgrer le Royaume-Uni (nous allons y revenir plus amplement ci-aprs)de de GAULLE lillustrent merveille. Ce nest pas tant le refus gaullien, dment motiv par le refusd une Communaut atlantique colossale sous dpendance et direction amricaines et qui aurait ttfait dabsorber la Communaut europenne (confrence de presse de janvier 1963) que lattitudepersonnelle, arrogante et sans concertation du prsident franais qui eut des effets dsastreuxsur nos partenaires.

    Aprs le dpart de de Gaulle en 1969, la construction europenne se dbloque. En somme, deGaulle a t une force dinertie voire de raction dans lhistoire de la construction europenne, pourtantquelques unes de ses intuitions comme le refus obstin du Royaume-Uni dans la Communaut se sont

    avres cruellement justes

    Le Royaume-Uni aux portes du March Commun

    Ds le dbut de lhistoire de la construction europenne, les Britanniques se sont mis deux-mmeshors-jeu par leur refus de toute intgration europenne. Churchill tait dj favorable lassociation , etquand la CECA est mise en place, les travaillistes prennent prtexte la constitution de cette Europe despatrons pour refuser toute intgration. Jusquau dbut des annes 1960, les Britanniques sont tenaillsentre leurs liens privilgis avec la Commonwealth et surtout les Etats-Unis dune part, et leurs voisins euro-pens dautre part ; ils sont favorables une Europe associative (des Etats) rduite sa plus simple

    expression, un large espace de libre-change sans le moindre organisme supranational.

    La constitution du March commun en 1958 va lencontre de leurs intrts conomiques immdiatset de leurs conceptions politiques aussi rpliquent-ils aussitt en ngociant ds dcembre 1958lAELE (lAssociation Europenne de Libre Echange) avec 6 autres pays europens : Suisse,Sude, Norvge, Danemark, Autriche et Portugal ; celle-ci est ratifie en 1960. LAELE dans sazone a men une mme politique de dsarmement douanier, termine en janvier 1967 mais sans insti-tutions supranationales, ni Commission. Mais cest une ralisation moins ambitieuse et beaucoup plusincomplte que le march commun car seuls les produits industriels sont concerns (pas de PAC), aucuntarif extrieur commun nexiste et lAELE est outrageusement dsquilibre au profit du Royaume-Uni.LAELE est avant-tout une machine de guerre conue contre la CEE.

    Pourtant, 2 reprises pendant les annes 1960, le Royaume-Uni va demander son intgration

    la Communaut. Cest que le contexte change : le Commonwealth rgit de moins en moinsle commerce extrieur britannique, le Royaume-Uni est isol et nest plus ncessairementle partenaire privilgi des USA, ce serait plutt la RFA, et plus imprvu lAELE ne connat pas ledynamisme de la CEE. Il savre assez vite que le March Commun est le principal partenairecommercial de tous les pays de lAELE, y compris le Royaume-Uni. Ds 1961-62, les 7 de lAELEdemandent soit ladhsion, soit lassociation la CEE.

    Les 1res ngociations dadhsion du Royaume-Uni eurent lieu de 1961 1963 ; on le sait,elles chourent sur le refus catgorique de de Gaulle qui voyait dans les Britanniques un chevalde Troie amricain dans la CEE, mais les Britanniques ne se sont pas encore rsolus choisir entre leCommonwealth et la CEE, les concessions ncessaires nont pas t faites ainsi refusaient-ils le tarifextrieur commun !

    Une 2nde

    tentative est lance par le travailliste Harold Wilson (la prcdente avait t linitiative desconservateurs). Le Royaume-Uni pose sa candidature lentre dans la CEE en mai 1967 de mmeque le Danemark, lIrlande et la Norvge. Les Britanniques prennent acte du poids croissant deschanges avec la CEE (20 % en 1966). Alors que les 5 partenaires de la France dans la CEE se dclarentfavorables, De GAULLE enterre le projet par son veto unilatral.

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  • 8/6/2019 AL7HG00TEPA0108Sequence03

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    Squence 3-HG00188

    Cest finalement le dpart de de Gaulle en 1969 qui va permettre aux Britanniques de rejoindrela CEE. Son successeur, Georges Pompidou, inflchit la politique extrieure intransigeante gaullienne etau sommet de la HAYE en 1969, les Six se mettent daccord sur llargissement et louverture dengociations. Ces ngociations durrent prs de 2 ans et furent pres au sujet du dsarmement douanier(effectif en 1977), des produits agricoles ; les Britanniques obtiennent un financement rduit de la CEE(dj !). Avec le Royaume-Uni, 3 autres pays signent leur adhsion la CEE en 1972 (Irlande, Danemark,Norvge), cette adhsion devient effective au 1er janvier 1973. LAELE est en voie de dcapitation ! Lespopulations des pays candidats ont du se prononcer sur ladhsion et toutes la ratifirent saufla population norvgienne qui dit NON 53 % en septembre 1972 par rfrendum. Notonsque Pompidou organisa en avril 1972 un rfrendum en France pour que la population se prononce surladhsion britannique, le rsultat fut positif plus des 2/3 mais les absentions furent phnomnales :39 % des inscrits. Dj lEurope ne fascine plus gure. Pourtant, 9 Etats la composent dj.

    C Du march commun la communaut europenne,1973-1989

    De leuropessimisme la relance de la constructioneuropenne ; les volutions institutionnelles

    Plusieurs lments contribuent crer un climat morose au sujet de la Communaut dans les annes1970 et 1980.

    A partir de 1974, la conjoncture conomique se dgrade ; les conomies ouest-europennes sontconfrontes aux difficults conomiques des 20 ou 30 calamiteuses :linflationsenvole jusquaudbut des annes 1980, le chmage explose au point de devenir un enjeu politique majeur. Cest l unetendance gnrale car les Etats de la Communaut nvoluent pas tous dans le mme contexte

    ainsi le Royaume-Uni est moins vulnrable aux alas ptroliers puisquil dispose dimportantes rserves enMer du Nord or ce nest ni le cas de la France, de lAllemagne ou de lItalie. Chaque pays de la Communautentreprend sa propre politique conomique pour attnuer les effets de la crise avec des rsultats plusou moins heureux. Labsence de politique conomique concerte lchelle communautaire ades effets redoutables. Par exemple en 1981-1982, la France opre une politique de relance alors que sesvoisins mnent des politiques daustrit librale, il en rsulte des tensions inflationnistes et montaires.Les spculateurs jouent sur la valeur des monnaies et amplifie le dsordre montaire : le mark devient lamonnaie europenne forte tandis que le franc franais, la lire italienne se dvalorisent. Dans loptique dumarch commun, cest plus que fcheux puisque cela perturbe les changes au sein de la Communaut: comment fixer les prix dintervention communs de la PAC si la valeur des monnaies de la Communautne cesse de changer ? Cest pourquoi on a invent les MCM (montants compensatoires montaires)qui corrigent la hausse ou la baisse les diffrentiels de prix entre pays europens. Pour le citoyen de

    base, MCM + prix dintervention + ngociations marathon, cela finit par tre incomprhensible, nbuleux.Il y a de quoi tre sceptique sur la solidit du March Commun.

    Lautre lment qui nourrit leuropessimisme est lattitude britannique. Les faits donnent raison de Gaulle, lintgration du Royaume-Uni la CEE est rate, jamais jusqu nos jours ce pays narespect les rgles communautaires europennes. A peine entr, en 1974, le 1er ministre travaillistedemande une rengociation du trait notamment une moindre contribution la Commmunaut etune rforme de la PAC. Un accord partiel rgle cette 1 re demande. Mais en 1979, les conservateursprennent le pouvoir avec leur tte la dame de fer , le 1er ministre britannique MargaretThatcher, celle-ci exige une nouvelle rengociation, elle sinsurge contre le fait que le Royaume-Uni contribue plus quil ne reoit en retour de la Communaut do son slogan lapidaire : I wantmy money back ! .Lintransigeance britannique a cr un climat de crise aigu au sein de

    la Communaut jusquen 1984, quelques accords partiels entre-temps ont bien t signs mais lasortie de crise nest engage quen 1984 lors du Conseil europen de Fontainebleau o, dans unarrangement, un milliard dECU (la monnaie de compte europenne,European Currency Unit, mlangedes diffrentes monnaies de la Communaut) lui est vers. Lattitude britannique sexplique par le cotdispendieux de la PAC, dont elle demande une rforme que la France freine de toute ses forces

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  • 8/6/2019 AL7HG00TEPA0108Sequence03

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    Squence 3-HG00 189

    Avec Thatcher, cest le retour en force de la conception confdrale de lEurope : Les Etats-UnisdEurope ? Un fantasme irralisable, n desprits farfelus qui feraient lieux de rflchir avant de parler .Son hostilit lgard de lintgration europenne est motive par un nolibralisme dogmatique.Son successeur conservateur John Major (1990-1997) et mme Tony Blair, du New Labour, ne remettentpas en cause cette mfiance lgard des technocrates bruxellois , et cela est fondamental : leRoyaume-Uni a dvelopp une logique drogatoire : il ne ratifie ni Schengen, ni leuro

    Document 6

    Les exigences budgtaires britanniques vues par Plantu en 1987

    PLANTU

    Malgr Thatcher, la construction europenne avance grce laction du couple franco-allemandValry Giscard dEstaing Helmut Schmidt. Cela se traduit par 4 innovations majeures dans lesannes 1970 : partir de 1975, des ressources propres sont attribues la Communaut : une partie de la

    TVA, les droits de douane du TEC (Tarif Extrieur Commun) plus quelques prlvements agricoles. Pourcontrler la bonne utilisation de ces fonds par la Commission, une Cour des Comptes europennesest cre en 1975,

    le conseil est officialis dans son rle directeur des institutions europennes. Jusqu sa

    cration officielle en dcembre 1974, le Conseil tait informel (Conseil au sens de runion des chefsdEtats et de gouvernements) mais lors des confrences inter-gouvernementales (CIG) des dcisionsimportantes se prenaient (Cf. en 1969 La Haye ; en 1973 Copenhague, en 1974 Paris). Aprs 1974,le Conseil est la principale institution de la Communaut avec comme rle de dfinir la politiquegnrale de la Communaut. Le Conseil se substitue au conseil des ministres (qui continue dexistercomme lieu de concertation et de ngociation) comme instance dcisionnelle,

    partir de juin 1979, les dputs du Parlement europen sont lus au suffrage universeldirect. Cest un progrs important dans la dmocratisation des institutions europennes. Les dputssont lus pour 5 ans avec un nombre de reprsentants fixe par pays : en 1979, 410 dputs dont81 pour la RFA, la France, le Royaume-Uni et lItalie, 25 pour les Pays-Bas etc. Ce nombre a ensuitevolu avec les diffrents largissements et la runification allemande de 1990. Progressivement, lesprrogatives du Parlement se sont toffes : en 1975, il acquiert des comptences budgtaires,

    en 1979 est cr le SME, systme montaire europen afin de palier linstabilit montaireau sein de la Communaut. Le SME cherche stabiliser les parits entre monnaies en limitant lesfluctuations comme le faisait le serpent montaire mais en tant plus souple, permettant des rajus-

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    Squence 3-HG00190

    tements. Nous ne dvelopperons pas car le SME a chou mais cet chec est essentiel car cestlui qui a rendu indispensable la marche acclre vers lunion conomique et montaire. Delchec du SME est n leuro.

    La relance de la construction europenne est spectaculaire dans les annes 1980 ; cest lavolont de 3 hommes : Franois Mitterrand, prsident de la Rpublique franaise partir de mai1981 jusqu 1995, Helmut Kohl, chancelier allemand de 1981 1996, Jacques Delors, prsident dela Commission de 1985 1995.

    Ce sont les largissements de la Communaut qui ont impos son approfondissement (le ren-forcement de lintgration europenne). Le symbole de cet approfondissement est lActe Uniqueeuropen, adopt lors du Conseil europen de Luxembourg de dcembre 1985, entr en vigueurau 1er juillet 1987. LActe Unique annonce pour 1993 un march intrieur communautaireunifi soit un march commun des produits industriels et agricoles, ce qui est dj ralis mais aussi ungrand march ouvert la libre-circulation des capitaux et des personnes, ce qui implique une certaineharmonisation fiscale.

    Pour faciliter la libre-circulation des personnes au sein de la Communaut, la Convention deSchengen a t labore en 1985, malheureusement signe seulement en 1990 et par 5 Etats (lesSix de Rome moins lItalie) avant de slargir en 1992 lEspagne et au Portugal, la Grce en 1995, lItalie et lAutriche en 1998 Concrtement, au sein de lespace Schengen, les contrles aux frontires

    sont supprims. Ds lors simpose une coopration douanire, juridique, policire accrue entre les Etatsde la zone Schengen.

    LActe Unique est bien plus quun Grand March pour 1993. Il comporte dimportantes volutionsinstitutionnelles : il institutionnalise le Conseil europen et le charge de donner les impulsionsncessaires lunion et dlaborer les orientations politiques gnrales . Sa priodicit de runionest de 2 par an (juin et dcembre) ; le Conseil est prsid pour 6 mois par chacun des chefs dEtatou de gouvernement de la Communaut tour de rle. LActe unique rnove le processusde dcision : la majorit remplace lunanimit. LActe Unique renforce le rle du Parlement enattribuant ce dernier un droit de codcision avec le Conseil dans certains domaines, il cre l avisconforme cest--dire que le Parlement europen doit ratifier toute adhsion de nouveaux Etats la Communaut ou tout accord de coopration extrieure.

    Les largissements

    En 1981, la Grce entre dans la CEE. Depuis 1961, la Grce tait un Etat associ la CEE ; ce nestquaprs la chute de la dictature des colonels en 1974 que les ngociations dadhsion sontenvisageables. Elles durent prs de 5 annes car la Grce diffre nettement des Neuf, cestalors un Etat assez pauvre, essentiellement agricole, peu industrialise. Lentre de la Grce estralise officiellement en 1981 mais un temps de transition est dcid : 5 ans pour lagriculture,7 ans pour la pche, 5 ans pour un dsarmement douanier complet. La Grce bnficie des fondscommunautaires cest--dire quelle reoit plus quelle ne contribue.

    Lintgration du Portugal et de lEspagne en 1986 la CEE relve de la mme logique, ce sontdes pays mditerranens, agricoles et de jeunes dmocraties consolider. La Rvolution desillets en 1974 a mis fin la dictature au Portugal comme la mort de Franco en 1975 en Espagne.Ce sont des adhsions fondamentalement politiques. Leur demande dadhsion date de 1977 etles ngociations dentre ont t particulirement pres. Llargissement au sud mditerranen estindit, car ce sont des pays pauvres, surtout le Portugal, donc cela signifie pour les Neuf un effortfinancier important ; de plus ce sont des Etats agricoles or la PAC absorbe dj les 2/3 du budgetcommunautaire. Les produits espagnols (vins, fruits et lgumes, pche) concurrencent gravementles producteurs italiens et franais et risquent de compromettre le dveloppement des rgions mdi-terranennes dj en difficult comme le Mezzogiorno. Comme pour la Grce, un temps de transitionest dcid aprs ladhsion officielle de 1986 avec dsarmement douanier effectif en 1993, intgrationcomplte dans le march agricole en 1995

    Dj, cette poque, on pense les largissements futurs. Le rapprochement entre CEE et AELEest relanc en 1989, il aboutit la constitution de lEEE (Espace Economique Europen) pour

    janvier 1993 : zone de libre change entre CEE et AELE. En cela, cest un prlude ladhsion delAutriche, de la Sude et de la Finlande lUnion Europenne en 1995, 3 pays membres de lAELE.

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  • 8/6/2019 AL7HG00TEPA0108Sequence03

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    Squence 3-HG00 191

    Des champs daction de plus en plus largis

    Les champs daction de la Communaut sont de plus en plus toffs, on retrouve dabord linvitablePAC.

    La PAC Du ct des quantits produites, cest un succs au-del de toute esprance au point que celadevient un gouffre financier. Les prix garantis ont gnr une surproduction structurelle. Lesannes 1980 sont celles des torrents de laits et de vin, des montagnes de beurre . La PACdevient ingrable, on a privilgi la garantie des prix sur la modernisation des agricultures ; la Franceen est la principale bnficiaire. On sait le grief des Britanniques contre cette PAC dispendieuse, etprogressivement la France, isole, a du accepter des rengociations et rformes de la PAC commeltablissement des quotas laitiers en 1984, des QMG (quantits maximales garanties) en1988 pour les crales et les olagineux avec gel des terres ,de la gnralisation des

    jachres en 1992 pour produire moins (contre des aides directes aux agriculteurs), la sta-bilisation des fonds destins lagriculture partir de 1999 avec baisse progressive des prixdintervention, incitation la reconversion et amlioration de la qualit des produits en contrepartiedaides directes compensatoires.

    LEuropeBleue

    En 1983, la CEE adopte une politique commune de la pche distinguant la zone ctire accessibleaux seuls pcheurs de lEtat riverain et la zone communautaire, accessible aux pcheurs de toute laCEE, tablissant des TAC, totaux de capture autoriss ou quotas pour la prservation des res-sources, et incitant la rduction des tonnages. Ladhsion de lEspagne modifie la donne car cestun Etat disposant dune importante flotte de pche. Ultrieurement, lEurope bleue a t rformeen 1992 : taille des filets autoriss, baisse des quotas, restructuration des flottilles do la cration delIFOP (Instrument Financier dOrientation de la pche) en 1994 pour les financer. Cette rformeest encore en cours avec comme axe prioritaire la prservation des ressources, donc des baisses de plusen plus drastiques des quotas et des prises.

    La politiquergionale

    Cette politique commence vritablement en 1975 avec la cration du FEDER (Fonds europende dveloppement rgional). Le FEDER cofinance des aides aux entreprises et la ralisationdinfrastructure dans les rgions dfavorises essentiellement dans le sud italien, en Espagne,Grce, Portugal, Irlande et Royaume-Uni dans le cadre de projets. Cette politique, dont les fonds ontt multipli par 13 entre 1973 et 1987 a t rforme en 1988 avec la dfinition de 3 typesde rgions : les rgions en retard de dveloppement, plus aides comme lIrlande, la Grce, lePortugal, le Mezzogiorno ; puis, les zones de reconversion industrielle (les ex- pays noirs ) enfinles zones rurales dfavorises comme les montagnes

    Lducation En tant que telle, elle ne relve pas de la Communaut ni de lUnion, mais dans les annes 1980ont t mis en place des programmes visant favoriser la mobilit des tudiants commeErasmus en 1987 avec octroi de bourse. Ce programme a t complt par SOCRATES (changedenseignants, partenariat entre tablissements) et LEONARDO DA VINCI.

    Les relationsextrieures

    La Communaut a entrepris une politique de coopration avec les PED. Ce sont essentiellementles conventions de Lom, signes en 1975 pour la 1re, puis 1979, 1984, 1989. Ce sont desaccords avec les pays ACP (Afrique, Carabes, Pacifique) portant sur laide au dveloppement,les relations commerciales (accs facilit au March Commun en franchise) et garantissant le

    prix de certains produits. De 21 pays ACP en 1975, on est pass 71 pays ACP en 2000 ; laideaccorde allant de 3,5 milliards dECU de 1975 1980 8,5 de 1985 1990 puis 13 milliards deurosde 1990 2000.

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    Squence 3-HG00192

    Cest avec les USA que les rapports sont les plus conflictuels. Les USA ont toujours contest la PACet son march protg, en plus des prfrences douanires accordes par la Communaut certainsPED qui concurrencent leurs exportations agricoles. Des pisodes de guerres douanires se sontrpts en 1985 sur les ptes alimentaires europennes sur lesquelles les USA augmentent les droitsde douane, en 1986-1987 sur les vins et fromage, en 1989 en rponse au refus europen des viandesamricaines aux hormones. Ces conflits sont en voie dapaisement dans le cadre des ngociations duGATT puis de lOMC : accords de Blair House de 1992 mais sont toujours susceptibles de rapparatresur des productions litigieuses : OGM. Les mmes controverses commerciales se retrouvent sur lesproduits industriels avec une vritable guerre de lacier dans les annes 1980, la rivalit Boeing-Airbus aujourdhui et la querelle autour des subventions publiques.

    On notera tout de mme des absences : toujours pas de politique industrielle digne de ce nom ;les politiques de transport et denvironnement ne commencent avoir quelque consistancequ partir des annes 1990, quant la politique sociale, elle reste de papier.

    Fin 1988, la Communaut est Douze. LActe Unique lui dresse un horizon de Grand March Uniquepour 1993.

    Puis survient 1989, le rideau de fer scroule. LEurope est alors repenser politiquement et gographi-quement. Des bouleversements dampleur sont raliser et des dfis de taille sont surmonter

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    Squence 3-HG00 193

    ontenu du chapitre 2

    Le temps des dmocraties populaires (1948-1989)Problmatique : Comment lUnion sovitique a-t-elle russi maintenir sa domination sur lEurope de

    lEst pendant plus de quarante ans ?

    Plan : traitement de la problmatique Notions-Cls Repres

    Introduction Europe de lEst Dmocraties populaires.

    A La sovitisation de lEurope delEst : 1945-1953

    LEst europen en 1945 : des facteursfavorables la rvolution communiste

    La mainmise de Moscou sur lEuropede lEst

    Les dmocraties populaires : lesnouveaux satellites de lURSS

    Les purges ou la bolchevisation despartis communistes nationaux

    Mosaque ethnique partis communistes

    Glacis dfensif tactique du salami Coupde Prague

    Dmocraties populaires modle sovitique sovitisation

    Crise yougoslave titisme purges stalinien-nes

    Interprter une carte politique : expliquer lesobjectifs des conqutes territoriales dun empire.

    Etudier un tmoignage : montrer le rle et les rac-tions dun acteur dun vnement historique

    Etudier une caricature : analyser la compo-sition et interprter le dessin et souligner laporte du document

    B Le temps des crises et desstratgies rformistes : 1953-1968

    1953 anne cruciale ou le nouveaucours

    Les rvolutions polonaise et hongroisedoctobre 1956 : la premire secoussemajeure du bloc de lEst

    Les diffrentes voies du socialismenational

    Communistes staliniens et libraux meu-tes de Berlin

    Rapport secret humanisation du systme assouplissement doctrinal Rvolutions popu-laires

    Socialisme national dictature communiste Printemps de Prague

    C La souverainet limite etlmergence des socits civiles :1968-1985

    Des expriences douverture la monte de la contestation des

    socits civilesSolidarnosc et les vnements de

    Pologne, une contestation populaire deplus en plus forte

    Doctrine de la Souverainet limite lib-ralisationSocits civiles Accords dHelsinki KOR Charte 77 Jean-Paul II

    Grve de Gdansk Solidarnosc rpression dedcembre 1981

    Lire une dclaration politique : extraire desinformations et les interprter

    D Le temps des turbulences ou lafin des dmocraties populaires :1985-1990

    L effet GorbatchevLes rvolutions de 1989 : enPologne a a pris 10 ans, en Hongrie

    10 mois, en Allemagne de lEst et enTchcoslovaquie 10 jours

    Dsengagement militaire sovitique

    Dmocratie pluraliste automne des peuples chute du mur de Berlin la Rvolution develours insurrection roumaine

    Etudier un programme politique : commenter

    un texte et souligner sa porte historique

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    Le temps des dmocratiespopulaires (1948-1989)

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    Certains habitants de lex-Europe de lEst regrettent aujourdhui les avantages procurs lpoquecommuniste (peu ou pas de chmage, des congs pays, des soins gratuits, une certaine promotion

    sociale, lalphabtisation, un idal de fraternit et de dvouement). Cest la rcente et difficile tran-sition vers la dmocratie et lconomie de march de cette partie de lEurope qui explique en grandepartie ce sentiment diffus de nostalgie du temps des dmocraties populaires.

    Le terme Europe de lEst sera utilis plus dans un sens politique que gographique. Il recouvre unepartie de lEurope orientale, centrale et balkanique avec les huit Etats communistes de RDA,Pologne, Hongrie, Tchcoslovaquie, Roumanie, Yougoslavie, Bulgarie et Albanie.

    Le sort de lEurope de lEst constitue ds 1945 lun des enjeux cruciaux dans la lutte qui sengage entreles Etats-Unis et lUnion sovitique pour la dfinition dun nouvel quilibre mondial. A peine librs delemprise hitlrienne ces peuples sont rcuprs par le jeu dintrts qui les dpassent. Il faut dire que

    dans lhistoire cet espace fut souvent sous influence trangre : Autrichiens, Russes, Turcs et Prussiensdu 18e au dbut du 20e sicle, Russes et Allemands dans les annes 1930.

    Dans le contexte naissant de la guerre froide les communistes de ces pays, pauls par les Sovitiques sem-parent du pouvoir en quelques annes et mettent en place un nouveau type dEtat : les DEMOCRATIESPOPULAIRES o le pouvoir appartient au peuple, o la grande industrie, les transports etles banques appartiennent lEtat et o la force dirigeante est constitue par le bloc desclasses laborieuses de la population ayant sa tte la classe ouvrire .

    Chaque nation accepte en apparence de faire partie du camp socialiste et adopte le modle soviti-que. Il faudra que les Hongrois, les Tchcoslovaques puis les Polonais tentent de sortir de ce camp pourque lon saperoive que lunivers socialiste est clos et sous domination sovitique.

    Comment lUnion sovitique a-t-elle russi maintenir sa domination sur lEurope de lEst pendant

    plus de quarante ans ?

    A La sovitisation de lEurope de lEst : 1945-1953

    Comment expliquer la conversion en quelques annes de cette partie de lEurope au com-munisme ?

    La prsence de lArme rouge en Bulgarie, en Hongrie, en Roumanie, en Tchcoslovaquie, en Pologneet encore plus pour la partie orientale de lAllemagne a davantage jou que la position de proximitgographique avec lURSS.

    Le contexte international est sans doute encore plus dterminant. En 1945, lAllemagne et lItalievaincues, la France et la Grande-Bretagne considrablement affaiblies, seule lUnion sovitique est enmesure de contrler lest de lEurope. Surtout le dbut de la rivalit entre les Etats-Unis et lURSSest dcisif sur le processus rvolutionnaire. Il pse beaucoup sur les hsitations de Staline lequel en 1945 na pas pour plan de transformer les pays dEurope de lEst en Etats communistes.

    LEst europen en 1945 : des facteurs favorables

    la rvolution communiste

    Il est indispensable de dresser un tableau succinct de lEurope orientale de laprs-guerre afin de biensaisir comment lURSS a pu si rapidement favoriser la mise en place de rgimes communistes.

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    Sur le planethnique

    Cest une mosaque de plusieurs nations importantes : les Slaves avec sept nations (Polonais, Tchques, Slovaques, Slovnes, Croates, Serbes et Bulgares) ; les Allemands, les Hongrois, les Roumains et les Albanais ; sans oublier les minorits turque et grecque.

    A lintrieur de chaque Etat un groupe centralise souvent le pouvoir (Tchques en Tchcoslovaquie, Serbesen Yougoslavie) do des rancurs profondes qui joueront sur le cours des vnements.

    Sur le planreligieux

    Les divisions accentuent ces tensions nationales.

    La ligne de partage entre le monde catholique romain et le monde orthodoxe passe lintrieur delEurope oriental