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Association Française du Marketing Introduction àl'analyse des chaînages cognitifs Author(s): PIERRE VALETTE-FLORENCE Source: Recherche et Applications en Marketing, Vol. 9, No. 1 (1994), pp. 93-117 Published by: Association Française du Marketing Stable URL: http://www.jstor.org/stable/40588939 . Accessed: 03/01/2014 05:39 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected]. . Association Française du Marketing is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Recherche et Applications en Marketing. http://www.jstor.org This content downloaded from 197.27.82.130 on Fri, 3 Jan 2014 05:39:50 AM All use subject to JSTOR Terms and Conditions

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Association Française du Marketing

Introduction àl'analyse des chaînages cognitifsAuthor(s): PIERRE VALETTE-FLORENCESource: Recherche et Applications en Marketing, Vol. 9, No. 1 (1994), pp. 93-117Published by: Association Française du MarketingStable URL: http://www.jstor.org/stable/40588939 .

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PÉDAGOGIE

Introduction à l'analyse des chaînages cognitifs

PIERRE VALETTE-FLORENCE *

Professeur agrégé des Facultés Ecole Supérieure des Affaires de Grenoble

Résumé. - L'analyse des chaînages cognitifs, initiée au début des années 80 par Gutman, a récemment bénéficié de développements méthodologiques permettant une meilleure analyse de l'information collectée selon cette démarche. Cet article en pré- sente tour à tour les fondements conceptuels, les principaux modes de collecte ainsi

que les différentes manières d'analyser l'information recueillie, notamment au tra- vers d'une illustration concrète. Les voies de recherches futures sont ensuite men- tionnées dans la conclusion.

INTRODUCTION

L'analyse des chaînages cognitifs s'est initialement développée aux Etats- Unis à partir du travail de Gutman en 1982, puis à la suite des publications de Reynolds et Gutman (1984) et Reynolds et Gutman (1988). En France, ce type d'analyses a été introduit par Valette-Florence et Rapacchi en 1990. Depuis, un certain nombre de recherches méthodologiques ont été proposées, toujours en France, autour des travaux de Aurifeille, Roehrich, Valette-Florence et Rapacchi

* L'auteur tient à remercier les lecteurs de cet article par leurs remarques constructives, et plus particulière- ment le lecteur 2 pour la minutie de son travail et surtout la pertinence et l'intelligence de ses remarques et de ses suggestions.

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94 Pierre Valette-Florence

SOMMAIRE

Introduction

I. RAPPEL D'ORDRE CONCEPTUEL

IL COLLECTE DE L'INFORMATION DANS LES CHAINAGES COGNITIFS

2.1. Initialisation de l'entretien

2.2. Nature de la collecte de l'information

a) Méthode originelle b) Méthode des protocoles écrits

c) Entretien par cartes

III. ANALYSE ET TRAITEMENT DES DONNÉES

3.1. Méthode basée sur la construction des cartes hiérarchiques 3.2. Méthode des chaînes virtuelles

3.3. Analyse causale et détermination des chaînages latents

IV. ILLUSTRATION DES TROIS MÉTHODES PRÉCÉDENTES

4. 1 . Choix du produit 4.2. L'échantillon

4.3. Résultats prinäpaux

a) Construction des cartes hiérarchiques b) Méthode des chaînes virtuelles

c) Détermination des chaînage latents

Conclusion

(Aurifeille, 1991 ; Aurifeille et Valette-Florence, 1992a, 1992b ; Valette-Florence et Rapacchi, 1990, 1991a ; Roehrich et Valette-Florence, 1992). Il apparaît de

plus en plus clairement que l'analyse des chaînages cognitifs peut être d'un

potentiel excessivement intéressant, non seulement grâce à une meilleure défini- tion des stratégies de communication publicitaire et de positionnement, mais aussi de par la qualité prédictive que ce type d'approche est susceptible d'avoir sur la consommation de différents types de produits (Aurifeille et Valette-Floren- ce, 1992b ; Aurifeille, 1993). En outre, les récents développements dans ce domaine laissent suggérer des extensions de la méthode particulièrement inté- ressantes pour mieux cerner l'univers de consommation des marques (Valette- Florence et alii, 1993a).

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Introduction à l'analyse des chaînages cognitifs 95

Les chaînages cognitifs conduisent, en principe, à trois types d'applications générales :

• en publicité tout d'abord, puisqu'ils permettent de mettre à jour les sensi- bilités principales (les chaînages) à mettre en avant lors de la conception du mes- sage ;

• en positionnement ensuite, car ils offrent la possibilité, par le biais d'ana-

lyses multidimensionnelles, de relier l'acte de consommation (l'achat de produits ou de marques) aux chaînages spécifiques sous-jacents qui le condition-nent ;

• en segmentation enfin, grâce à l'obtention de typologies de chaînes ou d'individus partageant les mêmes chaînages.

Ce nouveau type d'analyse commence d'ailleurs à pénétrer les milieux pro- fessionnels puisqu'il est désormais possible de répertorier quelques applications dans des domaines aussi variés que celui des parfums, de l'automobile ou de la consommation d'énergie domestique. Dans une perspective historique 1t souli-

gnons également que l'agence de publicité Dorland and Grey présentait en Fran- ce, dès 1976, les travaux de Young et Feigin à certains de ses annonceurs et s'efforçait de démontrer leur utilité dans l'élaboration des stratégies de commu- nication.

Compte tenu de l'intérêt que semble susciter ce type d'approche, tant dans le monde académique que dans les milieux commerciaux, il nous semble oppor- tun de proposer ici un article à caractère pédagogique permettant de mieux en cerner et de mieux en comprendre les caractéristiques essentielles. C'est la raison

pour laquelle l'article qui suit s'articule autour de quatre parties complémen- taires. La première retrace les traits principaux qui sous-tendent la théorie des

chaînages cognitifs, tandis que la deuxième s'attache à décrire les processus de collecte qu'il faut mettre enjeu pour effectuer une telle démarche. La troisième

partie présente ensuite les principales méthodologies actuellement employées. Celles-ci sont ensuite illustrées de manière plus concrète, en quatrième partie, au travers d'un exemple révélateur de leur mise en œuvre, portant sur la consomma- tion de cigarettes. La conclusion dégage enfin quels sont les problèmes actuels

qui persistent et quelles sont les voies de recherche futures qui apparaissent.

I. RAPPEL D'ORDRE CONCEPTUEL

Bien que l'article le plus couramment cité soit celui de Gutman en 1982,

puisque c'est cet auteur qui a proposé les fondements de l'analyse selon les chaînes moyens-fins, il importe de souligner que le modèle initial ayant servi de base à cette conceptualisation est celui du « chaînage des bénéfices latents » (grey bene-

fit chains) (proposé par Young et Feigin dès 1975). Dans leur très court article de 1975, Young et Feigin avaient pourtant défini la plupart des éléments qui sont actuellement utilisés dans les chaînages cognitifs. En fait, ils avaient remarqué

1 Nous remercions le lecteur 2 pour avoir porté ce fait qui illustre et introduit notre propos à notre connaissance.

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96 Pierre Valette-Florence

dans leurs enquêtes par questionnaires, que les consommateurs associent souvent des attributs qui déterminent leur choix à un ensemble de bénéfices manifestes, c'est-à-dire découlant directement des attributs, puis ensuite à des bénéfices plus abstraits et plus personnels. Ils avaient en outre noté qu'on pouvait continuer ainsi pour passer à des niveaux successifs de bénéfices qui devenaient de plus en

plus abstraits et importants pour l'individu. L'ensemble des associations corres-

pondait donc à un réseau ou un chaînage des bénéfices latents. Dans leur protocole initial, Young et Feigin limitaient en fait le nombre de niveaux qu'il était possible d'énoncer à quatre. En outre, dans la collecte de données, les consommateurs choisissaient seulement deux attributs les plus importants pour eux, ensuite deux bénéfices concrets les plus importants qui en découlaient, puis deux nouveaux bénéfices abstraits, etc., jusqu'à ce que les quatre niveaux hiérarchiques soient

évoqués. L'apport principal de Gutman en 1982 est d'avoir offert une conceptuali-

sation plus achevée des chaînages précédents, en faisant une distinction plus fine entre conséquences et valeurs, au lieu de garder le terme de bénéfice abstrait ou concret qui avait été proposé par Young et Feigin. Un autre apport de la démarche de Gutman est également de proposer la notion de valeur terminale qui, en quelque sorte, permet de borner l'entretien et de considérer que la collecte d'information, c'est-à-dire l'obtention d'une chaîne, a été achevée.

Concrètement, comment se caractérise une chaîne moyens-fins ? Initiale- ment, elle permet de faire les liens entre trois niveaux : les attributs, les consé-

quences, et les valeurs. Oison et Reynolds en 1983 ont par ailleurs fait une distinc- tion plus fine en subdivisant les éléments précédents en deux niveaux intermé- diaires. On aboutit donc à une hiérarchie qui correspond aux chaînages : attri- buts concrets - » attributs abstraits - » conséquences fonctionnelles - > conséquences psycho-

sociologiques -» valeurs instrumentales - > valeurs terminales. Il est important de souli-

gner d'ores et déjà que l'ensemble de ces six éléments n'est pas forcément pré- sent dans les chaînes qui sont évoquées par les consommateurs.

Qu'est-ce qui permet de distinguer pour chaque élément chacun des deux niveaux qui viennent d'être présentés ? En ce qui concerne les attributs concrets, il

s'agit d'éléments spécifiques d'évaluation, en d'autres termes des caractéristiques incontournables qui permettent de décrire un produit. On trouve par exemple le

nom, le prix, le lieu d'achat. Les attributs abstraits sont des éléments plus subjectifs d'évaluation en fonction de l'appréciation personnelle de chaque individu. Par

exemple, l'odeur d'un parfum est un attribut abstrait puisque celui-ci peut être qua- lifié de frais, léger, boisé ou fleuri, en fonction des différentes évaluations indivi- duelles

Les conséquences sont divisées elles aussi en deux niveaux, fonctionnel et

psycho-sociologique. Les conséquences fonctionnelles dérivent directement de l'usage qui va être fait du produit en question. Par exemple, un parfum permet de se sen- tir propre, d'avoir une odeur agréable. En revanche, les conséquences psycho-sodolo- giques sont produites par les conséquences fonctionnelles et permettent de rem-

plir des fonctions sociales importantes comme, par exemple, une image sophisti- quée, un statut personnel élevé, etc. En d'autres termes, les conséquences psycho- sociologiques sont beaucoup plus empreintes des normes socio-culturelles qui prévalent dans un environnement donné.

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Introduction à l'analyse des chaînages cognitifs 97

Enfin, au niveau des valeurs, la distinction est faite entre, d'une part les valeurs instrumentales, c'est-à-dire des modes de comportement spécifiques tels que la propreté, Y honnêteté, la déférence sociale, le romantisme, et d'autre part les valeurs ter- minales qui représentent les buts de l'existence 2 (les fins) tels que l'épanouissement personnel ou Y hédonisme. Nous invitons le lecteur intéressé à consulter Rokeach (1973) pour des exemples des valeurs terminales et des valeurs instrumentales. Notons aussi que, dans le processus initial de détermination des chaînes moyens- fins, rien n'indique qu'il faille avoir des valeurs qui appartiennent aux listes pré- établies telles que celles de Kahle ou Rokeach. A titre d'illustration, le tableau 1 présente la liste des items obtenus pour la consommation de cigarettes qui servira de base aux illustrations présentées plus loin.

Soulignons également que cette distinction en six niveaux d'abstraction est toute théorique 3, les frontières au sein d'une même catégorie (e.g : les attributs abstraits et concrets) ou entre catégories {e.g : les conséquences psychosociologiques et les valeurs instrumentales) pouvant être floues, voire subjectives, en fonction de

l'interprétation donnée par l'analyste. Néanmoins, cette catégorisation offre

l'avantage de mieux cerner les frontières existant entre le domaine lié à la connaissance du produit (les attributs concrets et abstraits et les conséquences fonction- nelles) et celui relié à la connaissance on à l'expression de soi (les conséquences psychoso- ciologiques et les valeurs instrumentales et terminales), conduisant ainsi à la séquence théorique complète suivante (entre crochets, figurent des éléments fictifs d'illustra- tion pour la consommation de cigarettes) :

attributs -> attributs -» conséquences -» conséquences -> valeurs -» valeurs concrets abstraits fonctionnelles psychosocio- instru- terminales

logiques mentales

[peu de [tabac léger] [préservation [confiance [ouverture [relations nicotine] santé] en soi] d'esprit] chaleureuses]

Connaissance du produit -> Connaissance de soi

Globalement, on peut donc définir une chaîne moyens-fins comme le résultat de la connexion entre les attributs d'un produit, les conséquences que le consommateur en retire, et les liens éventuels avec ses valeurs 4 personnelles. Le

point principal est que le consommateur s'implique dans un achat de manière à en retirer certaines conséquences qui, elles-mêmes, satisferont ses valeurs pre- mières. Mais avant tout, c'est la structure : valeurs - » conséquences - > attributs, qui représente l'aspect central du modèle : les valeurs montrent la direction princi- pale, les conséquences représentent des modes de comportement particuliers dans des situations spécifiques, et les attributs correspondent à ce qui, dans le

produit actuel, satisfait les conséquences recherchées. Comme tous les consom- mateurs ne partagent pas les mêmes valeurs, ils auront bien sûr des chaînages cognitifs différents, c'est-à-dire des liens attributs - > conséquences - » valeurs diffé-

2. Le terme moyens-fins est donc relatif à l'ensemble des moyens mis en œuvre (attributs et/ou conséquences) pour satisfaire les buts recherchés, d'où l'appellation de l'analyse.

3. Seule l'analyse selon les chaînages latents, présentée plus loin, permet d'apprécier, en termes de validité pré- dictive, la pertinence (i.e: le nombre et la nature) des catégorisations retenues.

4. Les valeurs peuvent être définies comme « des croyances durables déterminant qu'un mode de comportement ou but de l'existence est préférable à un autre» (Rokeach, 1973). Consulter Valette-Florence (1994), chapitre 2, p. 27-68, pour une présentation détaillées du concept de valeurs.

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98 Pierre Valette-Florence

rents. En définitive, c'est la connaissance de cette structure qui permet de mieux connaître les chaînages représentatifs des processus de décision dans l'achat d'un produit donné. Il importe aussi de bien souligner l'artefact de la collecte de don- nées qui conduit à une séquence artificielle : attributs - » conséquences - > valeurs, alors que la relation causale 5, en accord avec la théorie, valeurs - > conséquences - >

attributs, qui prévaut.

Tableau 1. - liste des items obtenus pour la consommation de cigarettes (Aurifeille et Valette-Florence, 1992b)

Attributs concrets Attributs abstraits

Al faible teneur en nicotine A5 tabac léger A2 goût fort A6 aspect naturel (peu de traitements A3 peu de goudron concernant le goût et la composition) A4 prix modéré

Conséquences fonctionnelles Conséquences psychosociologiques Cl aspect physique C4 prestique, charme C2 santé C5 confiance en soi C3 stimulation C6 identité

C7 communication

Valeurs instrumentales Valeurs terminales

Vil ouverture d'esprit VT1 une vie excitante VI2 gai, enjoué VT2 être heureux VI3 indépendant VT3 l'auto-accomplissement VI4 dynamique VT4 l'appartenance VI5 intellectuel VT5 être respecté VI6 capable VT6 la sagesse VI7 contrôle de soi VT7 des relations chaleureuses avec les

autres

Pour finir, il convient encore d'opérer une distinction entre les chaînes

moyens-fins individuelles, spécifiquement explicitées par un individu, et les chaî-

nages cognitifs résultants sur l'ensemble de la population et qui ont pour objet, en

quelque sorte, de synthétiser la nature des structures cognitives qui régissent un marché donné. A cet égard, un individu peut évoquer plusieurs chaînes qui se retrouveront agrégées, du moins en théorie, dans les chaînages cognitifs résul- tants que nous aborderons en troisième partie de cet article. Au préalable, il faut

cependant aborder la manière de collecter l'information.

5. Notons que seule l'analyse selon les chaînages latents, proposée par Valette-Florence et ala (1993a), et qui sera

présentée plus loin, tient compte de manière explicite de cette séquence théorique.

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Introduction à l'analyse des chaînages cognitifs 99

IL COLLECTE DE L'INFORMATION DANS LES CHAINAGES COGNITIFS

En matière de collecte de rinformation, Reynolds (1985) propose de distin- guer entre les approches « macro » et « micro ». L'approche « macro » est basée sur le développement d'une classification qui permet de répertorier les individus ayant des orientations en termes de valeurs différentes. L'exemple typique de cette démarche basée sur une population totale est le programme VALS 6, déve-

loppé par le Standford Research Institute. L'hypothèse principale est que les

répondants peuvent évaluer correctement des listes de valeurs censées représen- ter a priori soit leurs modes de comportement, soit les buts de l'existence qu'ils cherchent à satisfaire. Cependant, ceci implique deux conditions qui sont les sui- vantes :

• que les répondants soient sensibilisés aux listes qui leur sont présentées ; • qu'ils choisissent d'y répondre correctement. En fait, une étude très intéressante mais peu connue de Jones et al (1978) a

montré pourtant qu'un tiers seulement des valeurs de la liste de Rokeach était

spontanément mentionné par les personnes interrogées. Cela suggère clairement

que les individus devraient pouvoir s'exprimer librement au sujet de leur propre système de valeurs, plutôt que d'avoir à les noter ou les ordonner d'après une liste toute faite disponible à l'avance.

L'approche « micro », quant à elle, s'appuie sur la théorie psychosociolo- gique qui utilise des méthodes qualitatives pour comprendre les motivations pre- mières des consommateurs. Cette démarche évite ainsi l'utilisation de listes de valeurs pré-établies. Ce type de recherche a été originellement appliqué à des

problèmes de marketing par Dichter dans les années soixante. Comme nous l'avons évoqué, les applications les plus récentes s'appuient sur les chaînages cognitifs qui ont été présentés au paragraphe précédent.

Dans la pratique, la collecte d'information s'effectue de manière qualitative sur un échantillon limité en taille. Il importe néanmoins de s'assurer que celui-ci est assez important pour générer un nombre de chaînes (et d'éléments par chaînes) qui devront donc être représentatives de la totalité du processus cognitif mis enjeu dans l'achat du produit concerné par l'étude. La deuxième remarque est que cet échantillon doit, autant que possible, être représentatif de la popula- tion qui concerne l'analyse. En règle générale, la taille des échantillons varie entre une soixantaine et une centaine de personnes. Ce nombre relativement

peu important est conditionné par la durée des entretiens, qui durent en moyen- ne entre 30 et 60 minutes, et par le fait qu'on arrive rapidement, dès une

cinquantaine d'entretiens, à avoir la quasi globalité des chaînages existant dans la

population totale, d'autant plus que plusieurs chaînes peuvent être mentionnées

par un même individu. Deux points particuliers méritent d'être mentionnés : l'initialisation de

l'entretien et la manière de collecter ou de coder l'information.

6. L'approche VALS (Value and Life Style Survey) , développée par Mitchell (1983), propose une typologie des Américains en 9 groupes au moyen d'un questionnaire accordant une place prépondérante aux caractéristiques socio-économiques et au repérage des valeurs dominantes dans la société.

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1 00 Pierre Valette-Florence

2.1. Initialisation de l'entretien

Bien que plusieurs variantes existent, il y a globalement deux principes dans la manière de collecter l'information. La première possibilité est celle initiale- ment proposée par Reynolds et Gutman (1988). Elle consiste à générer les chaînes individuelles après que le répondant ait fait le choix du produit qu'il pré- fère parmi la liste des produits 7 relatifs au domaine d'étude concerné. Le pro- duit choisi constitue ainsi un point « d'ancrage» permettant ensuite d'effectuer l'entretien. Cette technique a l'avantage de bien initier la collecte d'information sur une classe de produits, voire une marque particulière. Elle nécessite cepen- dant au préalable d'avoir défini quel était l'ensemble des produits qui constituent l'univers de consommation.

Lorsque de très nombreuses marques se partagent le marché ou lorsque l'univers de consommation est moins cerné, une autre technique consiste à demander tout simplement à la personne interrogée de choisir parmi une liste d'attributs jugés importants pour l'achat d'un produit (ou d'une marque) celui ou ceux qui sont les plus déterminants dans son acte d'achat. Nous voyons ici que le point d'ancrage est donc une liste pré-établie d'attributs, ce qui renvoie directement à un mode de collecte d'information différent que nous abordons maintenant. Cette technique a néanmoins l'avantage d'être directement opéra- tionnelle en focalisant dès le départ l'entretien sur le choix du ou des attributs considérés comme les plus représentatifs, et par voie de conséquence, les plus importants pour l'acte d'achat. Dans les deux cas cependant, subsistent l'éventua- lité de l'évocation d'éléments ou le choix d'attributs fortement empreints des normes sociales prévalant à une époque donnée.

2.2. Nature de la collecte de Vinformation

Notons au préalable que les trois grandes manières de collecter l'informa- tion qui existent appartiennent toutes deux au domaine qualitatif, de sorte qu'en aucun cas, l'information qui va être collectée n'est déjà pré-codée ou pré-inscrite sur un questionnaire tout fait. Néanmoins, elles se différencient fortement, comme nous allons le voir, en ce qui concerne le codage et le mode de collecte de l'information. On peut donc faire la distinction entre la méthode originelle par entretien semi-directif classique proposée par Reynolds et Gutman en 1988, la méthode des protocoles écrits proposés par Walker et Oison (1991) et la méthode des cartes préconisée par Valette-Florence et Rapacchi en 1991 (b) (voir aussi Roehrich et Valette-Florence, 1991, 1992).

a) Méthode originelle

Initialement proposée par Reynolds et Gutman, cette méthode consiste à

interroger successivement les individus pour les faire passer petit à petit à des niveaux d'abstraction plus élevés, jusqu'à ce qu'une valeur terminale soit évo-

quée. Cette méthode d'entretien semi-directif nécessite donc dans un premier temps la transcription des chaînes qui ont été évoquées, puis l'analyse du conte-

7. Notons qu'en fonction des objectifs de l'enquête, l'entretien peut se focaliser soit sur une classe de produits (e.g: les cigarettes), une forme de produit particulière (e.g: cigarettes mentholées) ou encore une marque bien pré- cise (¿grMalboro).

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Introduction à l'analyse des chaînages cognitifs 1 01

nu, suivie d'un codage permettant ensuite de répertorier pour chaque individu les chaînes et les éléments qu'il a évoqués de manière spécifique. Cette méthode offre les avantages et les inconvénients des entretiens qualitatifs traditionnels, à savoir une très grande richesse de l'information collectée, puisque celle-ci est retranscrite sans distorsion, mais en contrepartie, une difficulté de codage et une lourdeur de l'enquête, compte tenu du temps que cela nécessite pour, non seule- ment transcrire les entretiens et définir les codages, mais surtout effectuer la codification correspondante (sans parler des problèmes d'homogénéité entre les différents juges qui doivent faire ce type d'opération). Une variante intéressante (Aurifeille, 1993) consiste dans un premier temps, au moyen d'une quinzaine d'entretiens qualitatifs, à générer au préalable une liste si possible complète des différents niveaux (attributs / conséquences / valeurs), puis à effectuer ensuite la collecte d'information traditionnelle, mais en codant directement les chaînes, au

moyen de la liste pré-établie, afin d'en faire évaluer ensuite la cohérence par les

personnes interrogées. Cette technique a l'avantage d'être beaucoup plus opéra- tionnelle, tant en termes de temps, que des éventuelles corrections de codage qui peuvent être directement apportées par la personne interviewée. Elle repose néanmoins sur la très forte expertise des enquêteurs à bien cerner le discours qui est évoqué et à retranscrire de manière adéquate les chaînages par les codes pré- définis. Elle permet aussi plus difficilement d'initialiser une chaîne avec le même attribut, comme c'est le cas dans la technique des cartes qui est présentée plus loin.

b) Méthode des protocoles écrits

Cette méthode, beaucoup plus proche d'une enquête traditionnelle, consis- te à utiliser un questionnaire structuré dans lequel les répondants sont directe- ment interrogés, par écrit, sur les fonctions ou caractériques qu'ils jugent les plus importantes pour eux pour le produit à l'étude. Ils sont en général limités à cinq attributs. Pour chacun d'entre eux, les personnes doivent ensuite indiquer trois ou quatre fois pourquoi l'élément précédemment évoqué est important pour eux. Ils peuvent néanmoins arrêter ce processus dès qu'ils ne trouvent plus d'explication sur l'évocation d'un élément.

Une telle collecte paraît très restrictive car elle conditionne non seulement le nombre maximum de chaînes à évoquer, mais aussi le nombre maximum d'éléments qu'une chaîne peut contenir. Elle conduit aussi à un post-codage fastidieux nécessitant plusieurs codeurs. Son avantage essentiel réside dans l'auto-administration du questionnaire, ce qui la prédispose à des enquêtes de

grande envergure. A ce jour, seuls Walker et Oison (1991) paraissent avoir utilisé ce mode d'enquête.

c) Entretien par cartes

Initialement proposée par Valette-Florence et Rapacchi (1991b), cette méthode consiste à générer dans un premier temps, par le biais d'un ou deux entretiens 8 de groupe, si possible de manière exhaustive, l'ensemble des attri-

buts, conséquences et valeurs qui sont supposés décrire les chaînages cognitifs

8. Ou éventuellement quelques entretiens individuels.

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1 02 Pierre Valette-Florence

relatifs à la consommation d'un produit donné. Pour chacun des niveaux (attri- buts / conséquences / valeurs), des cartes vierges sont aussi laissées à la discré- tion des personnes interrogées de manière à ce que celles-ci puissent mentionner des éléments qui n'auraient pas été préalablement générés par l'entretien quali- tatif. Notons que, dans la pratique, cet usage des cartes vierges n'apparaît que très rarement, gage que les entretiens préliminaires semblent performants pour générer l'ensemble des éléments d'un univers de consommation à l'étude

Concrètement, on demande aux personnes interrogées de commencer par l'ensemble des cartes concernant les attributs et ensuite de répertorier ces attri- buts en deux ou trois paquets. Le premier concerne les attributs jugés peu impor- tants, le deuxième ceux qui sont jugés moyennement importants, et enfin le der- nier paquet concerne les attributs qui sont jugés les plus importants dans l'acte d'achat. On demande alors à l'individu de sélectionner dans le paquet des attri- buts importants celui qui paraît primordial. Cet attribut est placé devant lui et sert donc d'ancrage. On répète ensuite le processus pour les conséquences en demandant, par rapport au tas des conséquences jugées les plus importantes, de sélectionner celles qui sont directement liées à l'attribut sélectionné. Le proces- sus est répété de la même manière jusqu'au niveau des valeurs. Remarquons que cette possibilité offre l'avantage de pouvoir générer une nouvelle chaîne com- mençant par le même attribut si la personne en fait la demande expresse. De même des conséquences ou des valeurs qui ont déjà été évoquées dans la premiè- re chaîne peuvent être également réintégrées dans la deuxième chaîne. Ce mode de collecte diffère donc légèrement de l'approche initiale, telle qu'elle a été pro- posée par Reynolds et Gutman, qui conduit à l'obtention de chaînes dissem- blables entre elles, puisque les éléments sont en général différents (l'attribut ini- tial, en particulier, n'étant jamais le même).

Cette méthodologie de collecte d'information permet en pratique à l'indi- vidu de générer de la manière la plus libre qui soit les chaînes qui sont censées caractériser son acte d'achat. Elle offre également l'avantage d'avoir une vision

globale de l'ensemble des chaînes qui sont évoquées et de pouvoir coder directe- ment les chaînes, en répertoriant les numéros correspondant aux différents élé- ments présents sur les cartes. Notons peut-être un inconvénient lié au fait que certaines personnes s'impliquent trop (elles jouent en quelque sorte avec les

cartes), ce qui pourrait conduire à générer un nombre trop important de chaînes. On a en effet observé que, dans les méthodes traditionnelles, la moyen- ne des chaînes évoquées est de l'ordre de trois, alors que, avec la méthode des cartes, elle peut monter dans certains cas jusqu'à huit (Roehrich et Valette-Flo- rence, 1992). Néanmoins, une fois que les chaînes sont évoquées, il est toujours possible de demander aux gens non seulement de noter l'importance, mais aussi

quelle est la cohérence des chaînes qu'ils viennent d'évoquer. Cette précaution méthodologique permet alors de réduire le nombre de chaînes véritablement uti- lisables. Enfin, dans certains cas, la méthodologie, puisqu'elle visualise directe- ment les chaînes, permet de noter la force des liens qui existent entre chacun des éléments qui ont été émis.

Le tableau 2 synthétise les caractéristiques principales des trois modes de collecte qui viennent d'être évoqués. Il en souligne également les avantages et inconvénients respectifs. En résumé, il convient de retenir que, quelle que soit la

méthode, le mode de collecte de données demeure avant tout qualitatif, ce qui

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Introduction à l'analyse des chaînages œgnitifs 1 03

laisse les gens s'exprimer librement sur les chaînes qu'ils évoquent. En outre, la méthode de collecte par les cartes, de par sa souplesse d'utilisation et sa facilité de codification, semble préférable, compte tenu du fait qu'une étude récente (Aurifeille et Valette-Florence, 1992c) a également montré qu'il y avait une très faible relation entre l'implication personnelle et la complexité des chaînes évo-

quées. A cet égard, les mises en garde de Grunert et Grunert (1991) qui considè- rent qu'un fort niveau d'implication peut nuire de manière artificielle au nombre des chaînes évoquées, ne paraissent pas, pour l'instant, justifiées.

Après cette présentation des différents modes de collecte, il convient main- tenant d'aborder le mode de traitement des données.

Tableau 2. - Présentation des différents modes de collecte de l'information

i "sag" i *-- ■- «- • Entretien indivi- • Caractère objectif de • Lourdeur de la collecte duel semi-directif l'information recueillie. (temps et coûts) . classique.

Méthode • Retranscription du originelle • Variété et richesse discours.

d'information. • Difficulté du codage. • Hétérogénéité du codage

• Enquête par ques- • Se prête à une enquête • Lourdeur du post- tionnaire : questions auto-administrée ou par codage.

Méthode des ouvertes, post-codées. voie postale. protocoles • Hétérogénéité du

écrits • Taille élevée de codage. l'échantillon.

• Nombre de chaînes limité. • Nombre d'éléments par chaînes limité.

• Entretien indivi- • Très grande facilité de • Entretiens prélimi- duel semi-directif au recueil de l'information naires (de groupe) pour moyen de cartes (pré-codage des cartes) . générer les cartes, (attributs/consé- quences/valeurs) pré- • Possibilité de noter la • Artefact possible lié au codées. cohérence et l'impor- mode de collecte : genèse

Entretien • Libre manipulation tance des chaînes artificielle ou trop par cartes des cartes pour effec- évoquées. importance de chaînes,

tuer les choix. • Rapidité de l'enquête • Caractère objectif de la collecte (l'enquêteur n'intervient pas).

• Processus impliquant pour le répondant : il participe activement

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1 04 Pierre Valette-Florence

III. ANALYSE ET TRAITEMENT DES DONNÉES

D'un point de vue historique, divers modes d'investigation ont été récem- ment proposés dans la littérature et sont amplement décrits dans les articles cor- respondants. C'est pourquoi nous renvoyons les personnes intéressées à leur lec- ture. Nous nous contenterons ici de présenter les caractéristiques principales de ces méthodes. Chronologiquement, on peut donc répertorier trois types d'ana- lyses :

• la première consiste à dresser une carte agrégée de l'ensemble des relations (attributs - » conséquences - » valeurs), collectées auprès des individus, qui donne donc les chaînages cognitifs résultants. La méthodologie correspondante est basée sur la théorie des graphes, les articles de référence étant ceux de Gutman et Rey- nolds (1988), Valette-Florence et Rapacchi (1991a) en langue anglaise, et celui de Valette-Florence et Rapacchi (1990) en français ;

• compte tenu d'un certain nombre de critiques qui ont été rapidement formulées, les chaînages résultants, notamment, pouvant simplement provenir d'un artefact méthodologique lié à leur constitution, une deuxième voie a été proposée principalement par Aurifeille et Valette-Florence (1992a). Elle consiste à proposer plutôt une typologie contrainte des chaînes solutions qui tient compte à la fois de leur cohérence sémantique et du nombre de personnes qu'on peut y rattacher ;

• enfin, une dernière voie d'investigation a été récemment proposée par Valette-Florence et alii (1993a). Elle a pour objet de proposer des chaînages latents, non directement observables, qui s'inscrivent en fait dans une méthodologie d'équations structurelles permettant de respecter la nature théorique causale du

phénomène observé (c'est-à-dire les liens valeurs - > conséquences - > attributs, au lieu de la séquence attributs - » conséquences - > valeurs, liée à la procédure de collecte de l'information) .

3.1. Méthode basée sur la construction des cartes hiérarchiques

Les cartes hiérarchiques sont en fait des représentations agrégées de l'ensemble des chaînes qui ont été évoquées par les répondants. Elles corres-

pondent donc aux chaînes qui ont été le plus souvent évoquées par les individus. Elles tirent leur appellation du fait que les éléments sont ordonnés hiérarchi-

quement en partant des éléments les plus concrets, les attributs en bas de la

représentation, aux éléments les plus abstraits, les valeurs terminales tout en haut. Une application manageriale immédiate consiste à utiliser ces chaînes résul- tantes comme support de communication ou comme stratégie de positionnement pour les produits correspondants. Nous attirons cependant l'attention du lecteur sur les problèmes inhérents liés à cette méthode, qui consiste en l'agrégation par- fois artificielle de chaînes qui n'ont pas véritablement été évoquées par les répon- dants. C'est la raison pour laquelle, il est recommandé dans ce type d'analyses (Roehrich et Valette-Florence, 1991, 1992) :

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Introduction à l'analyse des chaînages cognitifs 1 05

• tout d'abord de tenir compte des relations indirectes qui permettent d'apprécier la qualité des analyses entreprises,

• ensuite, d'effectuer si possible une typologie préalable des répondants afin d'avoir, par segments, une meilleure cohérence des chaînes obtenues,

• enfin, de vérifier, grâce à des indicateurs de cohérence sémantique, la pertinence des chaînes obtenues ; ce processus permet en outre d'éliminer les chaînes qui ne seraient pas satisfaisantes de ce point de vue-là.

Bien que des améliorations aient été proposées (Aurifeille, 1991), il semble

que l'utilisation d'une telle démarche ne soit pas véritablement recommandée, à moins d'une forte expertise dans le domaine, ceci afin d'éviter de proposer des solutions qui n'aient pas de sens d'un point de vue sémantique. On notera

cependant que l'avantage indéniable des cartes hiérarchique est d'avoir une pré- sentation (sous forme de carte) très agréable des résultats.

3.2. Méthode des chaînes virtuelles

La méthode qui consiste à réaliser une typologie contrainte des chaînes permet de pallier les inconvénients mentionnés précédemment. Sans entrer dans les détails techniques, la méthodologie consiste à proposer par le biais d'une analyse multi-dimensionnelle, de trouver des chaînes solutions qui synthétisent au mieux, dans l'espace sémantique correspondant, les diverses chaînes individuelles qui ont été proposées par les individus. Les solutions proposées correspondent à des chaînes virtuelles, en ce sens qu'elles peuvent avoir été réellement évoquées ou non par les individus. L'intérêt de cette méthode est double puisqu'il permet pour chaque chaîne solution :

• de proposer un indicateur de cohérence sémantique, mais aussi • de déterminer quel est le nombre de personnes à y rattacher. Il est évident que cette méthodologie convient tout à fait à une optique de

segmentation et, par voie de conséquence, à toutes les applications correspon- dantes en termes de stratégie de communication et de positionnement.

3.3. Analyse causale et détermination des chaînages latents

La méthode des chaînage latents a pour ambition de resituer l'analyse des

chaînages cognitifs dans le cadre habituel de la théorie du comportement du consommateur : valeurs - > conséquences - > attributs, séquence qui est en fait inver- sée par rapport au mode de collecte qui a été présenté. Cette perspective métho- dologique nouvelle, qui repose sur une généralisation de l'analyse canonique appliquée à des variables catégorielles, offre le quadruple avantage :

• de repérer les associations au niveau latent qui définissent la consom- mation d'un produit,

• de déterminer, pour une consommation donnée, quels sont les différents niveaux (attributs / conséquences / valeurs) qui sont déterminants dans l'acte d'achat,

• de visualiser sous forme graphique l'univers psycho-sociologique lié à la consommation d'un produit ou d'une classe de produits,

• d'effectuer, grâce au calcul des scores factoriels latents, une segmentation des différentes chaînes qui ont été proposées.

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1 06 Pierre Valette-Florence

IV. ILLUSTRATION DES TROIS MÉTHODES PRÉCÉDENTES

Afin d'apporter un éclairage plus concret sur les trois optiques méthodolo-

giques qui viennent d'être présentées, nous avons utilisé la même base de don- nées que Aurifeille et Valette-Florence (1992b) et Valette-Florence et alii (1993a). Avant d'en illustrer les résultats principaux, nous justifierons au préalable le choix du produit et soulignerons les caractéristiques principales de l'échantillon utilisé.

4.1. Choix du produit

Le choix des cigarettes semble tout à fait correspondre à une procédure basée sur l'étude des chaînes moyens-fins. Comme l'a remarqué Moschis (1989), la consommation de cigarettes induit des conséquences sociales individuelles

importantes. De fortes relations entre le fait de fumer et le concept de soi ont été mises en évidence par plusieurs chercheurs (Chassin et alii, 1981 ; Sheth, New- man et Gross, 1991). En outre, la cigarette a souvent été associée avec le choix de

marques (Chapman et Fitzgerald, 1982) et des conséquences comportementales importantes (Grube et al., 1984). Enfin, on remarquera que les gens qui fument ont souvent pour coutume de s'interroger sur la signification de leur acte, comme par exemple : « Est-ce queje peux m 'arrêter de fumer quand je veux ? Est-ce que ça m'aide à être plus confiant ? Est-ce que ça gêne les autres ? Est-ce que le fait de fumer est dangereux pour ma santé ? Est-ce que les cigarettes légères sont réellement moins nod- ves ? » etc. Une telle remarque limite donc le fait que les processus cognitifs mis en jeu soient artificiellement amplifiés par la méthode de collecte (Grunert et Grunert, 1991). Cette classe de produit correspond en outre à un univers très concurrentiel et hétérogène où sont présentes des marques dominantes (e.g Mal- boro) mais aussi des marques moins connues optant pour des positionnements spécifiques (e.g Chesterfield), autant de raisons conduisant à penser que diffé- rents chaînages cognitifs conditionnent en amont une consommation aussi riche et variée.

4.2. L'échantillon

Les sujets étaient 63 étudiants sélectionnés d'après un échantillon de conve- nance. Chacun était volontaire pour passer à peu près une heure d'entretien individuel. Le protocole d'interview détaillé par Reynolds et Gutman (1988) a été

soigneusement suivi. La liste des items obtenus est présentée dans la table 1. Au total, 138 chaînages ont été collectés, ce qui correspond à une moyenne de 2,12 échelles par personne (chiffre également consistant avec celui de Reynolds et

Gutman). En outre, notons que la collecte a aussi mesuré la quantité de ciga- rettes fumées par jour, ainsi que la marque préférée, en premier et deuxième choix, parmi une liste totale de 14 marques de cigarettes. Enfin, les répondants

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Introduction à l'analyse des chaînages cognitifs 1 07

avaient à noter une version étendue de l'échelle de Kahle dans le cadre d'une recherche spécifique qui ne sera pas développée ici. Soulignons aussi que, pour des raisons pratiques, seules les premières chaînes évoquées par les répondants seront utilisées (donc 63 chaînes au total) bien que les trois méthodes peuvent analyser sans aucun problème plus d'une chaîne par individu.

4.3. Résultats commentés

Chaque méthode sera successivement abordée sous l'angle de ses avantages et inconvénients respectifs. Les améliorations lors du passage d'une technique à une autre seront également soulignées.

a) Construction des cartes hiérarchiques

La figure 1 donne la représentation correspondante, basée sur le nombre de relations directes et indirectes pour tenir compte de la cohérence des chaînes résultantes et, par voie de conséquence, éliminer les chaînes provenant d'un arte- fact lié à la construction. Un tel processus conduit ici à une chaîne unique pour les attributs et les conséquences (faible teneur en nicotine - > santé - > confiance en soi -> identité) , ayant plusieurs ramifications possibles après la valeur instrumentales ouverture d'esprit

Les attributs et conséquences évoqués ici, en quelque sorte dénominateur commun du groupe pris dans son ensemble, correspondent aux éléments moteurs à mettre en jeu dans une stratégie de communication ou de positionne- ment visant l'ensemble de la population concernée. Seules quelques déclinaisons

plus spécifiques, en fonction des objectifs recherchés, peuvent être envisagées en déclinant des valeurs terminales particulières (la sagesse, le sentiment d'appartenance ou des relations chaleureuses avec les autres).

En l'état, cette démarche, si elle fournit une représentation globale des sen- sibilités dominantes caractérisant une consommation donnée, ne permet ni de

segmenter la population, ni de rattacher les individus à des chaînes spécifiques. Tels sont, entre autres, les deux apports de la méthode des chaînage virtuels.

b) Méthode des chaînage virtuels

Comme nous venons de le souligner, le principal intérêt de cette démarche est de proposer une typologie des chaînages, chaque chaîne solution étant carac- térisée par un indicateur de cohérence et le nombre de personnes qui y sont rat- tachées. La table 3 présente les résultats correspondants :

• cinq chaînes solutions sont identifiées, correspondant ainsi à cinq seg- ments présentant, à l'égard de la consommation de cigarettes, des sensibilités dif- férentes. Dans le tableau correspondant, les trois premières chaînes n'ont que trois éléments (attributs -> conséquences - > valeurs terminales) alors que les deux dernières chaînes en incorporent quatre avec l'inclusion des valeurs instru- mentales ;

• les indicateurs présentés permettent en outre de discerner l'importance à accorder à chaque chaîne. Par exemple, la chaîne faible teneur en nicotine -» santé

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1 08 Pierre Valette-Florence

Relations o . . . chaleureuses

les autres g^SSL upyuniau*uM> o . . .

^^^ avec les autres upyuniau*uM>

^ns^ |t7) ^(7) (7)

^^jr Contrôle de soi

Ouverture d'esprit

I (6) Identité

T (5)

Confiance en soi

f <9> Santé

i ** I (11)

Faible teneur en nicotine

" Correspond au nombre de reiauons «directes + indirectes). " * Les flèches en gras correspondent a une bonne coherence par rapport à l'attribut initiai. *•* Les flèches en caractere normai correspondent à une cohérence plus faible par rapport à

l'attribut initial.

Vota : Une relation fait preuve d une bonne coherence lorsque plus de la moitié des relations partant de l'attribut initial i faible teneur en nicotine) arrivent indirectement au nœud considere u.e : consequences intermédiaires ou valeurs terminales) (Roe h neh et Valette-Florence. 1992b).

Figure 1. - Chaînages cognitifs

-> être respecté correspond à 35% des répondants (22/63), alors que les chaînes

aspect naturel -» stimulation -¥ être heureux d'une part, et goût fort -» confiance en soi -» intellectuel-* auto-accomplissement d'autre part en représentent seulement chacu- ne 14% (9/63). Par ailleurs, l'indicateur de cohérence 9 permet d'apprécier la

qualité de représentation fournie par les chaînes solutions. Ainsi, la chaîne peu de

goudron - > confiance en soi -¥ relations chaleureuses est la plus cohérente (indice 1.1). Ceci nous indique qu'une communication articulée sur les éléments de cette

9. Plus l'indice correspondant est faible, meilleure est la cohérence. Cet indicateur correspond en fait, dans l'es-

pace multidimensionnel, à une mesure de la proximité de tous les éléments d'une chaîne. Plus les éléments sont

proches, plus l'indicateur est faible, et inversement

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Introduction à l'analyse des chaînages cognitifs 1 09

Tableau 3. - Chaînes virtuelles (Aurifeille et Valette-Florence, 1992b)

Chaînes solutions Cohérence* Nombre**

peu de goudron - » confiance en soi - » relations chaleureuses 1.100 12

aspect naturel - > stimulation - > être heureux 1.173 9 faible teneur en nicotine - » santé - » être respecté 1.182 22

aspect naturel - > identité - ¥ indépendant - > auto-accomplissement 1.191 1 1

goût fort - » confiance en soi - » intellectuel -» auto-accomplissement 1.280 9

* Les chaînes sont classées par ordre de cohérence décroissante. ** Le nombre correspond aux individus rattachés à chaque chaîne solution.

chaîne serait sans doute plus efficace que celle reposant sur les éléments d'une chaîne ayant un moins bon indice.

On perçoit dès lors l'intérêt de cette approche pour segmenter une popu- lation donnée en fonction des chaînes évoquées. Deux légères critiques peuvent néanmoins être soulevées :

• tout d'abord, l'indicateur de cohérence n'a de sens qu'en valeur relative (en comparant les chaînes solutions entre elles) . Il ne permet pas d'indiquer à partir de quel seuil une chaîne ne serait plus sémantiquement cohérente ;

• ensuite, les chaînes solutions, dans les faits, ne correspondent pas à des chaînes qui ont été véritablement évoquées par les répondants, d'où leur appel- lation de virtuelles. Correspondent-elles alors à une « réalité » chez les répon- dants dans leurs pratiques de consommation ?

Par ailleurs, cette méthodologie, comme la précédente, ne permet pas de discerner parmi les différents éléments (attributs / conséquences / valeurs) les- quels ont le plus d'impact sur une consommation donnée. C'est précisément l'un des apports de la méthode suivante.

c) Détermination des chaînages latents

Cette approche considère plutôt que le phénomène est mieux appréhendé au travers de ses composantes sousjacentes (non directement observables), de manière analogue au traitement factoriel des échelles d'attitude par exemple. La table 4 présente les normes catégorielles 10 obtenues pour les deux premières dimensions, et pour chacun des concepts latents qui a été modélisé (attributs / conséquences / valeurs intrumen taies / valeurs terminales). En pratique, chaque dimension s'apprécie de manière duale (comme en analyse des correspondances) par opposition entre les éléments ayant une norme positive aux éléments ayant une norme négative. Les associations correspondantes qui apparaissent sont présentées au bas de la table 3 et permettent de mieux cerner quels sont les éléments qui sont en relation. Comme dans les exemples précédents, les chaînes ainsi formées peuvent être utilisées dans le cadre de la définition de stratégies de positionne- ment ou de communication. L'analyse, s'effectuant dans le cadre de l'application

10. On parle ici de normes catégorielles car les variables de mesures sont ici dichotomiques (un élément a été évoqué ou non par un répondant).

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110 Pierre Valette-Florence

Tableau 4. - Chaínes latentes obtenues pour la consommation de cigarettes (PLS)

(Valette-Florence et alii, 1993a)

Items Dimension 1 Dimension 2

VT1 une vie excitante -0,222 1,185 £ VT2 être heureux 0,019 0,559

| "g VT3 l'auto-accomplissement -1,344 0,934 Ä I VT4 l'appartenance 1,038 0,297 > g VT5 être respecté 0,391 -0,638 w VT6 la sagesse -0,519 -2,000

VT7 des relations chaleureuses avec les autres 1,064 0,757

Vil ouverture d'esprit 1,436 -0,792 jg VE gai, enjoué 0,700 0,370

e S VIS indépendant -0,525 0,162 g g VI4 dynamique 0,337 0,965 5 ^ S VI5 intellectuel -0,6*90 0,431 ^ I VI6 capable -0,080 0,105

•S VI7 contrôle de soi -0,559 -1,616

Cl aspect physique 0,317 -0,021 0 C2 santé 1,119 -1,037 £ C3 stimulation -0,613 1,028 gn C4 prestige, charme 0,408 -0,043 N& C5 confiance en soi 0,354 0,632 o C6 identité -0,959 -1,060 ° C7 communication 0,230 0,446

Al faible teneur en nicotine 1,646 -0,213 A2 goût fort -0,432 1,477

§ A3 peu de goudron 0,512 0,055 M A4 prix modéré -0,236 0,254 S A5 tabac léger -0,307 -1,696 ^ A6 aspect naturel (peu de traitements concer- -1,128 0,055

nant le goût et la composition)

• Les normes positives définissent les chaînes latentes (en gras dans le tableau) suivantes :

Dimension 1 : Relations chaleureuses ^ ouverture v avec les autres

^ d'esprit ^Sv^

préservation faible teneur j^ de la santé en nicotine

Sens de ^

l'appartenance ► être gai

Dimension 2: Vie excitante ► dynamisme ► stimulation ► goût fort

• Les normes négatives définissent les chaînes latentes (en italique dans le tableau) suivantes :

Dimension 1 : Auto- accomplissement

- ► intellectuel ► sentiment et d'identité- ► aspect naturel

Dimension 2: ^r préservation ̂ ^ ̂̂ Sagesse ^ contrôle de soi de la santé ^^ ̂̂ tabac léger

sentiment d'identié '

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Introduction à l'analyse des chaînages cognitifs 1 1 1

de PLS à des variables catégorielles, offre en outre, par rapport aux méthodes précédentes, les avantages suivants :

• tout d'abord, elle permet de trouver quels sont les éléments ayant le plus d'incidence sur l'univers de consommation (Le : le choix des marques), en l'occurence, ici, les conséquences, et à un degré moindre les attributs et les valeurs terminales ;

• elle offre, ensuite, la possibilité d'effectuer, grâce aux calculs des scores latents, une typologie très simple des chaînes, puisqu'avec cette méthodologie chaque chaîne évoquée par un répondant n'est plus représentée que par une coordonnée unique dans les dimensions latentes retenues ;

• enfin, elle fournit surtout, dans le cadre d'une consommation spécifique, une représentation graphique de l'ensemble des éléments évoqués (attributs / conséquences / valeurs) en assodation avec les marques achetées. La figure 2 pré- sente la carte cognitive correspondante sur le marché des cigarettes, offrant alors la

possibilité pour une marque donnée de choisir les associations les plus perti- nentes. A titre d'illustration, Malboro serait ainsi reliée au dynamisme, à la confian- ce en soi, au fait d'être gai et enjoué et à la recherche de relations chaleureuses avec les autres.

Le principal inconvénient de cette dernière approche réside dans la relative

complexité de sa mise en œuvre. En effet, un degré certain d'expertise est néces- saire avant de pouvoir appliquer correctement un modèle PLS à des données

catégorielles. Cette difficulté est donc le prix à payer pour accéder à des analyses, certes plus complexes, mais aussi plus riches d'enseignements, tant pour le cher- cheur que pour le praticien.

A titre de synthèse, le tableau 5 présente les avantages et inconvénients res-

pectifs des trois méthodes précédentes, telles qu'elles ont été illustrées au travers de l'exemple retenu. Il nous semble que la demarche la plus pertinente consiste à analyser les chaînages cognitifs en relation avec une consommation bien préci- se, la pratique montrant que les marques en présence sur un marché se différen- cient fortement par rapport aux chaînes évoquées (cf figure 2). Dans cette

optique, l'analyse selon les chaînages latents nous semble à l'heure actuelle la

plus pertinente, bien que d'autres améliorations d'ordre méthodologique soient encore possibles (e.g : réseaux neuronaux ou classes latentes).

CONCLUSION

Cet article a essayé de présenter dans les grandes lignes les points princi- paux relatifs à l'analyse des chaînages cognitifs. Nous voudrions simplement sou-

ligner, en conclusion, quelles sont les principales interrogations qui subsistent et, par voie de conséquence, les pistes de recherche qui y correspondent.

Au préalable, on peut s'interroger sur l'apport véritable de cette méthode, par rapport aux démarches qualitatives usuelles. Son intérêt est en fait triple :

• tout d'abord, elle permet de mieux structurer l'analyse de contenu

puisque l'on effectue une recherche explicite des attributs, conséquences et

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1 1 2 Pierre Valette-Florence

1 -2 U

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2 *

valeurs évoquées par les répondants, conférant de ce fait à l'analyse un caractère plus opérationnel ;

• ensuite, elle peut s'effectuer en complément d'enquêtes habituelles, comme par exemple la recherche des freins et motivations. En ce sens, elle four- nit un complément d'information et non un substitut aux méthodes existantes ;

• enfin, elle offre un gain de temps appréciable (et donc de coût) lorsque la collecte est réalisée au moyen des cartes que nous avons présentées plus haut.

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Introduction à l'analyse des chaînages cognitifs 1 1 3

Tableau 5. - Synthèse des trois principaux modes d'analyse des données

Avantages Inconvénients

Cartes • Représentation graphique • Artefact lié à la construction hiérarchiques plane et agrégée de l'en- du graphe - » tenir compte

semble des chaînes évo- des relations indirectes. quées par les répondants. • Hétérogénéité des chaînes

• Met à jour les sensibilités évoquées - » effectuer au dominantes dans un groupe préalable une typologie, pris dans sa globalité. • Ne permet pas de classer les

chaînes par ordre d'impo- tance ou de cohérence.

• Ne fournit pas directement une carte en relation avec une consommation spéci- fique.

Chaînes • Fournit une typologie des • L'indicateur de cohérence virtuelles chaînes dans une popula- n'a pas de seuil pré-détermi-

tion donnée. né. • Segmente les individus en • Les chaînes, en général, ne

les affectant aux chaînes correspondent pas à des solutions. chaînes véritablement évo-

• Hiérarchise les chaînes en quées par les répondants, fonction de leur cohérence • Relative complexité des sémantique. enchaînements statistiques.

• Ne rattache pas directement les chaînes solutions à une consommation donnée.

Chaînages • Resitue l'analyse dans le • Difficulté d'accès à la métho- latents cadre théorique V -» C -» dologie.

A. • Savoir maîtriser l'usage de • Analyse explicitement les PLS appliqué à des variables

données dans le cadre de la catégorielles, consommation à l'étude.

• Repère et hiérarchise, au niveau latent, les chaînes qui régissent la consomma- tion d'unproduit.

• Détermine quel niveau (A, C ou V) a le plus d'inciden- ce sur la consommation.

•Visualise sous forme de cartes cognitives l'univers psychosociologique lié à la consommation d'un pro- duit ou d'une classe de pro- duits.

• Peut effectuer une typologie des chaînes proposées grâce au calcul des scores facto- riels latents.

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1 1 4 Pierre Valette-Florence

Comme toutes les approches qualitatives, la méthode des chaînages cogni- tifs souffre d'une lourdeur de la collecte d'information sur le terrain relativement importante. Elle nécessite aussi, nous l'avons vu, l'usage de techniques d'analyses plus ou moins sophistiquées. En contrepartie, l'homme de marketing dispose d'un outil performant et novateur pour l'étude des pratiques de consommation et surtout des mobiles sousj'acents qui les conditionnent.

En définitive, les interrogations actuelles concernent surtout le choix de la meilleure méthode de segmentation (des chaînes) possible et l'appréciation de la qualité prédictive de l'approche selon les chaînages cognitifs lorsqu'on la com- pare à des méthodes plus traditionnelles :

• Concernant le choix de la meilleure méthode de segmentation des chaînes, des travaux actuels basés sur des comparaisons entre les outils tentent d'apporter des éléments de réponse (Aurifeille, 1993). Il semble en fait que la meilleure méthode consiste non pas à traiter les chaînes évoquées par les indivi- dus de manière séquentielle, mais à les appréhender dans leur totalité, ce qui correspond en quelque sorte à une grappe cognitive. Une grappe cognitive peut être définie comme l' arborescence résultant de l'ensemble des éléments qui ont été évoqués par le consommateur (c'est-à-dire plusieurs chaînes). En les considérant dans leur totalité, on obtient en fait une chaîne globale, au lieu d'avoir plusieurs chaînes par individu, comme dans la démarche traditionnelle. Bien évidemment, des études complémentaires seront nécessaires afin de valider la qualité prédicti- ve de cette approche par rapport aux méthodes traditionnelles qui ont été propo- sées jusqu'à présent. A cet égard, il serait d'ailleurs intéressant de comparer la qualité prédictive des grappes cognitives avec celle d'une démarche intermédiai- re n, rendue possible par l'utilisation de cartes, comme nous l'avons déjà plu- sieurs fois souligné.

• Pour ce qui concerne la qualité prédictive de l'analyse selon les chaînages cognitifs, des travaux récents tentent d'apporter là aussi des éléments de réponse. Par exemple, dans une étude sur le tabac, il semble que l'on puisse conclure à la supériorité des chaînes moyens-fins comparée à une approche plus classique reposant sur la notation des valeurs de Kahle pour prédire la marque de ciga- rettes achetée (Aurifeille et Valette-Florence, 1992b). Une autre étude (Valette- Florence et alii, 1993a) montre également l'intérêt des chaînages latents pour bien cerner Y univers de consommation des marques (les cigarettes) puisque, suivant les dimensions mises en évidence, celui-ci peut être prédit jusqu'à hauteur de 43,3%. Mais comme il s'agit pour l'instant d'études exploratoires basées sur les mêmes données, il est évident que des études ultérieures de plus grande envergu- re devront être entreprises pour valider le bien-fondé de ces différentes approches.

Quoi qu'il en soit, la démarche selon les chaînages virtuels ou les chaînages latents a déjà montré tout l'intérêt de l'analyse des chaînages cognitifs pour mieux cerner l'univers de consommation et, par voie de conséquence, être à même de proposer des stratégies de positionnement et de communication appro- priées. En outre, nombre de recherches supplémentaires sont nécessaires pour faire les liens entre l'analyse des chaînages cognitifs et divers concepts importants

11. Les différentes chaînes évoquées par un même individu pouvant partager en commun plusieurs éléments (attributs/conséquences/valeurs) .

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Introduction à l'analyse des chaînages cognitifs 1 1 5

en comportement du consommateur comme l'implication ou le besoin de stimu- lation (Valette-Florence et alii, 1993b).

Nous espérons que cet article aura réussi à sensibiliser la communauté aca- démique et professionnelle à l'intérêt de l'analyse selon les chaînages cognitifs. Nous souhaitons aussi qu'il facilitera l'enseignement de cette nouvelle approche et suscitera auprès des chercheurs une nouvelle passion et, par voie de consé- quence, de nouvelles voies d'investigation...

GLOSSAIRE

Cartes cognitives Dans le cadre de la méthodologie des chaînages latents, ces représentations graphiques visualisent la nature des associations existant entre le choix des marques et les valeurs, conséquences ou attributs auxquelles elles sont reliées.

Cartes hiérarchiques Représentation graphique plane représentant, à un niveau agrégé, l'ensemble des chaînes moyens-fins évoquées par les répondants.

Chaînages cognitifs Ils représentent à un niveau agrégé, soit sous forme de cartes hiérarchiques, soit au moyen de chaînes virtuelles, la résultante de l'ensemble des chaînes individuelles évoquées par tous les répondants. Ils permettent ainsi de synthé- tiser la nature des structures cognitives qui régissent un marché donné.

Chaînages latents Ils correspondent à un niveau latent, non directement observable, à la natu- re des associations cognitives (valeurs - > conséquences - » attributs) qui conditionnent une consommation donnée.

Chaînes moyens-fins individuelles Elles représentent, au niveau individuel, les associations qui sont émises par un répondant entre les attributs, conséquences et valeurs recherchées dans son acte de consommation. Notons qu'un individu peut évoquer plusieurs chaînes individuelles, mais qu'une chaîne ne contient pas forcément les trois niveaux (attributs / conséquences / valeurs) précédents.

Chaînes virtuelles Ce sont les chaînes solutions qui apparaissent dans la méthodologie optant pour une typologie contrainte des chaînes moyens-fins individuelles. Elles peuvent correspondre ou non à des chaînes individuelles véritablement évoquées par les répondants, d'où leur dénomination.

Entretiens par cartes Méthode de collecte de l'information conduisant les répondants à sélection- ner eux-mêmes les éléments constitutifs de leurs chaînes (attributs / consé- quences / valeurs) au moyen de cartes pré-codées.

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1 1 6 Pierre Valette-Florence

Grappe cognitive Elle peut être définie comme l'arborescence, au niveau individuel, de l'ensemble des éléments qui ont été évoqués par le consommateur. En les considérant dans leur totalité, on obtient en fait une chaîne globale, au lieu d'avoir plusieurs chaînes par individu.

PLS Modèle d'équations structurelles selon les moindres carrés partiels (Partial Least Squares : PLS) permettant d'effectuer une généralisation de l'analyse canonique sur variables catégorielles dans le cadre de la détermination des chaînages latents. Cette méthode seule permet d'envisager les séquences cau- sales : valeurs - > conséquences - » attributs.

Protocoles écrits Méthode ayant pour objet, en auto-administré, de collecter l'information au moyen de questionnaires écrits, utilisant des questions ouvertes pour collec- ter l'information suivant les trois niveaux attributs / conséquences / valeurs.

Typologie contrainte Méthode d'analyse ayant pour objet de segmenter l'ensemble des chaînes moyens-fins émises par les répondants en affectant chaque individu à une chaîne solution, appréciée en fonction de sa cohérence sémantique.

N.B. : Les termes en italique dans le texte renvoient à d'autres définitions dans le glossaire.

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